Correspondance de Napoléon Ier – Septembre 1812

Velitchevo, 1er septembre 1812, une heure du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Velitchevo.

Mon Cousin, écrivez au vice-roi que jusqu’à cette heure je vois que son corps d’armée est toujours en arrière ; il est urgent cepen­dant qu’il soit toujours en avant sur la gauche, de manière à pouvoir tourner l’ennemi qui est sur le grand chemin devant l’avant-garde du roi de Naples par la raison que, la position du grand chemin étant déterminée, l’ennemi peut s’y fortifier par des redoutes ou prendre de bonnes positions, tandis que, la position de la gauche et celle de la droite n’étant pas déterminées, il ne peut opposer aucune redoute de ces côtés. Le vice-roi doit donc partir de bonne heure et ne pas passer par la ville de Ghjatsk, mais à deux lieues plus haut.

 

Velitchevo, 1er septembre 1812, 2 heures du matin.

Mon Amie. J’apprends avec plaisir que ta santé n’a pas souffert de la fatigue du 15 et que le petit roi n’a plus de fièvre. Cela a dû t’inquiéter quoique tu aies été instruite que ce n’était rien. Si tu étais 2 ou 3 jours sans recevoir d’estafette, cela ne devrait pas t’étonner parce que nous sommes loin et que je m’éloigne encore. Ma santé est bonne. Mes affaires vont bien. Le temps est un peu rafraichi ; il a un peu plu. Nous sommes en automne et non plus dans la canicule. Adieu, mon amie, embrasse pour moi le petit roi sur les deux joues, et ne doute jamais de ton fidèle,

Nap.

 

Velitchevo, 1er septembre 1812, une heure du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Velitchevo.

Mon Cousin, donnez ordre au roi de Naples de mettre son avant-garde en marche à cinq heures du matin, afin d’arriver de bonne heure sur Ghjatsk et de pouvoir l’occuper si l’ennemi le dispute. Il est nécessaire que le vice-roi le tourne par la gauche, en même temps que le prince Poniatowski le tournera par la droite. Une division de cuirassiers partira à six heures du matin, et les trois autres divisions pourront partir à sept ou huit heures. Donnez des ordres en consé­quence au vice-roi, au prince Poniatowski, au prince d’Eckmühl et au duc d’Elchingen.

 

Velitchevo, 1er septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Velitchevo.

Je désire que la division de ma Garde rejoigne le plus promptement possible, en laissant un général de brigade à Smolensk, et en emmenant avec elle sous son escorte le quartier général, le trésor et les convois d’artillerie qui pourraient se trouver. Les 3e bataillons de la Vistule doivent être arrivés ; ainsi il doit y avoir actuellement bien près de 3,000 hommes. Le major général recommandera de faire faire des patrouilles sur la route de Smolensk à Moscou par le régi­ment de cavalerie qui est à Smolensk, afin de maintenir les commu­nications libres et escorter les estafettes. Il sera convenable que ma Garde à pied fasse de bonnes journées, et que le général Delaborde m’instruise tous les jours, par le passage de l’estafette, du lieu où il est. Cela est nécessaire pour régler en conséquence les mouvements. Le major général écrira aussi au gouverneur de Smolensk de donner à Vitebsk des nouvelles de l’armée et de nous donner des nouvelles de Vitebsk.

 

Velitchevo, 1er septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, j’ai ordonné l’avance de 500,000 fr. pour le gouvernement de Vilna. Le gouvernement de Mohilef parait bien intentionné. Ce gouvernement pourrait aussi lever quelques régi­ments, et peut-être aussi celui de Vitebsk. Si toutefois la difficulté des cadres empoche d’en créer dans ces deux gouvernements, on pourrait toujours appeler les conscrits, puisqu’ils sont Polonais et parlent polonais. Concertez-vous à cet effet avec la commission du gouvernement. J’ai demandé depuis longtemps deux bataillons d’in­fanterie légère, garde-chasse. Si j’étais secondé, la garnison de Bobrouisk ne devrait pas m’inquiéter; cette place devrait être cernée par les troupes du pays. Songez bien que le seul secours que j’aie reçu de la Lithuanie se borne à douze gardes d’honneur. Je suis obligé de mettre garnison à Kovno et à Vilna. Il n’en était pas de même du Grand-Duché : il y avait à peine deux mois que j’y étais, qu’il avait fourni des troupes pour cerner Danzig, et beaucoup étaient en ligne. Le prince Poniatowski et la légion de la Vistule ont peu de cadres; c’est donc le plus difficile, mais les conscrits peuvent être levés. Jusqu’à cette heure, rien n’a été fait. Ayez donc une conférence là-dessus avec les membres du gouvernement. Le moins que je pusse espérer était que Bobrouisk aurait été cernée par les troupes du pays, et qu’elles auraient été en nombre suffisant pour faire la police, pour garnir Drouya et les points faibles de la Dvina, pour escorter les con­vois, etc. Il est probable que dans peu de jours j’aurai une bataille; si l’ennemi la perd, il perdra Moscou. Mes communications de Vilna à Smolensk ne sont pas difficiles, mais de Smolensk ici elles peuvent le devenir. Il faut donc des troupes, des gardes nationales ; il n’est pas nécessaire qu’elles soient bonnes, puisqu’elles ne sont opposées qu’à des paysans.

J’ai ordonné à la division Dombrowski de cerner Bobrouisk et de tâcher de s’en emparer. Écrivez dans ce sens au gouverneur de Minsk. En cas que le prince Schwarzenberg ait besoin de renfort, la division Dombrowski pourra lui servir, ainsi que les troupes du Grand-Duché. L’empereur d’Autriche fournira 3,000 hommes de cavalerie et 6,000 d’infanterie. Je désirerais beaucoup que le duc de Bellune pût me servir de réserve ici. Voyez le gouvernement pour que les recrues disséminées dans le pays se réunissent à Minsk. Il ne doit plus rien y avoir à craindre. Il faut que le duc de Bellune orga­nise bien son corps et assure bien ses subsistances.

 

Velitchevo, 1er septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, mandez au général Loison que j’ai ordonné que cinq bataillons, des douze qui sont à Danzig, se ren­dissent à Königsberg, et que douze bataillons, qui sont dans la Poméranie suédoise, se rendissent à Danzig, mon intention étant de leur faire continuer leur route sur l’armée. Réitérez au général Loison Tordre de faire partir toutes les troupes que j’ai désignées pour Kovno et Minsk.

 

Ghjatsk [1]La ville se nomme depuis 1968 Gagarine , 1er septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, donnez ordre au duc d’Abrantès de faire demain sa journée pour s’approcher de la ville, sans trop fatiguer sa troupe; qu’il fasse six lieues. Les 400 chevaux qu’il a laissés en arrière-garde doivent se rendre à Viazma. En attendant qu’ils y arrivent, il laissera 100 chevaux à la disposition du général Baraguey d’Hilliers.

Écrivez au général Baraguey d’Hilliers pour qu’il continue l’orga­nisation de la route jusqu’à Ghjatsk, limite de son gouvernement, et qu’il y ait à toutes les postes une redoute dans laquelle 100 hom­mes et les chevaux de l’estafette soient renfermés. Mandez-lui de vous écrire tous les jours par l’estafette, et de vous donner des nouvelles du général Pino et de la division Pajol.

 

Camp impérial de Ghjatsk, 1er septembre 1812.

ORDRE DU JOUR.

Sa Majesté l’Empereur et Roi a ordonné ce qui suit :

1° Tous les carrosses, fourgons ou voitures de bagages et de sub­sistances passeront après l’artillerie et les voitures d’ambulance.  

2° Tout carrosse, fourgon ou voiture particulière qui sera trouvé gênant la marche de l’artillerie et des ambulances sera brûlé.

3° Les voitures d’artillerie et les fourgons d’ambulance pourront seuls suivre l’avant-garde.

Les voitures de bagages, les grandes et petites charrettes ne pour­ront suivre l’avant-garde qu’à une distance de deux lieues. Toute voiture qui sera rencontrée plus près de l’avant-garde que deux lieues sera brûlée.

4° A la fin de la journée, les voitures ne pourront rejoindre l’avant-garde que quand elle aura pris position, et après que la canonnade ou la fusillade ne se feront plus entendre. Toute voiture qui serait trouvée à une distance moindre de deux lieues de l’avant-garde, avant qu’elle ait pris position, et pendant le temps que la canonnade ou la fusillade se feraient entendre, sera brûlée.

5e Le matin, au départ de l’avant-garde, les fourgons et voitures autres que celles de l’artillerie ou des ambulances seront parqués hors du chemin. Ceux qui seraient trouvés sur la route obstruant la marche de l’artillerie ou le mouvement des colonnes seront brûlés.

6e Les dispositions précédentes sont communes à toutes les divi­sions d’infanterie et de cavalerie de l’armée qui ne font point partie de l’avant-garde.

7° Sa Majesté ordonne aux chefs d’état-major des divisions et corps d’infanterie et de cavalerie et aux directeurs des parcs de l’artillerie de faire marcher les voitures de bagages après celles de l’artillerie et des ambulances, séparées et sous la conduite d’un vague­mestre de division.

8° Sa Majesté ordonne au général comte Belliard, chef de l’état-major de l’avant-garde, et aux chefs d’état-major des corps et divi­sions d’infanterie et de cavalerie de l’avant-garde, de prendre les mesures les plus efficaces pour l’exécution des présentes dispositions, et pour désigner l’emplacement où devront rester les voitures de l’avant-garde avant les défilés, tandis qu’elle combattra. Ces voitures ne devront passer les défilés que sur les ordres du chef de l’état-major de l’avant-garde, lequel ne pourra pas prendre sur lui de faire avancer aucune de ces voitures à plus de deux lieues de l’avant-garde.

9° Le présent ordre sera lu demain, à midi, à tous les corps; et Sa Majesté fait connaître que le 3 septembre elle fera brûler elle-même et en sa présence les voitures qu’elle trouvera en contravention au présent ordre.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812, trois heures du matin.

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 1er corps de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, j’ai été mal satisfait hier de la manière dont marche votre corps. Toutes vos compagnies de sapeurs, au lieu de raccom­moder les ponts et les débouchés, n’ont rien fait, à, l’exception de celles de la division Compans. Aucune direction n’avait été donnée aux troupes et aux bagages pour passer, le défilé, de manière que tous se trouvaient les uns sur les autres. Enfin, au lieu d’être à une lieue de l’avant-garde, vous étiez sur elle. Tous les bagages, carrosses, etc., étaient en avant de votre corps, en avant même de l’avant-garde, de sorte que vos voitures étaient dans la ville que la cavalerie légère n’avait pas encore débouchée. Prenez des mesures pour remédier à un aussi mauvais ordre, qui peut essentiellement compromettre toute l’armée.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, je ne vois pas depuis deux jours le rapport de la position du prince d’Eckmühl. J’ignore où se trouve son corps. Faites-moi connaître d’où cela vient. Il est de son devoir d’en rendre compte au moins tous les jours.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, donnez ordre au roi de Naples, au prince d’Eckmühl, au vice-roi, au prince Poniatowski, au duc d’Elchingen, de prendre aujourd’hui repos, de rallier les troupes, de faire faire à trois heures après midi un appel, et de me faire connaître positivement le nombre d’hommes qui seront présents à la bataille ; de faire faire l’inspection des armes, des cartouches, de l’artillerie et des ambulances; de faire connaître aux soldats que nous approchons du moment d’une bataille générale et qu’il faut s’y préparer. Il est nécessaire qu’avant dix heures du soir j’aie des états qui me fassent connaître le nombre d’hommes d’infanterie et de cavalerie, le nombre de pièces d’artil­lerie, leur calibre, le nombre de coups à tirer, le nombre de cartouches par soldat, le nombre de cartouches dans les caissons, le nombre de caissons d’ambulance appartenant soit aux régiments, soit aux divisions, soit aux corps d’armée, le nombre de chirurgiens, le nombre de pansements qu’on pourra faire. Ces états me feront connaître également les hommes détachés qui ne seraient pas pré­sents à la bataille si elle avait lieu demain, mais qu’on pourrait faire rejoindre si elle avait lieu dans deux ou trois jours, en indiquant le lieu où ils se trouvent et les moyens à prendre à cet effet. Ces états doivent être faits avec la plus grande attention, puisque de leur résul­tat doit dépendre ma résolution. Ils doivent comprendre d’abord tous les hommes présents à l’appel et ensuite tous ceux qui se trouveraient présents à la bataille. Vous ajouterez aussi qu’on me fasse connaître le nombre de chevaux qui seraient déferrés, et le temps qu’il faudrait pour referrer la cavalerie et la mettre en état pour la bataille. Le roi de Naples pourra, s’il le juge convenable, rectifier sa position, en avançant sa cavalerie légère et sa petite avant-garde de quelques vers les. Le prince Poniatowski et le vice-roi rectifieront également leur position.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Trévise de se rendre ici et de passer la rivière pour prendre position dans les faubourgs, sur la droite.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, l’état-major général ne m’est d’aucun service; ni le grand prévôt de la gendarmerie, ni le vaguemestre, ni les officiers d’état-major, aucun ne sert comme il le devrait. Vous avez reçu mon ordre du jour pour les bagages. Faites en sorte que les premiers bagages que je ferai brûler ne soient pas ceux de l’état-major général. Si vous n’avez pas de vaguemestre, nommez-en un; que tous les bagages marchent sous sa direction. Il est impossible de voir un plus mauvais ordre que celui qui règne.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, donnez ordre au général Baraguey d’Hilliers de faire partir de Smolensk, sous les ordres du général Lanusse, le régiment de marche de la Garde auquel sera joint le bataillon de marche de la Garde qui doit être arrivé le 30 août, les quatre pièces de canon de la Garde que le général Delaborde doit avoir laissées à Smolensk, le régiment de marche du 3e corps venant de Vitebsk; ce qui fera 3,500 hommes d’infanterie; et enfin la cavalerie suivante : 470 che­vaux du régiment de marche de cavalerie, qui doit être arrivé le 29 août; 360 chevaux du 6e régiment de marche de cavalerie, qui doivent être arrivés le 30 août ; 500 chevaux du 5e régiment de marche de cavalerie, qui doivent être arrivés le 2 septembre, et 125 chevaux de l’escadron de marche qui doit être également arrivé le 2 septembre; ce qui fait 1,455 chevaux. La colonne du général Lanusse sera donc de près de 5,000 hommes, infanterie et cavalerie. Le trésor, s’il n’est pas parti, et tous les convois qui seraient encore à Smolensk partiront sous cette escorte.

Le 10 septembre, le général Baraguey d’Hilliers fera partir de Smolensk, sous les ordres d’un officier supérieur qu’il désignera, une deuxième colonne composée de deux bataillons du 33e léger avec leurs deux pièces de canon, formant 1,200 hommes, et du bataillon de Hesse-Darmstadt, formant 700 hommes, au total de 1,900 hommes d’infanterie; et en outre de 700 hommes de cava­lerie, composés de l’escadron de marche d’Elbing et de l’escadron de marche de Vilna; ce qui portera cette seconde colonne à 2,600 hom­mes, infanterie et cavalerie. Ces deux colonnes se dirigeront sur Ghjatsk.

Le général Barbanègre prendra le commandement de Smolensk, qui aura pour garnison trois bataillons de la Vistule forts ensemble de 2,100 hommes, un bataillon de marche de la Vistule fort de 1,000 hommes, un régiment de chevau-légers polonais fort de 400 hommes, une compagnie d’artillerie et dix-huit pièces d’artillerie que fournira le général d’artillerie; ce qui fera 3 à 4,000 hommes, indépendamment des bataillons d’hommes isolés qu’on formera. Les 3e bataillons des 1er et 2e régiments de la Vistule, formant 1,500 hom­mes, doivent être arrivés le 30 août; le 3e bataillon du 3e régiment de la Vistule arrive le 9 septembre; le bataillon de marche de la Vistule arrive également le 9 septembre ; enfin le bataillon des hommes isolés doit déjà être de plus de 1,000 hommes. Il est nécessaire, à cet effet, qu’aucun homme isolé, qu’aucun détachement, aucune compagnie de marche, aucun homme sortant des hôpitaux, ne quit­tent Smolensk; ils doivent y être réunis en bataillon de marche.

Un régiment de marche de 3,000 hommes d’infanterie et un autre de 500 hommes de cavalerie sont à Minsk et doivent arriver à Smolensk. Quand ils y seront arrivés, ils resteront pour y tenir garnison ; les trois bataillons de la Vistule se rendront alors à Dorogobouje et à Viazma, et les bataillons westphaliens avec la cavalerie westphalienne arriveront à Ghjatsk.

Avec ces trois corps de garnison à Smolensk, à Viazma et à Ghjatsk, le général Baraguey d’Hilliers pourra maintenir la liberté de la route et les communications de Smolensk avec l’armée.

De nouvelles troupes doivent arriver successivement à Smolensk, telles que le 129e régiment, le régiment illyrien, etc. ; mais, d’ici à ce qu’elles arrivent, j’aurai le temps de donner des ordres. Enfin le duc de Bellune, qui est actuellement à Vilna, se met en marche avec son corps d’armée pour Minsk. Si les communications avec l’armée venaient à être interrompues, le général Baraguey d’Hilliers devrait correspondre avec ce maréchal, qui est prévenu de ce qu’il doit faire dans toutes les circonstances. Il correspondrait aussi avec le général Dombrowski, qui est avec une division du côté de Mohilef. Il adresserait ses dépêches au gouverneur de Mohilef et au gouverneur de Minsk.

Donnez l’ordre au bataillon westphalien et aux deux pièces de canon qui sont à Orcha de se rendre à Viazma et Ghjatsk, pour y rejoindre les autres bataillons westphaliens. Le gouverneur de Mohilef remplacera ce bataillon à Orcha. Donnez l’ordre à Vitebsk qu’un bataillon de marche bien armé et bien organisé se rende à Smolensk, où il tiendra garnison jusqu’à nouvel ordre. Enfin donnez l’ordre à la compagnie de sapeurs et à celle du Danube qui se trouvent à Vitebsk de se rendre à Smolensk.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, j’ai reçu le rapport du duc de Raguse sur la bataille du 22 [2]bataille des Arapiles ou de Salamanque . Il est impossible de rien lire de plus insigni­fiant ; il y a plus de fatras et plus de rouages que dans une horloge, et pas un mot qui fasse connaître l’état réel des choses.

Voici ma manière de voir sur cette affaire, et la conduite que vous devez tenir.

Vous attendrez que le duc de Raguse soit arrivé, qu’il soit remis de sa blessure et à peu près entièrement rétabli. Vous lui demande­rez alors de répondre catégoriquement à ces questions :

Pourquoi a-t-il livré bataille sans les ordres de son général en chef ?

Placé par les dispositions générales de l’armée à Salamanque, il était tout simple qu’il se défendit s’il était attaqué; mais, puisqu’il avait évacué Salamanque de plusieurs marches, pourquoi n’en a-t-il pas instruit son général eu chef ?

Pourquoi n’a-t- il pas pris ses ordres sur le parti qu’il devait suivre, subordonné au système général de mes armées en Espagne ?

Il y a là un cas d’insubordination qui est la cause de tous les mal­heurs de cette affaire. Et quand-même il n’eût pas été dans l’obliga­tion de se mettre en communication avec son général en chef pour exé­cuter les ordres qu’il en recevrait, comment a-t-il pu sortir de sa défensive sur le Douro, lorsque, sans un grand effort d’imagination, il était facile de concevoir qu’il pouvait être secouru par l’arrivée de la division de dragons, d’une trentaine de pièces de canon et de plus de 15,000 hommes de troupes françaises que le Roi avait dans la main ?

Et comment pouvait-il sortir de la défensive pour prendre l’offen­sive, sans attendre la réunion et le secours d’un corps de 15,000 à 17,000 hommes ?

Le Roi avait ordonné à l’armée du Nord d’envoyer sa cavalerie à son secours; elle était en marche : le duc de Raguse ne pouvait l’ignorer, puisque cette cavalerie est arrivée le soir de la bataille.

De Salamanque à Burgos il y a bien des marches : pourquoi n’a-t-il pas retardé de deux jours pour avoir le secours de cette cava­lerie qui lui était si importante ?

Il faudrait avoir une explication sur les raisons qui ont porté le duc de Raguse à ne pas attendre les ordres de son général en chef pour livrer bataille, à livrer bataille sans attendre les renforts que le Roi, comme commandant supérieur de mes armées en Espagne, pouvait retirer de l’armée du Centre, de l’armée de Valence, et de l’Anda­lousie. Le seul fonds de l’armée du Centre fournissait 15,000 hommes et 2,500 chevaux, lesquels pouvaient être rendus dans le même temps que le duc de Raguse faisait battre l’armée française; et, en pre­nant dans ces deux armées, le Roi pouvait lui amener 40,000 hommes.

Enfin, le duc de Raguse sachant que 1,500 chevaux étaient partis de Burgos pour le rejoindre, comment ne les a-t-il pas attendus ?

En faisant coïncider ces deux circonstances, d’avoir pris l’offensive sans les ordres de son général en chef et de n’avoir pas retardé la bataille de deux jours pour recevoir 15,000 hommes d’infanterie que lui menait le Roi et 1,500 chevaux de l’armée du Nord, on est fondé à penser que le duc de Raguse a craint que le Roi ne participât au succès, et qu’il a sacrifié à la vanité la gloire de la patrie et l’avan­tage de mon service.

Donnez ordre aux généraux de division d’envoyer des états de leurs pertes. Il est intolérable qu’on rende des comptes faux et qu’on me dissimule la vérité.

Donnez ordre au général Clausel, qui commande l’armée, d’en­voyer la situation avant et après la bataille.

Demandez également aux chefs de corps leurs situations exactes.

Vous ferez connaître au duc de Raguse, en temps opportun, combien je suis indigné de la conduite inexplicable qu’il a tenue, en n’attendant pas deux jours que les secours de l’armée du Centre et de l’armée du Nord le rejoignissent.

J’attends avec impatience l’arrivée du général aide de camp, pour avoir des renseignements précis. Ce qu’il a écrit ne signifie pas grand-chose.

 

Ghjatsk, 2 septembre 1812.

Mon amie, je reçois ta lettre du 17 août où je vois que la chaleur a commencé à Paris, cela doit durer jusqu’au 15 septembre. Ma santé est bonne. Nous sommes ici en automne. Les nouvelles que tu me donnes, que le petit roi est tout à fait rétabli, m’a fait plaisir. Embrasses-le deux fois pour moi. Adieu, mon amie, je pense à toi et j’éprouverai bien du plaisir à te revoir et à te donner un tendre baiser. Tout à toi.

Nap.

 

Ghjatsk, 2 septembre au soir.

Ma bonne amie. Je reçois ta lettre du 18 août. Je vois avec plaisir que tu te portes bien et que tu es contente du petit roi. Je suis bien aise que les dessins de Denon sur mes campagnes t’amusent. Tu trouves que j’ai couru bien du danger. Voilà 19 ans que je fais la guerre et j’ai donné bien des batailles et fait bien des sièges en Europe, en Asie, en Afrique. Je vais me dépêcher de finir celle-ci pour te revoir bientôt et te prouver tous les sentiments que tu m’inspires. Adieu mon amie. Tout à toi.

Nap.

 

Ghjatsk, 3 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, écrivez aux généraux commandant les corps d’armée, que nous perdons tous les jours beaucoup de monde par le défaut d’ordre qui existe dans la manière d’aller aux subsistances; qu’il est urgent qu’ils concertent avec les différents chefs de corps les mesures à prendre pour mettre un terme à un état de choses qui menace l’armée de sa destruction ; que le nombre de prisonniers que l’ennemi fait se monte chaque jour à plusieurs centaines; qu’il faut, sous les peines les plus sévères, défendre aux soldats de s’écarter, et envoyer aux vivres comme l’ordonnance prescrit de le faire pour les fourrages : par corps d’armée quand l’armée est réunie, et par division quand elle est séparée; qu’un officier général ou supérieur doit commander le fourrage pour les vivres, et qu’une force suffisante doit protéger l’opération contre les paysans et les Cosaques; que le plus possible, quand on rencontrera des habitants, on requerra ce qu’ils auront à fournir, sans faire plus de mal au pays ; enfin que cet objet est si important, que j’attends du zèle des généraux et chefs de corps pour mon service de prendre toutes les mesures capables de mettre un terme au désordre dont il s’agit. Vous écrirez au roi de Naples, qui commande la cavalerie, qu’il est indispensable que la cavalerie couvre entièrement les fourrageurs, et mette ainsi les détachements qui iront aux vivres à l’abri des Cosaques et de la cavalerie ennemie. Vous recommanderez an prince d’Eckmühl de ne pas s’approcher à plus de deux lieues de l’avant-garde. Vous lui ferez sentir que cela est impor­tant pour que les fourrageurs n’aillent pas aux vivres trop près de l’ennemi. Enfin vous ferez connaître au duc d’Elchingen qu’il perd tous les jours plus de monde que si on donnait bataille ; qu’il est donc nécessaire que le service des fourrageurs soit mieux réglé et qu’on ne s’éloigne pas tant.

 

Ghjatsk, 3 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, témoignez mon mécontentement au général Dutaillis, commandant à Varsovie, de ce qu’il a laissé passer un courrier russe dans le duché. La signature d’un agent diplomatique, celle même du ministre des relations extérieures, du ministre de la police ou du ministre de la guerre de France, ne pouvaient autoriser le général Dutaillis à laisser passer un courrier russe. Il devait le retenir jusqu’à ce qu’il en eût rendu compte au major général. Je ne puis conce­voir qu’il puisse ouvrir ainsi les frontières à mes ennemis; c’est un véritable crime. Donnez des ordres précis sur les derrières pour qu’on ne laisse passer aucun porteur de passeports du duc de Bassano ni du ministre de la police, si un ordre spécial de vous n’y est joint. Les porteurs de ces passeports doivent être retenus et leurs dépêches envoyées au quartier général. Je suis surpris que, depuis le temps que je fais la guerre, je sois toujours obligé de répéter de pareils ordres, si naturellement indiqués par les usages de la guerre et si intimement liés à la sûreté de l’armée.

 

Ghjatsk, 3 septembre 1812.

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac, le IIe corps, que commande le duc de Castiglione, manque d’administrateurs. Donnez des ordres pour qu’il en soit envoyé. Depuis vingt ans que je commande les armées françaises, je n’ai jamais vu l’administration militaire plus nulle ; il n’y a personne : ce qui a été envoyé ici est sans aptitude et sans connaissance. L’inexpérience des chirurgiens fait plus de mal à l’armée que les batteries ennemies. Les quatre ordonnateurs qui accompagnent l’intendant général n’ont aucune expérience. Le comité de santé est bien coupable d’avoir envoyé des chirurgiens si ignorants. Faites partir des administrateurs pour tous les corps d’armée. Nous avons besoin d’employés des hôpitaux et de 150 chirurgiens. Quant à l’institution des compagnies d’armuriers, elle a été, comme toutes les opérations de l’administration de la guerre, entièrement manquée. Dès qu’on leur a donné des fusils et des uniformes mili­taires, ils n’ont plus voulu servir les hôpitaux. Il fallait leur donner un chapeau rond, un frac, un bâton blanc et tout au plus un sabre. Envoyez de l’intérieur des administrations et des compagnies d’infirmiers, s’il en existe encore, mais organisées comme je l’ai dit ci-dessus.

Quant à la proposition de la Bavière, nous ne manquons ni de biscuit, ni de viande salée; si nous en manquions, la fourniture à Linz ne serait d’aucun résultat, le transport étant impossible.

 

Ghjatsk, 3 septembre 1812

Mon Amie. Je reçois ta lettre du 19. Je pars cette nuit pour avancer dans la direction de Moscou. Nous sommes ici à l’automne ; il fait le temps qu’il fait lors du voyage de Fontainebleau. Les greniers sont pleins, la terre couverte de légumes, aussi le soldat va bien, ce qui est un grand point. Mes affaires vont bien. Ma santé est bonne ; j’apprends que la tienne est parfaite. Embrasse le petit roi sur les 2 joues. Adio, mio ben.

Nap.

 

Ghjatsk, 4 septembre 1812.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, j’ai intercepté un courrier de Tormasof qui était porteur de lettres datées du camp de Kovel, le 25 août. Il résulte de ces lettres que les quatre divisions du corps de Tormasof ne font que 12,000 hommes; qu’il n’avait au combat du 12 août que 16,000 hommes tout compris, et qu’il attend deux divisions de Moldavie qui, vu les pertes faites, ne sont que de 7,000 hommes. Il n’y a pas là de quoi effrayer le prince de Schwarzenberg. Mandez-lui que j’ai écrit à l’Empereur pour qu’on lui envoie un renfort de 3,000 hommes de cavalerie et de 6,000 hommes d’infanterie.

Il résulte des mêmes lettres que le général Kamensky, malade, a quitté l’armée, et que le commandement de son corps a été donné au général Markof; que, le 10 août, Tormasof a fait prisonniers 3 officiers, 13 sous-officiers et 200 soldats; enfin qu’il se retire sur Loutsk.

 

Ghjatsk, 4 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Ghjatsk.

Mon Cousin, donnez ordre que toutes les voitures chargées ou vides qui sont ici partent pour suivre le petit quartier général. Donnez ordre à la vieille Garde de partir à midi et de faire aujourd’hui une journée de quatre ou cinq lieues.

 

Au camp, deux lieues en arrière de Mojaïsk, 6 septembre 1812 [3]Veille de la bataille de la Moskova .

ORDRE POUR LA BATAILLE.

A la pointe du jour, les deux nouvelles batteries construites pen­dant la nuit au plateau du prince d’Eckmühl commenceront leur feu contre les deux batteries ennemies opposées.

Au même moment, le général Pernety, commandant l’artillerie du 1er corps, avec les trente bouches à feu qui seront à la division Compans et tous les officiers des divisions Dessaix et Friant, qui se por­teront en avant, commencera le feu et écrasera d’obus la batterie ennemie, qui, par ce moyen, aura contre elle vingt-quatre pièces de la Garde, trente de la division Compans et huit des divisions Friant et Dessaix; total, soixante-deux bouches à feu.

Le général Foucher, commandant l’artillerie du 3e corps, se portera avec tous les obusiers du 3e et du 8e corps, qui sont au nombre de seize, autour de la batterie qui bat la redoute de gauche, ce qui fera quarante bouches à feu contre cette batterie.

Le général Sorbier sera prêt, au premier commandement, à se détacher avec tous les obusiers de la Garde, pour se porter sur l’une ou l’autre redoute.

Pendant cette canonnade le prince Poniatowski se portera du vil­lage vers la forêt et tournera la position de l’ennemi. Le général Compans longera la forêt pour enlever la première redoute.

Le combat ainsi engagé, les ordres seront donnés selon les dispo­sitions de l’ennemi.

La canonnade de la gauche commencera au même moment qu’on entendra la canonnade de la droite. Une forte fusillade de tirailleurs sera engagée par la division Morand et par les divisions du vice-roi, aussitôt qu’ils verront l’attaque de droite commencée. Le vice-roi s’emparera du village (Borodino), débouchera par ses trois ponts sur la hauteur, dans le temps que les généraux Morand et Gérard débouche­ront, sous les ordres du vice-roi, pour s’emparer de la redoute de l’ennemi et former la ligne de l’armée.

Le tout se fera avec ordre et méthode et en ayant soin de tenir toujours une grande quantité de réserves.

 

Borodino, 6 septembre 1812.

Ma bonne amie. Je suis très fatigué. Bausset m’a remis le portrait du roi. C’est un chef d’œuvre. Je te remercie bien de ton attention. Cela est beau comme toi. Je t’écrirai demain plus en détail. Je suis fatigué. Adio, moi bene.

Nap.

 

Au camp impérial, sur les hauteurs de Borodino, 7 septembre 1812, deux heures du matin.

PROCLAMATION.

Soldats, voilà la bataille que vous avez tant désirée ! Désormais la victoire dépend de vous : elle nous est nécessaire. Elle nous donnera l’abondance, de bons quartiers d’hiver et un prompt retour dans la patrie ! Conduisez-vous comme à Austerlitz, à Friedland, à Vitebsk, à Smolensk, et que la postérité la plus reculée cite avec orgueil votre conduite dans cette journée ; que l’on dise de vous : il était à cette grande bataille sous les murs de Moscou !

 

Borodino, 8 septembre 1812

Ma bonne amie. Je t‘écris sur le champ de bataille de Borodino. J’ai battu hier les Russes, toute leur armée forte de 120.000 hommes y était. La bataille a été chaude : à 2 heures après midi la victoire était à nous. Je leur ai fait plusieurs milliers de prisonniers et pris 60 pièces de canon. Leur perte se peut évaluer à 30.000 hommes. J’ai eu bien des tués et des blessés- Caulaincourt, le gouverneur des pages, a été tué, je lui avait donné le commandement d’une division. Je n’ai de ma personne pas été du tout exposé. Ma santé est bonne, le temps un peu frais. Nansouty a été blessé légèrement. Adieu, ma bonne amie. Tout à toi. Ton

Nap.

 

Mojaïsk, 9 septembre 1812.

À François Ier, empereur d’Autriche, à Vienne.

Monsieur mon Frère et très-cher Beau-Père, je m’empresse d’an­noncer à Votre Majesté Impériale l’heureuse issue de la bataille de la Moskova, qui a eu lieu le 7 septembre, au village de Borodino.

Sachant l’intérêt personnel que Votre Majesté veut bien me porter, j’ai cru devoir lui annoncer moi-même ce mémorable événement et le bon état de ma santé. J’évalue la perte de l’ennemi à 40 ou 50,000 hommes; il avait de 120 à 130,000 hommes en bataille. J’ai perdu de 8 à 10,000 tués ou blessés. J’ai pris 60 pièces de canon et fait un grand nombre de prisonniers. Mon avant-garde est à six lieues en avant.        ‘

Je prie de nouveau Votre Majesté de renforcer le prince de Schwarzenberg, afin qu’il soutienne l’honneur des armes autrichiennes, comme il l’a déjà fait.

Je prie surtout Votre Majesté, de me conserver ses bonnes grâces et ses mêmes sentiments, qu’elle me doit pour ceux que je lui porte.

Napoléon.

 

Mojaïsk, 9 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, donnez ordre que les 3e et 4e bataillons du 33e léger se rendent à Smolensk. Donnez ordre que les voltigeurs de la Garde se rendent de Vitebsk à Smolensk. Donnez ordre que deux bataillons de marche bien armés, chacun de 1,000 hommes, se rendent de Vitebsk à Smolensk et de là à l’armée. Donnez ordre que les 3e batail­lons des 4e, 7e et 9e régiments polonais se rendent à Smolensk. Donnez ordre que les quatre demi-brigades de marche qui faisaient partie de la division Lagrange se rendent à Smolensk. Donnez ordre que les 6e bataillons des 19e, 46e 37e et 56e se rendent de Danzig à Smolensk. Donnez ordre que le régiment westphalien qui est parti de Königsberg et les deux de Saxons se rendent à Smolensk. Donnez ordre que le régiment illyrien et le 129e se rendent à Smolensk. Le régiment illyrien laissera le cadre d’un bataillon à Minsk, et le 129e un dépôt, pour recevoir les recrues polonaises. Donnez ordre que tous les bataillons et escadrons de marche, détachements d’artillerie, caissons d’ambulance, munitions de guerre, se dirigent sur Smo­lensk. Donnez ordre que tous les hommes disponibles des dépôts de Glogau, Küstrin, Stettin, Danzig, Varsovie, Thorn, Königsberg, et des dépôts de cavalerie de la Prusse, de Meretch, de Kovno, de Lepel, etc., montés, soient dirigés sur Smolensk.

 

Mojaïsk, 9 septembre 1812. [4]Cette lettre est tout entière de la main de l’Empereur.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Faites faire la reconnaissance de la ville; tracer une route qui tourne le défilé.

Faites construire deux ponts sur la Moskova.

Écrivez au prince Eugène qu’il peut se rendre à Rouza et faire courir des partis sur Zvenigorod, réunir beaucoup de bestiaux et de vivres, et des nouvelles ;

Au prince d’Eckmühl, de faire occuper Borisov et ramasser des vivres et des nouvelles ;

Au duc d’Elchingen, de venir demain avec son corps à Mojaïsk, et laisser le duc d’Abrantès pour garder le champ de bataille.

 

Mojaïsk, 9 septembre 1812

Mon Amie. J’ai reçu ta lettre du 24. Le petit roi, après ce que tu me dis, est bien méchant. J’ai reçu son portrait la veille de la bataille de la Moskova. Je l’ai fait voir, toute l’armée l’a trouvé admirable, c’est un chef-d’œuvre. Je suis fort enrhumé d’avoir pris de la pluie à deux heures du matin pour visiter nos postes, mais j’espère en être quitte demain. Du reste ma santé est fort bonne. Tu peux donner, si tu le veux, les entrées au prince de Bénévent et à Rémusat,  il n’y a pas d’inconvénient. Tu les peux aussi donner à l’évêque de Nantes, s’il est à Paris. Adieu mon amie. Tout à toi

Nap

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812

Ma bonne amie. Je reçois ta lettre du 25. Je suis fâché de te voir triste ; j’espère que tu m’apprendras demain que tu es mieux. Ton père n’a pas reçu de tes lettres. Écris-lui par un courrier. Il paraît que les postes d’Allemagne vont mal. Lavalette, à qui tu adresses ta lettre, la lui expédiera. Ma santé est bonne. Je suis cependant un peu enrhumé, mais cela va finir. Il fait ici très froid.

Nap.

 

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, l’on suppose que Wittgenstein a quitté la Drissa pour se porter entre Pétersbourg et Moscou. Si cela se vérifie, écrivez au maréchal Saint-Cyr de le poursuivre et d’ar­river en même temps que lui pour couvrir mon flanc. Dans ce cas, écrivez aussi au duc de Tarente qu’il a carte blanche pour faire le siège de Riga ou faire ce qu’il croira le plus utile à mon service.

Écrivez au prince de Schwarzenberg que l’ennemi a tout fait pour nous empêcher d’arriver à Moscou; qu’il fera tout pour nous en chasser ; que je suis certain que tout ce qui était à Mozyr et à Kiev se dirige sur Moscou; qu’il faut qu’il suive vivement le mouvement de l’ennemi et ne se laisse pas tromper; que, si l’ennemi qui est vis-à-vis de lui tombe sur moi, il doit le suivre et tomber sur lui. Cela est bien entendu. Expliquez-vous bien là-dessus. Désormais l’ennemi, frappé au cœur, ne s’occupe plus que du cœur et ne songe plus aux extrémités.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le duc de Bassano, je vous ai écrit pour vous recom­mander d’approvisionner le corps de Saint-Cyr par Kovno, Vilna, Gloubokoïé et Vidzy. Je vous ai écrit pour que tous les convois d’ha­billement soient dirigés sur Smolensk. Je vous ai écrit pour que toute l’artillerie, les caissons chargés qui sont à Vilna et à Kovno, soient dirigés sur l’armée par tous les moyens possibles. Je vous ai écrit pour que les dépôts de cavalerie de Kovno, de Meretch, de Lepel, de Gloubokoïé, fassent partir pour Smolensk tous les hommes montés disponibles. Je vous ai écrit pour que l’on dirige de Vilna, de Kovno, etc., tous ceux qui sortent des hôpitaux de Lithuanie, bien armés et bien organisés, sur Smolensk. Je vous ai écrit pour que les neuf régiments de Lithuanie et les bataillons de chasseurs soient for­més; si je les avais, ils me serviraient contre les paysans de Russie. Rendez-moi compte de tout cela et entrez dans tous les détails.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, ordonnée que l’on passe la revue des dépôts de cava­lerie de Lepel, de Gloubokoïé, de Minsk, de Borisof, de Meretch, de Kovno, et que l’on en fasse partir le plus d’hommes montés que l’on pourra. On prendra le cheval d’un côté, la selle de l’autre; les hommes seront pris en bon état. Ainsi l’on pressurera les dépôts, et l’on en fera partir, sans avoir égard aux régiments, tout ce qu’ils peuvent fournir. Les chevaux qui pourraient avoir besoin encore d’un mois de repos, on les laissera aux dépôts avec leur harnachement, et avec des hommes armés et en état, de sorte que dans un mois tout puisse partir. Les chevaux hors de service et non susceptibles de se rétablir, on les abattra. Le reste des hommes sera dirigé sur Varsovie avec les harnais, pour y être remontés et remis en état de partir par les soins du général Dutaillis, qui passera à cet effet des marchés, et qui correspondra avec les commandants des dépôts d’Elbing, de Glogau et de Berlin, afin d’en faire venir des hommes ou d’en tirer des chevaux selon les besoins.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1S12.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, écrivez au général de l’artillerie qu’il se fasse rien brûler; que tout ce qu’il ne peut pas emporter doit être placé à deux lieues en arrière du champ de bataille, dans le couvent où je laisse l’hôpital. Le général d’artillerie réunira là l’artillerie prise à l’ennemi, celle démontée, y établira un atelier de réparations, y laissera une compagnie d’artillerie avec les moyens de tirer parti de quatre à six bouches à feu pour défendre la place. Il y aura là un commandant et une garnison de 1,000 hommes. On peut aussi réunir là les dépôts de cavalerie de l’armée et les chevaux fatigués ou blessés. Donnez les ordres en conséquence.

Napoléon.

P.S. . Il y aura un officier du génie pour créneler et faire bien retrancher ce poste.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, donnez ordre au général Dombrowski de rejoindre l’armée avec sa division, s’il ne voit aucun danger pour Minsk de la part de la garnison de Bobrouisk et du corps de Hertel, que l’on assure s’être porté sur la Grande Armée; qu’il amène avec lui le plus de munitions d’artillerie qu’il pourra.

Napoléon.

P. S. Écrivez au gouverneur de Minsk qu’il faut qu’il emploie les gardes nationales et les bataillons de garde-chasse pour protéger la province.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, par l’état que m’a remis le général d’artillerie, je vois que, les quatre convois arrivés, il manquera pour remplacer les munitions consommées : trente caissons de 12, quatre-vingts de 6, vingt-quatre de 6 pouces 4 lignes et cinquante-deux de 5 pouces 6 lignes, total cent quatre-vingt-six caissons. Il faut ordonner que ces munitions, formant cent quatre-vingt-six caissons, soient les premières chargées pour ici. Je ne dois éprouver aucune diminution de pièces de canon; les pièces démontées doivent déjà être remises en état; celles qui auront les lumières évasées, on y mettra un grain à Moscou; il ne faut renvoyer que les pièces crevées.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, nous avons bien besoin de fusils français ; il nous en faut à Vilna, à Minsk, à Smolensk et à l’abbaye qui est près du champ de bataille, pour armer les traineurs et, bien entendu, les blessés qui ont perdu les leurs. Il faudra 20,000 fusils dont «8

quatre endroits; faites-moi connaître ce que nous avons, arrivé et en route.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, faites connaître au maréchal Saint-Cyr les mesures que j’ai prises pour assurer ses subsistances; de son côté, il doit envoyer à Kovno prendre du riz, de l’eau-de-vie et du biscuit par toutes les voitures qu’il a. Dites-lui que le corps de Wittgenstein n’est pas de 20,000 hommes tout compris; qu’il est bien supérieur en forces, et que, s’il se concertait avec le duc de Tarente, il pourrait l’attaquer et le culbuter en le tournant.

 

Mojaïsk, 10 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, donnez ordre au vice-roi de se rendre avec son corps et le 3e corps de cavalerie à Zvenigorod, de jeter de suite deux ponts sur la route de Koubinskoïé, pour être en communication avec le roi de Naples qui s’y rend, de faire battre tout le pays de droite et de gauche, d’envoyer des nouvelles et de m’envoyer des guides, etc.

Donnez ordre au prince d’Eckmühl d’appuyer le roi de Naples, qui se rend à Koubinskoïé. Donnez ordre au duc d’Elchingen de se porter aujourd’hui à trois heures en avant de la ville. Faites revenir la bri­gade de cavalerie que le roi de Naples a laissée sur le champ de bataille, le duc d’Abrantès étant suffisant.

 

De notre quartier impérial de Mojaïsk, 10 septembre 1812.

CIRCULAIRE AUX ÉVÊQUES DE L’EMPIRE.

Monsieur l’Évêque de… , le passage du Niémen, de la Dvina, du Borysthène, les combats de Mohilef, de la Drissa, de Polotsk, d’Ostrovno, de Smolensk, enfin la bataille de la Moskova, sont autant de motifs pour adresser des actions de grâces au Dieu des armées. Notre intention est donc qu’à la réception de la présente vous vous concertiez avec qui de droit.

Réunissez mon peuple dans les églises pour chanter des prières, conformément à l’usage et aux règles de l’Église en pareille circon­stance.

 

Mojaïsk, 11 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon cousin, écrivez au duc de Bellune que le 8e régiment westphalien, le régiment saxon de Low, celui de Rechten, le 3e régiment de marche d’infanterie formé à Königsberg, les 3e bataillons des 4e, 7e et 9e régiments polonais, les 8e, 9e, 10e et 11e régiments de marche de cavalerie, doivent tous être dirigés sur Smolensk ; que l’ennemi attaqué au cœur, ne s’amuse plus aux extrémités; qu’il fait tout pour nous empêcher d’entrer à Moscou et montre la résolution de tout faire pour nous en chasser le plus tôt qu’il lui sera possible. C’est donc de Smolensk à Moscou qu’il faut se porter, les nombreuses troupes qui arrivent derrière et celles du grand-duché de Lithuanie étant suffisantes pour garder les derrières. IL est nécessaire également que le duc de Bellune se tienne prêt avec tout son corps d’armée réuni pour se porter de Smolensk sur Moscou, afin de renforcer l’armée à mesure que l’ennemi renforcera la sienne. Vitebsk n’a besoin de rien; si peu de troupes qu’il y ait, l’ennemi le laissera tranquille; je n’y tiendrai même personne aussitôt que mon hôpital sera évacué. Il faut donc que le duc de Bellune dirige tout, bataillons, escadrons, artillerie, hommes isolés, sur Smolensk, pour de là pouvoir venir sur Moscou.

 

Mojaïsk, 11 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, vous m’assurez qu’il y a à Kovno 9,000 fusils fran­çais, et à Vilna 2,000, ce qui fait 11,000. Vous les répartirez de la manière suivante : 3,000 à Mojaïsk, 4,000 à Smolensk, 2,000 à Vilna, 2,000 à Minsk, total 11.000.

Les 40,000 fusils étrangers seront tenus à la disposition du gouverneur général de la Lithuanie. Il n’en faut pas à Smolensk.

 

Mojaïsk, 11 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, donnez l’ordre au régiment de Mecklenburg, qui est à Vilna et à Minsk, de se rendre à Smolensk. Donnez ordre au régi­ment de Hesse, qui est à Vilna, de se rendre à Smolensk. Donnez ordre que les vélites de la garde, de Turin, qui arrivent le 19 septembre à Berlin, se rendent à Varsovie. Donner le même ordre pour les gardes d’honneur et les vélites de la Toscane. Réitérez l’ordre que les 1e, 2e, 3e et 4e demi-brigades de marche se rendent à Smolensk. Donnez l’ordre que deux compagnies d’artillerie de l’équipage de siège de Magdeburg se rendent à Smolensk. Donner l’ordre qu’il ne reste à Pillau qu’une compagnie d’artillerie; que l’autre se rende à Smolensk. Donner le même ordre pour la Poméranie suédoise, pour Spandau, pour Thorn, ce qui fera six nouvelles compagnies d’artil­lerie à Smolensk. Donnez ordre que le 7e régiment wurtembergeois qui est à Danzig, se rende à Smolensk. Donnez ordre que le batail­lon de marche étranger qui est à Thorn se rende à Smolensk. Donnez l’ordre que le bataillon du 22e léger qui est à Thorn se rende à Smolensk. Donnez ordre que le 1er bataillon de la Méditerranée, qui est à Glogau, se rende à Varsovie. J’ai donné ordre que les douze bataillons qui font partie de la division Morand, en Poméranie, se rendis­sent à Danzig. Donnez ordre qu’aussitôt que sa tête sera arrivée l’on fasse partir les régiments n° 4 et 5 de la Confédération et celui du prince Primat pour Smolensk, et les Napolitains pour Kovno; il suffit qu’il reste toujours à Danzig 8 bataillons et 2 à Königsberg. Une brigade de six cohortes de gardes nationales, formant 4,000 hommes, était arrivée à Bremen, donnez l’ordre qu’elle se rende à Hambourg, et que la division Heudelet se rende dans la Poméranie suédoise avec quatre de ses demi-brigades, et laissant les deux autres dans le Mecklenburg.

Donnez l’ordre que la 32e division, sous les ordres d’un général de brigade et composée des régiments de Belle-Île, de Ré, de Walcheren et de la Méditerranée, se rende à Varsovie. Il ne restera plus au duc de Castiglione que les 30e et 31e divisions, ce qui, avec des brigades de gardes nationales, est suffisant dans la saison actuelle.

Donnez l’ordre au 4e régiment westphalien, qui de Stralsund se rend à Danzig, de se rendre à Smolensk. Donnez le même ordre au régiment de Hesse-Darmstadt, qui arrive de Stralsund à Danzig. Donnez l’ordre aux trois bataillons de Würzburg qui sont à Berlin de se rendre à Varsovie.

 

Mojaïsk, 11 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, je vous ai envoyé divers ordres pour que toute mon infanterie et cavalerie fussent réunies à Smolensk. Je crois n’avoir rien oublié. Mon intention est qu’il ne reste, du Rhin à Smolensk, que la division Heudelet, la division Lagrange (le manchot), la bri­gade de dragons et 12 cohortes de gardes nationales;

A Danzig, 8 bataillons, savoir : un du 3e de ligne, un du 105e, deux du 29e, deux du 113e deux du régiment n° 6 de la Confédération ;

A Pillau et à Königsberg, 2 bataillons de marche.

Si j’avais oublié quelque chose et laissé en arrière quelques déta­chements ou bataillons, remettez-m ‘en la note sous les yeux. Les neuf régiments du grand-duché de Lithuanie doivent seuls tenir gar­nison en Pologne.

 

Mojaisk, 11 septembre 1812

Ma bonne amie. Je reçois ta lettre du 26. Tu as trouvé Trianon très riant ; c’est sa belle saison. Cela m’a fait penser au beau séjour que nous y avons fait l’an passé. Ici, la chaleur a cessé, il fait froid. Ma santé est bonne, cependant un peu de rhume qui tire à sa fin. Mes affaires vont bien, embrasses le petit roi deux fois pour moi. Écris à ton père par un courrier, l’on me dit qu’il est inquiet de ne pas recevoir de tes nouvelles. Adio, miou ben. Tout à toi

Nap.

 

Mojaïsk, 12 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, écrivez au vice-roi :

« L’Empereur n’approuve pas que vous n’ayez pas occupé hier la ville de Zvenigorod. Le roi de Naples était à Karymskoïe, ayant toute l’armée devant lui et étant en mesure. Avancez sur la route de Moscou aussi loin que vous pourrez; il est probable que l’armée sera aujourd’hui à Maly-Viazemka ; avancez jusqu’à l’endroit où la route repasse la Moskova, pour toujours tourner la gauche de l’ennemi. L’Empereur sera ce soir à l’avant-garde. »

 

Mojaïsk, 12 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, écrivez au vice-roi que l’on dit que l’ennemi a 18 bat­teries à vingt-cinq verstes de Moscou, c’est-à-dire près de Perkhouchkino ; qu’il est nécessaire qu’il tourne tout cela par la position de Ousovo. Dites-lui aussi que l’ennemi a des retranchements sur la montagne des Moineaux, mais que la route que le 4e corps suivra ne débouche pas sur cette montagne et la tourne.

 

Mojaïsk, 12 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mojaïsk.

Mon Cousin, tout ce que les 3e, 4e et 1er corps ont laissé sur le champ de bataille pour le garder rejoindra les corps respectifs. Le duc d’Abrantès portera son quartier général à Mojaïsk; il tiendra un bataillon et 100 chevaux aux ambulances près du champ de bataille; un bataillon, 100 chevaux et deux pièces de canon au monastère, à deux lieues en arrière; un bataillon, deux pièces de canon et 50 chevaux à Koubinskoïé sur la route de Moscou, et le reste ici. Il visitera le monastère, les ambulances du champ de bataille, et il fera ce qu’il pourra pour améliorer le sort des soldats blessés. Il fournira une escorte pour les pièces et caissons que l’artillerie renvoie sur les derrières. Il fera achever les six fours, et aura soin d’approvisionner la ville par des patrouilles d’au moins 150 hommes qu’il enverra pour chercher du blé, des farines et du fourrage.

Le petit quartier général partira à midi pour faire un jour de marche. Le grand quartier général partira demain avec l’escorte de 150 chevaux, de six pièces de canon et de 1,200 hommes fournis par le duc d’Abrantès.

 

Borisovka. 13 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Borisovka.

Mon Cousin, donnez ordre au roi de Naples de partir demain, à huit ou neuf heures. Le vice-roi est ce soir à Bouzava; il se dirige demain de bonne heure sur Tatarova, où le chemin passe la rivière. Il faut que le Roi se mette en communication avec lui. Le prince Poniatowski est arrivé à Charapovo; il a dû continuer sa route et se mettre en communication avec lui; il reçoit l’ordre de continuer demain sa route. Mandez au prince Poniatowski où est le roi de Naples et où sera le quartier général.

 

Borisovka, 13 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Borisovka.

Mon Cousin, écrivez au vice-roi que le roi de Naples est ce soir à Odintsovo, à trois lieues de Moscou ; que l’Empereur sera demain de bonne heure à l’avant-garde; que le 4e corps tout réuni, en rap­pelant tout ce qu’il aurait derrière et surtout toute son artillerie, doit se rendre de bonne heure à Tatarova, où l’on rencontre la Moskova, et se tenir en communication avec le roi de Naples ; que le Roi se rendra vis-à-vis Fili; qu’on dit que l’ennemi a retranché la montagne des Moineaux et une autre montagne; que le vice-roi aura des nou­velles , et fera de suite travailler à trois ponts sur le chemin, afin que, si l’Empereur le juge convenable, il reçoive l’ordre d’entrer à Moscou.

 

Tarchi, 13 septembre 1812.

Mon amie. J’ai reçu ta lettre du 29 août. La saison doit actuellement être bonne à Paris, ici, après avoir fait froid, le temps s’est radouci. Mon rhume tire vers sa fin. Je te prie d’embrasser le petit roi de ma part. Je suis à six lieues de Moscou. Adio, miou ben. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 14 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, il est nécessaire que vous écriviez au général Saint-Germain que le parc d’artillerie de campagne des Russes est dans le quartier au-delà de Zemlianoï-Gorod ou Ville-de-Terre, à côté d’un petit lac, près la route de Pétersbourg; qu’il est nécessaire d’y envoyer un fort parti. Il ne doit rien laisser entrer en ville et avoir continuellement des détachements occupés à ramasser les Russes, qui se trouvent en grande quantité de tous côtés.

 

Moscou, 15 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, commandez vingt patrouilles de dragons, chacune de 30 hommes commandée par un officier, et partagées en quatre pour occuper les quatre parties de la ville, ramasser tous les Russes qui s’y trouvent et les conduire au prince d’Eckmühl dans le village, hors la ville. Commandez également dix patrouilles de grenadiers à cheval, qui feront le même service dans le Kremlin et resteront là pour y mettre de l’ordre, ramasser tous les prisonniers, etc. Tout le reste des grenadiers à cheval et les chasseurs viendront également sur le Kremlin, pour qu’on puisse s’en servir dans la journée.

 

Moscou, 15 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Danzig de se rendre avec la vieille Garde au Kremlin, où il sera exclusivement chargé de la police de ce quartier.

Le général Durosnel fera les fonctions de gouverneur de la ville.

Le roi de Naples fera occuper par le prince Poniatowski et par sa cavalerie depuis la route de Kolomna jusqu’à la route de Troïtskoï.

Le vice-roi portera son quartier général à la barrière de Saint-Pétersbourg et fera occuper la route depuis Troïtskoï inclusivement jusqu’à la route qu’il a prise.

Le prince d’Eckmühl fera occuper toutes les routes depuis celle qu’a prise le vice-roi jusqu’à celle du prince Poniatowski.

Le vice-roi et le roi de Naples avanceront de forts postes sur la route de Saint-Pétersbourg et sur la route qu’a prise l’ennemi, afin d’avoir des nouvelles et de ramasser les traineurs.

 

Moscou, 16 septembre 1812.

Mon amie. Je reçois ta lettre du 31, où je vois que tu avais reçu les lettre de Smolensk. Je t’ai écris déjà de Moscou, où je suis arrivé le 14 septembre. La ville est aussi grande que Paris. Il y a 1600 clochers et plus mille beaux palais, la ville est garnie de tout. La noblesse en est partie, on a obligé aussi les marchands à partir, le peuple est resté. Ma santé est bonne, mon rhume est fini. L’ennemi se retire, à ce qu’il paraît, sur Kazan. La belle conquête est le résultat de la bataille de la Moskova. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 18 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, vous m’écrivez en chiffre, et je n’ai point de chiffre, ce qui me met fort en peine, parce que je ne sais pas si ce que vous m’écrivez est pressant.

J’approuve fort que l’on demande à la Prusse 3,000 hommes à tirer soit de Kolberg et de Graudenz, soit de Silésie, pour la garnison de Memel.

J’ai nommé le comte Tyzenhaus que vous m’avez proposé pour remplacer le prince Sa pie ha.

Nous suivons l’ennemi, qui se retire au-delà du Volga. Nous avons trouvé une immense quantité de choses à Moscou, qui était une ville extrêmement belle. De deux cents ans la Russie ne se relèvera pas de la perte qu’elle fait. Ce n’est pas exagérer que de l’évaluer à un milliard.

 

Moscou, 18 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, tous les Français qui étaient domiciliés à Moscou, hommes, femmes et enfants, et qui se trouvent sans asile, seront placés dans une maison près du Kremlin. Trois syndics seront nommés pour être leurs chefs et en dresser le contrôle; il leur sera donné des rations. Il sera donné des emplois à ceux qui en seront susceptibles, et un traitement en subsistance à tous les autres.

 

Moscou, 18 septembre 1812.

Au général comte de La Riboisière, commandant de l’artillerie de la Grande Armée, à Moscou.

Monsieur le Général la Riboisière, je désire que les deux compa­gnies des marins de la Garde aient chacune six pièces de 12 et deux obusiers. Vous prendrez les pièces à l’arsenal de Moscou; les cais­sons existent également dans l’arsenal de Moscou. Les chevaux et les soldats du train seront pris parmi ceux des caissons que vous vouliez renvoyer. Par ce moyen, la réserve de la Garde se trouvera aug­mentée de seize pièces de canon. Il est également nécessaire d’aug­menter la réserve du prince d’Eckmühl de huit bouches à feu, dont six pièces de 12 et deux obusiers. Si cela était nécessaire, vous les feriez servir par les deux compagnies prussiennes qui sont à la suite de la vieille Garde. Le prince d’Eckmühl ayant un corps de cinq divisions, seize pièces de réserve ne sont pas suffisantes. Faites-moi un rapport qui me fasse connaître quand toute la réserve de la Garde se trouvera aussi considérable qu’au moment où elle est partie de Paris, et quand tout ce qui a été démonté à Vilna sera parti. Il y a 200 petits caissons à l’arsenal de Moscou, je désire qu’ils soient employés ; on s’en servira avec plus de rapidité dans les mauvais che­mins et on pourra les atteler avec des cognats. Faites-moi un rapport général sur mon artillerie et sur les moyens de réparer toutes les pertes. Mon intention n’est pas de perdre une seule pièce, mais de conserver le complet de mon organisation, qui déjà n’est pas trop fort. Enfin voyez s’il serait possible d’établir à Moscou des moulins pour faire de la poudre.

 

Moscou, 18 septembre 1812

Mon amie.

Je t’ai déjà écris de Moscou. Je n’avais pas d’idée de cette ville. Elle avait 500 palais aussi beaux que l’Élysée Napoléon, meublés à la française avec un luxe incroyable, plusieurs palais impériaux, des casernes, des hôpitaux magnifiques. Tout a disparu, le feu depuis 4 jours la consume. Comme toutes les petites maisons des bourgeois sont en bois, cela prend comme des allumettes. C’est le gouverneur et les Russes qui, de rage d’être vaincus, ont mis le feu à cette belle ville. 200.000 bons habitants sont au désespoir et dans la rue et dans la misère. Il reste cependant assez pour l’armée, et l’armée a trouvé bien des richesses de toute espèce, car dans ce désordre tout est au pillage. Cette perte est immense pour la Russie, son commerce en sentira une grande secousse. Ces misérables avaient poussé la précaution jusqu’à enlever ou détruire les pompes. Mon rhume est fini, ma santé est bonne. Adieu, mon amie. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 18 septembre 1812, 8 heures du soir.

Ma bonne Louise.

J’ai reçu ta lettre du 27, avant les nouvelles de Smolensk. Tu auras actuellement reçu celles de Moscou. J’ai été aujourd’hui visiter les quartiers. La ville est belle. La Russie, en la brûlant, a fait une perte immense, il ne reste que le tiers des maisons. Le soldat a trouvé bien des provisions et des marchandises, il a des vivres, de l’eau de vie de France en quantité. Ma santé est bonne. Tu ne dois pas te donner la peine d’écrire par les auditeurs, puisqu’ils n’arrivent que dix jours après l’estafette. C’est une sujétion inutile et inconvenante. Tu écriras seulement quand tu auras quelque chose à dire. Ce que tu me dis de ce pauvre Lucet m’afflige. C’était un bon homme, je plains bien sa femme. Adieu, moi ben.

Nap.

 

Moscou, 19 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, donnez ordre que tous les officiers et sous-officiers russes, prisonniers de guerre, qui seraient à Danzig, Marienburg, Thorn ou Modlin, soient sans délai dirigés sur France; les soldats seuls resteront dans les places de la Vistule. Vous ferez connaître au général Lagrange que je n’approuve pas votre décision du 4 août, par laquelle vous avez autorisé les déserteurs russes à entrer dans les dépôts des régiments polonais qui sont à Danzig; mon intention est que ces déserteurs, s’ils sont arrivés comme déserteurs et non comme prisonniers, soient dirigés sur France ; on ne doit en souffrir aucun dans la garnison de Danzig. Quant aux Polonais, ils pourront être placés dans les régiments du Grand-Duché et envoyés à Modlin.

 

Moscou, 19 septembre 1821.

ORDRE.

L’Empereur veut que le gouverneur général de Moscou [5]il s’agit du maréchal Mortier four­nisse à M*** [6]le nom manque les moyens de temps et la protection nécessaires pour se rendre avec sa famille et ses paysans à sa terre près Voskresensk.

 

Moscou, 20 septembre 1812.

A Alexandre 1er, Empereur de Russie.

Monsieur mon Frère, ayant été instruit que le frère du ministre de Votre Majesté Impériale à Cassel était à Moscou, je l’ai fait venir et je l’ai entretenu quelque temps. Je lui ai recommandé de se rendre auprès de Votre Majesté et de lui faire connaître mes sentiments. La belle et superbe ville de Moscou n’existe plus. Rostopchine l’a fait brûler. Quatre cents incendiaires ont été arrêtés sur le fait ; tous ont déclaré qu’ils mettaient le feu par les ordres de ce gouverneur et du directeur de la police : ils ont été fusillés. Le feu parait avoir enfin cessé. Les trois quarts des maisons sont brûlées, un quart reste. Cette conduite est atroce et sans but. A-t-elle pour objet de priver de quelques ressources ? Mais ces ressources étaient dans des caves que le feu n’a pu atteindre. D’ailleurs, comment détruire une ville des plus belles du monde et l’ouvrage des siècles pour atteindre un si faible but ? C’est la conduite que l’on a tenue depuis Smolensk, ce qui a mis 600,000 familles à la mendicité. Les pompes de la ville de Moscou avaient été brisées ou emportées, une partie des armes de l’arsenal données à des malfaiteurs qui ont obligé à tirer quelques coups de canon sur le Kremlin pour les chasser. L’humanité, les intérêts de Votre Majesté et de cette grande ville voulaient qu’elle me fût confiée en dépôt, puisque l’armée russe la découvrait : on devait y laisser des administrations, des magistrats et des gardes civils. C’est ainsi que l’on a fait à Vienne, deux fois, à Berlin, à Madrid. C’est ainsi que nous-mêmes avons agi à Milan, lors de l’entrée de Souvarof. Les incendies autorisent le pillage, auquel le soldat se livre pour disputer des débris aux flammes. Si je supposais que de; pareilles choses fussent faites par les ordres de Votre Majesté, je ne lui écrirais pas cette lettre ; mais je tiens pour impossible qu’avec ses principes, son cœur, la justesse de ses idées, elle ait autorisé de pareils excès, indignes d’un grand souverain et d’une grande nation. Dans le temps que l’on emportait les pompes de Moscou, on laissait cent cinquante pièces de canon de campagne, 60,000 fusils neufs, 1,606,000 cartouches d’infanterie, plus de 400 milliers de poudre, 300 milliers de salpêtre, autant de soufre, etc.

J’ai fait la guerre à Votre Majesté sans animosité : un billet d’elle, avant ou après la dernière bataille, eût arrêté ma marche, et j’eusse voulu être à même de lui sacrifier l’avantage d’entrer à Moscou. Si Votre Majesté me conserve encore quelque reste de ses anciens senti­ments, elle prendra en bonne pari cette lettre. Toutefois elle ne peut que me savoir gré de lui avoir rendu compte de ce qui se passe dans Moscou.

 

Moscou, 20 septembre 1812

Mon Amie.

J’ai reçu ta lettre du 3 septembre. Il pleut beaucoup aujourd’hui, l’on assure que la saison des pluies va commencer. Heureusement que nous sommes arrivés. L’armée est ici très bien cantonné et caserné. Ma santé est bonne. Je te prie d’être gaie et de te bien porter. Mes affaires vont bien. Adieu mon amie. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 21 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, j’ai reçu votre lettre du 14 sep­tembre, par laquelle vous me faites connaître que 930 voitures d’artillerie sont parties depuis le 22 juillet jusqu’au 13 septembre, indépendamment des 90 caissons que la Garde impériale aurait fait partir, ce qui ferait près de 1,000 voitures.

Je désirerais avoir l’état de départ, par jour et par voiture, afin de connaître la nature des voitures et des attelages. Promenez-vous à l’arsenal de Vilna et voyez combien il y a encore de pièces de canon et de caissons remplis qui ne sont pas partis. Lors de mon départ de Vilna, il .y avait, je crois, soixante à quatre-vingts pièces et plus de deux cents caissons. Faites-moi également connaitre si les quatre compagnies d’artillerie légère de la ligne et les quatre d’artillerie à pied, qui avaient été laissées à Vilna, formant la réserve de la Garde, sont parties. Du reste, nous avons trouvé ici 2 millions de cartouches, 300 milliers de poudre, 300 milliers de salpêtre et de soufre, ce qui nous met à même de faire de la poudre, et une grande quantité de pièces et de boulets; de sorte que nous avons trouvé ici le triple de ce que nous avons dépensé à la bataille. Cette circonstance est extrêmement heureuse. Ces objets ne nous donnent plus d’inquié­tude. Nous avons en munitions de quoi livrer quatre batailles comme la dernière, mais j’en profite pour augmenter mon artillerie et utiliser les pièces prises à l’ennemi. Il est toujours agréable de se procurer dans le pays même une augmentation d’une centaine de pièces de canon.

 

Moscou, 21 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, écrivez au duc d’Abrantès qu’il convient d’organiser son corps d’armée en une seule division, et de m’en présenter l’or­ganisation ; que je donne des ordres pour que tous ses bataillons et détachements restés en arrière, tant infanterie que cavalerie et artil­lerie, le rejoignent ; qu’il vous rende compte si cet ordre s’exécute ponctuellement, et qu’il écrive au général Baraguey d’Hilliers et aux différents commandants pour leur recommander l’exécution de cette mesure ; recommandez-lui de bien organiser son artillerie ; que deux nouveaux régiments westphaliens sont partis pour le rejoindre, ce qui lui mettra dans la main une belle division; qu’il ait soin aussi que son artillerie soit approvisionnée et en bon état, puisque aussitôt que son corps sera réuni il recevra l’ordre de rejoindre l’armée. Faites venir le général wurtembergeois qui commande le corps, pour savoir définitivement à quoi est réduite cette division.

 

Moscou, 21 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, donnez ordre an général Lahoussaye, commandant le 3e corps de cavalerie, de se porter avec ce 3e corps à Podolsk, sur la route de Toula. La brigade de cavalerie du prince d’Eckmühl appuiera le 3e corps de cavalerie ; le roi de Naples fera appuyer ce 3e corps par le prince Poniatowski, qui se portera également à Podolsk. L’avant-garde se portera sur Bronnitsy, sur la route de Kolomna, si l’ennemi a laissé du monde sur cette route; car, s’il s’était porté tout entier sur la route de Toula, il serait nécessaire que l’avant-garde manœuvrât en conséquence.

Vous donnerez ordre au duc d’Istrie d’envoyer aujourd’hui le générai Colbert avec les deux régiments de lanciers de la Garde pour appuyer le général Girardin en se portant sur la route de Podolsk. Ce maréchal prendra aussi sous ses ordres le 3e corps de cavalerie. Le prince d’Eckmühl mettra à la disposition du duc d’Istrie la 4e divi­sion commandée par le général Friederichs. Ces troupes formeront un corps d’observation qui recueillera des renseignements sur la marche de l’ennemi et couvrira la route de Podolsk jusqu’à ce que le prince Poniatowski et l’avant-garde se soient replacés sur les traces de l’ennemi.

Vous ferez connaître au prince d’Eckmühl qu’il doit occuper avec son corps d’armée le faubourg de Kalouga, et vous lui désignerez un tiers de la ville du côté de Kalouga et de Toula; il ne doit rien occuper hors de la limite que vous lui tracerez ; il doit également n’envoyer fourrager que dans le pays compris entre les routes de Toula et de Kalouga. Vous manderez au duc d’Elchingen que l’en­nemi n’est pas encore assez éloigné pour que je puisse lui permettre de se rendre jusqu’à Bogorodsk, mais que je donne ordre que sa cavalerie légère y soit envoyée et que je ne vois pas d’inconvénients à ce qu’il dirige un fort parti, tant d’infanterie que de cavalerie et d’artillerie, sur Bogorodsk, en occupant encore avec son corps d’armée le quart de la ville du côté de Bogorodsk, et entre autres les casernes qui sont derrière l’hôpital.

Écrivez au vice-roi pour lui assigner le quart de la ville du côté des routes de Saint-Pétersbourg et de Dmitrof ; vous l’autoriserez à envoyer à six lieues sur la route de Pétersbourg une avant-garde d’infanterie et de cavalerie, pour prendre position jusqu’à ce que l’éloignement de l’ennemi soit assez considérable pour que je juge convenable de lui faire occuper les districts de Kline et de Dmitrof. Enfin présentez-moi un projet de répartition de tout le gouvernement de Moscou entre les différents corps d’armée, en donnant un, deux ou trois districts à chacun, selon sa force. Les maréchaux organise­ront ces districts en y tenant quelques troupes et en tireront des moyens de subsistance.

 

Moscou, 21 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, donnez ordre qu’aussitôt que les troupes de Hesse-Darmstadt, de quelque bataillon que ce soit, seront arrivées à Smolensk, elles continuent leur route pour Moscou. Donnez ordre à Vilna, à Smolensk, à Vitebsk, à Minsk, à Mohilef et sur toute la ligne, de faire partir tous les hommes isolés appartenant aux corps qui sont à Moscou, de les armer si on a des armes, et si on n’en a pas de les envoyer sans armes, vu que nous avons trouvé 60,000 fu­sils à Moscou. Donnez ordre au général Baraguey d’Hilliers de faire rétrograder sur Moscou tous les hommes légèrement blessés et qui peuvent marcher, vu qu’ils seront mieux ici et qu’on pourra les y armer et les utiliser.

Donnez ordre au régiment illyrien de partir de Smolensk pour se rendre à Moscou, où il rejoindra sa division au 3e corps ; donnez le même ordre au 129e régiment. Donnez ordre que, aussitôt que le régiment de marche du 3e corps sera arrivé, il me soit rendu compte de quels bataillons sont les cadres, afin que je décide s’ils doivent être incorporés. Donnez ordre que le régiment de la Vistule qui est à Smolensk se dirige sans délai sur Moscou. Donnez ordre que tous les bataillons westphaliens qui ont été laissés en route depuis Smolensk rejoignent leur corps à Mojaïsk, ainsi que tous les détachements, tant infanterie que cavalerie et artillerie ; ils seront remplacés sur la ligne de communication par les trois batail­lons de la Vistule. Donnez ordre que le 8e régiment westphalien con­tinue sa route sur Mojaïsk pour y rejoindre son corps. Donnez ordre que tous les régiments de marche de cavalerie, à mesure qu’ils arrivent à Smolensk, continuent leur route pour Moscou. Aussitôt que les deux bataillons du 33e seront arrivés, ils rejoindront la 4e division du 1er corps.

Donnez ordre dans toute l’armée que tous les détachements de Wurtembergeois qui se trouvent dans les différentes places soient dirigés sur Moscou. Donnez ordre que les 1er, 2e et 3e régiments de marche d’infanterie, après avoir séjourné un ou deux jours à Smo­lensk, continuent leur route sur l’armée, ainsi que tous les bataillons et régiments de marche. La garnison de Smolensk sera formée des 3e bataillons des 4e, 7e et 9e régiments polonais, et jusqu’à nouvel ordre du régiment saxon de Low et du régiment saxon de Rechten. Faites-moi connaître la composition du bataillon de marche étranger qui arrive à Minsk le 30 septembre, pour que je sache s’il appar­tient aux troupes qui sont à Moscou ou au corps du général Saint-Cyr. Donnez ordre que le régiment des flanqueurs de la Garde se repose deux jours, à Smolensk, après quoi il partira pour Moscou. Recommandez au gouverneur de la Lithuanie que, sous quelque prétexte que ce soit, il ne retienne aucun homme isolé, mais qu’il les forme en bataillons armés le plus possible et les dirige sur Smolensk; de là on les dirigera sur Moscou.

 

Moscou, 21 septembre 1812.

Ma bonne maie

Je reçois ta lettre du 4 septembre. Je t’ai écrit tous les jours, je suis surpris que tu restes quelquefois un jour sans de mes nouvelles. Ce que tu me dis du petit roi me plait fort. Je considère quelquefois le portrait de Gérard, que je trouve très beau. Je suppose que tu as écrit à ton père. Ma santé est fort bonne. Tu ne me dis jamais rien de la duchesse, se porte elle bien ? Tu ne dois jamais prêter l’oreille aux bavardages de Paris. Moscou était une très belle ville, mais il n’en reste pas le quart des maisons. Adieu, mio ben. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 23 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Doc de Bassano, le gouverneur de Minsk annonce le passage d’un officier autrichien qui porte la nouvelle d’une victoire gagnée sur Tormasof. Tous les fusils autres que les fusils français, destinés aux alliés et aux Polonais qui sont à Kovno et à Vilna, peu­vent leur être distribués. Le gouverneur me mande qu’il a ce qu’il faut pour former les neuf régiments lithuaniens, mais dans ces neuf régiments Mohilef et Vitebsk ne sont pas compris ; il serait impor­tant de lever des soldats dans ces deux gouvernements ; on les ferait venir à Minsk, et on pourrait les incorporer dans les régiments exis­tants ; car il paraît que les cadres, en officiers et sous-officiers, sont difficiles à former. Aussitôt que le 3e régiment de lanciers de la Garde sera en état de partir, mais pour cela il faut qu’il soit en très-bon état, il peut être dirigé sur Smolensk. Écrivez au gouverneur de Minsk que le général Dombrowski est là pour faire face à tout ce que Hertel pourrait faire.

Je viens de lever en France une conscription de 140,000 hommes, et en Italie une de 30,000. Il n’y a que le duché de Varsovie qui ne fait rien. Il faut qu’on lève autant d’hommes qu’il sera possible, pour recruter les régiments, qui en ont grand besoin. Pressez cette levée, pour qu’elle ait lieu promptement. Il faut qu’on envoie également des chevaux pour remonter la cavalerie et les attelages d’artil­lerie des corps polonais. Écrivez à cet effet à l’ambassadeur, au ministre de la guerre du Grand-Duché et en Saxe. Écrivez en même temps en Saxe pour que des conscrits à pied et à cheval et des attelages d’artillerie soient envoyés pour recruter les corps saxons. Écrivez pour le même objet dans toutes les coure de la Confédération du Rhin. Les circonstances de la bataille de la Moskova et de l’entrée à Moscou ne doivent pas affaiblir le zèle ni endormir les alliés. En leur faisant connaître les grandes levées que je fais partout, vous leur ferez sentir l’importance de compléter leurs corps.

 

Moscou, 23 septembre 1812.

Au général comte de La Riboisière, commandant l’artillerie de la Grande Armée.

Monsieur le Général Comte la Riboisière, il faut tenir à la dispo­sition du gouverneur de la Lithuanie les fusils dits d’insurrection pour l’armement des régiments du duché.

 

Moscou, 23 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, écrivez sur-le-champ, à Smolensk, au général Baraguey d’Hilliers et au duc d’Abrantès pour leur faire connaître que la cavalerie, l’infanterie et l’artillerie qui composent chaque convoi doi­vent marcher ensemble, bivouaquer en bataillon carré autour du convoi, et ne se séparer sous quelque prétexte que ce soit ; que le commandant du convoi doit bivouaquer au milieu ; que tout comman­dant qui manquerait à ces dispositions serait puni comme négligent et coupable de la perte du convoi. Réitérez les ordres à Smolensk pour qu’aucun convoi ne parte s’il n’est commandé par un officier supérieur et escorté par 1,500 hommes, infanterie et cavalerie (ne comprenant pas dans ce nombre les soldats du train, soit de l’artil­lerie, soit du génie, soit des équipages militaires) ; que je vois avec peine qu’on ait fait partir des convois qui n’avaient pas assez de forces pour les escorter. Faites, en conséquence de ce que je viens de prescrire, un ordre du jour sur la manière dont les convois doivent bivouaquer, envoyez-le aux commandants des 5e et 6e convois. Indé­pendamment de cet ordre du jour, mettez-moi sous les yeux les termes des ordonnances sur les convois et leurs escortes; il me semble qu’elles sont très-précises sur la manière dont les convois doivent se garder; dans ce cas, il faudrait réimprimer ces disposi­tions pour les faire afficher chez tous les commandants de place, depuis Kovno jusqu’ici.

 

Moscou, 23 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, écrivez au duc de Trévise que, loin de faire revenir la division Claparède, il est nécessaire que tous les détachements qu’elle aurait encore à Moscou en partent pour l’avant-garde.

 

Moscou, 23 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Écrire au gouverneur de Minsk que le général Dombrowski doit repousser Hertel s’il avance. Écrire au général Dombrowski et au duc de Bellune que le général Dombrowski ne doit avancer qu’autant que le général Hertel se porterait sur Moscou et évacuerait sa position.

 

Moscou, 23 septembre 1812

Mon amie. J’ai reçu ta lettre du 7 septembre, c’est-à-dire du jour de la bataille de la Moskova, ainsi tu sais actuellement ce grand évènement. Tout ici va bien, les chaleurs sont tempérées, le temps est beau, nous avons fusillé tant d’incendiaires qu’ils ont cessé. Il reste le quart de la ville, les ¾ sont brûlés. Ma santé est fort bonne. Adieu, mon amie, portes toi bien, soit gaies, embrasses quatre fois mon fils pour moi, tout le détail que tu m’en donnes me fait plaisir et me donne bien envie de le voir. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 24 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, je reçois votre lettre du 18. Con­certez avec la commission du gouvernement ce qu’il convient de faire dans les gouvernements de Mohilef et de Vitebsk; il faut y lever des troupes. Peut-être serait-il convenable de réunir ces deux gouverne­ments à la Lithuanie. Faites faire le travail et adressez-le aux gou­verneurs de Mohilef et de Vitebsk, qui s’empresseront de requérir les hommes et de faire ce qui sera convenable.

Un bataillon de marche étranger venant de Thorn a eu ordre (cet ordre est de la main de l’Empereur) de se rendre à Minsk; c’est par erreur. Ce bataillon est composé de 8 ou 900 Suisses et de 250 Illyriens. Il est nécessaire de le retenir à Vilna, où il se reposera ; après quoi on assurera ses subsistances et on dirigera les 900 Suisses sur Vidzy, d’où ils seront envoyés au maréchal Saint-Cyr. Les 250 Illyriens seront dirigés sur Smolensk.

Tenez la main à ce que tous les bataillons de marche qui appar­tiennent au 2e corps et aux Bavarois soient dirigés sur Polotsk. Il a été donné ordre de diriger sur Minsk les quatre demi-brigades de marche qui formaient la division Lagrange et qui viennent de Königsberg. Ces demi-brigades ont des détachements appartenant au 2e corps, qui est sous les ordres du maréchal Saint-Cyr. Il est néces­saire qu’on retienne ces détachements à Vilna, et qu’on en forme une demi-brigade de marche qu’on dirigera droit sur Polotsk. Le gouver­neur général doit faire cette observation surtout, et avoir soin de ne diriger ni sur Minsk ni sur Smolensk ce qui appartiendrait au 2e corps.

 

Moscou, 24 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, le ministre de la guerre a fait partir, le 8, de Paris, quarante moulins portatifs, pesant chacun 18 livres et pouvant moudre 30 ou 40 livres de farine par heure. Faites-moi connaître quand ces moulins passeront à Vilna, et ayez soin de pré­venir partout pour qu’ils arrivent promptement à Moscou. Ce ministre m’annonce qu’il fait partir 200 autres moulins le 15 septembre et 200 autres le 20. Sur le dernier envoi, vous pourriez retenir un de ces moulins pour modèle, pour en faire confectionner quelques-uns à Vilna. Cela est très-important. Je compte donner un de ces moulins à chaque compagnie de l’armée.

 

Moscou, 24 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, accusez au général Saint-Sulpice la réception de sa lettre; faites-lui connaître que j’attache une grande importance (et que je m’en rapporte à lui pour cela) à maintenir libre la route de Mojaïsk à Moscou; qu’il doit se cantonner dans le lieu où il est, qui est un point central, et se mettre en communication avec le duc d’Abrantès, qui est à Mojaïsk; que je lui recommande, lorsque les estafettes passent, d’envoyer des patrouilles pour les protéger; que le colonel Letort va retourner sous ses ordres, et que je le laisse maître de le tenir en échelons dans le lieu qu’il jugera le plus con­venable; que l’occupation de Disna éloignera probablement l’ennemi. Recommandez-lui surtout de pourvoir à ce qu’il y ait des patrouilles pour protéger les arrières. Il serait nécessaire qu’il tâchât de savoir s’il existe encore des Cosaques détachés, pour les poursuivre. Je sup­pose qu’il aura envoyé 2 ou 300 hommes au lieu où le détachement appartenant au général Lanusse a été enlevé il y a quelques jours ; s’il ne l’a pas fait, qu’il le fasse. Le colonel Letort partira ce soir ou demain matin ; cela fera toujours une patrouille sur la route.

 

Moscou, 24 septembre 1812

Ma bonne Louise. Je reçois ta lettre du 8 septembre où je vois qu’il fait bien mauvais à Paris. J’ai accordé ce que tu désires pour tes femmes rouges. Ma santé est fort bonne. Le temps se met un peu au froid mais cependant un froid de printemps. Je te prie de te bien porter, d’être gaie, de bien embrasser le petit roi pour moi. Comment ce petit nigaud n’a pas reconnu sa nourrice ? C’est un petit vilain. Adieu, mon amie. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 25 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, il est nécessaire de régler le service de la place de Moscou. Il y a cinquante barrières : en y mettant 10 hommes par barrière, cela ferait 500 hommes. La place se divise en vingt quar­tiers; je crois que sur ce nombre quelques-uns sont totalement dé­truits. IL faut au moins un poste de 20 hommes par quartier; il y a bien quelques quartiers où 10 bommes pourront suffire, mais il y en a d’autres où il en faudra 40 ; cela ferait 400 hommes ; il faudrait en outre mettre environ 500 hommes en réserve sur divers points ; je suis donc fondé à penser qu’avec 1,500 hommes de service on aurait suffisamment. Faites-moi la distribution de ce service entre la jeune Garde, la division Roguet, le vice-roi, le duc d’Elchingen et le prince d’Eckmühl. La vieille Garde, qui ne fera d’autre service que celui du Kremlin, ne sera pas comprise dans cette distribution. Remettez-moi un travail qui n’emploie pas au-delà de 1,200 hommes et qui me fasse connaître ce que chaque corps devra fournir. Par ce moyen, la jeune Garde se reposera et le service de la place se trou­vera fait.

 

Moscou, 25 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, j’ai déjà répondu à la demande que fait le payeur que les dépenses faites dans les gouvernements de Moscou et de Smolensk doivent être soldées en roubles en papier; donnez ordre à ce payeur de commencer à payer la solde en cette monnaie. Les frais de bureau 4e état-major et toutes les dépenses quelconques dans ces deux gouvernements doivent être payés de même en roubles. Le payeur pourra continuer à donner des billets du trésor à ceux qui voudront envoyer leur argent en France.

 

Moscou, 25 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, le dépôt de cavalerie est très-mal à Mojaïsk, où il y a déjà beaucoup de blessés; je pense qu’il serait convenable de trans­porter ce dépôt à Rouza, où le vice-roi a une garnison; il faudrait également y établir un hôpital pour y mettre une portion des blessés qui sont à Mojaïsk. Tous les hommes de cavalerie qui sont ici hors de service pourront être aussi dirigés sur Rouza, mais on aura soin de leur donner des fusils-carabines et des cartouches pour qu’ils soient dans le cas de résister aux paysans et aux Cosaques. Tous les hommes du dépôt de Mojaïsk seront également armés de fusils et recevront des cartouches; les hommes de la cavalerie légère auront leurs mousquetons. Par ce moyen, il y aura à Rouza une force de 2 à 3,000 hommes, qu’il faudra organiser en bataillons de 4 compagnies, de sorte que le service puisse se faire en règle et que cette force à pied soit utilisée. Il faudrait un général de brigade intelligent et qui ait servi dans la cavalerie, pour le charger de cette organisation et de mettre de l’ordre dans ce dépôt.

 

Moscou, 25 septembre 1812.

Ma chère Louise.

J’ai reçu ta lettre du 9 et j’ai vu avec plaisir que ta santé était fort bonne, que ton fils était aimable et te donnait bien des sujets de satisfaction. Ma santé est bonne. Tout à toi.

Nap.

 

Moscou, 26 septembre 1812, cinq heures du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, donnez ordre au vice-roi d’envoyer une de ses trois divisions d’infanterie avec son artillerie complète pour prendre posi­tion à quatre lieues de Moscou, sur la route de Smolensk, au lieu où se trouveront le général Guyot et sa brigade de cavalerie légère. Il faut que cette division soit là de bonne heure, et à cet effet la faire partir à la petite pointe du jour.

 

Moscou, 26 septembre 1812

Mon amie.

J’ai reçu ta lettre du 12 septembre, où tu présumes que je suis à Moscou. Tu ne te trompes pas. Tout le monde me dit du bien du petit roi. Je désire bien le voir, embrasses-le pour moi et ne doutes pas que je partage tous tes sentiments et que je suis tout à toi. Adio, miou ben.

Ma santé est fort bonne.

Nap.

 

Moscou, 28 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, je reçois vos lettres du 22 septembre. Je n’y vois point de nouvelles de Varsovie, peu de Vienne et aucune de Constantinople. Je ne vois, non plus, rien d’Amérique; il est cependant pressant de faire quelque chose de ce côté.

 

Moscou, 28 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, donnez ordre au général Saint-Sulpice de renvoyer à Moscou toute l’infanterie qu’il a avec lui. La division Bourcier qui est là suffit.

 

Moscou, 28 septembre 1812.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je pense que l’homme le plus propre à commander l’armée de Portugal est le général de division Reille. S’il n’est depuis survenu aucun événement, je pense que vous ferez bien de lui donner le commandement de l’armée.

 

Moscou. 29 septembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Moscou.

Mon Cousin, donnez l’ordre au duc d’Istrie de se porter avec son corps d’observation derrière le roi de Naples, comme il le désire, et de s’occuper sans délai à faire détruire le camp retranché de l’ennemi. Recommandez que cette démolition soit faite de manière qu’il n’en reste point de traces.

Mandez au roi de Naples l’ordre que vous donnez au duc d’Istrie; faites-lui connaître qu’il vaut mieux continuer à menacer l’ennemi de le tourner par son flanc droit que par son flanc gauche ; que s’il était entré dans mes projets de faire un mouvement, et que l’armée se fût trouvée où se trouve le Roi, l’ennemi était perdu; qu’il faut donc le menacer de tourner son flanc droit, cependant avec la pru­dence et la précaution nécessaires.

Donnez ordre au général Chasseloup d’envoyer une compagnie de sapeurs au camp retranché de l’ennemi pour aider à la démolition. Comme c’est une position que l’ennemi a dû croire bonne, faites-la lever par les ingénieurs géographes, afin que s’il la prenait une seconde fois nous la connussions.

 

Moscou, 29 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, je reçois votre lettre du 23. Tenez-moi bien au fait de l’exécution de mes ordres pour les mouvements de troupes que j’ai ordonnés à Berlin et à Danzig.

J’ai le plus grand besoin de 14,000 chevaux de remonte. J’ai ordonné au général Bourcier de se rendre à Vilna. J’ai mis à sa dispo­sition 4 millions en argent, en lui laissant carte blanche pour tout diriger. Les achats doivent être faits en Hanovre, à Berlin, à Elbing, à Varsovie et dans la Lithuanie, si cela est possible. J’ai ordonné qu’on envoyât par courrier extraordinaire au général Bourcier l’ordre de se rendre d’abord à Berlin et de là à Vilna; mais, avant qu’il arrive, tâchez de lui préparer de la besogne. Dans la province de Mohilef, il y a des juifs immensément riches : faites appeler les prin­cipaux et voyez s’ils ne peuvent pas traiter pour 3 à 4,000 chevaux, livrables à Vilna ou à Mohilef et payables argent comptant.

Le colonel du 3e régiment des lanciers de la Garde s’est procuré, à ce qu’il paraît, 1,200 chevaux; écrivez-lui d’en faire mettre en marche 500, aussitôt qu’il les aura disponibles, et de compléter sur-le-champ son régiment à 1,200 hommes, chevaux et harnais. Je crois qu’il a reçu de l’argent et qu’il ne doit y avoir aucune objection.

Le général Hogendorp m’écrit que les Tartares sont impatients de venir se ranger sous mes drapeaux; il faut pour tout cela aller de l’avant. On peut hardiment créer un régiment, si l’on a 1,000 hommes et 1,000 chevaux. En général, tout moyen d’avoir des hommes de cavalerie est extrêmement précieux; rien ne doit être épargné. Faites aussi presser le grand-duché de Lituanie et celui de Varsovie pour qu’on fournisse des hommes et des chevaux au régiment des chevau-légers polonais de ma Garde, commandé par Krasinski. Je voudrais porter ce régiment à 1,500 hommes, et cependant il est toujours faible. Que fait donc cette petite noblesse ? Je vous ai écrit hier pour que vous cherchiez à remuer le gouvernement du duché de Varsovie et à lui faire faire quelque chose pour remonter sa cavalerie et recruter son armée. Je vous ai recommandé aussi d’écrire à tous les alliés pour qu’on envoie des recrues et des chevaux de remonte. Les régiments prussiens qui sont ici sont réduits à rien. Qui est-ce qui empêche en Prusse de les compléter ? Il en est de même des régiments saxons. Faites faire des instances là-dessus, et chargez mes ministres d’avoir des conférences et de s’en occuper constamment.

Je n’ai pas besoin de vous dire de presser la formation des neuf régiments. Le pays doit voir que de la formation de ces régiments dépend sa tranquillité. S’ils avaient plus de zèle, ils auraient actuel­lement du coté de Drissa 3 à 4,000 hommes qui empêcheraient les Cosaques de faire des excursions; ils en auraient autant du côté de Bobrouisk et autant du côté de Minsk, ce qui aurait tranquillisé tout le grand-duché de Lithuanie.

 

Moscou. 30 septembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, je vous envoie le traité entre la Russie et la Porte, qu’on a trouvé ici dans les journaux de Moscou. Il parait que vous ne l’avez pas encore reçu de Constantinople, car vous ne me l’avez pas envoyé.

 

Moscou, 30 septembre 1812.

A M. Barbier, bibliothécaire de l’Empereur, à Paris.

Monsieur, Sa Majesté trouve que vous ne lui envoyez pas assez exactement les bons ouvrages qui paraissent. Elle désire que vous lui envoyiez plus souvent les livres et ouvrages nouveaux, en profitant pour cela soit de l’estafette de la malle, soit du départ des auditeurs, qui a lieu tous les jours, ou des occasions que vous pourriez avoir.

Le Grand-Maréchal du Palais, Duc de Frioul


 

References

References
1 La ville se nomme depuis 1968 Gagarine
2 bataille des Arapiles ou de Salamanque
3 Veille de la bataille de la Moskova
4 Cette lettre est tout entière de la main de l’Empereur.
5 il s’agit du maréchal Mortier
6 le nom manque