Correspondance de Napoléon – Septembre 1813

Septembre 1813

 

 

Dresde, 1er septembre 1813.

A Joachim Napoléon, roi de Naples, à Sayda

J’ai reçu vos différentes lettres. Le duc de Tarente est aujourd’hui sur Gœrlitz. S’il continue son mouvement rétrograde, il sera néces­saire que je marche pour rétablir les affaires ; je ne dois pas le laisser dépasser Bautzen. Or il ne serait pas impossible qu’il fût à Bautzen le 3. Il faut donc que les cuirassiers du général Latour-Maubourg viennent à Freiburg, de manière à être le 2 au soir à Dresde, prêts à passer l’Elbe le 3 au matin.

Le malheur arrivé au 1er corps est un malheur auquel on ne pouvait pas s’attendre. Le général Vandamme, qui paraît s’être tué, n’avait pas laissé une sentinelle sur les montagnes, ni une réserve nulle part; il s’était engouffré dans un fond, sans s’éclairer en aucune  façon. Cependant il m’arrive beaucoup de monde de son ‘corps ; presque tous les généraux sont arrivés, et il est aussi arrivé déjà 15,000 hommes, de sorte que je pense que ma perte ne sera que de 4 ou 5,000 hommes.

 

Dresde, 1er septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, donnez ordre à la division Teste de quitter sa posi­tion actuelle et le 2e corps, et de se rendre à Dresde afin de recompléter le 1er corps.

Donnez ordre au duc de Trévise de se rendre demain à Dresde, où, aussitôt son arrivée, il passera les ponts avec ses deux divisions. Il remettra la garde de Pirna et du camp de Königstein à la 42e divi­sion, qui doit être arrivée aujourd’hui à Pirna et qui est forte de près de 5,000 hommes. Le duc de Trévise fera partir, avant de quitter Pirna, tout ce qui appartient au 1er corps pour Dresde, et tout ce qui appartient à la brigade de Reuss pour Freyberg.

Donnez l’ordre au général Lefebvre-Desnoëttes de passer demain par Dresde avec sa division.

 

Dresde, 1er septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez an duc de Tarente que le prince Poniatowski étant à Zittau, appuie bien son flanc droit. Dites-lui que je n’ai aucune idée de son armée, puisque je ne connais point l’état de ses pertes en matériel et en personnel, ni enfin sa situation actuelle; mais que, s’il est en état de tenir à Gœrlitz, ce sera une chose fort avantageuse pour la facilité d’y vivre; que les environs de Bautzen sont tout à fait ruinés, et que nous serions bien resserrés entre Bautzen et l’Elbe.

Dites-lui que dans les derniers événements la perte de l’ennemi, Autrichiens, Russes et Prussiens, peut s’élever de 70 à 80,000 hommes; l’armée ennemie était de 200,000 hommes; nous avons fait 30,000 prisonniers, sans compter les blessés, dont sont encombrés les villages; que nous avons pris plus de 1,000 voitures de bagage et caissons, et soixante à quatre-vingts pièces de canon; que je me tiens à Dresde, en mesure de le soutenir avec une bonne réserve, si l’ennemi s’avance trop sur lui; qu’il faut qu’il m’envoie les officiers des trois corps que j’ai demandés, afin de bien connaître l’état des choses.

Écrivez dans le même sens au prince Poniatowski. Ce prince gardera les hauteurs des montagnes aussi longtemps que l’ennemi ne viendra point avec trop de forces et que le duc de Tarente tiendra à Gœrlitz.

 

Dresde, 1er septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, vous ferez connaître au roi de Naples, au duc de Bellune, au duc de Raguse et au maréchal Saint-Cyr que mon inten­tion n’est pas de pénétrer en Bohême; que cette opération n’est pas encore dans la ligne de ma position militaire; que mon intention est que le maréchal Saint-Cyr et le duc de Bellune soient en première ligne, pour observer les frontières, l’un ayant son quartier général à Pirna, l’autre l’ayant à Freyberg; et que le duc de Raguse, le duc de Trévise et le corps du général Latour-Maubourg soient groupés autour de Dresde, pour former une réserve et se porter partout où les circonstances l’exigeraient.

En conséquence des dispositions générales ci-dessus, donnez ordre au maréchal Saint-Cyr de prendre la position qui lui est indiquée, la gauche à l’Elbe, couvrant les deux routes de Peterswalde et de Donna et observant le défilé d’Altenberg; au roi de Naples de veiller à faire prendre par le duc de Bellune la position de la droite du maréchal Saint-Cyr, en portant son quartier général à Freyberg, et en échelonnant son corps de manière à pouvoir se porter sur Dresde ou sur des colonnes ennemies qui déboucheraient par Marienburg, Sayda, ou tout autre point de cette ligne; qu’il faudra laisser au duc , de Bellune une brigade de cavalerie légère; au duc de Raguse de se porter sur Dippoldiswalde et de laisser des colonnes en arrière pour masquer son mouvement, qu’il devra concerter avec le maréchal Saint-Cyr et avec le duc de Bellune.

Donnez ordre au roi de Naples de continuer cependant à envoyer des colonnes pour purger les vallées, et mandez au roi de Naples, au duc de Raguse et au maréchal Saint-Cyr de faire connaître quand ils occuperont la position définitive qui leur est assignée, parce que d’un moment à l’autre je puis avoir besoin de ma réserve.

 

Dresde, 2 septembre 1813, trois heures du matin.

Au maréchal Marmont, duc de Raguse, commandant le 6e corps de la Grande Armée, de la Grande Armée, à Carsdorf.

J’ai reçu votre lettre.

J’envoie mon aide de camp, le général Flahault, pour connaître ce qui se passe de votre côté. Votre correspondance est un peu trop laconique.

Faites attaquer aujourd’hui l’avant-garde ennemie, et sachez quels sont définitivement les projets de l’ennemi et ce -que vous avez devant vous. Si l’ennemi a moins de 30,000 hommes devant vous, culbutez-le au delà des montagnes. J’attends l’issue de cette journée pour faire des opérations de l’autre côté, et tout cela est très-urgent.

 

Dresde, 2 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez au roi de Naples et au duc de Bellune pour
leur faire connaître la position qu’occupe le duc de Raguse et l’ordre qui lui a été donné d’attaquer l’ennemi. Dites-leur de vous faire connaitre ce qui se passe de leur côté, et s’il est vrai que l’ennemi ait fait quelque mouvement en avant.

 

Dresde, 2 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez au prince de la Moskova :

e Nous venons de recevoir des nouvelles du duc de Reggio, qui a jugé convenable de venir se mettre à deux marches au-dessus de Wit­tenberg. Le résultat de ce mouvement intempestif est que le corps du général Tauenzien et un fort parti de Cosaques se sont portés du côté de Luckau et Bautzen et inquiètent les communications du duc de Tarente. Il est vraiment difficile d’avoir moins de tête que le due de Reggio. Tout ici se met en mouvement pour se porter sur Hoyerswerda, où l’Empereur aura son quartier général le 4. Il est nécessaire que, le 4, vous vous mettiez en marche pour être le 6 à Baruth. L’Empereur aura, le G, un corps sur Luckau pour faire la jonction sur Luckau.

De Bareuth vous ne serez qu’à trois jours de marche de Berlin. La communication avec l’Empereur se trouvera alors établie, et l’attaque de Berlin pourrait avoir lieu du 9 au 10. Toute cette nuée de Cosaques et ce tas de mauvaise infanterie de la landwehr se replieront de tous côtés sur Berlin, quand votre marche sera décidée. Vous comprenez bien la nécessité de manœuvrer rapidement pour profiter du désarroi de la grande armée de Bohême, qui fera des mouvements lorsqu’elle s’apercevra de ceux de l’Empereur. Leduc de Reggio n’a jamais abordé l’ennemi, et il a eu l’art de faire donner un de ses corps séparément. S’il l’eût abordé franchement, il l’aurait partout culbuté.

Faites-nous connaître d’une manière positive la marche que vous tiendrez.

Il doit y avoir à Wittenberg 120,000 rations de pain biscuité que l’Empereur avait fait préparer exprès; prenez-les. Donnez des ordres en conséquence au général Lapoype.

L’Empereur espère apprendre votre arrivée avant son départ, puisqu’il ne compte partir de sa personne pour Hoyerswerda que le 4, dans la matinée. e

Répondez au duc de Reggio que j’apprends avec un extrême mécontentement qu’avec les trois corps dont il n’a fait aucun usage il se soit retiré sous le canon de Wittenberg; qu’il a rendu inutile cette portion de nos forces et compromis en même temps les corps qui étaient sur la Neisse; que déjà, m’apercevant de l’incertitude de ses mouvements, j’ai envoyé le prince de la Moskova prendre le com­mandement de son armée.

 

Dresde, 2 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, envoyez un officier au duc de Reggio pour vous plaindre de ce que je n’ai pas ses états de situation et de ce qu’il ne fait pas connaître ce qu’il fait, et que pendant ce temps l’ennemi se tourne contre le prince d’Eckmühl. Dites-lui que je désire qu’il fasse un rapport en règle et qu’il parle franchement de sa situation.

Il doit envoyer tous les jours un officier.

 

Dresde, 2 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, donnez ordre aux deux divisions de la jeune Garde commandées par les généraux Curial et Barrois de passer aujour­d’hui les ponts et d’aller aussi loin qu’elles le pourront sur la route d’Hoyerswerda, par la petite ville de Kœnigsbrück. Donnez le même ordre à la division du général Nansouty. Donnez-le également à l’équipage de pont de 60 voitures qui est sur la rive droite, ainsi qu’à la réserve d’artillerie de la Garde. Il n’est pas nécessaire que cela arrive ce soir à Kœnigsbrück, il faut seulement que tout marche dans cette direction et continue demain sa route sur Hoyerswerda. Des aides de camp viendront ce soir vous faire connaître où sont les divisions d’infanterie et de cavalerie, le parc et les pontons, pour passer la nuit, afin que, s’il y avait des ordres à donner, on puisse leur épargner des marches inutiles.

J’ai déjà ordonné que le général Ornano quittât le duc de Raguse pour se rendre à Dresde. Faites-moi connaître où il se trouve, et réi­térez-lui l’ordre de se rendre le plus promptement possible à Dresde.

Préparez des ordres pour que le duc de Trévise parte demain à Pirna avec ses deux divisions d’infanterie et la division de cavalerie du général Lefebvre-Desnoëttes pour se diriger sur Stolpen et de là sur Hoyerswerda. Si le pont n’était pas fait demain à quatre heures du matin, et que le duc de Trévise ne pût passer à Pirna, il faudrait qu’il vînt passer à Dresde.

Préparez des ordres pour que la vieille Garde parte demain à trois heures du matin pour suivre la même direction.

Préparez également des ordres pour que le petit quartier général et un de mes services légers partent demain, à neuf heures du matin, pour se rendre en deux jours à Hoyerswerda.

Vous me présenterez, ce soir, à signer ces différents ordres.

 

Dresde, 2 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, donnez ordre que la cavalerie du 5e corps, qui est à Pirna ou au camp de Lilienstein, en parle demain avec le duc de Trévise. Saint-Cyr ne gardera que la cavalerie de la division Pajol.

Écrivez au duc de Trévise de ne laisser personne de la Garde, la 42e division devant faire le service de Pirna et du camp de Lilienstein.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, donnez ordre à la vieille Garde de partir pour se rendre ce soir à Kœnigsbrück.

Donnez le même ordre au petit quartier général.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez au comte de Lobau de donner ordre au duc de Trévise de se diriger de Stolpen sur Bischofswerda, afin d’arriver demain de bonne heure à Bautzen.

Donnez ordre à la division de la Garde, tant infanterie que cava­lerie et artillerie, qui est partie hier et a dû s’arrêter à la petite ville de Kœnigsbrück, de se diriger sur Bautzen, de manière à y arriver de bonne heure.

Donnez- ordre au quartier général et aux équipages de se rendre ce soir à Bischofswerda.

Donnez ordre à la vieille Garde de se porter sur la route de Bau­tzen, de manière à y arriver demain de bonne heure.

Donnez ordre au général Ornano, qui passe aujourd’hui, de se rendre sur la route de Bautzen, de manière à y arriver demain.

Donnez ordre au général Latour-Maubourg de prendre directe­ment la route de Bautzen, de manière à y arriver demain de bonne heure.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, envoyez un officier d’état-major au prince de la Moskova pour lui faire connaître que je serai demain matin à Bau­tzen, où le duc de Tarente est arrivé avec l’armée; que l’ennemi suit vivement et paraît fort encouragé; que je l’attaquerai dans la journée et tâcherai de le pousser sur Reichenbach, et qu’après la bataille je me mettrai en marche en grande hâte sur Berlin; qu’il doit écrire en chiffre au prince d’Eckmühl pour lui en faire part. Votre officier ira jusqu’à Wittenberg, par la rive gauche, et reviendra le plus promptement possible.

 

  1. S. Recommandez par la même occasion au général Lapoype de vous écrire tous les jours.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez au duc de Raguse que, s’il n’y voit pas d’inconvénient, il serait convenable qu’il s’approchât aujourd’hui de Dresde, afin de passer les ponts pendant la nuit; que nous aurons une bataille à Bautzen demain au soir, ou au plus tard le 5 au ma­tin; que le corps du duc de Tarente est tout à fait en désarroi.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez au maréchal Saint-Cyr qu’il faut qu’il ait ce soir son quartier général à Pirna. Vous lui ferez connaître que l’ar­mée ennemie de Silésie est entrée hier à Gœrlitz et s’approche de Bautzen, où le duc de Tarente sera aujourd’hui. L’armée du duc de Tarente est un peu décontenancée. J’y serai demain à la pointe du jour, et je compte attaquer demain à midi, ou après-demain au plus tard, l’armée ennemie et la mettre en déroute, de manière à faire le contrecoup de la retraite de Dresde.

Je ne sais point ce que fera la grande armée ennemie en Bohème. Je laisse les dispositions suivantes : le maréchal Saint-Cyr sera à Pirna, le duc de Bellune à Freyberg; le comte de-Lobau, que j’ai nommé commandant du 1er corps, sera au camp de la jeune Garde auprès de Dresde; tout cela fait encore 50 à 60,000 hommes. L’en­nemi ne peut pas se présenter devant Dresde pour l’attaquer avant quatre jours; d’ici là, les trois redoutes intermédiaires seront con­struites et armées, ce qui donnera un degré de force bien pins consi­dérable au camp retranché. Le maréchal Saint-Cyr établira une cor­respondance très-rapide avec le comte de Lobau et le duc de Bellune, et il m’écrira deux fois par jour à mon quartier général à Bautzen. Il fera construire des redoutes sur les hauteurs pour assurer son camp, et il fera sur-le-champ travailler à améliorer la route de Königstein à Hellendorf : cet ouvrage peut être fait dans quatre jours. L’ennemi peut manœuvrer sur Dresde par la rive gauche et la rive droite; s’il manœuvre par la rive gauche, ce sera la répétition de ce qui a eu lieu. Je pense que dans ce cas le maréchal Saint-Cyr, le duc de Bellune et le comte de Lobau doivent se réunir sur les hau­teurs de Dresde, et, aussitôt qu’ils se seront assurés que les forces de l’ennemi sont tellement considérables qu’ils ne peuvent tenir les dehors, se replier dans le camp retranché. Le maréchal Saint-Cyr en gardera la gauche, et le duc de Bellune la droite, en laissant en ré­serve les deux tiers de ces corps, comme j’avais placé la jeune Garde.

Le comte de Lobau serait dans Dresde de manière à déboucher quand les redoutes seraient sur le point d’être prises, afin de battre l’ennemi. Comme je pourrais toujours, en deux ou trois jours, être à Dresde, ce serait tout à fait la répétition de ce qui a eu lieu, hor­mis que je serais plus près.

Si l’ennemi manœuvre sur la rive droite, il peut manœuvrer de deux manières : 1° par la chaussée de Zittau; alors il se réunirait à l’armée de Silésie par derrière, et dans ce cas cela n’aurait aucune influence sur Dresde; 2° par Neustadt, pour venir se porter sur Weissig, entre Dresde et Lilienstein, et intercepter la route de Dresde à Bautzen. Dans ce cas, le maréchal Saint-Cyr devrait garnir avec la plus grande partie de son corps le camp de Lilienstein et les redoutes de Hohnstein, et le comte de Lobau, ainsi que le duc de Bellune, viendrait occuper les hauteurs de Weissig, où il y a de très-belles positions; ce qui me donnerait le temps de me joindre à eux, et, après avoir battu l’année ennemie de Silésie, de rebattre la grande armée de Bohême.

Vous ferez faire cinq copies de cette instruction, savoir : l’une pour le maréchal Saint-Cyr, l’une pour le duc de Bellune, l’une pour le comte de Lobau, l’une pour le comte Durosnel, et la cin­quième pour le duc de Bassano, parce que cela est utile à cause de son activité et de l’intérêt qu’il a à me prévenir de tout.

Aussitôt qu’on apercevra que l’ennemi manœuvre sur la rive droite et peut inquiéter la route de Bautzen, la route de l’armée ne passera plus par Stolpen et Bischofswerda, mais par Kœnigsbrück. Prévenez le général Lhéritier que le quartier général sera demain à Bautzen, qu’il envoie tous les jours ses rapports à Dresde, et qu’en cas d’évé­nement il sera sous les ordres du comte de Lobau.

Faites connaître au maréchal Saint-Cyr qu’il y a à Pirna un pont qui y a été jeté pour le passage du duc de Trévise, et que j’ai or­donné que ce pont fût relevé et les pontons placés sur des haquets, afin que, sur quelque point de la rivière que ce soit, il puisse jeter un pont pour établir la communication, selon les circonstances.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, envoyez plusieurs colonnes de gendarmerie avec des officiers  d’état-major, pour ramasser les fuyards des 3e, 11e et 5e corps, et les réunir à Bautzen.

Prenez des mesures pour que les blessés n’entrent à Dresde que nuit et par le pont de bateaux qui est placé en aval; qu’aucun ne passe sur les autres ponts.

Napoléon.

  1. S. Il faudrait voir le comte Daru pour presser les évacuations. Il y a ici des bateaux; je ne conçois pas comment on ne s’en servirait pas pour accélérer ces évacuations. S’il n’y avait pas de place pour les blessés à Dresde, il faudrait diriger les voitures sur Meissen, sans passer par Dresde. Voyez le comte Daru, pour qu’une route soit tracée et que les ordres soient donnés en conséquence. Dresde étant le centre de nos opérations, il est convenable de le désen­combrer.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez au prince Poniatowski pour lui faire con­naître que je serai demain de bonne heure à Bautzen ; que j’y don­nerai probablement bataille à l’ennemi; qu’il se tienne prêt à agir pour tourner la gauche de l’ennemi; qu’il m’envoie quelqu’un de confiance qui connaisse bien la position où il se trouve, et que cet officier soit arrivé à Bautzen à la pointe du jour.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

ORDRE POUR LES FORTIFICATIONS DE DRESDE.

Article premier. Les bois qui entourent les redoutes du camp retranché de la rive droite seront coupés sans délai à 100 toises des redoutes; on en formera des abatis à tous les petits chemins qui aboutissent au camp. Le 1er corps fournira le nombre d’hommes né­cessaire pour faire promptement ces abatis.

Art. 2. Ou commencera dans la journée de demain la construc­tion d’un bon blockhaus à la redoute n° 3 comme la plus faible, vu sa proximité des montagnes. Ce blockhaus sera pour 40 à 50 hom­mes. Les bois du côté de l’ennemi auront 18 pouces d’épaisseur. Le blockhaus sera construit de manière que l’artillerie de campagne ne le puisse démolir, et que, le feu de la redoute venant à s’éteindre, 30 ou 40 hommes renfermés dans le blockhaus empêchent l’ennemi de prendre possession de l’ouvrage. Le blockhaus sera environné d’une petite palissade qui en défendra les approches.

Art. 3. Il sera établi, avec de grandes démonstrations, trois ou quatre fougasses sous cette redoute, et il y sera employé une com­pagnie de mineurs, de manière à faire courir le bruit que les envi­rons de cette redoute sont minés et que les paysans des villages voi­sins en soient instruits.

Art. 4. Il sera placé dans chaque redoute une perche, avec le numéro de la redoute, pour que cela soit bien connu de la garnison.

Art. 5. On concentrera tous les ouvriers pour terminer les trois redoutes qui flanquent les cinq existantes , afin que ces redoutes soient en état d’être armées dans six jours.

Art. 6. Il sera tracé à la redoute n° 3 un avant-fossé palissade, de sorte que l’ennemi ait deux fossés à franchir. Les deux fossés seront flanqués par une place d’armes, de droite et de gauche, et ap­puyés d’une traverse où l’on puisse établir pour chacun une pièce de canon et quelques tirailleurs.

Art. 7. Avant quatre jours l’artillerie placera ses gabions et sacs à terre sur toutes les redoutes, de manière que l’artillerie et les canonniers soient le plus possible à l’abri.

Art. 8. Le hangar qui domine les fortifications de la rive droite sera démoli de manière à en conserver les bois.

Art. 9. Le major général désignera pour chaque redoute un offi­cier qui y commandera. Cet officier restera dans la redoute, y cou­chera, et ne pourra la quitter sous quelque prétexte que ce soit.

Art. 10. En cas d’attaque, le commandant d’artillerie aura en réserve une compagnie d’artillerie; il y joindra les pontonniers et les ouvriers de la marine; ces hommes seront placés dans les faubourgs et se tiendront prêts à se rendre dans les redoutes pour y remplacer les canonniers morts.

Art. 11. Il sera construit un magasin à poudre dans chaque re­doute, et il est expressément défendu qu’il y ait des caissons dans les redoutes.

Art. 12. Le major général est chargé de donner tous les ordres pour l’exécution des présentes dispositions.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

ORDRE POUR LA PLACE DE MEISSEN.

Article premier. II y aura à Meissen un officier général ou supé­rieur, au moins du grade de major, pour commander le château de Meissen et la tête de pont.

Art. 2. Il y aura, à la tête de pont, un commandant particulier du grade de capitaine ou de chef de bataillon.

Art. 3. Il y aura à Meissen huit pièces de canon, quatre pour le château et quatre pour la tête de pont.

Art. 4. Les ouvriers de marine qui travaillent au rétablissement du pont, en cas d’attaque, serviront les batteries.

Art. 5. Jusqu’au rétablissement du pont, il y aura un pont de bateaux.

Art. 6. Il y aura en garnison à Meissen un bataillon français et’ un bataillon westphalien, faisant au moins 1,000 hommes.

Art. 7. Ces 1,000 hommes auront au moins trois pièces de ca­non attelées, indépendamment de l’artillerie de la place.

Art. 8. Il y aura toujours 300 hommes de service à la tête de pont, partie Français et partie Westphaliens.

Art. 9. Le château sera approvisionné pour 1,000 hommes pen­dant un mois.

L’artillerie aura 300 coups à tirer par pièce.

Il y aura un dépôt de 100,000 cartouches dans le château.

Art.  10. Le major général donnera tous les ordres au directeur général de l’administration de l’armée, aux commandants du génie et de l’artillerie de l’armée, et au gouverneur de Dresde, pour que les présentes dispositions soient entièrement exécutées dans la jour née du 6, de sorte qu’à cette époque le château soit en état de défense et que l’artillerie et la garnison aient leurs approvisionnements existants; enfin pour que les travaux de la tête de pont sur la rive droite soient commencés. La garnison fournira les travailleurs.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au général Caulaincourt, duc de Vicence, grand-écuyer de l’Empereur, à Dresde.

Je partirai à six heures pour porter mon quartier général près de Bischofswerda, au lieu où sera le duc de Trévise. Mon quartier gé­néral sera  au milieu du carré de ses deux divisions.

Envoyez un autre service à Bautzen, afin que si, après avoir soupe au quartier général, je voulais aller jusqu’à celte ville, je pusse, en y arrivant à minuit, y trouver mon logement préparé.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au maréchal Macdonald, duc de Tarente, commandant le 11e corps de la Grande Armée, à Bautzen.

Cinquante-cinq caissons, dont vingt-quatre de cartouches, sont partis hier de Dresde; ils arrivent donc aujourd’hui à Bautzen; envoyez à leur rencontre. Un convoi de 4,000 fusils partira avant six heures du soir; idem un convoi de 6,000 paires de souliers. Il partira également dans la nuit un convoi de 35,000 cartouches. J’envoie le général Pernety pour qu’il voie sur-le-champ la situation de l’artillerie et ce qui manque.

Comme le débouché de Bautzen est très-difficile, faites bien recon­naître les routes et faites-les jalonner, pour qu’on puisse y passer  sans passer dans la ville. Faites jeter un pont de chevalets et raccom­moder les rampes vers l’endroit où doit passer le 6e corps lors de la bataille, et faites reconnaître les ponts qui existeraient sur les diffé­rents points de la Sprée, parce qu’il est convenable de déboucher rapidement et que la Sprée ne forme pas un défilé.

Je serai, s’il est nécessaire, à la pointe du jour à Bautzen pour faire ma reconnaissance du matin. J’espère qu’à midi toute ma Garde sera arrivée par les deux routes. Désignez la position que la colonne qui viendra par Kamenz doit occuper pour ne pas être vue par l’en–nemi, si toutefois l’ennemi est aussi près de Bautzen, et reconnaissez le point où elle doit déboucher pour ne pas faire d’embarras, car mon intention n’est pas d’attendre le duc de Raguse, qui n’y sera que demain au soir; et, aussitôt que-ma Garde*sera arrivée, ainsi que la cavalerie du général Latour-Maubourg, je marcherai à l’en­nemi. Je suppose que cela pourra être de deux à trois heures après midi. Si j’étais obligé de remettre au lendemain, il est alors très-important que toutes les troupes qui arrivent soient masquées. Éta­blissez la plus grande surveillance pour que personne, aucun paysan, ne passe, et qu’il n’y ait aucune communication, afin qu’on ignore ce qu’on a de troupes.

Quant à votre armée, ayez-la toute dans la main, quelque posi­tion que vous ayez, et qu’elle soit réunie. Je ferai mes dispositions sur le champ de bataille.   Je désire pouvoir en une demi-heure passer sur le front de toute l’armée.

Si les mouvements de l’ennemi vous faisaient craindre quelque chose pour Hoyerswerda, prévenez-en le général Normann. Il est cependant important d’occuper ce poste comme surveillance. Écrivez au général Normann, sans dire que j’arrive, pour qu’il vous envoie un officier qui fasse connaître la position des choses autour de lui, ce soir, à la nuit.

 

Dresde, 3 septembre 1813.

Au maréchal Macdonald, duc de Tarente, commandant le 11e corps de la Grande Armée, à Bautzen.

Le duc de Trévise, avec deux divisions de la jeune Garde et la division de cavalerie du général Lefebvre-Desnoëttes, est parti ce matin de Pirna; il passera par Stolpen et approchera ce soir de Bischofswerda. La vieille Garde est partie ce matin, et approchera de Bischofswerda. Mon quartier général sera ce soir près de Bischofswerda. Le général Curial, avec deux divisions de la jeune Garde, et le général Nansouty, avec la cavalerie de la vieille Garde, ont dû arriver ce matin de bonne heure à Kœnigsbrück, et feront une demi-marche sur la route de Bautzen, de manière à y être demain de bonne heure. |

Je partirai ce soir d’ici, pour être demain de très-bon matin m Bautzen. Si les circonstances sont pressantes, écrivez directement aux troupes sur la route de Kœnigsbrück et la grande route de Dresde pour hâter leur marche. Si l’ennemi vous suit vivement, mon intention est de l’attaquer sur-le-champ, c’est-à-dire demain ou après-demain au plus tard, et de tâcher de l’entamer. Comme, avec la cavalerie du général Sébastiani, celle du général Latour-Maubourg et celle de la Garde, j’aurai plus de 20,000 chevaux, nous pourrons pousser le corps ennemi et l’entamer avant qu’il ait gagné le Bober.

Je donne  ordre   au  général  Sorbier d’envoyer  5,000  fusils   à Bautzen.