Wagram – Les combats à Aderklaa

Le maréchal Jean-Baptiste Bernadotte

Maréchal Jean Bernadotte. Wikimedia Commons/Public DomainLes premières troupes françaises atteignent Aderklaa vers 5 heures de l’après midi du 5 juillet. Il s’agit d’une partie du corps d’armée de Bernadotte, la division mixte Dupas et la division saxonne, qui viennent de repousser la brigade Riese de l’avant garde de Nordmann et les Grenzers de Wallachie et Illyrie. A ce moment, elles sont attaquées par les cuirassiers de Roussel (prince Albert et archiduc François). La cavalerie saxonne se prépare à charger, lorsque les chevau-légers du prince Clemens, pressés d’en finir, chargent avant tous les autres. Ils sont arrêtés net dans leur élan par les autrichiens, qui ont attendu qu’ils soient à portée de fusils pour les recevoir d’un tir nourri. L’ensemble de la cavalerie charge alors, en formation en échelon. Les autrichiens ne peuvent recommencer leur exploit, ils doivent subir la mêlée. Dans cette affaire, deux escadrons, l’un saxon, l’autre autrichien, appartiennent au prince Albert de Saxe.

Marbot:

« Parmi les incidents remarquables….je dois citer le combat de deux régiments de cavalerie qui, bien que servant dans des armées opposées l’une à l’autre, appartenaient au même colonel propriétaire, le prince Albert de Saxe-Teschen. Celui-ci (..) possédait un régiments de housards en Saxe et un de cuirassiers en Autriche. L’un et l’autre portaient son nom (…) Ces deux régiments se trouvèrent en présence sur le champ de bataille de Wagram, où, stimulés par le devoir et le point d’honneur, ils se chargèrent mutuellement. Chose remarquable, les cuirassiers furent enfoncés par les housards, qui combattirent avec la plus grande vigueur, tant ils étaient désireux de  réparer sous les yeux de Napoléon et de l’armée française le double échec qu’avait éprouvé l’infanterie saxonne ! »…) Ces deux régiments se trouvèrent en présence sur le champ de bataille de Wagram, où, stimulés par le devoir et le point d’honneur, ils se chargèrent mutuellement. Chose remarquable, les cuirassiers furent enfoncés par les housards, qui combattirent avec la plus grande vigueur, tant ils étaient désireux de  réparer sous les yeux de Napoléon et de l’armée française le double échec qu’avait éprouvé l’infanterie saxonne ! »

A la fin, la cavalerie autrichienne doit se replier, au-delà d’Aderklaa. L’espace entre Raasdorf et Aderklaa est donc dégagé, ce qui permet à l’infanterie du IXe corps de se déployer. A 7 heures le soir, elle approche de Wagram, l’ordre ayant été donné par Napoléon d’attaquer sur toute la ligne de front. Aderklaa va être un peu plus tard le refuge, justement, des troupes saxonnes de Bernadotte, se repliant en désordre de Wagram, où l’affaire du Sachsen Klemm les a décimés et mis en déroute.

Cavalerie autrichienne
Cavalerie autrichienne

6 Juillet 1809

 

Dans la nuit, vers 2 heures, Napoléon donne l’ordre à Masséna de porter la majeure partie de ses troupes vers Aderklaa. Aux premières lueurs de l’aube, Bernadotte retire ses troupes de la position qu’ils occupent dans le village, la trouvant sans doute trop exposée. En effet, il aperçoit à sa droite les troupes de Bellegarde, qui descendent des hauteurs de Wagram, à sa gauche les cuirassiers et les grenadiers de la réserve autrichienne s’avancer vers Süssenbrunn. C’est pourquoi, lorsque Bellegarde atteint Aderklaa, s’attendant à une forte résistance, il trouve un village sans défense. Il le fait occuper immédiatement, ainsi que l’espace qui le sépare de Wagram. Un duel d’artillerie commence peu après, l’artillerie des saxons étant renforcée par celle du IIe corps d’armée (Oudinot).

Le monument d'Aerklaa- Photo Hardy
Le monument d’Aerklaa- Photo Hardy

L’arrivée de Masséna déclenche l’attaque d’Aderklaa, dans le but de le reprendre. C’est Saint-Cyr qui en est chargé, aidé de la brigade Hessoise. Les saxons doivent, en même temps, porter leur effort sur la droite, entre Aderklaa et Wagram. La première ligne autrichienne cède sous les coups des soldats de Saint-Cyr, mais la seconde, menée par Bellegarde, tient bon. Les Français, dans leur élan, traversent le village et se trouvent face à des Autrichiens parfaitement reformés et qui les accueillent avec un feu nourri. Français et Allemands sont contraints à la retraite dans le village. Pire, à droite, les Saxons, attaqués par la cavalerie autrichienne, prennent panique, et refluent jusqu’à Raasdorf, où la présence de Napoléon les arrête. Au même moment, les grenadiers de la Réserve autrichienne, ayant à leur tête l’archiduc Charles, reprennent Aderklaa, après un violent combat, parfois un corps à corps. Masséna lance les cavaliers de Lasalle et Marulaz sur les batteries autrichiennes, qu’ils dispersent, mais sont obligés presqu’aussitôt d’abandonner à leur tour, sous la pression de la cavalerie de Liechtenstein.

Le maréchal Masséna
Le maréchal Masséna

Masséna envoie alors la division Molitor, pour définitivement reprendre le village. Peine perdue: des renforts de grenadiers permettent aux autrichiens de refouler les français, qui reculent sous la protection de la division Legrand. Aderklaa est de nouveau abandonné. Les Français laissent sur le terrain 4 drapeaux et 500 prisonniers. Il est dix heures du matin. Masséna reçoit alors l’ordre de se porter au sud, à la rescousse de la division Boudet, qui, le long du Danube, doit faire face au 3e Corps d’armée de Klenau, qui menace le flanc gauche de l’armée française. Opération délicate, car Masséna doit en quelque sorte, défiler devant, et prêter son flanc, aux autrichiens (Réserve de grenadiers et 3e Corps d’armée – Kolowrat).  Une attaque de la cavalerie de Bessières est ordonnée pour le protéger, mais est menée tant soit peu dans le désordre, entraînant de nombreuses pertes. Bessières lui-même est blessé.

Napoléon aux côtés de Bessières tombé de son cheval et inconscient, peinture d'Antoine-Jean Gros.
Napoléon aux côtés de Bessières tombé de son cheval et inconscient, peinture d’Antoine-Jean Gros.

Savary:

« Le maréchal Bessières avait à peine commencé d’exécuter [cet ordre] qu’il est atteint par l’un des plus extraordinaire coup d’artillerie que je ne vis jamais: le boulet à pleine vitesse lui déchira le pantalon depuis le haut de la cuisse jusqu’au genou, zigzaguant le long de la hanche, comme l’aurait fait la foudre; il  fût mis a bas de son cheval si brusquement, que nous pensâmes qu’il avait été tué sur le coup. Le même boulet avait détruit le canon de son pistolet . L’Empereur l’avait vu tomber, mais ne l’ayant pas reconnu  tout de suite, avait demandé <Qui est-ce – c’était son expression habituelle –   Bessières, Sire>. Il tourna bride aussitôt, disant :  < Allons, je n’ai pas le temps de pleurer, évitons une autre scène> faisant allusion à ce qui s’était passé au moment de la mort du maréchal Lannes. Il m’envoya voir si Bessières était encore en vie: il venait d’être allongé sur le sol et avait repris ses esprits, ayant été sérieusement atteint à la hanche, qui était paralysée. »  

Napoléon:

« Le boulet qui vous a frappé a fait pleurer toute ma garde; remerciez-le, il doit vous être bien cher ! »

Toutefois, cela permet de ralentir les Autrichiens, et donne le temps à Napoléon pour faire mettre en ligne plus de cent canons, entre Aderklaa et Breitenlee (la « Grande Batterie« , composée de 60 canons de la Garde et de 40 pièces de l’armée du prince Eugène, dont beaucoup de fort calibre), sous la direction de Lauriston.

Savary:

« Il [Napoléon] ordonna à son aide de camp, le général Lauriston, qui commandait les 80 pièces de l’artillerie de la Garde, de les faire tirer , toutes ensemble, sur le centre de l’ennemi ».

C’est un enfer de mitraille et de feu qui est alors dirigé sur Aderklaa. Les champs sont bientôt en flammes, les blessés impuissant à s’échapper. Kolowrat ordonne le repli sur la route Breitenlee-Süssenbrunn, et ordonne à son artillerie d’ouvrir le feu sur les troupes de Masséna qui pour ainsi dire défilent devant lui. Par chance ce dernier est déjà hors de portée. Il va atteindre Essling vers midi.

A peu près au même moment, Napoléon ordonne à Macdonald une attaque générale contre les troupes de Kolowrat et la Réserve de grenadiers. Macdonald n’a plus sous ses ordres que 8000 hommes, formés en un énorme carré: le front constitué de huit bataillons d’infanterie, les flancs couverts par les cavaliers de la Garde, à droite, et de Nansouty, à gauche. La « Grande Batterie » les appuie, ouvrant un feu nourri contre les Autrichiens. Ces derniers ripostent, causant d’horribles dommages dans les rangs des soldats de Macdonald, sans pour autant stopper leur marche en direction de Süssenbrunn. En moins d’une heure, des 8000 hommes engagés, 1500 sont encore debout.

Macdonald:

« Je fis donc avancer d’abord, et au pas de course, quatre bataillons suivis de quatre autres que je déployai sur deux lignes, et pendant que mon artillerie ouvrait son feu, que celle de la Garde venait se mettre en position – ce que l’Empereur nomma la batterie de cent pièces de canons – mes deux divisions allaient se former en colonnes d’attaque, lorsque l’ennemi qui s’avançait toujours fit halte et redoublant son feu d’artillerie, d’une ligne double de la notre, nous fit un mal prodigieux; toutefois je faisais serrer les rangs au fur et à mesure que des files étaient hors de combat, et tirer les alignements comme à l’exercice. »

Pourtant, les Autrichiens vont être incapables d’exploiter ces terribles événements. En effet, tant à Markgrafneusiedl qu’à Essling, ils doivent déjà reculer. Leur défaite est en vue.