Le département de l’Ain durant le Premier Empire – Police et subsistances

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“Le 8 février 1815, à Carouges et à Genève, se forme même une compagnie de 100 contrebandiers à cheval structurée sur le modèle militaire avec des sous officiers et des officiers.”

A l’avènement du Directoire, le prestige des postes administratifs, très haut entre 1791 et 1794, tombe en désuétude. Durant le Directoire beaucoup de municipalités de canton, telle celle de Trévoux ou d’Aranc, sont très désorganisées et laissées à l’abandon :

« si le département continue à garder le silence à cet égard, l’administration municipale de Trévoux se verra contrainte de cesser toutes sortes de travail puisqu’elle n’a plus ni papier, ni registres, plumes etc » ((Lettre de Pété au département, 5 pluviôse an IV. A.D. Ain 12L.)).

Dans l’Ain, cette lente déliquescence se traduit par le retour des prêtres réfractaires et le pullulement des bandes armées qui mènent à la vexation du « petit nombre de républicains de ce département » ((Pétition des républicains de Pont-de-Vaux au Directoire, 15 pluviôse an VI. A.N. FIII 211 d 964.)), notamment en Bresse. Si l’Ain ne compte que 69 missions de prêtres réfractaires en 1793 et 1794, leur nombre se multiplie par 10 entre 1795 et 1797, pour un total de 665 missions, par le manque de moyens et d’application malgré des mesures politiques largement aussi strict que sous la Convention.

Politiquement, la lente main mise réactionnaire de 1795 et l’utilisation stratégique du département par les espions de Pitt, entraîne une réaction jacobine qui enchante les républicains, qui pouvait « à peine respirer« ((Pétition des républicains d’Ambérieu en Bugey, n.d. A.N. A.FIII 211.)), se manifeste par une reprise en main des choses publiques.

Outre la réorientation et le recyclage politique de bon nombre d’anciens jacobins, sans-culottes et commissaires, une vague de journaux contre-révolutionnaires et antirépublicains sont interdits dans le département de l’Ain les 19 et 22 fructidor an V, en maintenant, toutefois éloigné des postes clefs les vainqueurs de 1789 au civisme républicain peut être encore suspect.

Dès le commencement du Directoire, avec la relâche politique, les bandes organisées en provenance de Lyon envahissent le sud et l’ouest du département de l’Ain. Le 1er brumaire an 4, une troupe de 25 à 30 hommes pille le château de Leyment. Afin de réduire l’accès aux armes, le 24 Brumaire, suite à un arrêté du Comité de Sûreté Générale, l’administration du département de l’Ain prend un arrêté qui interdit la vente  et l’usage des épées, cannes épées, sabres, poignards et bâtons ferrés. Ce qui n’empêche pas l’attaque du château de la Servette, le 1er nivôse, par une troupe de 15 à 20 personnes armées.

L’an V, est aussi marqué par une forte insécurité, ainsi le 12 frimaire an V, une dizaine de brigands pénètrent chez un hôtelier de Briord, en pluviôse c’est Loyette qui est visée. En l’an VI, les bandes deviennent plus organisées et surtout plus entreprenantes. Le 13 vendémiaire, quatre brigands attaquent le coursier de Lyon à Strasbourg. Le 28 frimaire, une troupe armée vole de la farine saisie dans les bureaux de la douane du Grand Sacconnex. En germinal, des brigands s’attaquent à la diligence d’eau de Chalon à Lyon, au port de Riottier. Le 30 floréal, des chauffeurs attaquent une ferme isolée dans la commune de Chaleins.

D’une manière générale, les administrations cantonales se plaignent de la recrudescence des infractions à la loi. Si les brigands trouvent, sous le Directoire, des conditions favorables à leurs forfaits, ils sont indirectement aidés par le manque de motivation de la gendarmerie et l’insuffisance de sécurité des prisons de Bourg, Trévoux et Châtillon-sur-Chalaronne, dont les administrateurs se plaignent qu’elles ne soient “ pas plus solides et sures ” ((Lettre de l’administration municipale du canton de Châtillon-sur-Chalaronne, 9 germinal an 7. A.D. Ain 2L non classé.)). Face à l’immobilisme de la gendarmerie, le 19 nivôse V, les fonctionnaires de Saint Paul de Varax s’arment pour essayer de contrer les brigands.

Le coup d’état de Saint-Cloud, le 18 brumaire an VIII, auquel participe physiquement Jacques Paul Clément Vézu, lieutenant des grenadiers à pied de la Garde, met un terme à la révolution politique. La situation du département de l’Ain n’est pas très bonne, elle n’a peut être même jamais été économiquement aussi mal.

Politiquement, le coup d’état du 18 brumaire est très favorablement accueilli par l’administration du département de l’Ain et les fonctionnaires qui se rallient vite au régime consulaire. En effet, les administrateurs adhèrent sans retenue à l’idée de prospérité, tandis que les citoyens accueillent favorablement ce nouveau régime qui répond à leur vœu : l’affermissement du gouvernement et la fin de l’esprit de parti.

Judiciairement, le coup d’état du 18 brumaire marque un retour à l’ordre et à la sécurité publique ((le 21 messidor an IX, le ministre de la Police Générale ordonne l’arrestation du prêtre Rongier, chef de bande des royalistes du Midi, échappé de Lyon et réfugié à Pont de Vaux.)) :

“ Les évènements des journées de 18 et 19 brumaire semblent déjà produire dans le canton d’heureux effets ; les républicains redoublent d’énergie et de courage pour seconder le gouvernement dans les mesures qu’ils prend pour rétablir l’ordre, l’union et la tranquillité parmi les citoyens ” ((Compte rendu du commissaire du gouvernement près l’administration du canton de Châtillon-en-Michaille, 10 frimaire an VIII. A.D. Ain 2L.)).

Il convient désormais d’affermir la sécurité. Des mesures exceptionnelles sont prises pour la sûreté des biens et des personnes, de vastes chasses aux conscrits réfractaires et aux déserteurs sont organisées avec des troupes. Au début du Consulat, la région la plus violente est le Bugey, avec 34% des crimes commis, suivi de la Bresse, 26% et la Dombes, 15%.

La sécurité publique

Joseph Fouché
Joseph Fouché

Une des premières mesures consulaires est la mise en place d’une politique de sécurité publique sous la férule du ministère de la police dirigé par Fouché, le 28 ventôse an IX. Cette politique inclut le maintien de l’ordre social qui demande la mise en place d’un réseau où l’officier de police doit être informé sur les individus incarcérés et acquittés pour des faits relatifs à la tranquillité et la sûreté publique mais aussi sur le vagabondage.

Cette politique est mise en place dans l’Ain dès le 17 germinal an IX et se traduit, entre autre au niveau préfectoral, par l’envoi hebdomadaire, par le gendarmerie de rapports. Car, même si l’Ain de l’an VIII est bouleversé par la présence des réfugiés patriotes italiens, la délinquance et l’insécurité sont rares dans les campagnes et souvent le fait de vagabonds.

Cette police sécuritaire porte ses fruits. Dès l’an IX, les brigandages sur les routes s’atténuent fortement ainsi que les attaques domiciliaires, très répandues en l’an VII et l’an VIII. Les vols à main armée chutent par l’organisation efficace de la police dans les communes, notamment dans les environs de Lyon. La police dite politique reste sur le qui vive et continue d’enquêter sur les opposants royalistes plus que jacobins.

D’un point de vue social, des mesures sont prises à l’encontre de la mendicité par l’obligation faite aux communes de les nourrir et en cas extrêmes, de les arrêter.

Toutefois la violence physique reste. Pour l’atténuer, un contrôle des armes est mis en place dès l’an VIII avec, en premier lieu, le contrôle et la sécurisation des stocks de poudres privées. Ainsi, les marchands débitants de poudre doivent se faire connaître et obtenir une autorisation auprès du préfet, ce qui est le cas d’un marchand de Polliat qui obtient une autorisation pour venir se servir au magasin de poudre de Bourg le 18 floréal an VIII.

A ce contrôle de la poudre suit un contrôle des armes. Les bons citoyens sont autorisés à être réarmés par « simple précaution » ((A.D. Ain 4M40.)). Ce réarmement a pour but avoué de lutter contre les bêtes nuisibles et féroces « qui ravagent et désolent les campagnes » comme les loups.

En effet, la période consulaire et impériale marque la main mise totale de l’homme sur la nature par l’éradication systématique du loup contre lequel sont réinstaurés, en l’an V, les primes d’encouragement puis à partir de 1807, avec la découverte et la vérification de la contagion de la rage par les loups à la Société d’Emulation de l’Ain Bourg, sont mis en place des battus.

Le Premier Empire est la période d’intensification militaire de la chasse aux loups et aux ours : sur 29 battues organisées de l’an II à 1844 dans l’Ain, 12 se passent en 1808 et 26 concernent les loups. Toutefois, le système de battue à ses limites, car il mobilise beaucoup d’hommes et coûte cher sans rapporter beaucoup : sur 18 battues organisées de l’an II à 1808, seulement douze loups sont déclarés tués.

Toutefois, cette politique ne fait pas disparaître la délinquance quotidienne, inhérente au caractère humain. La délinquance consulaire, vue à travers les rapports de gendarmerie au préfet de l’Ain en l’an IX, est aussi bien le fait de paÿs que d’étrangers au département, puisque 55% des personnes arrêtées sont des gens de l’Ain. C’est une délinquance mature et virile, puisque la moyenne d’âge est de 36 ans (le plus jeune a 13 ans, le plus vieux 75) et que les femmes ne sont que 9% des personnes arrêtées, ce qui met en lumière une vision de la femme pas si nourricière et attentive que cela.

Cette délinquance consulaire dans l’Ain se compose, en l’an IX, essentiellement de vols, 32%, de défauts de passeports, 25% puis chute rapidement dans les voies de faits et outrage, reflets d’un quotidien avec 9% des cas, les rixes et violences, 7%, avec la signification des cas de violences faites aux femmes, puis les assassinats, 6%, assez souvent liés au vol, les vagabonds et les mendiants, 6% puis les faux et les escrocs, 4%.

Il est à noter la chute de la criminalité et de la délinquance à la fin du printemps et en été, au moment où le département, rural, occupe les mains par les travaux des champs. En tout, en l’an IX, la gendarmerie de l’Ain arrête 169 voleurs, 30 assassins et 340 vagabonds. Peu de chose pour un département à la population de 283 000 habitants.

L’an IX, est donc une année calme, malgré un gros vol de 30 000 francs par 3 individus à Caluire, le 6 frimaire.

Toutefois, l’an X, avec le départ du 11e dragons, qui participait activement à la sécurisation du département, la violence ressurgit, même si les délits sont rares. Les attaques sont peu nombreuses, mais rapides et violentes le long du Rhône qui sert d’échappatoire. La dispersion du 26e chasseurs re-sécurise les routes.

L’an XI est marqué par l’effort commun, de la gendarmerie, de l’armée et du préfet, qui donne une cohésion qui renforce la sûreté publique et fait reculer la grande délinquance et le crime organisé. Pour cela, dès le début de l’an XI, le préfet s’oppose à la multiplicité des lois en matière de police, qui risque de rendre le tout incohérent avec l’apparition de conflit entre lois, d’oppositions et de superposition. Au début de cette année, sont mises en place la police municipale de Bourg et de Montuel, appuyée par des agents secret financés par le police de Lyon.

Durant l’hiver de l’an XII, des mises en place de surveillance secrètes se font dans l’Ain, visant les fauteurs de trouble du repos public, autres que les affaires particulières. Le 29 nivôse, le préfet envoie des directives pour augmenter la surveillance des évasions et les attaques contre les fonctionnaires publics et leurs propriétés.

L’année 1807 est calme, le préfet ne déplore pas d’attentat aux personnes et aux biens, pas de brigandages sur les routes : « les personnes et les propriétés jouissent de toute la sûreté que peut procurer un bon gouvernement » ((Rapport du préfet de l’Ain du 4 juin 1808. A.D. Ain 4M.)). Toutefois en 1808, il fait renforcer le contrôle des passeports, ce qui donne, en 1809, un département calme où l’on ne déplore aucun trouble à la sûreté et la tranquillité des personnes.

Durant le 4e trimestre de 1811, les quelques infractions et délits graves concernent surtout des délits ruraux qui ne consistent qu’en pâturages illicites dans les bois et quelques mises sous surveillance d’émigrés amnistiés.

La sécurité publique reste calme durant le 2e trimestre 1812. Le département ne déplore pas les méfaits de grands criminels « qui affligent l’humanité » et les biens et personnes ne subissent que peu de délit. La loi sur les jeux s’applique toujours avec vigueur, interdisant les maisons de jeux publiques, sans doute au profit de tripots et de tables clandestines ponctuelles, comme à Rennes. L’ordre et la tranquillité continuent de régner dans l’Ain durant le 2e trimestre 1812.

Ce calme est troublé avec l’arrivée de la guerre. En 1815, les troubles et les espérances nés des événements politiques conduisent à un regain de violence, notamment, dans un premier temps contre les incarnations de l’Ancien Régime que sont les églises et leurs desservants (violences commises dans les presbytères d’Attignat et de Polliat, meurtre du curé de Saint André de Corcy le 5 juin), mais aussi d’une manière générale contre les personnes et surtout leurs biens (vol à main armée à Condessiat le 10 mai). Dans un second temps, une violence étatisée à l’encontre des hommes de l’Empire, féroce, violente et longue dans le temps qui perdure, à travers la censure jusqu’en 1823.

Les événements politiques ramènent à la frontière de l’Ain de très graves problèmes de contrebande à la frontière suisse.

Dès le 16 novembre 1814, le directeur des douanes avoue au préfet de l’Ain l’insuffisance des moyens mis à sa disposition pour lutter contre une contrebande diurne et nocturne qui utilise des bateaux sur le Rhône pour transporter de Suisse des marchandises mais aussi des troupeaux de moutons et de cochons à Collonges.

A partir du mois de décembre, cette contrebande, qui n’est « plus comme autrefois » ((A.D. Ain P 292.)), s’organise militairement ((Le 8 février 1815, à Carouges et à Genève, se forme même une compagnie de 100 contrebandiers à cheval structurée sur le modèle militaire avec des sous officiers et des officiers.((Le 8 février 1815, à Carouges et à Genève, se forme même une compagnie de 100 contrebandiers à cheval structurée sur le modèle militaire avec des sous officiers et des officiers.)) en groupe de 50 hommes dont 20 armés sous l’égide de chefs sortis de l’armée impériale auxquels la population est ouvertement favorable ((Le 24 novembre 1814, les habitants de Préon « sont gravement compromis » dans l’attaque du bureau des douanes de Bons. A.D. Ain P 292.)).

La contrebande nocturne est la plus précieuse (tissu, poudre et tabac) mais aussi la plus dangereuse. Les altercations armées deviennent presque quotidiennes ((Des combats opposants contrebandiers et douaniers ont lieu les 23 octobre à Ferney, 8 novembre au Crédo et à Dôle et le 24 novembre 1814 à Bons où des ballots de tabacs sont exfiltrés par la force du bureau des douanes.)) et sont parfois violentes, tel l’affrontement du 7 décembre vers Fort l’Ecluse où un douanier est blessé et 15 ballots de marchandise saisis.

Si en 1814, le découpage de la frontière rend difficile la lutte contre la contrebande genevoise ((Problème de l’enclavement suisse et de la non présence de troupes la rivière l’Arve.)), en 1815 signature du traité de Vienne en 1815, cède six communes françaises, Versoix, Preny-Chambésy, Collex-Bossy, Grand-Saconnex, Meyrin et Vernier à Genève. Une nouvelle frontière fut établie et matérialisée par un bornage.

Les fléaux sociaux : le vagabondage et la mendicité

Durant le Directoire et le Consulat, on assiste, en France à un accroissement du nombre de mendiants.  Afin de juguler cette plaie sociale et différencier les pauvres des mendiants, Napoléon interdit la mendicité en 1808 et demande la création de dépôt de mendicité.

Dans l’Ain, ce sont les mauvaises années de récoltes de 1810 et 1811 qui participent à accroissement du nombre de nécessiteux pour qui la solidarité institutionnelle ou privée entre en œuvre leur donnant ainsi le bénéfice de secours pour vivre. Mais, hormis cette pauvreté de circonstance, durant le 4e trimestre de 1811, l’Ain qui compte peu de mendiants, mais beaucoup de vagabonds, en voit arriver dans les villes. Ce sont des petits savoyards et de mendiants lyonnais partis de la capitale des Gaules où ils sont traqués. Afin de juguler cette misère sociale, le préfet fonde alors beaucoup d’espoir sur l’ouverture prochaine du dépôt de mendicité pour réduire la mendicité en ville. Avec la création et l’ouverture du dépôt de mendicité, le 16 mai 1812, la mendicité est réputée en baisse dans l’Ain, le 13 novembre 1813, alors que la mesure n’a pas cette efficacité en France.

 

L’économie et subsistances

Economiquement, l’Ain reste depuis la fin de l’Ancien-Régime et les essais de proto-industrialisation des premières années de la Révolution, un département axé sur l’exploitation du sol. Le commerce départemental peu actif subit de plein fouet le blocus et la guerre maritime dès 1809. De même, le débouché des produits agricoles est réduit surtout à cause du prix maintenu bas de ces denrées qui nuie à l’écoulement et aux producteurs ce qui conduit à un malaise général dans le monde rural alors que Lyon, voisine, subit de plein fouet une grave crise économique à partir de février 1810.

En effet, même si les récoltes sont réputées bonnes depuis le Consulat, voir depuis 1799, le prix du vin, pour qui les débouchés sont retreints, tombe à bas prix, ce qui participe à l’alcoolisation  de la société. L’Ain ne connaît donc pas de problème de subsistance jusqu’à l’hiver 1811. En effet, l’extrême médiocrité de la récolte de blé, toutefois compensée par une grande abondance de maïs et de sarrasin, et la mauvaise récolte de 1810, jettent dans la pauvreté une partie du petit peuple des campagnes.

La disette touche surtout le froment et le seigle à cause de gelées tardives au 1er avril 1812 qui provoquent une hausse du prix du grain. Toutefois le peuple des campagnes arrive à se nourrir de maïs, de sarrasin et de pommes de terre dont la plantation avait été encouragé en l’an II et la libre circulation des grains est maintenue et les marchés locaux sont approvisionnés au détriment de ceux de Lyon.

 

L’esprit publique

La proclamation du Directoire n’enthousiasme pas les foules, ni l’esprit public général comme peut le faire la mise en place du Consulat, lié à la paix d’Amiens. L’Ain est donc tout gagné à la cause napoléonienne. Durant le 1er trimestre an XI, le préfet s’enthousiasme d’une population départementale très attachée au gouvernement et soumis aux lois bien que la concorde religieuse ne soit pas encore rétablie.

Au printemps de l’an X, l’esprit public départemental reste très bon. Le gouvernement est aimé et respecté. Les autorités bénéficient de la considération qu’exige leur fonction alors que l’administrateur et le fonctionnaire sont appelés à être un exemple et un modèle moral. Le passage de Napoléon à Bourg et dans un partie du département est très important dans la mobilisation idéologique et l’adhésion populaire au gouvernement, qui se traduit après son passage par des contributions payées sans effort.

De même, durant le 3e trimestre 1806, le bon état d’esprit des habitant se matérialise au moment du départ des conscrits. Le département est gagné par l’esprit militaire surtout grâces aux préparatifs de guerre avec la Prusse. Ce bon état d’esprit populaire se manifeste par l’absence d’entraves aux impôts.

Le passage des troupes, en 1809, entraîne des fêtes et des réjouissances populaires et publiques spontanées « auxquelles toutes les classes de citoyens ont pris part ». Il y a alors un réel sentiment d’adhésion au système impérial traduit par un état d’esprit des habitant bon, qui sont soumis aux lois, toujours matérialisé par les non difficultés du recouvrements des contributions, voir au contraire.

Les habitants de l’Ain prennent vite goût à la gloire et aux victoires des troupes françaises. La campagne d’Allemagne de 1809 suscite beaucoup d’intérêt et les succès d’Eckmühl, Essling, Raab et Wagram, ont un effet positif sur le moral et l’esprit populaire.

Wagram - Gros
Wagram – Gros

Alors que la Grande Armée se prépare à la campagne de Russie, à la fin de l’année 1811, l’esprit public départemental reste bon. La population est toujours soumise aux lois et confiante dans le Gouvernement. De plus elle est profondément attachée à Napoléon. Cet attachement inaltérable à la personne impériale se matérialise par la bonne rentrée des contributions malgré la médiocrité des récoltes. Durant le 2e trimestre 1812, alors que le Grande Armée marche étrangement victorieuse dans les plaines russes, l’esprit public des habitants de l’Ain est bon.

Si la fin de l’Empire n’est pas vécu avec passion et le retour de la Monarchie fêtée sans ivresse, le retour de Napoléon, en mars 1815, donne lieu à Bourg à de véritables scènes épiques. Ainsi, les soldats du 76e de ligne, en garnison dans la ville, chasse le préfet et le maire alors que la foule hisse le drapeau tricolore. De leurs côtés, les patriotes et les partisans de la Révolution et de l’Empire se retrouvent à Lyon lors d’une Fédération.

Mais les événements militaires en Belgique ramènent la Monarchie. Et le 8 juillet 1815, la chasse aux anciens officiers de la Grande Armée est ouverte. Rapidement, la lieutenance de police de Lyon fait parvenir au préfet de l’Ain le signalement d’officiers évadés des prisons de Paris. La nomination du préfet Dumartroy, à la préfecture de l’Ain, le 3 juillet 1815 favorise la chasse aux partisans du régiment impérial. Son action est répressive à l’encontre de la classe politique du régime napoléonien, les fonctionnaires et administrateurs sont épurés, la presse surveillée et muselée. Les lieux de sociabilité, comme les auberges et les cafés, noyautés.

A cette réaction royaliste dure et officielle correspond une bienséance petite bourgeoise, heureuse de la sauvegarde de son sort. L’Ain reste fermement anti-bourbon et le Bugey particulièrement activiste et régulièrement, malgré la terrible répression Lyonnaise de 1817 dans laquelle des citoyens et des communes de l’Ain sont pris, les actes et les idées bonapartistes ou républicaines sont nombreuses.


Jérôme Croyet

Docteur en histoire, collaborateur au Magazine Napoléon 1er & à la revue Soldats Napoléoniens