La campagne de 1809 – Znaim -10-11 juillet

7- 10 juillet 1809. Une poursuite sans éclat.

« Ne croyez-vous pas, monsieur mon frère, qu’en raison des circonstances exceptionnelles dans lesquelles nous sommes placés, il ne faudrait pas mieux traiter que de combattre en vain ? » (L’empereur François à l’archiduc Charles)

7 juillet.

Dès le 7 juillet, Napoléon après être allé, dans la matinée, à Gerarsdorf et Stammersdorf, se rend le soir au château de Wolkersdorf [i]et s’établi dans les appartements occupés par l’empereur François pendant la bataille de Wagram. Le quartier général le rejoint peu après.

A sa grande surprise il apprend que le Bisamberg a été abandonné par les Autrichiens. Mais, à ce moment, il se trouve dans l’incapacité de savoir où se dirige les Autrichiens, et d’entreprendre une poursuite, son point fort généralement, et de récolter rapidement les fruits de sa victoire.

Il donne une journée de repos à son armée. Les cavaliers de Montbrun et d’Oudinot sont envoyés vers le nord, ceux de Masséna, en direction de l’ouest. Ces derniers lui apprennent que Korneuburg est encore occupée, et éclairent, l’après-midi, la marche de la division Legrand (26e léger, 18e de ligne) dans cette direction. Après avoir bombardé et mise en flammes la ville, les Badois (brigade Neuenstein) en repoussent, à 7 heures du soir, l’arrière garde de Klenau, qui se retire, par Mallebarn, sur Stockerau. Masséna a perdu environ 350 hommes tués ou blessés, les pertes de Klenau ne sont pas connues, mais il abandonne dans cette affaire 300 prisonniers.

Durant cette journée du 7, Rosenberg se dirige sur Mistelbach. Radetzky résiste jusqu’au soir, à Gaunersdorf, à la cavalerie qui le poursuivent. Cette résistance laisse penser Napoléon que le gros de l’armée autrichienne se retire par la route de Brünn. A minuit, il envoie donc dans cette direction Marmont (dont les troupes n’ont pas combattu à Wagram), renforcé des Bavarois [ii].

Si Napoléon n’engage pas aussitôt la poursuite de son adversaire, c’est parce qu’il sait l’extrême fatigue de ses troupes, parce qu’il peut toujours craindre une attaque sur Vienne, à partir de la Hongrie et, enfin, parce qu’il commence à penser à la paix.

De leur côté, les Autrichiens, vont mener une retraite parfaitement ordonnée, mais difficile : épuisés par les combats des jours précédents, sans ravitaillement, beaucoup de soldats tombent d’épuisement et son faits prisonniers. Mais cette retraite est également déconcertante pour l’empereur, qui ne va pas découvrir tout de suite dans quelle direction l’archiduc Charles se replie. Celui-ci fait reculer les 1er (Bellegarde), 2e (Hohenzollern), 3e (Kollowrath) et 5e corps (Reuss-Plauen) jusqu’à Göllersdorf, le 4e corps (Rosenberg) se rend en direction de Mistelbach. Enfin, le 6e (Klenau) – qui forme l’arrière-garde – retraite par Leobendorf et Korneuburg.

Dans la nuit du 7 au 8, Charles apprend que Rosenberg, contrairement aux ordres qu’il a reçu semble se diriger sur Znaïm par Laa. Il lui enjoint aussitôt de  ne pas quitter la route de Brünn et de couvrir la Moravie. Mais cet ordre ne va parvenir à Rosenberg que le soir du 8, alors qu’il sera déjà à Laa.

 

8 juillet.

Entre 9 h et 11 h, on se bat au nord de Stockerau (c’est un important nœud routier), où Klenau a pris position. Le 6e corps se trouve au sud de Sierndorf, sous le feu de l’artillerie alliée. Résistant à l’attaque des cavaliers de Marulaz, il va ensuite se diriger sur Maissau, en passant par Krems et Hadersdorf, afin de défendre la route qui rejoint Budweis, par Horn et Gmünd. A Stockerau, Masséna s’empare de nombreux magasins de vivres, bien approvisionnés en vins, « ce qui excita une joie des plus vives » (Marbot)

Le 4e corps (Rosenberg) se dirige sur Laa, en passant par Altmannsdorf, traverse la Thaya à Ruhhof et Dürnholz, et rejoint Muschau. Auparavant, le FML Radetzky repousse, à Neudorf, toutes les attaques de la cavalerie alliée.

Après ces combats de Neudorf, Marmont, quittant la route de Brünn, marche sur Laa, s’empare du village et du pont sur la Thaya. Passant sur la rive septentrionale de la Thaya, en direction de Znaïm, il menace ainsi la ligne de retraite des Autrichiens.

Napoléon n’est toujours pas vraiment renseigné sur la direction que l’archiduc Charles a fait prendre à son armée, même s’il considère que la route de la Moravie est la plus « logique ». Des renseignements lui indiquent en effet que l’ennemi se retire à la fois sur la Bohème et la Moravie, empruntant les routes de Krems, de Horn, de Znaïm, de Laa et de Nikolsburg ! C’est pour cette raison qu’il demande à Davout (qui a avec lui les dragons de Grouchy et les cuirassiers d’Arrighi) de suivre Marmont, en direction de Nikolsburg, d’où se dernier chasse les Autrichiens, puis s’avance jusqu’à Muschau et Wisternitz.

Avec les 45.000 hommes de Marmont et de Davout, Napoléon considère qu’il a de quoi arrêter l’armée autrichienne.

Napoléon reste encore à Wolkersdorf, avec la Garde, les cuirassiers de Nansouty et les troupes d’Oudinot. De là il espère bien apprendre enfin où trouver l’archiduc Charles.

 

9 juillet

L’archiduc Charles avait finalement pris la décision : c’est sur la Bohème qu’il fera sa retraite, décision qui s’expliquait par le désir de conserver ce pays à la couronne et de garder le contact avec l’Allemagne, que l’Autriche espérait encore soulever contre Napoléon. Mais en fait les différents corps ont pris la direction qui leur était la plus favorable à l’issue de Wagram :

  • à gauche, Hohenzollern, Rosenberg sont sur la route de Moravie (environ 25.000 hommes)
  • à droite et au centre, Bellegarde, les réserves d’infanterie et de cavalerie, Kollowrath, Reuss, Klenau sont sur celle de Bohème (environ 60.000 hommes)

C’est cette situation qui d’ailleurs a laissé Napoléon dans l’incertitude, et lui a fait prendre la décision d’envoyer 40.000 hommes à la poursuite de 25.000, mais en ne mettant que 28.000 hommes aux trousses de 60.000 ! Heureusement, placé entre les deux, il pourra, rapidement, apporter 30.000 hommes à l’un ou l’autre de ses lieutenants qui en aura besoin.

Marmont arrive rapidement à Wilfersdorf. Il y apprend que Rosenberg s’est brusquement porté sur sa gauche, quittant la route de Moravie pour celle de Bohème, ne laissant se diriger sur la route de Brünn que quelques détachements. Disposant de la liberté d’action que lui a donné l’empereur, il décide lui aussi d’abandonner la route de Moravie, et prend la direction de Znaïm, par Mistelbach et Laa. Mais, s’il informe Davout de son changement de direction, il ne l’incite pas à en faire autant (Davout va s’emparer de Nikolsburg, grâce à une charge du 7e dragons et y faire quelques 800 prisonniers et s’emparer de magasins importants,).

Le soir, Marmont est à Laa, mais avec à peine 25% de ses effectifs, tant le désordre s’est installé dans ses troupes. Il y remédie heureusement rapidement, et, au matin du 10, il est prêt à continuer sa marche sur Znaïm. Apprenant que Rosenberg, sur les ordres de l’archiduc Charles, a changé de nouveau de direction, pour se diriger sur la route de Brünn, il décide néanmoins de continuer sur Znaïm, où il arrive en milieu de journée du 10.

Durant cette journée, le 6e corps autrichien (Klenau) était arrivé à Oberhollabrunn[iii], toujours poursuivi par Masséna. Là, la cavalerie s’était arrêtée, afin d’y attendre l’infanterie.

Durant cette pause, un parlementaire autrichien s’était avancé jusqu’aux aux avant-postes français, pour y présenter une lettre demandant le libre passage pour le GdK Liechtenstein, chargé, selon cette lettre, de négocier la paix.

A monsieur le général commandant l’avant-garde française. — S. M. l’Empereur, mon souverain, m’ayant fait connaître que M. le général de cavalerie prince de Liechtenstein arriverait incessamment à mes avant-postes, chargé d’une mission auprès de S. M. l’empereur Napoléon, j’ai l’honneur d’en prévenir M. le général commandant l’avant-garde française en le priant de vouloir bien donner à ses troupes les ordres nécessaires afin que M. le général prince de Liechtenstein n’éprouve pas de difficultés à se rendre au quartier général de Sa Majesté l’Empereur Napoléon. — Monsieur le général voudra bien recevoir l’assurance de ma considération distinguée. — Le comte de Klenau, lieutenant-général, commandant le VIe corps d’armée. — Le 9 juillet 1809. » (Cité par Gachot)

Le parlementaire avait été envoyé à Masséna, qui avait fait savoir  que Napoléon le recevrait avec un grand plaisir.

Les combats avaient repris, Oberhollabrunn étant la proie des flammes. Durant ces combats, les hussards Blankenstein et Liechtenstein, les frontaliers St. Georges, les Volontaires viennois (bataillons 1 et 2), le 4e bataillon de Landwehr Viertel unter dem Manahrtsberg (major Colloredo) opposent une extraordinaire résistance, sans pouvoir cependant empêcher la prise du village par les Français et les Badois (18e et 26e de ligne). Le général Bruyère est grièvement blessé. Ceux-ci sont pourtant encore repoussés par le IR 31 (Benjovsky), et perdent près de 500 hommes. Des éléments des IR 51 (Splenyi), IR 60 (Gyulai) et IR 14 (Klebek) viennent renforcer les défenseurs. Sur les hauteurs, le gros autrichien reste avec calme sous la canonnade, qui lui occasionne de nombreuses victimes[iv]. Le soir, les Autrichiens bivouaquent à Schöngrabern, plus tard à Guntersdorf.[v]

L’archiduc Charles avait installé son quartier général à Guntersdorf. Là, il est informé que Marmont est en marche dans sa direction. Vers 22 h, il ordonne à la cavalerie et à la réserve de grenadiers de quitter Schöngraben et de se diriger sur Znaïm. Le reste de son armée doit suivre durant la nuit et le lendemain matin, en trois colonnes :

  1. de Kammersdorf, par Mailberg, Obritz et Rausenbruck,
  2. et par Immendorf, Hadres et Dörflitz, en direction de Pumlitz,
  3. par Wullersdorf, Haugsdorf et Urban, avec pour instruction de …. De  mit dem Auftrag, der Furt von Oblas zuzustreben.

Le FML Schuhsteckh reçoit l’ordre de couvrir la route de Horn. Le GM Hardegg est envoyé sur Sitzendorf, pour protéger le flanc du 5e corps (Reuss-Plauen), qui, par Retz, marche en direction de la Thaya.

Durant toue cette journée, Napoléon est resté à Wolkersdorf. Complétant son dispositif, il envoie les Saxons sur la March (où l’archiduc Jean pourrait se montrer menaçant), laisse une partie de l’armée d’Italie autour de Vienne [vi] (là aussi pour se protéger d’une éventuelle attaque de Jean), où il dirige également les Wurtembergeois de Vandamme. Macdonald reçoit l’ordre de suivre Masséna.

Au petit matin du 10, il met en marche la Garde, les cuirassiers de Nansouty et d’Oudinot, sur la route de Brünn.  Mais le quartier général reste à Wolkersdorf, car Masséna a fait annoncer l’arrivée de Liechtenstein. Mais il apprend bientôt ce qui s’est passé à Oberhollabrunn et la décision de Marmont de marcher sur Znaïm. Il réalise rapidement le danger qui menace son lieutenant.  Il donne aussitôt l’ordre à toutes ses troupes d’accélérer leur marche dans cette direction. Lui-même prend la direction, sentant que c’est là que va se faire la décision, et il entend être sur place pour diriger les opérations.

La ville de Znaim (Znojmo aujourd'hui)
La ville de Znaim (Znojmo aujourd’hui)

10 – 11 juillet 1809 – La bataille de Znaïm

 

Ordre de bataille françaisOrdre de bataille autrichien

L’archiduc Charles arrive à Znaïm, où l’on aperçoit aucun ennemi », avec le corps de réserve, vers 9 heurs du matin. Peu de temps après les premières colonnes françaises sont signalées, venant de Laa. Les grenadiers prennent aussitôt position aux entrées de la ville (vers Laa) : l’ancienne brigade Merville (3 régiments de cavalerie) sur la rive droite de la Thaya, la brigade Steyrer le long de la grande route, au nord de la rivière, à Teßwitz, les brigades Murray et Hammer en réserve, un peu en arrière, à gauche, à Zuckerhandel. Le gros de la cavalerie, 6 régiments de cuirassiers et 3 régiments de cavalerie légère, sous les ordres du FML Schwarzenberg, forment au nord de Znaim l’aile gauche du front, dirigé vers l’est.

Côté français, Marmont se hâte d’avancer, persuadé qu’il va rattraper l’arrière garde du généralissime, et l’anéantir, avec l’aide de Masséna. Lorsque les Bavarois, qui marchent en tête, se heurtent à de la résistance à Klein-Teßwitz, il les lance énergiquement à l’attaque, déployant sur leur droite la division Clausel (8e léger, 11e et 23e de ligne), et sur les ailes les cavaliers de Montbrun, ne gardant avec lui en réserve que la division Claparède (18e léger, 5e, 79e et 81e de ligne). Cette attaque permet de gagner beaucoup de terrain.

Entre temps le 3e corps autrichien (Kollowrath) est arrivé, traversant la rivière sur le pont de bois et la ville, puis c’est au tour du 1er corps (Bellegarde) de se présenter, passant le gué de Pumlitz.

Bataille der Znaim
Bataille der Znaim

A ce moment là (il est à peu près 11 heures), Marmont arrive sur les hauteurs à l’est de Klein-Teßwitz, et constate aussitôt qu’il n’a pas devant lui une arrière garde, mais bien des forces beaucoup plus considérables. Il  n’a en effet à sa disposition que 10.000 hommes, alors que les Autrichiens sont environ 60.000, mais sa position est avantageuse, puisqu’il domine la ville. De plus, il compte sur la prochaine arrivée de Masséna, et une attaque de flanc des Autrichiens, encore occupés à passer la rivière, a toutes chances de réussir.[vii]

Les Bavarois enlève Klein-Teßwitz aux grenadiers de l’arrière garde autrichienne, ainsi que de deux fermes et un petit bois, placés plus sur sa droite, puis continuent leur attaque, d’une part contre la division Steyrer, d’autre par en direction du gué de Pumlitz, où, à ce moment là, arrive la queue du 1er corps autrichien. Malgré l’intense fusillade, le GM Hennebert  ordonne au IR 36 (Kollowrath) et IR 11 (archiduc Rainer) de repasser la rivière. Ils repoussent les Bavarois et reprennent, avec quelques bataillons de grenadiers, Klein-Teßwitz.

Marmont n’entend pas abandonner aussi facilement cette position : il envoie la division le 81e de ligne (Claparède) au secours des Bavarois : un terrible combat a lieu pour la possession du village, rapidement mis en flammes.

La division Clausel est d’autre part arrêtée dans sa marche en avant par le gros des 1er et 3e corps autrichiens, la cavalerie de Montbrun, durement attaquée par celle de Schwarzenberg, est stoppée dans son avance en direction de la route d’Iglau.

Au sud de la Thaya, le 2e corps autrichien (Hohenzollern) arrivé sur les lieux, remplace la brigade de grenadiers.

Il est 5 heures de l’après-midi. Marmont réalise que son attaque a été stoppée, et que devant lui d’importantes masses de troupes défilent, suivis d’une colonne impressionnante de voitures, à travers la ville, en direction d’Iglau.

C’est bien le gros de l’armée autrichienne qu’il a devant lui. Mais Masséna n’arrive toujours pas ! Celui-ci, persuadé lui aussi qu’il avait devant lui le gros de l’armée autrichienne, il s’est en fait arrêter par les 9.000 hommes de Reuß, au début de l’après-midi, à Schöngraben, puis à Grund et Guntersdorf : il ne peut être en conséquence le soir au-delà du Pulkau.

Par chance pour Marmont, l’archiduc Charles ne profite pas de l’énorme avantage numérique dont il dispose sur son adversaire, pour contre attaquer. La chance de Marmont est que le champ de bataille, à l’est de Znaïm, est parsemé de collines et de ravins, peut propice en fait à la manière de combattre des Autrichiens. L’archiduc Charles, pleinement conscient de cette situation, ne donne donc pas d’ordre d’attaque, préoccupé d’ailleurs par les combats défensifs qu’il aura à soutenir le lendemain, car il doit attendre les 2e et 5e corps, et surtout, essayer de permettre à ses équipages de train de prendre suffisamment d’avance, et de limiter les pertes en matériel le plus possible.

Dans ces conditions, et comme il sait que Liechtenstein est en route pour proposer un cessez-le-feu à Napoléon, il fait proposer à Marmont, par le GdK Bellegarde, d’interrompre les combats, jusqu’au retour de celui-ci. Bellegarde fait passer ce message par le général Pujol. Mais Marmont refuse sèchement: il a reçu l’ordre d’attaquer et, de plus, les nouvelles qu’il a reçu lui laisse à penser que l’empereur va bientôt arriver. Ayant repris définitivement Klein-Teßwitz,  il se contente de conserver cette position.

Le soir, le 6e corps autrichien franchi la Thaya, marchant au nord de Znaïm, en réserve. Dans la nuit, les 2e et 5e corps s’avancent également : le 2e constitue maintenant la réserve  derrière l’aile gauche autrichienne, le 5e doit tenir le front dirigé vers la Thaya.

Lorsque le jour se lève le 11 juillet, Marmont a le sentiment qu’il n’a plus devant lui qu’une arrière-garde et que la retraite de l’archiduc a commencé. Mais l’importance des troupes qu’il a devant lui l’incite cependant à la prudence et à attendre des renforts.

Napoléon, de son côté, averti que Marmont marchait sur Znaïm, s’était dirigé sur Wilfersdorf, avec la Garde, Oudinot et les cuirassiers de Nansouty, qu’il avait atteint le 10, d’où il avait personnellement continué sur Laa, espérant, avec la Garde, arriver le 11 à Znaïm.

Peu après 9 heures, Masséna, à la tête du 4e corps, arrive sur les lieux. Bousculant l’arrière-garde de Reuß, il parvient jusqu’au pont de Schallersdorf, et le fait attaquer par la division Legrand, qui s’en rend bientôt maître. Celui-ci envoie ensuite ses hommes dans la plaine qui est en fait le bassin de la Thaya. Il a maintenant devant lui, adossés à la ville, les troupes de Reuß et les grenadiers autrichiens.

Il est 10 heures (midi, selon Marbot [viii]) lorsque Napoléon arrive, avec la Garde. Depuis un point d’observation, situé à Zuckerhandel [ix], il observe les positions : il est clair qu’il n’est pas possible d’ordonner une véritable attaque des positions autrichiennes avant l’arrivée de Davout et Oudinot. Il se contente de faire avancer plusieurs fois Marmont et la cavalerie, non seulement pour évaluer les forces autrichiennes, mais également pour préparer le passage de la Thaya par Masséna.

Sur les lieux de la bataille, tableau explicatif
Sur les lieux de la bataille, tableau explicatif

Les combats se limitent donc à la zone au sud de Znaïm. Legrand s’empare des ponts. Puis les affrontements se déplacent dans les faubourgs de Alt-Schallersdorf et Kloster-Bruck, dont les troupes de Masséna ne se rendent véritablement maîtres que vers 14 heures.

A ce moment, la division Carra Saint-Cyr sur les lieux, tandis que, du côté autrichien, l’archiduc Charles renforce le 5 corps avec la brigade de grenadier Murray (division Prohaska). Ces troupes doivent selon lui suffire pour tenir les positions au sud de Znaïm jusqu’à la tombée de la nuit, lorsque les troupes continueront leur retraite, selon des dispositions déjà envoyées à midi.

Masséna lance une vigoureuse attaque la division Legrand contre la porte sud de Znaïm. Au moment où ses troupes approche de celle-ci un violent orage s’abat sur le champ de bataille, empêchant les soldats français de continuer à faire feu.

Les troupes du général Legrand se réfugient dans Kloster-Bruck, à Scallersdorf, et principalement dans les nombreuses caves creusées au milieu des vignes dont le coteau est couvert. (Marbot)

Les grenadiers autrichiens (bataillon Leiningen) en profitent pour, suivis des troupes les plus proches du 5e corps, repousser les Français jusqu’à la Thaya.

Ces derniers sont en difficulté, de nombreux prisonniers tombent aux mains des Autrichiens, Masséna est lui-même mis en danger. Mais une charge de cuirassiers se lance dans la mêlée, libère les prisonniers, force une grande partie des Autrichiens à mettre bas les armes et s’empare de deux canons. Les cavaliers, avec le flot des fuyards, pénètrent presque dans la ville par la Wiener Tor. Ils en sont empêchés par le 5e bataillon des Volontaires viennois (brigade Lindenfels), qui ferment la barrière et font rebrousser chemin aux cuirassiers.

Peu après, Masséna donne à ses troupes l’ordre d’une nouvelle attaque, les renforçant des trois régiments de la division Saint-Cyr (24e léger, 4e et 46e de ligne), ainsi que des trois régiments Hessois (brigade Schiner). Une nouvelle fois, cette attaque ne donne pas de résultat décisif.

Napoléon est inquiet : le temps passe, et il n’aperçoit toujours pas les colonnes de Davout et Oudinot et il paraît à peu près certain qu’elles n’arriveront pas avant le lendemain matin. D’ici là, l’archiduc se sera dérobé et il faudra, de nouveau, se lancer à sa poursuite, et il faudra continuer la campagne.

Alors, espérant que l’archiduc restera jusqu’à l’aube sur ses positions, pendant que des négociations pour un armistice se dérouleront. Si elles échouent, il pourra engager enfin une bataille décisive. Un parlementaire est donc envoyé, avec l’invitation à de telles discussions, pendant lesquelles les combats devront s’arrêter. L’archiduc accepte immédiatement.

Napoléon accepte enfin de recevoir l’envoyé de Bellegarde, puis le prince Liechtenstein, qui demande officiellement une suspension d’armes, prélude à l’ouverture de négociations en vue de la paix. Réunissant ses généraux (Berthier, Davout, Maret, Lariboisière, Duroc et quelques autres nous dit Pelet), il confère avec eux sur la décision à prendre. Les opinions sont diverses : les uns, comme Berthier sont pour la poursuite de la campagne, les autres encouragent la modération, car ils craignent que l’archiduc ne se retire durant la nuit sur la Bohème.

Finalement, après avoir écouté tous les avis, Napoléon se décide à accepter l’offre d’armistice :

Et l’Empereur allait céder, quand, sur la nouvelle que le général de cavalerie Bruyère venait d’être blessé, se décidant:

«Vous le voyez, s’écria-t-il, la mort plane sur mes généraux ! Et qui sait si, dans deux heures, je n’apprendrai pas que vous-même (Davout), vous avez été atteint ? Non, c’est assez de sang versé ; j’accepte la suspension d’armes. » (Correspondance de Davout)

Montbrun est envoyé en parlementaire, avec le message que l’empereur sera prêt à négocier, si le généralissime envoie un parlementaire au maréchal Berthier. Le choix se porte sur son chef d’état-major, von Wimpffen, à qui Berthier annonce que Napoléon a pris ses dispositions pour livrer le lendemain une bataille décisive, mais qu’il est prêt à discuter.

Pendant que Berthier et von Wimpffen discutent, à la métairie de Zuckerhandel, les termes d’un armistice, Liechtenstein est enfin reçu par Napoléon [x]. Les deux premiers vont arriver à un accord dans la nuit.

Le colonel Marbot, pour la France, et le général d’Aspre, pour l’Autriche, sont chargés (mais d’autres officiers ont également cette tâche) de se rendre aux avant-postes pour y faire cesser les combats. Dans ce moment indécis, le premier est blessé au poignet, le deuxième à l’épaule. Ce n’est que lorsque les deux hommes s’embrassent, que les troupes comprennent que les combats doivent s’arrêter.

Le cessez-le-feu est officiellement annoncé le 11 juillet en fin d’après-midi, et la  suspension d’armes est signée le lendemain 12, entre Berthier et Wimpffen.

Cette bataille indécise de Znaim avait coûté environ 4.000 tués ou blessés du côté des Alliés, environ 6.000 du côté Autrichiens (mais il n’existe pas de chiffres officiels)

Le cessez-le-feu est signé pour un mois, avec possibilité de le prolonger 15 jours supplémentaires. Il est très sévère (et préfigure le traité de paix qui sera signé plus tard) : la France reçoit l’Autriche intérieure, une partie de la Moravie et de la Hongrie, avec Znaïm, Brünn, Presbourg et Raab, la Styrie, avec Graz, Salzburg, la Carinthie, la Kraina, l’Istrie et Fiume. Les Autrichiens doivent évacuer le Tyrol et le Vorarlberg, rendre Sachsenburg. En Pologne, les troupes autrichiennes devront rester sur leurs positions. C’est donc une superficie de 3.775 kilomètres carrés et près de 8,5 millions d’habitants qui tombent aux mains de Napoléon.

Le monument commémoratif
Le monument commémoratif
Plaque commémorative du séjour de Napoléon à Znaim
Plaque commémorative du séjour de Napoléon à Znaim

 

De nombreux tableaux explicatifs ont été érigés en 2009 à l’occasion du bicentenaire.

 

NOTES

[i] C’est ce que représente Jacques François Joseph Swebach (1769-1823), dans son tableau « Bataille de Wagram livrée le 7 juillet 1809 »

[ii] Remplacé par le général Minuti puisque Wrède a été blessé.

[iii] Hollabrunn aujourd’hui

[iv] Pour cette action à Hollabrunn, Klenau recevra la croix de Commandeur de l’Ordre de Marie-Thérèse.

[v] Mais il y a un grand monument commémoratif – qui célèbre également les combats de 1805)

[vi] Où d’importantes dispositions sont prises pour mettre la ville en état de défense.

[vii] Sans doute pense-t-il aussi pouvoir enfin se mettre en valeur, lui qui n’en a pas eu l’occasion à Wagram.

[viii] La bataille de Znaïm fait partie des pages hautes en couleur des Mémoires de Marbot.

[ix] Emplacement du célèbre Chêne de Napoléon.

[x] Il est intéressant de noter que von Wimpffen ne semble pas avoir exprimé le désire de prendre contact avec Liechtenstein !