Jean-Baptiste Dalesme (1763-1832)
Le baron Jean-Baptiste Dalesme
Lieutenant-Général, commandant de l’Hôtel des Invalides
Probité, dévouement et humilité
Hervé Oléon
Un nom enraciné dans le sol du Limousin…

Jean-Baptiste Dalesme voit le jour à Limoges le 20 juin 1763. François Dalesme, son père, imprimeur à Limoges, a épousé en secondes noces Catherine Leyssère dont il aura, outre Jean-Baptiste, six enfants dont deux embrasseront la carrière militaire : Léonard périra en livrant combat aux chouans, en Vendée, et Joseph mourra à Eylau dans les rangs de la Grande Armée. François Dalesme avait épousé en première noce Madeleine Disnemartin de Salles qui lui donna cinq enfants dont deux fils tous deux prénommés Jean-Baptiste. Ce prénom était déjà celui du père de François Dalesme, celui-là même qui avait repris l’imprimerie familiale à Limoges en 1729. La famille Dalesme, bien que de condition bourgeoise à cette époque, avait appartenu par le passé à la chevalerie périgourdine.
Mais revenons à Jean-Baptiste Dalesme quatrième du nom. L’enfant fut baptisé le jour même de sa naissance en l’église Saint-Pierre de Limoges ainsi que l’atteste le registre paroissial :
« Le vingtième juin mil sept cent soixante trois, j’ai baptisé Jean-Baptiste, né aujourd’hui du légitime mariage de sieur François Dalesme, marchand libraire et imprimeur, et de Demoiselle Catherine Leyssère, son épouse. A été parrain Monsieur Jean-Baptiste Dalesme, grand-père, représenté par messire Léonard Dalesme, prêtre et marraine Catherine Gertrude Dechée, qui ont signé avec moi. L’enfant a été ondoyé à la Paroisse. Signé au registre : Boudet, prêtre commis, Léonard Dalesme, prêtre et Catherine Gertrude Dechée. » [1]Service Historique de l’Armée de Terre, 7Yd771
Premiers engagements militaires
A l’âge de 17 ans, il s’engage, le 23 mai 1780, dans le Régiment d’Infanterie du Rouergue avec lequel il participe à la Campagne d’Espagne en 1782 et 1783.
Il est congédié le 23 mai 1788.
Fort de ses actes héroïques de jeune militaire, il est nommé le 11 octobre 1791 au grade de lieutenant-colonel, commandant en second du 1er Bataillon des Volontaires de la Haute-Vienne. Le commandant en premier n’est autre que Jean-Baptiste Jourdan qui sera son fidèle ami et compagnon d’armes pendant plus de 45 ans.
En 1792 et 1793, il combat dans l’Armée du Nord.
Fait prisonnier lors de la capitulation du Quesnoy, le 9 septembre 1793, il est gardé captif en Hongrie jusqu’en 1795.
A sa libération, il est nommé général de brigade et rentre dans le corps des officiers de l’Armée de Sambre et Meuse sous le commandement de Jourdan, le 19 novembre 1795.
Il entre dans la Division Grenier le 30 mars 1796.
Blessé à Giessen le 16 septembre 1796, il est admis au traitement de réforme le 13 février 1797.
En 1798, il combat dans les rangs de l’Armée d’Italie, notamment dans la Division Delmas. Blessé par un coup de feu dans les reins à Pastrengo le 26 mars 1799, il est à nouveau touché à la cuisse lors de la bataille de Magnano le 5 avril 1799. Fait prisonnier par l’ennemi le 28 avril 1799, il reste en détention jusqu’en 1800.
Fonctions citoyennes et vie conjugale
Nommé à la 14e Division militaire de Haute-Vienne le 10 juin 1800, il se rapproche de son département d’origine par son action militaire puisqu’il est élu député au Corps législatif le 27 mars 1802, fonction qu’il conservera jusqu’en 1809.
Le 7 septembre 1800 (9 fructidor an IX), la Députation de Haute-Vienne requiert auprès du Ministre de la guerre, à l’instigation de Jourdan, la nomination de Jean-Baptiste Dalesme au grade de général de division. Il semble que cette demande n’ait pas recueilli de suffrage favorable.
Le 22 avril 1802, le général Dalesme est admis au traitement de non-activité.
Le 15 août 1804, il épouse Marie-Françoise Alexandrine Dumas, de treize ans sa cadette, fille de Pierre-Louis Dumas, et Françoise Mounier, originaires de Lyon. Si nous nous référons à certains aspects chronologiques, nous sommes en droit de nous demander si cette union était réellement dictée par des raisons sentimentales ou si elle n’a pas été, en réalité, une contrainte d’ordre moral pour les deux époux au vu du contexte de l’époque : en effet, le premier enfant du couple, Alfred, est né le 18 septembre 1803, soit près d’un an avant le sacrement du mariage. Or on sait pertinemment que l’opinion publique, tout au moins la bourgeoisie d’alors était loin d’approuver l’union libre. Quant à la différence d’âge entre les deux époux, nous verrons plus loin qu’elle n’a pas été sans poser quelques problèmes par la suite…
De Versailles aux rives du Rhin
Le 20 juillet 1807, Jean-Baptiste Dalesme est nommé major général de la 4e Légion de réserve des Gardes Nationales de l’Intérieur à Versailles.
Le 6 mars 1809, il est nommé au Corps d’observation de l’Armée du Rhin, consécutivement à une requête du maréchal Oudinot adressée au ministre de la guerre :
« J’aurais été très satisfait de l’avoir sous mes ordres. C’est un officier général dont je fais le plus grand cas et Votre Excellence m’obligera beaucoup si Elle veut bien l’employer à l’armée que je commande lorsqu’il lui sera possible ou lui être favorable à l’occasion… »[2]In « Un bicentenaire oublié, le général DALESME… », Jules TINTOU, Lemouzi N° 6 et 7, avril 1963 (p. 49) et juillet 1963 (p. 19), I/L76.
Le 30 mars 1809, il est nommé à la tête de la 2e Brigade de la Division Carra-Saint-Cyr.

La même année, il participe au commandement de la Grande Armée lors de la Campagne d’Allemagne au cours de laquelle il est lui-même blessé au combat lors de la bataille d’Essling. En contrepartie des invalidités causées par ses blessures consécutives, il obtient une rente de 4000 francs sur le département de Rome.
Le 22 mai 1810, il est nommé commandant du département de l’Ombrone, fonction dans laquelle il donne une fois encore entière satisfaction à sa hiérarchie ainsi qu’en témoigne un courrier du préfet de l’Orne adressé au ministre de la guerre en date du 26 août 1809:
« Je sais d’après des renseignements certains que les ennemis du gouvernement cherchent encore à troubler la tranquillité de ce pays, qu’ils répandent de l’argent pour faire réarmer ceux qui ont jadis servi leurs fureurs et leurs brigandages. Il faut donc pour arrêter le mal dans son origine un officier général qui allie beaucoup de prudence avec beaucoup de fermeté, qui connaisse les localités et qui, enfin, en impose aux brigands. Je crois ces diverses qualités réunies dans le Général Dalesme qui depuis le peu de temps qu’il est dans ce pays, au su se concilier l’estime des habitants. L’harmonie la plus parfaite règne, au reste, entre lui et les autorités du département… »[3]Jules Tintou, idem
La reconnaissance des Grands : un titre et une île
Par lettres patentes du 23 juin 1810, il reçoit de l’empereur Napoléon Ier le titre de baron de l’Empire.

Le 14 septembre 1810, une lettre d’Elisa Bonaparte, grande-duchesse de Toscane, demande au ministre de la Guerre sa nomination au commandement de l’île d’Elbe :
« Le général Dazémar auquel Sa Majesté a confié le commandement de l’île d’Elbe se trouve dans l’impossibilité absolue de rester à ce poste. L’état de santé ne lui a pas encore permis de visiter aucune des positions de l’île et lui fait désirer de repasser sur le continent. (…) Nous avons cependant besoin d’un officier qui puisse sans cesse s’occuper des détails de la défense de ce point important et se porter au premier signal sur le poste qui serait attaqué. Je n’en vois point de plus capable que le général Dalesme qui commande actuellement le département de l’Ombrone. Le général Dazémar pourrait le remplacer dans ce commandement. Je vais autoriser provisoirement cette mutation jusqu’à ce que vous m’ayez fait connaître les ordres de l’Empereur sur le changement que je vous prie de provoquer. Je suis, Monsieur le Duc, votre affectionnée. Elisa ».[4]Correspondance de Napoléon Ier, Tome 31 (récit de l’exil de l’empereur).
Cette succession est confirmée officiellement par l’empereur le 24 octobre 1810 et le général Dalesme prend sans tarder son nouveau poste.
Durant son éloignement du continent, il apprend la naissance de sa fille Aurore-Alexandrine, née le 11 mars 1811.
Pendant 4 ans, le général Dalesme remplit ses fonctions avec rigueur, probité et humanité. Il s’attache plus particulièrement à faire lever les droits de douane prohibitifs imposés à l’île par le gouvernement impérial et qui réduisent de nombreux insulaires à la misère. Il s’attire ainsi les faveurs de la population et des soldats en poste sous ses ordres.
Le 6 avril 1814, Napoléon Ier confirme son abdication par la signature du traité de Fontainebleau. Il est déchu de tous ses droits au titre impérial et reçoit en contrepartie la dérisoire souveraineté de l’île d’Elbe.
Le 22 avril, à Porto-Ferrajo, le général Dalesme offre leur rapatriement vers leurs provinces ou pays respectifs à tous les soldats on français qui le demanderaient, ceci afin d’éviter une mutinerie de ses troupes semblable à celle survenue quelques jours auparavant à Porto-Longone et à Rio. Le général avait alors réussi in extremis à désarmer les rebelles.[5]http://perso.club-internet.fr/ameliefr/Elbe1.html & Correspondance de Napoléon Ier, Tome 27.
Un triste retour sur le sol de France
Une dépêche en date du 28 avril avertit le général Dalesme des changements politiques et de l’avenir imminent de l’île d’Elbe en tant que royaume. Quelques jours avant, Fort Stella s’était trouvée menacé par les canons de navires anglais postés en avant de la rade. Le général Dalesme avait alors fait savoir à l’ennemi qu’il défendrait la forteresse jusqu’à la dernière goutte de son sang. La capitale de l’île, Porto-Ferrajo, arbore déjà le drapeau blanc des Bourbon [6]Symbole ambigu qui pouvait tout aussi bien représenter la royauté restaurée que la paix retrouvée. lorsque, le 3 mai, la vigie du port, annonce l’arrivée à vue d’une frégate anglaise portant pavillon parlementaire. Prévenu de l’identité de l’illustre passager du navire, le général Dalesme ordonne à la garde du Fort Stella de ne pas donner le tir tandis que la population en effervescence, se presse déjà sur les quais.
« Le 3 mai 1814 à dix heures du soir, l’Undaunted mouilla dans la rade de Porto-Ferrajo ; le général Drouot débarqua sur le champ pour prévenir le général Dalesme qui y commandait et les autorités civiles, de l’arrivée de l’Empereur. Le lendemain, 4 mai, à onze heures du matin, l’Empereur débarqua ; il fut salué par les canons de la frégate, de la rade et de la place. Les troupes étaient toutes en armes. Il se rendit à l’église et l’on chanta un Te Deum. Toutes les autorités du pays y étaient réunies (…).Le général Dalesme qui commandait l’île était un officier sage qui s’était fait aimer des habitants (…). Le capitaine Moncabrié s’était rendu à Toulon où il reçut de nouveau l’ordre de se rendre à Porto-Ferrajo, faire la remise de l’Inconstant et de ramener en France le général Dalesme et la garnison française… » [7]Correspondance de Napoléon Ier, Tome 31 (récit de l’exil de l’empereur).
Avant que quitter l’île, le général Dalesme adresse aux Elbanès cette touchante proclamation [8]http://perso.club-internet.fr/ameliefr/Elbe1.html& Correspondance de Napoléon Ier, Tome 27.:
« Habitants de l’île d’Elbe !
Les vicissitudes humaines ont conduit parmi vous l’empereur Napoléon, et son choix vous le donne comme souverain. Avant d’entrer dans vos murs, votre auguste souverain m’a adressé les paroles suivantes que je m’empresse de vous faire connaître parce qu’elles sont le gage de votre bonheur.
Général, j’ai sacrifié mes droits aux intérêts de la patrie et me suis réservé la souveraineté et la propriété de l’île d’Elbe, ce qui a été consenti par toutes les puissances. Veuillez faire connaître le nouvel état des choses aux habitants, et le choix que j’ai fait de leur île pour mon séjour, en considération de la douceur de leurs mœurs et de leur climat. Dites-leur qu’ils seront l’objet constant de mes plus vifs intérêts.
Napoléon
Elbois, ces paroles n’ont pas besoin d’être commentées, elles fixent votre destinée. L’Empereur vous a bien jugés, je vous dois cette justice et je vous la rends. Habitants de l’île d’Elbe, Je m’éloignerai bientôt de vous, cet éloignement me sera pénible car je vous aime sincèrement, mais l’idée de votre bonheur adoucit l’amertume de mon départ et, en quelque lieu que je puisse être, je me rapprocherai toujours de cette île par le souvenir des vertus de ses habitants et par les vœux que je forme pour eux. Porto-Ferrajo, 4 mai 1814. »
En outre, avant d’embarquer sur l’Undaunted, le général Dalesme ratifie le procès-verbal donnant son nouveau drapeau à l’île :
« Cejourd’hui 4 mai 1814, l’empereur Napoléon ayant pris possession de l’île d’Elbe, le général Drouot, gouverneur de l’île, au nom de l’empereur, a fait arborer sur les forts le pavillon de l’île : fond blanc traversé diagonalement d’une bande rouge semée de trois abeilles d’or. Ce pavillon a été salué par les batteries des forts de la côte, de la frégate anglaise l’Undaunted et les bâtiments de guerre français qui se trouvaient dans le port. En foi de quoi, nous commissaires des puissances alliées, avons signé le présent procès verbal avec le général Drouot, gouverneur de l’île et le général Dalesme, commandant supérieur de l’île. Fait à Porto-Ferraio le 4 mai 1814. Signé : Koller, Campbell, Drouot, Dalesme. » [9]http://perso.club-internet.fr/ameliefr/Elbe1.html
De retour en France, le général Dalesme a la mauvaise surprise de découvrir auprès de son épouse un troisième enfant, Catherine-Jeanne-Eugénie dont l’arithmétique gynécologique montre bien qu’il ne pouvait être le géniteur [10]L’enfant étant née le 11 juillet 1813, sa légitimité supposerait une grossesse d’une durée de près de 32 mois ! mais qu’il reconnaîtra et élèvera, en dépit de son amertume, comme sa propre fille. Dès lors, meurtri par cette situation conjugale des plus inconfortables, le général Dalesme se retire à Versailles, au 44 boulevard de la Reine, où il mène une existence retirée.

En dépit de cet isolement, il reçoit, le 16 août 1814, la distinction de Chevalier de l’Ordre de Saint-Louis.
Le 1er septembre, il est mis en non-activité et reçoit le titre de lieutenant général honoraire le 21 octobre 1814.
En mars 1815, Napoléon, quittant son exil forcé de l’île d’Elbe, rentre en France pour tenter de reprendre le pouvoir. C’est la période appelée « Les Cent-Jours ». Connu comme proche de l’empereur, le général Dalesme est arrêté le 16 mars avec d’autres officiers impériaux suspectés d’avoir ourdi le retour de Napoléon. Cependant, sa triste situation personnelle suffit rapidement à convaincre les commissaires enquêteurs de son innocence, ainsi que le confirme le rapport suivant en date du 17 mars 1815 :
« Conformément à l’ordre que vous m’avez donné, et en exécution de celui de Monsieur le Ministre de la guerre, le Lieutenant Général Dalesme a été arrêté hier à Versailles. Cet officier m’a paru on ne peut plus tranquille sur son arrestation, il s’occupait à nettoyer un fusil de chasse au moment où j’y suis entré. Il m’a confié qu’il avait trop de chagrin domestique pour s’occuper d’affaires politiques et l’aveu qu’il m’a fait de l’impossibilité où il est de recevoir ni de rendre aucune visite par suite de l’inconduite de sa femme m’a paru expliquer la solitude qu’on remarque tous les jours dans sa maison. Le désordre de son ménage, la dispersion de ses papiers dans tous les tiroirs de son secrétaire, n’annonce pas un homme qui ait des précautions à prendre telles que seraient celles qui commanderaient à la tenue de quelque conciliabule. J’ai examiné tous ses papiers et n’y ai rien trouvé de suspect. Il parait avoir donné quelque ombrage aux habitants et même aux autorités civiles et militaires par la solitude dont il s’entoure mais sa situation vis-à-vis de sa femme, qui lui a donné un enfant pendant une absence de cinq ans, paraît justifier cette solitude. » [11]Service Historique de l’Armée de Terre, op. cit.
Cet état de fait est confirmé par un autre rapport adressé au comte d’Aubry, ministre de la Maison du roi, en date du 18 mars 1815 :
« Il résulte des renseignements que j’avais chargé Monsieur le Lieutenant-Général Conte-Maison de faire sur eux [le général Dalesme et le commissaire Flandin] que l’état de solitude dans lequel vit le Lieutenant-Général Dalesme tient à la position où le place dans le monde l’inconduite de sa femme et qu’il n’existe ni contre lui, ni contre Monsieur Flandin aucun indice des faits qu’on leurs avait attribués. (…) Dans ces circonstances, j’ai cru devoir donner les ordres pour les mettre en liberté, pour faire rendre les papiers pris chez Monsieur le général Dalesme et pour faire recommander à Monsieur Flandin une plus grande circonspection à l’avenir. » [12]Service Historique de l’Armée de Terre, op. cit.
Rappelé aux honneurs
Le 23 mars 1815, Napoléon adresse au maréchal Davout, prince d’Eckmülh, ministre de la guerre, le courrier suivant :
« Faites demander au général Dalesme s’il veut retourner à l’île d’Elbe. Personne n’est plus propre que lui à commander cette île qui ne laisse pas que d’être importante » [13]Correspondance de Napoléon Ier, Tome 28.
Par lettre du 26 mars 1815 adressé au ministre, le général Dalesme accepte de reprendre son ancienne charge en les termes suivants :
« J’accepte avec la plus vive reconnaissance le commandement de l’île d’Elbe, poste aussi important qu’honorable, que votre altesse m’offre au nom de Sa Majesté. Ce nouveau gage de la satisfaction du héros du siècle pour mes services antérieurs ne peut que redoubler les sentiments de zèle et de dévouement que je lui ai toujours voués, il ne fait que m’offrir une nouvelle occasion de justifier sa confiance… » [14]Service Historique de l’Armée de Terre, op. cit.
Le 10 avril 1815, l’empereur adresse au maréchal Davout de nouvelles directives quant au rétablissement de son autorité sur l’île d’Elbe :
« Mon cousin, donnez l’ordre au général Dalesme de partir pour se rendre à Toulon et, de là, à île d’Elbe dont il sera gouverneur. Il aura sous ses ordres le général de brigade Lapi (…). Le général Dalesme aura tous les pouvoirs civils et militaires de l’île. Il recevra de la Corse un bataillon de 5 à 600 hommes. Il embarquera à Toulon une compagnie d’artillerie complétée de 120 hommes et un bataillon de 600 hommes de troupes qui sont à Toulon, de sorte qu’il aura pour la défense de l’île un bataillon de troupes qui sont à Toulon, 500 hommes, un bataillon corse, 500 hommes, une compagnie d’artillerie, 120 hommes, le bataillon franc de l’île, 500 hommes, les gardes nationales, 200 hommes, total 1820 hommes. Donnez ordre au général Dalesme de vous désigner un chef de bataillon d’artillerie et un capitaine du génie qu’on pourrait envoyer à Porto-Ferrajo. Donnez lui également l’ordre de désarmer entièrement Porto-Longone et de le mettre hors service. Laisser seulement 6 pièces de canons au fort Focardo et 6 autres pièces sur affûts marins, pour la défense de la côte. Vous direz au général Dalesme qu’il vienne me parler avant son départ. » [15]Correspondance de Napoléon Ier, Tome 28.
Le 14 avril 1815, Napoléon écrit au comte Carnot, ministre de l’Intérieur, à propos du maintien de l’ordre en Corse :
« Il est nécessaire qu’il [le gouverneur de Corse] corresponde fréquemment avec le général Dalesme, gouverneur de l’île d’Elbe, afin de se porter mutuellement le secours que les circonstances exigeraient. » [16]Correspondance de Napoléon Ier, id.
Le 3 mai 1815, le général Dalesme est nommé lieutenant général titulaire.
En juin et juillet, faisant à nouveau montre de sa grande humanité, il évite une rébellion de la population de l’île d’Elbe, affamée par le blocus anglais, en distribuant aux habitants le grain saisi auparavant sur des navires anglais ainsi que des lettres de marque.
« Cette mesure, écrit-il le 3 juillet 1815 au prince d’Eckmühl, a produit le plus heureux effet parce qu’elle a compromis tous les mauvais sujets de l’île et une grande partie de la population indigente et qu’elle nous les attache de manière à tout espérer d’eux en cas d’attaque. » [17]Service Historique de l’Armée de Terre, op. cit.
La chute de Napoléon semble, de prime abord, signer la fin de la carrière du général Dalesme. En effet, il est mis en retraite forcée par ordonnance royale de Louis XVIII le 15 novembre 1815. On comprendra volontiers les motivations du monarque, quelque peu rancunier à l’égard des fidèles de celui qui l’obligea à fuir hâtivement Paris en abandonnant le trône de France, quelques mois auparavant. Le général Dalesme se retire alors dans sa propriété de Charrat, près de Cieux, non loin de Limoges.
Le commandement des Invalides et le choléra

Le 20 août 1830, Louis-Philippe le rappelle au commandement de l’Hôtel des Invalides, à Paris. Dans cette fonction, il est chargé de seconder un gouverneur que nous avons maintes fois cité précédemment puisqu’il s’agit de son vieil ami Jean-Baptiste Jourdan, devenu entre temps comte et maréchal.
Le 1er mai 1831, il est fait Grand Officier de la Légion d’Honneur.
Mars 1832, l’épidémie de choléra morbus fait des ravages dans la capitale. L’Hôtel des Invalides n’est pas épargné par le fléau. Le registre des correspondances du maréchal Jourdan nous donne de nombreuses informations quant à la gestion de cette situation de crise :
« Au lieutenant général commandant Dalesme, le 20 mars 1832.
(…) Il faut réunir les Invalides par divisions dans les dortoirs ou les réfectoires pour leur expliquer que la maladie atteint particulièrement les hommes malpropres, les ivrognes et surtout ceux qui font usage de liqueurs fortes (…). Vous interdirez la vente de l’eau de vie aux cantiniers et vous leur ordonnerez une propreté particulière ainsi que chez les petits marchands. Il faut redoubler de soins pour entretenir (…) les cuisines et les locaux accessoires par des lavages, grattages et lessivages plus fréquents (…). Il faut veiller à ce que la salle d’appareil destiné aux pansements des militaires atteints de maladies chirurgicales soit tenue avec la même attention que les salles des malades, défendre expressément de ne faire les pansements dans les dortoirs ou dans les chambres. Il faut recommander au sieur Parent qui a la surveillance et la direction du service de propreté de redoubler de zèle et d’activité. Vous recommanderez particulièrement à son attention :
- les cloaques et les puisards qui répandent l’odeur
- d’empêcher qu’on dépose des ordures le long des murs
- de faire vider et nettoyer chaque fois les baquets qui reçoivent l’urine
- d’éviter les amas de fumier dans l’Hôtel
- de faire laver les plombs et les égouts, les latrines et les abords, les faire balayer plusieurs fois dans la journée
- et enfin de veiller à ce que les portes des tambours ventilateurs établis à l’entrée des latrines demeurent constamment fermés . » [18]Service Historique de l’Armée de Terre, Correspondance du Gouverneur des Invalides, 1831-1837, 2Xy186.
« Au lieutenant général commandant Dalesme, le 4 avril 1832.
(…) J’ai invité l’intendant militaire à prendre d’urgence les moyens nécessaires pour ces dispositions soient suivies et je viens en vous donnant la note ci-dessous détaillée vous recommander la surveillance de l’exécution de ces mesures de salubrité reconnues indispensables. Ces mesures consistent :
- dans la substitution d’un local à celui affecté à la lingerie des infirmeries
- à faire nettoyer les carreaux des vitres autant de fois qu’il sera jugé nécessaire
- à faire blanchir promptement à l’eau de chaux les corridors et autres lieux étroits ou obscurs
- et enfin à employer du chlorure et des fumigations partout où les officiers de santé le jugeront nécessaire. » [19]Service Historique de l’Armée de Terre, id.
Après plusieurs semaines de lutte contre l’épidémie, le général Dalesme est lui-même atteint par la maladie. Pourtant, dans ses lettres, Jourdan se veut rassurant, du moins les trois premiers jours.
« Au Ministre de la Guerre, le 10 avril 1832.
Je viens vous faire connaître que le Lieutenant Général Baron Dalesme, après avoir éprouvé une indisposition pendant quelques jours s’est trouvé atteint de cette funeste maladie hier vers quatre heures de l’après-midi. De prompts secours lui ont été administrés par Messieurs les Officiers en chef de santé de l’Hôtel et je suis heureux d’avoir à vous apprendre que son état est d’autant plus satisfaisant qu’il ne laisse aucune inquiétude. » [20]Service Historique de l’Armée de Terre, op. cit.
« Au Ministre de la Guerre, le 11 avril 1832.
Je viens de me traîner comme j’ai pu jusque chez Monsieur le Lieutenant Général Commandant de l’Hôtel dont j’ai eu l’honneur de vous annoncer la maladie par lettre d’hier en ajoutant que, grâce aux prompts secours qui lui avaient été administrés, son état ne présentait rien que de très rassurant. Malheureusement, il n’en est plus ainsi à l’heure qu’il est. Cependant, d’après le résultat de la consultation de Monsieur Fouquier, son médecin actuel, il paraît que la maladie du général n’est pas un véritable choléra mais bien l’état fébrile compliqué comme toutes les maladies régnantes, plus ou moins de l’épidémie actuelle. Du reste, toute grave qu’est la maladie du général Dalesme, son état est loin d’être désespéré, tel est l’avis du docteur Fouquier. » [21]Service Historique de l’Armée de Terre, id.
La mort frappe d’en haut
En dépit de tous les soins qui lui sont prodigués, le général Dalesme succombe le 13 avril 1832 en l’Hôtel des Invalides. Plusieurs sources bibliographiques que nous avons consultées dans le cadre de nos recherches avancent des dates erronées quant à ce décès, à commencer par l’état-civil reconstitué de la ville de Paris qui l’indique le 15 avril et la monographie d’A. Poux qui l’indique le 19 avril. La première confusion citée n’est pas totalement dénuée de cohérence puisqu’il y vraisemblablement eu confusion entre la date de décès et la date d’inhumation lors de la reconstitution de l’état-civil. Quant à la seconde, il faut bien reconnaître qu’elle relève, de la part de son auteur, de l’absence d’approfondissement dans la recherche bibliographique. Les multiples citations de la date véritable dans le dossier militaire du général Dalesme, dans le registre de décès de l’Hôtel des Invalides et dans le registre des correspondances du gouverneur suffisent pour s’en convaincre…
Le lendemain du décès, le maréchal Jourdan informe le ministre de la guerre quant à l’organisation des funérailles du général Dalesme :
« Au Ministre de la Guerre, le 14 avril 1832.
J’ai eu le chagrin de vous annoncer hier la mort de mon Monsieur le Général Baron Dalesme, Grand Officier de la Légion d’Honneur, Commandant de l’Hôtel. Je viens aujourd’hui vous informer que ses obsèques auront lieu demain 15, à midi précis, en l’église paroissiale Saint-Louis des Invalides. Ses dépouilles mortelles seront ensuite transportées au cimetière de l’Hôtel à Vaugirard. J’ai donné connaissance de ces dispositions à Monsieur le Lieutenant Général commandant la 1ère Division Militaire en le priant de vouloir bien donner les ordres nécessaires pour que des troupes de la garnison de Paris soient commandées pour rendre les derniers honneurs à l’officier général dont tous les militaires invalides déplorent unanimement la perte. » [22]Service Historique de l’Armée de Terre, id.
Il annonce également la triste nouvelle à l’ensemble des militaires présents en l’Hôtel des Invalides :
« L’hôtel des Invalides vient de faire une perte bien douloureuse dans la personne de Monsieur le Lieutenant Général Baron Dalesme, son commandant, Grand Officier de la Légion d’Honneur.
Militaires Invalides !
Ceux d’entre vous qui ont servi sous ses ordres ont pu apprécier son dévouement à la patrie, ceux qui ont combattu sous ses yeux ont eu plus d’une fois l’occasion d’admirer sa brillante valeur, et depuis qu’il commande, vous avez vu avec quels soins et quel zèle il veillait à tous vos besoins. Vos regrets seront donc sincères et profonds. Vous accompagnerez sa dépouille mortelle à sa dernière demeure et, en vous éloignant de sa tombe, vous direz : là reposent les cendres d’un général aussi distingué par son mérite que par son courage, d’un véritable ami des soldats !
Militaires Invalides !
Mes infirmités ne me permettent pas de marcher à votre tête dans cette lugubre cérémonie ; mais je mêlerai mes douloureux regrets aux vôtres et ils accompagneront le cercueil de celui qui était mon ami intime depuis 45 ans. » [23]Service Historique de l’Armée de Terre, 1Xy11, liasse D.
La matinée du 15 avril, Jourdan finalise ses ordres pour les funérailles du général Dalesme :
« Les Militaires Invalides seront réunis par divisions à onze heures et demie et conduits à l’église pour assister à la cérémonie religieuse. Ils accompagneront le cercueil jusqu’au cimetière, marchant en ordre sous la conduite du colonel major, des adjudants majors, des chefs et adjudants de divisions. Six divisions précèderont le char, six autres le suivront. La 1ère Division marchera en tête de ces six dernières. Les divisions seront ramenées en ordre à l’hôtel. Il restera à l’hôtel un certain nombre d’hommes par division pour veiller à la garde des chambrées. Il n’y aura point dans le cortège de troupes de la Garnison, attendu que le Gouvernement a ordonné qu’il ne serait plus rendu d’honneurs funèbres militaires pendant le temps de l’épidémie du choléra. » [24]Service Historique de l’Armée de Terre, id.
Le même jour, Jourdan adresse au vicomte Lenoir LE sombre bilan de l’épidémie en l’Hôtel des Invalides depuis le début de celle-ci à savoir 134 hommes atteints dont :
94 morts
2 guéris
41 encore en traitement ou en convalescence.
Jourdan, bienfaiteur des enfants Dalesme…
En dépit de ses nombreux mérites et de ses hautes fonctions, le général Dalesme n’en laisse pas moins une famille totalement démunie. On ne trouve en effet nulle mention de succession dans le registre des actes notariés du Xe arrondissement de Paris (aujourd’hui VIIe arrondissement) et il y a fort à parier que les quelques biens matériels laissés sous séquestre jusqu’à la fin du mois d’avril 1815 étaient bien maigres. En dehors d’Aurore-Alexandrine, déjà mariée à Pierre Pétiniaud et pouvant par conséquent subvenir sans aide à ses besoins, Alfred, l’aîné des enfants, héritier du titre de baron et Eugénie, la benjamine, se trouvent alors dans l’indigence la plus totale, n’ayant ni emploi ni rente pour subsister. Honorant le souvenir de son vieux compagnon de guerre, le maréchal Jourdan intercède aussitôt en leur faveur :
« Au ministre de la Guerre, le 14 avril 1832.
Je m’adresse à vos services pour vous recommander avec confiance le fils de mon vieux compagnon d’armes, le Lieutenant Général Dalesme qui laisse deux enfants, un fils et une fille, dans un état voisin de la détresse et qu’un emploi au Ministère de la Guerre secourrait efficacement. Je suis garant que Monsieur Alfred Dalesme qui est mon filleul se rendra digne de vos bontés et je vous aurai une obligation particulière, Monsieur le Maréchal, de ce que vous voudrez bien faire pour lui. » [25]Service Historique de l’Armée de Terre, Correspondance du Gouverneur des Invalides, 1831-1837, 2Xy186.
« Au Général Baron Pelet, le 15 avril 1832.
Mon cher général, le fils du général Dalesme vous remettra la présente. Servez lui, je vous prie, d’interlocuteur auprès du Ministre de la Guerreà qui je vous prie de dire que je lui aurai autant d’obligation de ce qu’il fera en faveur de ce jeune homme que s’il était mon propre fils. Quant à vous, général, recevez l’expression de la sincère reconnaissance de l’intérêt que vous prenez au fil de mon ami et agréez la nouvelle assurance de mon sincère attachement. » [26]Service Historique de l’Armée de Terre, id.
« Au Baron Louis, Ministre des Finances, le 27 avril 1832.
Les services éminents que pendant les années qui se sont succédées depuis 1790 jusqu’à sa mort, Monsieur le Général Dalesme a rendu à son pays sont de véritables titres aux bienfaits du gouvernement et c’est dans le but de vous proposer de les récompenser dans la personne de celle de ces enfants de mon ancien ami qui est vraiment la plus à plaindre que je viens vous prier de vouloir bien accorder à Mademoiselle Eugénie Dalesme, âgée de 25 ans, un bureau de timbres à Paris (…). J’espère donc, Monsieur le Baron, que (…) vous voudrez bien accueillir une demande au succès de laquelle j’attache le même prix que si elle concernait l’une de mes propres filles (…). Le gouvernement ne doit pas souffrir que la fille d’un général qui a servi son pays pendant plus de quarante ans et qui est mort couvert de blessures soit réduite à l’aumône. » [27]Service Historique de l’Armée de Terre, id
Alfred Dalesme bénéficiera effectivement d’un poste d’employé au Ministère de la Guerre. Il épousera Nathalie Roger avec qui il s’expatriera aux Etats-Unis quelques années plus tard pour y développer le commerce de la porcelaine.
Eugénie tirera faveur des bontés de Jourdan qui ira jusqu’à lui accorder, à sa mort, une rente de 12000 francs. Elle épousera François-Achille Bordet, employé au Ministère de la Guerre dont elle aura une fille prénommée Madeleine.
Aurore-Alexandrine, épouse de Pierre Pétiniaud, mettra au monde un fils prénommé Jean-Baptiste Alfred qui épousera, plus tard, sa cousine germaine Madeleine Bordet.
Quant à la veuve du général, Marie-Alexandrine Dumas, qui demeure toujours en leur maison de Versailles au moment du décès de celui-ci, bien que légalement séparée de corps à la demande de son époux depuis plusieurs années pour les raisons précédemment évoquées, elle remplit à merveille son rôle de veuve éplorée et ne perd nullement le nord quand il s’agit de réclamer la pension de veuve de militaire d’un montant de 6000 francs à laquelle elle peut prétendre.
Que dit la postérité ?
Le 29 août 1836, les trois enfants du général Dalesme adressent une requête au ministre de la guerre afin que celui-ci fassent rajouter le nom de leur père parmi ceux des héros de la Grande Armée figurant sur l’arc de triomphe de l’Etoile, à Paris. Ce sera chose faite en 1837 et l’on peut encore lire le nom de Dalesme sur la face nord du monument.

L’Hôtel National des Invalides conserve en outre son souvenir au travers de deux objets présentés dans la salle « Egypte » du Musée de l’Armée : une carabine d’apparat et une boîte de pistolets de duel lui ayant appartenu (voir photo).
L’île d’Elbe conservait, sur l’un des murs du Fort Stella, une plaque (aujourd’hui disparue) dédiée au général Dalesme, apposée à l’occasion du bicentenaire de l’arrivée de l’Empereur, le 3 mai 1914. On pouvait y lire les mots suivants :
« Da questo antico quartiere militare, dal 1810 al 1814, il Generale Barone Giovan. Batt. Dalesme che con alta saggezza di governatore et virtu di soldato in momenti fortunosi volle e seppe liberraria dagli orrori della guerra civile. » [28]« Depuis ce vieux quartier militaire, de 1810 à 1814, commanda l’île d’Elbe le Général Baron Jean-Baptiste Dalesme qui, par sa haute sagesse de gouverneur et sa valeur de soldat dans des … Continue reading
Quant à la ville de Limoges, elle garde aujourd’hui bien peu de souvenirs de ce héros de l’Empire qu’elle vit pourtant naître.
En 1847, le Conseil Municipal fait percer une nouvelle rue entre la place Saint-Pierre et la place Fournier et décide de la désigner sous le nom de rue Dalesme, en souvenir de l’emplacement qu’occupait à cet emplacement la maison familiale Dalesme. A ce jour, ces quelques dizaines de mètres de chaussée entourés de maisons quelque peu austères portent toujours le même nom, mais sans plus d’indications quant à son origine.
En 1897, Monsieur Brunet, inspecteur des finances retiré à Solignac et petit-neveu du général Dalesme évoque dans plusieurs numéros du« Courrier du Centre » l’idée d’une souscription pour élever à Limoges une statue représentant son illustre ancêtre. Il relance cette idée en 1899 par la publication d’une brochure intitulée « Une statue au Général Dalesme ». La réalisation du projet mettra plus de dix ans. Dans un premier temps, la place Fournier est choisie pour accueillir le monument. Finalement c’est vers le Cours de Fleurus que se porteront les suffrages : le buste du général Dalesme fera face à la statue du maréchal Jourdan [29]Aujourd’hui visible Place Jourdan.déjà en place à l’autre extrémité de l’avenue. Enfin, le 9 novembre 1911, le fameux buste, œuvre du sculpteur limougeaud Coutheillas est inauguré, sans que cette cérémonie suscite pour autant le moindre enthousiasme de la part de la population :
« La cérémonie a duré dix minutes à peine. Cette rapidité d’exécution donna lieu à une joyeuse revue de fin d’année dont se souviennent tous les plus de 40 ans à Limoges. L’orateur y lançait des phrases tonitruantes, devant un marmiton qui représentait la foule absente, à qui un brave agent de police s’époumonait à crier : Circulez ! » [30]Archives Départementales de Haute-Vienne, « Le courrier du Centre », 11 novembre 1911

Il est effectivement déjà loin en ce début de vingtième siècle, le crépuscule de l’Empire, a fortiori pour Limoges l’ouvrière, alors davantage soucieuse – et probablement à juste titre – du développement industriel de la porcelaine que de ses gloires passées. Il y a par ailleurs fort à parier que le discours éminemment emphatique de Brunet a du faire fuir plus d’un adaud se trouvant là !
Dans les années qui suivent l’armistice 1918, le buste du général Dalesme est transféré place Fournier où il trône au sommet d’une ridicule fontaine. Comble de la malchance, il sera fondu par les occupants allemands en 1942. La seule statue de Limoges qui échappera ce triste sort est celle… du maréchal Jourdan !
Enfin, au décours de récentes recherches, j’ai découvert grâce à un article paru dans le bulletin de liaison des Amis du Patrimoine Napoléonien que le dernier descendant direct du général Dalesme, Armand Dalesme, avait légué voilà quelques années un coffret (photographie ci-contre) lui ayant appartenu au musée Emile-Jean de Villiers-sur-Marne où il résidait alors avec son épouse. Il s’agit vraisemblablement d’un coffret à lettres, de fort belle facture, en ébène rehaussée de bronze doré, le tout en assez bon état. Il a été assez surprenant pour moi de trouver ce souvenir de mon illustre parent aussi loin de sa région d’origine et de l’hôtel des Invalides.
Outre la gravure figurant plus haut, je possède pour ma part plusieurs souvenirs indirectement liés au général Dalesme. Il s’agit de 2 ouvrages (Heures du diocèse de Limoges et Règle des Ursulines) imprimés chez Jean-Baptiste Dalesme, imprimeur à Limoges, en 1805. Enfin, les inconditionnels de l’histoire napoléonienne sauront probablement que l’ouvrage « Souvenirs de l’île d’Elbe » de Pons de l’Hérault, réédité chez Plon en 1897 fait à de multiples reprises mention du général Dalesme en sa qualité de gouverneur de l’île avant l’arrivée de l’empereur.
Perspectives…
Au vu des derniers éléments recueillis au fil de mes recherches, j’envisage 2 nouvelles étapes :
- La première consiste à rematérialiser le lieu de la sépulture du général Dalesme dans le carré militaire du cimetière de Vaugirard, ou à proximité immédiate. Les démarches que j’avais entreprises auprès de l’association du Souvenir français, responsable de l’entretien de ce mémorial militaire se sont soldées par un refus catégorique de s’engager dans ce sens. La prochaine étape de mes démarches consistera donc à me mettre en relation avec la conservatrice du cimetière du Montparnasse qui a également la charge de Vaugirard. Il me parait inconcevable, en dehors du fait qu’il s’agisse d’un de mes ancêtres, que le général Dalesme, fort de ses hauts faits d’armes au service de son pays, n’ait pas le même droit à la mémoire que les soldats anonymes des 2 dernières guerres. J’espère donc que ce projet pourra aboutir rapidement et je compte vivement sur le soutien des associations oeuvrant pour le souvenir de l’époque impériale et des ses grands noms.
- En second lieu, à l’issue de ma visite au musée de Villiers-sur-Marne, pour y photographier le coffret du général Dalesme, m’est venue l’idée d’une petite exposition, réunissant textes et objets se référant de près ou de loin à celui-ci. Projet à murir et à discuter avec le conservateur du musée, Daniel Poisson, également président de l’Association des Amis du Patrimoine Napoléonien.
A mes grands-parents, Suzanne et René Fely
A la mémoire de mon arrière-grand-mère, Jeanne Dalesme.
BIBLIOGRAPHIE
Archives du Service Historique de l’Armée de Terre
Dossier militaire du général Jean-Baptiste DALESME, 7Yd771
Archives de l’Hôtel National des Invalides
Personnel militaire, dossiers individuels, liasse 2, 1Xy9.
Service du culte, inhumations, liasses 3 et 4, 1Xy11.
Séances du Conseil d’Administration (29/12/1831 au 9/6/1837), 2Xy121.
Archives du Service de Santé, 2Xy152.
Correspondance du gouverneur (30/9/1831 au 14/3/1834), 2Xy186.
Registre des décès (3/1/1822 au 16/7/1832), 2Xy240.
Registre de l’infirmerie (1/1/1832 au 31/12/1842), 2Xy254.
Archives du Département de Paris
Reconstitution de l’état-civil parisien – Actes de décès
1ère reconstitution, Microfilms 5Mi 1100 à 1576.
2e reconstitution, Microfilms 5Mi 36 à 64.
Inventaire de la conservation des pompes funèbres de Paris, VI-15-1, carton 22.
Bibliothèque de l’Hôtel National des Invalides
Dictionnaire des Généraux et Maréchaux d’Empire, Georges SIX.
« J-B. DALESME, un limousin glorifié en Italie », Georges POUX , Limoges, 1930.
« Les Invalides, trois siècles d’histoire… ». Ouvr. Coll.
Archives Départementales de Haute-Vienne
« Le général DALESME », Alm. Ann. Lim. DUCOURTIEUX, p. 139, 1878.
Nobiliaire du Limousin, J. NADAUD, Limoges, 1882, tome I.
« Une statue au général DALESME », A. BRUNET, Limoges, 1899, I/K66
Le Limousin de Paris, 17 septembre 1911
Limoges illustré, recueil des tirages, 2nd semestre 1911.
« Erection du buste du général DALESME », Alm. Ann. Lim. DUCOURTIEUX, p. 80, 1912.
« Excursion urbaine d’histoire et d’archéologie », Bull. Soc. Arch. Lim, tome 80 (p. 126), 14 juin 1942.
« Un bicentenaire oublié, le général DALESME… », Jules TINTOU, Lemouzi N° 6 et 7, avril 1963 (p. 49) et juillet 1963 (p. 19), I/L76.
Sites Internet
http://perso.club-internet.fr/ameliefr/Elbe1.html
Ouvrages divers
« Les Etoiles de Napoléon », J. PIGEARD
« Napoléon, roi de l’île d’Elbe », P. GRUYER
« Soldats-ingénieurs » B. RICHE
Contacts pris
M. l’adjudant-chef GILLIS, porte-étendard du gouverneur, Hôtel National des Invalides.
M. Bernard GOT, président de l’Association pour la Sauvegarde du Patrimoine Napoléonien.
Service général des cimetières, Ville de Paris.
Conservations des cimetières du Père-Lachaise, Montparnasse, Montmartre, Vaugirard, Grenelle à Paris.
Service général des cimetières, Ville de Versailles.
Musée de l’Armée, Hôtel National des Invalides.
M. le Conservateur-adjoint, Archives Départementales de Haute-Vienne.
References[+]
↑1 | Service Historique de l’Armée de Terre, 7Yd771 |
---|---|
↑2 | In « Un bicentenaire oublié, le général DALESME… », Jules TINTOU, Lemouzi N° 6 et 7, avril 1963 (p. 49) et juillet 1963 (p. 19), I/L76. |
↑3 | Jules Tintou, idem |
↑4, ↑7 | Correspondance de Napoléon Ier, Tome 31 (récit de l’exil de l’empereur). |
↑5 | http://perso.club-internet.fr/ameliefr/Elbe1.html & Correspondance de Napoléon Ier, Tome 27. |
↑6 | Symbole ambigu qui pouvait tout aussi bien représenter la royauté restaurée que la paix retrouvée. |
↑8 | http://perso.club-internet.fr/ameliefr/Elbe1.html& Correspondance de Napoléon Ier, Tome 27. |
↑9 | http://perso.club-internet.fr/ameliefr/Elbe1.html |
↑10 | L’enfant étant née le 11 juillet 1813, sa légitimité supposerait une grossesse d’une durée de près de 32 mois ! |
↑11, ↑12, ↑14, ↑17, ↑20 | Service Historique de l’Armée de Terre, op. cit. |
↑13, ↑15 | Correspondance de Napoléon Ier, Tome 28. |
↑16 | Correspondance de Napoléon Ier, id. |
↑18 | Service Historique de l’Armée de Terre, Correspondance du Gouverneur des Invalides, 1831-1837, 2Xy186. |
↑19, ↑21, ↑22, ↑24, ↑26 | Service Historique de l’Armée de Terre, id. |
↑23 | Service Historique de l’Armée de Terre, 1Xy11, liasse D. |
↑25 | Service Historique de l’Armée de Terre, Correspondance du Gouverneur des Invalides, 1831-1837, 2Xy186. |
↑27 | Service Historique de l’Armée de Terre, id |
↑28 | « Depuis ce vieux quartier militaire, de 1810 à 1814, commanda l’île d’Elbe le Général Baron Jean-Baptiste Dalesme qui, par sa haute sagesse de gouverneur et sa valeur de soldat dans des époques troublées, s’appliqua et réussit à nous préserver des horreurs de la guerre civile. » |
↑29 | Aujourd’hui visible Place Jourdan. |
↑30 | Archives Départementales de Haute-Vienne, « Le courrier du Centre », 11 novembre 1911 |