Correspondance de Napoléon – Avril 1813
Erfurt, 26 avril 1813, une heure après midi.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Erfurt.
Mon Cousin, donnez ordre au duc de Raguse de porter demain son quartier général à Erfurt ; de porter la division Bonet en colonne depuis Erfurt jusqu’à Weimar, la 3e division en colonne depuis Gotha jusqu’à Erfurt, et la 1e division à Weissensee et Kœlleda. Ordonnez au général Compans d’envoyer un officier à Naumburg pour se mettre en communication avec le prince de la Moskova. Donnez ordre que le régiment provisoire, composé de 900 chevaux, se réunisse tout entier demain en avant d’Erfurt; il sera sous les ordres du duc d’Istrie. Le régiment de Hesse-Darmstadt, composé de vieux soldats, fera partie du corps du duc de Raguse; chargez ce maréchal d’envoyer à la rencontre de ce régiment, pour qu’il ne s’arrête pas en route. Donnez ordre également au duc d’Istrie d’envoyer prendre le régiment provisoire et de le réunir à la Garde. Ce régiment figurera bien en ligne derrière la Garde et ne ferait rien isolément. S’il n’y a pas de général de brigade qui commande ce régiment, chargez-en le général Beaumont, qui est ici, et recommandez au duc d’Istrie de le tenir derrière la Garde et de n’en détacher aucune partie. Donnez ordre au duc de Trévise de porter ce soir son quartier général à Weimar et d’y faire venir toute la jeune Garde aussitôt que le prince de la Moskova aura évacué le pays. Donnez ordre que tout le quartier général administratif vienne se placer à Erfurt. Donnez ordre au duc d’Istrie de reconnaître un emplacement pour pouvoir placer sa cavalerie et le régiment provisoire autour de Weimar et en avant, dans la direction de Naumburg et d’Iéna.
Erfurt, 26 avril 1813, une heure après midi.
Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant le 3e corps de la Grande Armée, à Hanau.
Le major général vous fait connaître mes instructions pour le mouvement. Je donne ordre au duc de Trévise de porter son quartier général ce soir à Weimar. La Garde est en colonne d’Erfurt à Weimar. Aussitôt que vous aurez évacué les environs de Weimar, le duc de Trévise et le duc d’Istrie y placeront la Garde. J’ai donné ordre au général Compans de se porter de Langensalza à Weissensee, où il sera ce soir. Je lui ai donné ordre, s’il entendait le canon du côté de Naumburg, de s’y porter sur-le-champ. Faites-le reconnaître pour l’attirer à vous, si vous en aviez besoin. J’ai ordonné que vos 200,000 rations de biscuit restassent à Erfurt, a6n qu’en cas de retraite et à tout événement nous puissions les y retrouver.
Le 4e corps, que commande le général Bertrand, sera composé de ta division Morand, de la division italienne et de la division wurtembergeoise.
J’ai formé un 12e corps sous les ordres du duc de Reggio, qui est aujourd’hui à Cobourg. Ce corps est composé de deux divisions françaises et de deux divisions bavaroises.
Votre corps restera composé de cinq divisions, dont quatre françaises et la division Marchand, où se trouvent les Hessois, les Badois et les troupes du prince Primat. Relirez le bataillon du prince Primat, qui est à Würzburg et qui y est inutile, afin d’en augmenter la division Marchand.
Je porterai demain mon quartier général à Weimar, et j’ordonne à mon petit service de suivre votre quartier général. Je suppose que votre quartier général sera ce soir du côté d’Auerstaedt. J’ordonne au général Bertrand, avec ses trois divisions, de se placer sur les hauteurs de Weimar; il fera garder Iéna. C’est vous qui serez chargé de garder les débouchés de Dornburg, où vous pourrez placer la division Marchand.
Le vice-roi me mande, en date du 22 au soir, qu’il s’est porté sur Kœtben; que l’ennemi l’a évacué en se dirigeant sur Dessau. Je suppose que ce prince aujourd’hui aura occupé Halle et Merseburg. Le duc de Raguse aura demain son quartier général à Erfurt.
Le roi de Bavière a levé toutes les difficultés que faisaient les Bavarois ; ils ont une division de 10,000 hommes, qui complète le corps du duc de Reggio.
Je désire que vous remarquiez dans toutes ces dispositions que votre corps seul est maintenu à cinq divisions. Voyez-y une preuve de la parfaite estime que je fuis de vous.
Pour ce moment, ma grande affaire c’est de me réunir au vice-roi et de border toute la Saale depuis Saalfeld jusqu’à l’embouchure de la Saale dans l’Elbe. Il est nécessaire que Naumburg soit mis à l’abri des Cosaques.
Erfurt, 26 avril 1813, une heure après midi.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, vous trouverez ci-jointe une lettre pour le vice-roi; envoyez-la-lui en toute diligence. Si vous n’êtes pas inquiété du côté du Weser, approchez-vous d’Artern et de Querfurt avec votre cavalerie, votre infanterie, votre artillerie et la division Teste. Cependant que cela soit subordonné avant tout à la sûreté de votre royaume.
Je porte ce soir mon quartier général à Weimar. Le prince de la Moskova, avec cinq divisions, a son quartier général à Auerstaedt, occupant Naumburg. Le général Bertrand, avec le 4e corps, occupe Iéna. Le duc de Reggio, avec son corps, occupe Saalfeld. Ma Garde sera ce soir à Weimar. Le duc de Raguse aura demain son quartier, général à Erfurt. Le général Compans sera ce soir à Weissensee.
Si vous pouviez avoir seize ou vingt-quatre pièces de canon, 15 ou 1800 chevaux et n’importe quelle quantité d’infanterie, tout cela ne pourrait qu’être fort utile. Faites placer également les bataillons de la division Teste, et commandez vous-même ce corps.
Envoyez des courriers au général Vandamme pour l’instruire de ce qui se passe; envoyez-en au général Lemarois, et, à Paris, à la Reine, pour l’informer de tout autant que possible.
Donnez ordre à vos préfets de Mühlhausen et de Nordhausen de réunir autant de farine et de bœufs qu’il sera possible et de les diriger sur Naumburg, pour la nourriture de l’armée. Je n’ai pas de nouvelles de vous depuis le 22.
Erfurt, 26 avril 1813, une heure après midi.
À Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Mansfeld.
Mon Fils, je suppose que vous serez aujourd’hui à Halle et Merseburg. Le prince de la Moskova a son quartier général à Auerstaedt et occupe Naumburg. Une division du 6e corps que commande le duc de Raguse sera ce soir à Weissensee. Je porte cette nuit mon quartier général à Weimar. Le général Bertrand a son quartier général en arrière d’Iéna, occupant Iéna par des troupes légères. Le duc de Reggio a son quartier général à Saalfeld. Je ne sais pas bien où est la 1e division du 1èr corps, ni la situation de votre cavalerie. Je suppose que l’ennemi, voyant les mouvements sérieux qui se font, aura rappelé tous les coureurs qu’il avait détachés de Hambourg sur le Weser.
Mon premier but est d’occuper la Saale et de faire, le plus tôt possible, réoccuper Hambourg : la 2e division et la 6e ainsi que la division Saint-Cyr, doivent être suffisantes pour cette opération. Vous aurez fait revenir le général Bourcier à Hanovre; pressez-le donc pour qu’il se dépêche de vous envoyer de la cavalerie et de compléter votre corps. J’ai déjà ici 4,000 hommes, composés de différents détachements destinés aux 1er et 2e corps. Ma seconde opération sera d’occuper l’Elbe. Faites-moi connaître ce qui forme la garnison de Magdeburg.
Erfurt, 26 avril 1813.
Au maréchal Augereau, duc de Castiglione, commandant le 11e corps de la grande armée, à Würzburg.
Mon Cousin, je porte ce soir mon quartier général à Auerstaedt. Le prince de la Moskova est, avec cinq divisions, à Naumburg; le général Bertrand, avec trois divisions, à Iéna. Je serai ce soir avec six divisions à Weimar. Le duc de Reggio marche avec trois divisions sur Saalfeld.
Donnez ordre au bataillon du prince Primat, qui est à Würzburg, de se diriger sans délai sur Erfurt.
Donnez ordre au duc de Plaisance de partir avec les troupes de cavalerie appartenant à la 1e division de marche du 1er corps de cavalerie et avec celles de la 1e division de marche du 2e corps de cavalerie, en se dirigeant sur Gotha.
Erfurt, 26 avril 1813.
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris.
Mon Cousin, je reçois votre lettre du 22 avril. Le ministre de la marine, jusqu’à cette heure, n’est jamais sorti de la ligne pour les nominations de marins : hormis pour les grades supérieurs, je m’en rapporte à lui.
Il n’a pas été question, dans l’ordre de service, des gouvernements généraux de la Hollande, du Piémont et de la Toscane, parce que cela ne forme pas une différence d’avec le reste de l’Empire.
Je pense que le ministre de la police ne doit adresser ses rapports de police qu’à vous, et que vous ne devez montrer à l’Impératrice que ce qu’il est bon qu’elle sache : il est inutile de lui parler de choses .qui pourraient l’inquiéter ou salir son esprit. Vous avez eu donc tort de préjuger la question. Vous trouverez ci-jointe la lettre que j’écris à ce sujet au ministre de la police. La même chose doit être pour tous les ministres ; ils ne doivent pas parler à l’Impératrice de choses qui pourraient l’inquiéter ou la peiner.
Erfurt, 26 avril 1813.
Au général Savary, duc de Rovigo, ministre de la police général, à Paris.
Mon intention n’est pas que vous remettiez directement à l’Impératrice vos mémoires sur les affaires de police. Ce ne peut avoir aucun avantage et j’y vois des inconvénients. L’Impératrice est trop jeune pour lui gâter l’esprit ou l’inquiéter par des détails de police. Vous ne devez donc adresser qu’à l’archichancelier la copie des rapports que vous me remettez. L’archichancelier ne lui remettra que ce qu’il est bon qu’elle sache, et en traitant ces sortes d’affaires le plus légèrement possible.
Erfurt, 26 avril 1813, huit heures du matin.
Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant le 3e corps de la Grande Armée, à Auerstaedt.
Je reçois votre lettre où je vois que vous avez, ce matin 27, votre quartier général à Auerstaedt. Le général Compans avec sa division sera tout réuni à midi à Weissensee; il doit occuper demain Kœlleda. Le vice-roi s’est porté le 23 sur Kœthen, où ses reconnaissances ont trouvé un bivouac d’infanterie; il a fait occuper Eisleben. Il y a des avis qui disent que Winzingerode est à Merseburg. Si le général Souham est entré à Naumburg, on aura des nouvelles certaines. Il serait important d’envoyer une reconnaissance d’infanterie sur Freiburg, pour voir s’il n’y aurait pas un chemin qui conduit à Freiburg sans passer par Naumburg. J’espère qu’aujourd’hui le vice-roi se trouvera à Querfurt, et que la jonction sera opérée. L’occupation d’Iéna, de Dornburg, Naumburg, Merseburg, Halle, voilà mon premier projet. On pourra aussi occuper Weissenfels, s’il y a un pont sur la Saale et une route par la rive gauche. Tous les mouvements doivent se faire derrière la Saale comme derrière un rideau, et aucun sur la rive droite.
Je suppose que je ne tarderai pas à avoir des nouvelles des coups de canon que vous me dites avoir entendus du côté de Naumburg hier au soir.
Erfurt, 27 avril 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Erfurt.
Mon Cousin, j’ai donné ordre de faire reconnaître la route de Würzburg à Fulde, celle de Würzburg à Meiningen et Gotha, et celle de Francfort à Gotha; il est nécessaire de compléter la reconnaissance de toutes les routes qui traversent les montagnes de Thuringe. Faites partir le nombre d’ingénieurs géographes nécessaire pour faire les reconnaissances suivantes : 1° la route d’Erfurt à Meiningen par Ichtershausen et traversant la montagne à Oberhof ; elle complétera la reconnaissance ordonnée de Meiningen à Würzburg ; 2° la route de Schweinfurt à Erfurt par Kœnigshofen, Rœmhild, Themar, Schleusingen, llmenau et Ichtershausen (une autre route de Schweinfurt à Erfurt quitte la première à Rœmhild et passe à Hildburghausen et Gehren) ; 3° la communication entre Meiningen et Cobourg par Hildburghausen; 4° en partant de Cobourg, il faut reconnaître, à gauche, la communication par Eisfeld, Kahlert et Gehren; à droite, la route de Saalfeld par Neustadt, Judenbach et Graefenthal (il doit y avoir une communication entre Neustadt, Sonneberg et Kahlert) ; 5° à Saalfeld, on trouve trois routes : celle de droite sur Neustadt et Géra; celle du milieu sur Rudolstadt, Orlamünde et Iéna; celle de gauche sur Blankenburg et llmenau (à Rudolstadt se trouvent des communications sur Weimar, 1° par Blankenhayn, 2° par Berka, 3° par Kranichfeld) ; il faut savoir aussi si on peut communiquer de Rudolstadt à Blankenburg et llmenau ; 6° reste à reconnaître la route de Kronach à Schleiz ; l’armée y a passé autrefois, mais on ne connaît pas les communications de droite et de gauche. Il doit y avoir des communications entre Lobenstein et Saalfeld, entre Lobenstein et Hof, entre Schleiz et Iéna par Neustadt, entre Schleiz et Hof. On dit que la route entre Schleiz et Géra vient d’être réparée. Il faudrait savoir si la route entre Hof, Plauen et Géra est praticable, comme on le dit, entre Plauen et Géra.
Les ingénieurs géographes reconnaîtront avec soin ces routes ; ils rendront compte si elles sont praticables ou non pour l’artillerie, décriront les défilés, bois, rivières, leur largeur, leur profondeur, les ponts, les bacs, les gués; ils indiqueront les positions susceptibles de défense, les villes et villages susceptibles d’être facilement mis à l’abri d’un coup de main.
Erfurt, 27 avril 1813
Au maréchal Marmont, duc de Raguse, commandant le 6e corps de la Grande Armée, à Erfurt.
Je viens de prendre dans les 123e et 134e régiments de ligne des capitaines pour les faire chefs de bataillon dans le 37′ léger, des lieutenants pour les faire capitaines, des sous-lieutenants pour les faire lieutenants, et des sergents pour les faire sous-lieutenants. Mon décret va vous être envoyé par le major général. Tous ces hommes sont ici dans la citadelle. Faites-les réunir sans délai et qu’ils partent demain, à la pointe du jour, pour qu’avant midi ils soient placés dans les compagnies : il n’y a rien de plus urgent que cela, ce régiment ne pouvant pas marcher avec les officiers ineptes qui s’y trouvent. Vous mettrez en pied les sous-lieutenants que je vous envoie et qui ont tous fait la guerre. Vous renverrez au dépôt d’Erfurt (et vous m’en remettrez la note) tous les capitaines qui n’auraient pas fait la guerre. Vous mettrez à la suite les sous-lieutenants et lieutenants qui seraient dans le même cas. Il est absurde d’avoir dans un régiment des capitaines qui n’ont pas fait la guerre. Ceux que vous renverrez au dépôt, on verra dans la campagne ce qu’on en fera; mais, en attendant, le commandement sera dans la main des hommes que je vous envoie.
Erfurt, 27 avril 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Je viens de voir le 37e d’infanterie légère; il est impossible de voir un plus beau corps en soldats, mais il est impossible en même temps d’en voir un plus mauvais en officiers. Si votre bureau avait pris à tâche de nommer les officiers les plus ineptes de France, il n’aurait pas mieux réussi : ces officiers sont la risée des soldats. Effectivement, ils sont tous tirés des bataillons coloniaux, du service hollandais ou de la garde nationale des Pyrénées et de l’Escaut; la plupart des capitaines n’ont jamais vu le feu. Chaque jour ne faitqu’ajouter à mon mécontentement du travail de vos Bureaux dans la partie la plus importante du service : l’organisation. Je désire que vous ne perdiez pas votre temps à vous occuper de police; employez-le à l’organisation de l’armée. Je vais être obligé de destituer et de renvoyer tous ces officiers.
Vous m’envoyez aussi des jeunes gens qui sortent des collèges et qui n’ont pas été à l’école de Saint-Cyr, de manière qu’ils ne savent rien, et c’est dans de nouveaux régiments que vous les placez ! Il est impossible de plus mal servir que ne fait ce bureau de votre ministère. Je vous ai ordonné de mettre à la tête de ce bureau un officier général responsable; je regarde cette fonction comme la principale de votre ministère, et c’est celle dont vous vous occupez le moins.
Je vous ai donné ordre aussi, avant mon départ, de faire partir pour Mayence les 88 officiers venant d’Espagne; vous n’en avez rien fait; vous n’en avez envoyé l’état ni au prince de Neuchâtel, ni au duc de Valmy, ni à moi. J’ai le plus grand besoin de ces officiers, qui me font un vide considérable; il ne vous aurait pas coûté beaucoup de m’en envoyer l’état. On ne sait ni où ces hommes ont été dirigés, ni où ils sont, ni ce qu’ils font.
Erfurt, 28 avril 1813, trois heures du matin.
A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant l’armée de l’Elbe, à
Mon Fils, je reçois votre lettre du 26; je n’ai point encore de lettre de vous du 27. Je vois par cette lettre que le général Lauriston était devant Wettin et que la 31e division devait être à Querfurt le, 27, et comme le 26 au soir le général Souham était à Naumburg, et le prince de la Moskova à Auerstaedt, j’espère que la jonction se sera faite hier 27, et au plus tard aujourd’hui 28. Le prince de la Moskova fera occuper Weissenfels sur la Saale. Il me tarde d’apprendre que vous serez à Merseburg et que la jonction soit faite.
Envoyez-moi sur-le-champ l’état de situation de votre corps d’armée et me faites bien connaître où chaque chose se trouve, tant votre artillerie que votre cavalerie. Faites appuyer toute ma Garde sur votre droite, désirant le plus tôt possible la réunir avec le reste de la Garde qui est à Weimar. Portez votre quartier général aussi près de nous que cela vous paraîtra convenable.
Vous savez que mon principe est de déboucher en masse; c’est donc en masse que je veux passer la Saale avec 300,000 hommes.
Procurez-vous du pain pour quelques jours. Envoyez-moi un officier d’artillerie qui connaisse parfaitement votre artillerie et où existent vos munitions et surtout vos pièces de 12, également tout le personnel de votre artillerie à cheval et tous les moyens de pontonniers que vous avez.
Erfurt, 28 avril 1813, trois heures et demie du matin.
Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant le 3e corps de la Grande Armée, à Naumburg.
La 31e division, commandée par le général Gérard, doit être arrivée hier 27 à Querfurt. Si votre jonction n’a pas été faite hier au soir, elle doit l’être dans la journée d’aujourd’hui. Le 26, le quartier général était à Mansfeld; une division occupait Alsleben; une autre était vis-à-vis Wettin.
Le général Brenier a évacué Iéna avant que le général Marchand y fût arrivé, ce qui a donné lieu à un parti de 200 hommes de cavalerie ennemie d’entrer dans la ville, d’y prendre plusieurs otages et des traînards. Le général Marchand n’est arrivé qu’une heure après. Cette faute grossière et cette manière de faire la guerre peuvent compromettre toutes mes opérations. Quand vous donnez un ordre, veillez désormais à ce qu’un poste ne soit évacué qu’après qu’il est remplacé; un débouché comme Iéna méritait bien ce soin. Témoignez mon mécontentement au général Brenier; c’est perdre des hommes bien inutilement et faire courir des dangers à l’armée par pure imprévoyance.
Il doit y avoir à Weissenfels un pont sur la Saale et un chemin qui conduit du côté de Querfurt; il serait convenable de s’emparer de cette ville. Je désirerais, s’il est possible, qu’on passât par la rive gauche. Faites palissader dans la journée la tête du pont de Naumburg, surtout sur la route de Merseburg. Je suppose que vous aurez fait occuper Freiburg, afin d’avoir votre communication avec Merseburg.
Thorn s’est rendu le 16 avril. La garnison était réduite par les maladies à 900 Bavarois; ils ont obtenu par capitulation de retourner en Bavière, avec la simple condition de ne pas servir pendant l’année, actuelle. L’officier d’état-major qui a apporté cette nouvelle a laissé le général Barclay de Tolly près de Thorn, avec toute son armée. Ce général était chargé de Thorn et de Danzig.
D’un autre côté, il est certain que le corps du général Sacken est du côté de Cracovie contre les Autrichiens et les Polonais. Les Russes ne peuvent donc point être en mesure de nous disputer sérieusement l’Elbe, et, comme Wittgenstein est assez audacieux, en débouchant avec de fortes masses, on peut lui faire éprouver beaucoup de pertes.
Je pense que le premier point sera d’arriver à Leipzig. Le vice-roi pourrait déboucher par Merseburg.
Il paraît qu’il y a eu une affaire assez chaude à Stettin, où l’ennemi a été brossé et a perdu beaucoup de monde. Ils ont voulu prendre d’assaut Spandau et ont fait sauter un magasin à poudre ; ils y ont perdu 1,200 hommes. Enfin il paraît qu’ils ont brûlé Wittenberg, mais n’ont pas pu le prendre; ayant tenté un assaut, ils y ont perdu beaucoup de monde. Ces nouvelles paraissent certaines.
La grande affaire en ce moment, c’est la jonction. Faites passer cette lettre au vice-roi.
Erfurt, 28 avril 1813, quatre heures du matin.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Eschwege.
Mon Frère, je reçois votre lettre du 27, par laquelle vous m’instruisez que vous serez aujourd’hui 28 à Eschwege et demain à Erfurt. Si vous avez quelque inquiétude pour Hanovre, dirigez vos forces de ce côté; si vous n’avez pas d’inquiétude pour Hanovre, envoyez toutes vos forces qui sont à Nordhausen sur Querfurt, et toutes celles que vous avez du côté de Mühlhausen sur Weissensee. Ces deux colonnes se réuniront sur la Saale par les ordres ultérieurs que vous leur donnerez d’Erfurt, et vous pourrez ainsi assister, à la tête de toutes vos forces, infanterie, cavalerie et artillerie, y compris votre garde, au mouvement que je vais faire pour jeter l’ennemi de l’autre côté de l’Elbe.
Donnez ordre à vos préfets de Mühlhausen et de Nordhausen d’expédier sur Naumburg la plus grande quantité de subsistances qu’il sera possible, des farines, des bœufs et de la viande.
Erfurt, 28 avril 1813, hait heures du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Erfurt.
Mon Cousin, donnez ordre au duc de Raguse de porter ce soir son quartier général à Weimar; de faire partir la division Bonet pour prendre militairement position, et au bivouac, en avant de Weimar, sur les routes de Naumburg, éclairant la route d’Iéna par un bataillon ; de donner ordre à sa 3e division de dépasser Erfurt et de se placer en colonne dans les cantonnements entre Erfurt et Weimar; à la division Compans, qui doit être à Kœlleda, de s’approcher de Naumburg, en ne faisant pas cependant une trop grande marche, mais de manière à pouvoir y être demain, s’il est nécessaire.
Donnez ordre sur-le-champ au duc d’Istrie et au duc de Trévise de partir de Weimar avec la Garde à pied et à cheval, ainsi qu’avec mon service, pour faire six lieues sur le chemin de Naumburg, arriver à Auerstaedt ce soir, si la journée n’est pas trop forte, et, si elle était trop forte, rester en deçà d’Auerstaedt ; les troupes bivouaqueront; la cavalerie sera dans les villages. Faites connaître que je vais partir, que j’arriverai à Weimar au moment où l’infanterie partira, voulant marcher à la tête de l’infanterie.
Instruisez de ces dispositions le prince de la Moskova ; prévenez-en également le général Bertrand ; qu’il fasse connaître à quelle heure il aura occupé Iéna; qu’il est nécessaire qu’il fasse venir la division italienne, afin de pouvoir demain se porter sur Naumburg.
Erfurt, 28 avril 1813, neuf heures du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Erfurt.
Mon Cousin, prévenez le duc de Raguse, le duc d’Istrie, le duc de Trévise, le duc de Reggio, le général Bertrand, le prince de la Moskova, que le quartier général sera ce soir à Eckartsberga, chemin de Weimar à Naumburg.
Faites connaître au duc de Reggio qu’il est nécessaire qu’il se presse d’arriver à Saalfeld et d’appuyer sur Iéna, d’occuper Rudolstadt et de se lier avec Iéna ; que j’espère qu’il sera demain à Saalfeld ; que nous avons passé la Saale à Naumburg ; que ce soir le quartier général sera près d’Auerstaedt, au village d’Eckartsberga ; que le duc de Raguse est à Weimar et le général Bertrand à Iéna.
Erfurt, 28 avril 1813, neuf heures du matin.
Au maréchal Bessières, duc d’Istrie, commandant la garde impériale, à Weimar.
Mon Cousin, j’arriverai à midi à Weimar; je ne m’arrêterai qu’un quart d’heure pour voir la duchesse; je monterai de suite à cheval pour me mettre à la tête de la Garde. La Garde à pied et à cheval peut donc filer, puisque vous ne pourrez vous mettre en route avant onze heures, et qu’ainsi je trouverai toujours la queue de vos troupes dans Weimar; d’ailleurs la tête de la division Bonet ne tardera pas à y arriver. Mon intention est de porter ce soir mon quartier général à Eckartsberga; ce n’est donc pas la route d’Auerstaedt qu’il faut prendre, mais celle d’Eckartsberga. La 31e division ‘du vice-roi a dû être hier à Querfurt. Il serait bien important de communiquer.
NAPOLÉON.
- S. Envoyez des coureurs en avant pour savoir si le pont de Naumburg est gardé, et envoyez aussi un détachement de vingt-cinqcoureurs pour marcher le plus loin possible dans la direction de Querfurt. Instruisez-les que mon quartier général sera à Eckartsberga. Dites au duc de Weimar que je désire qu’il envoie un de ses courriers à Querfurt ; il sera porteur d’une lettre de vous au général commandant le corps du vice-roi pour l’instruire que nous avons passé la Saale à Naumburg, que le quartier général sera ce soir à Eckartsberga, que l’Empereur aura là dans la main plus de 200,000 hommes. Ce coureur ira vite. Vous lui direz que s’il a l’esprit de m’apporter le premier la nouvelle de l’arrivée du vice-roi, il aura 50 napoléons. Si vous aimez mieux en charger le maître de poste, vous pouvez le faire.
Erfurt, 28 avril 1813, onze heures du matin.
A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Je reçois votre lettre du 27 avril. Je vous avais écrit ce matin. Mon quartier général sera, à deux heures après midi, à Eckartsberga, point situé près d’Auerstaedt, à six lieues de Weimar et quatre de Naumburg ; le prince de la Moskova est à Naumburg avec tout son corps ; le duc de Raguse est campé en avant de Weimar ; le général Compans, qui était à Weissensee et à Kœlleda, va se placer aujourd’hui à la hauteur d’Eckartsberga, à quatre lieues de Naumburg. Le 4e corps est à Iéna, commandé par le général Bertrand; le 12e corps, commandé par le duc de Reggio, doit arriver demain à Saalfeld. Envoyez sur-le-champ un officier au vice-roi pour le prévenir de ces nouvelles. J’espère que nos communications se feront aujourd’hui par Naumburg ; une de ses divisions était hier à Querfurt. Donnez l’ordre au général Hammerstein d’envoyer en poste un officier sur Naumburg pour m’instruire où il est. Ordonnez-lui de se diriger sur Naumburg et de me faire connaître où il se trouve; qu’il envoie des officiers en poste pour communiquer avec le vice-roi, et que ces officiers viennent m’en rendre compte à Eckartsberga.
Envoyez un courrier à la Reine pour l’instruire que j’ai passé la Saale, ainsi que des succès du général Sébastiani.
Ordonnez à votre ministre auprès du roi de Saxe de se rendre à Prague auprès de ce monarque, pour observer ce qui se fait.
Envoyez un courrier au roi de Wurtemberg pour l’instruire du passage de la Saale et de la bonne situation des choses actuelles.
Je pense que vous faites bien de rester à Cassel. Si vous avez votre régiment de cavalerie de la garde, envoyez-le-moi; je vous le renverrai aussitôt que je serai sur l’Elbe. Je donne ordre que les six bataillons de la division Teste, au fur et à mesure de leur arrivée sur le Rhin, se portent sur Cassel, où vous réunirez toute la division. Envoyez-nous des farines et des bœufs sur Naumburg.
Écrivez au prince d’Eckmühl, à Lemarois et à Sébastiani pour les instruire de la situation des choses ; et, quoique je suppose que notre réunion se fasse aujourd’hui, cependant, jusqu’à ce que je vous aie fait dire qu’elle est faite, instruisez-moi de tout ce que vous apprendrez du vice-roi. Envoyez des officiers intelligents en poste, et qu’ils viennent me rendre compte. Dites à Lemarois d’envoyer un courrier à Amsterdam, à l’architrésorier, pour lui donner des nouvelles.
Erfurt, 28 avril 1813.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le duc de Bassano, je vous envoie une lettre du comte de Mercy. Je ne puis qu’être extrêmement mécontent de la manière dont je suis secondé par le ministère des relations extérieures. Vous me laissez les missions près les cours de Bavière et de Saxe incomplètes dans un moment aussi important ! À Munich, où aujourd’hui il faudrait le plus de monde possible, vous n’avez personne ! Celte manière de faire le service est fort extraordinaire; aussi jamais les affaires étrangères n’ont été plus ignorantes de ce qui se passe. Le roi de Saxe a fait une convention avec l’Autriche pour les troupes polonaises, afin de les autoriser à passer par la Bohême en posant les armes, ce qui est contraire à mes intentions, et vous n’en avez rien su. Mettez plus d’attention désormais à tenir au complet mes missions et à ce qu’elles veillent avec plus de soin dans les pays étrangers. Faites partir, sons vingt-quatre heures, font ce qui appartient à la mission de Dresde et à celle de Munich. Comment avez-vous pu ignorer la convention faite par la Saxe ?
Eckartsberga, 29 avril 1813, cinq heures du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Eckartsberga.
Mon Cousin, écrivez au prince de la Moskova qu’il convient qu’il envoie la division Ricard pour occuper Weissenfels, par la rive gauche ; le général Souham pourrait marcher par la rive droite sur Weissenfels, de sorte que le général Souham aurait ce soir deux divisions à Weissenfels. Les divisions Gérard et Brenier se réuniraient à Naumburg : la division Gérard en avant, sur la route de Zeitz, et la division Brenier à Naumburg. La division Compans, qui est à Rastenburg, pourrait se porter, si cela devenait nécessaire, sur Freiburg; mais, moyennant le mouvement que le vice-roi fait aujourd’hui de Querfurt sur Merseburg, il suffit de laisser un poste sur Freiburg. Aujourd’hui la division Compans et la Garde pourraient arriver à Naumburg, afin que tout le corps du prince de la Moskova pût se réunir ce soir ou demain à Weissenfels, pour marcher aussitôt que le vice-roi sera prêt, par Weissenfels et par Merseburg, sur Leipzig. Écrivez au général Compans de se rapprocher de Naumburg. Écrivez au prince de la Moskova de vous envoyer les papiers de la poste de Naumburg et de Weissenfels.