Correspondance de Napoléon – Avril 1813

Avril 1813

 

Paris, 1er avril 1813.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, vous trouverez ci-jointes des lettres du général Durutte et du général saxon Lecoq ; vous y verrez la con­duite de ce dernier général ; le général Thielmann a également refusé les pièces d’artillerie nécessaires pour armer Wittenberg. Je désire que vous fassiez, dans la journée, une note officielle à M. de Just, pour lui témoigner combien toutes ces difficultés me contrarient et me mé­contentent. Envoyez un courrier à M. de Serrae : vous lui direz que je suis surpris de ce qu’il ne me rend point compte de tout cela, et de ce qu’il ne fait rien pour lever toutes ces difficultés; que vous devriez recevoir deux fois par jour des lettres de lui; qu’il devrait vous instruire de toutes les nouvelles et même des bruits, tandis qu’il ne vous écrit point. Ordonnez-lui d’avoir une explication claire et de finir toutes ces difficultés.

 

Paris, 1er avril 1813.

Au baron de La Bouillerie, trésorier général de la couronne et du domaine extraordinaire, à Paris.

Vous prendrez trente millions en or dans le trésor du domaine extraordinaire; vous en mettrez vingt dans le trésor de la couronne, en place des vingt qui en ont été retirés; vous garderez les dix autres, dont vous ne disposerez que sur mon ordre. Sur ces dix millions, vous tiendrez deux millions à la disposition du grand maréchal, pour continuer les avances à faire à la Garde poor accé­lérer ses différents travaux ; vous en ferez partir deux autres en or pour Mayence, avec un payeur, afin d’être à ma disposition à la suite du quartier général; enfin vous garderez les six autres, dont je vous ferai connaître la destination.

 

Paris, 2 avril 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, la ligne d’opération de l’armée de l’Elbe est par Wesel. En conséquence, ordonnez que le double ap­provisionnement et tous les détachements de l’artillerie destinés pour cette armée, ainsi que les convois de poudre et d’armes, etc., soient dirigés par Wesel, et de là sur Magdeburg. Donnez le même ordre pour les hommes isolés et pour tout ce qui a cette destination.

L’armée du Main, au contraire, aura sa ligne d’opération sur Mayence.

J’ai donné ordre que tous les effets d’habillement, équipement et harnachement qui sont pour le général Bourcier, soient envoyés sur Wesel, et de là sur Hanovre.

En deux mots, Wesel est la ligne d’opération du corps de l’Elbe.

Paris, 2 avril 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous ai écrit hier pour vous faire connaître mes intentions, après avoir lu votre travail du 30 mars, contenant tous les renseignements que j’ai demandés sur l’infanterie de l’armée.

Je vous ai fait connaître que je désirais que les 1ere bataillons des vingt-huit régiments de la Grande Armée fussent complétés à six compagnies, moyennant qu’une ou deux compagnies des 5e bataillons y seraient incorporées, et que les compagnies qu’ils ont dans les places de l’Oder seraient considérées comme appartenant aux 5e ba­taillons. Cela étant, il y aurait encore les 1er et 3e bataillons des vingt-huit régiments de la Grande Armée à faire partir.

Mon intention est que vous donniez l’ordre que quatre compagnies des 1er bataillons de chacun de ces régiments, les cadres bien complétés, et les quatre compagnies portées à 500 hommes avec ce qui reste de la conscription de 1813 et des quatre années, partent sans délai pour se réunir à Wesel; ce qui fera vingt-huit bataillons de 500 hommes ou 14,000 hommes.

Toutefois vous dirigerez provisoirement, pour ne pas trop encombrer Wesel, huit de ces bataillons (ceux les plus près d’Utrecht, c’est-à-dire ceux dont les dépôts sont dans la 24e et dans la 16e division militaire) sur Utrecht, et vous les classerez sous le nom de 1e brigade de la 3e division et de 1e brigade de la 6e division. Nommez deux colonels en second pour commander chacune de ces deux brigades, et recommandez au général Molitor de mettre ses soins à faire exercer celte troupe. Ces deux brigades, jointes aux sept 4e bataillons qui sont à Utrecht, feront une force de 7 à 8,000 hommes, qui rassurera la Hollande. Il suffit de peu de jours pour opérer ce mouvement, et je désire que vous envoyiez vos ordres par une estafette extraordinaire.

Il restera donc douze bataillons du 1er corps et huit bataillons du 2e qui se réuniront à Wesel. Donnez ordre au général Lemarois de les placer à Wesel, Munster et dans le grand-duché de Berg.

Les bataillons du 1er corps formeront une brigade, qui sera la 2e de la 3e division.

Les huit bataillons du 2e corps formeront une autre brigade, qui sera la 2e de la 6e division.

Le général Lemarois les mettra sous les ordres d’un général de brigade, qui s’occupera de leur instruction. Il est surtout nécessaire que tous les chefs de bataillon soient à leurs corps.

Aussitôt que les 5e et 6e compagnies de ces 1er bataillons pour­ront partir, ce qui ne peut être qu’après qu’elles auront reçu la conscription de 1814, on les mettra en marche pour aller compléter leurs bataillons.

A tout événement, ces l6,000 hommes seraient destinés à fournir la garnison de Wesel, et ne devront pas, sans votre ordre spécial, sortir de dessous les ordres du général Lemarois, qui pourrait même en employer pour former les garnisons des places de Grave et Venlo. Si les circonstances l’exigeaient, il pourrait même retirer quelques bataillons pour contenir le grand-duché de Berg.

Je vous ai fait connaître que mon intention était également de diriger les vingt-huit 3e bataillons sur Wesel, lorsque la conscription de 1814 les aura complétés; ils formeront de nouvelles divisions à la Grande Armée. Mais, comme ce mouvement ne peut avoir lieu avant la mi-mai, les circonstances décideront ce qu’il sera convenable de faire alors. En attendant, il n’y a donc pas d’inconvénient à laisser ces bataillons comme s’ils devaient former des brigades provisoires.

DIVISION DE HAMBOURG.

La 32e division militaire se trouvant suffisamment garnie, je pense qu’il faut donner contre-ordre à la formation des 3e bataillons des divisions réunies, vu que cela met trop de désordre et de complica­tion dans les corps. Un grand nombre de compagnies sont en route; il faut les réunir toutes à Wesel, et en faire autant de bataillons qu’il y aura de fois six compagnies, et, aussitôt que ces compagnies seront formées à Wesel, on m’en rendra compte pour que je les dirige sur les régiments provisoires qui sont à la Grande Armée, afin de ren­forcer d’autant ces régiments et de pouvoir dissoudre les bataillons formés à Wesel. Vous me présenterez un projet de dislocation de ces bataillons de Wesel, et, en même temps, vous me proposerez de faire partir des dépôts tout ce qui s’y trouve disponible pour envoyer ces détachements directement sur Mayence, et de là aux corps de la Grande Armée qu’ils doivent renforcer. Par exemple, le 2e d’infan­terie légère, qui est à Paris, au lieu de renforcer le détachement de 70 hommes qui est à Wesel, enverrait directement 150 hommes, provenant de la conscription des quatre années, sur le régiment pro­visoire auquel il a fourni un bataillon.

La division de Hambourg restera composée de trois bataillons du 3e de ligne, savoir : le 6e, le 3e, le 4e; de trois bataillons du 29e de ligne, savoir : le 3e, le 4e, le 2e ; et enfin de deux bataillons du 105e, savoir : le 3e et le 4e; total, huit bataillons.

Les compagnies que ces régiments ont à Danzig seront portées dans le 5e bataillon, afin que les bataillons qu’ils ont dans la division de Hambourg aient leurs six compagnies.

Aussitôt que possible, vous ferez partir ces huit bataillons, en profitant de toutes les facilités que le cours du Rhin peut donner à leur route.

31e DIVISION.

Le 123e régiment aura à la division d’Erfurt ses 1er, 2e et 4e bataillons; total, trois bataillons. Le 124e aura à la même division ses 1er, 2e et 3e bataillons; total, trois bataillons. Le 127e aura ses 1er et 2e bataillons ; total, deux bataillons. Le 128e aura ses 1er et 2e bataillons; total, deux bataillons. Enfin le 129e aura à la même division ses 1er et 2e bataillons. Total général, douze bataillons.

On pourvoira par la suite aux bataillons que ces régiments ont à la 31e division, à Spandau et à Küstrin; mais, pour que ces régi­ments puissent fournir douze bataillons, il manquera 4,000 hommes, et, pour savoir s’il est convenable de les leur donner, je désirerais qu’une revue spéciale fût passée à leurs dépôts pour me faire con­naître la consistance de leurs cadres et ce qu’il y aura à espérer. S’ils sont bons et complets en officiers et sous-officiers, je ne ferais pas de difficulté à leur fournir ces 4,000 hommes sur ce que la Garde n’emploiera pas de la conscription de 1814.

32e DIVISION.

La 32e division est composée des 131e, 132e, 133e de ligne et du 36e léger. Ces régiments n’ont plus qu’un bataillon à leur division. Ils ont, en ce moment, à Mayence les cadres de leurs 4e> bataillons, qui sont arrivés le 16 mars et ont été retenus dans cette place pour y recevoir des détachements de conscrits partis de leurs dépôts et destinés à les compléter; le cadre du 4e bataillon du 133e a trouvé à Mayence les conscrits qui lui étaient nécessaires, et les conscrits destinés aux trois autres cadres doivent arriver du 6 au 7 avril : ces quatre bataillons seront donc réorganisés à cette époque.

Quatre autres cadres, ceux des bataillons partis de Dresde le            doivent être bien près d’arriver à Mayence ; mais aucune mesure n’a encore été prise pour compléter à Mayence ces derniers cadres; il faut y pourvoir.

Mon intention est que les quatre bataillons qui sont en ce mo­ment à Mayence soient réunis sous le commandement d’un major en second, qu’on les place sur les confins du grand-duché de Berg, du royaume de Westphalie et du comté de Nassau, et que successi­vement les quatre autres bataillons s’y réunissent de manière à refor­mer sur ce point la division.

Il ne faut tenir aucun compte des bataillons de garnison; il en sera ce qu’il pourra, selon les circonstances. Il ne faut pas faire de dépla­cement, mais seulement tenir en note dans les états qu’il reste dans telle division tant d’hommes, qu’on pourrait réunir pour jeter dans les places comme garnison, selon que les circonstances pourraient l’exiger; cela suffira; mais il ne faut rien organiser d’avance, puis­que cela peut changer à chaque instant.

DEMI-BRIGADES PROVISOIRES.

M’étant résolu à lever les gardes nationales du 6e arrondissement, je les chargerai de la défense de mes chantiers. Il me faudrait au moins seize fions bataillons pour former le camp d’Utrecht, puisque tout ce qui y est aujourd’hui ira renforcer les régiments et que les cadres retourneront aux dépôts.

Flessingue sera gardé par le 1er bataillon du 131e.

Anvers sera gardé par les 5e bataillons et 3,000 hommes de gardes nationales.

Cherbourg sera gardé par les 5e bataillons, par le 5e bataillon du 5e léger et par 3,000 hommes de gardes nationales.

Pour la Bretagne, on complétera les 3e et 4e bataillons des 4e, 7e, 15e, 86e et 70erégiments; ce qui fera 6,000 hommes. Il y aura, en outre, le bataillon de marine qui s’y trouve et des gardes nationales. On y emploiera également les bataillons du 121e et du 122e qui entraient dans la formation des demi-brigades provisoires desti­nées d’abord à la défense de ce point.

Les conscrits réfractaires, les 5e bataillons et les gardes nationales seront également suffisants pour Pile d’Aix, la Rochelle et Rochefort.

Les 5e bataillons et les gardes nationales seront également suffisants pour Toulon.

Ces mesures me rendront disponibles six bataillons d’infanterie légère et vingt-neuf d’infanterie de ligne; total, trente-cinq bataillons, qui pourront former une réserve à Mayence. Cette réserve, avec la division d’Erfurt, fera trois divisions de seize bataillons cha­cune. Ce sera un beau corps d’armée, qu’on appellera Corps de réserve.

Cette réserve sera portée à cinq divisions lorsqu’on aura réuni à Wesel les vingt-huit 3e bataillons ; elle pourra alors s’étendre insen­siblement sur toute l’Allemagne. Tous ces régiments ne fourniront que des conscrits de 1814, qui seront formés en demi-brigades pro­visoires de deux ou trois bataillons. En cas d’événement, cette réserve fournirait des garnisons à toutes mes places fortes. Faites-moi con­naître s’il y a d’autres cadres de bataillons revenant d’Espagne que l’on puisse placer dans cette réserve.

DE QUELQUES RÉGIMENTS QUI NE SONT PAS EMPLOYÉS.

Le 113e devait avoir deux bataillons au corps d’observation de Mayence ; tout ce que ce régiment a à Danzig doit être compté comme appartenant au 5e bataillon, et l’on doit compléter entièrement avec des compagnies tirées du 5e bataillon ses 1er, 2e, 3e, 4e et 6ebatail­lons , s’il y a suffisamment d’officiers pour tous ces cadres ; sinon, supprimer le 6e bataillon et ne réorganiser que les quatre premiers. Ces quatre bataillons devront, lorsqu’ils seront bien formés, être dirigés sur l’armée.

Le 29e léger a deux bataillons au 1er corps d’observation du Rhin ; le 3e et le 4e bataillon peuvent-ils aussi y être envoyés ?

Les deux bataillons du 44e, du 51e, du 43e et du 55e sont, je crois, tous destinés à la 4e division du 2e corps d’observation du Rhin. Il me semble que ces cadres ont été nouvellement formés; car, s’ils avaient été vieux, il aurait été convenable de les compléter sur-le-champ à Mayence avec ce qui se serait trouvé disponible de conscrits des quatre années dans quelque régiment voisin.

Le 8e et le 18e d’infanterie légère doivent avoir leurs 2e bataillons complétés et réunis à Mayence : on en pourrait former un régiment provisoire qui serait attaché à la 4e division du 2e corps d’observa­tion du Rhin ; les deux autres bataillons de ces régiments, devant être complétés avec la conscription de 1814, suivraient après leur destination.

Il y a dans les 5e, 11e, 79e et 81e de ligne 12 à 1500 conscrits des quatre années qu’on pourra retirer pour les diriger sur Mayence, où l’on s’en servirait pour compléter les régiments provisoires ou les régiments formés de cohortes qui seraient les plus faibles.

Je vous ai fait connaître mes intentions pour les régiments de la marine; je vous ai fait connaître également mes intentions pour que ce qu’il y a de disponible aux dépôts des différents régiments de cohortes rejoigne ces régiments et se dirige sur Mayence.

CORPS D’ITALIE,

Les six régiments qui sont en Italie doivent avoir chacun trois bataillons outre leur bataillon de dépôt. Il est nécessaire que vous vous assuriez que le colonel et le major sont présents, et que vous soumettiez à ma nomination les propositions pour toutes les places vacantes.

Ces dix-huit bataillons avec ceux du 112e avec ceux qu’on laisse pour la garde du Piémont et de Rome et ce que pourra fournir le royaume d’Italie, feront quarante à cinquante bataillons vers le mois de septembre; ce qui pourrait être d’une grande utilité.

LEVÉE DES QUATRE ANNÉES.

Je viens de lever 80,000 hommes, mon intention est qu’ils soient répartis sur tout l’Empire, mais que la Hollande, la 32e division militaire et les départements d’Italie soient mis en réserve ; ce qui réduira la levée actuelle à 60,000 hommes.

Voici l’emploi que je compte faire de ces 60,000 hommes.

24,000, les plus près de Paris et de Mayence, seront pris pour ma Garde, ce qui, avec les 6,000 de la conscription de 1814, fera 30,000 hommes, avec lesquels je recruterai seize régiments de la jeune Garde.

Pour le surplus, je désire, 1° que les régiments de la 1e division aient leurs 5e bataillons complets; 2° que l’on complète bien tous les cadres qui arrivent d’Espagne et pour lesquels la conscription de 1814 ne suffirait pas.

La conscription de 1814 fournissait 12,000 hommes à la Garde; mais comme la Garde ne prend plus que 6,000 hommes sur cette
conscription, ce sera 6,000 hommes qui vont devenir disponibles et que l’on pourra verser dans les régiments qui en auront besoin. L’im­portant est que vous me proposiez de verser cette levée dans de bons cadres ; je la verserais volontiers dans des régiments composés de cohortes, mais je crois que l’administration y est bien peu expéri­mentée et que les cadres en sont bien neufs.

Enfin le 120e, le 119e, le 118e, le 117e, le 116e, le 115e et le 114e qui ont leurs dépôts près des Pyrénées et sont plus spécialement destinés à recruter l’armée d’Espagne, le 143e, le 34e léger et le 31doivent être portés à leur grand complet, afin que cela puisse former une bonne réserve pour Bayonne et pour l’armée d’Espagne.

Paris, 2 avril 1813.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Magdebourg.

Mon Fils, j’ai donné ordre que tout ce qui vous serait envoyé, soit détachements, soit habillements, soit artillerie, etc., fût dirigé par Wesel : il faut donc que ce soit sur Wesel que vous envoyiez chercher tout ce qui vous est nécessaire. Faites-le savoir à l’intendant et au général d’artillerie. Tout ce que vous envoyez en France doit éga­lement passer par Wesel, ainsi que tout ce que vous en recevrez.

J’ai ordonné que les compagnies que les 1er bataillons des vingt-huit régiments de la Grande Armée ont dans les places de l’Oder fussent désormais comprises au 5e bataillon et remplacées au 1er ba­taillon par des compagnies tirées du 5e.

Indépendamment des vingt-huit 4e bataillons, formant la 2e division et la 5e que les généraux Dumonceau et Dufour commandent sous les ordres du général Vandamme, qui est déjà à Bremen, deux nouvelles divisions, composées des 1er bataillons des mêmes vingt-huit régiments, se mettent en marche pour se rendre à Wesel, et, dans le courant de mai, elles seront suivies de deux autres divisions, composées des 3e bataillons de ces régiments.

Ainsi le 1er corps aura : sa 1e division composée de seize 2e bataillons; sa 2division, de seize 4e bataillons; sa 3e division, de seize 1er bataillons; et sa 4e division, qui sera la 3e bis de la Grande Ar­mée, composée de seize 3e bataillons, au total soixante-quatre batail­lons. Vous sentez bien qu’aussitôt qu’on le pourra il faudra réunir les régiments, et chaque division deviendra alors composée de quatre régiments, comme avant la campagne. Notez bien que, sur ces soixante-quatre bataillons, les seize de la 1e division sont sur l’Elbe, les seize de la 2e division ont déjà passé Wesel, et les seize de la 3e division auront dépassé le Rhin avant le 15 avril. Quant aux seize de la 3e division bis, ce ne sera guère avant la fin de mai qu’ils entreront en Allemagne.

Le 2e corps aura : la 4e division, composée de ses douze 2e bataillons, qui sont à Magdeburg; la 5e division, composée de ses douze 4e bataillons, qui ont dépassé Wesel, et la 6e division, composée de ses douze 1er bataillons, qui sont en ce moment en marche sur Wesel; enfin ses douze 3e bataillons, qui seront incorporés dans les trois divisions. Quand on pourra, on formera chaque division à trois régiments. Il s’ensuit que dans ce moment les seize bataillons de la 2e division, les douze bataillons de la 5e, les seize bataillons de la 3e et les douze bataillons de la 6e, au total cinquante-six bataillons, sont en route pour la 32e division militaire, plus la brigade de Ham­bourg, composée de cinq bataillons tirés des 3e, 105e et 29e; ce qui porte ce corps à soixante et un bataillons.

J’ai envoyé le général Lemarois à Wesel pour y commander la place et toute la 25e division militaire.

Les Anglais n’ont pas un homme à débarquer; tous leurs efforts sont en Portugal et dans le Canada. Les Suédois s’occuperont proba­blement de la Poméranie.

 

Paris, 2 avril 1813.

Au général comte Fontanelli, ministre de la guerre et de la marine du royaume d’Italie, à Milan

Je désire que vous m’envoyiez l’état de situation de mon armée du royaume d’Italie au 1er avril. Vous m’y ferez connaître où se trouve chaque bataillon de chaque régiment, en distinguant ceux qui faisaient partie du 4e corps de la Grande Armée, et dont les restes de cadres doivent être rentrés en Italie pour se reformer; les six bataillons qui sont encore à la division Grenier et en bon état ; enfin les bataillons qui font partie du corps d’observation d’Italie sous les ordres du gé­néral comte Bertrand. Ceux-ci étant au nombre de 13, et ceux qui sont à la division Grenier au nombre de six, il y a donc dix-neuf bataillons italiens à la Grande Armée. Je désire que vous paissiez envoyer au corps d’observation d’Italie trois autres bataillons, de ma­nière à porter sa division italienne à seize bataillons. Vous prendrez, à cet effet, les trois bataillons le plus tôt prêts. Il me semble qu’il avait été déjà convenu de prendre les deux bataillons de la garde de Milan, Indépendamment de cela, il y a les bataillons qui étaient au 4e corps qui sont rentrés en Italie et qui sont à reformer. Au moyen de cette augmentation de trois bataillons, il y aurait à la Grande Armée vingt-deux bataillons italiens, c’est-à-dire la valeur de quatre régiments et demi. Vous me ferez connaître ce qu’il y a en Espagne et tout ce qui restera en Italie, ainsi que les moyens que vous avez pour reformer les cadres, et les moyens que vous avez en soldats pour les recompléter. Vous me ferez aussi connaître combien de bataillons organisés il y aura en Italie à la fin de mai ou au mois de juin, sans compter les 5e bataillons. Il y aura probablement un incomplet provenant des grandes pertes éprouvées à la Grande Armée. Faites-moi connaître quels sont les moyens qui existent pour pourvoir à cet incomplet.

L’armée d’Italie se trouvera donc divisée en trois fractions : 1° ce qui est à la Grande Armée ; 2° ce qui est à l’armée d’Espagne ; 3° les troupes restant en Italie. Cette dernière fraction sera subdivisée en deux, en mettant à la deuxième partie ce qui sera- dans l’île d’Elbe, à Corfou et à Raguse. Pour les régiments de cavalerie, il y a deux régiments de dragons; un est déjà parti, ainsi qu’un régiment de chasseurs. Il est resté quelques cadres et quelques compagnies des autres régiments qui étaient au 4e corps ; il s’agit de les reformer. Faites-moi connaître quand ces régiments le seront, et quand il pourra partir pour la Grande Armée deux nouveaux régiments de cavalerie, un de chasseurs et un de dragons ; en sorte qu’il y ait à la Grande Armée cinq régi­ments de cavalerie italienne, savoir, deux de dragons et trois de chas­seurs, en y comprenant le 4e de chasseurs, où on réunira les déta­chements de tous les autres régiments. Il restera donc en Italie un régiment de chasseurs. Faites-moi connaître, par la même occasion, combien d’hommes et de chevaux ont produit les dons volontaires et quel a été leur emploie L’état de la cavalerie du royaume d’Italie étant de quatre régiments de chasseurs et de deux de dragons, cela fait 6,000 hommes. On peut compter qu’il y en a 3,000 à la Grande Armée, en y comprenant le corps d’observation d’Italie; il y aura donc encore 2,000 hommes à fournir à la Grande Armée.

Présentez-moi aussi dans la même forme les états pour l’artillerie.

Enfin faites-moi un rapport sur la garde, afin de me faire connaître les moyens qu’il y a de commencer sa réorganisation.

 

Paris, 2 avril 1813.

Au général comte Fontanelli, ministre de la guerre et de la marine du royaume d’Italie, à Milan

Je vous ai fait connaître dans quel état je désirais avoir un rapport sur la situation de mon armée d’Italie au 1er avril. Je désire avoir dans le courant de juin deux divisions françaises de seize bataillons chacune, savoir : dix-huit bataillons des six régiments qui se reforment en Italie, à raison de trois bataillons par régiment, treize bataillons qui viendront du Piémont, et un bataillon du 112e; ce qui fait trente-deux bataillons ; et une 3e division italienne, également de seize ba­taillons ; deux régiments de cavalerie italienne et un régiment fran­çais, faisant 3,000 chevaux; enfin l’artillerie nécessaire à ce corps d’armée, qui sera de 40 ou 50,000 hommes, sans compter tous les 5e bataillons qui tiendront garnison dans les places. Faites-moi un rapport sur les moyens d’arriver à ce résultat. Les six régiments français doivent déjà être nombreux, et ils seront complétés au moyen de la nouvelle conscription que je lève. On pourvoira insensiblement aux cadres.

 

Paris, 3 avril 1813.

Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris.

L’École de médecine reste depuis longtemps sans être terminée : présentez-moi un projet pour achever la place et les galeries qui complètent cet ensemble; on pourra y employer 500,000 francs, afin d’achever tout cela cette année.

 

Paris, 4 avril 1813.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, je vous renvoie la correspondance. Présentez-moi dans la journée quelqu’un pour remplacer le sieur de Moustier; il cherche à m’indisposer contre le roi de Wurtemberg en mettant ses passions à la place de la vérité. J’ai peine à croire au propos que le roi aurait tenu. Tâchez de faire une enquête là-dessus. Si le sieur de Moustier m’avait manqué à ce point, il mériterait d’être puni. Toutefois il faut le remplacer. Proposez-moi son successeur, et qu’il parte sur-le-champ.

Vous passerez une note officielle au ministre de Wurtemberg qui est ici, dans laquelle vous lui ferez connaître : 1° que dans le projet de contingent il n’y a que trois régiments de cavalerie au lieu de quatre, que deux bataillons d’infanterie légère au lieu de quatre, et que quatre régiments d’infanterie au lieu de cinq ; que je demande que le 4e régiment de cavalerie et le 6e d’infanterie de ligne, du Prince Royal, soient réunis à ce contingent et le portent à 12,000 hommes; 2° que le contingent manque d’artillerie, et que, si c’est par défaut de matériel, le roi peut en demander, que je lui donnerai toutes les pièces qu’il voudra; 3° que je désire formellement qu’au moins deux régiments de cavalerie partent avant le 15 avril pour rejoindre à Würzburg le corps du prince de la Moskova, que c’est indispensable, et que les deux autres régiments y arrivent avant la fin du mois ; que je n’admets pas de délai là-dessus ; que j’attends cette preuve du zèle du roi, et qu’il ne voudrait pas sans doute me fournir son contingent quand les affaires seraient décidées. Vous me remettrez copie de ce tableau comparatif du contingent de Wurtemberg, et vous m’en remettrez un semblable des contingents de Bavière, de Bade et de Hesse-Darmstadt.

Passez une note au ministre de Bade pour lui demander le 2e régi­ment de dragons ; que j’ai besoin de cavalerie, et que 500 chevaux ne sont pas indifférents. Donnez des instructions à ce sujet à mon chargé d’affaires. Il faut que cela réussisse et que ce régiment parte pour Würzburg. Faites dire en Bavière, à Stuttgart et à Bade, que, si on a besoin pour la police du pays et pour contenir le Vorarlberg d’une brigade de cinq à six bataillons français de ma réserve, formant 4 à 5,000 hommes, je les leur fournirai; j’en payerai la solde; ils ne seront tenus qu’à les nourrir ; que cela m’est facile, vu que je réu­nis une forte réserve pour parer à tout événement.

Je suppose que vous avez passé à M. de Just la note que je vous ai ordonnée. La correspondance de M. de Serra ne me satisfait pas : il ne montre pas l’activité qu’il faudrait dans ces circonstances, et il n’a pas fait ce qu’il fallait pour empêcher les militaires saxons de dé­sobéir. J’attends désormais plus de zèle de sa part. Demandez par un courrier que toute la cavalerie saxonne qui accompagne le roi soit mise à la disposition du prince de la Moskova; que ces 1,200 chevaux nous feront le plus grand bien et sont inutiles au roi.

Écrivez à M. de Saint-Marsan qu’il revienne sur-le-champ. Rendez-moi compte des courriers que M. de Krusemark (ministre de Prusse à Paris) a envoyés; je vous avais défendu de lui donner des passeports ; cependant je vois qu’il en a expédié beaucoup. Il faut que M. de Krusemark parte avant lundi : c’est un espion qu’il est inutile d’avoir ici. Faites auparavant partir votre courrier pour rappeler M. de Saint-Marsan. Vous pour­rez laisser aller le secrétaire de la légation jusqu’à Strasbourg ; mais vous donnerez des ordres pour qu’on le retienne à Strasbourg. Dans la dernière conférence que vous aurez avec M. de Krusemark, dites que M. de Hardenberg ne tient aucune de ses promesses, qu’il avait promis qu’on n’écrirait rien, et que cependant on a beaucoup écrit ; qu’il paraît que le roi n’est plus maître de rien. Je tiens à ce que lundi, à midi, il soit parti.

Faites une circulaire à mes ministres dans la Confédération en leur envoyant le Moniteur, pour qu’ils le communiquent officiellement, et qu’on renvoie les ministres de Prusse.

Écrivez à Karlsruhe pour qu’on arrête cet espion qui est signalé de Weimar.

 

Paris, 4 avril 1813.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, vous trouverez ci-jointe une lettre du général Durutte. Il est incroyable que le roi de Saxe abandonne ainsi son pays à quelques Cosaques et n’utilise pas sa cavalerie, qui pourrait le défendre. Les Saxons se conduisent bien mal. Demandez que ce régiment saxon, s’il n’a pas rejoint la division Durutte, re­joigne au moins le prince de la Moskova.

 

Paris. 4 avril 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Non-seulement j’approuve vos conclusions pour ne pas lever la conscription en Hollande, mais je désire que vous écriviez à tous les préfets des 17e et 32e divisions, de Rome et de la Toscane, que j’ai mis en réserve la portion qu’ils devaient fournir dans les 80,000 hom­mes que je dois lever, et que je suis disposé à en exempter les dépar­tements réunis. Quant au Piémont, il faudra suspendre encore cette mesure.

 

Paris, 4 avril 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, mon intention est qu’il soit préparé pour le 1er juin un second corps d’observation d’Italie, qui se réunira à Vérone. Ce corps sera composé, 1° de vingt-quatre bataillons des six régiments de la Grande Armée; 2° du 6e bataillon du 112e de ligne; de deux bataillons croates; de douze bataillons tirés des ba­taillons qui font partie des demi-brigades provisoires qu’on forme des Piémontais qui sont delà conscription de 1814; de quatre batail­lons d’élite, deux de chaque régiment étranger ; du reste du contin­gent de Naples; du 8e bataillon du 14e léger; du 8e bataillon du 6e de ligne. Cela fera trois divisions, chacune de trois brigades, ou quarante-huit bataillons; plus une division de l’armée d’Italie, de seize bataillons; total, soixante-quatre bataillons.

Cavalerie. La cavalerie se composera de deux régiments de cava­lerie légère italienne, de deux régiments de cavalerie légère napolitaine et de quatre escadrons des 13e, 14e de hussards et 19e de chasseurs (le dernier est à former), total, 4,000 chevaux.

Artillerie, L’artillerie sera composée de six divisions à pied fran­çaises, chaque division formée de seize pièces; deux divisions à pied italiennes ; deux batteries à cheval françaises ; une batterie à cheval italienne; deux batteries de réserve; total, équipage français, 96 bou­ches à feu; équipage italien, 22 bouches à feu; total général, 118 bouches à feu.

Génie. Le génie se composera d’une compagnie de sapeurs français et d’une compagnie de sapeurs italiens.

Équipages militaires. Six compagnies serviront 600 voitures à la comtoise.

Présentez-moi toutes mes ressources pour la formation de cette armée. La conscription de 1811, celle que je viens de lever, seront employées pour cela.

Il sera également réuni, à la un de mai, un corps d’observation à Wesel et un autre à Mayence. Celui de Mayence sera composé de quarante-huit bataillons recrutés par la conscription de 1814, réunis en régiments provisoires et formant trois divisions de seize batail­lons chacune. Dans la formation des demi-brigades provisoires, il entre trente-cinq de ces bataillons; il pourrait aussi en arriver d’Espagne; vous y comprendrez douze bataillons de la brigade d’Erfurt. Ces quarante-huit bataillons seront partagés entre les trois divisions.

La cavalerie sera formée de trois divisions de marche des 1e, 2et 3e corps, composées de ce que les régiments pourront faire partir de leurs dépôts; cela fera 6,000 cavaliers.

Le corps de Wesel sera composé des vingt-huit 1er bataillons de la Grande Armée et des vingt-huit 3e; total, cinquante-six. Cela formera trois divisions; savoir : la 3e, la 3e bis et la 6e de la Grande Armée.

La cavalerie sera composée d’une division de marche du 1er corps, formée également des détachements que pourront fournir les ré­giments.

L’artillerie sera composée de 92 bouches à feu par corps, avec un simple approvisionnement.

Ainsi j’aurai en réserve, dans le courant de juin, trois corps composés de jeunes conscrits, qui, réunis, contiendraient l’Allemagne, et à tout événement assureraient les frontières. Les gardes nationales garderaient les côtes, avec les 5e bataillons, hormis les bataillons laissés en Bretagne et en Italie.

 

Paris, 4 avril 1813.

Au général comte Bertrand, commandant le 4e corps de la Grande Armée, à Augsburg

Monsieur le Comte Bertrand, je viens de lire l’état de situation de votre 3e division. Il est nécessaire que vous nommiez à toutes les places d’officiers, de manière qu’il n’en manque aucun. Comme on ne peut pas vous fournir des sous -lieutenants, si vous n’en avez point, faites pour le mieux; pourvoyez à toutes les places, puisque vous avez des sous-officiers; n’attendez rien du ministre pour les grades inférieurs, ni un plus grand nombre de sous-lieutenants de Fontainebleau que celui qui vous a été annoncé.

Je suis surpris que le colonel du 52e ne soit pas encore arrivé.

Je suppose que les deux régiments formés de cohortes ont changé ceux de leurs effets qui n’étaient pas à l’uniforme de la ligne. S’ils ne l’avaient pas fait, ordonnez-leur de faire ces changements à Nurem­berg ou à Augsburg. Ordonnez qu’ils composent leur musique, et faites-leur avoir des sapeurs, à raison de quatre par bataillon, en ayant soin qu’il leur soit donné de bonnes bâches. Veillez surtout à ce qu’ils se pourvoient de bons chevaux ou mulets de bât, pour porter les ambulances, la caisse et les bagages des officiers.

Vous ne me parlez pas des généraux de brigade ni des adjudants-commandants qui sont à votre corps d’armée.

 

Paris, 4 avril 1813.

Au général comte Lemarois, commandant la 25e division militaire, à Wesel.

Monsieur le Comte Lemarois, le général Dombrowski arrive dans le grand-duché de Berg avec 3 à 4,000 hommes en mauvais état; aussitôt qu’ils seront arrivés, établissez-les sur un bon point, en sorte que ces hommes, bien habillés, bien nourris et bien montés, puissent entrer en campagne.

 

Paris, 4 avril 1813.

Au général comte Lemarois, commandant la 25e division militaire, à Wesel.

Monsieur le Comte Lemarois, trente-six compagnies fournies par les 5e bataillons des régiments qui ont un bataillon à la 30e division, et dix compagnies fournies par les 5e bataillons des régiments qui composent la 31e division, formant un total de quarante-six com­pagnies, devaient former une division sous le titre de Réserve des divisions réunies. Je suppose que vingt-quatre de ces compagnies sont déjà arrivées à Wesel : formez-en quatre bataillons et tenez-les à Munster, à Wesel, et, si vous voulez, dans le grand-duché, jusqu’à ce que vous m’en ayez envoyé l’état et que je vous aie fait passer de nouveaux ordres, sans les envoyer dans la 32e division militaire, où ces compagnies morcelées se perdraient. De ces quatre bataillons on peut faire une fort belle réserve pour Munster.