Correspondance de Napoléon – Septembre 1806

Mayence, 30 septembre 1806

Au prince Primat

Mon Frère, j’ai reçu votre lettre. Les mouvements des Prussiens m’obligent à accélérer les miens. Une grande quantité de troupes arrivant à chaque instant à Würzburg, je désirerais qu’il soit possible d’y envoyer 20,000 quintaux de blé ou de farine. Le prix en serait promptement payé au taux du pays. La célérité nécessaire pour faire arriver ces farines à Würzburg me fait seule prendre le parti d’en écrire à Votre Altesse. Je la prie de charger un de mes ministres de faire arriver le plus tôt possible cet approvisionnement dans cette place. Je la prie aussi de m’envoyer, par l’officier que je lui expédie, les nouvelles qu’elle pourrait avoir de Cassel, Fulde et pays environnants. Je ne puis vous donner aucune nouvelles négociations avec la Prusse. Il parait qu’il y a un courrier prussien qui s’est croisé avec moi en route. Toutefois je vous prie d’être sans  inquiétude, de ne jamais douter de ma constante et ferme volonté de protéger la Confédération, et surtout de vous être agréable.

 

Mayence, 30 septembre 1806, 2 heures du matin

A M. de Montesquiou

  1. de Montesquiou partira à deux heures du matin pour porter la lettre ci-jointe au maréchal Soult à Amberg. Il me rapportera la situation de ses troupes, une idée générale des chemins, et vous me retrouver le plus tôt possible au quartier général. Si le maréchal Soult n’était pas encore arrivé à Amberg, il ira à sa rencontre. Il aura soin de bien faire connaître le jour où toutes les troupes du général y seront rendues. La lettre qu’il porte est de la plus grande conséquence. Il la détruirait plutôt que de la laisser prendre. A tout événement, il est bon qu’il la porte d’une manière cachée.

 

Mayence, 30 septembre 1806, 3 heures du matin

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, en pensant à la manière de pourvoir mon armée de munitions, j’ai senti la nécessité d’avoir deux points forts où je puisse établir mes dépôts : Würzburg et Forchheim.

Je vous ai déjà donné des ordres pour Würzburg, et je n’ai pas à y ajouter. Faites choisir des emplacements pour les magasins et pour les forges. Quant à Forchheim, nommez-y un commandant; ordonnez que la place soit armée et approvisionnée; envoyez reconnaître son état actuel; faites-y désigner des locaux pour les magasins, de cartouches d’infanterie et de cartouches à canon, pour des magasins de bois de rechange, et qu’on y établisse sans délai, ainsi qu’à Würzburg, un petit arsenal. En prescrivant des dispositions si importantes pour l’artillerie, vous sentez le besoin de les appliquer à l’état-major et à l’administration. Tous les prisonniers que l’on fera seront dirigés sur Forchheim ou Würzburg, selon les circonstances. Forchheim sera probablement le point souvent préféré.

Faites établir à Forchheim un hôpital de 500 malades et des magasins de vivres. Faites transporter à Forchheim les 35,000 rations de biscuit qui sont à Passau. Faites-y construire des fours, pour qu’il y ait une manutention, et faites-y réunir 15,000 quintaux de farine, de sorte qu’à tout événement mes corps pourraient se plier sur Forchheim ou Würzburg, et trouver là des cartouches, des vivres et un point d’appui.

Ces deux points sont également à l’abri d’un coup de main; ce sont deux places assez fortes. Il y a des Bavarois à Forchheim; on peut y envoyer une compagnie d’artillerie. J’imagine qu’il y en a deux compagnies à Würzburg, qui travaillent à armer la place. Faites donc passer des ordres à l’intendant général pour que tout soit ainsi dirigé. Je n’aime point Bamberg, parce que c’est un lieu ouvert, et qu’il est important que mes dépôts soient dans une petite
place.

Vous avez assez d’expérience de la guerre et de ma manière de diriger les opérations pour sentir l’importance des places de Forchheim et de Würzburg. Ajoutez que Forchheim a le double avantage de me servir contre la Bohême, et qu’il peut y avoir telle opération où, refusant entièrement ma gauche, je sois privé pour longtemps du point d’appui de Würzburg. Ainsi donc, faites construire dix fours à Würzburg et dix fours à Forchheim , et qu’on ne perde pas de temps à approvisionner ces places en farine, en eau-de-vie et en avoine.

Beaucoup de commandants vous deviennent inutiles dans la Bavière; nommez-en à ces places. Tracez une route pour l’artillerie d’Augsbourg à Forchheim, et d’Augsbourg à Würzburg.

Forchheim va-être dans cette nouvelle campagne ce qu’a été Braunau l’année passée.

 

Mayence, 30 septembre 1806, 3 heures et demie du matin

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je n’ai reçu qu’aujourd’hui à minuit votre lettre du 25. Le général Songis a tort de s’excuser; un parc d’artillerie sans ponts est une chose trop absurde. Si ceux de Vienne ne valaient rien, il fallait en avoir de plus légers, ce que j’approuve fort. J’ai ordonné au général Rapp de diriger les vingt-cinq pontons de Strasbourg sur Bamberg; ils y seront rendus le 5 octobre, je l’espère. J’ai donné des ordres pour les bataillons du train qui sont en France et en Italie; je vous en envoie copie. J’ai donné de l’argent pour les remonter; je vous en envoie la note. L’idée du général Sonis d’acheter 1,000 chevaux n’en est pas moins excellente. Donnez ordre par un courrier extraordinaire, au directeur du parc, d’en acheter 2,000, s’il en trouve de bons. On ne saurait avoir trop de chevaux d’artillerie, et certainement j’ai aujourd’hui des charretiers à la Grande Armée pour servir 20,000 chevaux. Mais il est temps enfin de prendre un parti réel sur le parc. Je ne veux point non plus avoir 11 ou 1200 voitures à ma suite. Dites à Songis que c’est autant de pris par l’ennemi. Je ne veux pas plus de 400 voitures. Mais je n’entends pas que la moitié soit des caissons d’outils ou des effets d’artillerie des compagnies, etc. J’entends que ce soient des cartouches d’infanterie, des cartouches de canon, pour réparer les pertes, et avoir vingt ou trente pièces de canon de plus en batterie le jour d’une bataille. Sur ces 400 voitures, je n’en veux pas plus de 30 qui contiennent des objets de rechange du parc; le reste doit être cartouches et munitions. Telle est ma volonté. Alors ce parc me sera de quelque utilité, ne me gênera jamais, et, s’il retarde peu mes opérations, ce sera un retard raisonnable et selon la nature des choses. Écrivez donc au général Songis que, si j’avais 30,000 chevaux, je ne voudrais pas dans l’organisation de mon armée plus 400 voitures à mon parc.

Ainsi donc, que le général Songis fasse l’état des voitures et les dirige sur Bamberg, si elles sont encore à Augsbourg, ou à Würzburg, si elles sont sur la route; qu’il y ait au parc des munitions, des canons, des canonniers et une compagnie ou deux d’ouvriers, le conducteur général du parc et tout le personnel de l’artillerie qui n’est attaché à aucun corps d’armée. Ce parc me sera d’une immense utilité. Un atelier de réparation sera établi dans la citadelle de Würzburg, et un dans la citadelle de Forchheim. Un magasin de cartouches à canon et de cartouches d’infanterie sera formé à Würzburg, et un autre à Forchheim.

Les moyens du pays seront suffisants pour approvisionner rapidement ces deux dépôts. On peut même laisser à Augsbourg des munitions et des approvisionnements. A mesure que j’irai en avant, je choisirai un point central fortifié, et j’ordonnerai qu’on y fasse, avec les moyens du pays, des magasins; mais cela n’a rien de commun avec le parc mobile.

Ainsi donc mon parc doit être partagé en quatre : 400 voitures suivront l’armée avec une compagnie d’ouvriers, tous mes  pontonniers et tout le personnel de l’artillerie; un gros atelier de réparation sera formé dans la citadelle de Würzburg et à Forchheim; des ouvriers, des forges y seront envoyés; des magasins de cartouches, de rechanges et d’effets de toute espèce y seront réunis; mais de manière cependant qu’il reste à Augsbourg au moins le tiers de ce que j’y ai, de sorte que, soit que je me reploie sur Augsbourg, soit que je me reploie sur Forchheim, soit que je manœuvre sur Würzburg, je trouve dans ces places de quoi réapprovisionner mes caissons et réparer mon artillerie. Le parc réduit ainsi au simple nécessaire suivra l’armée.

Le général Songis me rendra compte tous les jours de ce qui s’y trouve, de ce qu’il fait, et je donnerai des ordres pour son réapprovisionnement et pour la formation de nouveaux dépôts. C’est ainsi qu’il est possible de faire la guerre; tout autre moyen est absurde.

Résumé. Indépendamment des ordres que vous transmettrez sur-le-champ au général Songis, transmettez-lui l’ordre d’acheter 2,000 chevaux. J’ai des charretiers à l’armée pour servir plus que ce nombre; mais ils ne doivent pas être employés comme domestiques, ils ne doivent pas être attachés aux caissons des officiers, des généraux. Je serai inexorable là-dessus, et je ne souffrirai pas que personne se serve des chevaux ni des caissons d’artillerie.

 

Mayence, 30 septembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je ne vois pas d’inconvénient que l’on occupe Neustadt. Ce qui m’avait fait porter une avant-garde à Koenigshofen, c’est que je pensais qu’il existait sur le territoire du pays, en avant de Koenigshofen, appartenant à la Bavière, une bonne position qui rendait maître des débouchés sur Meiningen et Hildburghausen. Mon intention n’étant pas de déboucher par Meiningen et Gotha, mais de faire ployer ma gauche sur Cobourg, il faut que les deux divisions du maréchal Lefebvre occupent une position en arrière de Neustadt, et qu’il fasse reconnaître une route telle qu’il puisse se porter, par une marche de flanc, qui sera dérobée à l’ennemi, sur le chemin de Würzburg à Cobourg, sans passer par Bamberg, pour ne pas faire confusion avec les autres corps d’armée. Il faut aussi qu’il y ait des détachements de cavalerie sur les hauteurs, entre Meiningen et Neustadt, jusqu’aux limites du territoire bavarois, afin d’empêcher, quand le moment sera arrivé, toute communication , et de pouvoir masquer le mouvement à l’ennemi , mon intention étant d’arriver à Saalfeld avant que l’ennemi s’y trouve en très-grande force. Envoyez donc un officier du génie reconnaître la frontière bavaroise jusqu’à Heldburg et même jusqu’au pendant des eaux qui est, je crois, au delà de Cobourg. Envoyez-en un autre reconnaître le pendant de eaux entre Meiningen et Melrichstadt, en avant de Neustadt. Que le maréchal Lefebvre réunisse son corps d’armée. Je n’aime point voir la division du général Gazan éparpillée dans les montagnes; c’est là l’affaire de quelques piquets ou, au plus, de quelques détachements; que sa division et son artillerie se réunissent en arrière de Neustadt; qu’il envoie des reconnaissances et des piquets de cavalerie sur la hauteur, comme je l’ai dit ci-dessus. J’attends ces deux reconnaissances, qui sont très-importantes.

Si vous avez même des outils à Würzburg, je ne serais pas éloigné d’avoir l’air de faire travailler à des redoutes sur les hauteurs, entre Meiningen et Neustadt, sur la hauteur du pendant des eaux et sur la limite du territoire wurtembergeois, également sur le pendant des eaux entre Kronach et Lobenstein. Toutefois il est nécessaire que le maréchal Bernadotte ait sur cette hauteur une avant-garde d’infanterie; il suffit qu’elle y soit placée le 4 Je suis fâché de n’avoir pas une reconnaissance de Kronach; je préférerais de beaucoup cette place, si elle est aussi bonne que Koenigshofen; faites-la armer et approvisionner sans délai.

 

Mayence, 30 septembre 1806

Au roi de Wurtemberg

Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté du 27, qu’un de ses officiers m’a apportée. Comme je pense qu’un courrier arrivera plus vite, je lui expédie ma réponse directement. Je serai fort aise de voir Votre Majesté. Voici mon itinéraire : je serai le 2 octobre à Würzburg et le 5 à Bamberg. J’aurai grand plaisir à m’aboucher dans les circonstances actuelles une heure avec elle. J’aurais été fort aise de pouvoir l’attendre à Mayence, si je n’étais le plus esclave de tous les hommes, obligé d’obéir à un maître qui n’a point de cœur : le calcul des événements et la nature des choses.

Je désirerais beaucoup que vos troupes pussent être rendues, du 10 au 12, du côté de Würzburg on de Bamberg. Si elle a à la main un millier d’hommes d’infanterie et quelques escadrons, elle peut les envoyer à Würzburg, où je les placerai en garnison jusqu’à ce que le corps puisse se réunir.

Si Votre Majesté se résout à faire une course aussi longue, nous pourrons convenir des arrangements relatifs au mariage que nous avons arrêté. Il me semble qu’il suffit que le cérémonial ait été réglé comme il doit se faire. Il faudra ensuite agir selon les circonstances. Quant à moi, Votre Majesté voit bien que je suis l’homme du monde qui, dans ce moment, peut faire le moins de calculs. Ce n’est pas que la guerre soit encore déclarée; je ne sache pas que M. Laforest ait encore quitté Berlin; on m’a annoncé un officier prussien, porteur d’une lettre du roi de Prusse; mais voilà trois jours qu’on m’en a parlé, et je ne le vois point venir.

Le grand-duc de Würzburg a adhéré à la Confédération.

 

Mayence. 30 septembre 1806

Au grand-duc héréditaire de Bade

Mon Fils, je reçois votre lettre du 27. J’approuve le désir que vous avez de faire la guerre. Je vous verrai avec plaisir près de moi. Vous pouvez vous rendre à Bamberg pour le 4 ou le 5 d’octobre et y envoyer vos chevaux. Si vous pouvez diriger sur-le-champ sur cette place votre régiment avec quelques escadrons de cavalerie et quelques pièces d’artillerie, cela sera convenable. Je laisserai, du reste, l’infanterie dans quelques places du côté de Bamberg, jusqu’à ce que
tout votre corps puisse se réunir. J’imagine que pour tous ces arrangements vous avez l’agrément du grand-duc. Pressez autant qu’il vous sera possible le départ de votre corps de troupes. Les princes de la Confédération se mettent en mouvement. Le prince Primat fournit seul 2,000 hommes. Il est donc bon de n’être pas trop en retard.

 

Mayence, 30 septembre 1806

Au roi de Wurtemberg

Monsieur mon Frère, je vous envoie un portrait qui, selon l’étiquette qui a été réglée, doit être remis par mon ministre le jour de l’audience que Votre Majesté lui accordera. J’ai pensé qu’elle serait bien aise de connaître un nouveau membre de sa famille qui désire bien faire sa connaissance et lui plaire. Il sers donc convenable que ce portrait soit rendu à mon ministre, pour qu’il puisse le remettre officiellement lorsqu’il sera présenté à la princesse.

 

Mayence, 30 septembre 1806

NOTE SUR LA DÉFENSE GÉNÉRALE DE L’EMPIRE, POUR L’ARCHICHANCELIER CAMBACÉRÈS

Le roi de Hollande est à Wesel; il a l’ordre de défendre depuis la Moselle jusqu’à la mer. Le maréchal Kellermann commande la réserve et les gardes nationales depuis la Moselle jusqu’à la Suisse.

Il y aura pour garnison à Mayence des dépôts qui auront bientôt une grande quantité de conscrits. Il y a quarante 3e bataillons ou dépôts le long du Rhin, lesquels reçoivent, soit par la conscription de 1806, soit par l’appel de la réserve, 30,000 conscrits.

Il y a à Paris deux régiments de ligne entiers, lesquels formeront en octobre, avec les troupes de Paris, un effectif de 8,000 hommes présents sous les armes. Il y a, soit à Paris, soit à Moulins, soit à Amiens, huit 4e escadrons de dragons, qui, avant le mois de novembre, auront 12,000 chevaux.

Les attaques du côté du Rhin ne peuvent être dangereuses pour l’intérieur. D’ailleurs, le roi de Hollande et le maréchal Kellermann sont munis d’instructions convenables, et de plus, étant aussi assuré que je le suis du midi de l’Allemagne, et me trouvant en situation d’être le premier averti de tout, je pourrai toujours envoyer à temps les ordres convenables.

L’ennemi peut débarquer en Hanovre. Le roi de Hollande se trouve à portée de faire face à tout si cet événement a lieu, et tous les corps qui se trouvent le long du Rhin appuieraient le mouvement du roi de Hollande.

L’ennemi peut débarquer à Boulogne; mais il y trouvera 15,000 hommes retranchés et qui sont, tant marins que fantassins, destinés à défendre ce poste important.

Le général Rampon réunit 6,000 gardes nationales à Saint-Omer. Dès l’instant où on saurait que les Anglais auraient réussi à opérer par force un débarquement, ce qu’ils ne peuvent faire qu’avec 30,000 hommes, on ferait partir promptement le maréchal Moncey, pour qu’il puisse réunir en toute hâte tout ce qu’il pourrait de gendarmerie de ces contrées, à Saint-Omer, et l’on dirigerait en poste sur la Somme les 8,000 hommes qui sont à Paris. Il faudrait que les Anglais fussent bien audacieux pour tenter cette entreprise, et le roi de Hollande en peu de jours se précipiterait sur eux.

Les Anglais peuvent débarquer à Cherbourg. Le général commandant la 14e division militaire a, dans cette partie, le 5e régiment d’infanterie légère. Ce régiment suffirait pour garnir les forts de Cherbourg. Les préfets mettraient en mouvement les gardes nationales, pendant que le maréchal Moncey serait envoyé pour rassembler sur un point toute la gendarmerie des départements voisins. D’une autre part, le général commandant à Rennes la 13e division militaire ferait marcher le camp volant de Pontivy et réuni- rait une grande partie des troupes qui sont dans sa division. Les 8,000 hommes qui sont à Paris se dirigeraient en poste vers Cherbourg. Ainsi l’ennemi ne réussirait pas à s’emparer des forts. S’il brûlait la ville et une frégate qui s’y trouve sur chantier, son entreprise n’en aurait pas moins été sans but, et dès lors insensée.

L’ennemi pourrait attaquer Brest. Le général commandant la 13e division militaire s’y jetterait avec les garnisons de cette division; tous les canonniers garde-côtes, ceux des régiments de la marine, se ploieraient dans la ville, où il se trouve plus de 10,000 marins et une grande quantité d’ouvriers qu’on armerait, et l’ennemi ne retirerait que de la honte d’une telle tentative. Il faut un siège en règle pour prendre Brest. Les troupes de Paris auraient le temps de se rendre en poste à Rennes. Le 31e régiment, qui est à Nantes, et ce que j’ai de troupes à Bordeaux se porteraient vers Brest. Une telle entreprise doit donc paraître extravagante.

Dans la saison actuelle, l’ennemi ne peut rien tenter contre Bordeaux, ni contre Belle-Île.

Au surplus, le remède à tout, c’est le prompt rassemblement de la gendarmerie, les compagnies de réserve départementales, la formation des gardes nationales, et l’envoi soudain du corps central qui est à Paris.

Une entreprise contre Toulon de la part des ennemis serait également folle. Indépendamment du régiment de la marine, des canonniers garde-côtes, des ouvriers, des marins, de la gendarmerie, des douanes, il y a le régiment d’Isembourg, fort de 3,000 hommes, et un bataillon du 32e régiment d’infanterie légère; tout cela dans Toulon mettrait cette place à l’abri de toute entreprise. Il faudrait 40,000 hommes aux ennemis pour l’attaquer, et il n’est pas probable qu’ils les y voulussent employer avec aussi peu de chance de réussir.

Ce qu’il y a de plus probable, c’est que l’ennemi débarquera en Hanovre. La saison n’est pas favorable pour un débarquement en Hollande, ni pour débarquer à Boulogne, et cette place est à l’abri de tout événement funeste, tant parce qu’elle est fortifiée qu’à cause du corps nombreux qui la défend. A mon avis, cependant, de tout ce que l’ennemi peut entreprendre, c’est ce qu’il y a le plus à craindre, car il ne faut qu’un succès d’un moment pour que l’ennemi détruise la flottille et le port, et puisse ensuite se retirer.

On doit croire que, dans la saison où nous entrons, l’ennemi n’essayera rien de sérieux, parce qu’il n’aurait plus la probabilité de pouvoir se rembarquer.

  1. l’archichancelier Cambacérès doit écrire tous les jours au roi de Hollande, quelquefois au maréchal Brune.

J’imagine que le ministre de la marine a toujours assez de vivres à Toulon, à Brest et à Cherbourg, pour que ces places ne puissent se plaindre d’en manquer en peu de temps, en cas d’événements.

Si l’ennemi débarque soit à Boulogne, soit sur tout autre point important de la France, on devra exécuter ce qui est prescrit dans la présente instruction, et M. l’archichancelier Cambacérès en préviendrait sur-le-champ le roi de Hollande afin que, laissant au général Michaud le commandement des troupes qui lui obéissent en ce moment, il se rendît en poste vers le lieu du débarquement pont s’opposer aux progrès de mes ennemis.

 

Mayence. 30 septembre 1806

Au général Junot

Monsieur le Général Junot, les 15e et 58e régiments d’infanterie légère doivent être entièrement réunis à Paris. Mon intention est qu’ils fassent peu de service, et que ce peu de service soit fait par régiment et par semaine, c’est-à-dire que pendant huit jours un régiment n’en fasse pas du tout. Vous ferez tirer à la cible les sous-officiers et les soldats. Vous porterez une grande attention à l’instruction des conscrits et à la bonne organisation de ces deux corps, afin qu’au moindre événement je puisse les avoir disponibles. Ils vont recevoir des conscrits; j’espère que ces deux régiments feront 6,000 hommes à eux deux; les colonels et officiers sont bons; ce doit faire, d’ici à un mois, deux très-beaux corps. Soignez aussi la garde de Paris, car je pense envoyer ces régiments à Boulogne, à Cherbourg, en Bretagne; et, si l’armée de Hollande, qui est à Wesel, avait besoin d’être renforcée, mon intention est que ces deux régiments, le 15e et le 58e, partent en poste pour les points menacés. Ce serait un renfort de 8,000 hommes qui ne serait pas indifférent.  Il est même possible qu’il y ait des événements qui me mettent dans le cas de vous faire marcher avec ces troupes. Vous voyez qu’il est important d’y donner tous vos soins.

Vos dépôts de dragons auront bientôt 2,000 hommes. J’y comprends celui du 4e qui est à Moulins, et celui du 10e, qui est à Amiens. Dans le cas où mes troupes seraient obligées de marcher, on rassemblerait des gendarmes qui feraient le service à Paris,. D’ailleurs les 3e bataillons que vous avez vont bientôt avoir assez de conscrits pour suffire à la police de Paris. Portez un grand soin à tous ces dépôts.

 

Mayence, 30 septembre 1806

INSTRUCTION POUR LE MARÉCHAL KELLERMANN, COMMANDANT L’ARMÉE DE RÉSERVE SUR LE RHIN, A MAYENCE

Il faut que M. le maréchal Kellermann ait 4 à 6,000 gardes nationales soldées à Mayence. Il en cantonnera 12 à 1500 à Cassel, avec une compagnie entière d’artillerie, un officier supérieur pour y commander, un adjoint à l’état-major, un officier du génie et un officier d’artillerie. Tous ces militaires auront l’ordre le plus positif de ne point découcher et de ne point sortir de Cassel. Il faudra exercer ces gardes nationales à la manœuvre du canon, afin qu’elles puissent aider l’artillerie. On placera 100 hommes à l’île de Saint-Pierre, 50 hommes dans le réduit qui défend l’inondation, une compagnie dans chaque fort détaché, et ils pourront être relevés toutes les semaines, ou même plus souvent si cela est nécessaire. La garnison de Cassel fournira 200 hommes aux redoutes de l’embouchure du Mein. Ils seront relevés comme les précédents. Un officier commandera dans l’île de Saint-Pierre et un autre à l’embouchure du Mein. On ne devra pas considérer les troupes qui sont à Mayence comme devant y rester, et la défense de cette place est spécialement affectée aux gardes nationales et à quatre compagnies d’artillerie et, en cas d’événements, aux six bataillons de réserve, qui, au moyen des conscrits qu’ils vont recevoir, auront un effectif de 4,000 hommes.

Le 8e corps de la Grande Armée, composé des divisions Dupas et Lagrange, sera réuni à Mayence dans la première quinzaine d’octobre, et destiné à prendre position à Francfort. Il agira suivant des circonstances étrangères à ce qui concerne la garnison de Mayence.

Le maréchal Kellermann correspondra avec le roi de Hollande, qui est à Wesel. Il doit ne laisser passer le pont de. Mayence à aucun soldat isolé qui voudrait joindre la Grande Armée; mais il fera réunir tous les soldats voyageant seuls, soit qu’ils sortent des hôpitaux, soit qu’ils aient quelque autre raison valable pour voyager ainsi, et, lorsqu’ils seront au nombre de 100, il les fera partir sous la conduite d’un ou plusieurs officiers, et aura soin, en les dirigeant sur l’armée, qu’ils soient munis du nécessaire. La route de l’armée continuera à être de Mayence à Würzburg; mais il se pourrait qu’on ordonnât que qui que ce soit ne passât davantage sur le pont Mayence, et que la route de l’armée fût de Mannheim à Würzburg. Il est donc convenable d’avoir vis-à-vis de Mannheim un adjoint qui recevra des ordres du maréchal Kellermann et l’instruira de tout ce qui viendra à sa connaissance. Il sera utile que cet adjoint ait avec lui une compagnie de gardes nationales; et une brigade de gendarmerie pourra aussi lui être nécessaire, afin de l’aider à réprimander toute espèce de désordre et pour lui prêter main-forte, etc.

Il y aura en outre à Mannheim même un commandant d’arme dépendant de la Grande Armée et qui correspondra avec le major-général. Il faut que le maréchal Kellermann active, autant que faire se pourra, l’habillement et surtout l’instruction des conscrits; lorsqu’ils seront à l’école de peloton, on les fera tirer à la cible; en temps dg guerre, c’est ce qu’il y a de plus pressé. Il faut s’attacher avec un soin très-scrupuleux à leur bien apprendre à nettoyer leurs fusils et à bien placer les pierres de leurs fusils.

Quant à ce qui concerne la cavalerie, l’ordre est donné pour qu’on n’achète pas de chevaux au-dessous de l’âge de cinq ans. Je préfère des chevaux de 4 pieds 3 pouces, ayant cinq ou six ou sept ans, et il y a en France un grand nombre de chevaux de cette espèce.

 

Mayence, 30 septembre 1806

Au maréchal Kellermann

Mon Cousin, les chasseurs et les grenadiers des gardes nationales destinés à la garde de la place de Mayence seront habillés sur leur solde et comme ils l’entendront. Mon intention est que le trésor ni la ville ne fassent aucuns frais pour cet objet. Les gardes nationales ne sont pas des troupes de ligne; il y en a beaucoup qui sont déjà habillées, et la rigidité de l’uniforme n’est pas ici de saison.

 

Mayence, 30 septembre 1806

NOTE POUR M. DE TURENNE

  1. de Turenne partira dans la journée pour porter une lettre au roi de Hollande; il suivra la rive gauche du Rhin. Cette dépêche est de la plus grande importance. Il la lui remettra en main propre et rapportera sa réponse. Quand il aura remis sa lettre, il passera à Düsseldorf; il verra l’officier qui y commande pour le grand-duc de Berg, pour savoir s’il a des renseignements à donner. Quand il saura ce qui s’y fait et ce qui s’y dit, il reviendra à Mayence pour savoir quelle est la route qu’il doit prendre pour rejoindre le quartier général.

 

Mayence, 30 septembre 1806

Au roi de Hollande

Je vous expédie M. de Turenne, qui est officier d’ordonnance près de ma personne; il vous remettra en main propre la présente, qui a pour objet de vous faire connaître le plan d’opérations que je me propose de suivre. Il est probable que les hostilités commenceront le 6 du mois d’octobre.

PREMIÈRE NOTE

Mon intention est de concentrer toutes mes forces sur l’extrémité de ma droite, en laissant tout l’espace entre le Rhin et Bamberg entièrement dégarni, de manière à avoir près de 200,000 hommes réunis sur un même champ de bataille. Si l’ennemi pousse des partis entre Mayence et Bamberg, je m’en inquiéterai peu, parce que ma ligne de communication sera établie sur Forchheim, qui est une petite place forte, et de là sur Würzburg. Il deviendra donc nécessaire que vous fassiez passer les courriers les plus importants que vous aurez à m’expédier par Mannheim, et de là ils prendront langue à Forchheim, et m’arriveront de la manière la plus sûre. La nature des événements qui peuvent avoir lieu est incalculable, parce que l’ennemi, qui me suppose la gauche au Rhin et la droite en Bohème et qui croit ma ligne d’opération parallèle à mon front de bataille, peut avoir un grand intérêt à déborder ma gauche, et qu’en ce cas je puis le jeter sur le Rhin. Occupez-vous de mettre Wesel dans le meilleur état possible, afin que vous puissiez, si les circonstances le demandent, faire repasser toute votre armée sur le pont de Wesel et longer le Rhin, afin de contenir les partis, et qu’ils ne puissent aller au delà de cette barrière. Le 10 ou le 12 octobre il y aura à Mayence le 8e corps de la Grande Armée, fort de 18 à 20,000 hommes. Son instruction sera de ne pas se laisser couper du Rhin, de faire des incursions jusqu’à la hauteur de Francfort; mais, en cas de nécessité, de se retirer derrière le Rhin et d’appuyer sa gauche à vos troupes.

DEUXIÈME NOTE

Les observations de ma première note, qui est ci-dessus, sont toute de prévoyance. Mes premières marches menacent le cœur de la monarchie prussienne, et le déploiement de mes forces sera si imposant et si rapide, qu’il est probable que toute l’armée prussienne de Westphalie se ploiera sur Magdeburg, et que tout se mettra en marche à grandes journées pour défendre la capitale. C’est alors, mais alors seulement, qu’il faudra lancer une avant-garde pour prendre possession du comté de la Marck, de Münster, et d’Ost-Frise, au moyen de colonnes mobiles qui se ploieraient au besoin sur un point central. Il en résulterait que l’ennemi ne tirerait ni recrues ni ressources du pays, et que vous pourriez en tirer, au contraire, quelques avantages. Vous devez sentir que la masse vos forces ne doit point s’éloigner de Wesel, afin que de là vous pussiez défendre votre royaume et les côtes de Boulogne, si les circonstances l’exigeaient. Pour la première époque de la guerre, vous n’êtes qu’un corps d’observation, c’est-à-dire que, tant que l’ennemi n’a pas été jeté au delà de l’Elbe, je ne compte sur votre corps que comme sur un moyen de diversion et pour amuser l’ennemi jusqu’au 12 octobre, qui est l’époque où mes opérations seront démasquées; et aussi pour qu’un corps ennemi, qui se trouverait coupé et qui ne verrait d’autre ressource que de se jeter en Hollande ou en France, n’y pût pénétrer; ou enfin pour qu’en cas d’un événement majeur et funeste, tel que pourrait l’être une grande bataille perdue, vous puissiez, pendant que j’opérerais ma retraite sur le Danube, défendre Wesel et Mayence avec votre armée et le 8e corps de la Grande Armée, qui ne s’éloignera jamais de Mayence, et empêcher en même temps l’ennemi de passer le Rhin et de piller mes États.

TROISIÈME NOTE

Il est nécessaire que vous correspondiez fréquemment avec le maréchal Brune ainsi qu’avec le Texel, pour pouvoir être sur les côtes, si les Anglais y débarquent, ce que je ne crois guère probable. Il est plus vraisemblable qu’ils enteront de débarquer en Hanovre, et qu’en se réunissant aux Suédois ils y auraient bientôt 25,000 hommes. N’ayant plus de craintes alors pour la Bretagne, pour Cherbourg, ni pour Boulogne, j’ordonnerais au corps de 8,000 hommes que j’ai à Paris de venir en poste vous renforcer, ce qui serait une affaire de dix jours. Débarrassé vous-même de toute appréhension, vous pourriez vous faire renforcer par les troupes du camp de Zeist, et, en cas de nécessité absolue, la totalité ou partie du 8e corps d’armée quitterait Mayence pour se rendre, à marches forcées, par la route du Rhin, auprès de vous. Ces moyens réunis vous donneraient une quarantaine de mille hommes, qui occuperaient assez les Suédois et les Anglais pour que mon armée n’en fût point attaquée. En tout ceci, je vais aussi loin que la prévoyance humaine le puisse permettre. D’ailleurs, malgré l’éloignement où nous pourrions nous trouver l’un de l’autre, assuré comme je le suis du midi de l’Allemagne, je pourrai toujours vous envoyer, en peu de jours, des instructions analogues aux circonstances.

QUATRIÈME NOTE

Une fois le premier acte de la guerre fini, il sera possible que je vous charge de conquérir Cassel, d’en chasser l’Électeur et de désarmer ses troupes. Le 8e corps de la Grande Armée, une portion de la vôtre, et peut-être même un détachement de mon armée, auquel je donnerais cette destination, vous mettraient à même d’effectuer cette opération. L’Électeur veut être neutre; mais cette neutralité ne me trompe pas, quoiqu’elle me convienne. Vous devez l’entretenir dans les sentiments qu’il manifeste à ce sujet, sans compromettre cependant votre caractère. Des paroles d’estime pour sa personne dites à propos, la manifestation fréquente de l’intention où vous êtes de vous conformer aux ordres que vous avez de bien vivre avec lui, de bons procédés de tout genre, le maintiendront encore quelque temps dans cette neutralité à laquelle il a recours. Quant à moi, j’aime fort à voir à mon ennemi 10 à 12,000 hommes de moins sur un champ de bataille où ils pourraient être. Mais, je répète, le premier résultat d’une grande victoire doit être de balayer de mes derrières cet ennemi secret et dangereux. Je ne vous dis ceci qu’afin que vous étudiiez le pays, et vous voyez le cas que je fais de vous par la confiance que je vous montre.

A tout événement la garnison de Wesel doit être composée du 22e de ligne que j’y ai laissé, des quatre compagnies d’artillerie qui y sont, du bataillon du grand-duc de Berg, et, s’il est nécessaire, d’un millier d’hommes à retirer des dépôts de la 26e division militaire, en organisant 150 hommes par dépôt et en ayant bien soin ne placer avec ce nombre d’hommes que deux officiers, deux sergents et quatre corporaux par dépôt; afin que, si la place devait être prise,  je n’eusse pas à regretter un grand nombre d’officiers et surtout le déficit que cela produirait dans mes corps à cause de la non-formation des conscrits. Je laisse le général Marescot premier inspecteur de l’arme du génie en deçà du Rhin, avec l’ordre d’être soit à Mayence, soit à Wesel, à Venloo, à Anvers, à Juliers et à Maëstricht, pour fortifier ces différents points et prendre les mesures provisoires que les circonstances commanderont. Vous le verrez sous peu à Wesel.

Il me serait impossible de vous donner des instructions plus détaillées. Ayez de vos officiers d’état-major au quartier général du maréchal Brune à Boulogne, et qu’il s’en trouve au vôtre de l’état-major du maréchal Brune. Tenez-vous au courant de toutes les nouvelles que le maréchal Kellermann pourra rassembler à Mayence. Écrivez fréquemment à M. l’archichancelier Cambacérès et au ministre Dejean, afin d’en recevoir des nouvelles. Écrivez même quelquefois pour le même objet au général Junot, qui commande mes troupes à Paris. N’exposez jamais votre corps d’armée et ne hasardez pas votre personne, puisque vous n’avez qu’un corps d’observation. Le moindre échec que vous éprouveriez me donnerait de l’inquiétude; mes mesures en pourraient être déconcertées, et cet événement mettrait sans direction tout le nord de mon empire. Quels que soient, au contraire, les événements qui m’arriveront, si je vous sais derrière le Rhin, j’agirai plus librement; et même, s’il m’arrivait quelque grand malheur, je battrais mes ennemis quand il ne me resterait que 50,000 hommes, parce que, libre de manœuvrer, indépendant de toute ligne d’opération et tranquille sur les points les plus importants de mes États, j’aurais toujours des ressources et des moyens.

Il est possible que les événements actuels ne soient que le commencement d’une grande coalition contre nous et dont les circonstances feront éclore tout l’ensemble; c’est pourquoi il est bon que vous songiez à augmenter votre artillerie. Les troupes ne manqueront pas; elles vous viendront de tous côtés; mais elles n’amèneront pas avec elles les attelages qu’elles auront besoin d’avoir. Vous avez aujourd’hui trente pièces d’artillerie attelées : c’est plus qu’il ne vous en faut à la rigueur, mais ce n’est pas assez en cas d’événements. Attachez-vous à vous procurer insensiblement des attelages en bon ordre, de telle sorte que vous puissiez en réunir soixante vers le mois de novembre. Comme il nous faut un chiffre, je charge le général Clarke, secrétaire de mon cabinet, de vous en envoyer un. Mais ne chiffrez que ce qui est important.

 

Mayence, 30 septembre 1806, minuit

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, j’approuve la nomination du général que vous avez nommé pour commander Würzburg. Je n’ai point la reconnaissance de Kronach. Cette position, avec celles de Würzburg et de Forchheim, assurerait bien mes derrières. Kronach fortifié serait l’appui de mon avant-garde; et, ma droite appuyée à Forchheim, ma gauche à Würzburg, je serais environné de places fortes. Faites donc armer ces trois places.

 

Mayence, 30 septembre 1806

Au général Marescot

Monsieur le Général Marescot, j’approuve beaucoup votre projet relatif aux caissons. Présentez-moi, ce soir même, un projet de décret au moyen duquel les caissons que vous proposez seront attachés aux bataillons de sapeurs, et qui réglera le mode de leur achat, de leur entretien, etc. Il est temps de prendre un parti relativement à ces caissons, dont le service est indispensable. Il faut que le génie ait avec lui tout ce dont il a besoin. Il sera bon de mettre dans les caissons ce qui convient relativement aux outils de mineurs. On me dit qu’il est parti de Strasbourg pour Würzburg beaucoup d’outils. Si cela est vrai, il suffira peut-être d’envoyer à Würzburg environ 15,000 outils qu’on pourra charger sur douze à quinze prolonges d’artillerie qu’on attellera avec des chevaux de réquisition, et ces prolonges seront alors attachées, pendant cette campagne, au service du corps du génie. Ainsi les déplacements et les versements d’outils d’une place sur l’autre ne deviendront plus funestes au service. On saura où chaque chose aura été placée; et, sans un ordre bien établi pour tous ces objets de détail, tout se perdrait, les dépenses pour l’État seraient énormes, et je finirais cependant par ne rien avoir.