Correspondance de Napoléon – Mars 1813

Mars 1813

 

Paris, 1er mars 1813

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris.

Monsieur le Duc de Bassano, je désire que vous écriviez à Hesse-Darmstadt pour que le régiment de cavalerie hessoise, et à Bade pour que le régiment badois, se rendent sans délai à Aschaffenburg, où ils seront sous les ordres du général Souham.

 

Paris, 1er mars 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous ai fait connaître, par ma lettre du 26 février, les dispositions générales à prendre pour la formation de la cavalerie de la Grande Armée ; mais la saison s’avance, et il est indispensable de porter sur nos frontières le plus grand nombre de cavalerie possible.

Je désire donc que les huit régiments de cavalerie légère qui forment la 1e division du 1er corps de cavalerie (division Bruyère) fassent partir le plus tôt possible de leurs dépôts un escadron com­plété à 250 hommes bien montés, bien équipés et bien habillés ; ce qui portera cette division à 2,000 hommes; et, comme il est possible que les dépôts ne puissent pas d’abord faire partir un escadron, vous ordonnerez qu’ils fassent du moins partir une compagnie, bien com­plétée en officiers et sous-officiers et forte de 125 hommes. On formera de ces huit compagnies un régiment provisoire, qui se réunira à Wesel.

Vous ordonnerez la même chose pour la 3e division de cavalerie légère; ce qui réunira huit escadrons ou 2,000 hommes, et provi­soirement huit compagnies ou 1,000 hommes, qui se formeront de même à Wesel.

La le division de cuirassiers, qui est composée de six régiments, recevra de chaque dépôt un escadron de 200 hommes, bien montés, bien habillés et bien équipés; les dépôts feront d’abord partir une compagnie de 100 hommes; ce qui fera 600 chevaux de grosse cavalerie.

Enfin les trois régiments de cuirassiers et les quatre de dragons qui forment la division Doumerc feront partir également un escadron, et, en attendant, une compagnie; ce qui fera d’abord 700 hommes.

Ces quatre régiments de marche feront 3,300 hommes et seront réunis à Wesel. Vous nommerez un général de division ou un géné­ral de brigade pour les commander, et vous désignerez quatre colonels ou majors pour le commandement de chacun des régiments.

Les régiments qui ne feront partir qu’une compagnie feront con­naître quand la seconde pourra partir pour porter le 1er corps de cavalerie à 6,600 hommes.

Vous donnerez le même ordre pour la 2e division de cavalerie légère du 2e corps de cavalerie. Cette 2e division est forte de six ré­giments; ce qui fera six escadrons, et en attendant six compagnies ou 750 hommes. Vous donnerez le même ordre pour la 4e division de cavalerie légère, composée de sept régiments ; ce qui fera provi­soirement 875 hommes. Enfin vous donnerez le même ordre aux ré­giments de la division de cuirassiers qui est sous les ordres du géné­ral Wattier; ses six régiments fourniront d’abord six compagnies de 100 hommes. Ce qui fera pour le 2e corps de cavalerie un total de 2,225 chevaux.

Les dépôts feront connaître également quand les secondes com­pagnies pourront rejoindre et porter le 2e corps de cavalerie à 4,450 hommes.

Ces régiments de marche seront sous les ordres d’un général de division ou d’un général de brigade, et seront commandés par trois majors ou colonels. On les réunira à Mayenne. Chacun de ces régi­ments de marche prendra le nom de régiment de marche de sa divi­sion, et aura, indépendamment de ce, un numéro d’ordre, pour éviter toute méprise.

Vous donnerez ordre que le 3e corps de cavalerie se forme à Metz.

Les huit régiments qui composent la 1e division de cavalerie légère y enverront chacun un escadron, hormis le 13e de chasseurs qui en enverra deux; et, en attendant, ils enverront chacun une compa­gnie, hormis le 13e qui enverra deux compagnies; ce qui fera 1,125 hommes.

La 2e division de cavalerie légère du même corps est composée de neuf régiments. Chacun de ces régiments enverra également une compagnie, en attendant qu’il puisse envoyer un escadron; ce qui fera de même 1,125 hommes.

Ainsi de suite pour les autres divisions.

Nommez un général de division et deux généraux de brigade pour commander les régiments de marche de ce 3e corps.

Faites-moi connaître quand ces corps seront réunis à Wesel, Mayence et Metz, et quand les secondes compagnies partiront pour former l’escadron; enfin quand on pourra faire partir un autre escadron.

Le 3e corps, composé des escadrons d’Espagne, doit être définitif. Les autres escadrons, au contraire, devront s’incorporer dans leurs régiments respectifs qui sont à la Grande Armée.

Napoléon

  1. S. Donnez ordre au duc de Plaisance de prendre provisoirement le commandement de toute la division de cavalerie composée des détachements des quatre divisions d’Espagne; il suivra tous les détails de leur formation, et, quand cela sera nécessaire, il portera son quartier général à Metz.

 

Paris, 1er mars 1813.

Au général Duroc, duc de Frioul, grand maréchal du palais, à Paris.

Je vois par votre travail sur l’infanterie de la Garde que le complet est de 36,000 hommes; que l’effectif actuel est de 18,600; que le manquant est de 17,400, et que les ressources, comprenant les deux conscriptions et ce qui doit arriver d’Espagne, sont de 24,000 hom­mes. Il y aura donc 6,000 hommes de plus qu’il ne faudra; ce qui mettra bien tous les cadres au complet.

Je vois également dans ce travail qu’il y a un grand nombre d’of­ficiers surnuméraires, tant dans les grenadiers que dans les chasseurs, savoir : neuf chefs de bataillon, vingt capitaines, vingt lieutenants et quarante sous-lieutenants. Mon intention est d’employer tous ces of­ficiers dans la ligne; faites-moi un projet de décret qui leur donne le grade pour lequel ils sont propres. Ils partiront sur-le-champ en poste pour Magdeburg, où le général Lauriston les placera dans les cohortes qui en ont besoin ; ceci est d’une grande importance.

Je n’adhère pas au désir qu’a le général Curial de conserver des officiers surnuméraires. Je ne veux avoir que le nombre d’officiers strictement nécessaire pour les cadres; s’il le faut par la suite, ou je ferai des avancements, ou je ferai venir des officiers d’Espagne; mais c’est aujourd’hui une ressource précieuse que de pouvoir disposer de ces officiers surnuméraires, qui sont la plupart capables d’être faits chefs de bataillon, dont les cohortes manquent entièrement.

Présentez-moi ce travail le plus tôt possible.

 

Paris, 1er mars 1813.

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, j’ai approuvé le compte que vous avez arrêté avec le maître des requêtes la Bouillerie, d’où il résulte que le sieur la Bouillerie vous donne : 1° 8,200,000 francs qui sont dus à la liste civile; 2° 10 millions qui sont dus à la liste civile pour le reste de l’année; 3° 6 millions pour différents comptes d’intérêt; 4° et enfin 10 millions en argent; ce qui équivaut à une somme de 34,200,000 francs qui serait sortie du trésor; ce qui, avec les 10 millions de plus que vous avez demandés hier, portera le total à 44,200,000 francs.

 

Paris, 1er mars 1813.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, je désire que vous écriviez à mes chargés d’affaires près les différents princes de la Confédération pour qu’il ne soit question d’aucun mouvement de troupes françaises dans leurs journaux. La Gazette de Francfort, entre autres, rend compte de tous les passages ; cela a le plus grand inconvénient.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris.

Comme je vais me rendre bientôt à Bremen, à Munster, à Osnabrùck et à Hambourg, écrivez dans ces différentes villes pour qu’on y prépare mon logement et une garde d’honneur. Il ne faut cependant pas que mon logement coûte rien au pays.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général Savary, duc de Rovigo, ministre de la police générale, à Paris.

Faites mettre dans les petits journaux qu’on assure que l’Empereur va se rendre à Anvers, où il visitera son escadre; qu’il ira ensuite à Amsterdam, qu’il visitera le Helder et l’escadre du Texel; qu’il ira a Groningen, Munster, Osnabrück, Bremen et Hambourg, et que de cette dernière ville il portera son quartier général à Magdeburg.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, donnez ordre au général Lapoype de se rendre à Spandau pour y prendre le commandement de la place. Faites-lui connaître que je compte sur lui pour cette place importante; qu’il la mette en état, l’approvisionne et n’écoute rien; qu’il ait soin de se munir d’un chiffre avec le vice-roi.

Présentez-moi des lettres qui nomment gouverneur de Magdeburg le général de division Haxo. IL sera chargé de la défense de la place et de tout ce qui est relatif au commandement et à l’approvisionnement. Si cette place venait à être cernée, il aurait, indépendamment des officiers du génie et d’artillerie, quatre ou cinq compagnies d’artillerie, une de sapeurs et deux divisions d’infanterie composées des bataillons d’Erfurt. Les deux généraux de division et les quatre généraux de brigade formeraient la garnison de la place; on y mettrait le nombre de chevaux qu’il jugerait utile. Faites connaître ces dispositions au vice-roi.

Le général Michaud restera jusqu’à nouvel ordre à Magdeburg, pour mettre bien au fait le général Haxo ; il y aura le commandement en second, le général Haxo ayant les lettres de gouverneur. Cepen­dant, si la place était investie, le général Michaud n’y resterait point. Vous ferez connaître au général Haxo que, le cas arrivant, il aura la plus grande latitude. Je pense qu’il est convenable que ce général soit rendu à Magdeburg vers le 10. Vous lui ferez connaître d’ailleurs qu’il sera là à portée de suivre Farinée, où je l’emploierais convena­blement à la confiance que j’ai en lui, aussitôt que nous aurions dé­passé l’Oder et que Magdeburg ne serait plus menacé.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Nos dépôts s’encombrent d’hommes hors de service. Il serait con­venable d’envoyer six inspecteurs faire des tournées, tant pour réfor­mer les hommes hors de service et accorder la retraite à ceux qui doivent la recevoir, et désencombrer ainsi les dépôts, que pour veiller à la formation, conformément à mes ordres, des 4e bataillons des vingt-huit régiments de la Grande Armée; ils activeront cette for­mation et feront connaître quand les bataillons pourront partir.

Il faut faire partir de même quatre inspecteurs de cavalerie pour veiller à la réorganisation des escadrons qui doivent partir pour la Grande Armée.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au colonel Bernard, aide de camp de l’empereur, à Paris.

Rendez-vous auprès du prince de Neuchâtel pour prendre des renseignements sur les chiffres qui existaient à la dernière campagne, et savoir si le vice-roi en a un. Comme je crains que l’ennemi n’ait ces chiffres, je désire les changer. Vous me ferez un rapport là-des­sus, je désirerais avoir deux espèces de chiffres, un chiffre de l’état-major de l’armée avec les différents commandants des corps, un chiffre de moi avec les commandants de l’armée pendant le temps que je suis absent.

Vous m’apporterez le chiffre qu’aura le vice-roi, puisqu’on sera obligé de chiffrer beaucoup, à cause des partis de Cosaques.

 

Paris, 2 mars 1813.

INSTRUCTIONS POUR LE CAPITAINE LAPLACE, OFFICIER D’ORDONNANCE DE L’EMPEREUR, A PARIS.

Vous vous rendrez en toute diligence, et en voyageant jour et nuit, à Karlsruhe. Vous irez trouver le grand-duc où il sera, et vous lui remettrez la lettre ci-jointe. Vous y resterez douze heures, et vingt-quatre s’il le faut, afin de m’envoyer l’état des troupes qu’il fera partir pour Würzburg, infanterie, cavalerie et artillerie. Vous l’engagerez à faire partir de bonnes troupes et surtout de la cavalerie. Vous m’é­crirez de Karlsruhe.

De là vous vous rendrez à Stuttgart, où vous remettrez la lettre ci-jointe au roi, et d’où vous me ferez passer les mêmes renseigne­ments.

Vous irez ensuite à Munich, où vous porterez au roi la lettre ci-jointe.

De là vous vous rendrez à Kronach, pour vous assurer de la si­tuation de cette place, et, par une estafette extraordinaire, vous m’informerez de l’état des choses.

De là vous vous rendrez à Würzburg : vous verrez la citadelle, et vous m’informerez également de sa situation.

De là vous irez et viendrez à Bamberg, Bayreuth et Kronach, pour connaître les progrès que fait la réunion des troupes bavaroises qui doivent se former sur ces trois points.

Les Wurtembergeois, les Hessois et les Badois doivent se réunir à Würzburg. Il est urgent que la place de Kronach et la citadelle de Würzburg soient approvisionnées, armées et mises à l’abri d’un coup de main.

Vous m’écrirez tous les jours et vous attendrez mes ordres dans cette situation.

Lorsque les Bavarois et les Wurtembergeois seront à peu près réunis, vous en informerez le vice-roi, qui est à Berlin, et le général Lauriston, qui est à Magdeburg, par des courriers extraordinaires.

Napoléon.

  1. S. Dans les lettres que vous m’écrirez tous les jours, vous aurez soin d’insérer tout ce qui pourra m’intéresser. Soyez parti demain, 3 mars, avant le jour.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 1er corps de la Grande Armée, à Magdebourg

Mon Cousin, j’ai donné ordre au vice-roi de réunir les seize bataillons de votre corps d’armée qui sont formés à Erfurt, à Wittenberg, où je désire que vous vous rendiez. Organisez le plus tôt pos­sible pour ce corps deux batteries d’artillerie.

Je donne ordre que la division du 2e corps, forte de douze batail­lons, qui se forme à Erfurt, se réunisse à Dessau. Si le duc de Bellune était employé ailleurs, vous prendriez aussi le commandement de cette division. Il est nécessaire qu’elle ait également deux batteries d’artillerie. Par ce moyen, les ponts de Dessau et de Wittenberg seraient gardés, ainsi que tout l’espace entre Magdeburg et Torgau. Le roi de Saxe a pourvu à la défense de cette dernière place, sur laquelle cependant vous exercerez votre surveillance.

Votre division doit avoir un bon général de division et trois bons généraux de brigade. Faites tout ce qui sera possible pour la bien organiser. Faites exercer les troupes.

Une seconde division de seize bataillons, composée des 4e batail­lons du même corps d’armée, part dans le courant de mars ; ce qui complète le 1er corps à deux divisions. Cette division devra aussi avoir deux batteries.

Il part également douze 4e bataillons pour le 2e corps.

Wittenberg a des portes ; ainsi il est à l’abri d’un coup de main, au moins contre les Cosaques et une avant-garde. Je suppose qu’on n’y a rien dérangé depuis la campagne de Prusse.

S’il arrivait que les ennemis obligeassent le vice-roi à repasser l’Elbe et s’avançassent en Allemagne, mon intention est que la divi­sion du 1er corps et celle du 2e et tout ce qui est organisé forment la garnison de Magdeburg, dont j’ai nommé gouverneur le général de division Haxo. Dans ce cas, vous suivriez le corps de l’Elbe et l’armée du vice-roi, mon intention étant que celte armée se dirige sur Cassel pour défendre le Weser, en prenant sa ligne d’opération sur Wesel. Je désire que vous m’écriviez directement et tous les jours de Wittenberg.

La citadelle de Würzburg et celle de Kronach se mettent en état de défense. 15,000 Bavarois se portent à Bamberg, Bayreuth et Kronach ; les Wurtembergeois, les Hessois et les Badois se portent à Würzburg.

Le prince de la Moskova sera le 10 à Francfort, avec le 1er corps d’observation du Rhin, fort de soixante bataillons.

Je n’ai pas besoin de vous dire qu’il faut porter le plus grand soin à discipliner les troupes, à faire faire l’exercice à feu, tirer à la cible, et former des colonnes d’attaque et des bataillons carrés contre la cavalerie.

Le corps d’observation d’Italie, fort de 60,000 hommes et com­mandé par le général Bertrand, se met en mouvement vers le 10 mars pour se porter sur Ratisbonne.

Le duc de Trévise sera le 12 à Gotha, avec soixante pièces d’ar­tillerie de ma Garde en double approvisionnement, 2,000 chevaux de ma Garde et une division de 10,000 hommes d’infanterie aussi de ma Garde.

La citadelle d’Erfurt a été mise en état de défense; elle est à l’abri d’un coup de main. Le duc de Padoue s’y trouve, et il y a là encore plusieurs bataillons.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général comte de Lauriston, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Magdebourg.

Monsieur le Comte Lauriston, la tête de pont de Magdeburg me parait un peu en pointe. Il serait convenable de construire une ou deux redoutes de campagne entre la tête de pont et la citadelle, de manière à la bien flanquer, et que rien ne puisse s’introduire dans cet intervalle.

A la fin de mars, deux autres divisions viendront renforcer le 1er et le 2e corps. Vous entendez bien qu’il est nécessaire que la division du 1er corps qui s’assemble à Wittenberg, et celle du 2e corps qui s’assemble à Dessau, aient chacune deux batteries à pied ou seize pièces de canon.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général comte de Lauriston, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Magdebourg.

Monsieur le Comte Lauriston, vous trouverez ci-jointe une lettre pour le prince d’Eckmühl; remettez-la-lui. J’ai nommé le général Haxo gouverneur de Magdeburg; il y sera rendu vers le 10. En cas que l’ennemi poussât sa pointe sur Dresde, je vous ai fait connaître les dispositions faites relativement aux montagnes de Thuringe, pour Bayreuth, Kronach et Würzburg. Je vous ai fait connaître que le duc de Trévise sera le 12 à Gotha, avec soixante pièces de canon de ma Garde et 10 à 12,000 hommes, dont 2,000 de cavalerie. Mon intention, je ne puis que vous le répéter, est que les quatre divisions du corps d’observation de l’Elbe restent réunies à une marche de Magdeburg. Vous aurez, sur votre droite, la division du 2e corps à Dessau, le prince d’Eckmühl à Wittenberg, et les Saxons à Torgau; sur votre gauche, les Westphaliens à Havelberg. Ces derniers, s’ils craignent quelque chose, au lieu de se mettre sur la rive droite du fleuve, se placeront sur la gauche, en ayant soin de retirer tous les bateaux.

Si jamais les ennemis poussaient leur pointe sur Dresde, ou que le vice-roi crût devoir abandonner Magdeburg à ses propres forces, mon intention est que vous y laissiez quatre ou cinq compagnies d’ar­tillerie, une de sapeurs, et les deux divisions tout entières du 1er et du 2e corps, qui se réunissent à Dessau et à Wittenberg; ce qui ferait une force de plus de 16,000 hommes. Vous y laisseriez 2 ou 300 che­vaux, selon que le général Haxo le jugerait convenable; vous y lais­seriez aussi la valeur d’un régiment westphalien. Le reste, et tout votre corps avec celui du vice-roi, et sous les ordres du vice-roi, manœuvrerait pour défendre le Weser et Cassel. Il est donc néces­saire que vous preniez votre ligne d’opération sur Wesel. A cet effet, vous pouvez prendre votre ligne d’étape sur Cassel, et de Cassel sur Wesel. Le duc de Padoue reste à Erfurt, où se réunit un corps de troupes. Vous connaissez ainsi l’ensemble des mes dispositions.

N’ayant pas de chiffre en ce moment, je n’ose pas écrire ces dis­positions au vice-roi, puisque les Cosaques pourraient intercepter ma lettre. Mais, si le cas arrivait que l’ennemi se portât sur Dresde et poussât une pointe sur la Thuringe, vous devez lui faire connaître qu’il ne doit point s’en étonner; qu’il doit tenir longtemps à Torgau et à Magdeburg, puisque sa ligne d’opération ne peut pas être compro­mise, étant sur Cassel et Wesel.

Écrivez aussi dans ce sens au roi de Westphalie, pour qu’il sache les instructions que j’ai données, et qu’il y ait à Cassel des fours et une réserve en cas d’événement. Si vous avez un chiffre avec le vice-roi , faites-lui connaître cette direction générale des opérations. Bien entendu qu’il doit garder Berlin et l’Elbe aussi longtemps que cela sera possible.

J’ai nommé le général Lapoype pour commander à Spandau.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général comte de Lauriston, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Magdebourg.

Monsieur le Comte Lauriston, je reçois votre lettre du février.

Le prince d’Eckmühl doit se porter sur Wittenberg avec les vingt-huit bataillons qui doivent se réunir à Erfurt, Il est probable que, si l’ennemi avance, le général Reynier viendra se placer avec tout le contingent saxon à Torgau. Le prince d’Eckmühl doit garder non-seulement le pont de Wittenberg, mais aussi celui de Dessau, si ce dernier a été rétabli. Plusieurs bataillons doivent déjà être arrivés à Wittenberg; rappelez donc votre 134e régiment et concentrez-vous à Magdeburg. Je pense que, dans les circonstances actuelles, il est inutile que vous envoyiez une division à Brandenburg. Le principal est que vos troupes ne fassent pas de mouvements rétrogrades et soient tranquilles quelque temps pour s’organiser. Vous pouvez placer tout votre corps à une ou deux journées de Magdeburg, afin de l’avoir sous la main, et de pouvoir attendre ainsi votre artillerie et un peu de cavalerie, car sans artillerie et sans cavalerie vous seriez bien faible.

J’ai ordonné que tout le corps de Westphalie vint se réunir à Havelberg; il peut, si vous le jugez convenable, rester en grande partie derrière l’Elbe, et garder ainsi tout le bas du fleuve.

Le duc de Trévise sera rendu le 12 à Mayence et le 14 à Gotha, où toute la Garde impériale sera réunie, c’est-à-dire quarante-quatre pièces d’artillerie, avec double approvisionnement, une division de 8,000 hommes d’infanterie et 1,500 chevaux. Mettez-vous en cor­respondance avec ce maréchal.

Le prince de la Moskova sera rendu le 10 mars à Francfort avec le 1er corps d’observation du Rhin, fort de soixante bataillons.

Les Bavarois se réunissent à Bamberg, Bayreuth et Kronach. Les Wurtembergeois, les Hessois et les Badois se réunissent à Würzburg.

Tenez vos troupes réunies et ne les exposez à aucun mouvement rétrograde. Allez vous-même passer la revue des régiments qui for­ment le corps de cavalerie du général Sébastiani, qui sont sous vos ordres. Faites-moi connaître les colonels morts ou hors de service, proposez-moi des sujets pour les remplacements et prenez toutes les mesures pour activer la remonte de tous ces hommes.

Le duc de Raguse sera le 15 à Mayence avec le 2e corps d’obser­vation du Rhin, fort, comme le 1er, de soixante bataillons.

Le général Bertrand commence le 10 mars son mouvement pour se porter sur Ratisbonne.

Je ne puis que vous répéter que mon intention est qu’aucune de vos divisions ne passe l’Elbe, si elle n’a ses seize pièces de canon bien équipées, ses caissons d’ambulance, si les officiers manquant dans les corps n’ont été remplacés, si les généraux de brigade, les officiers d’état-major et ceux d’artillerie et du génie ne s’y trouvent au nombre nécessaire, et enfin si vous n’avez votre corps de cava­lerie fort au moins de 2,000 chevaux. Jusqu’à ce que vous ayez obtenu ces résultats, il faut que vos divisions restent placées à une ou deux journées de Magdeburg.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général comte de Lauriston, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Magdebourg.

Monsieur le Comte Lauriston, faites préparer mon quartier général à Magdeburg.

 

Paris, 2 mars 1813.

Au général comte Bertrand, commandant le corps d’observation d’Italie, à Trieste.

Monsieur le Comte Bertrand, recommandez aux généraux qui commandent vos divisions qu’on fasse faire aux troupes l’exercice à feu deux fois par semaine; que, deux fois par semaine, elles tirent à la cible, et enfin que trois fois elles fassent des manœuvres. On leur fera faire les colonnes d’attaque par bataillon ; on les fera charger en colonne d’attaque et en se déployant sous le feu de la première divi­sion et faisant feu tout en arrivant sur la ligne de bataille. On for­mera également la colonne d’attaque, tandis que la division du centre commence le feu de file et se déploie sous le feu de file. Après cela, on fera une charge de cent pas, buttant la charge simplement et sans fion ni variantes, et on fera faire feu de file à tous les pelotons, à mesure qu’ils viendront se placer sur la ligne de bataille. Vous ordonnerez aussi qu’on fasse souvent la manœuvre de se mettre promptement en bataillon carré, en ployant derrière les dernières divisions du bataillon, à distance de peloton et en faisant feu de file.

C’est la manœuvre qu’il est le plus nécessaire que les colonels con­naissent bien, car la moindre hésitation peut compromettre la troupe. Enfin ordonnez que chaque compagnie de voltigeurs soit instruite à former promptement le carré et à faire sur-le-champ feu de file, afin qu’étant en tirailleurs ils puissent promptement se réunir et résister à la cavalerie. Faites donner la poudre nécessaire pour ces exercices, et annoncez que ce sont ces manœuvres plus particulière­ment que je ferai faire deva.nl moi.

Même lettre au général Lauriston et au maréchal duc de Valmy.

 

Paris, 2 mars 1813.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Schönberg

Mon Fils, dans la situation actuelle des choses, il serait inconve­nant de faire marcher en avant de votre corps d’armée les vingt-huit 2e bataillons d’Erfurt ; ces bataillons ont besoin de se former. Il sera plus convenable de réunir les douze bataillons du 2e corps en une division à Dessau, où ils garderont le pont. Envoyez un général de division et deux généraux de brigade. Vous avez dû en garder à cet effet, et ceux qui ont été à Erfurt peuvent servir.

Les seize bataillons du 1e corps formeront une autre division à Wittenberg, où ils garderont le pont et la ville. Vous leur enverrez également un général de division et trois généraux de brigade. On organisera à chacune de ces divisions une batterie de pièces de canon.

Ou le prince d’Eckmühl commandera les deux divisions et portera son quartier général à Wittenberg, ou bien le duc de Bellune ira prendre à Dessau le commandement du 2e corps, et, dans ce cas, le prince d’Eckmühl ne commandera à Wittenberg que la division du Ier corps.

Vous leur recommanderez bien de faire exercer les bataillons ; il faut que les généraux de brigade leur fassent faire l’exercice à feu et tirer à la cible. Ces deux divisions se trouveront ainsi intermé­diaires entre Torgau et Magdeburg. Quand elles auront leurs batteries de canon et qu’elles seront un peu formées, nous verrons à les en­voyer sur Stettin; mais, telles qu’elles sont aujourd’hui, il serait imprudent de les exposer en route et de les envoyer en avant.

J’ai ordonné que les vingt-huit 4e bataillons des mêmes régiments partissent de France dans le courant de mars. Cela fournira deux autres divisions qui pourront également se réunir sur l’Elbe.

 

Paris, 2 mars 1813.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Schönberg

Mon Fils, j’ai fait connaître au général Lauriston mon intention sur les mouvements à faire en cas que l’ennemi se portât en force sur Dresde, et sur la ligne d’opération à prendre. Je vous l’écrirai demain en détail, parce que j’attends un chiffre pour cela.

Je vois que le général Guilleminot vous a quitté : cela méritait du moins de m’en dire la raison, et ce que fait ce général.

J’ai ordonné, comme je vous l’ai déjà mandé, que le prince d’Eckmühl se portât à Wittenberg. Mettez sous ses ordres les régi­ments polonais, cavalerie et infanterie, que le général Reynier a amenés; cela augmentera sa division. Donnez des ordres pour que son artillerie soit promptement organisée. Il faut deux batteries à pied pour sa division et deux batteries pour celle qui se réunit à Dessau.

 

Paris, 2 mars 1813.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Schönberg.

Mon Fils, je vois avec peine que vous avez renvoyé le duc de Castiglione. Sa présence à Berlin pouvait être utile ; il avait l’habitude de la police de cette ville et était connu de la populace. Je vois éga­lement avec peine l’événement arrivé au 4e de chasseurs italiens. S’il y avait eu là un bon général de cavalerie, ce ne serait pas arrivé ; mais vous renvoyez tout le monde et ne gardez personne. Il aurait fallu réunir ce régiment à la Garde et en former un corps de cavalerie qui, partout où il se serait présenté, aurait tout culbuté. Tout cela n’est pas bien. Faites des exemples sévères et maintenez la tranquillité.

Les 300,000 hommes qui composent les quatre corps d’obser­vation sont en mouvement, et la scène changera bientôt.

Je donne ordre au général Lauriston de se concentrer à Magdeburg, au corps de Westphalie de se réunir du côté de Havelberg, et au prince d’Eckmühl de se porter avec les vingt-huit 2e bataillons sur Wittenberg et Dessau.

Les cent pièces de canon du corps d’observation de l’Elbe sont parties. Complétez votre artillerie

Envoyez-moi tous les cinq jours l’état de situation de votre corps et les lieux où il se trouve ; en un envoyez-moi des relations de tous les événements qui se sont passés depuis que vous commandez. Votre correspondance ne dit rien. Indépendamment des lettres que vous m’écrivez, il faut que l’état-major écrive tous les jours et en détail. Ainsi, qu’est-ce que c’est que l’évènement où le prince Giedroyc a été pris? Je ne le sais pas; je ne connais pas nos pertes; je ne connais pas davantage l’événement du 4e de chasseurs. Cette manière de m’instruire est insuffisante et fausse. J’ai besoin surtout de connaître la vérité; c’est ce que vous ne me dites pas assez.

Appelez un bon général de division de cavalerie pour commander votre cavalerie; tenez-la réunie et mettez avec elle un bon corps de voltigeurs et une bonne batterie d’artillerie à cheval.

Ne faites pas avancer sur vous le corps du général Lauriston, qu’il n’ait toute son artillerie et un peu de cavalerie.

 

Paris, 3 mars 1813.

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel.

Mon Frère, dans les quinze premiers jours de mars, tout le corps d’observation de l’Elbe doit être réuni à Magdeburg et à une journée aux environs. Je donne l’ordre que le prince d’Eckmühl, avec une division de seize bataillons, se porte à Wittenberg, et qu’une autre division se porte à Dessau. Des mesures sont prises depuis longtemps par les Saxons pour occuper Torgau.

Je vous ai fait mander que je désirais que vous missiez votre corps sur la gauche du général Lauriston, à mi-chemin de Magdeburg et de Hambourg. Les troupes pourront se placer même sur la rive droite du fleuve, pendant le temps qu’il n’y aura point de danger, afin d’inquiéter l’ennemi. On s’assurera de tous les bateaux pour em­pêcher le passage de l’Elbe.

Toutes les forces de l’ennemi, selon les derniers renseignements, paraissent être du côté de Kalisz. S’il marchait sur Dresde pour tourner ainsi l’Oder et l’Elbe, j’ai ordonné au vice-roi de porter sa ligne d’opération par Magdeburg, Cassel et Wesel. Si le vice-roi était obligé d’abandonner l’Elbe, il défendrait le Weser et Cassel. Je pense donc qu’il est convenable que, sans faire semblant de rien, vous ayez à Cassel une ressource de 4 à 500,000 rations de biscuit et une manutention de vingt-quatre fours, que vous pouvez faire construire en annonçant l’arrivée d’une armée ; ce qui sera toujours d’un bon effet.

Envoyez-moi ici, près du grand maréchal du palais, un officier des ponts et chaussées ou un individu de ce pays qui connaisse bien les chemins de Cassel à Cologne, de Cassel à Francfort et de Cassel à Wesel, et qui puisse donner de bons renseignements sur les routes et les localités.

Le vice-roi m’a mandé, sous la date du 24, qu’il restait à Berlin. Le général Reynier est entre Glogau et Dresde avec les Saxons et la division Durutte. La Bavière a organisé 15,000 hommes, dont 2,000 de cavalerie et trente pièces de canon ; ce corps se réunit à Bayreuth, Kronach et Bamberg. Les Wurtembergeois se réunissent à Würzburg, ainsi que les Hessois et les Badois.

Le 1er corps d’observation du Rhin est tout entier réuni à Franc­fort; le prince de la Moskova, qui le commande, y sera rendu de sa personne le 10. Le duc de Raguse, qui commande le 2e corps d’ob­servation du Rhin, sera rendu le 15 à Francfort. Le duc de Trévise sera rendu à Gotha le 12; il aura soixante pièces de ma Garde avec double approvisionnement, 3,000 hommes de cavalerie de ma Garde et 10,000 hommes d’infanterie aussi de ma Garde. Le général Ber­trand, avec 60,000 hommes du corps d’observation d’Italie, com­mencera le 10 à déboucher par le Tyrol pour venir se placer à Ratisbonne.

Je pense qu’il serait convenable que vous eussiez près du vice-roi un de vos aides de camp, connaissant les localités, pour l’aider et pour vous assurer de ce qui se passe. Il faudrait que cet aide de camp eût un chiffre avec vous, et qu’il s’en servit constamment en vous écrivant, car il faut bien vous attendre que les Cosaques in­tercepteront des courriers. Ayez aussi un chiffre avec le général Lauriston.

J’envoie pour gouverneur de Magdeburg le général de division Haxo. Si le vice-roi était obligé d’abandonner l’Elbe (ce qu’il ne fera qu’à bonne enseigne, vu surtout la ligne d’opération que je lui prescris sur Cassel et Wesel), la garnison de Magdeburg serait composée de 1,500 ou 2,000 hommes de troupes westphaliennes et de deux divisions complètes du 1er et du 2e corps, qui se réunissent à Dessau et Wittenberg.

Aussitôt que l’empereur Alexandre ou le général Koutouzov seraient entrés soit à Berlin, soit à Dresde, vous feriez partir la Reine par Wesel et renverriez a Paris, mais pas avant.

Faites-moi connaître la nature des routes du Weser à Cologne. Des pièces d’artillerie peuvent-elles y passer ?

Vous voyez que, par ces dispositions, l’armée des Russes à Dresde ne dérangerait ni ne compromettrait rien, puisque la division qui est dans la citadelle à Erfurt est approvisionnée et à l’abri d’un coup de main. Les choses ainsi disposées, lorsque je croirai le moment arrivé, je me rendrai à Mayence, et si les Russes s’avancent, je prendrai des dispositions convenables; mais nous avons grand besoin de gagner jusqu’en mai.

Je suppose que j’ai dans mon cabinet toutes les cartes de votre pays ; si vous aviez des cartes que je n’eusse pas, adressez-les-moi par l’officier que vous m’enverrez.

 

Paris, 2 mars 1813.

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon frère, je vous ai fait connaître mes intentions dans ma lettre d’aujourd’hui. Vous aurez vu que mon intention est que vous réu­nissiez vos troupes sur la gauche du général Lauriston, à mi-chemin entre Hambourg et Magdeburg, au coude de la rivière, et que vos troupes exercent tout le long de l’Elbe, afin de retirer tous les bateaux de ce côté. Je pense qu’aussitôt que vous aurez là 6,000 hommes et seize pièces de canon vous pourrez faire établir une redoute sur la rive droite, pour protéger le passage de la rivière soit sur un pont que vous établirez, soit du moins au moyen d’un va-et-vient qui pourra porter 500 hommes et 50 chevaux à la fois. Cette position de vos troupes est fort nécessaire, et l’établissement d’un pont ou d’un va-et-vient, ainsi que celui d’une forte redouté faisant tête de pont sur la rive droite, me paraît très-convenable. Occupez-vous de cela sans délai.