L’Italie Napoléonienne (1802-1814)
Administration d’un Royaume
La république italienne, par sa constitution, consacre une nouvelle Italie où le Tiers Etat est représenté dans la composition du Corps Législatif, mais aussi du gouvernement. L’Italie n’est plus le jardin de l’Europe où les nations en guerre puisaient des ressources, c’est un état uni, constitutionnel et presque indépendant [1]A. Pingaud, op.cit., vol. II, p. 487. . La république italienne n’est en fait que la phase où on prépare la future Italie : des projets de Code de lois sont mis en place, l’instruction publique commence à être organisée. La république italienne applique concrètement ce que la Cisalpine n’avait posé qu’en théorie.
L’administration y est en évolution se modelant par les expériences. Le Royaume d’Italie est la concrétisation de ces projets et le résultat des expérimentations. L’Italie de cette période (1799-1805) est sans cesse changeante sur le plan institutionnel mais ce sont ces changements qui permettront au nouveau royaume d’avoir des institutions plus solides et abouties pendant 10 ans. La société elle-même est très différente de celle de 1796, modifiée par les lois et les impôts nouveaux. L’Italie ayant sa propre armée, son propre gouvernement et son territoire possède en droit toutes les caractéristiques d’un état indépendant. Le Royaume d’Italie doit consacrer cet état de fait et dans une évolution logique, le consolider. L’article 1er de ses statuts le précise, l’attachement à la France n’est que provisoire : « la couronne d’Italie ne pourra plus être réunie à la couronne de France ». Napoléon n’accorde pas seulement la situation de l’Italie à celle de la France il cherche aussi, par ses réformes constitutionnelles, à accélérer les réformes mises en œuvre et consacrer des changements nécessaires mis en avant par la pratique.
Une administration héritée de la république
L’administration judiciaire est la première innovation institutionnelle de la république Italienne, Napoléon exige d‘ailleurs de continuer l’œuvre de simplification dans la nouvelle constitution de 1805. La Cisalpine n’avait pas réellement réformé la justice, elle s’était contentée d’y ajouter les lois françaises sans se soucier des textes déjà existants. La grande réforme judiciaire fût donc le fait de la république italienne. La réorganisation judiciaire est prévue dans le titre XIII de la constitution de Lyon, puis dans la loi organique d’application du 22 juillet 1802, qui établit une justice sur quatre degrés où le premier degré est un « conciliateur ». L’appel se fait devant les tribunaux dans les vices préfectures ou les deux tribunaux de révision de Milan et Bologne. Le dernier ressort est la Cour de Cassation de Milan juge de la légalité. Cette administration adaptée au particularisme italien reste en application dans ses grandes lignes jusqu’à la fin de l’époque napoléonienne.
Le système pénal de la république italienne est inachevé et il faut attendre que le système pénal français soit mis en place pour que l’Italie ait une organisation définitive. L’article 117 de la loi organique reconnaît d’ailleurs le caractère inachevé de l’organisation judiciaire et énonce que des lois futures doivent en préciser les détails. Les tribunaux de commerce sont créés le 26 août 1802, il faut attendre le décret du 23 novembre 1803 pour que l’on fixe précisément les pouvoirs du ministre de la Justice. Dans les faits la mise en place de cette organisation est très difficile, car le recrutement des magistrats est quasi impossible pour des problèmes de fierté municipale et de traitements trop faibles.
Des tribunaux militaires sont instaurés pour pallier au manque de Cours. La loi du 1er avril 1804 instaure les Cours d’appel dans sept départements et celle du 1er juillet dans cinq autres. Le cas des prêtures est encore plus grave, la première ne pouvant être créée que le 6 août 1804 [2]A. Pingaud, op.cit., p.308-320.. Ainsi la république italienne a dans les textes un système judicaire organisé, mais dans les faits le territoire est très mal desservi.
Autre institution héritée de la république Italienne : les préfectures. Le royaume est divisé en départements depuis la première Cisalpine, mais le décret du 8 juin 1805 va calquer l’organisation Italienne sur le modèle Français. Les départements, atteignant un nombre maximal de vingt-quatre [3]A. Pillepich ,op. cit., p.84,. Ces départements sont dans l’annexe., ont une population moyenne de 300 000 habitants. A leur tête se trouve un préfet : ils furent cinquante-deux en tout. L’organisation des préfectures va être modifiée lors du changement de régime. Tout d’abord la nomination des préfets ne relève plus du vice-président mais du Roi. Sous la république, le préfet est assisté de deux lieutenants et de l’administration départementale, comité nommé par le vice-président.
Sous l’administration royale, ces organes sont remplacés par un conseil préfectoral, dont le travail de justice administrative dépend du Conseil d’Etat [4]A. Pillepich, op.cit., p.107.. Chaque département a son conseil général, dont les membres sont nommés par le vice-roi, qui se réunit deux fois par an, puis suite aux réformes budgétaires, une fois par an. Le 9 juin 1805, Napoléon 1er crée le Collège des Auditeurs qui est le Tribunal suprême en matière de contentieux administratifs.
Les vice-prefeturra [5]Sous-préfectures en Italien., instaurées en 1802 puis totalement abolies en 1804, sont restaurées en 1805. On en comptera jusqu’à soixante-huit. La grande majorité du personnel administratif est recrutée parmi les notables locaux. Le principe est que les hauts fonctionnaires doivent pratiquer en dehors de leur localité d’origine. Les cas de hauts fonctionnaires français dans l’administration locale sont très rares.
Sur le plan législatif, une codification de la procédure civile a pris forme, la loi du 14 avril 1804 sur la « méthode judiciaire civile » règle le problème des lois applicables et des juridictions compétentes, des modes de saisines et de preuves, en 764 articles. Son application est fixée au 1er janvier 1805.
References[+]