Correspondance de Napoléon – Décembre 1814

Décembre 1814

 

Porto-Ferrajo, 6 décembre 1814.

Au général comte Drouot, gouverneur de l’île d’Elbe

Il faudra faire lever, par le jeune officier du génie et un ou deux gardes du génie, le plan des environs de Porto-Ferrajo, à 1.200 toises de distance. Il faudrait que ce plan fût fait sur une grande échelle et que les inégalités du terrain fussent marquées exactement, afin que ce plan pût servir en cas de siège.

 

Porto-Ferrajo, 9 décembre 1814.

Au général comte Drouot, gouverneur de l’île d’Elbe

Lundi 12 de ce mois, nous tiendrons conseil d’administration de la guerre ; il aura lieu chez moi ; vous y appellerez l’inspecteur aux revues Boinod et le trésorier Peyrusse. L’objet de ce conseil sera d’arrêter les dépenses du budget de 1814 et d’établir le budget réel. Il faudra donc que le trésorier fasse exactement l’état des dépenses qui ont eu lien et ce qui reste sur chaque crédit, et que le sieur Boinod présente l’état des dettes qu’il y a à solder. Le deuxième objet de ce conseil sera de régler le budget de la guerre pour 1815. Tra­vaillez à en faire un aperçu. Vous y serez porté comme gouverneur ; votre traitement, à raison de 1,000 francs par mois, sera le plus fort ; tous les autres devront être moins forts. Vous verrez ce qu’il est possible de diminuer aux différents individus, en faisant cependant les choses convenablement et en leur laissant des traitements plus considérables qu’ils n’en auraient aujourd’hui en France.

Nous tiendrons mardi un conseil pour régler le budget de l’île. Il sera composé de vous, de l’intendant et du trésorier. On réglera d’abord tout ce qui est relatif au budget réel de 1814, et après cela le budget de 1815, en recettes et en dépenses.

Mercredi nous tiendrons le conseil de la maison. Il y aura vous et le trésorier. On réglera d’abord le budget réel de 1814, puis le budget de 1815, tant en recettes qu’en dépenses. La recette se com­posera de la mine et autres revenus qui n’entrent pas dans le budget de l’île.

Vers la fin du mois, il sera tenu un conseil pour régler le budget de la mine de Rio pour 1814 et 1815. Le sieur Pons, le trésorier et vous serez de ce conseil. Vous en préviendrez M. Pons, pour qu’il se tienne prêt. Il sera nécessaire que ce conseil ait lieu avant le 25 décembre.

 

Porto-Ferrajo, 11 décembre 1814.

Au général comte Drouot, gouverneur de l’île d’Elbe

Si l’usage à Paris est de laisser le sabre aux grenadiers qui s’en vont par congé, on le leur laissera ; on ne l’ôtera qu’à ceux qui sont renvoyés.

Je vous recommande de porter la plus grande attention à ce que les cartouches des grenadiers qui s’en vont soient faites à leur avan­tage, pour ceux qui sont bons sujets. Il faudra mettre que le congé leur est accordé par les ordres du général Drouot, prenant en con­sidération la situation de la famille de ces individus qui réclame leur présence, et malgré le regret qu’éprouve le bataillon de se priver des services d’aussi bons sujets. On relatera tous leurs services, les batailles auxquelles ils se sont trouvés, les blessures qu’ils ont reçues ; enfin on n’oubliera rien pour témoigner ma satisfaction à de braves soldats qui m’ont donné tant de preuves de dévouement.

Les grenadiers qui seront renvoyés comme mauvais sujets auront des cartouches jaunes.

Faites imprimer ici un modèle de cartouche. Vous y ferez mettre mes armes au milieu ; vous effacerez cette formule de souverain de l’île d’Elbe, qui est ridicule, et vous ferez en sorte que cette car­touche soit connue de la Garde, afin qu’elle voie combien on la traite honorablement lorsque les grenadiers s’en vont avec permission.

 

Porto-Ferrajo, 22 décembre 1814.

Au général comte Drouot, gouverneur de l’île d’Elbe

Je vous renvoie trois pièces relatives à une coupe de bois dans les forêts de Giove et de Volterajo. Je désire que vous vous concertiez avec M. Pons pour faire couper dans ces forêts environ 1,000 stères de bois, lequel sera coupé et transporté à la Marine par les ou­vriers de la mine sous sa surveillance. Il ne faudrait pas que le stère revînt à plus de 40 ou 50 sous. Le sieur Pons pourra passer un marché avec les conducteurs des ouvriers. La guerre lui remboursera ses dépenses, et, moyennant ce, elle aura un approvisionnement de 1,000 stères de bois, qui ne lui reviendra pas à plus de 2 ou 3,000 francs. Vous verrez en même temps le capitaine du port, pour savoir combien l’Abeille et la Mouche peuvent porter de bois ; si ces bâtiments n’en peuvent porter une quantité suffisante, il serait alors urgent d’acheter un bâtiment pour porter ce bois à la Linguella, avec les marins de la Garde et ceux du brick. Il faudra avoir soin qu’on ne coupe pas de gros arbres qui puissent servir aux constructions. On pourra employer un certain nombre d’ouvriers de la marine pour les élaguer et les nettoyer, ce qui facilitera leur accroissement et pro­curera pour l’avenir une ressource pour la bâtisse.

 

Porto-Ferrajo, 25 décembre 1814.

Au général comte Drouot, gouverneur de l’île d’Elbe

Présentez-moi trois officiers, chefs de bataillon ou capitaines à la suite, pour commander les forts Montebello, Saint-Hilaire et Saint-Cloud. Les uns et les autres y seront logés et ne pourront décou­cher; ils auront les clefs des magasins des vivres, des poudres et des citernes.

À compter du 1er janvier, le service des forts Montebello, Saint-Hilaire et Saint-Cloud sera fait par un sergent et 10 hommes du bataillon corse. Il y aura de plus dans chaque fort deux canonnière.

Ces détachements seront relevés tous les mois, et ils n’auront pas d’autre caserne. Tous les hommes formant la garnison de ces farte devront toujours s’y trouver à une heure avant le coucher du soleil, et ils ne pourront sortir pour aller en ville que par la permission du commandant, qui ne l’accordera qu’à une heure après le lever du soleil, et seulement à la moitié de la garnison; de sorte qu’il devra toujours y avoir au fort cinq hommes et un canonnier. Par ce moyen, trente hommes du bataillon corse se trouveront logés, ainsi que six canonniers.

Le fort Montebello sera armé de deux pièces de canon d’un calibre supérieur à celui de 8, montées sur affût de siège, d’un mortier de 6 pouces et d’un obusier, tout cela approvisionné à 100 coups par pièce.

Le fort Saint-Hilaire aura trois pièces d’un calibre supérieur à 12; le fort Saint-Cloud aura deux pièces d’un calibre supérieur à 12. Le fort Montebello seul aura du biscuit, de l’eau-de-vie, et de l’huile pour 50 hommes pendant un mois.

Vous ferez embarquer les pièces pour le fort Montebello sur un grand canot monté par les marins de la Garde, avec un détachement d’artillerie, et comme si elles étaient destinées pour le cap Saint-André. On les débarquera au pied du fort ou sur la plage la plus voi­sine. Je désire que ces forts soient armés dans la semaine, et que, dès le 1er janvier, le commandant et la garnison y soient placés. Vous ferez mettre au fort Montebello, indépendamment de la garnison, 10 grenadiers ou chasseurs de la Garde, choisis parmi les travail­leurs. Ces hommes ne feront que travailler au déblayement et à prix fait.

Vous donnerez les ordres les plus précis pour que la garnison de ces trois forts soit exercée sur-le-champ à la manœuvre du canon, de manière que, quinze jours après, les hommes soient capables de servir aux pièces.

 

Porto-Ferrajo, 28 décembre 1814.

Au général comte Bertrand, grand-maréchal du palais.

Monsieur le Comte Bertrand, l’architecte me rend compte que la maison du commissaire des guerres ne vaut rien, parce que les étages n’ont que dix pieds de haut, et que le premier étage est humide. Il faudrait habiter le deuxième et pour cela relever les planchers, ce qui ne pourrait se faire sans une dépense de 10 à 12,000 francs, pour avoir un mauvais logement. Voyez ce que coûterait le loyer de la maison Laforgue, et ce qu’il faudrait y dépen­ser pour la mettre en état. Si l’Impératrice et le Roi de Rome venaient ici, cette maison sera la seule convenable pour loger la princesse.

BUDGET POUR LA MAISON DE SA MAJESTÉ :

EXERCICE 1815.