11-22 janvier 1811 – Siège d’Olivenza
En quittant Séville pour opérer en Estrémadure, et se porter sur le Tage au secours de Masséna, le maréchal Soult avait l’intention d’ouvrir la campagne par le siège de Badajoz, et, dans ce but, il s’était fait suivre d’un matériel assez considérable. Mais les pluies affreuses qui vinrent assaillir son armée dans les défilés de la Sierra-Moréna, ayant arrêté la marche de sa grosse artillerie, il se détermina, en attendant qu’elle pût arriver, à marcher sur Olivenza, petite place qu’il présumait ne pas devoir faire une longue résistance et qui pouvait lui servir de lieu de dépôt jusqu’au moment de la prise de Badajoz. En conséquence,, il laissa en arrière le général Gazan avec une division pour couvrir la grande route de Séville, et réunir le matériel sous la protection du château de Zafra, qui fut mis en état de défense. Le général Briche, qui déjà s’était emparé de Mérida avec sa brigade de cavalerie légère, reçut l’ordre de s’avancer par la rive droite de la Guadiana sur Badajoz, afin d’intercepter les secours qui pourraient y être envoyés de Portugal. Le maréchal Soult, après avoir fait la reconnaissance de cette place sur la rive gauche, accompagné du maréchal Mortier, commandant du cinquième corps, revint le 11 janvier à Albuera, d’où il se mit immédiatement en marche sur Olivenza avec la division Girard du cinquième corps, le vingt-septième de chasseurs, la cavalerie de réserve du général Latour-Maubourg, deux compagnies d’artillerie légère, les seules qu’il eût en ce moment à sa disposition, et une compagnie de sapeurs.
Olivenza est une petite ville de cinq mille âmes, située sur un plateau qui domine ses alentours, excepté du côté du sud. Elle est entourée d’une enceinte bastionnée, revêtue, et avec demi-lunes, fossés et chemins couverts. Une galerie voûtée, adossée à l’escarpe, donne des feux sur la crête du glacis. À trois cents mètres environ du bastion I, se trouve une lunette avancée, cotée I3, construite sur la pente d’un contre-fort s’inclinant vers la hauteur qui, du côté sud, domine la ville.
Le maréchal de camp D. Manuel Herch commandait dans la place avec quatre mille hommes, y compris un escadron des hussards d’Estrémadure, deux compagnies d’artillerie et une compagnie de sapeurs.
Les troupes françaises arrivèrent en vue d’Olivenza le 11 janvier, à cinq heures du soir. Le maréchal Mortier envoya au gouverneur une sommation de se rendre, lui offrant de le laisser sortir avec les honneurs de la guerre; mais celui-ci répondit qu’il se défendrait jusqu’à la dernière extrémité. Le maréchal Soult ordonna aussitôt d’investir la place et de commencer le siège. Le général Latour-Maubourg fut détaché en observation avec sa division de dragons sur la route de Badajoz. Une colonne, commandée par le général Girard, fit l’investissement par la droite; une autre, sous les ordres du général Brayer, fit le même mouvement par la gauche. Le capitaine du génie Vainsot, qui marchait avec cette dernière colonne, devait, s’il était possible, s’emparer de la lunette avancée, cotée I3, laquelle avait été reconnue l’année précédente par le chef de bataillon du génie Cazin. L’ennemi, ayant négligé d’occuper cette lunette, le capitaine Vainsot y entra, et s’y établit aussitôt avec les voltigeurs du soixante-quatrième régiment.
Le général Léry, qui commandait le génie, n’avait que six officiers, une compagnie de sapeurs, et deux cents outils portés à dos de mulets. Le général Bourgeat, qui commandait l’artillerie, était resté en arrière pour activer l’arrivée du matériel. Il n’y avait d’autre artillerie que les douze pièces de campagne de la première division.
1e Nuit, du 11 au 12 janvier : cent quarante travailleurs.
On fit un logement au saillant de la lunette I3 dont on s’était emparé, et l’on y commença une batterie pour quatre pièces de 8, avec une rampe et deux épaulements pour couvrir le passage du fossé. Une autre batterie pour deux pièces fut également commencée dans le crochet du chemin couvert de la face droite.
Au jour, on perfectionna ce travail, et l’on prépara un emplacement pour mettre à couvert les munitions. L’artillerie arma la batterie construite au saillant de la lunette, et à midi, cette batterie commença à tirer. On continua les travaux du crochet du chemin couvert.
Le chef de bataillon du génie Cazin et le capitaine Vainsot reconnurent l’ancienne brèche que l’on savait avoir existé sur la face droite et vers le saillant du bastion Saint-Pierre 8. Elle était réparée jusqu’au tiers de la hauteur du revêtement, et surmontée d’un parapet en terre au niveau du terre-plein. Le maréchal Soult, qui vint lui-même sur le terrain, désigna ce bastion pour le point d’attaque.
2e Nuit, du 12 au 13 janvier : quatre-vingt-quatorze travailleurs.
On déboucha d’une maison située à trois cent cinquante mètres environ de la place, par une portion de parallèle d’environ soixante-huit mètres de longueur, dirigée vers le saillant qu’on se proposait d’attaquer. Cette parallèle devait se lier par sa droite au logement fait la nuit précédente dans la lunette I3, au moyen d’une communication qu’il était facile de mettre à couvert des feux de la place, à la faveur des plis du terrain et de quelques légers travaux à faire.
Au jour, cent quatre-vingt-quinze travailleurs élargirent cette parallèle qu’ils prolongèrent de soixante mètres, malgré le feu de la place et une pluie qui tombait par torrent. On perfectionna le logement de la lunette I3, Les sapeurs furent employés à abattre des bois et à confectionner des gabions et des fascines.
3e Nuit, du 13 au 14 janvier : trois cent-soixante-treize, travailleurs.
La parallèle fut prolongée d’environ quatre-vingts mètres vers le saillant du bastion S. La pluie tombant toujours et remplissant les tranchées, on creusa des rigoles pour l’écoulement des eaux. On ouvrit la communication projetée, de la maison ou s’appuyait la parallèle, au logement fait dans la lunette I3.
Au jour, soixante-huit travailleurs continuèrent les travaux de dessèchement, et prolongèrent la parallèle d’une dizaine de mètres à la gauche.
4e Nuit, du 14 au 15 janvier.
On prolongea la parallèle de soixante-quatre mètres, et l’on fit des rigoles pour faciliter l’écoulement des eaux qui noyaient le travail.
Au jour, on fut obligé de poser des fascines sur les parties basses de la parallèle. L’ennemi tira beaucoup à mitraille.
5e Nuit, du 15 au 16 janvier : cent quatre-vingts travailleurs.
À l’entrée de la nuit, le chef de bataillon du génie Gazin et le capitaine Amillet se portèrent sur la crête du glacis de la place d’armes saillante du bastion 8, afin de reconnaître le chemin couvert. On prolongea la parallèle de cent soixante mètres. La pluie qui tombait par torrent inonda la tranchée; il fallut creuser des rigoles et des puits pour faire écouler l’eau, et faire un pavé en fascines dans les parties inondées de la parallèle. On ne pouvait disposer que d’un petit nombre de travailleurs, et le manque d’outils était tel que les hommes étaient obligés de jeter la terre avec leurs mains pour se couvrir.
Dans la journée, la tranchée fut élargie et pavée en fascines sur une longueur de cent vingt-six mètres.
6e Nuit, du 16 au 17 janvier.
On prolongea la parallèle sur une longueur de cent soixante-six mètres; mais les travailleurs étaient en si petit nombre, qu’au jour ils ne se trouvèrent pas à couvert. Le général en chef visita la tranchée avec le maréchal Mortier, et reconnut à la gauche l’emplacement d’une batterie à ricochet de trois pièces, destinée à enfiler la face gauche du bastion 8.
7e Nuit, du 17 au 18 janvier : trois cent trente travailleurs.
On déboucha de la parallèle et l’on s’avança en sape double vers le saillant du bastion 8, le long de la capitale. Le capitaine du génie Vainsot fit exécuter la batterie à ricochet de gauche, bien qu’il restât encore deux cent vingt mètres de communication à faire pour y arriver. De leur côté, les assiégés dégorgèrent de nouvelles embrasures aux deux faces du bastion 8, et redoublèrent leur feu. De la lunette I3, on découvrit qu’ils avaient élevé perpendiculairement à la face droite du bastion 8, une grande traverse pour se défiler des feux de la batterie établie dans cette lunette.
Au jour, on continua les travaux de la batterie à ricochet de gauche. Il arriva dans la journée une compagnie de sapeurs polonais, avec un caisson de trois cents outils, qui furent d’un grand secours. Un chef de bataillon du trente-quatrième régiment et un autre officier furent grièvement
8e Nuit, du 18 au 19 janvier : trois cent dix travailleurs.
Le capitaine du génie Bagnac fit commencer à droite de la capitale, et en avant de la parallèle, une batterie à ricochet de deux pièces pour enfiler la face droite du bastion 8. On s’avança sur le glacis jusqu’à six mètres de la crête du chemin couvert, qu’on ne put couronner faute de gabions. On continua sur une longueur de cent soixante mètres la communication de la parallèle à la batterie à ricochet de gauche.
Au jour, on travailla à dessécher la parallèle et à élargir le cheminement ouvert pendant la nuit. Le général Bourgeat, commandant de l’artillerie, arriva devant la place avec trois compagnies de cette arme: quatre pièces de 12 et deux mortiers de six pouces arrivèrent également dans la journée. Tous les sapeurs furent employés à faire des gabions et des fascines.
9e Nuit, du 19 au 20 janvier : trois cent vingt travailleurs.
On fit le couronnement du chemin couvert au saillant de la place d’armes du bastion 8. L’artillerie arma de deux pièces de 8 la batterie à ricochet de droite, et elle plaça ses deux mortiers de six pouces derrière la traverse tournante du couronnement du chemin couvert, à douze mètres du saillant. À huit heures du matin, elle entreprit dans le couronnement du chemin couvert deux batteries de brèche pour dix bouches à feu, qui devaient être réparties également de chaque côté du saillant. Les batteries à ricochet de droite et de gauche commencèrent leur feu ; mais ces batteries se trouvant trop près de la place pour tirer à ricochet, battirent de plein fouet les deux faces du bastion 8, et forcèrent l’ennemi à retirer deux pièces qu’il avait sur chacune de ces faces. Les deux mortiers placés derrière la traverse tournante du couronnement du chemin couvert, lancèrent dans le bastion d’attaque des bombes qui en chassèrent un grand nombre de tirailleurs, dont les feux inquiétaient beaucoup nos travailleurs.
Le chef de bataillon du génie Lamare arriva avec une grande partie du matériel du génie, que le mauvais état des chemins avait retenu en arrière.
10e Nuit, du 20 au 21 janvier : deux cent quatre-vingts travailleurs.
On prolongea le couronnement du chemin couvert, sur une longueur de trente mètres, à droite et à gauche des batteries de brèche. La communication de la parallèle avec la batterie à ricochet de gauche fut à peu près terminée.
Le chef de bataillon du génie Cazin reconnut la contrescarpe et le fossé; il s’assura que le chemin couvert avait une largeur de 10 mètres, avec une banquette en maçonnerie et un parapet revêtu; que les deux demi-lunes, dont les faces étaient revêtues, n’avaient aucun commandement sur la crête du chemin couvert; qu’on y montait du fossé par des rampes; que les traverses des deux places d’armes rentrantes étaient aussi revêtues, et couvraient des rampes qui y aboutissaient; enfin que la contrescarpe du corps de place était revêtue, et que sa hauteur variait de trois mètres à trois mètres cinquante centimètres.
Les maréchaux Soult et Mortier visitèrent la tranchée avec le général Léry, qui donna des ordres pour commencer la descente du fossé et renverser la contrescarpe.
À la pointe du jour, les deux batteries de brèche furent achevées; par une promptitude remarquable, l’artillerie n’avait pas mis vingt-quatre heures à leur construction. Trois cents travailleurs furent employés à terminer le couronnement du chemin couvert, et à réparer les dégradations occasionnées par le feu des assiégés.
11e Nuit, du 21 au 22 janvier.
À sept heures du soir, le chef de bataillon du génie Lamare fit commencer, à l’extrémité du couronnement de gauche un chemin couvert, un puits de mine de deux mètres cinquante centimètres de profondeur pour renverser la contrescarpe, et à six heures du matin, on commença à entrer en galerie. On transporta dans la tranchée les gabions et les blindes nécessaires au passage du fossé. L’artillerie arma les batteries du couronnement de quatre pièces de 12, destinées à battre en brèche; de quatre pièces de 8 et de deux obusiers de six pouces, pour combattre les flancs et lancer des obus sur la brèche. On commença dans le couronnement de gauche une nouvelle batterie de brèche pour deux pièces de 12 et un obusier de 8 pouces, arrivés le soir même. L’artillerie travailla avec tant d’activité que cette nouvelle batterie put tirer en même temps que les autres.
Le 22, à midi, les batteries de brèche commencèrent leur feu contre les deux faces du bastion 8, et contre les flancs des bastions latéraux. A trois heures, les maçonneries des escarpes étaient fortement entamées; les mineurs se trouvaient à peu de distance de la contrescarpe, et tout était prêt pour le passage du fossé, lorsque le gouverneur demanda à capituler. Le maréchal Mortier lui fit répondre qu’ayant refusé les conditions avantageuses qui lui avaient été proposées au commencement du siège, il ne pouvait plus se rendre qu’à discrétion. Un instant après, le gouverneur se présenta avec son état-major en avant de la porte de San-Francisco, et se soumit avec toutes ses troupes. Le maréchal Mortier fit prendre possession des portes, et autorisa le général Girard à régler la sortie de la garnison, qui, le lendemain à huit heures du matin, déposa les armes sur le glacis, et fut conduite prisonnière en France. L’effectif en était de quatre mille cent soixante et un hommes, parmi lesquels on comptait un maréchal de camp gouverneur, un brigadier, neuf colonels ou lieutenants-colonels, et cent quarante-neuf officiers de divers grades. On ne trouva dans la place que dix-huit pièces d’artillerie, dont huit en bronze, peu de poudre, et beaucoup de projectiles. Les habitants, malgré la part qu’ils avaient prise à la défense, furent traités avec des égards et une modération à laquelle ils ne s’attendaient pas [1].
Le maréchal Soult ordonna de combler les tranchées et de remettre la place en état de défense, afin qu’elle pût servir de dépôt à l’armée en attendant la prise de Badajoz. Il y laissa l’adjudant-commandant Forestier, avec une garnison de quatre cents hommes, et le lieutenant du génie Fortin, avec un détachement de mineurs pour réparer la brèche. Il se mit en marche le 26 janvier, pour faire le siège de Badajoz.
Rapport du maréchal Soult sur la prise d’Olivenza, adressé au prince Berthier, major général.
Olivenza, le 15 janvier 1811.
Monseigneur,
J’ai l’honneur de rendre compte à Votre Altesse Sérénissime que la place d’0Olivenza s’est soumise aux armes de Sa Majesté l’Empereur. Hier après avoir fini mon rapport, je me rendis à la tranchée pour faire commencer le feu à la batterie de brèche qui était établie au couronnement du saillant du chemin couvert du bastion 8. Deux heures de feu ont suffi pour déterminer la garnison, qui déjà était réduite à ses derniers moyens de défense, à demander à capituler. Il lui a été répondu qu’ayant refusé les conditions avantageuses qui lui avaient été proposées au commencement du siège, on ne pouvait plus la recevoir qu’à discrétion. Un instant après, le gouverneur, accompagné de son état-major, s’est présenté en avant de la porte San Francisco, et s’est soumis avec toutes les troupes sous son commandement. M. le maréchal duc de Trévise a aussitôt prit prendre possession des portes, et il a autorisé M. le général de division Girard à faire une convention pour régler la sortie de la garnison.

J’ai l’honneur d’adresser à Votre Altesse cette convention et l’état de situation des troupes espagnoles qui ont été trouvées dans la place, et dont le nombre s’élève à cent quarante-neuf officiers de tout grade et à quatre mille douze sous-officiers ou soldats.
Cette troupe a déposé les armes sur les glacis, et elle est immédiatement partie sous escorte pour être conduite en France comme prisonnière de guerre. J’ai cependant autorisé le général don Manuel Herch, ex-gouverneur, que son âge et sa santé rendaient incapable de voyager, à rester à Olivenza sous la surveillance du commandant militaire, ainsi que quarante vieux invalides qui sont portés sur l’état. J’ai, en outre, ordonné que cent trente-deux chefs de famille que les chefs de l’insurrection avaient par violence obligés de servir, fussent sur-le-champ mis en liberté; mais ils se trouvent remplacés dans la colonne des prisonniers par deux cents autres militaires espagnols de tout grade, qui ont été pris dans les dernières affaires, et leur nombre s’accroîtra encore à leur passage à Cordoue et à Andujar par les prisonniers qui se trouvaient dans les dépôts de Séville et de Grenade, et que j’ai ordonné qu’on y réunît. Ainsi le convoi en partant de Cordoue sera au moins de quatre mille cinq cents prisonniers.
Nous n’avons trouvé dans la place que huit pièces de canon en bronze, et presque plus de munitions; il n’y avait pas de magasins. Il y a aussi plusieurs pièces en fer, dont quelques-unes pourront être utilisées, et beaucoup de projectiles de divers calibres.
La place est d’ailleurs en bon état; Votre Altesse en trouvera un plan joint au journal de siège que j’ai l’honneur de lui adresser. J’ai donné des ordres pour que nos travaux d’attaque fussent immédiatement comblés, et je vais m’occuper de faire mettre en état de défense ce poste important qui formera une excellente place d’armes, en attendant la prise de Badajoz, où les troupes qui agiront sur cette frontière tiendront leurs dépôts.
Je dois des éloges aux troupes d’infanterie du cinquième corps d’armée, qui ont fait l’investissement et le siège de la place. Elles étaient commandées par M. le général de division Girard, sous les ordres de M. le maréchal duc de Trévise. J’en dois également aux troupes du génie, sous les ordres de M. le général de division Léry et à celles de l’artillerie, commandées par M. le général Bourgeat. Les officiers de l’état-major général, et ceux du cinquième corps d’armée, qui ont fait le service à la tranchée, se sont aussi fait remarquer par leur dévouement. La cavalerie de la réserve, aux ordres du général de division Latour-Maubourg, a redoublé d’activité dans son service pour prévenir toute tentative que l’ennemi aurait pu faire afin de secourir Olivenza.
Notre perte n’a été que de quinze hommes tués et de quarante blessés. Nous avons aussi perdu quelques chevaux. M. le chef de bataillon Gadillon du trente-quatrième régiment a été grièvement blessé d’un coup feu en plaçant lui-même ses sentinelles sur le chemin couvert M. le maréchal duc de Trévise demande pour lui le grade de colonel et un commandement dans l’intérieur, s’il peut se rétablir de ses blessures.
S. Exe. propose aussi pour le grade de général de brigade, M. le colonel Veilande du quatre-vingt-huitième régiment, pour celui de colonel, M. le chef de bataillon Cazin du génie, également présenté par M. le général de division Léry; pour celui d’adjudant-commandant, M. le chef de bataillon Hudry, chef de l’état-major à la première division du cinquième corps; pour celui de chef d’escadron, M. Mesclop, capitaine, aide de camp de M. le général de division Girard, et pour celui de capitaine, M. Moron, lieutenant, aussi aide de camp du même général. Enfin, S. Exe. renouvelle les demandes d’avancement et d’admission dans la Légion d’honneur qu’elle a faites après les combats de Villagarcia, lesquelles j’ai eu l’honneur d’adresser à Votre Altesse, et elle sollicite le grade de commandant dans la Légion d’honneur et une dotation en faveur de M. le général de brigade Bourgeat, commandant l’artillerie du cinquième corps, récompense qu’a méritée cet estimable général.
La lettre ci-jointe de M. le maréchal duc de Trévise contient les demandes du général Bourgeat en faveur de l’artillerie. J’ai l’honneur de prier Votre Altesse de vouloir bien les mettre sous les yeux de Sa Majesté. MM. les capitaines Moron et Lespagnol, proposés pour le grade de chef de bataillon, sont des officiers très-recommandables qui se sont parfaitement conduits; le chef de bataillon Lambert, proposé pour le grade d’officier dans la Légion d’honneur, M. Munier, capitaine, et M. Fortel lieutenant, les sergents Guillaud, Giles, Saint-Denys et Martin, le brigadier Mouillerat et le canonnier Matis (ce dernier a eu une jambe emportée par un boulet), ont été particulièrement remarqués, et sont proposés pour la décoration de la Légion d’honneur.
J’ai aussi l’honneur d’adresser à Votre Altesse Sérénissime les états de demandes que M. le général de division Léry présente pour le génie. M. le chef de bataillon Cazin, proposé pour le grade de colonel, et M. Vainsot, capitaine, pour celui de chef de bataillon, ces deux officiers du mérite le plus distingué, sont dignes de cet avancement. M. le général Léry propose aussi pour le grade de chef de bataillon M. le capitaine Saint-Denys, son aide de camp, et il propose pour la décoration de la Légion d’honneur MM. Andoueaud, capitaine, Lemut, capitaine, Amillet, capitaine, Phaizand, sergent-major à la cinquième compagnie du deuxième bataillon de sapeurs, Lamoureux, sapeur idem, tous militaires très-distingués dans leurs grades, et ayant donné des preuves de dévouement. J’ai l’honneur de prier Votre Altesse de vouloir bien, en présentant ces demandes à l’Empereur, solliciter des grâces de Sa Majesté, le grade de chef de bataillon pour M. le capitaine Ricard et celui de chef d’escadron pour M. le capitaine Petiet, tous deux mes aides de camp, la décoration d’officier de la Légion d’honneur pour M. le chef d’escadron Tholosé, aussi mon aide de camp, et celle de légionnaires pour MM. le chef de bataillon Aspelli, le capitaine Porcher, le capitaine Bory de Saint-Vincent et le capitaine Lafitte (j’ai demandé des commissions d’aides de camp pour les deux derniers ), tous quatre de l’état-major général. Ces divers officiers sont des plus méritants, et Votre Altesse se rappellera que je les ai déjà présentés comme dignes des grâces de S. M. l’Empereur.
J’ai l’honneur de prier Votre Altesse d’agréer l’hommage de mon profond respect.
Signé : Maréchal DUC DE DALMATIE.
Le maréchal Soult, ayant ainsi réuni tout son monde, se porta sur Olivenza, ville forte à quatre lieues de Badajoz; il la croyait abandonnée; mais les Espagnols y avaient jeté une garnison de quelques mille hommes, la plupart milices ou régiments de nouvelle formation et nous y fûmes reçus à coups de canon; il fallait donc commencer par prendre cette ville avant de songer à Badajoz, et c’était déjà un grand obstacle de plus; on se hâta de remuer de la terre et de mettre quelques pièces en batterie afin de jeter des obus dans la ville; la garnison n’opposa qu’une faible résistance, et au bout de peu de jours elle se rendit prisonnière de guerre.
La prise de cette ville nous donna de grands moyens en artillerie, et surtout en poudres et boulets, pour le siège de Badajoz, qui fut aussitôt entrepris; mais c’était un morceau de plus dure digestion.
Nous avions aussi trouvé des vivres et beaucoup de bon vin à Olivenza; le maréchal y établit ses hôpitaux et une petite garnison composée d’hommes malingres; l’administration y resta également pendant tout le siège de Badajoz. (Mémoires de Saint-Chamans)
NOTES
[1] Le pillage est évité grâce à l’intervention de Soult, qui fait un exemple en giflant un soldat pris sur le fait (cité par Nicole Gotteri (« Le maréchal Soult », Paris, 2000).