Jean-Toussaint Arrighi de Casanova Duc de Padoue (1778-1853)

Portrait du général Arrighi
Portrait du général Arrighi

Les jeunes années (1778 – 1796)

Jean-Toussaint Arrighi de Casanova naît le 8 mars 1778, à Corte (Corse), dans la maison sise aujourd’hui sur la Place du Poilu, et ou, 10 ans auparavant, Joseph Bonaparte. Il est le plus jeunes des quatre enfants  (1) de Hyacinthe Arrighi, avocat à la Cour, et d’Antoinette Benielli, cousine par alliance de Laetitia Ramolino, la mère de Napoléon Bonaparte. Hyacinthe, lui-même l’aîné des sept enfants, était né en mars 1748 et avait épousé  Antoinette, à Ajaccio, en octobre 1777.

Les origines de la famille remontent loin en arrière, et les deux noms d’Arrighi et de Casanova furent réunis lorsque, en 1635, un Antonio Arrighi épousa Catherina de Casanova. Un décret de la municipalité de Corte, le 31 août 1772, devait autoriser l’usage du nom Arrighi de Casanova.

1787 -Jean-Toussaint, à l’âge de neuf ans, entre comme pupille à l’École Militaire de Rebais (Seine et Marne).

1793 – Il entre à l’Université de Pise, où il va recevoir une solide éducation.

 

Les premières armes (1797 – 1804)

Le jeune Arrighi a 18 ans lorsque, le 30 novembre 1796, s’enrôle, comme sous-lieutenant, dans la 3e compagnie Franche du Département de Liamone. (2) Le mois suivant, il est promu lieutenant. Il est bientôt dans l’état-major, à l’armée d’Italie, et il est un moment secrétaire de Joseph Bonaparte, alors ambassadeur de la République à Rome et à Parme. Puis il passe à l’état-major de la 75e demi-brigade de ligne

Le 27 décembre 1797, il est de service dans la cité papale, avec un autre jeune officier, Eugène de Beauharnais, aide de camp d’un général nommé Bonaparte. Il sont là aux cotés du général Léonard Duphot, qui tente de s’interposer entre les troupes papales et la population. Duphot, qui doit se marier deux jours plus tard à Désirée Clary, est atteint en pleine poitrine, et succombe peu après de plusieurs coups de baïonnettes.

Le 6 février 1798, Arrighi est à l’Armée d’Italie, puis, quelques mois plus tard, à l’Armé d’Orient qui se réunie à Toulon pour l’expédition d’Égypte. Le 12 août 1798, il est à la bataille de Salahieh, où les français s’opposent victorieusement aux Mamelouks. Il est blessé d’un coup de sabre à la tête. Sa bravoure lui vaut d’être promu capitaine directement sur le champ de bataille. (3)

Il est ensuite nommé, à titre temporaire, aide de camp du chef d’état-major de Bonaparte, le général Berthier, lors de l’expédition de Syrie. Il est à la bataille d’El-Arish, les 14/20 février 1799. Puis il est présent à l’assaut de la citadelle de Jaffa., le 8 mars, et entre le premier dans la ville.  

Lors du siége de Saint-jean d’Acre (18 mars – 20 mai 1799), il est sous les ordres du général Lannes. Arrighi est blessé sérieusement au cou. Bien qu’il soit secouru rapidement, notamment par Lannes (qui sera lui aussi blessé durant le siège), personne ne lui donne alors une chance de survivre. Mais, grâce à Larrey, il est sauvé (4)

De retour au Caire, il quitte bientôt l’Égypte, sur la suggestion de Bonaparte, au vu de la gravité de sa blessure. Il est suivi, peu de temps après, de Bonaparte, qui a décidé de revenir en France.

Arrighi est alors nommé, à titre définitif, aide de camp du chef d’état-major Berthier, poste qu’il occupe le 14 juin 1800, à la bataille de Marengo. Il s’y comporte une nouvelle fois brillamment. Le 11 octobre 1800, il est nommé chef d’escadron, et entre à l’état-major du 9e régiment de dragons, alors commandé par le colonel Sébastiani de la Porta, avant de rejoindre, le 3 novembre 1801, le 1er régiment de dragons, sous les ordres du colonel Viallanes.

Il est rappelé à Paris le 3 août 1803, nommé chef de brigade. Il est affecté à l’Armée des Côtes de l’Océan, où il restera jusqu’en 1805. Le 24 décembre 1804, il est décoré de la Légion d’honneur. Trois semaines auparavant, Bonaparte s’est fait couronner Empereur des français.

A la Grande Armée  (1805 – 1815)

Durant les années 1805-1807, Arrighi sert dans la Grande Armée. Il est à Wertingen, le 8 octobre 1805, où les autrichiens de l’archiduc Ferdinand et du général Mack sont vaincues par les français. Il enlève avec brio les escadrons des 1e et 2e dragons contre les cuirassiers autrichiens, les met en déroute, et s’empare de six canons des grenadiers hongrois. Il est blessé plusieurs fois, sans gravité cependant.

Il sera présent à Austerlitz, avant d’être promu, le 13 décembre 1805, à Augsbourg, commandant.

L’année 1806 commence plutôt bien pour Arrighi : il se voit attribué une pension de 12.000 francs sur le trésor impérial ! Le 19 mai, il est nommé colonel-major des dragons de la Garde. Il y apporte sa fougue, mais aussi un certain besoin de « modernisme », notamment au niveau de l’apparence des dragons, qui n’ont pas vraiment l’heur de plaire à leur colonel général, le maréchal Bessières.

Arrighi va faire les campagnes de Pologne de 1806 et 1807, étant présent notamment à Friedland, le 14 juin 1807. Il est nommé général de brigade le 25 juin, mais garde le commandement des Dragons de la Garde Impériale.

Armoiries du duc d'Arrighi
Armoirise du duc d’Arrighi

Le voilà peu après doté de 130.000 francs de rente tirés sur le Grand-Duché de Berg, et d’une autre de 70.000 francs, dans l’Ost-Frise. Plus encore : le 20 mars 1808, il est fait duc de Padoue. (5)

Le nouveau duc est bientôt en Espagne, où, le 29 décembre 1808, il participe à l’affaire de Benevente (6)

Napoléon a besoin de troupes sur le Danube. Arrighi est bientôt en Autriche. Il participe à la bataille d’Essling, les 21-22 mai, à l’issue de laquelle (l2 25 mai) il est nommé général de division, et reçoit le commandement de la 3e division de cavalerie lourde, laissée vacante par la mort au combat du général d’Espagne (7)

Six semaines plus tard, c’est Wagram. Arrighi a désormais sous ses ordres près de 2.000 cavaliers et six pièces d’artillerie (il s’agit des brigades Raynaud – 4e et 6e cuirassiers – et de la brigade Bordesoulle – 7e et 8e cuirassiers). Son action, à l’extrême droite française, si elle n’est pas marquée par une extrême brillance (les cavaliers auront beaucoup de mal à se déployer sur un terrain peu propice) oblige cependant l’archiduc Charles à modifier ses intentions d’attaque.

Le 23 juillet 1810, Arrighi est nommé inspecteur général de cavalerie. Le 18 mars 1811, il est commandant de la 4e colonne mobile  chargée de rechercher les déserteurs et les réfractaires, dans les 27e et 28e divisions militaires, poste peu fait pour rapporter des lauriers !

Il ne participera pas à la campagne de Russie, ayant été envoyé en France pour des tâches plus administratives que guerrières. En mai, par exemple, il est nommé commandant supérieur des Côtes de la Somme à l’Elbe, et inspecteur des 2e, 3e, 4e, 5e et 11e brigades de Gardes nationales….

Il met à profit cet espèce de répit pour se marier. Le 25 février 1812, en effet, il épouse Anne-Rose-Zoe de Montesquiou-Fezensac, qui a vingt ans, et est la fille de Henri Montesquiou-Fezensac, comte de l’Empire, Chambellan de l’Empereur et de François-Augustine Dupleix de Bacquencourt. Le 21 décembre 1812, la jeune épousée met au monde son premier enfant, Marie-Louise-Antoinette, à Anvers (8)

Début janvier 1813, Arrighi est envoyé à Osnabrück, afin de veiller à la formation de cinq régiments de ligne, à Osnabrück même ainsi qu’à Wesel. La campagne de 1813 commence. Le 22 mars, il est nommé commandant le 3e corps de cavalerie de la Grande Armée. Les premières actions le voit se heurter à des partisans, entre Rhin et Elbe. Le 28 mai, il est nommé gouverneur de Leipzig, et le 7 juin, il repousse victorieusement une attaque du russe Czernischeff. Il est ensuite (août-septembre), avec son corps de cavalerie, sous les ordres du maréchal Oudinot, puis du maréchal Ney. C’est avec ce dernier qu’il se distingue à la bataille de Dennewitz, le 6 septembre (9)

Le 16 octobre, il est à Mockern, à la tête de 26 escadrons (pas moins de 4.000 sabres et 18 canons), puis, les 17/18 octobre, à Leipzig. Il doit reculer, le 22 octobre, jusqu’à Weimar, puis participe à la victoire des français sur les austro-bavarois de Wrede, à Hanau, le 30 octobre.

Le 7 novembre 1813, Arrighi passe sous les ordres ee Marmont, puis, en janvier 1814, sous ceux de Macdonald. Le 15 février, il est nommé commandant la 1e division d’infanterie de la Réserve de Paris. Il retrouve Marmont, le 3 mars, à Neuilly-Saint-Front, puis à Craonne, le 7 mars. Il est alors dirigé sur Athies (près de Laon), dans la nuit du 9 mars, et engage de nouveaux combats les 23 et 13. Le 25, c’est la bataille de La Fère-Champenoise, puis le 30, la bataille de Paris. Il y est blessé.

Après la première abdication de Napoléon, Arrighi est mis en non activité, le 1er septembre 1814. Le 26 de ce mois, son épouse lui donne un deuxième enfant, Ernest (10). La famille Arrighi se rend alors en Lombardie.

Revenu de de son premier exil, Napoléon nomme Arrighi gouverneur de la Corse, le 14 avril 1815, et le nomme pair de France, le 2 juin.

 

L’après empire (1815 – 1853)

La défaite et la deuxième abdication de napoléon entraînent la mise sur la liste de proscription d’Arrighi, par l’article 2 de l’Ordonnance du 24 juillet. Arrighi s’enfuit, pour échapper à l’arrestation. Avec sa famille il se rend en Italie, réside un moment à Trieste, où son épouse décède, á peine âgée de 25 ans.

Revenu en France en 1819, il est autorisé à prendre sa retraite en décembre de la même année. Après quelques années au cours desquelles il occupe des postes administratifs, il entre en politique en 1849, élu à l’assemblée législative en tant que représentant de la Corse. En janvier 1852, il est nommé sénateur. Enfin, le 29 décembre 1852, il est nommé, à l’âge de 74 ans, Gouverneur des Invalides.

Jean-Toussaint Arrighi de Casanova meurt le 22 mars 1853, à l’âge de 75 ans.

Les restes du général reposent dans la crypte des Invalides.

 

Statue d'Arrighi à Corte
Statue d’arrighi à Corte
Plaque commémorative sur la mason natale d'Arrgghi
Plaque commémorative sur la mason natale d’Arrgghi

A Corte, sur la place du duc de Padoue, s’élève la statue du général, par Bartholdi. La maison natale du général se trouve 1 place du Poilu. Une plaque rappelle qu’Arrighi et Joseph Bonaparte y naquirent.

Le château de Courson-Monteloup (Essonne – près d’Arpajon), propriété d’Arrighi, renferme des souvenirs du duc de Padoue et de Napoléon Ier.

REPERES BIBLIOGRAPHQIUES

  • – Six. Dictionnaire biographique des Généraux et Amiraux Français de la Révolution et de l’Empire. Paris, 1934.
  • – A. Chappet, R. Martin, A. Robe, A. Pigeard. Répertoire Mondial des Souvenirs Napoléoniens. Paris, 1993.
  • – J. Tulard. Dictionnaire Napoléon. Paris, 1999.

NOTES

 (1) Ambroise Arrighi de Casanova fera une carrière militaire, deviendra officier et sera tué à la bataille de Vimeiro, au Portugal, le 21 août 1808. Antoine-François-André sera aussi soldat, sera aide de camp du général Leclerc, lors de l’expédition de Saint-Domingue, où il mourra de la fièvre jaune. Marianne-Isabelle-Celeste mourra âgée seulement de trois ans.

 (2) Le 11 juillet 1793 la Corse avait été partagée en 2 départements, le Golo et le Liamone (afin de disposer d’une administration loyale à Ajaccio car celle de Bastia était en insurrection). De 1793 à 1811, le département du Liamone avait des limites équivalentes à celles de l’actuelle Corse du Sud.

 (3) Cette promotion sera confirmée par le Directoire, le 17 mars 1799.

(4) Dans ses Mémoires, le général Auguste de Colbert-Chabanais, qualifiera la guérison d’Arrighi de miraculeuse.

(5) Les lettres patentes seront signées du 24 avril 1808

(6) Le général anglais Henry Paget y fait prisonnier le général Charles Lefebvre-Desnouettes. Envoyé prisonnier sur parole à Cheltenham, Lefebvre-Desnouettes s’en échappera en mai 1812… juste à temps pour participer à la campagne de Russie.

(7) d’Espagne succombe à ses terribles blessures dans l’île Lobau.

(8) Marie-Louise épousera, en 1834, l’américain Edouard-James Thayer, homme politique de son état)

(9) Le IIIe corps est alors composé de : les 5e division (général Lorge), 6e division (général Fournier-Sarlovese) de cavalerie légère , 4e division de cavalerie lourde (général Defrance).

(10) Ernest Arrighi de Casanova sera le deuxième et dernier duc de Padoue. Député de Corse sous la Troisième République, il décèdera, sans descendance, en mars 1888.