Correspondance du maréchal Davout – Juin 1809

Hainbourg, 2 juin 1809, deux heures et demi du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, aussitôt mon arrivée ici, hier, j’ai envoyé le général Compatis et le colonel du génie Blin reconnaître la tête du pont de l’ennemi sur la rive droite du Danube, à la hauteur de Presbourg.

II est résulté de cette reconnaissance que l’ennemi parais­sait occuper, avec beaucoup de monde, l’Ile qui est immédia­tement au-dessus de Presbourg, qu’il avait construit des épaulements dans la partie de cette île qui bat la route de Hambourg à Presbourg, voisinage d’Engerau, qu’il gardait par de forts postes l’intervalle qui se trouve entre cette route et l’îile qui est au-dessous de Presbourg, et qu’ainsi il couvrait la petite île intermédiaire qui se trouve devant cette ville; mats il était douteux si les épaulements reconnus dans la première île étaient armés d’artillerie et si les rapports de nos postes d’observation, que l’ennemi se fortifiait dans Fîle intermédiaire et qu’il y avait probablement du canon, étaient exacts. Il fallait donc nécessairement faire une attaque sur les postes ennemis en avant d’Engerau, pour savoir positive­ment à quoi s’en tenir sur ses forces et ses ouvrages. En con­séquence, j’ai fait marcher sur ce point le 16* de chasseurs, 800 hommes d’infanterie de Hesse-Darmstadt et deux bouches à feu, soutenus par le 85* de ligne et la compagnie d’artillerie légère de la ?* division.

L’attaque a été vive, l’ennemi a été repoussé et forcé de se replier sur le village d’Engerau, où la nuit n’a pas permis de voir s’il avait des retranchements; mais il est certain que, quoique nous ayons tiré du canon sur lui, il n’en a pas tiré de ce point, ni de l’île qui est au-dessus de Presbourg, tandis qu’il en a tiré du quai de cette ville et de l’ile intermédiaire. La nuit déjà avancée ne permettant pas d’approfondir cette reconnaissance, j’ai ordonné que mes troupes se repliassent, ce qu’elles ont fait dans le plus grand ordre, sans être inquié­tées par l’ennemi.

Les troupes de Hesse-Darmstadt se sont très-bien conduites; elles doivent avoir eu de vingt à vingt-cinq blessés.

Aujourd’hui, dans la matinée, je ferai une nouvelle recon­naissance sur Je même point avec deux ou trois régiments français et une douzaine de bouches à feu. Je ne doute pas qu’elle ne me mette parfaitement au courant des forces, des fortifications et des desseins de l’ennemi, et que je ne force celui-ci à rentrer dans l’île intermédiaire.

 

Wolfstadl, 3 juin 1809, minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, dans le moment où les troupes du général Gudin et les détachements des divers bataillons hessois enlevaient le village d’Engerau, qui était couvert de retranchements et d’abatis, et y faisaient environ 300 prisonniers, j’ai adressé à Votre Majesté le colonel Bourck, mon aide de camp, avec un officier qui est le petit-fils du maréchal de Beaulieu; ces officiers auront pu donner à Votre Majesté des renseigne­ments. Le village retranché et les îles étaient défendus par trente bouches à feu, les régiments de Beaulieu, Duca et Giulay. Ces régiments faisaient partie du corps du général Hiller qui doit être dans les environs de Presbourg. Il est même présu­mable que très-prochainement ce corps devait manœuvrer sur la rive droite du Danube, avec l’insurrection hongroise et peut-être le corps de l’archiduc Jean.

On a vu un rassemblement de plus de soixante barques à l’embouchure de la March, à Theben, et des feux qu’on n’avait point remarqués jusqu’à présent; il est probable que ce sont les autres régiments du général Hitler. J’ai fait porter quelques compagnies et quelques hommes à cheval sur ce point pour l’observer. Le combat a duré jusqu’à près de dix heures du soir; il a été très-sanglant. J’estime par aperçu que nous avons eu 7 à 800 hommes tués ou blessés ; le brave général Petit est du nombre de ces premiers.

L’ennemi, après avoir fait des pertes considérables et une vaine résistance, s’est retiré dans les lieu de notre droite. J’ai lieu de croire qu’il les évacuera totalement dans la nuit; car on a remarqué pendant toute l’action que le pont volant était constamment en mouvement pour reporter des troupes des îles dans Presbourg d’où il revenait à vide.

J’occupe le village en force. On profite des outils que l’ennemi a abandonnés pour détruire ses retranchements.

Je dois faire à Votre Majesté l’éloge de tous les généraux et de toutes les troupes. Je saisirai cette occasion pour lui rap­peler la conduite distinguée que le général Compans, officier d’un véritable mérite, a tenue dans toutes les affaires de cette campagne, et la prier de vouloir bien faire réparer l’oubli qui a été fait de ce général sur les bulletins de l’armée. Je dois faire aussi une mention particulière des troupes hessoises, qui ont rivalisé de courage avec celles de Votre Majesté, et du comte de Gall, major commandant ces troupes. Ce comman­dant a déployé la plus grande valeur; officiers et soldats, il n’est personne qui ne lui rende justice ainsi qu’à ses troupes.

J’ai envoyé au 7* d’infanterie légère et au 25* de ligné qui étaient à Fischament l’ordre de se rendre tout de suite ici, afin d’être en mesure pour empêcher l’ennemi de sortir de ses îles.

Le général Montbrun écrit au général Lasalle qu’une grande partie de l’insurrection hongroise vient de se réunir à Raab, et qu’une partie s’est portée en cet endroit et à Altenbourg.

Je prie Votre Majesté de vouloir bien donner des ordres pour que la division Puthod se porte à Petronell.

Il est important qu’on fasse observer le Danube entre Fischament et Petronell. Aujourd’hui, le général Compans, en se rendant ici, a vu une barque chargée d’une centaine d’Autrichiens se rendre dans lîle à la hauteur d’Elend.

Les officiers prisonniers ont déclaré qu’ils avaient reçu l’ordre de tenir à outrance dans la tête de pont.

P. S. — Deux chefs de bataillon du 12e ont été tués. M. Pierre, qui commandait par intérim le régiment, et le chef de bataillon Hecquet, ont été tués.

 

Wolfstadt, 4 juin 1809, quatre heures et demie du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, d’après les intentions de Votre Majesté, j’ai fait jeter aujourd’hui des obus sur Presbourg et canonner l’ennemi dans l’ile où il s’est retiré; il est probable que les obus ne sont point arrivés sur la ville, puisqu’ils n’ont produit aucun effet. Quatorze bouches à feu ont été dirigées sur l’île, et quoi­qu’elles fussent à découvert, elles n’ont pas tardé à faire taire les huit que l’ennemi avait disposées, partie en batteries à barbettes, et partie en batteries à embrasures. Cependant l’ennemi recommençait son feu par intervalles, ce qui a fait croire qu’il ne le discontinuait que lorsqu’il avait des pièces démontées ou des canonniers hors de combat. Durant cette canonnade l’infanterie se tenait toujours couchée derrière ses épaulements et ne se montrait que lorsque quelqu’un de nos voltigeurs s’approchait pour tirer sur leurs canonniers. Nous avons eu trois pièces démontées et un bon nombre d’hommes et de chevaux hors de combat. Voyant que cette canonnade ne produisait aucun résultat décisif, je l’ai fait cesser; elle nous coûte beaucoup de munitions que je m’occupe de faire remplacer.

Votre Majesté sait que les deux ponts par lesquels on com­munique avec l’ile occupée par l’ennemi, sont rompus au point d’être impraticables pour une attaque; d’après cette circonstance, j’ai pensé qu’il ne restait rien à faire que de faire faire la nuit prochaine des épaulements pour l’artillerie et l’infanterie qui auront le double objet d’empêcher l’ennemi de déboucher sur nous et de faciliter une attaque de vive force dans le cas où, malgré toutes les difficultés, Votre Majesté les jugerait indispensables. M. le colonel Blin s’oc­cupe en ce moment de tracer ces ouvrages.

La canonnade de ce matin n’ayant produit aucun résultat, j’ai pensé qu’il n’y avait pas lieu à demander aux habitants de Presbourg de conduire sur notre rive le pont volant qui est resté constamment à la disposition de l’ennemi. Le même motif m’a empêché de réclamer le chef d’escadron du 24e régiment de chasseurs qui est prisonnier k Presbourg.

Je désespère de trouver des bateaux, et en outre je n’ai ni  marins» ni pontonniers, ni sapeurs; ils sont tous à la disposi­tion du général Bertrand à Vienne et Ebersdorf.

Tous les prisonniers autrichiens se sont accordés à dire que les travaux de l’ile étaient commencés depuis huit jours, et que les fortifications sont très-bien conditionnées.

Tous les renseignements confirment que l’ennemi avait l’intention de jeter un pont sur ce point et du côté de Theben.

Je ne sais ce que sont devenus les bacs qu’on a vus à ce dernier endroit.

 

Wolfstadt, 5 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai eu l’honneur hier de rendre compte à Votre Majesté que j’allais faire exécuter quelques ouvrages, dont le double objet serait d’empêcher l’ennemi de déboucher de l’ile qu’il occupe devant nous, et d’en faciliter l’attaque malgré les difficultés qu’elle parait présenter.

J’ai l’honneur d’adresser aujourd’hui à Votre Majesté le croquis des fortifications de l’ennemi dans l’ile, des ouvrages qu’il avait en avant du village d’Engerau et que nous avons détruits, et de ceux que nous exécutons en ce moment; deux batteries ont été construites dans la nuit, nous continuons de travailler sans être inquiétés par l’ennemi. Notre système n’est pas encore complet, nous y ajouterons quelque chose lorsque les ouvrages tracés seront terminés.

J’ai reconnu hier moi-même l’emplacement de la batterie destinée à jeter des obus sur Presbourg; je ne doute pas qu’elle ne soit à bonne portée et qu’elle ne remplisse son objet.

Le croquis a été fait à la hâte par le colonel Blin. Je crois qu’il rend aussi bien que possible le terrain et les ouvrages.

L’ennemi perfectionne ses ouvrages sur sa gauche; les autres paraissent être dans le meilleur état.

Il est certain qu’il augmente le nombre de ses troupes dans l’ile, qu’il y a fait même passer de la cavalerie, et qu’il a fait des mouvements aux environs de Presbourg; mais les ren­seignements sur ces mouvements sont trop vagues pour pou­voir les apprécier.

On parle de l’arrivée de l’archiduc Ferdinand, avec un corps de troupes en marche sur Komorn ; la source de ce bruit n’est pas assez digne de foi pour que l’on puisse regarder cette nouvelle comme certaine, niais seulement comme bonne à vérifier. Le même rapport annonce que l’archiduc Jean et des troupes de l’insurrection hongroise doivent être derrière la Raab.

On cherche à travailler la population de Vienne. Aucun des ordres donnés aux habitants, de livrer les militaires et landwehrs autrichiens qui se trouvent à Vienne, n’a reçu son exécution; ils s’y trouvent en assez grande quantité. Ce sont des renseignements qui me paraissent mériter quelque considération ; ils viennent de gens bien intentionnés.

 

Wolfstadt, 5 juin 1809, minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre que Votre Majesté m’a fait l’honneur de m’écrire ce matin à neuf heures[1]. Tous les détails qu’elle renferme sur les îles occupées par l’ennemi et sur les fortifi­cations qu’il a faites à celle du centre sont exacts; une reconnaissance qui a été faite aujourd’hui par le général Oudin et le colonel du génie Blin, et de l’exactitude de laquelle je me suis assuré par moi-même, est absolument conforme aux idées de Votre Majesté. Elle pourra s’en con­vaincre par le croquis et la note ci-joints. Il paraît en effet qu’on peut arriver par la chaussée jusqu’aux chevaux de frise de l’ennemi ; mais pour en avoir une assurance parfaite, j’ai ordonné qu’un sous-officier intelligent et intrépide allât le reconnaître cette nuit.

J’ai aussi donné des ordres pour faire réunir quelques embarcations, au moyen desquelles je ferai attaquer demain l’ile de gauche relativement à nous, que je suppose n’être gardée que par des landwehrs ; l’enlèvement de cette îe nous faciliterait beaucoup l’attaque de celle où l’ennemi s’est retranché.

Tous les moyens vont être préparés pour cette attaque; de nouvelles batteries vont être construites à demi-portée de fusil des retranchements de l’ennemi.

Comme un grand feu d’artillerie épargnerait nécessaire­ment beaucoup d’hommes, je prie Votre Majesté de donner des ordres pour que celle de la division Puthod me soit envoyée ; je la prie aussi de vouloir bien ordonner que cette division soit envoyée à Petronell et à Hainbourg, afin que celle du générai Gudin soit entièrement disponible pour l’at­taque, ce que je crois d’autant plus nécessaire que l’ennemi paraît très en force dans son île retranchée.

J’ai l’honneur de faire connaître à Votre Majesté les noms des officiers hessois qui se sont particulièrement distingués à l’attaque du village d’Engerau; ce sont : le major de Gall, commandant les détachements réunis des troupes hessoises, le chef de bataillon major de Schomberg, le capitaine de tirailleurs de Duchenrôder, le capitaine Coppet, qui a été blessé, et l’adjudant-lieutenant Westenveller.

J’ai demandé qu’on me fit connaître le sous-officier et le soldat qui se sont le mieux montrés dans cette affaire ; aussitôt qu’on m’aura fait parvenir leurs noms, j’aurai l’honneur de les transmettre à Votre Majesté.

Il existe dans le corps d’armée beaucoup d’emplois d’offi­cier vacants, notamment dans la 3e division; je prie Votre Majesté de vouloir bien donner des ordres pour qu’il y soit pourvu le plus promptement possible.

Je prie aussi Votre Majesté de m’accorder l’agrément de mettre de nouveau sous ses yeux l’état nominatif des mili­taires du corps d’armée qui, par la conduite qu’ils ont tenue dans les diverses affaires de cette campagne, ont acquis de nouveaux droits à la bienveillance de Votre Majesté.

 

Wolfsthal, 6 juin 1809, deux heures après midi.

AU MAJOR GÉNÉRAL DE LA GRANDE ARMÉE, PRINCE DE NEUFCHÀTEL, ETC.

Monseigneur, une nouvelle reconnaissance qui fut faite hier par le général Gudin et le colonel du génie Blin, et que je fis ensuite moi-même, nous avait fait croire que la chaussée qui conduit d’Engerau à l’îie retranchée occupée par l’en­nemi n’avait point été rompue : cependant, pour en avoir une assurance parfaite, j’ordonnai qu’elle fût reconnue dans la nuit, par un sous-officier intelligent et intrépide. Cette reconnaissance a été faite non-seulement par un sous-officier, mais encore par un sous-lieutenant, un adjudant et l’officier du génie de la 3e division. Tous se sont accordés à rapporter que la route est coupée à environ 25 toises des retranche­ments de l’ennemi, et que la coupure qu’ils croient être d’environ 4 toises est traversée par un courant très-rapide; ainsi il n’est plus permis de songer à une attaque de vive force. C’est un siège à faire.

J’envoie aujourd’hui 100 nageurs, suivis de quelques nacelles chargées de leurs vêtements et de leurs armes, reconnaître l’île occupée par l’ennemi sur notre gauche. D’après les rapports que j’ai reçus aujourd’hui, je ne peux pas douter qu’ils n’y soient en force ; je soupçonne même qu’ils la fortifient intérieurement. Je suis toujours porté à croire que si nous parvenions à nous en emparer, les batteries que nous établirions à sa pointe diminueraient beaucoup les difficultés de l’attaque principale.

J’attends les sapeurs, les pontonniers et les marins que l’Empereur m’a annoncés. Quelques personnes m’ont assuré les avoir trouvés en route. Ils me seront très-utiles.

J’ai envoyé un officier de l’état-major à Hambourg, pour réunir tous les cordages et bois propres à faire des radeaux qu’il pourra y trouver.

J’en ai envoyé un autre à Petronell, pour le même objet et pour faire charger sur trois bateaux conduits par des marins français qui doivent s’y trouver, tous les cordages, madriers et poutrelles qu’il pourra réunir. Ces bateaux seront ensuite descendus jusqu’à la hauteur de Wolfsthal.

J’ai donné des ordres pour qu’il ne soit plus jeté d’obus sur Presbourg, avant que l’ennemi ait été délogé de sa tête de pont.

 

Wolfsthal, 6 juin 1809, minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, la reconnaissance de la chaussée dont j’ai entretenu Votre Majesté, dans ma lettre de cette nuit, a été faite non- seulement par un sous-officier, mais encore par un lieutenant, un adjudant et un officier du génie; le résultat en est con­signé dans le rapport ci-joint du général Duppelin. Il n’est plus douteux que cette chaussée ne soit coupée, et que le courant qui traverse la coupure ne soit très-rapide; ainsi, une attaque de vive force est impossible; c’est un siège à faire.

L.es rapports de cette nuit et d’aujourd’hui ne permettent pas de douter que l’ile de gauche relativement à nous ne soit fortement occupée; je soupçonne même qu’elle est fortifiée dans l’intérieur. Elle sera cependant reconnue par une cen­taine de bons nageurs, qui se feront suivre de quelques bateaux où ils placeront leurs armes et leurs vêtements, et que je ferai protéger par une batterie mobile de quatre à cinq bouches à feu; je suis toujours porté à croire que si nous parvenions à nous emparer de cette île , les batteries que nous établirions à sa pointe du côté de Presbourg diminue­raient beaucoup les difficultés de l’attaque de celle où l’en­nemi est retranché

S’il existait à Vienne des pierriers ou de petits mortiers, et que Votre Majesté jugeât à propos de nous en envoyer, je crois qu’ils nous serviraient utilement, et qu’ils feraient beau­coup plus de mal à l’ennemi que le canon.

Les sapeurs, les marins et les pontonniers que Votre Majesté m’a annoncés ne sont point encore ‘arrivés, mais quelques personnes m’ont assuré qu’on les avait vus en route.

Les batteries qui furent tracées hier ont été élevées dans la nuit; il en sera construit sans retard de nouvelles, pour compléter le double système d’attaque et de défense.

J’ai envoyé un officier d’état-major à Hambourg, pour réunir tous les cordages et bois propres à faire des radeaux qu’il pourra y trouver.

J’en ai envoyé un autre à Petronell, pour le même objet et pour faire charger sur trois bateaux conduits par des marins français qui doivent s’y trouver, tous cordages, madriers et poutrelles qu’il pourra réunir. Ces bateaux seront ensuite descendus jusqu’à la hauteur de Wolfsthal.

P.S. — Nous remarquons depuis hier que l’ennemi for­tifie les hauteurs qui dominent la citadelle de Presbourg et qui battent la route de Theben. Les ouvrages qu’il fait paraissent avoir beaucoup de relief.

 

Wolfsthal ; 7 juin 1809, à minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté les rapports que j’ai reçus aujourd’hui des généraux Lasalle et Montbrun. Le mouvement rétrograde résolu par ce dernier général m’ayant paru de nature à contrarier les dispositions générales ordonnées par Votre Majesté, et dont elle a bien voulu me faire part dans sa lettre d’aujourd’hui, dix heures du matin, je me suis empressé de faire connaitre à ce général la partie de cette lettre qui lui est relative.

J’ai l’honneur de rendre compte à Votre Majesté que l’en­nemi s’étant aperçu des dispositions qu’on faisait aujourd’hui, d’après mes ordres, pour faire passer une centaine de nageurs dans l’île qu’il occupe sur notre gauche, il s’est empressé de faire marcher environ 300 hommes et une bouche à feu pour s’opposer à cette opération, et qu’au même moment il a lui- même tenté de faire passer quelques hommes dans la grande île qui est au-dessous de Wolfsthal, pour faire diversion à la tentative qu’il craignait de notre part.

Ayant été informé que quelques carabiniers du 7e régiment d’infanterie légère connaissaient un point du bras du Danube qui nous séparait de l’ennemi, où il était possible de passer à gué, j’ai ordonné qu’on fit passer trois compagnies de ce régiment vers le point de débarquement, et qu’on culbutât dans le Danube tout ce qui n’aurait pas le temps de se rembarquer; cette opération a eu tout le succès qu’on pouvait en attendre ; tous les hommes qui avaient passé au nombre de 30, y compris deux bateliers, sont restés en notre pouvoir; un lieutenant-colonel de landwehr qui les commandait, quoi qu’ils appar­tinssent au régiment de Duca, a été tué.

Un feu de mousqueterie assez vif a eu lieu pendant cette expédition entre les 300 hommes que l’ennemi avait fait avan­cer à la tête de son île, et nos tirailleurs embusqués sur la rive droite.

Le canon de l’ennemi a tiré pendant longtemps; nous n’y avons répondu que vers la fin du combat. Nous n’avons eu que 4 ou 5 hommes blessés.

L’obstination que les Autrichiens mettent à garder les îles qu’ils occupent, et le soin avec lequel ils continuent de s’y for­tifier, ne permettent pas de douter que leurs dispositions sur ce point ne se rapportent au projet de quelques opérations sur la rive droite du Danube ; mais ce projet doit être entièrement déjoué par l’impossibilité où nous les mettons de déboucher devant nous, et par le mouvement que Votre Majesté vient d’ordonner aux troupes de Son Altesse Impériale le prince vice-roi [2].

Je joins à ma lettre le rapport du capitaine de carabiniers qui commandait les compagnies qui ont marché sur le détache­ment débarqué par l’ennemi.

Demain, j’aurai l’honneur de faire part à Votre Majesté des déclarations des prisonniers que je vais faire questionner soigneusement.

 

Wolfsthal, 7 juin 1809.

AU MAJOR GÉNÉRAL DÉ LA GRANDE ARMÉE, PRINCE DE NEUFCHÂTEL, ETC,

Monseigneur, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Altesse les états nominatifs des militaires du corps d’armée qui se sont distingués aux diverses affaires de cette campagne, avec des rapports historiques sur ces affaires; les états sont par corps, et les rapports par division. La rapidité de nos mouvements, l’éloignement des divisions qui ont été successivement déta­chées du quartier général, se sont opposés à ce que ce travail fût fait plus promptement et d’une manière aussi conforme aux intentions de Votre Altesse que je l’aurais désiré.

J’ai vainement fait réclamer le travail de la division Saint- Hilaire, qui avait pris la part la plus glorieuse à nos affaires des 19, 21 et 22 avril; il m’a toujours été promis et ne m’a jamais été adressé. Il m’eût été infiniment agréable de pouvoir le joindre à celui des autres troupes du corps d’armée.

La division Demont ne s’étant trouvée à aucune affaire sous mes ordres, je ne lui ai point fait demander ce travail. Je pense que les généraux en chef sous les ordres desquels elle a servi l’auront fait parvenir à Votre Altesse.

 

Wolfsthal, 7 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, des recherches que je faisais faire depuis plusieurs jours dans le voisinage ont produit la découverte d’une dou­zaine de bateaux de diverses dimensions dont la plupart, et notamment les plus grands, ont besoin d’être réparés, de pou­trelles, de madriers, de cordages, de bois propre à faire des radeaux en quantité suffisante pour organiser les moyens néces­saires pour effectuer un passage dans l’ile de droite de l’en­nemi. J’ai ordonné au colonel Blin de réunir tous ces moyens dans le lieu le plus convenable, et de faire travailler avec activité à les mettre en état ; j’ai en conséquence mis à sa dis­position les pontonniers, les sapeurs et les marins que Votre Majesté m’a envoyés. J’espère que très-prochainement nous serons en mesure pour tenter un coup de main vigoureux sur cette ile avec toute assurance de succès.

Dès aujourd’hui on va travailler à élever sur notre rive des batteries et des épaulements pour protéger cette opération ; les ouvrages seront faits avec toutes les précautions nécessaires pour que l’ennemi ne s’en doute point.

Nous sommes toujours ici dans le plus grand embarras pour le pain. Je réitère à Votre Majesté la prière que j’ai eu l’honneur de lui faire de donner des ordres pour qu’il nous en soit fourni des magasins de Vienne, Les deux villages que nous occupons sur la route ont été totalement épuisés par la cava­lerie légère et par l’infanterie hessoise qui y ont séjourné avant nous. Ces troupes occupent maintenant tous ceux qui nous avoisinent, et nous ne pouvons en attendre aucune res­source. J’ose espérer que Votre Majesté voudra bien foire informer M. l intendant général de notre position, et lui faire prescrire de nous envoyer des vivres de Vienne.

 

Wolfsthal, 7 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté l’état des sujets proposés pour remplir les emplois vacants dans les régi­ments composant la 3e division, et celui de quelques demandes d’avancement et d’admission dans la Légion d’honneur, faites par le général Gudin.

Cette division, n’ayant pas encore eu l’avantage d’être passée en revue par Votre Majesté, n’a point participé aux faveurs que vous daignâtes accorder sous les murs de Ratisbonne aux divisions Morand et Friant; je réclame pour elle votre bien­veillance.

Je saisis cette occasion pour mettre de nouveau sous les yeux de Votre Majesté l’état des demandes d’avancement et d’admission dans la Légion d’honneur en faveur des officiers de l’état-major général du corps d’armée que j’eus l’honneur de lui remettre à Ratisbonne, et pour lui rappeler la promesse qu’elle me fit d’accueillir favorablement ces demandes.

J’ai aussi l’honneur d’adresser à Votre Majesté et d’appuyer auprès d’elle quelques demandes faites par le général Touzard, commandant le génie du corps d’armée, en faveur d’officiers de son arme.

Le général Hanicque, commandant l’artillerie du corps d’armée, à qui j’ai demandé plusieurs fois un pareil travail, ne me l’ayant point encore adressé, je regrette de ne pouvoir saisir cette occasion pour le transmettre à Votre Majesté. J’aurai l’honneur de lui en faire l’envoi aussitôt qu’il me sera parvenu.

 

Wolfsthal, 7 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur de transmettre à Votre Majesté une lettre que je viens de recevoir du général Pajol. Elle démontre l’inu­tilité de la cavalerie légère aux ordres du général dans les environs de Knitzing et de Nusdorf, et l’embarras qu’éprouve­rait ce général pour l’y faire vivre plus longtemps.

Comme elle pourrait être plus utile ici pour éclairer exclu­sivement ma droite et me mettre en communication avec Son Altesse Impériale le Vice-Roi et le général Montbrun, je prie Votre Majesté de vouloir bien autoriser le général Pajol à me rejoindre avec sa cavalerie légère, et de lui en faire donner l’ordre.

 

Wolfsthal, 7 juin 1809. onze heures du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur de rendre compte à Votre Majesté que le général Lasalle, par une lettre de ce jour, de Kitsee, à cinq heures du soir, m’annonce que l’on a remarqué en face de Sommerein douze hommes à cheval qui ont placé une vedette ; que, vis-à-vis de ce même poste, on croit avoir vu des travail­leurs s’occupant à la tranchée, et qu’il va s’en assurer; que ses reconnaissances poussées jusqu’à trois lieues n’ont point vu l’ennemi; qu’un homme de Wieselbourg lui a fait le rapport que d’après ce qu’il a entendu dire, il doit être arrivé à Raab vingt mille hommes de troupes de ligne, et que l’ennemi a dû couper tous les ponts qui se trouvent de Wieselbourg à Raab.

Je réponds au général Lasalle de pousser ses reconnais­sances le plus près possible de l’ennemi, de faire vérifier par elle les faits dont lui a donné connaissance l’bomme de Wie­selbourg, et d’en faire un exemple dans le cas où ils seraient dénués de fondement.

 

Wolfsthal, 7 juin 1809. onze heures du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’accuser à Votre Majesté la réception des deux lettres qu’elle m’a écrites ce matin à huit heures.

Je me suis empressé de faire connaître au général Montbrun la partie de l’une de ces lettres qui le concernait, en me servant des mêmes expressions que Votre Majesté. Ma lettre lui a été adressée par duplicata.

J’ai écrit aussi au général Hanicque, pour qu’il fisse partir des chevaux à l’effet de transporter jusqu’à Engerau les six pierriers que Votre Majesté m’a annoncés, et que le général La Riboisière a dû envoyer aujourd’hui à moitié chemin. Je recom­mande que ce transport soit fait avec la plus grande célérité.

Je donne ordre au colonel du génie Blin de faire con­struire tout de suite des batteries pour ces pierriers, et de bien s’assurer du point où ils devront être placés, pour produire le plus d’effet possible. J’espère que ce nouveau moyen ne con­tribuera pas peu au succès d’une attaque, lorsque nous serons en mesure pour l’effectuer. On continue toujours de réunir les moyens de passage. Je presserai tous les travaux.

 

Wolfsthal, 8 juin 1809, onze heures trois quarts du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté le rapport d’une reconnaissance qui a été faite ce matin, à la pointe du jour, dans l’île de gauche de l’ennemi. J’ai été reconnaître moi-même cette île dans l’après-midi; le bruit des tambours, des musiques et d’ouvriers que j’y ai entendus, les postes que j’y ai vus, ne me permettent pas de douter qu’elle ne soit for­tement occupée.

Il doit y avoir nécessairement une communication entre cette île et celle du centre où l’ennemi est retranché; ou a vu aujourd’hui des mouvements de troupes qui, d’après leur direction, ne pouvaient avoir lieu que de cette dernière île sur l’autre; cependant personne n’a encore pu reconnaître les moyens de communication.

L’ennemi continue toujours ses travaux : il a même établi quelques bouches à feu à la droite de ses retranchements, aux points les plus rapprochés de Presbourg.

J’ai observé dans ma reconnaissance d’aujourd’hui que ces retranchements sont établis de manière que leur extrême droite ne peut être prise ni en flanc ni à dos par la pointe de l’ile de droite occupée par l’ennemi.

Le colonel Blin rassemble avec activité les moyens néces­saires pour l’établissement d’un pont volant et de deux va-et-vient. J’espère que le tout sera prêt après-demain.

L’ennemi, ainsi que l’annonce le général Lasalle dans son rapport ci-joint, montre beaucoup de postes sur la rive gauche du Danube, entre Karlsbourg et Ragendorf.

Les pierriers sont arrivés; ils ont besoin de quelques répa­rations, et ils ne pourront être mis en batterie que demain soir.

 

Wolfsthal, 9 juin 1809

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté le rapport de ce matin du général Lasalle et la lettre du général Montbrun qui l’accompagnait. Hier soir, j’ai donné l’ordre au général Lasalle de pousser des partis entre le Wieselburger-Donau et le Danube, depuis Èarafeld jusqu’à Ragendorf. Son rapport est le résultat de la première reconnaissance de Ragendorf; si les autres reconnaissances ont lieu, on con­naîtra la quantité de forces que l’ennemi poussera entre le Wieselburger-Donau et le Danube. Je ne peux croire qu’il y porte des forces majeures, puisqu’il découvrirait Raab ; quoi qu’il en soit, je me mets en mesure, et j’ai prescrit au général Lasalle, dans le cas où cela serait, de se concentrer entre Sandorf et Karlsbourg, et à la première nouvelle, je ferai venir la division Puthod qui est entre Petronell et Hambourg, et je pourrais ainsi disposer d’environ 14,000 hommes d’infan­terie.

A l’exception de quelques coups de fusil tirés sur les hommes qui se mettent en vue de l’ennemi, tout a été parfai­tement tranquille.

L’ennemi continue ses abatis de nuit dans son île de droite; on a cru remarquer sur les hauteurs de Presbourg qu’il éta­blissait des batteries : il serait possible que cela fût contre les troupes qui voudraient s’établir dans cette île.

Je réitère à Votre Majesté la demande de la brigade Pajol; vu les mouvements du général Montbrun et le peu de forces du général Lasalle, toute la partie qui est entre le Danube et le lac se trouvera à découvert.

 

 

Wolfsthal, 10 juin 1809, trois heures du matin.

AU MAJOR GÉNÉRAL DE LA GRANDE ARMÉE

PRINCE DE NEÛFCHATEL, ETC.

Monseigneur, je reçois à l’instant la lettre du général Lasalle que j’ai l’honneur de vous envoyer. Votre Altesse remarquera que le mouvement du général Montbrun a laissé à découvert la droite du général Lasalle. J’écris en consé­quence au général Marulaz à Bruck, pour qu’il porte un escadron à Neusiedel et Waiden, et un autre à Parendorf entre le Neusiedler et la Leitha, afin que ces escadrons éclairent le pays jusqu’à Saint-Peter.

J’ai eu l’honneur d’adresser à Sa Majesté une lettre du général Pajol, par laquelle il me fait connaître que sa brigade est peu nécessaire dans la position qu’elle occupe au milieu des Wurtembergeois et des Saxons; je prie Votre Altesse de vouloir bien lui rappeler que cette brigade ne serait point de trop ici, le pays ne formant guère qu’une immense plaine très-propre à la cavalerie.

 

Wolfsthal, 10 juin 1800.

A L’EMPEREÜR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur de rendre compte à Votre Majesté de la difficulté que nous eûmes hier à faire passer devant Theben les bateaux destinés à transporter les troupes qui devaient faire aujourd’hui l’attaque de l’île à droite de l’ennemi. Quatre de ces bateaux passèrent malgré le feu qu’ils eurent à essuyer; mais le cinquième, plus grand et plus difficile à manœuvrer que les autres, fut obligé, après avoir eu plusieurs hommes blessés, à s’échouer sous la protection de nos postes : il repartit dans la nuit et arriva à l’endroit indiqué pour la réunion.

Ce mouvement de bateaux donna de l’inquiétude à l’ennemi et lui fit soupçonner notre dessein. Il a travaillé toute la nuit dernière et aujourd’hui à de nouveaux retranchements. Les rapports de ce matin me l’avaient annoncé, je m’en suis con­vaincu par moi-même, ayant fait une reconnaissance dans l’après-midi pour nous assurer de nos moyens de passage et arrêter définitivement les dispositions d’attaque.  –

Le plan des îles, de nos travaux et de ceux de l’ennemi que j’ai fait faire après cette reconnaissance, où j’étais accompagné par mon chef d’état-major, le général Gudin et le colonel du génie Blin, mettra Votre Majesté à portée d’établir combien, dans l’état actuel des choses, une attaque serait san­glante et combien le succès en serait douteux.

L’ennemi, qui connaît le point obligé où nos bateaux sont réunis, a porté la plus grande partie de ses troupes en présence et a élevé ses batteries et ses retranchements de manière à s’opposer avantageusement à leur passage.

Il suffît en effet de jeter un coup d’œil sur le plan pour voir qu’il ne pourrait déboucher du petit bras du Danube où il se trouve, sans être exposé, dès le premier mouvement, à un feu considérable et très-meurtrier.            .

Outre les ouvrages que l’ennemi a faits à la tête de son île, vis-à-vis de notre point de passage, il n’a pas continué d’en faire sur divers autres points. Le grand abatis qui la traverse dans toute sa largeur s’est considérablement accru depuis hier; il en est de même d’un épaulement qui flanque cet abatis sur sa gauche, et le bruit d’ouvriers que nous avons entendu dans l’intérieur de cette île, ne permet pas de douter qu’il ne travaille constamment à s’y fortifier avec soin.

Il y a trois ou quatre jours, on voyait dans cette île beau­coup plus de landwehr que de troupes régulières ; aujourd’hui nous n’y avons vu que de ces dernières troupes.

À l’instant je reçois un nouveau rapport, ainsi qu’une lettre de l’officier du génie. J’envoie des pontonniers, des sapeurs et des marins.

Le général Puthod, qui est à Hambourg, me rend compte que 20 barques chargées de munitions sont parties de Thében pour Presbourg ; j’envoie vérifier ce rapport, reconnaître l’île en face de Theben et voir ce qu’on pourrait faire pour gêner les communications de l’ennemi par eau et par terre.

L’ennemi a une communication de va-et-vient pour son île de droite, et une certaine quantité de barques avec laquelle il peut augmenter en très-peu de temps le nombre de ses troupes.

P.S. — J’ai l’honneur de faire connaître à Votre Majesté que le colonel de gendarmerie Saunier, ancien commandant de la place de Varsovie, vient d’arriver à Vienne, ayant quitté Varsovie en vertu de la convention faite pour cette place.

J’ai l’honneur de recommander à Votre Majesté le colonel Saunier, officier très-estimable, qui est à même de rendre de bons services à Votre Majesté, par son excellente tête et par toutes les qualités qui constituent un militaire distingué.

 

Wolfstfhal, 10 juin 1809, quatre heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’envoyer à Votre Majesté le Rapport du général Lasalle, d’hier au soir. Il n’est pas douteux maintenant que l’ennemi n’ait porté des forces assez considérables entre le Wieselburger et le Danube.

Si Votre Majesté juge à propos de m’envoyer le général Pajol, quels que soient les projets de l’ennemi, j’essayerai de les rendre vains. D’après les dispositions que j’ai prises, je n’aurai besoin que de laisser très-peu de monde dans les retranchements d’Engerau, pour empêcher l’ennemi de sortir des siens.

Dans cet état de choses, j’ai cru ne devoir point me décider à ordonner une attaque avant d’avoir mis Votre Majesté à portée de juger s’il ne serait pas trop dangereux de l’entre­prendre et de me donner des ordres définitifs. D’après ces nouveaux renseignements, ma lettre, le plan qui l’accom­pagne et la note de M. le colonel Blin, explicative de ce plan, seront remis à Votre Majesté par mon chef d’état-major, qui, ayant une parfaite connaissance des localités, des dis­positions de l’ennemi et des nôtres, pourra lui donner tous les éclaircissements qu’elle désirera.

Conformément aux intentions de Votre Majesté, j’ai ordonné au général Lasalle de faire une nouvelle reconnaissance dans l’ile de Raab; pour lui faciliter le moyen de disposer de toutes Les troupes et de la faire aussi forte que Votre Majesté le désire, je donne l’ordre au générai Gudin d’envoyer un de ses régiments à Karlsbourg; ainsi, le général Lasalle pourra disposer de son infanterie hessoise, de ses deux bouches à feu et de la cavalerie dont il pourra avoir besoin.

Votre Majesté trouvera ci-joint le rapport d’un sergent du régiment de Duca, qui faisait partie des 28 prisonniers que nos troupes firent le 7 de ce mois, et celui de deux bateliers qui avaient été employés à la conduite du bateau qui les passait.

 

 

Wolfsthal, 10 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté un rapport du général Lasalle, d’aujourd’hui à quatre heures et demie du matin, par lequel il m’annonce qu’il a réuni les matériaux nécessaires à la construction d’un pont sur le Wieselburger. L’officier du génie qu’il attendait a dû être rendu près de lui une demi-heure après la date de son rapport.

Les barques que j’attendais de Petronell et d’Hainbourg pour organiser les moyens de passage sur l’ile de droite de l’ennemi sont arrivées à l’entrée de la nuit. Elles ont éprouvé une vive fusillade et quelques coups de canon en passant devant Theben. L’ennemi les a accompagnées avec 4 ou 500 hommes pendant plus d’une heure; nous n’avons eu que 7 ou 8 blessés. La dernière barque a échoué sur la rive droite; les 7 ou 8 marins qui la montaient, à l’exception de deux, ont pris l’épouvante et se sont sauvés dans l’ile. L’officier de voltigeurs qui était de garde sur cette barque, avec les deux marins restés et quelques voltigeurs, ont relevé la barque qu’ils ont remise à flot, et l’ont conduite à sa destination. Je compte que je pour­rai dans l’après-dinée faire l’attaque de l’ile droite de l’ennemi.

P. S. —Je joins ici une lettre que mon chef d’état-major reçoit à l’instant du général Lasalle.

Votre Majesté m’avait annoncé que le général Marulaz devait se porter à Bruck. Je lui ai en conséquence adressé la nuit passée une lettre pour lui demander de porter deux esca­drons entre le Neusiedler See et la Leitha. On n’a point trouvé le général Marulaz à Bruck, et la lettre vient de m’être rap­portée.

 

Wolfsthal, 12 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j*ni l’honneur d’adresser à Votre Majesté quatre rap­ports du général Lasalle.

Conformément aux intentions de Votre Majesté dont le général Compans m’a donné connaissance, tout va être disposé aujourd’hui pour faire demain sur les îles occupées par l’ennemi un feu d’artillerie lent, mais continu, dirigé sur le point où il pourra faire le plus de mal à ses troupes, les fati­guer et les inquiéter. En conséquence nos bivouacs vont être établis en arrière de la ligne où les boulets perdus de l’ennemi pourraient arriver; nos soldats et chevaux du train, ainsi que les caissons, seront aussi placés en arrière de cette ligne. Les canonniers resteront seuls à leurs pièces : quelques détache­ments de soldats bons tireurs seront placés dans des épaulements à côté des batteries pour tirer sur les canonniers.

Le colonel Blin reçoit ordre de faire faire quelques manne­quins qui seront placés dans des bateaux qu’on montrera à l’ennemi pour lui faire croire à des tentatives de passage et l’obliger à se mettre en évidence pour s’y opposer.

En général, toutes les dispositions que Votre Majesté a chargé le général Compans de me faire connaître recevront leur exécution.

Je me rends à l’instant à Ragendorf pour connaître les loca­lités et les dispositions des troupes du général Lasalle.

P. S. — Je transcris un rapport que je reçois à l’instant du général Duppelin.

12 juin 1809, une heure après midi.

« A midi s’est présenté derrière la batterie de droite de l’ennemi et vis-à-vis de la maison blanche, un officier général accompagné de plusieurs autres officiers. L’officier général, après avoir lorgné un moment cette maison, et l’officier du génie crayonné pendant cinq minutes, a fait sortir deux pelotons de grenadiers hongrois qui se sont placés en colonne entre les chevaux de frise et la coupure de leur côté.

« Aussitôt quelques coups de fusil sont partis du côté de l’ennemi, auxquels nous avons riposté, et leur feu d’artillerie a commencé sur tous les points. La nôtre a joué de même, et ce feu a duré jusqu’à une heure moins un quart.

« A notre premier coup de canon, les grenadiers hongrois se sont jetés en désordre derrière leurs retranchements.

« L’ennemi a brûlé les maisons qui se trouvaient dans le village d’Engerau dans la presqu’île de gauche. Il n’a pu parvenir à brûler celle qui nous sert d’observatoire, qui cependant a été criblée de coups de canon,

« Tout est rentré dans l’ordre, et nous sommes tranquilles. »

 

 

Wolfsthal, 12 juin 1809, à minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, ainsi que j’ai eu l’honneur de l’annoncer aujourd’hui à Votre Majesté, j’ai été reconnaître les dispositions faites, par le général Lasalle pour pousser des reconnaissances dans l’ile de Raab. J’étais à cinq heures du soir au pont que ce général a fait jeter sur Wieselburger-Donau, un peu au-dessous de Ragendorf, lorsque j’ai vu arriver environ trente-six hussards de l’insurrection hongroise qui venaient d’être faits prisonniers dans cette île. Le général Lasalle que j’avais fait appeler est arrivé quelques instants après et m’a appris que le général Piré, après avoir passé le pont avec une partie du 8e de hus­sards, s’était dirigé par Frauendorf sur Halassi; qu’avant d’arriver à ce dernier endroit, il avait rencontré deux escadrons de hussards de l’insurrection hongroise, et que les ayant fait charger, il les avait culbutés dans un marais, leur avait fait trente-six prisonniers, tué une vingtaine d’hommes dans le nombre desquels se trouvait le lieutenant—colonel qui les com­mandait, et blessé beaucoup de monde. Les restes de ces esca­drons ont été poursuivis jusqu’au-delà d’Halassi, et le général Piré devait pousser sa reconnaissance aussi loin qu’il le pour­rait sans rien compromettre.

Le général Lasalle a dû établir ce soir son quartier général à Frauendorf.

Votre Majesté trouvera ci-joint une note renfermant les réponses faites par un des prisonniers, le seul qui sût parler allemand, aux diverses questions qui lui ont été faites.

P.S,—Ci-joint une lettre du général Lasalle au duc d’Istrie, qui était portée par une ordonnance, et dont j’ai pris connais­sance, pensant qu’elle pouvait donner des nouvelles.

 

Wolfsthal, 12 juin 1809, à minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté un écrit que deux colporteurs distribuaient à Ratisbonne. Ils ont été arrêtés par l’ordre du commandant de la place, mon aide de camp Trobriant. Les colporteurs ont fait connaître l’imprimeur, qui a été également arrêté. Ils sont tous les trois détenus dans les prisons de Ratisbonne jusqu’à ce que Votre Majesté ait fait connaître ses ordres.

 

Wolfsthal, 13 juin 1809, dix heures du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, Son Altesse le prince vice-connétable major général, m’adressant copie de la lettre qui a été écrite à Votre Majesté, le 11 de ce mois, à minuit et demi, par Son Altesse Impériale le prince vice-roi, m’annonce qu’il paraîtrait que l’archiduc Jean se dirigeait sur Raab, où il a dû arriver hier ou aujour­d’hui; qu’il devait être suivi vivement par l’armée du Vice-Roi, et qu’il était important que je me tinsse en communication avec Son Altesse Impériale et que je pusse même marcher à son secours pour appuyer sa gauche, si cela était nécessaire.

Je me suis empressé de communiquer au général Lasalle la lettre du Vice-Roi et de lui ordonner d’achever la tête du pont qu’il a fait jeter d’après mes ordres au-dessous de Ragendorf; d’y faire travailler le bataillon du 12e régiment de ligne qui y est établi; de se tenir en communication avec le Vice-Roi afin d’appuyer sa gauche si cela devenait nécessaire, et d’envoyer un fort parti pour communiquer avec le générai Montbrun, en dirigeant ce parti sur Csorna et Papocz.

J’ai également chargé ce général de prescrire à toutes ses troupes ainsi qu’au général Marulaz de redoubler d’activité et de surveillance dans le service. Ma dépêche lui a été portée par un de mes officiers.

Si Votre Majesté croyait pouvoir m’envoyer sans inconvé­nient la brigade Pajol et la division Friant, j’emploierais cette division pour contenir l’ennemi dans ses îles devant Presbourg et observer le Danube depuis cet endroit jusqu’à Petronell ; je pourrais disposer des divisions Gudin et Puthod et de la brigade Pajol pour me porter sur Raab, et dans ce cas, j’ose­rais répondre à Votre Majesté que ses intentions seraient par­faitement remplies. Le corps du général Hiller étant à Pres­bourg, dans les îles et aux environs, si Votre Majesté ne m’en­voyait point la division Friant, j’aurais de la peine à pouvoir disposer, avec l’assurance de ne rien compromettre, de toute la division Gudin, car l’ennemi, qui a beaucoup de moyens de passage, pourrait profiter de mon mouvement sur Raab pour entreprendre quelque chose, et la division Puthod, placée depuis Presbourg jusqu’à Petronell, ne pourrait qu’être faible sur tous les points

J’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté le dernier rapport du général Lasalle.

P.S.—Je reçois h l’instant du général Lasalle un rapport du 13, à six heures du soir ; j’ai l’honneur d’en adresser ci-joint copie à Votre Majesté,

 

 

Wolfsthal, 14 juin 130S.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’envoyer à Votre Majesté la copie d’une lettre que je reçois à l’instant du général Lasalle. Je vous ai demandé ce matin, par M. de Castellane, les ordres qui avaient été donnés à ce général. Je joins ici la copie de ma réponse à sa lettre.

La disparition des postes ennemis de cette nuit, de Barafeld, est un indice de la retraite de l’ennemi de Baab.

 

 

Wolfsthal, 14 juin 1800, neuf heures trois quarts du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté deux rap­ports du général Lasalle, que j’ai reçus à un quart d’heure de distance.

Dès la réception du premier, j’ai écrit à ce général que les renseignements qu’il renfermait étaient une raison de plus pour que sa division et celle du général Marulaz exécutassent le mouvement que j’avais ordonné et établissent la commu­nication avec la gauche du Vice-Roi.

Sur le second rapport, je lui ai aussi écrit pour s’assurer du prêtre dont il y est question, et dont la déclaration paraît d’autant plus extraordinaire que le débarquement de l’ennemi ne pouvait avoir pour objet de jeter des troupes dans l’île de Raab, puisqu’il pouvait le faire de Raab même, sans rien compromettre, et que si c’était pour renforcer l’armée à Raab, il était plus naturel de le faire quelques lieues plus bas, où il pouvait être effectué sans aucun risque.

L’ennemi a occupé une île à la droite de la sienne de droite ; mais il y a le grand bras du Danube entre nous et cette île.

 

Wolfsthal, 14 juin 1809, onze heures et demie.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu, avec la lettre que Votre Majesté m’a fait l’honneur de m’écrire hier, à neuf heures et demie du soir, celle de Son Altesse Impériale le prince vice-roi qui y était jointe ; je me suis empressé d’ordonner au générai Lasalle de concentrer la division du général Marulaz et la sienne, et de la mettre en marche, la première pour aller passer la Raab à la hauteur de la gauche de l’armée du Vice-Roi et l’appuyer, et la seconde pour la porter en avant par les deux rives de Wieselburger-Donau, de manière à se rapprocher le plus possible de Raab, se lier par sa droite avec la gauche du général Marulaz et observer par sa gauche le gros bras du Danube dans l’île de Raab,

J’ai en même temps chargé le général Lasalle de donner de ses nouvelles à Son Altesse Impériale, et de me tenir au courant des opérations de l’armée d’Italie et de tout ce qui se passera devant ses troupes.

Je réitère à Votre Majesté la demande que je lui ai faite cette nuit de la division Friant et de la brigade Pajol. J’aurais alors des forces suffisantes et de l’ensemble.

Votre Majesté trouvera ci-joint le dernier rapport que j’ai reçu du général Lasalle.

Un maréchal des logis de l’insurrection hongroise, qui était du nombre des prisonniers faits en avant de Frauendorf, a déclaré qu’il y a environ un mois, six escadrons d’insurrection avaient été formés ans environs de Stulhweissenburg; qu’il y a quinze jours, ils en étaient partis. Deux escadrons faisant 300 hommes se sont portés aux avant-postes en avant de Raab et ont vu, en passant par cette ville, environ 6,000 hom­mes d’infanterie d’insurrection. Les quatre autres escadrons ont été en avant de Stulhweissenburg. On disait, il y a huit jours, qu’il y avait vers cette ville un grand rassemblement de troupes d’insurrection ; il devait même y avoir de l’infanterie de ligne; mais il croit qu’elle ne consistait qu’en bataillons ou compagnies de réserve dépendant des régiments hongrois qui sont à l’armée. Les troupes de Stulhweissenburg et celles de Raab sont, dit-il, aux ordres de l’archiduc palatin.

 

Des hauteurs de Kitsee, 13 juin 1809, cinq heures du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, je viens de recevoir une lettre de Son Altesse le prince vice-connétable, major général, datée d’hier, dans laquelle il parait douter du fondement des motifs qui m’ont fait annoncer à Votre Majesté que le corps du général Hiller était à Presbourg; tous les rapports depuis plusieurs jours annoncent une augmentation de troupes dans les îles, à Presbourg et sur tous les points de la rive gauche qui peuvent être découverts par nos postes ; les régiments qui étaient devant nous appartenant au corps du général Hiller, j’ai dû croire naturellement que c’était l’arrivée du reste du corps de ce général qui avait produit une augmentation de troupes; mais un fait constant, c’est que cette augmentation est réelle, que depuis cinq ou six jours on n’aperçoit plus de landwehrs nulle part, et qu’hier encore, à six heures du soir, on a vu un gros bataillon avec six canons et autant de caissons arriver à Theben et en repartir aussitôt pour se diriger sur Presbourg.

Il est très-possible que depuis quarante-huit heures une partie de ces troupes ait descendu le Danube.

Son Altesse le major général m’annonce en même temps que Votre Majesté désire avoir un rapport sur tout ce que j’ai fait, en ajoutant que les jours perdus sont des jours où l’ennemi se fortifie, que Votre Majesté croit qu’avec une canonnade fortement soutenue, l’île eût été le tombeau de l’ennemi, et que la tête du pont qu’il occupe n’ayant que 500 toises de long, s’il y a 4 ou 5,000 hommes, il ne peut y rester sans perdre beaucoup de monde, et que si le commandant de l’ar­tillerie s’était attaché à bien placer les batteries, chacun de nos coups de canon devait tuer beaucoup de monde à l’en­nemi, tandis que les siens ne pouvaient nous tuer que quelques canonniers.

Aucune de nos batteries ne peut enfiler leurs retranchements, et quelles que soient les reconnaissances faites, aucune localité n’a pu remplir cet objet; l’examen du plan, qui est exact, est suffisant pour s’en convaincre. On tire aussitôt qu’on aperçoit deux hommes réunis; la nuit dernière, on a jeté une trentaine de petites bombes qui presque toutes ont éclaté, et cependant MM, le chef de bataillon Thuillier et le capitaine Decastres, qui étaient fort près des retranchements, n’ont pas aperçu que cela fit le moindre effet; ils n’ont entendu que les cris de weredaw de quelques sentinelles.

Enfin j’ai fait mettre à exécution tout ce que Votre Majesté a prescrit à mon chef d’état-major, le rapport ci-joint en est une nouvelle preuve; je suis convaincu qu’on userait toutes les munitions sans pouvoir faire abandonner les îles aux ennemis et sans leur faire beaucoup de mal.

Votre Majesté remarquera que les deux pièces de canon dont l’ennemi s’est servi pour tirer sur ce mannequin avaient été cachées jusqu’à présent.

Les deux officiers du génie que je viens de citer ont reconnu de nouveau la coupure de l’ennemi; ils l’ont jugée à peu près d’environ 40 pieds, et nuls gués dans le courant d’eau qui est auprès des retranchements, quoique le Danube soit beaucoup baissé. Indépendamment de ce cours d’eau, il y a entre nous et l’ennemi une flaque d’eau, mais qui est guéable en plu­sieurs endroits, ce qui pour l’ennemi n’est pas un obstacle, mais à son avantage, étant toujours libre de jeter des ponts sur le bras d’eau qui est auprès de ses retranchements.

P. S, — N’ayant pas sous la main, dans ce moment, le rapport du colonel du 7e d’infanterie légère, je l’adresserai demain à Votre Majesté; il rend compte qu’un bateau, portant des mannequins arrangés par le colonel Blin, a débouché, et que l’ennemi a tiré dessus avec deux pièces qu’on ne lui connaissait pas, que tout le monde s’est jeté dans les retran­chements, et qu’on n’a pas pu tirer sur eux.

 

Des hauteurs de Kitsee, 15 juin 1809, six heures du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, je n’avais point reçu de rapport du général Lasalle depuis hier minuit; j’avais envoyé jusqu’à quatre officiers. Je me hâte d’envoyer à Votre Majesté celui que je reçois à l’instant.

J’envoie le général Gudin à Altenbourg, où il couchera ce soir avec 6,000 hommes et 14 pièces de canon; il en partira demain de grand matin; suivant ce que j’apprendrai, je resterai devant Presbourg ou je le suivrai, suivant les nouvelles qui me parviendront et les événements.

 

Kitsee, 15 juin 1809, dix heures moins un quart du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté deux rapports que je reçois du général Lasalle.

Le général Gudin est parti avec 6,000 hommes et quatorze bouches à feu ; j’ai écrit à Son Altesse le Vice-Roi pour le pré­venir, conformément aux intentions de Votre Majesté, que ces troupes ainsi que celles du général Marulaz sont à sa dis­position, dans le cas où il en aurait besoin.

Je réunis ici ce qui reste de la division Gudin et la majeure partie de la division Puthod, en laissant quelques détache­ments pour la garde des pièces et des retranchements, et observer la rive gauche du Danube.

S’il survenait des événements du côté de Raab et qu’il n’y eût rien de nouveau de ce côté-ci, j’irais rejoindre le général Gudin.

 

 

Kitsee, 16 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté les derniers rapports du général Lasalle et celui du colonel Lamaire que j’avais annoncé dans ma lettre d’hier.

Sur ce que m’a écrit le général Lasalle que le général Lauriston manquait de bouches à feu, j’ai envoyé les trois petits mortiers qui me restaient et ce qu’il y avait d’approvisionne­ment.

J’ai l’honneur de vous communiquer, Sire, un extrait d’une lettre de mon commissaire général, pour la principauté de Łowicz, qui fait connaître l’esprit qui anime la nation polo­naise et la bravoure de ses troupes.

 

Kitsee, 16 juin 1809, midi.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté un rapport que je reçois à l’instant du général Lasalle.

Le général Marulaz, avec ses trois régiments, était le 15 à Teth, entre Papa et Raab; il avait envoyé prendre les ordres de Son Altesse le Vice-Roi.

 

Kitsee, 16 juin 1809, onze heures et demie da soir.

AU MAJOR GÉNÉRAL DE LA GRANDE ARMÉE

PRINCE DE NEUFCHATEL, ETC.

Monseigneur, j’ai reçu la lettre de Votre Altesse, de ce jour, datée de midi ; déjà j’avais recommandé au général Lasalle, dans le cas où Raab ne serait pas pris, de faire jeter un pont près de Raab pour sa communication avec le Vice-Roi; je lui réitère cet ordre. Je lui ai envoyé les pontonniers qui sont disponibles.

J’ai fait partir un officier pour se rendre près du Vice-Roi, pour ce qui est relatif aux munitions de guerre; j’ai fait venir une partie de mon parc pour remplacer celles que le général Gudin sera dans le cas de fournir.

J’ai invité le général Lasalle à faire détruire tous les ouvrages que l’ennemi avait faits entre la Rabnitz et la Raab.

Je fais porter à Votre Altesse le dernier rapport du général Lasalle.

 

Kitsee, 17 juin 1809, six heures et demie du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre de Votre Majesté, du 16 juin, à quatre heures après midi. Toutes les dispositions que Votre Majesté me prescrit ont été ou vont être prises. Plusieurs dispositions avaient été prévues, entre autres l’envoi des petits mortiers et des pontonniers.

Je profite du passage d’un officier de Son Altesse Impériale le Vice-Roi pour vous écrire cette lettre; les prisonniers ne passeront pas par ici.

P. S. — La proclamation de Votre Majesté aux Hongrois n’est presque pas connue ; il ne m’en reste plus un seul exem­plaire. Les villages de ce pays sont tous habités; il est vrai qu’il y a eu très-peu de désordres ; les vues de ce pays ne paraissent pas hostiles.

 

 

Kitsee, 18 juin 1809, quatre heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre de Votre Majesté datée du 17 juin à huit heures du matin.

Les convois de munitions annoncés dans le rapport de votre officier d’ordonnance sont arrivés dans la matinée; je les ai dirigés tout de suite sur Altenbourg, d’où on les enverra par l’île de la Raab à l’armée d’Italie, qui a déjà dû recevoir aujour­d’hui des munitions de 8 et d’infanterie qu’a fournies le général Gudin; il est à craindre que les caissons de l’armée d’Italie qui ont été à la charge n’aient pris la route d’OEdenburg ou peut-être même aient été dirigés sur Graetz.

II n’y a dans les divisions Gudin et Puthod que trois obusiers qui aient été envoyés au général Lasalle, qui a l’ordre de prendre ceux du général Lauriston pour l’établissement de ces obusiers, ainsi que deux petits mortiers.

Les prisonniers faits par Son Altesse Impériale le Vice-Roi n’ont point pris cette route; j’envoie à Votre Majesté les résultats de quelques interrogatoires de ceux de quelques prisonniers que le général Lasalle a faits dans les faubourgs de Raab, entre autres ceux de deux officiers : le résultat est que la garnison de Raab n’est que de 1,500 hommes formés par les réserves de trois régiments, qu’à la bataille du 14, il ne devait pas y avoir de troupes de l’archiduc Charles, que les rives du Danube depuis Presbourg jusqu’à Raab doivent être gardées par des landwehrs de la Moravie et quelques escadrons de l’insurrection hongroise, qu’aucune troupe de l’armée autrichienne n’a paru de ces côtés venant du Danube.

J’adresse à Votre Majesté les différents rapports du 17 du général Lasalle.           ,

L’ennemi parait craindre qu’on ne cherche à lancer des moulins sur son pont; il vient d’en détruire vingt-trois en face d’Aswang, qui est dans l’île de la Raab.

Tous les rapports s’accordent à dire qu’il y a un pont volant à Komorn ; pour pouvoir détruire le premier, je pense qu’il faudrait qu’on envoie des officiers avec les marins qui ont été dirigés ici et que j’ai envoyés au général Lasalle, pour orga­niser des moyens de destruction contre ce pont.

Je prie Votre Majesté de lire le rapport du général Lasalle du 17 juin à une heure après midi, cela lui donnera une idée des immenses approvisionnements qui doivent se trouver dans Raab; j’ai recommandé au général Lasalle d’empêcher le gas­pillage de ces approvisionnements et de ne rien négliger pour les faire remonter dans le Wieselburger.

L’ordre de destruction du camp retranché a été révoqué jusqu’à la décision que donnera Votre Majesté d’après les connaissances qui sont données des ouvrages faits par l’ennemi.

J’ai fait passer à Son Altesse Impériale le Vice-Roi la lettre que Votre Majesté lui écrit et qui accompagnait celle que j’ai reçue du 17 juin à huit heures du matin.

A l’instant je reçois, Sire, votre lettre du 17 juin à quatre heures après midi ; je prie Votre Majesté de donner l’ordre à M. l’intendant de m’envoyer des préposés et des bouchers, et je livrerai les 2,000 bœufs que Votre Majesté me demande. Je chargerai l’ordonnateur en chef de faire établir un hôpital à OEdenhurg.

Quant au millier de quintaux de farines, le nombre des employés que j’ai étant insuffisant, je prie Votre Majesté de donner ordre à M. l’intendant général de m’envoyer des com­missaires des guerres et des employés que j’enverrai à la division Lasalle. Ce général mettra à leur disposition les subsistances trouvées sur des bateaux; on les débarquerait et l’on fournirait des moyens de transport.

Son Altesse Impériale désire que je laisse encore à Altenbourg le général Gudin; comme il n’est qu’à six heures de marche d’ici, je n’y vois point d’inconvénient.

Le général Lasalle a un poste au confluent du Danube et du Wieselburger.

Je ferai répandre les proclamations aussitôt que je les aurai reçues.

Il est d’un grand avantage pour le bien du service de Votre Majesté de répandre des écrits dans le pays pour contrebalancer les bulletins autrichiens et pour éclairer les habitants.

 

 

Kitsee, 18 juin 1809, neuf heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, je m’empresse d’adresser à Votre Majesté un rapport que je reçois à linstant du général Lasalle sur une colonne ennemie qui est coupée.

Je donne l’ordre au générai Gudin qui est à Altenbourg d’envoyer des reconnaissances par Saint-Peter et Walla sur la route de Saint-Myklas ; si cette colonne se trouvait entre le lac Neusiedl et lui, de marcher dessus et de m’en prévenir sur-le-champ, parce que je marcherais avec quelques milliers d’hommes d’ici. J’envoie 15 chevaux qui sont les seuls qui sont à ma disposition à Boldog-Dszony, qui donneront des nouvelles au général Gudin et à moi; enfin j’écris au général Defrance pour qu’il envoie aux nouvelles de l’autre côté du lac à OEdenhurg, et qu’il en fasse part directement à Votre Majesté et à son général de division.

Je suppose que le général Marulaz aura déjà reçu des ordres de Son Altesse Impériale ; je fais écrire à ce général par le général Lasalle que si un général d’avant-garde ne peut pas mettre son avant-garde en marche sans ordre, il est de son devoir de faire éclairer les mouvements des colonnes ennemies, et qu’il n’y a pas d’exception pour celles qui sont coupées.

 

J’ai fait écrire au général Bertrand par le colonel Blin pour le prévenir que nous avions réuni 50 forts grappins, beaucoup de cordages, des pontons et autres objets.

Comme ils deviennent inutiles ici, on lui demande des baquets pour le transport des pontons; quant aux cordages, on peut les faire transporter sur des voitures du pays.

 

Kitsee, 18 juin 1809, quatre heures et demie de l’après-midi.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, le général Gudin m’informe que le général Lauriston ayant demandé six pièces de 12, il s’est empressé de lui envoyer les deux qui font partie de l’artillerie de sa division : il en existe une troisième à la division Puthod, je donne l’ordre qu’elle parte à l’instant pour Raab.

Le général Lauriston assurant qu’il ne peut rien entre­prendre sur cette ville s’il n’a six pièces du calibre de 12, je m’empresse d’en informer Votre Majesté afin de la mettre à portée de juger s’il ne serait pas convenable de lui en envoyer trois autres de Vienne.

Je reçois à l’instant une lettre de Son Altesse Impériale le prince vice-roi, dans laquelle il m’annonce que les munitions de 4 et de 8 que je lui ai fait passer lui sont inutiles, attendu qu’il n’y a pas d’artillerie de ce calibre : Son Altesse Impé­riale a accepté les munitions de 12 et celles d’infanterie : elle en demande instamment des calibres de 3 et de 6, ainsi que des obus de 24 ; mais n’ayant point de ces munitions-ci, il m’est impossible de lui en envoyer. L’artillerie régimentaire n’a qu’un caisson par pièce ; il me parait indispensable qu’elle le conserve.

Les caissons expédiés par le général Lariboisière sont partis hier d’ici : ils doivent être rendus à leur destination.

M. Chlapowski, officier d’ordonnance de Votre Majesté, qui arrive des environs de Raab, m’assure que la colonne autri­chienne égarée, dont il a été question dans les rapports du général Marulaz, est loin d’être aussi considérable que ce général l’a dit. J’ai envoyé des officiers dans toutes les direc­tions pour avoir des nouvelles de cette colonne, et pris des mesures pour marcher à elle, si on la découvre.

 

Kitsee, 19 juin 1809, cinq heures du soir

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre de Votre Majesté du 18 juin à deux heures après midi ; déjà M. l’intendant général a envoyé M. le commissaire Désirât qui m’a annoncé des préposés pour ce soir ou demain. Aussitôt leur arrivée, je les enverrai au général Piré; les envois de bœufs et de farine pourront com­mencer après-demain.

J’espère qu’il y aura un pont sur la Raab, établi aujourd’hui par les soins du général Lasalle ; il y en aura un entre Raab et Weneck par les soins du général Piré.

J’envoie l’ordre pour l’établissement d’un hôpital à Bruck.

Je n’ai ni blessés ni embarras; ainsi les ordres de Votre Majesté n’éprouveront aucun délai dans leur exécution.

Un des deux régiments du général Pire rejoindra le général Lasalle, à qui le général Gudin a déjà envoyé ce matin deux bataillons.

J’ai également fait connaître à ce général les intentions de Votre Majesté, relativement à l’emploi de la brigade du géné­ral Bruyère,

J’ai envoyé une compagnie à Bruck.

J’ai annoncé, Sire, au général Gudin qui est à Altenbourg, l’arrivée de M, de Metternich ; j’envoie à Votre Majesté copie de ce que mon chef d’état-major a écrit par mes ordres au général Gudin à cet égard, parce que si la conduite que je lui prescris ne répondait pas aux intentions de Votre Majesté, je m’empresserais de m’y conformer.

J’adresse à Votre Majesté un rapport du colonel Blin sur Kitsee; j’attends ses ordres pour commencer les travaux qui seraient finis sous trois jours pour faire de cet endroit un excellent fort.

Le général Defrance avait annoncé que l’ennemi avait fait un ouvrage important vis-à-vis de Deutsch-AItenbourg, près Hainbourg; j’ai envoyé le colonel Blin le reconnaître : ci- joint son rapport ; cet ouvrage n’a d’autre but que de gêner la communication du Danube.

J’adresse à Votre Majesté différents rapports du général Lasalle et de l’officier du génie que j’ai envoyé près de lui.

Elle y verra qu’on dit qu’un courrier de Votre Majesté, porteur de dépêches pour le Vice-Roi, s’est noyé avec sa dépêche; peut-être est-ce un courrier de la poste militaire qui portait des paquets à l’armée d’Italie, qui a passé avant- hier soir ici.

Le général Lasalle m’annonce que le général Marulaz marche sur Neusiedlesee, où il suppose que s’est dirigée la colonne ennemie qui a été coupée par le Vice-Roi. On avait dit que cette colonne s’était dirigée du côté de Saint-Miklas ; ces renseignements ne me paraissent pas exacts. Un officier que j’ai envoyé exprès, et qui est rentré ce matin, s’est porté jusqu’à Pamhagen, où il n’y avait rien de nouveau; il a vu des personnes venant de Saint-Miklas, qui n’avaient aucune nouvelle de l’ennemi.

J’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté une relation qui m’a été envoyée de Vienne et que l’ennemi a dû faire sur l’attaque du village d’Engerau.

Le général Lasalle m’a envoyé une cinquantaine de prisonniers qu’il a ramassés dans les faubourgs de Raab; ci-joint leur interrogatoire.

P, S. — A l’instant, le général Lasalle me fait passer le rapport ci-joint du général Marulaz; ainsi cette colonne a trop d’avance pour qu’il puisse la rejoindre.

 

Kitsee, 19 juin 1809, cinq heures et demie du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, à l’instant, je reçois la lettre de Votre Majesté du 19, à neuf heures du matin. Les réquisitions de bœufs et de farine sont en activité, ainsi que l’enlèvement des grains et farines qui ont été trouvés dans une île près de Raab ; j’espère que sous cinq jours tout sera enlevé, et que les derniers des envois qui commenceront demain ou après seront achevés.

J’avais recommandé au général Gudin de ne point laisser passer la rivière aux caissons de munitions; je lui écris de nouveau, ainsi qu’au général Lasalle

J’établirai les relais pour les pièces de 18 et les obusiers, depuis Hambourg jusqu’à Raab.

Le général Lasalle me mande qu’il ne lui reste plus que 80 coups à tirer pour les petits mortiers que je lui ai envoyés ; les approvisionnements n’étaient que de 750 en tout. Le reste a été consommé devant Presbourg; j’ai écrit au général Hanicque pour en faire obtenir du grand parc, mais un ordre de Votre Majesté lèvera toutes les difficultés; il faudrait aussi quelques munitions de 12.

M. de Metternich vient de passer; il s’est arrêté un moment à la poste et a continué sa route pour Wieselburg,

 

 

Kitsee, 20 juin 1809, midi.

A L’£MPEUEUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre de Votre Majesté du 19 juin, à deux heures après midi, et les pièces qui y étaient jointes; je prends des mesures pour qu’elles aient la plus grande publicité. On ne peut trop instruire ces gens-ci pour détruire l’effet des nouvelles autrichiennes; il ne peut qu’être très-utile aux inté­rêts de Votre Majesté d’y faire circuler des feuilles publiques dont la rédaction soit soignée.

En conséquence des ordres de Vôtre Majesté, j’avais pres­crit au général Lasalle, qui du reste doit se conformer à ce que lui mandera le général Lauriston, de mettre en batterie les pièces de 12 et les obusiers du corps d’armée que je com­mande sur son point; mais sur la lettre ci-jointe du prince Eugène, je mande au général Lasalle de faire placer ces pièces de 12 sur le point qui sera indiqué par le général Lauriston.     .

Les quatre pièces de 18 et les deux obusiers avec leurs munitions arrivent à l’instant, et partent de suite pour se rendre au pont établi sur la Raab.

 

 

Kitsee, 21 juin 1809, sept heures et demie du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté les derniers rapports du général Lasalle, à l’un desquels se trouve jointe une lettre du général Marulaz, qui fait connaître la direction de la colonne ennemie sur Pesth.

Le convoi des deux pièces de 12 et des obusiers que Votre Majesté m’a annoncé, n’arrivera à Hainbourg que dans quelques heures; les relais sont préparés pour le conduire promptement à Raab, ou il paraît que les munitions manquent et qu’on s’est trop pressé de commencer le feu.

 

 

Kitsee, 21 juin 1809, neuf heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur de rendre compte à Votre Majesté que ce matin à une heure, l’ennemi a débarqué 400 hommes, moitié du régiment de Stein et moitié landwehr, dans une île vis-à-vis de Theben, que nous occupions par quelques postes, qui se sont repliés sur une petite tête de pont que j’y avais fait établir et vis-à-vis de laquelle l’ennemi s’est présenté; il y a eu une fusillade assez vive.

Le général Gérard, dit Vieux, s’est porté à la tête de pont avec plusieurs pièces d’artillerie et quelques compagnies : on a attaqué l’ennemi qui a été culbuté; sa perte doit être de 40 ou 50 blessés ou tués. On a trouvé de ces derniers une dizaine dans l’île. Le nombre des prisonniers qu’on a faits et qu’on m’a envoyés est de 40. Il paraît qu’on en ramassera encore dans l’île, qui est assez grande.

Parmi les prisonniers autrichiens, il y a un sergent-major du régiment de Stein qui m’a paru très-intelligent et que j’adresse à Votre Majesté. Il est du 5e corps, commandé par le général Rosenberg : une partie de ce corps est entre Marchegg et Presbourg.

Ce sergent-major était d’ordonnance à Presbourg, il y a trois jours, chez le général Bianchi; suivant son rapport, le régiment de Hiller y était arrivé depuis peu; il dit qu’il y a deux équipages de pont, l’un à une demi-lieue de Presbourg, qu’il a vu, et l’autre à une lieue, mais il n’a pas vu ce dernier; il l’a seulement entendu dire.

Je ferai questionner dans le plus grand détail les autres prisonniers, et j’adresserai à Votre Majesté leur rapport.

Notre perte est d’un homme tué et de 8 à 10 blessés.

L’ennemi a montré quatre ou cinq bouches à feu sur la rive gauche, du côté de Theben, pour protéger le rembarquement de ses troupes.

Ci-joint un premier interrogatoire des prisonniers; on en fera faire un avec plus de soin.

Je ferai observer Presbourg : si l’on s’apercevait de quel­ques mouvements de troupes, je ferai rapprocher le général Gudin d’ici.

 

 

Kitsee, 22 juin 1809, deux heures après midi.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu les deux lettres de Votre Majesté, du 21 juin, de quatre à cinq heures après midi.

Il parait que l’ennemi a laissé constamment une partie de son monde au pont d’embarquement; que lorsqu’il a vu son avant-garde repoussée, il n’a eu qu’à faire prendre le large ; en outre, il faisait nuit, et il est aussi vrai de dire que les troupes de renfort et les deux pièces d’artillerie ont un peu tardé d’arriver. Au reste, l’ennemi aura peu sauvé de son expédition de 400 hommes; il n’en a sauvé que la moitié, 45 ont été pris, plus de 50 ont été tués ou blessés auparavant l’embarquement : une barque contenant 40 hommes, dont 3 officiers, a coulé bas au milieu du Danube. On m’en avait fait le rapport, mais j’ai voulu le vérifier avant de l’annoncer à Votre Majesté; il est constant. Outre cela, l’ennemi a eu des blessés pendant sa traversée.

Je n’ai point de nouvelles des 80 caissons qui ont apporté des munitions au Vice-Roi, près de Raab; je les ai réclamés plusieurs fois et ai envoyé un officier.

J’ai écrit hier au général Lasalle, pour qu’il rapproche de lui le général Bruyère, et que ce général devait s’éclairer au loin par des partis.         ‘

C’est sur la déclaration du sergent-major prisonnier, que j’ai envoyé à Votre Majesté, que je lui ai annoncé l’arrivée du régiment du général Hiller.

Il paraît que les Autrichiens n’ont pas rendu M. Dodun. En conséquence, l’adjudant-commandant Avy va ramener M. de Metternich. Cet ambassadeur a fait le même métier qu’à Paris; il a pris des informations sur le camp, la force des troupes, etc. Un officier lui a répondu ce qu’il devait.

Le convoi des deux pièces de 12 et des munitions, dont Votre Majesté m’a envoyé l’état, a passé ici hier à quatre heures et demie après midi; il a relayé et est parti tout de suite. Les relais étaient prêts sur la route; il aura dû être rendu quinze ou seize heures après à Raab.

On va travailler au château de Kitsee. La coupure que désire Votre Majesté existait déjà indépendamment de celle de l’ennemi; j’en avais fait faire une qui a déjà 60 pieds de largeur; elle était nécessaire, car avant la flaque d’eau de notre côté était guéable dans presque toute sa longueur; actuellement elle s’est beaucoup agrandie, et elle n’est guéable nulle part. Un bataillon sera bien suffisant pour empêcher l’ennemi de déboucher de ce côté, mais il a tant de passage que ce bataillon ne pourrait pas tenir longtemps et serait obligé de se replier sur Kitsee, où, avec les travaux dont on va s’occuper et les obusiers et les quatre pièces de 12 (si le général Lauriston a l’ordre de les envoyer), le bataillon pourra tenir longtemps et obliger l’ennemi à déployer beaucoup de moyens d’artillerie.

 

 

Kitsee, 22 juin 1809, deux heures après midi.

A L’EMPEREUR ET ROI,

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté les déclara­tions des prisonniers faits hier; j’y joins aussi les interroga­toires faits à des prisonniers venant de l’armée d’Italie qui ont été pris le 14 et le 15.

Il est entré hier un régiment d’infanterie à Presbourg, venant du haut Danube ; pendant toute la journée, les postes qui sont vis-à-vis de Marchegg ont vu des barques, près de Hof, passer beaucoup de troupes, de caissons, et il parait même de l’artillerie, se dirigeant du côté de Presbourg. D’un autre côté, votre officier d’ordonnance, M. Talliouet, m’a dit qu’on avait vu il y a quatre ou cinq jours une colonne d’infanterie se diriger de Komorn sur Presbourg.

Il paraît certain que l’ennemi, depuis quelques jours, est en mouvement, et j’ai jugé qu’il ne pouvait qu’être utile de rapprocher la division Gudin; en conséquence, elle est partie d’Altenbourg et est arrivée depuis hier soir à Carlsbourg.       .

Il ne nous manque ici que de la cavalerie; je prie Votre Majesté de m’excuser si je reviens à la charge si souvent, mais c’est en raison de l’utilité que j’y attache. Je n’ai ici que 20 chevaux.

On a arrêté hier deux espions. L’un avoue tout, il nous en a signalé six que l’ennemi a envoyés depuis deux jours et que nous espérons attraper; il dit qu’il y a auprès de Presbourg un camp avec des tentes, et que ce camp est commandé par trois généraux.

L’ennemi a fait faire aussi des ouvrages près de Marchegg, le régiment de Stein y a travaillé.

P.S. — J’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté les derniers rapports du général Lasalle.

 

 

Kitsee, 22 juin 1809, deux heures après midi.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, à l’instant où je reçois la lettre de Votre Majesté du 21, huit heures du soir, j’écris à Son Altesse Impériale le Vice-Roi, pour lui faire connaître vos intentions de faire relever les troupes que le général Gudin a avec le général Lasalle

Le général Gudin a un officier près du général Piré, qui est dans l’île de Raab, afin d’être promptement instruit des tenta­tives que l’ennemi pourrait y faire. Le général Gudin déboucherait par la tête de pont de Ragendorf, qui est en très-bon état. J’ai donné l’ordre au général Lasalle de m’envoyer demain un de ses régiments de cavalerie, et de donner l’ordre u général Marulaz de rejoindre le plus tôt qu’il pourra.

Son Altesse Impériale ayant son quartier général dans les faubourgs de Raab, je lui ai transcrit la partie de la lettre de Votre Majesté relative au général Lauriston.

Je suis lié avec les postes du général Nansouty.

A l’instant, je reçois une lettre du général Piré que je fais passer à Votre Majesté ; j’écris à ce général qu’il faut qu’il établisse son quartier général sur la route de Medwe à Raab.

Je le préviens que le général Lasalle a l’ordre de lui envoyer le régiment qu’il lui avait pris, et que ce général, au premier avis, le renforcerait de ses troupes, et que l’armée d’Italie déboucherait par le pont de la Kis-Duna, pour culbuter les troupes autrichiennes qui voudraient chercher à occuper l’île de la Raab. Je me porterai, dans ce cas, également sur ce point avec la division Gudin et les autres troupes.

 

 

Kitsee, 23 juin 1809, neuf heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre de Votre Majesté du 22 juin, à six heures après midi; M. de Metternich a passé ici hier soir, étant ramené à Vienne.

L’adjudant-commandant Avy m’a dit qu’il était dans ses instructions de le ramener, dans le cas où M. Dodun ne serait pas rendu le 21 aux avant-postes. La lettre du général Dawidowitch, en annonçant qu’on allait rendre M. Dodun, n’indiquait pas le jour.

M. de Metternich faisait attention et accablait tout le monde de questions sur les mouvements de l’armée.

Son Altesse Impériale le Vice-Roi a relevé les troupes du général Lasalle devant Raab, elles vont s’établir à Altenbourg; ainsi si l’ennemi se portait dans l’île de Raab, le général Lasalle s’y porterait par Altenbourg, et les troupes qui sont ici, par la tête de pont de Ragendorf.

J’ai l’honneur de vous adresser, Sire, les derniers rapports des généraux Piré et Lasalle.

L’officier que j’avais envoyé au général Piré pour avoir des renseignements sur l’occupation des îles du côté de Medwe par l’ennemi, a vu à onze heures du soir, à Altenbourg, deux officiers de chasseurs qui arrivaient des faubourgs de Raab, d’où ils étaient partis vers les huit heures ; ils disaient qu’on n’avait pu s’entendre pour les articles de la capitulation, et que le feu devait recommencer hier soir ou ce matin.

Il n’y a rien de nouveau de ces côtés-ci. Les prisonniers du régiment de Stein, faits dans une île vis-à-vis de Theben, ont rapporté qu’ils avaient travaillé à trois redoutes fermées dans une plaine vis-à-vis de Marchegg, dans la direction de Vienne; à leur départ, deux étaient achevées, et la troisième ne l’était pas encore tout à fait.     .

Ces prisonniers ont été adressés au général Lecamus.

Les travaux pour mettre le château de Kitsee en état de défense sont commencés depuis hier.

 

 

Kitsee, 23 juin 1809, neuf heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté un rapport de l’ordonnateur en chef qui lui fera connaître ce qui aura été trouvé sur les bateaux près de Raab. Sur les 9,189 quintaux de grains et froment, plus de 2,800 sont en route pour Vienne : des mesures sont prises pour faire transporter successivement le reste. J’ai adopté toutes les propositions de l’ordonnateur en chef.

Sur les 2,000 bœufs, 287 sont partis et doivent arriver aujourd’hui à Vienne; en outre, 882 sont partis également d’Altenbourg aujourd’hui pour Vienne. Sur la réquisition de 2,000, il en a déjà été envoyé 1,269; les autres vont être livrés ces jours-ci.

Les autorités du pays s’exécutent on ne peut mieux ; mais toutes réclament contre cette nuée d’agents de tous les corps d’armée et de toutes les divisions, qui parcourent le pays, porteurs de réquisitions toutes illégales et quelques-unes frauduleuses.

Si l’on place dans les fossés de Vienne les 2,000 bœufs qui vont être envoyés, ils auront le même sort que ceux qui y étaient, ils dépériront; il ne manque pas de pacages près de Vienne pour les y mettre.

 

 

Kitsee, 23 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, Votre Majesté m’ayant ordonné de lui faire connaitre les militaires du bataillon hessois qui se distinguèrent aux affaires d’Engerau, je m’empressai de remplir ses intentions; mais il ne fut question que des officiers qui s’étaient le mieux montrés.

Le général Lasalle venant de m’adresser l’état nominatif de tous les officiers, sous-officiers et soldats de ce bataillon, dont il propose l’admission dans la Légion d’honneur pour leur bonne conduite à ces affaires, j’ai l’honneur de le transmettre à Votre Majesté, eu la priant de vouloir bien avoir égard aux demandes de ce général.

Le zèle et l’exactitude que ce bataillon hessois montre jour­nellement dans le service, la bravoure dont il fit preuve dans les journées des 1er et 3 juin dernier, lui donnent des droits à la bienveillance de Votre Majesté. On ne sert pas mieux que cette troupe.

 

 

Kitsee, 23 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté une lettre du prince Joseph Poniatowski.

Il est possible que ce prince, dans sa correspondance offi­cielle avec le major général, n’ose pas exprimer sa manière de voir et faire connaître ses conjectures.

P. S. — Un sergent-major du régiment de Stein a dit que le jour même de leur descente, on avait mis à l’ordre du jour de l’armée autrichienne, ordre qu’il n’avait pas eu le temps de copier, l’entrée de l’archiduc Ferdinand en Saxe, le 14 juin, après de grands avantages remportés.

 

 

Kitsee, 24 juin 1809, minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reconnu aujourd’hui les préparatifs que fait l’ennemi pour réunir un équipage de pont à Presbourg.

Hier, il y avait à une centaine de toises au-dessous de ceux-ci, une vingtaine qui ne sont pas liés par des madriers, mais auxquels on travaille.

Il a été aussi construit une culée, qui paraît d’autant plus destinée à servir de point d’appui à un pont, qu’elle se trouve directement en face du réduit que l’ennemi a construit en arrière de ses retranchements dans l’ile.

Il est très-possible que tout cela ne soit qu’une démonstra­tion pour masquer des mouvements et attirer notre attention de ce côté, car je ne puis croire que l’ennemi veuille entre­prendre de déboucher devant un corps de 10,000 hommes, qu’il doit croire plus nombreux et qui, d’un moment à l’autre, peut s’accroître.

Peut-être l’ennemi veut-il seulement se ménager les moyens de déboucher sur cette rive, dans le cas où nous passerions de l’autre côté sans succès.

Quels que soient ses projets, nous sommes sur nos gardes, et je crois pouvoir répondre d’en empêcher l’exécution,

Je n’ai pas encore reçu de Raab les mortiers, les pièces et les munitions que j’ai envoyé chercher. Aussitôt qu’ils seront arrivés, les ordres de Votre Majesté s’exécuteront.

Le général Marulaz a tourné le lac Balaton et est revenu par Veszprém.

D’après ce que m’a dit un officier de ce général, qui portait des lettres au duc de Rivoli, il parait qu’il s’est trompé sur la direction de la colonne qu’il était chargé de suivre, et qu’elle a fait sa jonction avec un autre corps chargé d’attaquer les troupes qui font le siège de Graz.

On m’assure qu’il y a sur la rive droite de la Rabnitz et sur les deux rives de la Raab une excellente race de chevaux; ce sont les meilleurs de la Hongrie.

Ce pays est aussi abondant en bestiaux. Les 2,000 qui viennent d’être levés pour l’approvisionnement de l’armée, l’ont été dans une contrée qui a déjà souffert et qui pourrait difficilement en fournir davantage.

  1. S, — Ci-joint un rapport du général Lasalle. A l’instant, je reçois une lettre de Son Altesse Impériale le Vice-Roi, qui m’annonce qu’elle va faire mettre en route, pour m’être envoyés, les pièces et les mortiers; mais ils n’ont que peu de munitions. .

 

 

Kitsee, 24 juin 1809, huit heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI

Sire, j’ai reçu les deux lettres de Votre Majesté, du 23, à deux heures du matin et neuf heures du matin; j’ai adressé à Son Altesse Impériale le Vice-Roi copie de celle où vous ordonnez de faire revenir les mortiers et les obusiers qui sont à Raab, soit ceux qui y ohnt été envoyés, soit ceux qui y existent, avec le plus possible de munitions.

L’adjudant-commandant Romeuf et le colonel d’artillerie Pellegrin sont porteurs de cette lettre, avec l’instruction de faire activer l’exécution de cette mesure; je ferai préparer des relais à Altenbourg. Pour peu qu’on y mette d’activité, on peut avoir ici ces mortiers et obusiers dans la journée d’après- demain; ainsi, le 26 ou le 27, on serait en mesure d’exécuter les intentions de Votre Majesté.

Je joins ici un rapport d’un officier qui est en observation sur une montagne qui est près de Kitsee; tous ces jours-ci on a vu les bacs qui sont au-dessus de Hof, passer de la rive droite à la rive gauche de la March, de l’artillerie et de l’infanterie; je ne puis croire que ces démonstrations soient réelles, mais dans tous les cas je puis, dans une heure et demie, ras­sembler de 12 à 14,000 hommes d’infanterie. Le général Lasalle, en six heures, avec la majeure partie de sa cavalerie et son bataillon de Hessois, pourrait aussi nous avoir rejoints; il est à Altenbourg.

La pièce de 12, du général Puthod, les deux mortiers et les trois obusiers du général Gudin ont rejoint, avec peu de munitions, il est vrai, mais demain ou après nous en aurons. Avec ces moyens-là on peut espérer de culbuter un ennemi qui vou­drait déboucher entre Hainbourg et Ragendorf.

Le général Lasalle, qui a quitté Raab à l’instant où la ville capitulait, y a rendu les plus grands services; c’est à son activité que l’on doit le prompt établissement des diffé­rents ponts qui ont été faits pour communiquer avec l’armée d’Italie; il a établi, avec beaucoup d’intelligence, ses batte­ries de mortiers et. d’obusiers ; elles étaient à deux portées de fusil et ont fait le plus grand mal ; il a été parfaitement secondé par son bataillon hessois et le chef de bataillon du génie Prévost.

P. S. — Je fais préparer, près de l’île de Theben, des bateaux qu’on chargera de pierres et qu’on lancera s’ils achèvent leur pont.

 

 

Kitsee, 24 juin 1809, huit heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, je reçois la lettre de Votre Majesté, du 23 juin, à quatre heures après-midi; dans ma première lettre je lui rends compte de l’exécution de ses ordres pour le bombardement de Presbourg. Je me conformerai à ses intentions au sujet de la sommation.

Nous n’avons jamais eu que 7 ancres et grappins et 3 grands bateaux; c’est une erreur de mon secrétaire d’avoir mis 70 au lieu de 7.

Le général Bertrand a envoyé chercher les 4 pontons, les 7 grappins et les cordages qui faisaient à peu près 250 brasses. Les 3 bateaux ont été jugés trop lourds pour être transportés.

Je vais envoyer des officiers dans tous les villages pour rechercher les ancres et cordages qui peuvent s’y trouver. Je doute que cela puisse produire beaucoup, des recherches très-rigoureuses ayant déjà été faites qui ne nous ont produit que ceux-ci.

Dans sa lettre du 21 juin, à quatre heures après midi, Sa Majesté, en me donnant l’ordre de faire mettre le château de Kitsee en état, me mandait qu’on pouvait y mettre les 4 pièces de 12 et les 2 obusiers qui ont été envoyés pour prendre Raab; 4 ou 500 paysans travaillent à Kitsee, qui sera en état dans deux ou trois jours; Sa Majesté ayant disposé autrement de ces pièces, je la prie de me faire connaître ses intentions.

L’exécution des mesures de Votre Majesté va nous employer beaucoup de chevaux, mais je me servirai de ceux de paysans, qui cependant deviendront insuffisants si on les force à aller au-delà de Regelsbrun, entre Petronell et Fischament; il est à désirer que le général La Riboisière prenne des mesures pour qu’il y ait là des relais d’un couple de cent chevaux. Peut-être serait-il plus avantageux de faire passer tous ces convois par Bruck ; on trouve plus de ressources sur cette route ; alors les relais du général La Riboisière devraient être établis à Galbrun.

Je prie Votre Majesté de me faire connaître ses intentions à cet égard.

 

Kitsee, 24 juin 1809, huit heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté un croquis de la reconnaissance des retranchements construits par les Autrichiens pour couvrir la place de Raab. Le chef de bataillon Prévost, officier très-distingué, n’a pu faire ce travail qu’à la hâte, ayant été chargé de l’établissement des ponts sur la Raab et sur la Rabnitz ; mais le capitaine Decastres, que j’ai envoyé sur les lieux, fait cette reconnaissance avec plus de soin et présentera plus de détails; lorsqu’elle sera terminée, je m’empresserai de l’adresser à Votre Majesté.

 

 

Kitsee, 24 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté une lettre que je viens de recevoir de son intendant à Erfurt, avec plu­sieurs pièces qui peuvent servir à faire connaître un de ces nombreux agents qui servent à fomenter des troubles en Alle­magne, et de ces colporteurs de pamphlets, le sieur B***. On parviendra certainement, par la visite des papiers de cet individu et par les interrogatoires qu’on pourra lui faire subir, à connaître son correspondant.

 

 

Kitsee, 25 juin 1809, minuit.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu les deux lettres de Votre Majesté du 24 à deux heures et à six heures du soir.

L’endroit où l’ennemi réunit ses bateaux pour son port est tellement couvert par les bois de son île de gauche et à une telle distance que je ne crois pas qu’on puisse interrompre ce travail avec un feu d’artillerie, surtout avec des canons; quant aux obusiers, l’armée d’Italie a renvoyé ceux qui lui avaient été prêtés, mais les munitions sont consommées, on est au remplacement; d’un autre côté, Votre Majesté me recommande de les réserver pour la bataille.

Ce ne sera que dans l’après-midi que je recevrai le convoi de Raab ; si celui que Votre Majesté m’annonce arrive en même temps, tout sera en batterie ce soir; la démarche que Votre Majesté m’a prescrite sera faite, et le feu commencera demain.

Nous n’avons pu nous procurer des moulins, mais je fais faire des radeaux qui seront chargés de gros arbres, et l’on fait des essais pour savoir d’où l’on pourra les lancer pour qu’ils arrivent au milieu du pont.

Les Badois sont entre Altenbourg et Raab.

Le général Bruyère a rejoint le général Lasalle, et le géné­ral Marulaz doit le rejoindre aujourd’hui.

J’ai recommandé au général d’artillerie de prendre toutes les mesures pour que nos 82 bouches à feu soient bien appro­visionnées, ainsi que son parc; j’y tiendrai la main.

J’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté le rapport du général Piré sur les déclarations des 6 prisonniers qui ont été pris du côté d’Aswang dans l’île de la Raab.

Suivant ces déclarations, l’archiduc Jean a dû marcher avec la majeure partie de son corps pour rejoindre l’archiduc Charles.

Votre Majesté est informée qu’on n’a trouvé aucune muni­tion de guerre dans Raab, et que si l’on veut conserver cette place, il faut y en envoyer.

Les travaux de Kitsee avancent, et ce petit fort est déjà en état de défense ; mais ces ouvrages sont plus nuisibles qu’utiles si on ne les arme pas.

Le chef d’escadrons Pierre, qui commande à la tête de pont de Ragendorf, me mande ce matin que pendant toute la nuit dernière, l’ennemi n’a cessé de faire entendre des coups de hache et de marteau; ces bruits se faisaient entendre du côté de Somerein et en face de Sandorf. On n’a pu rien voir ce matin du côté de Presbourg, à cause de la brume; ce n’est que dans ce moment qu’on a pu reconnaître que les bateaux de l’ennemi sont toujours au nombre de 31, trois à trois. Il y a peu d’ouvriers qui travaillent aux vingt autres, qui ne sont encore liés que par des longerons.

Des 100 caissons que j’avais vus hier en arrière de Pres­bourg, il n’en reste plus que neuf.

 

 

Kitsee, 25 juin 1809, onze heures du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre de Votre Majesté du 25 à dix heures du matin.

J’ai écrit au général Lasalle de prendre des mesures pour que les prisonniers venant de Raab ne s’échappent pas; j’en prendrai de mon côté pour qu’il ne s’en perde pas d’ici à Vienne.

Je n’ai encore reçu que 150 bouches et de la poudre venant de Vienne.

L’officier qui m’a apporté la lettre de Votre Majesté a ren­contré les mortiers à trois lieues de Vienne; ceux de Raab me sont annoncés, mais ne sont pas encore arrivés dans ce moment; ainsi ce ne sera que demain soir que je pourrai faire tirer sur Presbourg.

Je joins ici la sommation que je me propose de faire remettre au commandant de Presbourg; je prie Votre Majesté de me faire connaître si elle l’approuve; si je ne reçois rien demain, je l’enverrai.

Aujourd’hui, on n’a pas travaillé aux bateaux qui sont sous Presbourg, probablement parce que c’est dimanche.

Les batteries pour les mortiers et obusiers sont prêtes ; elles sont établies ainsi qu’il suit :

L’une à gauche d’Engerau se trouve à la distance de 740 toises du clocher principal du faubourg de Presbourg; l’autre à droite d’Engerau et à gauche de la flaque d’eau, se trouve à 650 toises du même          clocher.

Ce clocher parait être de 2 à 300 toises du clocher de la cathédrale située au centre de la ville.

Il est impossible de rapprocher davantage ces batteries, puisqu’elles sont établies tout près du filet d’eau qui nous sépare de l’ennemi.       j

Il est parti aujourd’hui pour Vienne un convoi de 204 bœufs.

Les 2,000 qui doivent être fournis seront bientôt complétés.

On a envoyé aussi 200 voitures chargées de 2,431 quintaux de froment, ce qui fait avec ce qui a déjà été fourni environ 16,000 quintaux.

 

 

Kitsee, 26 juin 1809, neuf heures et demie.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre que Votre Majesté m’a écrite ce matin.

En comprenant ce qui est arrivé de Vienne, il y a en tout huit mortiers ou obusiers prussiens en batterie. Le feu va commencer.

On a porté à huit heures du soir la sommation dont j’ai envoyé hier le projet à Votre Majesté. En la remettant, l’officier qui en était porteur a été chargé de dire que si sous une heure on n’avait pas fait de réponse, cela serait considéré comme un refus.

Trois mortiers de Vienne ne sont pas encore arrivés. J’ai envoyé au-devant. Ils serviront demain à donner plus d’acti­vité aux batteries.

L’ennemi a travaillé aujourd’hui trois ou quatre heures à débarquer des madriers des bateaux qu’il a à la tête de l’île qui est à gauche de Presbourg, et à les entasser sur cette île.

Le nombre de ses bateaux disposés devant Presbourg, pour jeter un pont, n’est pas augmenté.

Il y a deux généraux de brigade de la division Puthod, qui sont MM. Gérard dit Vieux et Desailly.

Le général Puthod a envoyé il y a quelque temps au major général l’état des emplois vacants. Je vais le lui demander de nouveau. J’aurai l’honneur de l’adresser à Votre Majesté.

P.S. — J adresse à Votre Majesté une note du général La Riboisière que m’envoie le général Hanicque. Il parait, d’après cette note, que les trois mortiers que j’attendais n’arri­veront pas, et qu’il n’y aura en batterie contre Presbourg que ce qui existe à présent.

 

 

Kitsee, 27 juin 1809, cinq heures du matin

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu les trois lettres de Votre Majesté, du 26. Les trois pièces de 12, les pièces de 18 et leurs munitions qui ont été envoyées à Raab, ont passé à Kitsee, et à l’époque où j’ai reçu la lettre de Votre Majesté, elles devaient être rendues à Obersdorf.

Il faut que le général La Riboisière envoie les 1,600 coups de canon de 12 à Raab, c’est le seul moyen de mettre à exécu­tion les intentions de Votre Majesté. Je vous ai annoncé, Sire, par ma lettre d’hier 26, à dix heures du soir, que la sommation dont je vous ai adressé le projet avait été envoyée à l’ennemi ; elle était signée du général de brigade Desailly.

J’envoie ci-joint à Votre Majesté la réponse du général Bianchi ; il est bon d’observer que l’officier à qui la sommation a été remise, en en connaissant le contenu, a dit dans le pre­mier mouvement que l’on ne pouvait rien faire sans les ordres de l’archiduc Jean.

Le feu a commencé à dix heures et demie du soir et à onze heures il était déjà dans plusieurs maisons; il s’est propagé avec une grande violence, et il y a des quartiers de Presbourg brûlés.

A la réception de vos dépêches renfermant les termes dans lesquels Votre Majesté voulait que la sommation fut faite, j’ai fait suspendre le feu.

Le général Desailly va faire une nouvelle sommation qui sera conçue dans les termes que désire Votre Majesté; je doute qu’elle produise de l’effet. Dans le commencement, l’ennemi a tiré très-vivement, surtout de la mousqueterie ; ensuite il a presque totalement cessé son feu. Il avait établi dans son île de droite une batterie vis-à-vis de la chapelle, qui prenait à dos nos batteries incendiaires ; j’ai fait porter hier soir, avant de commencer le feu, trois pièces de 12 et établir de l’infan­terie derrière la digue ; on lui a éteint son feu.

Aussitôt la consommation des 2,000 bombes et obus, je renverrai à Vienne les mortiers et obusiers; j’imagine que cela sera fait dans la journée et dans la nuit.

 

 

Kitsee, 27 juin 1809, cinq heures du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté : 1° copie de la deuxième sommation faite par le général Desailly; 2° le rapport de ce général sur la première réponse verbale du général autrichien qui s’en est suivie; 3° la demande de la communication par écrit de cette sommation qui d’abord avait été refusée ; enfin, la réponse qui a été faite. Le feu va en conséquence recommencer

Non-seulement, comme le prouve les expressions verbales et écrites des Autrichiens, Presbourg a beaucoup souffert, mais encore une grande partie de la ville a été détruite.

M. de Metternich vient de passer pour se rendre à Raab; on lui a fourni une escorte.

L’ennemi travaille faiblement à la continuation de son pont, au moins sur la partie des bateaux que l’on voit.

Il semblerait que depuis quelques jours quelques troupes se sont portées de la Hongrie en Autriche. C’est ce que l’on peut conclure des rapports de ceux qui observent Neudorf sur la March et Theben.

P. S. — On me rend seulement compte, dans ce moment, qu’hier soir, à six heures, l’ennemi a tiré deux coups de canon dans la direction de Nyarod près Szap. Le bruit du tambour s’est tout de suite fait entendre, ainsi que la musique, dans la grande île, en face du poste qui est à droite d’Aswang.

Ou a cru aussi voir deux dragons dans l’île entre Aswang et Medwe. L’ennemi n’y avait pas encore paru.

 

 

Kitsee, 29 juin 1809, deux heures du matin.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu la lettre que Votre Majesté m’a fait l’honneur de m’écrire la nuit dernière. On n’a pas pu employer toutes les munitions, parce que, au lieu de 6 mortiers, je n’en ai reçu [3]que 3. Il nous reste 200 bombes qui seront tirées cette nuit et demain, si l’ennemi n’évacue pas les îles, d’après la nouvelle sommation que je lui fais faire et dont j’adresse copie à Votre Majesté.

Quoique l’ennemi ait fait plusieurs fois sur nous un feu très-vif, nous n’avons eu que 7 ou 8 blessés et 2 tués, dont un capi­taine d’artillerie, M. André, officier très-distingué.

J’ai reconnu aujourd’hui la gauche des ouvrages de l’ennemi qui est la partie la plus attaquable de leur position, parce que dans ce moment on peut y passer à gué. Il m’a paru que leurs ouvrages de ce côté étaient très-forts. Un parlementaire que j’avais envoyé sur ce point n’a pas été admis, mais on l’a reçu par la droite.

Demain j’expédierai pour Ebersdorf et Raab ce que Votre Majesté m’ordonne d’y envoyer.

Je prie Votre Majesté de me faire connaître si je dois rester encore quelque temps ici, parce que je ferai faire une recon­naissance sur la gauche de l’ennemi.

J’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté la déclaration d’un espion autrichien qui a été arrêté et fusillé.

 

J’ai envoyé sur la ligne les signalements des individus dési­gnés dans cette déclaration comme faisant le même métier.

Je reçois dans ce moment la réponse du général autri­chien; je l’adresse à Votre Majesté. Ce ne sera que dans quelques heures que nous aurons consommé les bombes qui nous restent. Aussitôt qu’elles le seront, je ferai retirer les mortiers sans que l’ennemi s’en aperçoive, et je les dirigerai sur Ebersdorf et Raab. Je ne crois pas que le mal fait à Presbourg soit aussi grand que le dit le général autrichien.

J’ai reçu la lettre de Votre Majesté, d’aujourd’hui à midi. Je donne ordre au général Lasalle de faire porter le général Marulaz sur Estheraz. Ce général laissera un fort détache­ment à Pamagen, pour garder le débouché, et dans le cas où le général Chasteler se porterait sur OEdenbourg, le général Marulaz se jetterait sur ses derrières et sur ses flancs, pour lui faire le plus de mal possible. Son Altesse le Vice-Roi est pré­venu de cette disposition, et le général Marulaz lui transmettra directement les renseignements qu’il obtiendra sur la marche de cette colonne.

  1. S. — J’adresse à Votre Majesté un journal qui parait circuler librement à Vienne.

 

 

Kitsee, 29 juin 1809, deux heures et demie du soir.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’accuser réception à Votre Majesté de sa lettre du 28 à dix heures du soir.

La brigade de troupes badoises est en marche, elle arrivera ce soir à Ebersdorf.

Les généraux Lasalle et Marulaz, qui ne sont sous mes ordres que pour les opérations militaires, ont jusqu’à présent envoyé leurs situations au duc d’Istrie; ils en ont agi ainsi d’après des ordres supérieurs qu’ils m’ont communiqués officiellement; j’ai demandé à ces généraux l’état exact de leurs combattants, que j’adresserai à Votre Majesté.

A l’entrée de la nuit, les mortiers et obusiers destinés pour Ebersdorf et Raab partiront, mais sans munitions; il y a des relais préparés; ainsi ils seront rendus demain avant midi à leur destination.

J’adresse à Votre Majesté une dépêche qu’un parlemen­taire vient de remettre aux avant-postes devant Presbourg.

Les travaux du fort de Kitsee touchent à leur terme ; d’après les intentions de Votre Majesté, je pense qu’un approvision­nement de 1,000 rations de viande, forme et vin serait dicté par la prévoyance. Je prie Votre Majesté de me faire con­naître ses ordres, afin que je donne des ordres à l’ordonnateur en chef à cet égard.

 

 

Kitsee, le 29 juin 1809.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai l’honneur d’adresser à Votre Majesté une récla­mation que forme le général de division Gudin; je l’ai trouvée si fondée que je ne puis que la transmettre textuellement. Ces sortes d’oubli affectent péniblement de bons serviteurs de Votre Majesté, qui ont la crainte qu’on n’ait pas mis sous ses yeux les preuves du zèle et du dévouement dont ils sont ani­més pour son service.

Le chef de cette excellente division est trop connu de Votre Majesté pour qu’il soit nécessaire de parler de ses nombreux et bons services.

 

 

Au bivouac près Presbourg, 30 juin 1809, midi.

A L’EMPEREUR ET ROI.

Sire, j’ai reçu les différentes lettres de Votre Majesté du 29 juin. J’avais demandé à Votre Majesté si par les mouvements généraux il me restait assez de temps pour faire une reconnaissance sur une île de droite qui m’a toujours paru for­tement occupée par l’ennemi.

Hier soir, j’ai chargé le général Gudin de cette opération; il l’a fait exécuter aujourd’hui une heure avant le jour par le colonel Decouz qui s’en est acquitté de la manière la plus brillante. Cet officier très-distingué, avec quelques nacelles, a fait passer plusieurs compagnies sous le feu de quelques canons, malgré une vive fusillade de l’ennemi, qu’il a fait attaquer aussitôt qu’il a eu 100 hommes sur le rivage.

Deux pièces de canon et leurs caissons attelés, 200 prisonniers, 50 Autrichiens tués, quantité de blessés en proportion, ont été le résultat de cette opération.

De notre côté, nous avons eu 7 hommes tués et 40 blessés; la plupart de ces derniers l’ont été sous le feu des retranche­ments de l’ennemi, qui a aussi dans cette île une tête de pont.

Parmi les prisonniers se trouvent M. de Longueville, com­mandant du régiment de Saint-Julien, blessé gravement, et un officier d’état-major nommé Latour, Savoyard, qui est un homme de beaucoup d’importance et dont Votre Majesté pourra tirer de grands renseignements. Cet officier a toute la confiance de l’état-major de l’archiduc Jean et de l’Empe­reur. Il craint d’être fusillé, et, soit par peur ou autrement, il est possible de le faire parler. Je l’ai adressé ce matin à Votre Majesté, par mon aide de camp Fajet.

Un aide de camp du général Compans qui vous remettra cette lettre vous présentera un jeune officier qui dit tout ce qu’il sait, et dont je joins ici l’interrogatoire, ainsi que de plu­sieurs prisonniers.

Entre autres particularités, pour me donner une idée de l’importance de ce sieur Latour, cet officier m’a dit que les généraux étaient obligés de faire ce qu’il voulait.

Il y a 15,000 hommes dans les îles près de Presbourg, et l’archiduc Jean est à Presbourg.

Je joins ici un croquis qui fera connaître à Votre Majesté la position de l’ennemi.

Je vais faire la reconnaissance de cette île, et s’il n’y a rien de nouveau, je me rendrai auprès de Votre Majesté pour quelques heures.