Justice impériale – La condamnation de François Gueniard

ARMÉE D’ALLEMAGNE
AU NOM DE SA MAJESTÉ L’EMPEREUR ET ROI
JUGEMENT
Portant condamnation du nommé François Guéniard, Ex-Secrétaire du Bureau de la place de Vienne, convaincu d’avoir tenu une correspondance avec l’ennemi, rendu par la Commission militaire crée en vertu du Décret impérial du dix-sept Messidor An XII
Cejourd’hui trente Septembre de l’an mil-huit-cent neuf.
La Commission militaire créée en vertu du Décret impérial du dix-sept Messidor, an douze, et de l’ordre de S. A. S. le Prince Vice-Connétable, Major-général, et composée conformément à ce Décret, de Messieurs :
Pavetti, Chef d’escadron de la gendarmerie, membre de la Légion d’honneur;
Massonnet, Capitaine adjoint à l’état-major général;
De Billy, Capitaine aide-de-camp, membre de la Légion d’honneur;
De Stubeurath, Capitaine aide-de-camp, membre de la Légion d’honneur;
Sarazin, Lieutenant attaché à l’état-major général; membre de la Légion d’honneur,
et de Monsieur Beizard, Capitaine de la gendarmerie impériale, membre de la Légion d’honneur, Rapporteur; tous nommés par Monsieur le Comte Mathieu Dumas, Général de Division, Sous-chef de l’état-major général, assisté du Sieur Vautier, Brigadier de la gendarmerie impériale, Greffier nommé par le Rapporteur.
Lesquels aux termes des articles six et sept de la loi du treize Brumaire an cinq, ne sont parents ou alliés, ni entr’eux ni du prévenu au degré prohibé par la Constitution.
La Commission militaire convoquée par l’ordre de Monsieur le Comte Mathieu Dumas, Général de Division, s’est réunie dans une des salles de la prévôté de l’armée, à l’effet de juger le nommé François Guêniard, âgé de trente-deux ans, natif de Dijon, Département de la Côte-d’or, Secrétaire du Bureau de la place de Vienne, au moment de son arrestation, prévenu d’avoir tenu une Correspondance avec l’ennemi, sans une permission de ses supérieurs.
La séance ayant été ouverte, le Président a fait apporter, par le Greffier et déposer devant lui, sur le Bureau, un exemplaire de la loi du treize Brumaire an cinq, et un autre du Décret impérial du dix-sept Messidor an douze, et a demandé ensuite au Rapporteur la lecture du procès-verbal d’information et de toutes les pièces tant à charge qu’à décharge, envers l’accusé, au nombre de treize.
Cette lecture terminée, le Président a ordonné à la garde d’amener l’accusé, lequel a été introduit libre et sans fers, devant la Commission, accompagné de soit défenseur officieux.
Interrogé de ses noms, prénoms, âge, profession et lieux de naissance, a répondu se nommer François Guéniard., âgé de trente-deux ans, Ex-Secrétaire au Bureau de la place de Vienne, natif de Dijon, Département de la Côte-d’or.
Après avoir donné connaissance à l’accusé des faits à sa charge, lui avoir fait prêter interrogatoire par l’organe du Président; avoir entendu séparément les témoins qui lui ont été publiquement confrontés; ouï le Rapporteur dans son rapport et ses conclusions, et l’accusé dans ses moyens de défense, tant par lui que par son défenseur officieux, lesquels ont déclaré n’avoir rien à ajouter à leur moyens de défense; le Président a demandé aux membres de la Commission s’ils avaient des observations à faire; sur leurs réponses négatives, et avant d’aller aux opinions, il a ordonné à l’accusé de se retirer. L’accusé a été reconduit par son escorte à la prison, le Greffier et les Assistants dans l’auditoire se sont retirés sur l’invitation du Président. La Commission délibérant à huit clos, le Président a posé les questions suivantes :
Le nommé François Guéniard, qualifié ci-dessus, accusé d’avoir tenu une correspondance, avec l’ennemi sans la permission de ses supérieurs, est-il coupable ?
Les voix recueillies en commençant par le grade inférieur. le Président ayant émis son opinion le dernier, la Commission militaire déclare à l’unanimité que l’accusé est coupable. Les voix recueillies de nouveau par la Président, pour l’application de la peine, dans les formes indiquées ci-dessus.
La Commission militaire condamne à l’unanimité le nommé François Guéniard , âgé de trente-deux ans, Ex-Secrétaire au Bureau de la place de Vienne, à la peine de mort, conformément à l’article six du titre neuf de la loi du vingt-un Brumaire an cinq, ainsi conçue:
« Tout militaire ou autre individu attaché à l’armée et à sa suite, qui entretiendrait une correspondance dans l’armée ennemie sans la permission par écrit de son supérieurs, sera puni de mort. »
Ordonne en outre l’impression, l’affiche et la distribution du présent jugement au nombre de cinq-cents exemplaires; condamne le dit François Guéniard. aux frais d’impression et à ceux de la procédure.
Enjoint au capitaine rapporteur de lire de suite le présent jugement au condamné, en présence de la garde assemblée sous les armes, et au surplus de le faire exécuter dans tout son contenu, dans les quatre heures; ordonne qu’il en sera envoyé, à la diligence du rapporteur, une expédition à S. A. S. le Prince Vice-Connétable, Major-général, une à Monsieur le Général de division Comte Matthieu Dumas, sous-chef de l’état-major général.
Fait, clos et jugé, sans désemparer, en séance publique, à Schönbrunn, le trente Septembre mil-huit-cent neuf.
Signés à la minute :
Machet et Sarrazin, lieutenants
De Stubenrath, De Billy et Massonnet, capitaines
Pavetti, chef d’escadron, Président
Brizard, Capitaine Rapporteur
Vautier, Greffier
Pour copie conforme : Le capitaine rapporteur. Signé : Brizard