Correspondance de Napoléon – Septembre 1804

Cologne, 16 septembre 1804

A M. Gaudin

Monsieur Gaudin, Ministre des finances, je désire connaître si les obligations pour le droit de passe sont souscrites, quel en est le montant, et la partie qui est versée au trésor public. J’ai parcouru beaucoup de départements, causé avec les administrateurs et receveurs, et je reste convaincu qu’il n’y en a pas un qui ne fût prêt à signer le montant de ses obligations en douze mois, avec une restriction convenable pour lui servir d’escompte. Il faut donc vous occuper sérieusement de cet objet, car c’est la seule manière de rétablir l’ordre dans nos finances.

Dans la loi du budget, je pense qu’il sera nécessaire de conserver le centime additionnel pour l’an XIII. J’espère que vous vous occupez de trouver des matières de cautionnements, afin de compléter nos budgets.

J’espère que les droits réunis rendront plus de dix-neuf millions pour l’an XIII. Beaucoup de départements espèrent des recettes assez considérables.

 

Cologne, 16 septembre 1804

A M. le cardinal Fesch, ambassadeur à Rome

Monsieur mon oncle et Cousin, M. le général Caffarelli, mon premier aide de camp, officier distingué, pour qui j’ai de l’affection, est le porteur de ma lettre au Pape. Il est convenable que vous lui ménagiez une entrevue particulière pour qu’il remette lui-même ma lettre au Saint-Père.

Le Saint-Père viendra dans ses voitures jusqu’au pied du montCenis; arrivé là, mes voitures le prendront; une députation le recevra à l’extrémité du territoire, et il sera défrayé de tout, du moment qu’il y aura mis le pied. Vous devez accompagner le Pape, mais incontinent retourner à Rome avec lui, mon intention étant que vous continuiez à séjourner dans cette ville. Je désire que le Pape soit arrivé le 18 brumaire; n’arriverait-il que le 15 ou le 16, cela est égal, parce que nous renverrons ensuite la fête à dix ou quinze jours à volonté; et enfin, pourvu qu’il soit en deçà des Alpes avant le 12 brumaire, je serai satisfait. J’imagine que vous le logerez, à Lyon à l’archevêché. Il sera facile de le loger à Turin. A Paris, je compte le loger au pavillon de Flore, aux Tuileries. J’imagine qu’il sera plus satisfait de cela que d’être logé à l’archevêché.

Je désire beaucoup que le roi de Sardaigne ne retourne plus à Rome; c’est une question finie. Je ne permettrai plus qu’il ait rien en Italie. C’est donc pour moi un sujet de désagrément de voir un agent russe à Rome et ce prince, qui ne laisse pas que de gêner et finirait par compromettre le Pape. Il faut profiter de cela pour que le Pape ne le laisse plus revenir à Rome et l’engage à rester à l’extrémité des États romains.

 

Coblentz, 19 septembre 1804

A M. Portalis, chargé par intérim du portefeuille de l’intérieur

Je ne vois aucune difficulté à ce que le général Carteaux ne parte que le 10 ou 12 vendémiaire pour Piombino. Ce déplacement n’est pas une disgrâce, mais une mission de confiance. Il y fera du bien; c’est dans ce sens que vous devez lui en parler.

 

Coblentz, 19 septembre 1804

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, l’état que vous m’avez envoyé de la solde de vendémiaire contient quelques erreurs.

1° Il n’y a pas 3,000 vélites.
2° Si le 5° de ligne est passé de la solde d’Étrurie à celle de France, le 62e qui était à Turin, a été en Étrurie.
3° Le second bataillon ligurien, qui est à Gênes, ne doit pas être payé par la France; celui qui est à Tarente est seul à la solde de la France.
4° Le calcul de 468,000 francs par mois pour le pain blanc est erroné; au lieu de cette somme, cela ne doit pas aller, à beaucoup près, à 400,000 francs. Pour cela, il faut vérifier si ce pain est accordé aux hommes présents ou à l’effectif; il me semble qu’il ne doit l’être qu’aux présents; il n’a pas non plus été accordé aux sous-officiers; enfin les vétérans, les gendarmes, les armées de Hanovre, de Hollande, d’Étrurie, de Lucques, de Naples, ne doivent pas en jouir. Je désire donc que vous établissiez des calculs plus précis sur cet objet. J’envoie votre état au ministre du trésor public, qui vous le fera passer.

 

Coblentz, 19 septembre 1804

A M. Barbé-Marbois, ministre du trésor public

Vous trouverez ci-joint l’état que m’envoie le ministre de la guerre. Il en résulte que la solde ne doit monter qu’à 8,684,000 fr. pour vendémiaire; encore, sur cette somme, y a-t-il des observations à faire.

On a porté en plus le 5e régiment de ligne, qui n’est plus en Étrurie; mais il fallait porter en moins le 62e, qui n’est plus en Piémont et qui est passé à la solde de 1’Érurie.

Le second bataillon ligurien ne doit pas également être soldé; ces bataillons étaient au nombre de deux; l’un, qui est à Tarente, est à notre solde; le deuxième, qui est à Gênes, doit être soldé par la République ligurienne.

On a porté les vélites pour 3,000; je ne sais pour quelle raison, puisque leur complet est de 1,600, et qu’ils ne sont pas aujourd’hui plus de 11 à 1200.

Vous demandez dans votre rapport 9,300,000 francs; il est vrai que vous y comprenez le pain blanc; mais le ministre, même en l’y comprenant, et malgré les petites erreurs que j’ai remarquées, demande que neuf millions.

Le ministre de la marine m’avait assuré que les troupes embarquées sur les vaisseaux de guerre, ainsi que celles qui sont dans les colonies, étaient payées par la marine; ce fait est facile à vérifier. Qui est-ce qui paye les garnisons des escadres de Toulon, de Brest, de l’île d’Aix ? Si c’est la marine, vous vous trouverez demander beaucoup trop.

Faites passer au ministre de la guerre l’état, puisqu’il le demande. Il faut avoir soin, dans les distributions du mois, de porter en tête du crédit fait à l’administration de la guerre la portion des huit millions destinée à la partie de la masse qui se paye comme solde et qui doit être prise sur les fonds de l’administration de la guerre. Il y a également trois millions, qui se payent comme solde, sous le titre de fournitures de campagne. Le retard du payement de
deux objets au trésor public ne laisse pas que de porter de la confusion dans la question de la solde. Il faut aussi avoir soin veiller à ce que le pain blanc ne se donne qu’aux présents et non à l’effectif.

Je reste toujours convaincu que cette partie mérite toute votre sollicitude, et qu’il est possible d’y faire des économies importantes, je désirerais qu’on fit successivement vérifier les trente-six payeurs; ce n’est que par ce moyen qu’on peut connaître les abus qui existent dans ce service. Je demeure persuadé que huit millions, non compris le pain, doivent être suffisants pour la solde.

 

Coblenz, 19 septembre 1804

Au maréchal Berthier, ministre de la guerre

Mon Cousin, j’ai examiné avec attention les places de Juliers de Venloo.

Un ouvrage à couronne a été construit sur la Roër, en avant Juliers; mais les détails de la construction m’ont semblé faits sur des projets extrêmement chers. On a, dans cette localité, le moyen de se couvrir par une inondation, et la place ne peut, dans tout le reste, être assez formidable pour que jamais on l’attaque du côté de l’ouvrage à couronne. J’ai jugé fort inutiles toutes les dépenses qu’on a faites pour des casemates. Ainsi l’on aurait pu épargner un million pour cet ouvrage, qui, à ce qu’on m’assure, coûtera 1,400,000 fr. J’ai aussi regretté qu’on eût donné à cet ouvrage si peu de profondeur. A mon sens, les branches sont trop courtes, ce qui fait qu’il n’y a pas assez d’espace, tandis qu’il aurait été si facile, soit en brisant les branches, soit en leur faisant recevoir les feux d’un petit saillant qu’on eût établi sur la rive gauche, de rendre cet ouvrage bien plus spacieux et beaucoup plus beau. Dans sa situation actuelle, je pense qu’il ne faut pas y établir de casernes. En temps de guerre, il y aura assez de place dans les casemates pour contenir les hommes nécessaires à la défense, et, d’ailleurs, ils auront toujours la ressource de la ville. Des casernes dans les ouvrages avancés ne servent, en général, qu’à les affaiblir; tandis qu’elles peuvent être placées avec utilité dans les autres parties plus à l’abri des attaques.

Je désire que vous ordonniez la démolition des fronts de la citadelle qui regardent la ville; cela donnera de l’espace et une fort belle esplanade, dont la ville a besoin. On peut cependant se servir de ces fronts pour établir des souterrains, si l’on juge en avoir besoin.

Il faut acheter les maisons voisines des deux casernes existantes, afin de pratiquer devant elles de belles esplanades, qui contribuent à la santé et à la discipline des troupes.

Il y a à Juliers des maisons nationales qui ne sont point à votre disposition. Il faut les demander sur-le-champ et les mettre en réparation, pour en faire des casernes.

Il faut faire démolir, à la citadelle, toute la partie du château qui est élevée au-dessus des corps de bâtiments ; les débris seraient fort dangereux pendant un siège, tandis que les matériaux peuvent servir. J’ai vu les ouvrages pratiqués sur la hauteur; ils coûteraient quatre millions pour être terminés; je crois cette dépense beaucoup trop considérable.

La hauteur étant occupée par l’ennemi, la place conserverait encore toute sa défense. Si l’on met en bon état le front de la place opposé à la hauteur, et, si on lui donne quelque relief, elle dominera peu la place, puisqu’elle est à 400 toises et qu’elle finit d’une manière très-rapide, de sorte que 300 toises entre la place et la hauteur sont dominées par l’enceinte de la place. En supposant qu’il fallût dépenser trois à quatre millions sur ces hauteurs, je crois encore le système très-fautif. On a établi une espèce d’ouvrage à couronne, qui ne tire aucune défense de la place, et dont, par conséquent, les côtés n’auraient aucune sorte de défense aussitôt qu’un des forts de droite ou de gauche aurait été pris. En effet, celui du centre serait battu en brèche, sur-le-champ, du fort même qui aurait été pris, et ils ne tiendront pas quatre jours.

Mon opinion est donc qu’un simple fort en étoile serait d’une aussi forte défense qu’un ouvrage à couronne, qui coûtera beaucoup d’argent et de bras. Et, si l’on persistait à dépenser beaucoup sur la hauteur, il faudrait le faire par trois bastions qui formeraient le triangle et seraient parfaitement défendus; le plus avancé dans la campagne serait le plus soigné
et se trouverait défendu par les deux autres. Je ne puis que vous répéter que, quand j’ai vu le système sur le terrain, j’ai craint non seulement pour la dépense que nous faisons, mais encore pour l’honneur de l’arme. Les officiers du génie n’ont pu rien me répondre lorsque j’ai raisonné d’après cette supposition que l’ennemi attaquerait un bastion de droite ou un bastion de gauche de la couronne. Quant au fort qu’on pourrait faire pour soutenir l’ouvrage à couronne ce serait une augmentation de dépense et un bien faible sûreté de défense. On ne ferait que préparer deux batteries de plus pour l’ennemi.

Mon opinion est donc qu’il ne faut pas dépenser plus de cent mille écus sur la hauteur de Juliers, qu’il faut y faire un fort unique en étoile, lequel tiendra la tête du camp retranché, empêchera l’ennemi de s’approcher de la place, l’obligera à ouvrir la tranché devant ce fort et à l’attaquer en règle avec de l’artillerie de siège.

Et enfin, lorsqu’il y aura un parc d’artillerie de siége assez considérable et la volonté de suivre l’attaque, cet ouvrage sera pris, sans doute, mais la place restera entière. En donnant du relief et en couvrant bien quelque ouvrage du front qui regarde la hauteur, on lui donnera beaucoup de défense. Je désire donc que vous me présentiez à nouveau les projets de Juliers, avec l’ordre qui doit être mis dans chaque partie.

Quant à Venloo, il faut prendre les couvents et les maisons nationales encore existants, et les faire mettre en état, pour former des casernes. Il faut, dans le courant de l’année, réparer les batardeaux et les différents points de l’enceinte. Plusieurs maisons de particuliers gênent et obstruent les remparts; il convient de les démolir. Il m’a paru qu’en rasant deux ou trois monticules, en donnant du relief à quelques ouvrages avancés, en revêtissant et en reformant les contrescarpes à quelques flèches avancées, cette place serait d’une grande utilité; mais elle ne remplirait pas son but, si elle ne restait à cheval sur la Meuse. Je suis donc bien loin de partager l’opinion de ceux qui veulent démolir le fort Saint-Michel. Je pense qu’en faisant simplement revêtir ses demi-lunes et en établissant une contrescarpe au saillant de ses batteries, ainsi que le chemin couvert, non-seulement le long du fort, mais même, comme il a été fait par les Français, en le prolongeant jusqu’à rencontrer la rivière, et en l’accompagnant d’un fossé plein d’eau, et, enfin, en fermant à la gorge par un mur crénelé le fort actuel, on aurait, sans aucune dépense, une tête de pont susceptible d’une bonne et longue défense; et l’ennemi n’attaquerait jamais le fort mis dans cet état, parce qu’il ne lui donnerait aucun avantage; il attaquerait au contraire le corps de la place. Je ne voudrais point de casernes dans ce fort; on pourrait seulement y établir, le plus près possible de la rivière, un magasin à poudre à l’abri de la bombe. On mettrait aussi dans la place du bois pour les constructions de petites baraques, à l’usage des troupes qui seraient de service, le long des remparts.

Je suis persuadé qu’avec une dépense beaucoup moindre d’un million, et qui peut se faire en cinq ou six années, on parviendrait à rendre Venloo tout ce qu’il doit être, c’est-à-dire un point d’appui pour l’armée sur le bas Rhin et sur la Meuse inférieure; et, en effet, les convois pourraient de là se rendre dans un jour sur le bas Rhin.

Soumettez-moi un projet dans ce sens. Tout autre projet, qui tendrait à dépenser trois à quatre millions à Venloo, je ne l’approuverais point. Je préférerais certainement employer cet argent à la construction d’une grande place qui maîtriserait le Rhin.

 

Coblentz , 19 septembre 1804

Au vice-amiral Decrès

Monsieur Decrès, Ministre de la marine, mon intention est que le lieutenant Grant soit échangé contre un des lieutenants de la corvette que commandait Jérôme. Quant à la seconde question, nous avons nos habitudes et les Anglais ont les leurs. Nous ne sommes pas une nation neuve. De tout temps nous avons traité les prisonniers que nous avons eus. Je ne veux donc rien changer à cet égard. Quant à l’habillement, mon intention est d’habiller les prisonniers anglais, parce qu’ils sont en mon pouvoir, et que la générosité, les lois de la nature veulent qu’on leur donne tout ce qui est nécessaire. Ils ont leur masse comme les troupes. Les Anglais doivent en faire autant, d’autant plus que leurs prisonniers sont de misérables pêcheurs qui, naviguant sur des bâtiments de commerce, dont pas n’ont pas été pris à main armée. Ainsi donc je veux que les prisonniers anglais ne coûtent rien aux Anglais, et que les prisonniers français qu’ils pourraient avoir ne me coûtent rien. Faites-moi connaître ce que c’est qu’un M. Brenton; je n’entends point qu’il ait aucune correspondance; aucune lettre sur cet objet n’a été remise, et M. Perregaux, ou tout autre individu, aurait tort de se mêler de ces affaires-là. J’approuve la réponse que vous proposez de faire pour le capitaine Jurien. Quant à la proposition faite d’envoyer des agents de part  et d’autre pour surveiller les prisonniers, faites connaître que cette demande n’a point été soumise à l’Empereur, mais a été mise sous les yeux du ministre, qui pense que l’Empereur ne fera aucune difficulté d’adhérer à une proposition si conforme au droit des gens dès qu’il connaîtra l’agent anglais qu’on est dans l’intention d’envoyer; que sur cet objet le personnel de l’individu décidera le Gouvernement à adopter ou à rejeter la proposition.

 

Coblentz, 19 septembre 1804

Au vice-amiral Decrès

Monsieur Decrès, Ministre de la marine, après le rapport que vous m’avez fait, voici les bâtiments que montera ma Garde :

Un seul paquebot . . . . . . . . . . . . . . 14 hommes
Deux grands canots . . . . . . . . . .  . . 6
36 chaloupes canonnières . .. . . 612
36 péniches . . . . . . . . . . . . . . . . .  144
——–
776

Dans les 36 chaloupes canonnières seront comprises les corvettes canonnières; et comme la Garde a aujourd’hui 29 chaloupes canonnières à Boulogne, 7 chaloupes canonnières au Havre, 4 corvettes canonnières au Havre, total 40, elle remettra à la marine 4 canonnières dont les équipages seront formés comme à l’ordinaire; et à mesure que des corvettes canonnières arriveront de Saint-Malo, elle remettra, également les autres.

Quant aux 5 paquebots, ils resteront toujours sous les ordres de la Garde, qui y mettra un homme pour les garder, et les équipages en seront formés ultérieurement.

Vous me faites la proposition de faire entrer dans l’arsenal de Brest 46 bateaux canonniers et 84 péniches, afin d’employer les 1,500 hommes d’équipage que cela vous fournirait au complément de l’expédition de Brest. Vous avez prévu combien j’aurais de répugnance à approuver cette mesure; faites-moi connaître le nombre de chaloupes, bateaux canonniers et péniches qu’il nous restera, et les lieux où ils se trouvent aujourd’hui; faites-moi, connaître également la portion du port de Brest où ces bâtiments pourront être réunis, car, en supposant que je me décide à faire ce désarmement d’après les rapports que vous me ferez, je voudrais qu’ils fussent tous réunis à Brest, entretenus et soignés de manière à pouvoir, d’un instant à l’autre, être réarmés. Je pense aussi que s’il y avait possibilité que chaque vaisseau de guerre à Brest pût embarquer une péniche, ce surcroît de moyens de débarquement ne laisserait pas d’avoir d’immenses avantages. J’attends avec intérêt le rapport que vous m’annoncez sur l’autre objet, ainsi que les renseignements que vous avez puisés dans la dernière expédition des Anglais.

 

Mayence, 21 septembre 1804

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je me suis fait rendre compte de ce que le Pontifical romain prescrit pour le sacre; je l’ai fait traduire et je vous l’envoie. Je désire que vous me le renvoyiez avec vos observations et des modifications plus adaptées à nos mœurs, et qui blessent le moins possible la cour de Rome. Cela nécessitera aussi quelques décorations différentes dans le chœur de l’église. Je désire, au reste, que vous ne fassiez part à personne, si ce n’est à Portalis, de ces questions, puisque cela ne serait qu’un vain sujet de bavardage.

 

Mayence, 21 septembre 1804

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, j’ai reçu l’état des garnisons de la flottille impériale au 10 fructidor. Cet état m’a paru fait avec grand soin. Il est divisé en deux parties. La première partie comprend l’état de situation par ordre numérique. Cette partie est fautive, en ce sens que vous placez, pour former la première division de chaloupes canonnières, les dix  huit premiers numéros, et ainsi de suite : cet ordre n’existe pas. La première division de chaloupes canonnières est formée telle qu’elle se trouve au second état intituléRépartition de la flottille impériale dans les différents ports, où l’on voit, après le n° 1, le n° 259.

 

Mayence, 21 septembre 1804

DÉCISION

Claret-Fleurieu rend compte de l’état des travaux de la galerie du muséum, qu’il croit devoir être continués.N’étant pas sur les lieux, je ne puis donner aucun ordre relativement à cette galerie. Mon intention est qu’au 18 brumaire on en ait la jouissance, sans quoi l’appartement du Pape serait mesquin. Si la construction des trumeaux ne peut être faite pour cette époque et doit contrarier la jouissance de cette galerie, il n’y a qu’à l’ajourner à une autre année.

 

DÉCISION

Le conseil général de liquidation présente à I’Empereur un projet de décret tendant,
1° A arrêter les comptes de la compagnie Rousseau à13,891,931 francs;
2° A admettre provisoirement les pièces de dépenses de cette compagnie pour la somme de 5,l90,686 francs;
3° A rejeter les autres pièces comme arguées de faux.
Cet arrêté de la comptabilité devrait être signé; savoir pourquoi il ne l’est pas. Renvoyé à M. Defermon pour qu’il le fasse signer; et, pour ne pas perdre temps, il en renverra deux copies au grand juge et au ministre du trésor public, avec cette apostille de moi :

« Le grand juge et le ministre du trésor public prendront les mesures, le premier, pour faire exécuter les lois de la République envers les faussaires et leurs complices; et le second, pour pouvoir le plus promptement possible aux intérêts du trésor. »

 

Mayence, 22 septembre 1804

NOTE POUR LE MINISTRE DES CULTES

Je désire qu’il fasse donner 8,000 francs de gratification à l’évêque d’Aix-la-Chapelle et à celui d’Arras, pour les indemniser des dépenses que peut leur avoir occasionnées mon séjour dans leurs diocèses; qu’il en donne 19,000 à celui de Mayence, pour l’indemniser des frais qu’il peut avoir faits pour recevoir l’électeur archichancelier.

 

Mayence, 22 septembre 1804

A M. Régnier, Grand-Juge, ministre de la Justice, à Paris.

Par votre lettre, vous m’annoncez que M. Botton a changé d’opinion et, après avoir refusé le poste de substitut près la cour de cassation. il l’accepte. Je suis fâché que dans cet intervalle cette place ait été donnée à un homme très distingué de Cologne. La première place qui se présentera au tribunal de cassation, je la lui ferai donner.

(Brotonne)

 

Mayence, 23 septembre 1804

A l’Empereur d’Autriche

Monsieur mon Frère, je suis sensible aux choses aimables contenues dans la lettre de Votre Majesté. Je la prie de recevoir mes félicitations sur l’érection de sa Maison en Maison impériale héréditaire d’Autriche. Un long règne à Votre Majesté, une paix perpétuelle entre nous, et qu’elle permette que j’ajoute, tout ce qui petit contribuer au bonheur de l’intérieur de sa famille, sont des événements qui ne seront jamais étrangers à mon propre bien-être. Mais surtout que Votre Majesté ne conçoive jamais de doute sur mon désir constant et sincère de maintenir dans nos deux États la meilleure harmonie, non plus que de mes sentiments d’estime, d’amitié et de haute considération.

Monsieur mon Frère, de Votre Majesté impériale le bon frère,

Napoléon

 

Mayence, 24 septembre 1804

A M. Portalis

Monsieur Portalis, chargé par intérim du portefeuille de l’intérieur, mon intention est que les évêques de Mayence, d’Aix-la-Chapelle et de Tournay soient nommés membres des conseils des hospices civils et des comités de bienfaisance des villes de leur résidence.

 

Mayence, 25 septembre 1804

DÉCISION

Rapport du ministre de la guerre sur le refus, fait par le capitaine d’un trois-mâts russe mouillé à Paimboeuf, de recevoir une haussière à son bord, afin d’empêcher l’échouement d’une chaloupe canonnièreRenvoyé au ministre de la marine pour faire mettre en prison  ce capitaine russe, par forme de police maritime, et pour donner
à ce barbare une leçon d’hospitalité.

 

Mayence, 26 septembre 1804

A M. Cretet

Monsieur Cretet, Conseiller d’État, presque toutes les grandes villes de France ont des jeux. La police en prend le produit pour son profit. Mon intention est qu’il aille désormais au profit des villes. Bordeaux rend 200,000 francs. Je voudrais les employer à quelque chose de durable et d’utile pour la ville, comme un bon quai, un canal, un pont, enfin quelque chose qui pût contribuer à la gloire de l’empire et à l’utilité publique. Les jeux doivent rendre beaucoup à Marseille; leur produit peut très-bien être employé à la tour de Bouc, etc., à moins qu’il n’y ait quelque chose de plus important à faire au port ou à la ville de Marseille. Je ne vois pas de travail plus important pour Lyon que d’accélérer le pont dont j’ai ordonné la construction, et le quai de la Saône. Le produit des jeux d’Aix-la-Chapelle est destiné à l’entretien des eaux. Spa, Barréges, Plombières, etc., ont tous des jeux; que peut-on faire faire dans ces différentes villes ?

 

Mayence, 27septembre 1804

A M. Monsieur François, de Neufchâteau, Président du Sénat, j’ai reçu la lettre que vous m’avez écrite et les deux imprimés des jeunes élèves de votre sénatorerie. Si vous pensez qu’il n’y ait pas d’inconvénient à provoquer une discussion au Sénat sur les statues à élever aux hommes qui ont illustré la nation et répandu les lumières et la gloire sur notre époque, pour en décorer son palais, cela ne pourra que m’être extrêmement agréable. N’en occupez le Sénat de votre propre mouvement qu’autant que cette discussion ne puisse réveiller aucune passion et n’avoir aucun inconvénient notable. (Nicolas-Louis, comte François  de Neufchâteau, 1750-1828, président du Sénat de 1804 à 1806. C’est lui qui s’adressera à l’Empereur lors de son couronnement)

 

Mayence, 27 septembre 1804

DÉCISION

M. Lacépède fait connaître à l’Empereur que M. Anquetil, auteur de l’Histoire de France, désire lui dédier son ouvrage.J’accepterai la dédicace de M. Anquetil.

 

Mayence, 27 septembre 1804

A M. Fouché

Monsieur Fouché, Ministre de la police générale, mon intention est de tenir au budget que j’ai arrêté pour l’année. Les conseillers d’État ne doivent pas avoir plus de 30,000 francs. Ce ne sont point quatre ministres de la police que j’ai voulu établir : ce sont quatre chefs de division d’un rang élevé et pouvant offrir des garanties de toutes les parties pour arriver au ministre, et même à moi. Mon intention a toujours été qu’ils travaillassent tous les jours, avec le ministre de la police, et que, dans ce travail, en lui présentant la correspondance des départements, ils eussent toujours l’original dans le portefeuille de travail. Enfin ils ne doivent correspondre avec aucun ministre; et, quand ils correspondent avec les préfets et les commissaires près les tribunaux, ils doivent toujours le faire au nom du ministre de la police. Je désire que vous leur communiquiez cette lettre. Le bien ne peut se faire que par l’unité, mais l’unité seule n’est pas suffisante, vu que les premiers organes du ministre, qui tiennent aux plus chers intérêts des citoyens et aux plus précieux intérêts de l’État, ne doivent pas être confiés à de simples chefs de division. On a pris cette organisation trop en grand, et les éléments s’en sont un peu dénaturés. Il faut revenir à mes propres idées.

 

Mayence, 27 septembre 1804

A M. Fouché

Monsieur Fouché, Ministre de la police, ce qui arrive à Bordeaux arrive à Turin, à Spa , à Marseille, etc. Les commissaires de police tirent d’immenses rétributions des jeux, et le peuple les honnit de cris. Mon intention est qu’à dater du 1er vendémiaire de cette année tout le produit des jeux soit au profit des villes. Faites-moi un rapport sur ce que rendent les jeux de chaque ville, et, par un arrêté spécial , je leur donnerai une affectation d’utilité publique. J’emploierai les 200,000 francs des jeux de Bordeaux soit à un pont, soit à un canal utile à la ville, et ainsi de suite pour tout le reste. Chaque commissaire de police, se trouvant ainsi riche, devient une puissance qui a des agents pour la soutenir contre les municipalités des villes, qui ne peuvent voir qu’avec un extrême déplaisir des sommes immenses détournées de leur véritable but, l’utilité publique. Envoyez-moi par le prochain courrier le rapport que je vous demande. Spa rendait 2 à 300,000 francs à l’évêque.

Faites mettre dans les journaux un article sur la brutale conduite de l’ambassadeur anglais à. . . . . . .  Je lis dans les journaux un article qui dit que Moreau se rend à l’île de Majorque; remontez à la source de cette nouvelle, cela vous donnera quelques fils; c’est ce que voudrait le parti. J’y vois un autre article qui, sous le prétexte de louer le prince Louis, a pour but évidemment de décréditer Menou ; je le suppose de Charron ; cela achève de me prouver que
c7est un intrigant.

J’ai vu avec plaisir l’arrestation d’Ingand de Saint-Maur. Faites mettre ce misérable dans une prison tellement forte qu’il ne puisse s’en échapper.

Veillez à ce qu’on prenne toutes les précautions pour empêcher l’épidémie d’Espagne de nous gagner.

Si Ratier, qui a été arrêté en Hollande, est un agent des Anglais, écrivez à Marmont de le faire partir sur-le-champ.

La décision contenue dans votre lettre relative au ministre de l’intérieur me paraît convenable; je l’approuve.

 

Mayence, 27 septembre 1804

A M. Fouché

Je vois avec plaisir l’arrestation de l’agent du roi de Suède. Je ne tiens d’agent à Stockholm que celui qui y est accrédité; il faut enfin que les étrangers prennent l’habitude de n’en point entretenir d’autres à Paris. C’est une bonne circonstance pour mystifier le roi de Suède. Faites-vous faire un rapport par le préfet de police, dans lequel on dira qu’il s’était rendu suspect par quelques propos; qu’il s’était rendu coupable de telle ou telle chose. Faites faire une petite brochure des lettres réunies du secrétaire et des bulletins que l’agent pouvait avoir envoyés. Je sais qu’il doit y avoir des niaiseries et des nigauderies dans ce qu’il envoyait; mais le ridicule en retombera toujours sur le roi de Suède, qui avait la petitesse de tenir un agent pour savoir ce qu’on disait de lui.

Le préfet du Mont-Tonnerre a envoyé dans le temps une correspondance de Taylor, ministre de Hesse-Cassel, au grand juge. Envoyez-la-moi avec les pièces. L’impression de cette correspondance peut aussi nous débarrasser de ce gaillard-là.

 

Mayence, 27 septembre 1804

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, l’expédition d’Irlande est résolue. Vous aurez à cet effet une conférence avec le maréchal Augereau. Il y a à Brest des moyens d’embarquement pour 18,000 hommes. Le général Marmont, de son côté, est prêt avec 25,000 hommes. Il tâchera de débarquer en Irlande, et sera sous les ordres du maréchal Augereau. La grande armée de Boulogne sera pendant le même temps embarquée, et fera tout ce qui est possible pour pénétrer dans le comté dé Kent. Vous ferez connaître au maréchal Augereau qu’il se comportera selon les événements. Si les renseignements que j’ai par les Irlandais réfugiés et par les hommes que j’ai envoyés en Irlande se vérifient, une grande quantité d’Irlandais se rangeront sous ses drapeaux à son débarquement; alors il marchera droit à Dublin. Si, au contraire, ce mouvement était plus tardif, il prendrait position, pour attendre le général Marmont et jusqu’à ce que la grande armée fût débarquée. La marine fait espérer qu’elle sera prête au 22 octobre; la terre le sera aussi à cette époque. Il faut surtout au maréchal Augereau un bon commandant d’artillerie.

 

Mayence, 27 septembre 1804

Au maréchal Berthier

J’approuve l’affectation de 2,400,000 francs que vous proposez pour les travaux d’Alexandrie. Prévenez le général Chasseloup et faites-lui connaître que, s’il les dépense bien et s’il les emploie à des travaux essentiels qui puissent contribuer à la première défense de la place, elle pourra se trouver en état de défense au mois de juin prochain. Quant travaux des places de la République italienne, on ne peut régler que ce que j’ai donné dans son budget. Recommandez que l’on mette surtout beaucoup d’économie dans les travaux.

J’approuve la gratification que vous proposez d’accorder aux officiers, sous-officiers et soldats venant à Paris pour le couronnement.

J’approuve que les voltigeurs fournissent des détachements sur les vaisseaux.

Accordez un congé au général Dutruy. La demande du général Paulet me paraît juste.

 

Mayence, 27 septembre 1804

Au maréchal Berthier

Lorsque j’ai présenté, Monsieur, à la signature de l’empereur le projet de décret sur l’organisation générale de l’armée compris dans votre dernier travail, Sa Majesté m’a chargé de vous faire connaître les motifs qui l’ont déterminée à ne pas statuer sur cet objet dans la forme que vous proposez.

L’Empereur a considéré 1’usage de fixer tous les ans l’organisation générale de l’armée comme tenant à des idées qui ne peuvent plus exister et qui ne sauraient renaître et s’appliquer à un système fixe et régulier. L’armée est permanente. Lorsque des circonstances ou l’expérience exigent des modifications partielles, vous ne manquez pas, Monsieur, d’en faire le rapport à Sa Majesté, qui, après y avoir mûrement réfléchi, statue par des règlements particuliers. En adoptant la forme d’une organisation annuelle, il pourrait échapper à Sa Majesté, au milieu des détails dont elle serait composée, quelques objets qui n’entreraient pas parfaitement dans ses vues. Il arriverai aussi, Monsieur, que, peu de temps après avoir arrêté cette organisation, elle pourrait être altérée par des modifications dans une ou plusieurs de ses parties, à moins qu’on ne voulût se soumettre à différer jusqu’à l’année suivante des changements que les circonstances pourraient rendre indispensables.

Le projet que vous avez présenté suppose l’existence de seize maréchaux de l’empire, et il n’y en a que quatorze. Si l’on en portait quatorze dans l’organisation, elle pourrait devenir également inexacte, si le nombre de seize était complété. Sous beaucoup d’autres rapports plus importants, Sa Majesté juge qu’une organisation générale est sans objet; elle la croit même contraire au but qu’on se propose.

Mais autant il y aurait d’inconvénients à la consacrer solennellement par un décret, autant l’Empereur verrait-il d’avantages à ce que le ministre établît, dans une sorte de règlement ou de récapitulation, l’organisation existante conformément aux décrets rendus pendant le cours de l’année. Rien n’empêcherait d’adopter ensuite et successivement les changements dont l’expérience vous aurait fait reconnaître la nécessité, et que vous proposeriez à Sa Majesté par des rapports particuliers.

Telles sont, Monsieur, les observations qui se sont présentées à l’esprit de l’Empereur en lisant le projet d’organisation de l’armée pour l’an XIII, et qu’il m’a chargé de vous communiquer.

 

Mayence, 27 septembre 1804

Au vice-amiral Decrès

Je ne puis revenir sur ma décision relative au capitaine Larue. Je lui ai confié le Marengo : il faut qu’il revienne sur son vaisseau dans mes ports. Je vous laisse le maître de désigner un autre port que Bayonne pour son départ. Je ne puis voir comme vous les affaires de l’île de France. Si Linois eût attaqué le convoi, il eût été accueilli par tout le monde à l’île de France avec des applaudissements et de la considération. Decaen mérite des remerciements pour avoir pris part à la gloire nationale et s’être mis ainsi en avant; il n’a été que l’organe des habitants, et ses équipages, d’une partie de l’escadre elle-même. Certes, je ne dis point trop que, si un pareil événement fût arrivé à une escadre anglaise, l’amiral eût perdu la tête sur un échafaud, et mon opinion est, franchement, que je préférerais la perte du Marengo à la tache que reçoit le caractère national. Je ne varierai jamais là-dessus, car mon opinion se forme sur le propre rapport de l’amiral. L’amiral a détruit Bencoulen, dites-vous : avec plus de décision, il pouvait y imposer une forte contribution au profit de ses équipages, et de l’État.

Quant à la circonstance de n’avoir pas eu sa troisième frégate avec lui, c’est la faute de l’amiral. Un brick devait remplir le but du général Decaen, et il devait lui faire sentir que, devant faire une grande croisière, il ne pouvait avoir trop de forces. J’espère surtout que vous aurez exécuté mes ordres, et que le capitaine Larue ne passera pas à Paris un temps où son drapeau est exposé aux coups de l’ennemi.

Écrivez à Linois, faites-lui sentir toute la force de sa faute; combien est erronée son opinion qu’il est la ressource de la marine aux Indes. Tant qu’il y aura du bois dans les forêts et des matelots sur les côtes de France, personne ne pourra se dire la ressource de la marine; et il est ridicule qu’avec un vaisseau pourri et 500 à 600 hommes il raisonne comme l’aurait pu faire Villars à Denain ou l’archiduc Charles sur la Mur. Après ces signes de mécontentement, après surtout avoir établi tout ce qu’eût fait à sa place le plus médiocre officier anglais, et le lui avoir dit sèchement et durement, car cette lettre doit être connue de la postérité, vous lui direz qu’il a manqué de courage d’esprit, courage que j’estime le plus dans un chef; qu’il s’en faut de beaucoup qu’il ait perdu dans mon esprit sous le point de vue de son courage physique; que j’espère qu’avant de rentrer en France, il trouvera occasion de rendre à son pavillon quelque éclat. Quant au général Decaen, vous ne discuterez que des objets d’administration avec lui. Ne parlez point de Linois, que pour lui reprocher d’avoir détaché une frégate, sans raison, de sa croisière.

Je ne puis revenir davantage sur l’embargo. Avec des maiset des si, on n’a jamais de système. Puisque les Anglais ont mis en blocus ces côtes, je ne veux plus avoir de communication avec eux.

Je vous renvoie les pièces que vous m’avez envoyées; faites imprimer dans le Moniteur la relation de la rencontre du convoi de Chine par l’amiral Linois; car il ne serait pas juste qu’on voulu entacher son honneur sur le simple rapport du général Decaen, qui n’y était pas. Malheureusement ce qu’il en dit n’en fera pas encore voir une meilleure opinion.

 

Mayence, 27 septembre 1804

Au vice-amiral Decrès

Monsieur Decrès, Ministre de la marine, je viens de voir M. Allaire, administrateur des forêts, qui arrive de faire la visite des bords du Rhin, depuis Porentruy. Il m’a rendu compte qu’il y avait dans le Haut et Bas-Rhin plus de soixante milliers de pieds cubes de bois coupés en l’an X et XI et laissés sur la place; ce bois a été acheté par les fournisseurs de la marine, coupé et laissé là, ce qui a d’autant plus d’inconvénient que les adjudicataires sont obligés de payer; qu’il y a douze ou quinze mille avirons déjà coupés et qu’on laisse pourrir; et qu’enfin Anvers ne peut manquer de bois, puisqu’il y en a à Porentruy et sur le Rhin plusieurs milliers de pieds cubes; il pense aussi qu’il y a à Porentruy un nombre raisonnable de courbes. On m’assure cependant que les magasins d’Anvers sont peu approvisionnés. L’année passée j’avais ordonné la coupe d’une grande quantité de bois pour Dunkerque et Anvers; faites-moi connaître où cela en est. Prenez des mesures pour qu’il ne se perde point de bois; vous savez que c’est une perte irréparable.