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François Richard, dit Richard-Lenoir (1765-1839)

François Richard, dit Richard-Lenoir
François Richard, dit Richard-Lenoir

François Richard, dit Richard-Lenoir, naît à Trélat, petit hameau du Calvados, non loin d’Épinay-sur-Odon, le 16 avril 1765, dans une pauvre famille de fermiers. Plus souvent occupé dans les champs, l’enfant n’a guère la possibilité de s’instruire. Mais il a déjà le sens des affaires, se lançant, à sept ans, dans un élevage de pigeons, ou, un peu plus tard, dans celui de chiens de chasse.

En 1782, muni d’un petit pécule, il part à pied à Rouen, dans l’intention de se former au commerce. Mais, embauché par un marchand, celui-ci l’emploie comme domestique au lieu de lui apprendre le commerce.

Après avoir servi pendant un an dans un café, il décide de s’établir à Paris, où l’attendent bien des mécomptes : à force d’économie et de petites spéculations, il réunit bientôt une somme de 1.000 francs, à l’aide de laquelle il acheta quelques pièces de basin anglais, qui viennent d’être introduites en fraude. Il trafique relativement bien (achat de biens nationaux à bas prix, spéculation sur la baisse des assignats, trafic sur les produits étrangers prohibés, etc.) : six mois, après il possède 6.000 livres, et au bout d’un an 25.000.

Mais en 1789, un faiseur d’affaires lui fait perdre tout ce qu’il a. De plus, se trouvant débiteur d’une somme qu’il ne peut payer, il est enfermé à la prison pour dettes de la Force. Il s’en échappe, au moment des incidents de l’incendie de la manufacture de Réveillon [1]Jean-Baptiste Réveillon (1725-1811).  Ce fut un des éléments déclencheurs de la prise de la Bastille. . Richard emprunte alors quelques écus, et, en 1790, il a déjà acquitté ses engagements et renouvelé son crédit. Ses affaires vont si bien qu’il devient bientôt propriétaire du domaine de Fayl près de Nemours.

En 1797, de retour à Paris, il rencontre un jeune négociant d’Alençon, Joseph Lenoir Dufresne, avec lequel il va s’associer, association qui deviendra célèbre sous le nom de Richard-Lenoir.

Une des branches les plus lucratives de leur négoce consistant en basins anglais, qui fait alors fureur, Richard recherche avec ardeur le secret de la fabrication de ces tissus. Le hasard le lui ayant révélé, il se procure aussitôt cent livres de coton ; un prisonnier anglais du nom de Browne lui monte quelques métiers dans une guinguette de la rue de Bellefonds. Les premières pièces fabriquées sont des basins anglais ; Lenoir trouve ensuite le moyen d’en obtenir le gauffrage.

Richard loue au gouvernement l’hôtel Thorigny, dans le Marais. Mais la demande se fait de plus en plus grande : il lui faut donc chercher un emplacement plus vaste. Richard demande alors l’autorisation d’occuper le couvent de Bon-Secours, rue de Charonne. L’autorisation se faisant attendre, il vient un matin à la tête de ses ouvrières s’emparer du couvent abandonné, où il installe, avec son associé, la mule-jenny, métier à filer d’invention anglaise [2]Inventée par l’anglais Samuel Crompton, cette machine accru de façon considérable la consommation du coton. Il n’en subsiste qu’un seul modèle, au musée de Bolton, Lancashire (UK). Un … Continue reading .

Le seul exemplaire subsistant de la mule-jenny originelle telle que construite par son inventeur Samuel Crompton. Il est conservé au musée de Bolton, dans le Lancashire.
Le seul exemplaire subsistant de la mule-jenny originelle telle que construite par son inventeur Samuel Crompton. Il est conservé au musée de Bolton, dans le Lancashire. (Wikipedia)

Première manufacture parisienne de coton, l’entreprise Richard-Lenoir prospère et devient, en peu d’années, l’une des plus importantes pour le commerce du coton en France. Elle reçoit même la visite du premier consul, qui, impressionné, l’encourage et le décore même de sa propre main. En 1801, trois cents métiers sont montés dans différents villages de la Picardie ; l’abbaye de Saint-Martin de Sées renferme alors 100 mule-jenny et 200 métiers de tisserand ; celle des Bénédictines à Alençon, celle d’Aunay-sur-Odon, les fabriques de L’Aigle, de Caen, de Chantilly se peuplent de nombreux ouvriers.

La fortune des associés, comme leur renom et leur crédit, est alors à leur apogée. En 1806, Lenoir-Dufresne meurt; respectant le vœu de son associé de ne jamais séparer leurs deux noms, François Richard devient, dès lors, « Richard-Lenoir ». Il passe alors pour l’homme le plus riche de son temps.

Mais Richard-Lenoir, considérant que sa mission ne se bornait pas à la fabrication cotonnière, voulut également établir la culture du coton. Il en fait semer dans le royaume de Naples, et dès 1808, il fait entrer en France plus de 50 000 de balles de coton.  Mais Napoléon, qui songe à cette époque à le faire cultiver dans les départements méridionaux, frappe l’introduction de ce produit d’un nouveau droit. C’est, pour Richard-Lenoir, le début des ennuis qui vont mener à sa ruine complète.

Dans l’impossibilité de faire marcher ses six filatures, de payer ses cinq fermes et d’alimenter sa fabrique d’impressions à Chantilly, Richard-Lenoir est obligé d’emprunter plusieurs millions. De plus, la réunion de la Hollande à la France, en 1810, ayant jeté une grande quantité de marchandises anglaises dans la circulation, Richard ne trouve plus à vendre ses produits, ni à emprunter sur leur valeur. Il s’adresse à l’empereur, qui lui fait donner 1 600 000 francs.

En 1810, Richard-Lenoir est nommé membre du conseil des manufactures et chevalier de la Légion d’honneur. Mais les désastres de 1813 achèvent sa ruine. Au moment de la formation de la garde nationale, il devient chef de la huitième légion, qu’il doit habiller en quelques jours. Il se prononce pour la défense de Paris, occupant, le 31 mars, l’avenue de Vincennes avec sa légion et quelques pièces de canon.

L’ordonnance du 23 avril 1814, qui supprime entièrement et sans indemnité pour les détenteurs les droits sur les cotons, entraîne la ruine complète de ce grand manufacturier, qui avait occupé vingt mille ouvriers, et qui le 22 avril avait encore une fortune de huit millions.

Forcé de vendre ses propriétés et d’accepter une pension de son gendre, le frère du général Lefebvre-Desnouettes, Richard-Lenoir se retire, emportant l’estime de tout le monde et la gloire d’avoir doté son pays d’une précieuse industrie.

Richard-Lenoir meurt à Paris, 19 octobre 1839

 

Lieux de Mémoire

  • A Épinay-sur-Odon (Calvados), le manoir d’Outreleau fut la propriété de Richard-Lenoir.
Le manoir d’Outreleau
Le manoir d’Outreleau
  • Richard-Lenoir est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris (42e division)
Tombe de Richard-Lenoir au cimetière du Père-Lachaise à Paris (42e division)
Tombe de Richard-Lenoir au cimetière du Père-Lachaise à Paris (42e division)

References

References
1 Jean-Baptiste Réveillon (1725-1811).  Ce fut un des éléments déclencheurs de la prise de la Bastille.
2 Inventée par l’anglais Samuel Crompton, cette machine accru de façon considérable la consommation du coton. Il n’en subsiste qu’un seul modèle, au musée de Bolton, Lancashire (UK). Un Belge, du nom de Bauwens, établi dans la banlieue de Londres, ayant réussi à s’en procurer un exemplaire, l’avait démontée et fait passer frauduleusement sur le continent, où il avait créé la première filature mécanique. C’est là que Richard et Lenoir se la procurèrent et l’amenèrent à Paris, la rebaptisant : mule-Jeanette