L’armée autrichienne sous le Premier empire
Handicapés par le conservatisme de sa hiérarchie, les Autrichiens eurent à combattre contre l’armée alors la plus moderne en Europe. Les soldats autrichiens se comportèrent cependant avec discipline, jouant un rôle central dans plusieurs coalitions contre la France, depuis les campagnes des années 1790, durant la campagne d’Austerlitz de 1805, les batailles très équilibrées de 1809 et, finalement, durant les affrontements victorieux de 1813-1814.
Durant les années 1740 et 1750, la principale tâche de l’armée autrichienne avait été de protéger le territoire contre son plus dangereux adversaire : l’armée prussienne du Grand Frédérique. La série de défaites infligées par ce redoutable adversaire démontra largement qu’elle n’était en aucune manière en mesure de s’opposer victorieusement à un tel adversaire.
En 1771, l’Autriche introduit une sorte de conscription générale, mais des exemptions sont alors accordées à plusieurs villes et provinces. Les zones soumises à la conscription étaient divisées en districts régimentaires (les régiments d’infanterie ‘allemands’), mais la Hongrie, les Pays-Bas et l’Italie du nord, ainsi que la noblesse et les fonctionnaires, en étaient exclus. Certaines régions (Tyrol, Italie du nord, Pays-Bas) avaient recours à un recrutement libre, tandis que d’autres (Hongrie) comblaient les rangs avec des fonctionnaires locaux selon un quota imposé par la Diète hongroise, ainsi qu’avec des volontaires.
Un processus de réforme fut également entamé, touchant chaque aspect de la vie militaire. Ces réformes améliorèrent grandement l’armée autrichienne, au point que, durant la Guerre de Succession bavaroise, les Prussiens furent presque complètement neutralisés, grâce à des positions défensives si formidables que Frédérique n’osa même pas s’y attaquer.
Mais alors, survint une période de stagnation, de sorte que, dans les années 1790, l’armée autrichienne se retrouva prisonnière d’un ensemble d’attitudes et de méthodes qui avaient été adoptées pour convenir au style de guerre du passé. De nouvelles réformes étaient nécessaires pour résister à la menace posée par Napoléon.
Un des problèmes de l’armée autrichienne est alors son système de promotions à l’ancienneté, conduisant à réduire le nombre de généraux et de colonels en activité. Cela signifiait aussi qu’en entrant dans le service, tout individu était sûr, pour autant qu’il ne vole pas ( !), de passer tous les rangs et même d’atteindre le rang de général !
La défaite de 1805 porte un coup fatal à l’armée autrichienne, tant en hommes qu’en matériel, mais l’état déplorable des finances de la monarchie danubienne ne présage pas d’une reconstruction rapide.
Peu de temps après la Paix de Presbourg, l’archiduc Charles est nommé par son frère, l’empereur François (le 10 février 1806), Chef du Conseil Aulique de guerre et Généralissime des Armée. Profitant de son prestige – rappelons qu’il était alors le seul général à avoir battu des généraux français, Moreau et Jourdan – et de la paix, il va commencer un important travail de réorganisation de l’armée, supprimant le service militaire à vie, réorganisant la conscription, interdisant le châtiment corporel[1] et adoptant les tactiques françaises de combat.
Au début de 1809, François I lui fixe un objectif ambitieux : lui préparer, rapidement, un plan détaillé de réforme systématique du système militaire de toute la Monarchie.
Ce n’est pas une tâche des plus aisées, car ce système, terriblement usé par 10 années de guerres presque continuelles contre la France, est dans état de total délabrement. Et pourtant, grâce à un travail considérable, l’archiduc va réussir, et dans un temps relativement court, une transformation radicale des armées impériales.
La principale réforme va concerner le Conseil aulique de la guerre que déjà, bien avant lui, le Prince Eugène de Savoie, son auguste prédécesseur, avait accusé d’être à l’origine des déboires militaires de l’Autriche. Il est bien décidé à redonner à ce Conseil le rôle qui devait être le sien : celui d’un organe d’exécution des ministères de la guerre et de la marine, qu’il crée à cet effet, et à qui il donne la prérogative de pouvoir s’adresser directement à l’empereur. C’est à eux que va revenir désormais le travail d’organisation, les questions de stratégie, la conception des plans de campagnes et les affaires du personnel.
On l’a vu plus haut, l’armée autrichienne se renouvelle alors, par la conscription, les conscrits étant appelés en fonction des besoins. La durée du service est en général, dans les pays héréditaires, de 10 ans (10 ans pour l’infanterie, 12 pour la cavalerie, 14 pour l’artillerie et le génie). En Hongrie, ce service est cependant pour la durée de la vie. Ce système de conscription permet de couvrir environ 63 % des besoins en soldats. Le reste est alimenté par les enrôlements et les Volontaires, qui proviennent également de l’étranger, notamment des pays de l’empire.
L’archiduc Charles tente d’adapter l’armée aux nouveautés que les guerres révolutionnaires et napoléoniennes ont, ces quinze dernières années, engendrées. Il publie de nombreux écrits qui s’appliquent tant au corps des officiers qu’aux simples soldats. Son but est de créer un nouveau type de soldat : il faut désormais faire fi de la contrainte, et s’appuyer, au combat, sur la mentalité et l’enthousiasme patriotique.
La Landwehr
Créée par les décrets impériaux des 12 mai et 9 juin 1808, la Landwehr (sorte de milice de réserve) est, pour ainsi dire, la réponse à la levée en masse de la France révolutionnaire. Elle a pour but essentiel la défense du sol et de la patrie, tout en soulageant les finances de l’État, en réduisant le nombre de soldats dans l’armée régulière.[2]
Lorsque la guerre contre la France et ses Alliés éclate, au printemps 1809, cette Landwehr est cependant loin de répondre aux attentes, en particulier pour ce qui est de sa valeur combattante, car le temps a manqué pour une formation adéquate et pour assurer la cohésion des unités. Cette formation prévoyait, pour les hommes de 18 à 45 ans aptes à porter les armes, des exercices hebdomadaires (pour les individus), mensuels (pour les compagnies) et annuels (pour les bataillons). La guerre arrivant trop tôt, cela n’a guère été possible, et les unités sont alors loin d’être parfaitement aptes au combat. Les cadres eux-mêmes sont pour le moins insuffisants, en quantité et en qualité.
Ces critiques ne s’appliquent toutefois pas aux bataillons de Volontaires[3], mis à la disposition de la Landwehr, tout au début de 1809. Mais ceux-ci seront rapidement incorporés dans l’armée régulière[4], entraînant, conséquemment, un affaiblissement de cette Landwehr, qui se voyait ainsi privée d’éléments de valeur et extrêmement motivés.
Au début de 1809, la Landwehr se compose de 150 bataillons : 19 de Basse-Autriche, 15 de Haute-Autriche, 4 de Salzburg, 13 de Styrie, 5 de Carinthie, 15 de Kraina et des pays du littoral (ce qui deviendra plus tard l’Illyrie), 55 en Bohème, 24 en Moravie-Silésie, soit un total d’environ 142.000 hommes[5]. Mais ce sont seulement six bataillons de Volontaires qui sont formés à Vienne, 4 en Innerösterreich, en Styrie, en Carinthie, en Kraina et dans les pays du littoral, et 3 en Moravie.
Organisées sur une base territoriale, ces unités d’importance croissante (compagnie, bataillon, régiment, brigade) vont rapidement avoir l’occasion de défendre le sol national, seules ou avec l’armée principale impériale. Car l’avancée rapide des troupes coalisées et les défaites des impériaux durant la première partie de la campagne, en Bavière, entraînent rapidement que les premières se dirigent bientôt droit sur Vienne. Les unités de la Landwehr se voient ainsi, très tôt, entraînées dans les combats, avec plus ou moins de succès[6], en raison de leur manque flagrant de formation.
L’armée principale.
Depuis juillet 1808, l’Autriche a adopté l’organisation en corps d’armée, plus apte à répondre aux exigences modernes d’une guerre de mouvement telle que la pratiquent les armées françaises, mais rompant totalement avec la tradition autrichienne. C’était là un changement radical, car jamais encore cette armée n’avait manœuvré de telle manière.
En 1809[7], elle se compose de 9 corps d’armée[8] et de 2 corps de réserve. Les premiers (du moins au début de la campagne) sont chacun composés de 28 bataillons d’infanterie, 16 escadrons de cavalerie, 10 batteries d’artillerie, 2 compagnies de pionniers (génie) ainsi que de ce qui est nécessaire en formations du train et de santé. Chaque corps d’armée rassemble ainsi environ 30.000 hommes et 2.200 cavaliers.
En règle générale, chaque corps d’armée est à deux divisions d’infanterie de ligne et une division d’infanterie légère (autre nouveauté), auxquelles s’ajoutent l’artillerie, le train, 2 compagnies de pionniers et une de santé.
Les deux corps de réserve sont organisés différemment. C’est là que l’on trouve l’élite de l’infanterie – les grenadiers – et la cavalerie lourde – cuirassiers et dragons, qui, comme auparavant, est considérée comme l’arme devant décider de la victoire.
Le 1er corps de réserve est composé d’une division, avec 1 brigade (12 bataillons) de grenadiers, 3 brigades de cavalerie (4 régiments de cuirassiers, 2 régiments de dragons), de l’artillerie (5 batteries), le train et une compagnie de santé.
Le 2e corps de réserve est nettement moins important. Sa brigade de grenadiers n’a que 5 bataillons, les 2 brigades de cavalerie n’ont que 2 régiments de cuirassiers et 2 de dragons. L’artillerie est à trois batteries.
Divisions et brigades ne sont pas numérotées, mais identifiées par le nom de leurs commandants.
On voit donc que l’organisation de l’armée autrichienne, en 1809, dans laquelle les corps d’armée et de réserve sont composés des trois armes, et peuvent agir de façon indépendante, se rapproche grandement de celle des armées de Napoléon. Mai, en ce mois d’avril, il s’agit là d’une expérimentation hasardeuse.
Et la campagne qui s’ouvre va montrer que de nombreux commandants de corps ne sont pas préparés (quand ils n’y sont pas tout simplement hostiles, comme le note amèrement l’archiduc) à cette conception tellement nouvelle pour eux de la conduite de la guerre, bien loin de la tactique linéaire qu’ils ont appris, quelquefois des décennies auparavant. Se considérant toujours comme de simples exécutants de leur général en chef, l’initiative ne va pas vraiment être leur principale qualité, ce qui par ailleurs ne les empêchera pas d’être courageux. A leur décharge, il faut reconnaître qu’ils ne furent jamais entraînés à commander et à faire évoluer de grosses masses de soldats, et que la rapidité des évènements entraîna de nombreux changements dans les ordres de bataille, qui, dans de nombreux cas, s’écartèrent de la théorie.
L’infanterie
Au début de 1809, l’infanterie impériale se compose de 61 régiments de ligne, 17 régiments de frontaliers (les « Grenzer »), 9 bataillons de chasseurs et d’une division[9] (2 compagnies) d’infanterie de marine.

Les régiments de ligne viennent d’Innerösterreich (11), de Bohème (11), de Moravie-Silésie (12), de Galicie (12), de Hongrie (15) et de Transylvanie (15). Chaque régiment comprend un état-major, 3 bataillons de campagne[10] (chacun à 3 divisions à 2 compagnies, soit 238 hommes pour les compagnies hongroises, 218 pour toutes les autres), une division de grenadiers (2 compagnies à 145 hommes) et une division de dépôt (2 compagnies à 416 hommes pour les Hongrois, 818 pour les autres), destinée à la formation. Chaque régiment a donc, au total, 5.170 (allemands) ou 5.065 hommes (hongrois).
Les compagnies de grenadiers sont réunies dans 21 bataillons et forment des brigades qui, pour la plus grande partie, font partie des deux corps de réserve. On avait, dès 1808, pensé à former une telle réserve. Parmi les 46 régiments allemands et autres, on avait ainsi regroupés 1.300 hommes de première réserve, et 1.600 de seconde réserve, qui se trouvaient en congé.
Les régiments d’infanterie frontaliers qui, comme les chasseurs, sont employés comme troupes légères, sont moins importants. Ils comportent seulement 2 bataillons de campagne à 6 compagnies, pour un total de 2.980 hommes (à l’exception des 4 régiments de Transylvanie, à 2693 hommes). Chaque régiment possède également un bataillon de réserve de 1.473 hommes (785 pour les transylvaniens).

L’infanterie utilise alors le fusil modèle M 1798 , à baïonnette, d’une longueur de 149,3 cm (197,3 avec la baïonnette), et un poids de 4,090 kg, de calibre 17,6 mm. Il a une portée d’environ 180 pas.
Les neufs bataillons de chasseurs (en nombre nettement inférieur par rapport aux autres armées belligérantes) n’ont été formés que peu de temps avant la campagne. Chaque bataillon est à six compagnies (166 hommes) et une compagnie de dépôt (74 hommes), ce qui fait un total de 1.010 hommes par bataillon. Ils sont équipés de la carabine M 1807, à baïonnette, d’une longueur de 150 cm (198 avec la baïonnette), d’un poids de 4,200 kg, de calibre 17,6 mm. La portée est de 250 à 300 pas. Ils ont également une arme beaucoup plus efficace, de calibre 13,9 mm, qui autorise une bonne précision jusqu’à 350 pas. Les « Stutzenjäger » emportent avec eux jusqu’à 100 cartouches (seulement 60 pour le reste des fantassins).
Bien que l’entraînement au tir ait été intensifié[11], l’allocation en munitions, pour cet effet, est très faible. Un fantassin ordinaire ne peut ainsi tirer que 10 cartouches réelles par an, les tirailleurs d’élite (2 caporaux, 12 fantassins par compagnie) seulement 25.
Ayant gagné une certaine expérience durant les récentes guerres, l’infanterie combat désormais d’une façon similaire aux Français. Si le nouveau règlement met toujours l’accent sur l’importance de la mousqueterie, le dernier mot reste désormais au combat à la baïonnette[12].
Au moment de l’attaque, les bataillons forment d’abord une « masse », pour laquelle les compagnies de bataillon s’avancent, les unes derrières les autres, sur trois lignes, espacées de 2 pas. Au moment de tirer, une courte pause est observée dans la marche en avant. Dans la pratique, le bataillon a malgré tout la possibilité d’avancer sans s’arrêter et d’attaquer l’ennemi à la baïonnette. Une telle attaque brutale de la colonne en rang serré a pour but de rompre le front de défense de l’adversaire, et de décider du combat. Cette formation « en masse » permet également la formation rapide en carré, pour repousser les attaques de cavalerie.
L’emploi des tirailleurs par les Français a forcé les Autrichiens dans une direction identique. A cet effet, dans les bataillons, les fantassins de la troisième ligne sont enlevés du front pour, en utilisant les particularités du terrain, tourner les tirailleurs ennemis et, par des tirs très précis, inquiéter les flancs de l’adversaire, ou même de considérablement ébranler celui-ci.
En défense, le bataillon se met en ligne, compagnie par compagnie, sur trois rangs, quelquefois (selon les besoins) en formation plus profonde, avec une ligne de réserve. On tire alors des salves de « divisions », de compagnie ou de bataillon, mais le tir individuel est également possible. Lorsque le terrain est couvert et varié, ce sont surtout les fantassins légers, les chasseurs, les frontaliers et les Volontaires qui sont utilisés.
Les soldats équipés de carabines ont pour mission de causer, par des tirs précis, des pertes sensibles à l’ennemi, pendant que les tirailleurs, par leurs tirs incessants et rapides, na doivent laisser aucun repos à l’ennemi.
Mais, malgré des progrès certains, l’infanterie autrichienne est alors loin d’avoir le niveau de son opposante et ne pourra que partiellement mettre en œuvre avec succès la nouvelle façon de combattre qui lui est désormais proposée.
La cavalerie
L’archiduc a compris l’importance de cette arme, dont il va chercher à faire l’élément de décision sur le champ de bataille, se basant sur l’exemple de son adversaire.
Elle se compose de cavalerie lourde et de cavalerie légère. Cette classification se base essentiellement sur les différentes tâches effectuées.

La cavalerie lourde comprend 8 régiments de cuirassiers et 6 régiments de dragons (chaque régiment étant composé de 6 escadrons de 135 cavaliers[13]), et constituent, au moment du combat, la réserve à la disposition du général en chef.

La cavalerie légère est formée de six régiments de chevau-légers, 12 régiments de hussards et 12 régiments de uhlans (tous à six escadrons de 150 cavaliers), qui sont employés dans les divisions légères et dans les brigades des corps d’armée. En fait, les particularités de ces régiments, en particulier pour ce qui est des opérations de reconnaissance et de sécurité, sont alors mal utilisées par l’état-major. Celui-ci rechigne aux larges opérations de reconnaissance, pour, par exemple, apprécier les mouvements de l’ennemi, car il veut avant tout éviter, non seulement les pertes, mais aussi la dispersion de ces unités, afin d’être en mesure, le moment venu, d’engager l’ensemble de sa cavalerie. Mais il faut souligner l’excellente formation (et cela comprend le maniement des armes à feu) et l’excellente mobilité en formation fermée de cette cavalerie autrichienne.
L’artillerie

Depuis l’introduction d’un nouveau système d’artillerie, en 1753, par le FM prince de Liechtenstein[14], l’artillerie autrichienne compte parmi les meilleures d’Europe. Si, du point de vue technique, le matériel n’a subi aucune modification, les réformes de l’archiduc Charles vont profondément transformer l’usage de cette arme, au point de la refonder totalement (Angeli) et de lui donner un rôle qu’elle n’avait pas jusque là. Elles viseront essentiellement à la rendre plus mobile.
En ce sens, principale réforme intervient le 3 juin 1808, lorsqu’un décret impérial, signé du directeur de l’artillerie, Joseph Colloredo[15], aboli les bataillons d’artillerie de l’infanterie, et crée trois formations permanentes : les batteries de brigades (8 pièces légères), de position (6 pièces lourdes et deux obusiers) et les batteries attelées (4 canons et 2 obusiers)[16]. Mais les bataillons de frontaliers gardent leur artillerie propre. Les premières suivent leurs formations respectives, les deux autres formant la réserve.
Durant la campagne de 1809, l’artillerie se montrera digne de sa réputation, en particulier lors des grandes batailles d’Aspern et de Wagram, notamment par sa capacité de regroupement rapide sur les points sensibles des batailles.
L’intendance
Dans ce domaine, le problème majeur est constitué par le ravitaillement et les équipages du train. L’archiduc Charles n’a guère été en mesure de réformer le système existant, face à la résistance d’un personnel en place influant. Alors que les Français vivent, en campagne, en grande partie « sur le terrain », une telle méthode, compte tenu du contexte spécifique, avait peu de chance d’être mise en pratique. Les troupes doivent, comme par le passé, compter sur un réapprovisionnement organisé à l’avance, alors que les armées sont devenues plus importantes, et doivent désormais se déplacer plus rapidement. Il a donc fallu augmenter les équipages du train. Chaque corps d’armée s’est vu attribuer son propre parc de voitures : 4 à 5 divisions du train sont ainsi chargées de faire avancer, en priorité, pain, biscotte, foin, paille, etc. Mais la pratique va montrer que les chariots, trop lourds, seront trop lents, et le ravitaillement des troupes sera loin d’être sans accrocs, mettant en péril, en de nombreuses circonstances, les opérations militaires elles-mêmes. Il en va de même des véhicules mis à la disposition des troupes, peu mobiles, et, surtout, trop nombreux[17], ce qui conduira souvent à des embouteillages !
Services de santé.
Les équipes de santé mises sur pied, juste avant le début de la guerre (mars -avril 1809), sont constituées d’individus qui n’ont reçu aucune formation au service de la guerre. Elles ne pourront donc être utilisées que pour le transport des blessés. En pratique, chaque corps d’armée et le 1er corps de réserve se voit attribuer une compagnie de santé. Mais l’armée autrichienne va terriblement manquer de médecins préparés à la guerre
Les officiers du quartier général[18]
La valeur de n’importe quelle armée dépend en grande partie de celle de ses officiers. Il faut ici reconnaître que l’armée autrichienne est, en 1809, de ce point de vue, grandement inférieure à son adversaire. Aucun d’entre eux n’a reçu une formation spécifique, que ce soit à l’école ou dans leurs années de service. Ce qu’on leur demande, pour un tel poste, c’est d’avoir démontré une certaine capacité à diriger des troupes, une formation militaire uniquement théorique, ainsi que l’aptitude nécessaire pour assister le commandement.
L’accroissement de la force des armées, et le fait que de nombreux officiers ont été nommés à des postes de commandement, font qu’au début de 1809, l’armée autrichienne manque d’officiers qualifiés, aptes à faire partie du quartier général. A la tête de l’armée c’est un général qui occupe le poste de chef d’état-major. Au niveau des corps d’armée et des corps de réserve, ce sont des officiers du quartier-général, avec rang de colonel, qui occupent les fonctions de chefs d’état-major. Ils sont secondés par de nombreux officiers du quartier-général de l’armée. Le chef d’état-major est avant tout responsable des questions tactiques et opérationnelles.
Bibliographie sommaire.
- Ausgewählte Schriften weiland seiner kaiserlichen Hoheit des Erzherzogs Carl von Österreich. Wien 1893.
- Moris von Angeli. Erzherzog Carl von Österreich als Feldherr und Heeresorganisator. Wien, 1896
- Krieg unter der Regierung des Kaisers Franz. Wien, 1907 (vol. 1)
- David Hollins. Austrian Napoleonic Artillery 1792 – 1815. New Vanguard 72 – Osprey Publishing. 2003
- James R. Arnold. Crisis on the Danube. Napoleon’s Austrian campaign of 1809. Arms & Armour, 1990.
NOTES
[1] « L’amour de son souverain et une vie honnête…. L’obéissance, la loyauté, la détermination, telles doivent être les qualités du soldat » se plait-il à écrire.
[2] Il faut noter que l’archiduc avait été longtemps opposé à la formation de cette Landwehr, « potentiellement dangereuse lorsqu’elle n’avait rien à faire » et qui « pouvait donner la fausse impression que l’on disposait d’une nombreuse armée »
[3] Formés par un décret du 17 février 1809, il y en aura 6 de Basse-Autriche (Vienne), 6 de Bohème et 2 de Moravie-Silésie.
[4] Les Volontaires Viennois s’illustreront à Ebelsberg.
[5] Pour des raisons politiques, aucune Landwehr n’est levée en Galicie et Bukovina.
[6] Sur les 12.200 hommes levés en Haute Autriche, près des ¾ désertèrent à l’approche des Français.
[7] Si l’on inclus la Landwehr, l’Insurrection hongroise et les Volontaires, l’armée impériale autrichienne atteint son plus haut niveau de son histoire depuis la guerre de Trente-Ans : 724.151 fantassins et 59.491 cavaliers, dont à peu près la moitié directement employés dans l’offensive de 1809 (Angeli), .
[8] Dont six sur le théâtre d’opérations « allemand », les trois autres se trouvant en Galicie et en Italie.
[9] Il s’agit là d’une formation tactique, de petite taille (2 pelotons), à ne pas confondre avec la division française, qui regroupe plusieurs brigades. Pour éviter la confusion, le mot est ici écrit en italique.
[10] Entre 1805 et 1807, les régiments ont été à 5 bataillons (quatre de fusiliers, un de grenadiers)
[11] Règlements du 15 mai 1806 et du 15 mars 1807. Jusque là, le tir à la cible était inexistant.
[12] Dans un ordre du jour du 3 mai 1809, il louera les régiments Duka et Klebek pour avoir repoussé à la baïonnette deux régiments de chasseurs.
[13] Juste après la défaite de 1805, les régiments avaient été formés à 8 escadrons, mais cette réforme fut rapidement abandonnée.
[14] Nous n’entrerons pas ici dans la querelle entre les partisans de Lichtenstein et ceux de Gribeauval !
[15] FM Wenzel Joseph Colloredo-Mels und Wallsee (1738 – 1822). Un autre nom mérite ici d’être cité : GM Joseph Freiherr von Smola (1764 – 1820), qui va particulièrement se distinguer à Essling, à la tête d’une batterie de près de 200 canons, et que l’archiduc tient en très grande estime.
[16] Mais les bataillons de frontaliers gardent leur artillerie propre.
[17] Notamment en raison des nombreux équipages des généraux et officiers d’état-major et des trop nombreux chevaux de trait.
[18] L’archiduc Charles a complètement réorganisé l’appareil de commandement dans une Instruction du 19 août 1808.