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Antoine-François Andréossy (1761 – 1828)

Antoine-François Andréossy (1) naît le 6 mars 1761 à Castelnaudary (Aude). Il est issus d’une famille noble de Lucques, dont une branche était venue s’établir en France sous le règne de Louis XIII. Son père, Pierre Jérôme est ainsi l’arrière petit-fils de François Andréossy, qui a construit le canal du Languedoc.

Après des études sérieuses au collège de Sorèze, il entre à l’école d’artillerie de Metz. Il en sort major de sa promotion, en 1781, avec le grade de lieutenant d’artillerie. Tout juste âgé de 20 ans, il choisit le régiment d’Auxonne, qui passe alors pour avoir en son sein les meilleurs officiers.

C’est dans ce grade qu’il participe, en 1787, à la guerre de Hollande (le gouvernement de Louis XVI soutient alors les patriotes hollandais dans leur lutte contre les Prussiens)au sein d’une légion batave, levée par le comte de Maillebois. Fait prisonnier, il est bientôt libéré à l’occasion d’un échange. Nommé capitaine d’artillerie le 15 mai 1788, sa carrière continue alors sans faits notables, jusqu’en 1789.

Lorsque la Révolution éclate, Andréossy, malgré ses origines nobles, en épouse les idées de liberté, et ne fait pas partie de la vague d’émigration qui décime alors le corps des officiers. A Metz, en 1790, il se prononce violemment contre les mouvements anarchistes, ce qui lui vaut les félicitations de ses chefs.

En 1792 et 1793, il procède à des essais sur l’emploi des bombes et des obus pour la défense des places. L’année suivante, il est employé à l’armée du Rhin. Court séjour, car il est rapidement versé à l’armée d’Italie, où il a l’occasion de rencontrer Bonaparte, le 28 octobre 1794, qui se trouve à Nice, à qui il remet, un mémoire sur le tir des projectiles creux.

Le 29 mars 1795 il est nommé chef de bataillon d’artillerie, à l’Armée des Alpes, commandée alors par Kellermann. En août de la même année, il est chargé de reconnaître les montagnes sur la ligne Borghetto- San-Remo. Peu après il est nommé directeur-général des ponts de l’armée d’Italie, poste qu’il occupera jusqu’en 1797. Le 6 décembre 1796, il est chef de brigade (colonel)

Il est à la bataille du Tagliamento, le 15 mars 1797. Le 18 juillet, il commande cinq chaloupes canonnières chargées de faire diversion devant Mantoue, dont Murat et Dallemagne s’empare grâce à ce stratagème. L’année d’après, le 19 mars 1797, il se distingue au passage de l’Izonso. Désormais, Bonaparte l’a remarqué. A la fin de la campagne, après Campo-Formio et Rastatt, il l’envoie, en décembre 1797, à Paris, avec Joubert, présenter au Directoire les drapeaux pris à l’ennemi.

Le 14 mars 1798, Andreossy est nommé membre de la commission de la marine chargée d’organiser la descente en Angleterre. Mais c’est en Egypte qu’il est bientôt envoyé, après avoir été fait général de brigade le 16 avril. Durant la campagne, il dirige les équipages de pont. Le 13 juillet 1798 il chasse Mourad-Bey du village de Chebreis.

Le 22 août 1798, il fait partie de la première « promotion » du tout nouveau Institut d’Égypte (dont, avec Monge, Berthollet, Geoffroy, Caffarelli, Costaz et Desgenettes, il a été chargé de préparer l’organisation), créé par deux ordres du général en chef, en date du quartier général du Caire, les 20 et 22 août 1798. Il a été nommé dans la section de mathématiques, où siège également Bonaparte. (2) Six jours plus tard, il présente son premier rapport sur la fabrication de la poudre.

En septembre 1798, Bonaparte lui confie la mission d’explorer le lac Menzaleh.

Le général Andréossy s’embarquera sur le lac de Menzaleh et le reconnaître jusque vers son extrémité qui, sur la carte d’Anville, est marquée comme les ruines de l’ancienne Péluse. Il fera souvent jeter la sonde, surtout aux environs de son embouchure dans la mer » (Correspondance de Napoléon Ier – Tome IV)

La mission d’Andréossy sur le lac se déroule du 3 au 20 octobre. C’est au cours de ce voyage qu’il trouve, dans l’île de Thouma, un camée antique avec un profile d’homme, dont la légende dira qu’il ressemblait à Bonaparte. Le camée sera remis au général en chef, qui en fera cadeau à Joséphine, après être revenu en France. Le 16 novembre (16e séance de l’Institut), Andréossy lit un mémoire «  relatif à ses observations recueillies dans la partie de l’ancien delta, et du lac Meuzaleh »

Du 22 au 27 janvier 1799, Andréossy fait un nouveau voyage en Basse-Égypte, dans la région des « lacs de Natron ». Puis il participe à la campagne de Syrie.

Le général Bonaparte est arrivé le 17 de ce mois à Fréjus, accompagné des généraux Berthier, Lannes, Marmont, Murat et Andréossy, et des citoyens Monge et Berthollet (Le Moniteur)

Bonaparte a nommé le général Lefebvre son premier lieutenant; le général Andréossy est chef de l’état-major général; il a sous ses ordres les adjudants généraux Caffarelli et Doucet (…) (Le Moniteur)

Andreossy a acquis désormais toute la confiance de Bonaparte et il est de ceux qui embarque sur la Muiron, lorsque celui-ci se décide à rentrer en France. Et, lors du coup d’État de Brumaire, il le choisit comme chef d’état-major. En témoignage de satisfaction, le nouveau Premier consul nomme Andreossy général de division (6 janvier 1800), chef de la 3e division militaire, commandant de l’artillerie à Strasbourg (et plus tard celle de Mayence).

Au début de l’année 1801, Andreossy est nommé chef d’état-major de l’armée gallo-batave. Puis, en février, il est chargé d’organiser un plan de défense de la rive gauche du Rhin.. Le 10 août, il est nommé à la tête de la direction générale du dépôt de la guerre. A ce titre, c’est entre ses mains que seront déposés tous les matériaux rapportés d’Égypte, qui permettront l’élaboration de la Carte géographique de l’Égypte et des pays environnants (qui sera présenté à Bonaparte le 13 octobre 1803).

A la signature de la paix d’Amiens, le 27 mars 1802, il est nommé, le 29 mai, ambassadeur de la France en Angleterre. A Londres « la nouvelle de l’arrivée cause (…) la plus grande satisfaction (Otto à Talleyrand) », car l’on sait les penchants anglophiles du nouvel ambassadeur. Ce qui ne l’empêche pas, dès son arrivée, d’informer le Premier consul que « le gouvernement actuel est formé de talents médiocres » !

Mais il n’exercera ses fonctions qu’un peu plus d’un an, les Anglais reprenant les hostilités le 17 mai 1803, et Andreossy quittant Londres le lendemain.

Le général Andréossy fut accompagné à son départ avec de grands égards et de visibles regrets. Il parvint à Douvres en même temps que lord Whitworth à Calais, c’est-à-dire le 17 mai. Lord Whitworth fut à l’instant même transporté de l’autre coté du détroit. Il s’empressa de visiter l’ambassadeur français, le combla de témoignages d’estime, et le conduisit lui-même à bord du bâtiment qui devait le ramener en france. Les deux ambassadeurs se séparèrent en présence de la foule émue, inquiète et attristée. (Thiers – Histoire du Consulat et de l’Empire, tome 4, p.337. Paris, 1845)

Revoilà donc Andréossy militaire. A son retour, il est nommé inspecteur-général de l’artillerie. Le 14 juin 1804, il est fait Grand Officier de la Légion d’honneur.

Il suit le nouvel empereur durant la campagne de 1805, à l’état-major général, avec le titre de chef d’état-major général et après Austerlitz, il reste à Vienne, jusqu’à la paix, en tant que ministre plénipotentiaire. En novembre 1806, il est nommé ambassadeur dans cette même ville, à la place du comte Alexandre François de La Richefoucauld. (3)

Dès son arrivée, Andréossy entretient des relations suivies avec le comté Pálffy, dans le but de neutraliser la Hongrie vis-à-vis de l’Autriche (4). Il fréquente le casino et les eaux de Baden, où il s’inscrit comme « écrivain scientifique ». Dès 1807, pourtant, il signale à son ministre à Paris, Talleyrand, des actes inquiétants (levées d’hommes, achats de chevaux, formation de magasins).

Dans les différents cercles et coteries, en particulier dans ceux de la noblesse, l’excitation a atteint son paroxysme; on ne connaît plus de retenue et le langage que l’on utilise a des accents de jacobinisme (Andréossy – 13 décembre 1808)

Talleyrand, berné par les dires de l’ambassadeur autrichien à Varsovie, dénonce Andréossy à Napoléon comme « un agent dangereux , observant et jugeant mal ce qui se passait autour de lui, et capable, si on l’écoutait, de brouiller les deux cours, à force de rapports inexacts et malveillants« . Mais Napoléon s’en rapporte plus aux rapports d’Andréossy « esprit entier, observateur médiocre, exagérant probablement ce qu’il aperçoit », qu’à son ministre, « esprit crédule, aussi enclin à (se) laisser séduire qu’habile à séduire les autres« .

A Vienne, la cour s’émeut de toutes ces rumeurs à son égard, et, dans la rue, les gens de l’ambassadeur sont menacés.

Le 6 janvier 1808, Andréossy assiste au mariage de l’empereur François Ier d’Autriche, avec Maria-Ludovica d’Este (5), « en vêtement foncé, une tête noire, un regard sombre, une démarche assurée (semblant) déjouer la prospérité, y rappeler les malheurs passés et faire lire l’avenir, (ressemblant) au génie du mal ou à la discorde, arrêtant le bonheur dans son cours et montrant le gouffre qu’il peut entr’ouvrir à son gré » (6)

Le 13 janvier, l’ambassadeur français informe Paris que l’Autriche entend commencer les hostilités en mars. Le 18 février, il précise que ce devrait être le 15. La situation devient intenable pour notre ambassadeur, et Andréossy quitte Vienne le 1er mars, sous prétexte d’un congé, alors qu’en fait, général d’artillerie, il rejoint l’armée d’Allemagne, juste avant le début des hostilités, que l’Autriche engagera le 12 avril. C’est Claude Laurent Marie Dodin qui reste, à Vienne, le chargé d’affaires français. Ce dernier envoie régulièrement des dépêches

Le 10 mai 1809, Napoléon nomme Andreossy préfet-gouverneur de la ville (qui n’est pas encore prise !), par un décret daté du palais de Kaunitz (7). Il a pour adjoint  et commandant de la place le général RazoutL’après-midi, le nouveau gouverneur fait afficher une proclamation , en français et en allemand, demandant aux habitants de retourner à leurs occupations habituelles, n’hésitant pas à ajouter, faisant référence au premier passage de la Grande Armée en 1805 :

Vous connaissez les Français, vous avez su les apprécier, ils ont été au milieu de vous. Ils y ont vécu en frères (..:)

Mais il reçoit bientôt de l’empereur l’ordre

de faire réunir, le 11 dans l’après-midi, tous les obusiers de l’armée et de les placer comme il le jugerait convenable pour qu’à commencer de 10 heures du soir on pût ouvrir un feu de bombardement qui ne cesserait que lorsque la ville aurait demandé à parlementer (Mémoires de duc de Rovigo)

Les ordres sont exécutés : à 9 heures du soir, 60 pièces sont en position : une batterie de 20 obusiers commence le bombardement; 1800 obus sont lancés en moins de quatre heures.(8) 31 maisons sont incendiées, 66 endommagées. On compte 4 tués et 20 blessés parmi la garnison, 11 tués et 14 blessés parmi la population.

La ville s’étant rendue, il prend ses fonctions le 13. Le 15 mai, il reçoit de Napoléon de former « un comité de police, composé de trois membres, un de l’ancienne police, un Français et un autre, qu’on nommera » Le nouveau gouverneur propose, en réponse, de nommer « M. Schulmeister commissaire général du comité de police« , ce qui est confirmé le 18. (9)

Andréossy s’était installé la Hofburg, délaissant le palais Kaunitz, et c’est là que le général-major russe baron de Löwenstern le rencontre, au cours d’un dîner où « ce n’était  plus le luxe qui régnait autrefois à la table du ci-devant ambassadeur, mais bien la frugalité qui s’est établie à celle des Césars. La vaisselle était aux armes d’Autriche, les laquais aveint la livrée de la cour d’Autriche, les vins étaient mauvais comme le sont les vins d’Autriche »

Durant son séjour à Vienne, Andréossy accompagne un jour la baron Vivant-Denon, chargé de sélectionner les oeuvres d’arts destinées aux musées français.. Au nom de Sa Majesté, ils prélèvent ainsi 401 tableaux au Belvédère (10), et Andréossy se « paie » au passage, de quatre oeuvres (11)

Pour la fête de l’empereur, le 15 août, il est nommé Grand-Aigle de la Légion d’honneur. (12) Lui-même offre un banquet à deux cents invités, à la Hofburg : maréchaux et généraux français sont là, aux cotés des négociateurs de paix autrichiens, des représentants de la noblesse, du président du gouvernement de Basse-Autriche, du maire de Vienne, Stephan von Wohlleben et des représentants de la ville de Vienne. Un feu d’artifice est tiré lorsque la nuit est venue, devant la Hofburg.

Lorsque la paix de Schönbrunn est conclue, Andréossy est rappelé à Paris (13) où il est nommé au Conseil d’État, président de la section de la guerre, à la place de Lacuée, devenu ministre. En 1812, il redevient ambassadeur, cette fois-ci à Constantinople, où il est nommé le 28 mai 1812, poste qu’il va occuper jusqu’au 13 août 1814. Remplacé le 13 mars 1814 par le marquis de Rivière, il est, à son retour à Paris, bien accueilli par Louis XVIII, qui le décore de la Croix de Saint-Louis

Durant les Cent-Jours, il se rallie à Napoléon. Président du Conseil de la guerre, et de nouveau membre du Conseil d’État, il signe la pétition du 25 mars. Le 2 juin il est fait pair de France.

Après Waterloo, le gouvernement provisoire le nomme commandant de la 1e division militaire et le 26 il est un des commissaires chargés d’aller proposer un armistice à Wellington. Durant les négociations, il demande clairement le retour de Louis XVIII.

Sa carrière tend désormais à sa fin. Il est mis à la retraite le 1er octobre 1815. Il est ensuite nommé membre de la Commission de défense du royaume, le 13 mars 1818, dont il présente le rapport final. Ce qui lui vaut la croix de Commandeur de l’Ordre de Saint-Louis, le 1er mai 1821. Le 23 janvier il avait été nommé directeur-général des subsistances militaires au ministère de la guerre, à la place du général Dejean, démissionnaire. Membre de l’Académie des Sciences, en 1826, il est élu député de Castelnaudary, en 1827.

Antoine-François Andréossy meurt le 10 septembre 1828, à Montauban, âgé de 67 ans. (14)

Lieux de mémoire

La maison natale d’Andréossy se trouve toujours  au 2 de la rue qui porte son nom, à Castelnaudary. Au numéro 43 rue de l’Hôpital se trouve une maison ayant appartenu au général.

La tombe du général se trouve dans l’ancien cimetière de Castelnaudary, en face de l’hôpital.

A Paris, au n° 21 de la rue de l’Université (7e arrondissement), s’élève l’hôtel Cambacérès, qui appartint à Andréossy en 1809. L’archichancelier lui avait acheté 195 000 francs comptant, alors qu’Andréossy n’avait du débourser, cinq ans auparavant, que 119 1000 francs.

Repères bibliographiques

  • Fastes de la Légion d’honneur, tome 3. Paris, 1845
  • Tulard A. Dictionnaire Napoléon. Fayard, Paris, 1999
  • J-J Brégeon. L’Égypte de Napoléon. Perrin, Paris, 1991A.
  • Plischnack A. Vive l’Empereur, weil’s sein muß. Amalthea, Vienne, 1999.
  • Six G. Dictionnaire biographique etc. Paris, 1934
  • Buat E. 1809. De Ratisbonne à Znaïm. Paris 1909

NOTES

(1) On trouve aussi l’orthographe Andreossi, ainsi que d’Andréossy (Georges Six. Les généraux de la Révolution et de l’Empire, Bernard Gionanangeli Éditeur, Paris, 2002)

(2) Les autres membres sont : Fourier, Costaz, Noeut, Quenot, Le Père, Girard, Le Roy, Say, Malus et Monge. Andréossy sera élu vice-Président de l’Institut le 29 juin 1799.

(3) A son sujet, cependant, les avis divergent : « L’intelligent et amical Larochefoucauld est, à Vienne, démis de ses fonctions, et remplacé par Andréossy, un des généraux de Napoléon. Ce dernier parle un langage rude et menace plus qu’il ne négocie » (Erzherzog Karl – H. Hertenberger, F. Wiltschek. Graz, 1983)

(4) Il utilise même la voiture du général pour rendre visite à sa maîtresse, l’épouse du comte Pálffy.

(5) C’est sa quatrième épouse, qui va entretenir une haine farouche à l’encontre de Napoléon Ier

(6) Roger de Damas. Mémoires. Paris, 1924

(7) Il s’agit du palais d’été, qui se trouvait alors non loin de l’actuelle Mariahilferstrasse, le palais d’hiver – occupée par l’ambassade de France ! – se trouvant dans le centre de la vieille ville.

(8) Les batteries étaient situées vers le Spitelberg, à peu près où se trouve, aujourd’hui, le « Museum Quartier ». Ceci fait de lui, sans doute, le seul gouverneur ayant fait bombardé la ville dont il avait la charge ! On trouvera sur ce site des documents datant de l’occupation de Vienne.

(9) Les rapports assez ambigus entre Andréossy et Schulmeister sont relatés dans « Schulmeister – Dans les coulisses de la Grande Armée. A. Douay, G. Hertault. Nouveau Monde Éditions, Paris, 2002

(10) L’Autriche, en 1815, en récupèrera 365.

(11) Les tableaux sont déposés chez le directeur des collections du duc Albert (le fondateur de l’actuel Albertina), François Lefebvre, qui reçoit mission de les restaurer. Celui-ci ne se presse guère. Lors de son passage en 1814, la restauration ne sera toujours pas achevée et Andréossy les échangera contre des dessins de différents maîtres.

(12) Il avait été fait comte de l’empire le 24 février 1809

(13) Il est remplacé à son poste par Louis-Guillaume Otto, comte de Mosloy.

(14) Le général Andréossy avait épousé une demoiselle de Fay de Latour-Maubourg, dont il eut un fils.