Correspondance de Napoléon – Mars 1801

Paris, 10 mars 1801

Au citoyen Forfait

Il est nécessaire, Citoyen Ministre, que vous adressiez la circulaire ci-jointe dans les différents ports de la Méditerranée :

« Le ministre de la marine au préfet maritime de…..

La défense qui a été faite aux armateurs français de courir sus aux bâtiments d’Alger, de Tunis et de Tripoli, doit toujours être observée. D’un autre côté, les bâtiments français doivent être rassurés contre les barbaresques. »

 

Paris, 10 mars 1801

Au citoyen Gaudin, ministre des finances

Le Premier Consul a remarqué, Citoyen Ministre, dans l’état que vous venez de lui remettre sur la dette publique :

1° Que la dette perpétuelle pour le 2e semestre de l’an VII a été de 18,900,000 francs, ce qui supposerait qu’au mois de germinal an VII le tiers consolidé s’élevait à 37,800,000 francs;

2° Que la dette viagère pour le même semestre a été de 10,687,000 francs, ce qui supposerait qu’au mois de germinal an VII la dette viagère s’élevait à 21,374,000 francs.

Le Premier Consul désire, Citoyen Ministre, que vous lui donniez les renseignements propres à faire apprécier les résultats de ces données et à prouver qu’ils ne sont pas au-dessus du montant véritable de la dette consolidée et viagère.

 

Paris, 10 mars 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

La maison Chapeaurouge de Hambourg, Citoyen Ministre, nous doit quatre millions.

Ces quatre millions ont été volés par cette maison à la République avec une infâme impudence; le rapport ci-joint du ministre des Finances, l’arrêté de la comptabilité intermédiaire, la lettre même de M. Chapeaurouge, vous mettront au fait de cette affaire.

Je désire que vous expédiiez un courrier à Hambourg, en envoyant les pièces, avec une lettre aux magistrats de Hambourg , à peu près conçue en ces termes :

« La maison Chapeaurouge a volé à la République française quatre millions. Le Premier Consul me charge de vous expédier toutes les pièces de cette affaire. Il ne la regarde pas comme susceptible d’être décidée par les lenteurs ordinaires de la justice. C’est un faux matériel d’où il résulte quatre millions de perte pour la République. Il espère que les magistrats de Hambourg lui feront promptement rendre justice; il remet les pièces et la créance entre leurs mains, mais il veut deux millions dans le courant de germinal, et des obligations pour les deux autres dans le courant de fructidor.

Le courrier remettra directement ces dépêches aux magistrats de Hambourg, à quelque heure qu’il arrive de la nuit; il déclarera qu’il a ordre de séjourner soixante et douze heures à Hambourg, au bout duquel temps il reviendra.

Le citoyen Lavallette sera sans doute rendu à Hambourg. Vous lui enverrez une notice de cette affaire, pour qu’il la suive; mais vous lui déclarerez que je ne veux pas perdre un sou.

 

Paris, 12 mars 1801

Au citoyen Talleyrand

Voici comme je crois que vous pourriez répondre à M. de Kalitchef :

« Que, la note qu’il vous a remise relativement à Naples, ne contenant qu’une simple interrogation, il n’y avait pas nécessité qu’elle me fût mise sous les yeux; que même vous ne pensiez pas qu’il fût convenable de me la remettre; que vous pensiez qu’il la devait reprendre pour faire au protocole les mêmes questions, et dans les termes convenables, et qu’alors vous lui diriez :

Qu’un armistice entre l’armée française et l’armée napolitaine avait réglé que la paix avec Naples se traiterait en Italie;

Que l’impatience du roi de Naples de voir son sort promptement fixé avait rendu cette mesure indispensable, vu que le peuple de la ville de Naples commençait déjà à se mettre en fermentation;

Que, de notre côté, nous étions pressés de conclure quelque chose avec Naples, afin de pouvoir porter des secours à notre armée d’Orient, ce qui est aujourd’hui le principal mobile de notre conduite;

Que M. de Gallo s’était présenté à Paris avec des pouvoirs où il était question des plénipotentiaires anglais; que, cependant, s’il avait eu les instructions et pouvoirs nécessaires pour accorder ce que nous désirions, nous aurions traité avec lui; mais que, ce plénipotentiaire ayant des pouvoirs très-anciens et n’ayant aucune instruction pour les circonstances actuelles, nous avons dû regarder ses pouvoirs comme non avenus;

Que, du reste, notre traité avec Naples fût-il fait en Italie ou à Paris, il consiste toujours en fort peu d’articles, puisque la seule clause qu’on y ajoutait, c’était de donner passage à un corps de troupes françaises pour se rendre à Otrante, pour pouvoir s’y embarquer, et, en cas d’empêchement, y rester jusqu’à ce que l’expédition de sir Abercromby eût échoué, et sans cependant que ce séjour pût excéder une année;

Que S.M. le roi des Deux-Siciles s’était aperçue qu’elle n’avait dû la modération du Gouvernement français qu’à intervention de M. Levachef, ministre de Sa Majesté Impériale à Naples;

Que, du reste, la saison et les autres obstacles qui avaient retardé son arrivée de vingt jours avaient été une chose funeste, car je m’étais toujours flatté que le traité de Lunéville même serait conclu de concert avec lui;

Qu’aujourd’hui j’avais témoigné mon mécontentement de ce que trois jours avaient été perdus, parce que les événements se succèdent avec rapidité et qu’il est nécessaire qu’on travaille jour et nuit pour bien déterminer la part que veut prendre dans toutes ces affaires Sa Majesté Impériale et la marche quelle veut suivre;

Qu’il ne faut pas perdre une heure, et commencer et finir tout le travail en peu de jours.

 

Paris, 13 mars 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Ordre au général de brigade Houdetot de partir sur-le-champ pour Rochefort.

Même ordre à deux ou trois officiers qui puissent fixer l’attention du public sur un projet d’expédition dans l’Inde.

 

Paris, 15 mars 1801

Au citoyen Gaudin, ministre des finances

Je vous prie, Citoyen Ministre, de me faire remettre quatre états conformes aux quatre modèles ci-joints, et de m’envoyer, reliées ensemble, les lois relatives à la dette publique.

Je vous prie également de me faire connaître de quelle manière s’opère le remboursement des deux tiers mobilisés; combien il en a été mis en circulation jusqu’à ce jour; combien il y en a de retirés ; combien il en est dû pour la portion de la dette à rembourser.

Je désire que vous me fassiez remettre aussi quatre états qui me fassent connaître la portion à liquider de la dette exigible.

Le premier état, relatif aux 4 à 500 millions que le liquidateur général porte par approximation comme dette des émigrés; cet état aura autant de pages qu’il y a de départements ;

Le deuxième état, relatif à la dette intermédiaire; cet état sera divisé par année;

Le troisième état, relatif aux neuf départements de la Belgique; il sera divisé par nature de dettes ;

Le quatrième état comprendra les sommes présumées dues pour objets divers, en spécifiant ces objets.

 

Paris, 16 mars 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Il faudrait, Citoyen Ministre, que, dans le procès-verbal de l’échange des ratifications, ou immédiatement après, on fit une convention pour l’évacuation des pays occupés par les armées françaises.

1° L’évacuation ne sera censée commencée qu’à dater du à germinal.

2° L’Allemagne ne sera évacuée que quarante jours après.

3° Les Autrichiens n’occuperont aucun pays en deçà de l’Inn. Ils n’occuperont pas le Brisgau ni les autres petites portions de territoire qu’ils pourraient posséder en deçà de l’Inn.

4° Les armées autrichiennes et françaises rentreront sur le pied de paix, c’est-à-dire que les régiments seront réduits au nombre d’hommes existant en temps de paix.

5° Les équipages des vivres et de l’artillerie seront vendus.

6° Le plénipotentiaire français cherchera aussi à jeter les fondements d’un traité d’un nouveau genre, qui tendrait à régler le nombre d’hommes que pourraient avoir sur pied, en temps de paix, la France, la Prusse et l’Autriche, afin de soulager d’autant leurs finances.

 

Paris, 17 mars 1801

Au citoyen Talleyrand

Je désire, Citoyen Ministre, que vous écriviez une lettre à M. de Cavallos, ministre des affaires étrangères en Espagne, pour le prévenir de l’échange des ratifications, afin que le duc de Parme se mette en chemin pour prendre possession de la Toscane.

Cette lettre sera portée, ainsi que la copie du traité, par le citoyen Lebrun, mon aide de camp; vous chargerez notre ambassadeur à Madrid de le présenter à Leurs Majestés et au jeune duc de Parme.

 

Paris, 17 mars 1801

AU SÉNAT CONSERVATEUR

Sénateurs, le Premier Consul, en exécution de l’article 16 de la Constitution, vous présente, comme candidat à la place vacante au Sénat conservateur, le général Pérignon, qui a signé le traité d’alliance conclu, le 28 fructidor au IV, entre la France et l’Espagne.

 

Paris, 18 mars 1801

Au citoyen Chaptal, ministre de l’intérieur

Vous recevrez, Citoyen Ministre, l’acte du Gouvernement pour la proclamation de la paix; cette proclamation sera faite à Paris le 30 ventôse.

Vous réunirez chez vous les préfets d’administration et de police, le conseil de préfecture, le conseil général du département et les maires des douze municipalités.

Après avoir fait la proclamation, vous ordonnerez au préfet de police de la publier dans la commune de Paris; il sera accompagné des maires dans toute l’étendue de leur municipalité respective.

Vous donnerez des ordres dans les départements pour que la proclamation ait lieu le décadi qui suivra son arrivée.

Elle sera faite dans les chefs-lieux de département par le préfet, accompagné du maire et des commissaires de police;

Dans les chefs-lieux d’arrondissement, par le sous-préfet, accompagné du maire;

Dans les autres communes, par le maire.

 

Paris, 18 mars 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Il est nécessaire, Citoyen Ministre, que vous fassiez connaître à M. de Cobenzl que les ordres envoyés aux généraux Brune et Macdonald, commandant les armées d’Italie et des Grisons, ne peuvent arriver à Trente et à Trévise que le 6 ou le 7 germinal; qu’ainsi l’évacuation des pays vénitiens ne pourra avoir lieu que le 15 ou le 16 du même mois; que ce ne sera également qu’à la même époque que la partie du Tyrol comprise dans les États héréditaires sera évacuée.

Quant à la partie du Tyrol qui n’est pas comprise dans les États héréditaires, c’est-à-dire l’évêché de Trente, nos troupes l’auront évacuée avant le 30 germinal, époque où la nouvelle de l’échange des ratifications sera arrivée au quartier général. Nos troupes ayant l’ordre de remettre le pays aux troupes ou milices de l’évêque de Trente, Sa Majesté Impériale en fera prévenir ce prince, vu que, par l’article 19 du traité de Lunéville, les troupes impériales ne doivent pas dépasser les États héréditaires.

 

Paris, 18 mars 1801

Au citoyen Talleyrand

Je vous prie, Citoyen Ministre, de présenter un projet de note à M. de Cobenzl, pour qu’il l’envoie cette nuit, par un courrier extraordinaire, à Vienne.

Vous direz dans cette note :

1° Que le territoire de la Maison d’Autriche ne peut pas être évacué
dans dix jours, comme le porte l’article 19 du traité de Lunéville, puisque, le procès-verbal d’échange n’ayant été signé qu’hier 26, et les ordres du ministre de la guerre ne pouvant être expédiés qu’aujourd’hui 27, ils ne pourront être arrivés aux avant-postes français que le 4 ou le 5 germinal. Le ministre de la guerre donne les ordres de manière que dix jours après l’arrivée de l’ordre aux différents quartiers généraux, c’est-à-dire le 14 ou le 15 germinal, les États héréditaires seront évacués.

2° Quant aux États de l’Empire, les calculs de marche des militaires portent qu’il faut, à commencer des premiers jours d’évacuation, quarante jours; ainsi, ce ne sera que du 15 au 20 floréal que les États de l’Empire seront entièrement évacués.

3° Le même article 19 du traité de Lunéville dit que les troupes de Sa Majesté Impériale rentreront dans dix jours dans le sein des États héréditaires. Ainsi, en prenant les mêmes calculs pour base, toutes les troupes de Sa Majesté Impériale devront être rentrées dans les États héréditaires le 14 ou le 15 germinal.

4° Que les ordres sont également donnés pour que les troupes françaises restent dans le Brisgau jusqu’à ce qu’elles soient relevées par les troupes du duc de Modène; et, si les troupes de ce duc ne se trouvaient pas encore formées, il faudrait demander à connaître les régiments à pied ou à cheval que Sa Majesté Impériale donnera à ce duc, afin que le passage de l’Inn par ces troupes ne donne aucun ombrage.

 

Paris, 18 mars 1801

Au citoyen Talleyrand

Je désire, Citoyen Ministre, que vous remettiez demain à M. de Saint-Marsan une note dans laquelle vous lui direz :

1° Que le Premier Consul n’a pas eu lieu d’être satisfait du peu de confiance que lui a montré le roi de Sardaigne depuis qu’il est à la tête des affaires, et spécialement depuis la bataille de Marengo; que l’effet naturel de cette méfiance a été de rendre inutile la bonne volonté que le Premier Consul pouvait avoir conservée de ses anciennes relations avec le roi de Sardaigne;

2° Mais que, S. M. l’empereur de Russie prenant un grand intérêt à ce prince, le Premier Consul était disposé à faire quelque chose d’avantageux pour lui; qu’il désire donc que les négociations soient ouvertes le plus tôt possible;
3° Qu’il devait sans doute être muni des pouvoirs nécessaires, mais que le préalable à tout devait être de fermer tous les ports de Sardaigne aux Anglais et de les ouvrir aux bâtiments français ; que c’est là la condition principale et préliminaire d’un armistice qui pourrait être suivi, quelques jours après, du traité définitif.

 

Paris, 18 mars 1801

Au citoyen Talleyrand

Je vous prie, Citoyen Ministre, de m’envoyer copie des instructions que vous avez données au Ministre Plénipotentiaire de la République pour l’échange des ratifications, sur la Convention à signer ou à convenir avant la signature du Proès Verbal de l’échange des Ratifications.

 

Paris, 18 mars 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Faites connaître, Citoyen Ministre, au général commandant l’armée d’Italie que, les ratifications ayant été échangées, il faut qu’il prenne ses mesures pour avoir évacué la rive gauche de l’Adige au 16 germinal. Il aura soin de faire rentrer ce qui serait dû sur les contributions imposées sur ces pays. Il ne fera évacuer la portion de Porto-Legnano et de Vérone fortifiée sur la rive gauche qu’après l’entière démolition et le transport sur la rive droite des objets qui peuvent servir.

Faites connaître au général Macdonald qu’il faut qu’il ait évacué la partie du Tyrol qui est comprise dans les États héréditaires au 16 germinal; il tiendra des troupes dans l’évêché de Trente jusqu’au 30 germinal, vu que ce pays, considéré comme faisant partie de l’Empire, ne doit être évacué qu’un mois après.

La remise des villes du Trentin doit être faite aux agents et milices du Prince-Évêque, les troupes de l’Empereur ne devant pas sortir des pays héréditaires.

 

Paris, 18 mars 1801

Au général Berthier

Faites connaître, Citoyen Ministre, aux généraux Moreau et Augereau, par un courrier extraordinaire, que les ratifications ont été échangées à Paris; qu’il faut qu’ils effectuent leurs mouvements d’évacuation de manière à avoir évacué les États héréditaires au 15 germinal, et tout l’Empire au 15 on au 20 floréal.

Les troupes impériales ne doivent point dépasser l’Inn, et celles qui sont sur les terres de l’Empire, du côté de la Bohême, doivent être rentrées dans les États héréditaires avant le 15 germinal. Les différentes villes évacuées seront consignées soit aux milices bourgeoises, soit aux troupes appartenant aux différents princes.

Les généraux doivent veiller à ce que les Autrichiens observent fidèlement l’article 19, c’est-à-dire à ce qu’ils ne dépassent pas les États héréditaires.

Le Brisgau continuera à être occupé par des troupes françaises jusqu’à ce que le duc de Modène soit venu en prendre possession.

Kehl, Philippsburg, Cassel, Ehrenbreistein, Düsseldorf, ne doivent être évacués que lorsqu’ils auront reçu de nouveaux ordres; on doit continuer leur démolition.

On ne doit rien laisser à Ingolstadt et Ulm , et on achèvera de détruire entièrement leurs fortifications.

Dans la convention que les généraux Moreau et Augereau seront dans le cas de conclure, ils auront soin de spécifier, le général Augereau, que les troupes de l’Empereur retourneront en Bohême, et le général Moreau, quelles ne passeront pas l’Inn.

Enfin, le général Moreau fera passer le Danube à tous les corps qui doivent se rendre en Batavie et dans les 16e, 24e, 25e, 26e divisions militaires.

 

Paris, 18 mars 1801

Au général Berthier

Donnez l’ordre, Citoyen Ministre, au général Leclerc de former deux brigades du corps d’observation de la Gironde, de tenir la lère brigade prête à partir pour Bayonne, et d’organiser ainsi la 2e :

Un général de brigade, un adjudant commandant, quatre adjoints à l’état-major, deux commissaires des guerres, une ambulance, deux médecins, six chirurgiens, un chef de brigade d’artillerie, quatre officiers d’artillerie, un chef de bataillon du génie, deux capitaines du génie, deux lieutenants du génie;

500 hommes de cavalerie légère,

300 canonniers à cheval, à pied et ouvriers d’artillerie, 100 sapeurs,

200 hommes d’infanterie, parmi lesquels seront compris les bataillons francs,

300 hommes d’infanterie pris dans les dépôts de l’île de Ré,

(total) 3,200

12 pièces d’artillerie, qui seront fournies par le corps de la Gironde,

6,000 fusils
2,000 sabres
1,000 paires de pistolets

et les caisses envoyées par le ministre de la guerre.

Ces objets sont à Rochefort.

Cette brigade sera aux ordres de l’amiral Bruix, étant destinée à s’embarquer sur son escadre.

Le général Leclerc fera toutes ces dispositions dans le plus grand secret, en préviendra l’amiral Bruix, qui lui fera connaître le jour où il faudra que cette brigade arrive à Rochefort. Il enverra auprès de cet amiral le général de brigade destiné à la commander.

 

Paris, 18 mars 1801

Au citoyen Lebrun, aide de camp du Premier Consul

Vous vous rendrez, Citoyen, à Rochefort; vous y verrez le préfet maritime et l’amiral Bruix. Vous vous informerez dans ce port combien il y a de vaisseaux en rade et ce qui pourrait leur manquer pour partir.

De là, vous vous rendrez à Bordeaux, où vous remettrez au général Leclerc les dépêches que vous prendrez du ministre de la guerre avant de partir. Vous décrirez de ces deux places tout ce que vous aurez vu, et vous renverrez de cette dernière l’état de situation des corps de l’armée d’observation et du lien où ils se trouvent.

Vous remettrez la lettre ci-jointe, à l’ambassadeur de la République à Madrid.

 

Paris, 19 mars 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

L’ambassadeur de la République à Madrid me mande que le roi d’Espagne s’est décidé à nous donner trois des vaisseaux qui sont à Cadix, un vaisseau de 50 et deux frégates de celles qui sont à Carthagène. Écrivez-lui que mon intention est qu’il fasse armer le plus tôt possible les trois vaisseaux de Cadix; qu’il y fasse réunir tous les matelots qui pourraient se trouver sur les corvettes, petits bâtiments et corsaires qui seraient entrés dans les ports d’Espagne.

Dans peu de jours, 60 officiers de marine se rendront en poste à Cadix, afin de former les états-majors de ces trois vaisseaux. Un bataillon de la 47e, de 400 hommes, part de Perpignan pour se rendre à Carthagène et former la garnison de ces trois vaisseaux. Il faut donc que notre ambassadeur s’entende avec le ministre de la guerre d’Espagne pour que les vivres soient fournis à ces troupes; bien entendu qu’il en tiendra compte et que nous le rembourserons.

 

Paris, 19 mars 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Donnez l’ordre au général Leclerc, Citoyen Ministre, de faire partir la première brigade le plus tôt possible pour Bayonne, et faites-lui connaître que je désire que cette brigade soit composée de quatre escadrons des 24e et 25e de chasseurs, deux escadrons du 18e de cavalerie, un bataillon de la 16e légère, deux bataillons de la 24e de ligne, un bataillon de la 63e de ligne, un bataillon de la 90e de ligne, deux bataillons de la 105e de ligne, douze pièces d’artillerie attelées et approvisionnées.

Je compte que, toutes armes réunies, cela doit former de 5 à 6,000 hommes.

Donnez l’ordre aux seconds bataillons des 72e et 73e, qui sont à Tours et à Angers, et au troisième bataillon de la 68e, qui est à Nantes, de se compléter à 420 hommes et de se rendre à Saintes, pour faire partie du corps de la Gironde.

Prévenez le général Leclerc que ces trois bataillons, les bataillons francs de l’Ouest, feront le fond de la deuxième brigade, destinée à s’embarquer avec l’amiral Bruix; qu’il pourra prendre les hommes de cavalerie, pour cette brigade, dans le 20e de dragons et dans la portion des 24e et 25e de chasseurs qui auraient de mauvais chevaux. Ces détachements de cavalerie s’embarqueront avec leurs selles.