Louis-René Levassor de Latouche-Tréville (1745-1804)

Louis René Levassor de Latouche naît le 3 juin 1745, à Rochefort, au sein d’une grande famille de marins des Petites Antilles. A 13 ans il entre, en février 1758, dans les garde-marine. Il participe à trois combats de la guerre de Sept-Ans, recevant son baptême du feu en 1759 sur le Dragon, que commande son père. Après être passé sur la Louise et l’Intrépide, il embarque en Méditerranée sur le Tonnant, en 1762, puis repart pour l’outre mer, embarquant sur la Garonne (1763), le Hardi puis la Bricole (1765).

En septembre 1768, il n’a que 23 ans, Latouche est promu enseigne de vaisseau. C’est à cette époque que, sans doute sous la pression de sa famille, il abandonne la marine, pour devenir officier de cavalerie. Il est nommé capitaine en avril 1769, servant comme aide de camp des gouverneurs de la Martinique et de Saint-Domingue en 1770 et 1771.

Mais en 1772, il revient dans la marine comme capitaine de brûlot. Puis il sert à terre, à Rochefort, de 1773 à 1776. La guerre d’Indépendance américaine va lui permettre de s’illustrer.

En 1776, Latouche effectue une mission de transport de poudre aux Etats-Unis. En mai 1777, il est nommé lieutenant de vaisseau, et reçoit le commandement de la corvette Le Rossignol, avec laquelle il escorte des convois côtiers et capture deux corsaires et trois marchands anglais. Puis il prend le commandement de la frégate l’Hermione, transportant, en janvier 1780, le marquis de La Fayette parti soutenir les insurgés américains.

C’est sous le commandement de Des Touches, qu’il fait alors une brillante campagne en Amérique, remportant plusieurs combats, en particulier contre l’Isis (juin 1780) puis contre le Chesapeak (mars 1781). Il est promu capitaine de vaisseau en juin 1781.

Le 21 juillet 1781, avec Lapérouse qui commande la frégate l’Astrée, Latouche attaque, au large de la Nouvelle-Ecosse, un convoi anglais, décimant les navires d’escorte : le Charleston est démâté et prend la fuite, le Jack et la corvette Thorn sont capturés, ainsi que trois navires marchands. Ces navires sont ramenés triomphalement à Boston.

Ayant reçu le commandement du vaisseau Aigle, il transporte avec la Gloire des fonds pour les insurgés et du matériel pour l’escadre de Vaudreuil. Le 5 septembre 1782, après la défaite des Saintes (avril), il coule le vaisseau anglais l’Hector, mais s’échoue à l’embouchure du Delaware. Il y est fait prisonnier par une division britannique le 12 septembre et ne sera libéré qu’à la paix, en 1783.

En 1784, Latouche succède à d’Entrecasteaux au poste de directeur adjoint des Ports et Arsenaux, puis est nommé Inspecteur général des canonniers en 1786, enfin chancelier du duc d’Orléans en 1787. En 1788, il ajoute à son nom celui de Tréville : il se fait désormais appeler Latouche-Tréville.

La Révolution ayant éclaté, Latouche-Tréville devient député de la noblesse en 1789, et siège à la Constituante. Lorsque celle-ci se sépare, en septembre 1791, Latouche-Tréville prend le commandement du vaisseau Languedoc et d’une division de 4 navires, qu’il doit conduire de Brest à Toulon. Là, il rejoint le contre-amiral Truguet, et participe aux opérations de soutien à l’armée d’Italie. Il participe à l’attaque de la Sardaigne, en octobre 1792, qui se solde par l’échec du corps expéditionnaire, débarqué le 14 février 1793, qui est mis en déroute par les Sardes. Il rentre alors à Toulon avec Truguet.

En janvier 1793, Latouche-Tréville est promu contre-amiral. Le 1er janvier, la Constituante déclare la guerre à l’Angleterre, envisageant une descente en Grande-Bretagne. Le 28 mars, il fait adopter par le conseil son projet de débarquement qui prévoit la constitution d’une flottille spéciale de bâtiments légers pour le transport des troupes. Au mois de mars, il est nommé commandant de l’armée navale de Brest. Mais, dénoncé comme noble par ses subalternes, il est arrêté en septembre comme suspect, et passe un an en prison, à la Force, n’étant libéré qu’à la chute de Robespierre.

Le Directoire le réintègre dans son grade en décembre 1795, mais il n’obtient pas de commandement. Latouche-Tréville se retire alors à Montargis.

En janvier 1800, Bonaparte, le tout nouveau Premier consul, le nomme au commandement d’une escadre à Brest. Reprenant l’idée de débarquer en Angleterre, Bonaparte et son ministre, Forfait, décident de reprendre le plan d’une flottille de petits bâtiments. C’est donc naturellement à Latouche-Tréville que le consul confie, au début 1801, le commandement de la Flottille de Boulogne. Celui-ci repousse même, les 4 et 15 août 1801, deux attaques de Nelson contre cette force.

L’amiral Villaret de Joyeuse

La paix d’Amiens signée, Latouche-Tréville est nommé, le 30 octobre 1801, commandant de l’escadre de Rochefort . C’est dans ce port que se réunit la flotte chargée de conduire les 23.000 hommes de l’armée du Rhin destinés à l’expédition de Saint-Domingue, sous les ordres de Villaret de Joyeuse. Arrivé le premier devant l’île, Latouche-Tréville s’empare, avec le général Boudet, de Port-au-Prince et Léogane. Il obtient même le ralliement pacifique du général noir Laplume, tandis que dans le sud le général Leclerc bat l’armée noire de Toussaint et Christophe.

Latouche-Tréville reste à Saint-Domingue à la tête d’une escadre de 4 vaisseaux, 9 frégates et 5 corvettes. Lorsque la nouvelle insurrection éclate, en mai 1802, l’armée de Leclerc, décimée par la fièvre jaune, ne peut résister. Latouche-Tréville défend difficilement les ports attaqués, confiant la défense de la station ouest à l’amiral Willaumez et prenant le commandement de celle du sud. En octobre 1803, il obtient un sauf conduit des Anglais pour rentrer en France.

Nommé vice-amiral en décembre 1803, Latouche-Tréville prend la tête de l’escadre de la Méditerranée, faisant hisser sa marque sur le vaisseau Bucentaure. Il repousse périodiquement les forces de Nelson qui bloquent le port. Un nouveau projet de débarquement en Angleterre est mis sur pied, constitué d’une flottille de 2.500 chaloupes et canonnières. Napoléon place alors en Latouche-Tréville tous ses espoirs, car il doit prendre la tête de l’escadre destinée à tenir la Manche le temps de ce débarquement.

Mais l’amiral est emporté par la maladie, le 19 août 1804, âgé de seulement de 59 ans. Il s’éteint à Toulon, sur son vaisseau qu’il n’a pas voulu quitter. « Un amiral est trop heureux lorsqu’il peut mourir sous le pavillon de son vaisseau« , avait-il déclaré. Sa mort est gardée secrète, pour que les Anglais n’en aient pas connaissance. C’est Villeneuve qui le remplace à son poste.

 

LIEUX DE MÉMOIRE

  • A Rochefort, au 31 de la rue Docteur-Pujos, une plaque est apposée sur la facade de l’hôtel où est né et a vécu l’amiral Latouche-Tréville.
  • A Montargis (Loiret), au 23 de la rue Neuve-du-Pâtis, la maison Désormeaux fut la demeure du vice-amiral Latouche-Tréville
  • A Villemandeur (près de Montargis – Loiret), le château de Plateville appartint au vice-amiral Latouche-Tréville.
  • A Saint-Mandrier-Sur-Mer (Var), sur la route du cap Cépet, dans la nécropole maritime de Saint-Mandrier (cimetière franco-italien) monument du vice-amiral Latouche-Tréville (pyramide au centre du cimetière) et PC rapelleant la mort de l’amiral à bord du Bucentaure.