L’Italie Napoléonienne (1802-1814)
La Constitution Italienne est promulguée à Milan le 15 février 1802. C’est le point de départ de l’Italie Napoléonienne. Bonaparte disparaît pour laisser place à Napoléon [1]Le Prénom n’apparaît dans un document officiel qu’à partir du plébiscite sur le Consulat à vie, voir Jean Tulard, Napoléon, éd. Le grand Livre du Mois/ Fayard, 2002, p.163..
L’Italie s’organise développant les universités et son armée jusqu’en 1804. L’administration pendant ces deux années doit faire accepter le nouvel état de choses et la fin des municipalismes : but la constitution. En France le 18 mai 1804, Napoléon Bonaparte devient Empereur des Français, il convoque Melzi pour les festivités du Sacre et lui fait comprendre que l’Italie doit se conformer à ce changement constitutionnel [2]G. Bourdin, Formation de l’unité Italienne, Collection Amand Colin n°116, Paris 1938, p.51-53..

Cependant la république italienne n’est déjà plus celle de 1802, les annexions successives et le concordat de 1803 l’ont déjà modifiée. La transformation en Royaume n’est donc pas soudaine, on peut dire que la république italienne n’a vécu que pour servir de passage vers une Italie plus grande, plus stable. Tout comme la France qui a évolué sous le Consulat, l’Italie de 1804 n’est géographiquement plus celle de 1800. Les modifications institutionnelles mènent au statut constitutionnel du 17 mars 1805. Napoléon y a déjà pratiqué sa politique, plus qu’une Italie Française on peut réellement parler d’une Italie Napoléonienne [3]JeanTulard, op.cit., p.230. car il l’a fait évoluer comme la France. Cette similitude dans les politiques Françaises et Italiennes de Napoléon se remarque à travers les passages du Consulat à l’Empire, et de la République au Royaume. Le particularisme italien entraîne évidemment des réformes propres, le Royaume n’a pas la même fonction en Italie que l’Empire en France. L’un continue les réformes en Italie et affirme l’unité nationale alors que l’autre enterre la Révolution et tend vers une extension internationale. Ainsi avec deux politiques similaires Napoléon tend vers deux buts très distincts.
Il reste le maître des évolutions constitutionnelles et institutionnelles de l’Italie, lui qui en est le créateur. En effet si Melzi pensant avoir les mains libres, ralentit l’application du concordat et envoie un émissaire négocier avec l’Autriche, ses plans sont très vite contrecarrés après la proclamation de l’Empire. Napoléon a un plan pour l’Italie qu’il entend appliquer sans condition.
Création d’un Royaume
Le Corps Electoral est réuni le 16 mai 1802 et le Corps législatif le 24 juin, l’Italie lance alors des réformes comparables à celles du Consulat en France. Il s’agit d’abord de réaliser les missions que lui a données la constitution : l’organisation des tribunaux, l’administration locale, l’Institut, la police et l’Instruction Publique. Les institutions ne sont pas centralisées à Milan mais distribuées entre la capitale et Bologne L’unité n’étant pas encore complète dans les mentalités [4]Alain Pillepich, Napoléon et les Italiens, NM éditions/ Fondation Napoléon, 2003, p.56 et suiv., l’Italie reste sous la tutelle militaire de la France, les troupes Françaises si elles se sont considérablement réduites restent toujours en place et sont encore payées par la république sœur. La loi de conscription du 13 août 1802 n’ayant que peu de succès, l’armée italienne dépend encore des français, elle est d’ailleurs envoyée au camp de Boulogne. Le territoire même de l’Italie dépend de la France qui décide du sort des républiques voisines avant et après le sacre du 2 décembre 1804. Une nouvelle politique religieuse est mise en place par l’Empereur. Si la religion catholique a toujours été favorisée en Italie au niveau légal et constitutionnel, le pays bénéficiera aussi des travaux de l’Empereur, qui aboutissent à un concordat Italien. Tout sera prêt pour un changement de régime, changement voulu et organisé par l’Empereur lui-même. Enfin dernière touche à ce renouveau de l’Empire Carolingien, Napoléon 1er prend la couronne de Fer. L’Italie est ainsi définitivement liée à la France puisqu’elles partageront la même dynastie. L’Italie devient un royaume toujours séparé de Naples et Rome mais lié à la France. Ainsi s’achève l’œuvre de Bonaparte, les hostilités avec l’Angleterre ont déjà repris, mai 1803, quand a lieu le Couronnement. L’Italie est devenue un allié et ne sert plus un théâtre d’opérations.

La fin des républiques sœurs
La république italienne s’est déjà étendue sur le Piémont et vers l’Est avant la Consulte de Lyon. Napoléon va simplifier encore la carte de la péninsule italienne en réorganisant les voisins de « sa république ».
Le Piémont depuis la paix d’Amiens n’avait pas de statut clair. Son annexion rapide à la France n’a duré qu’un temps et le Premier Consul doit statuer sur l’avenir de cette zone tampon entre l’Italie et la France.
Le Tsar est le protecteur du roi de Sardaigne ce qui refroidit les appétits de la France. Mais l’assassinat de Paul 1er va changer la donne considérablement. Le retour du Piémont sous l’autorité de Charles-Emmanuel IV en aurait fait un bastion anglais ce qui est inacceptable au sein du futur Empire. Le 12 avril 1801, un arrêté est rendu, le Piémont devient une division militaire sous le commandement de l’administrateur général Jourdan. Des préfectures sont instaurées sur le modèle français. Le 31 mars 1801 l’armée piémontaise, formée par Bonaparte en 1800, est incorporée à l’armée Française. Charles-Emmanuel IV abdique en faveur de son frère, Victor-Emmanuel que la France reconnaît comme roi de Sardaigne… Le 11 septembre 1802, le Piémont devient six départements français.
Après le retour de la paix et les traités successifs, la Toscane aussi doit évoluer, dans le plan italien de Napoléon. Après plusieurs projets en accord avec l’Autriche et l’Espagne, on finit par la donner, le 21 mai 1801 par le traité d’Aranjuez, au fils du duc de Toscane : le prince Louis qui devient ainsi Roi de Toscane. L’Autriche a ainsi définitivement quitté la péninsule.

Après le décès de l’Infant le 9 octobre 1802, Parme est occupé par Moreau Saint-Méry qui en devient administrateur. Melzi la réclame immédiatement pour la République Italienne mais finalement, le traité du 23 octobre 1802 transfère à la France : « tous les droits et pouvoirs inhérents à la souveraineté dans les Etats de Parme, Plaisance et Guastalla »[5]A. Fugier, op.cit., p.135.. Parme reste donc sous l’administration de Moreau Saint-Méry. La Toscane devient Royaume d’Etrurie. Ainsi Napoléon prépare la nouvelle Italie formée non plus de républiques sœurs mais de royaumes vassaux. Alors qu’il a chassé les Habsbourgs d’Italie, les Bourbons lui doivent leur nouveau trône.
Après Marengo, la république Ligurienne doit changer de statut constitutionnel. Le général Dejean a pour mission, selon l’arrêté du 4 messidor an VIII, de réorganiser les institutions. Il est assisté d’une commission de sept membres et d’une Consulte de trente membres. L’arrêté du 18 avril 1801 clarifie l’avenir de la Ligurie puisqu’il en fait une division militaire dépendant du ministère de la Guerre [6]G.Bourdin, op. cit., p.48.. Une constitution est promulguée le 24 juin 1802, c’est une copie de la constitution italienne. La seule différence notable réside dans le pouvoir exécutif, en effet celui-ci est détenu par une commission, le Magistrato supremo, rassemblant un Doge et des représentants des sénateurs. Le texte constitutionnel est en lui-même plus républicain que celui de sa voisine, la devise « Liberté, Egalité et Représentation Nationale » figure en tête, on ne trouve la référence au catholicisme qu’à l’article 13 et son article 14 énonce les objectifs militaires que les Ligures doivent remplir dans le cadre de leur coopération maritime avec la France. Cette constitution sans exécutif fort entraînera des problèmes d’interprétation sur le pouvoir du Magistrato Supremo. Le 25 mai 1805, Saliceti, qui remplace Dejean depuis 1803, fait voter par le Sénat un texte réclamant le rattachement à la France. Le 4 juin la demande officielle est faite à l’Empereur qui l’accepte, désormais la Ligurie forme les départements français de Gênes, Montenotte et les Apennins [7]A. Fugier, op.cit., p.174-175..
La République italienne, seule création de Bonaparte, survivant à la proclamation de l’Empire, ne retire que bien peu d’avantages de ces annexions et changements de statuts mais sa place en Italie en est affermie. La république doit maintenant adapter sa politique interne à celle de la France pour changer à son tour de régime. Ainsi l’évolution du nord de l’Italie sera achevée.
References[+]
↑1 | Le Prénom n’apparaît dans un document officiel qu’à partir du plébiscite sur le Consulat à vie, voir Jean Tulard, Napoléon, éd. Le grand Livre du Mois/ Fayard, 2002, p.163. |
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↑2 | G. Bourdin, Formation de l’unité Italienne, Collection Amand Colin n°116, Paris 1938, p.51-53. |
↑3 | JeanTulard, op.cit., p.230. |
↑4 | Alain Pillepich, Napoléon et les Italiens, NM éditions/ Fondation Napoléon, 2003, p.56 et suiv. |
↑5 | A. Fugier, op.cit., p.135. |
↑6 | G.Bourdin, op. cit., p.48. |
↑7 | A. Fugier, op.cit., p.174-175. |