Correspondance de Napoléon – Novembre 1803

Paris, 22 novembre 1803

Au citoyen Régnier, Grand-Juge, ministre de la justice

Je vous prie de pousser toujours la correspondance avec Drake comme vous le jugerez convenable. Il m’est impossible de donner à cette affaire une attention suivie. Faites-moi bientôt connaître les mesures à prendre pour arrêter tous les individus qui se trouvent compromis déjà dans ces affaires.

 

Paris, 22 novembre 1803

A l’amiral Bruix, commandant la flottille de Boulogne

Citoyen Amiral Bruix, toutes les flottilles de Saint-Malo ont passé Cherbourg; la flottille de Cherbourg elle-même est partie. Je désire que vous ôtiez des quatre premières divisions de bateaux canonniers tous ceux qui seraient de nouvelle construction, et que vous les remplaciez par des bateaux d’ancienne construction, qui vous viennent de Granville; il y en a vingt-deux.

Votre 4e division n’est encore composée que de vingt-deux bateaux; vous la compléterez avec ceux venant de Granville.

La 5e division actuelle, toute composée de bateaux de nouvelle construction, formera la 6e division; et vous formerez la 5e avec le surplus des bateaux que vous aurez d’ancienne construction. Il y en a d’ailleurs encore quelques-uns à Dunkerque et à Anvers, et je pense que vous en aurez assez pour compléter les cinq premières divisions, c’est-à-dire cent trente-cinq bateaux.

Par tous les renseignements qui me reviennent ici, il s’ensuit qu’au ler nivôse vous aurez, rendus à Boulogne ou en partance dans les différents ports depuis Saint-Malo jusqu’à Flessingue, 8 prames, 150 chaloupes canonnières, 350 bateaux canonniers, 354 bateaux de Terre-Neuve, 300 péniches, 40 caïques.

Les constructions des chantiers de Paris sont très-avancées. On fera partir ces bâtiments armés et équipés pour le Havre, afin qu’ils vous arrivent sur-le-champ.

Un très-beau canot, qui m’est destiné, est parti de Saint-Malo. Vous le ferez remettre aux matelots de la Garde. Vous ferez remettre également aux matelots de la Garde les péniches et caïques destinées pour mon service particulier, qui arriveront des différents ports.

Vous ferez remettre également à la Garde quatre paquebots de Calais.

Je désire que sur chacune de mes caïques (il doit vous eu arriver sept) vous fassiez mettre un canon de 24 de bronze, léger; sur chacun des quatre paquebots, un obusier de 8 pouces; et sur chacune de mes péniches, un bon obusier.

Dès qu’il vous sera arrivé des bateaux de Terre-Neuve, je vous prie de me faire connaître si vous pensez que ces bâtiments puissent porter des hommes pendant la traversée.

Les divisions de la flottille avaient été divisées en trois sections parce que nos régiments sont eux-mêmes divisés en trois bataillons mais, comme nous n’embarquons que deux bataillons, et pour vous ménager d’ailleurs des capitaines de vaisseau dont vous pourriez avoir besoin, je vous prie de me faire connaître si vous pensez qu’il y ait des inconvénients notables à former les divisions de quatre sections. Comme un régiment de deux bataillons s’embarquerait à bord de deux sections, deux régiments s’embarqueraient à bord d’une division; ce qui fait une brigade d’infanterie par division.

 

Paris, 22 novembre 1803

Au général Pino

Citoyen Général Pino, il ne faut s’occuper dans ce moment que des affaires d’Angleterre; l’Italie n’a rien à craindre. Les trouble intérieurs que quelques malveillants pourraient y exciter ne tourneraient qu’à leur confusion et à leur perte.

Le poste de campement de votre division est déjà marqué, et j’apprendrai avec plaisir son arrivée à Genève, d’où vous aurez soi de m’envoyer l’état de situation de chaque corps.

 

Paris, 23 novembre 1803

DÉCISION

Le ministre fera faire l’état de tous les déserteurs et conscrit n’ayant pas rejoint, par arrondissement et sous-préfecture, avec le nom des père et mère, et l’indication de la commune où ils demeurent.

Cet état sera remis au Premier Consul le 15 frimaire.

Le ministre enverra en même temps à chaque sous-préfet l’état de ces hommes, et leur fera connaître qu’ils seront personnellement responsables. Il l’enverra également au premier inspecteur, qui l’adressera aux capitaines pour faire arrêter ces hommes; il annoncera qu’il y aura 12 francs de gratification pour chaque déserteur ou conscrit livré au corps.

 

Paris, 23 novembre 1803

ARRÊTÉ

ARTICLE 1er. – Les Anglais prisonniers de guerre seront renfermés dans la ville de Verdun, dans le château de Bitche et dans les citadelles de Charlemont et de Valenciennes.
ART. 2. – Un général de brigade de gendarmerie sera chargé du commandement de la ville de Verdun , et de la police et de la surveillance spéciales des prisonniers anglais.
Un chef d’escadron de gendarmerie sera chargé de la surveillance des dépôts des prisonniers anglais au château de Bitche et dans les citadelles de Charlemont et de Valenciennes.
ART. 3. – Il sera pris, dans les réserves des légions de gendarrnerie, des brigades, à raison d’une brigade pour cinquante prisonniers, lesquelles seront placées dans la ville de Verdun, le château de Bitche et les citadelles de Charlemont et de Valenciennes, et aux environs de ces places, qui seront néanmoins pourvues des garnisons nécessaires.
ART. 4. – Seront réunis :
Dans la ville de Verdun, les prisonniers anglais d’un âge avancé ou ayant avec eux des femmes et des enfants, et ceux qui sont revêtus de grades;
Dans le château de Bitche, ceux qui ont donné lieu à des plaintes sur leur conduite relative à leur détention;
Dans les citadelles de Charlemont et de Valenciennes, tous ceux qui sont matelots ou soldats.
ART. 5. – Aucun Anglais ne pourra résider à Paris on à une distance moindre de trente lieues de cette ville.
Ceux qui, sous quelque prétexte que ce soit, se trouveront à une distance moindre de dix lieues des côtes, seront arrêtés et traités comme prévenus d’espionnage. Ceux qui seront trouvés à une distance moindre de dix lieues des frontières de terre seront considérés comme ayant voulu s’échapper, et traités en conséquence.
ART. 6. – Le ministre de la guerre est seul chargé de l’exécution du présent arrêté.

 

Paris, 23 novembre 1803

Au général Soult, commandant le camp de Saint-Omer

Citoyen Général Soult, j’ai reçu vos dernières lettres. J’ordonne au ministre Dejean de vous autoriser à vous procurer une paire de sabots pour chaque soldat. L’ordonnateur de votre division est chargé de s’en procurer.

 

Paris, 23 novembre 1803

Au général Dejean, ministre directeur de l’administration de la guerre

Je désire, Citoyen Ministre, que vous fassiez donner une paire de sabots, en forme de gratification, à chaque soldat des camps de Saint-Omer, Compiègne et Montreuil. Faites toucher aux corps la somme nécessaire pour cela, ou bien chargez-en l’ordonnateur de l’armée.

 

Paris, 23 novembre 1803

Au général Davout, commandant le camp de Bruges

Citoyen Général Davout, je reçois votre lettre du 27 brumaire, par laquelle vous me rendez compte de l’arrestation du nommé Bulow. Au lieu de le retenir dans une maison particulière, il faut le mettre au secret, en prison; nommer une commission de cinq officiers pour le juger dans les vingt-quatre heures comme espion, et le faire fusiller. Cet exemple est nécessaire; nos côtes sont inondées de ces misérables.

Je donne l’ordre au ministre de la guerre de tenir 50,000 francs votre disposition.

Faites-moi connaître si les cinquante boots achetés en Hollande sont arrivés à Flessingue.

 

Paris, 23 novembre 1803

Au général Rapp, aide de camp du Premier Consul

Vous voudrez bien vous rendre à Toulon. Vous remettrez la lettre ci-jointe au général Ganteaume; vous y prendrez connaissance de la situation de la marine, de l’organisation des équipages et du nombre des vaisseaux en rade ou qui seraient prêts à s’y rendre. Vous resterez jusqu’à nouvel ordre à Toulon. Quarante-huit heures après votre arrivée, vous m’enverrez un courrier extraordinaire avec la réponse du général Ganteaume à ma lettre. Ce courrier extraordinaire parti, vous m’écrirez chaque jour ce que vous aurez fait et vu. Vous entrerez dans le plus grand détail sur toutes les parties de l’administration. Vous irez tous les jours une on deux heures à l’arsenal. Vous vous informerez du jour où passera le 3e bataillon de la 8e légère, qui part dAntibes, et qui a ordre de se rendre à Saint-Omer pour l’expédition; vous vous rendrez au lieu le plus près de Toulon où il passera, pour l’inspecter, et vous me ferez connaître sa situation.

Vous irez visiter les îles d’Hyères pour voir de quelle manière elles sont gardées et armées. Vous me ferez un rapport détaillé sur tous les objets que vous verrez.

 

Paris, 23 novembre 1803

Au général Ganteaume, préfet maritime à Toulon

Citoyen j’expédie auprès de vous le général Rapp, un de mes aides de camp; il séjournera quelques jours dans votre port et s’instruira en détail de tout ce qui concerne votre département.

Je vous ai mandé, il y a deux mois, que je désirais avoir dans le courant de frimaire 10 vaisseaux, 4 frégates et 4 corvettes, prêts à mettre à la voile à Toulon; que cette escadre fût approvisionnée de quatre mois de vivres pour 2,500 hommes de bonnes troupes d’infanterie qui s’embarqueraient à son bord. Je désire que, quarante- huit heures après la réception de cette lettre, vous me fassiez connaître, par le courrier extraordinaire que m’enverra le général Rapp, le jour précis où cette escadre pourra mettre à la voile de Toulon, ce que vous avez en rade et prêt à partir au moment de la réception de ma lettre, ce que vous aurez au 15 frimaire, ce que vous aurez au ler nivôse. Mon vœu serait que cette expédition pût mettre à la voile au plus tard dans les premiers jours de nivôse.

Je viens de Boulogne, où il règne aujourd’hui une grande activité et où j’espère avoir, vers le milieu de nivôse, 300 chaloupes canonnières, 500 bateaux canonniers et 500 péniches réunis; chaque péniche portant un obusier de 36, chaque bateau canonnier un canon de 24, et chaque chaloupe canonnière trois pièces de 24. Faites-moi connaître vos idées sur cette flottille. Croyez-vous qu’elle nous mènera sur les bords d’Albion ? Elle peut porter 100,000 hommes. Huit heures de nuit qui nous seraient favorables décideraient du sort de l’univers.

Le ministre de la marine a continué sa tournée vers Flessingue; il visitera la flottille batave, qui est composée de 100 chaloupes canonnières et de 300 bateaux canonniers, capables de porter 30,000 hommes, et la flotte du Texel, qui doit porter aussi 30,000 hommes.

Je n’ai pas besoin d’exciter votre zèle; je sais que vous ferez tout ce qui sera possible; comptez sur mon estime.

 

Paris, 24 novembre 1803

Au citoyen Perregaux(Jean Frédéric Perregaux, 1744-1808)

Citoyen Perregaux, Président des régents de la Banque de France, j’ai compris, par la note que vous m’avez fait remettre,

l° Que la Banque avait en suspens des affaires avec le trésor public : j’ai ordonné qu’elles fussent terminées, mon intention n’étant pas, dans aucun cas, d’emprunter de l’argent de la Banque;
2° Que la Banque ne jouissait pas du capital dont elle devrait jouir: j’ai chargé le consul Lebrun de vous proposer divers moyens pour aider la Banque et la mettre à même de marcher avec plus de hardiesse et d’assurance, mon intention étant, telle que je vous l’ai communiquée il y a un an, d’aider la Banque dans toutes les circonstances.
Mais je ne saurais penser que les régents méconnussent le principe qu’ils doivent escompter les obligations lorsqu’elles sont à moins de deux mois d’échéance, et ne fussent pas pénétrés de l’obligation où ils sont de donner à leur privilège toute l’extension dont il est susceptible; l’intérêt de l’État, du commerce, des actionnaires, tout en fait une loi.

Je fonde un grand espoir dans la Banque; je l’aiderai dans toutes les circonstances; mais il faut qu’elle se pénètre de sa puissance et de son utilité.

 

Paris, 24 novembre 1803

NOTE POUR LE MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES

Il paraît que le dernier courrier d’Espagne à Azara ne dit rien et n’a pour but que de gagner du temps. Cependant je suis pressé pour avoir de l’argent; 16 millions sont échus au ler vendémiaire. Je voudrais que le ministre du trésor public tirât pour 16 millions de lettres de change sur la trésorerie espagnole; on les confierait à un banquier qui se rendrait en poste à Madrid, où ces lettres seraient acceptées ou ne le seraient pas : si elles ne l’étaient pas, ce serait un sujet naturel de querelle avec l’Espagne; le banquier aurait soin de dire que, si les lettres de change ne sont pas acceptées dans vingt- quatre heures, il s’en va. Si, au contraire, elles le sont, elles seraient soldées dans huit jours, c’est-à-dire avant le 10 frimaire, et dès ce moment on aurait de l’argent arrivé à Paris avant la fin de frimaire. On pourrait, pour les payements réguliers de mois en mois, convenir d’un arrangement.

 

 Paris, 24 novembre 1803

Au citoyen Talleyrand

Je désire, Citoyen Ministre, que vous écriviez une lettre en chiffre au citoyen Lesseps, commissaire des relations extérieures au Caire, et que vous preniez la précaution de la lui envoyer par un homme qui ira s’embarquer à Trieste, sur le premier bâtiment qui partira pour Alexandrie, de manière que vous ayez double garantie pour l’arrivée de cette lettre.

Vous direz au citoyen Lesseps de faire connaître à Ibrahim-Bey et à Ostnan-Bey que j’ai reçu leur lettre, et que j’en approuve le contenu; que j’ai fait parler à la Porte pour ce qui les regarde, mais qu’il est difficile d’espérer quelque chose de ce côté; que je leur veux du bien, et que je désire leur en donner des preuves; qu’en attendant qu’il soit pris un parti définitif, je serais porté à leur donner du secours, mais de manière à ne pas nous brouiller encore avec la Porte; qu’ils me fassent donc de suite connaître la nature du secours dont ils peuvent avoir besoin.

Recommandez au citoyen Lesseps de rendre ses communications plus fréquentes, en envoyant des exprès avec des lettres chiffrées, et avec les plus grandes précautions, soit par Raguse, soit par Trieste.

 

Paris, 24 novembre 1803

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je vous prie, Citoyen Ministre, d’envoyer copie de cette dépêche au général Brune, pour qu’il porte des plaintes sur la manière dont on se comporte avec notre agent à Latakieh.

Écrivez en chiffre au citoyen Lesseps qu’il doit se rendre au Caire; qu’il a eu tort de montrer la lettre des Mameluks au pacha du Caire; qu’il doit envoyer en France, par la voie la plus sûre, tout ce qu’il aura des beys, sans en rien communiquer aux Turcs.

Il doit faire dire principalement à Osman-Bey que j’ai reçu sa lettre; que j’en ai compris le contenu; que j’aime les Mameluks, parce qu’ils sont braves, et surtout les Mameluks de Mourad-Bey, parce qu’ils ont été avec nous et ont fait partie de l’armée française; que mon intention était , dans toutes les circonstances , de les favoriser et de les protéger; qu’ils peuvent donc compter là-dessus. Qu’il fasse dire à la veuve de Mourad-Bey que j’ai reçu sa lettre; que j’ai donné l’ordre spécial aux agents français qui sont en Égypte de la protéger; que je veux qu’elle n’ait rien à craindre, et qu’elle n’ait besoin de rien, parce que Mourad-Bey a fini par être ami de la France, qu’il est mort dans ces sentiments, et qu’ainsi je serai toujours ami de sa famille.

 

Paris, 24 novembre 1803

Au citoyen Talleyrand

Je vous prie, Citoyen Ministre, d’écrire au citoyen Semonville, à la Haye, que j’ai donné ma confiance au contre-amiral hollandais Ver Huell, que j’ai nommé commandant en chef de la flottille batave; qu’il est donc convenable qu’il le soutienne auprès de son Gouvernement, et lui prête toute l’assistance dont il pourrait avoir besoin.(Charles Henri, comte de Verhuell de Sevenaer, 1764-1845. Il a été rappelé à l’activité par Bonaparte, pour prendre le commandement de la flottille de Flessingue. Il jouera un rôle décisif à Walcheren).

 

Paris, 24 novembre 1803

Au général Berthier, ministre de la guerre

Vous donnerez l’ordre au général de division Gouvion, inspecteur général de gendarmerie, de se rendre sur-le-champ à Angers, et de porter de là son quartier général à Châtillon.

Il aura immédiatement sous ses ordres une colonne d’éclaireurs, composée de trois compagnies de grenadiers du 12e régiment d’infanterie légère, qui est à Nantes, complétées chacune à 65 hommes au moins, commandée par un chef de bataillon; de quatre compagnies de grenadiers du 93e régiment, complétées également à 65 hommes et commandées par un chef de bataillon. Ces deux petits bataillons, joints à 25 gendarmes et à un escadron du 22e de chasseurs à cheval, fort au moins de 130 hommes, formeront cette colonne sous les ordres du général Gouvion.

Il aura aussi sous ses ordres trois autres colonnes qui se réuniront à Beaupreau, à Thouars et aux Herbiers.

La première, qui se réunira à Beaupreau, sera composée de 25 gendarmes, de deux compagnies du 12e régiment d’infanterie légère, complétées au moins à 65 hommes, et d’une compagnie à cheval du 28e de dragons, forte au moins de 70 hommes. Le général de brigade Girardon, commandant le département de la Mayenne, se mettra à la tête de cette colonne.

La deuxième colonne sera composée de deux compagnies, complétées à 65 hommes, du bataillon du 63e régiment qui est à Poitiers, de 25 gendarmes et d’une compagnie, complétée à 70 hommes et à cheval, du 22e régiment de chasseurs, qui est à Niort. Le général de brigade Dufresse se mettra à la tête de cette colonne, qui se réunira à Thouars.

La troisième colonne se réunira aux Herbiers, et sera composée de deux compagnies complétées à 65 hommes, d’une demi-brigade suisse, qui est à la Rochelle, de 25 gendarmes, de deux compagnies également à 65 hommes du bataillon de la 82e demi-brigade, qui est aux Sables, et d’une compagnie à cheval du 4e régiment de chasseurs, qui est à Fontenay-le-Peuple (Fontenay-le-Comte). Cette troisième colonne sera commandée par le chef de brigade Reynaud, adjudant du palais, auquel vous donnerez l’ordre de se rendre en poste aux Herbiers.

Ces trois colonnes d’éclaireurs seront sous les ordres du général de division Gouvion, qui dirigera toutes leurs marches et leurs opérations de manière à faire fouiller la forêt de Vezins et arrêter sans miséricorde les hommes qui faisaient partie du rassemblement qui a eu lieu dans la commune d’Yzernay, les poursuivre partout et sur quelque département qu’ils se soient réfugiés, et enfin se porter partout où le prétexte de la conscription ou toute autre raison feraient naître des troubles.

Le général Gouvion est à cet effet muni de tous les pouvoirs nécessaires;  il pourra promettre telle récompense qu’il jugera convenable pour l’arrestation des brigands.

Il sera accordé à toutes les troupes faisant partie de ces quatre colonnes d’éclaireurs une indemnité pour tenir lieu de vivres de campagne.

Ces colonnes d’éclaireurs existeront  jusqu’à nouvel ordre; et vous mettrez à la disposition du général Gouvion une somme pour qu’il puisse suffire, soit aux dépenses d’espionnage, soit au payement des récompenses promises, soit pour l’indemnité des vivres de campagne jusqu’à ce que ce service soit organisé.

Recommandez au général Gouvion de se concerter avec les préfets; il est d’ailleurs autorisé, d’après son grade d’inspecteur général de gendarmerie, à faire faire à la gendarmerie tous les mouvements et déplacements qu’il jugera convenables pour arrêter les troubles à leur naissance.

 

Paris, 24 novembre 1803

Au général Savary, aide de camp du Premier Consul

Vous voudrez bien partir pour Mayenne et secrètement. Vous verrez Chappedelaine, qui vous a écrit la lettre que vous m’avez remise. Vous prendrez les renseignements les plus circonstanciés. Vous irez sur les lieux mêmes où il a été rencontré par le commencement du rassemblement. De là, vous consulterez les officiers de gendarmerie, le général et le préfet, et vous acquerrez sur tout ce qui se passe toutes les informations convenables, ainsi que sur les mouvements que des malveillants voudraient faire sous le prétexte de la conscription.

 

Paris, 24 novembre 1803

DÉCISION

Le ministre de la guerre rend compte d’un marché passé à Liége pour une fourniture d’armes au Gouvernement batave. Il a défendu toute exportation d’armes, de peur qu’on ne les fît passer en Angleterre.On ne saurait prendre trop de mesures pour empêcher que les Anglais ne recrutent des armes, dont ils ont le plus grand besoin.

DÉCISION

Rapport du ministre de la guerre sur les dispositions faites par le général Lacombe Saint-Michel pour assurer la défense des côtes de la Ligurie. Le ministre propose de faire passer 500,000 kilogrammes de poudre à Gênes, qui en manque.Renvoyé au ministre de la guerre pour faire filer à Gênes,
pour rester en dépôt jusqu’à nouvel ordre, et entreposer, s’il est  nécessaire, dans les magasins de la République italienne, trois cents milliers de poudre. Par ce moyen, les poudres seront toujours à nous, et, si nous en avons besoin, nous les trouverons.

DÉCISION

Rapport du général Soult sur la demande formée par le citoyen Gravatte, chirurgien de 3e classe, d’être réintégré dans le grade de chirurgien de 2e classe.Renvoyé au ministre de l’administration de la guerre. Mon intention est qu’il ne soit pas fait de tort aux vieux chirurgiens qui ont fait la guerre.

 

Paris, 24 novembre 1803

Au citoyen Fleurieu

Citoyen Fleurieu, Conseiller d’État, chargé par intérim du porte-feuille de la marine, je reçois un imprimé de Boulogne, ou est décrit l’arrimage d’une chaloupe canonnière, d’un bateau canonnier et d’une péniche; mais je ne trouve pas que tout soit décrit avec assez d’ordre et de précision.

1° On ne dit pas le nombre d’hommes que la chaloupe canonnière doit porter. Le mot passagers y est seulement, mais le nombre est laissé en blanc; il faudrait mettre : passagers, 90; et garnison, 30; ce qui fait 120 hommes.
2° On ne distingue pas l’endroit où doivent être placées les 12,000 cartouches et les 1,200 pierres à feu.
3° On ne dit pas comment les passagers doivent être répartis sur les calissons, sur le pont, dans les hamacs.
4° On ne dit pas combien la péniche doit porter d’hommes. Elle doit en porter 66, dont 10 de garnison et 56 de passagers.
5° Les caissons ne sont pas désignés, ni ce qu’ils doivent porter; il doit y avoir 12,000 cartouches.

Je vous prie de faire rédiger de nouveau cette instruction, et de faire ajouter, à la fin de l’installation de chaque bâtiment, une table de tout ce qu’il doit porter, en indiquant par qui les objets doivent être fournis, pour l’usage des garde-magasins, etc.

Faites connaître au ministre de la guerre qu’il doit faire fournir un tonneau de lest en boulets à chaque bâtiment, et indiquez-lui les ports où vous avez de ces bâtiments en armement. Prévenez les commissaires de marine que, toutes les fois que la terre ne sera pas en mesure, ils fournissent des boulets de la marine.

 

 Paris, 24 novembre 1803

Au contre-amiral Ver Huell, commandant en chef la flottille batave

Je reçois votre lettre du 28 brumaire. Je vois avec peine qu’il n’y a encore qu’un petit nombre de bâtiments à Flessingue, et j’attends votre deuxième dépêche pour connaître ce qu’il y a à Rotterdam et dans les autres chantiers. J’ai causé avec Schimmelpeninck, qui va écrire par un courrier à son Gouvernement pour lui faire sentir l’importance de vous seconder de tous ses moyens. Je vous prie de continuer à prendre des renseignements sur les boots qu’on a achetés pour nous. Donnez des ordres pour qu’ils partent le plus tôt possible. On m’assure qu’il y en a en quarante-trois d’achetés. Il faudrait d’abord qu’ils partent tous pour Flessingue. J’attends donc votre second courrier.

 

Paris, 25 novembre 1803

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, le mémoire d’un négociant de Dunkerque qui a perdu, par la violation qu’ont faite les Anglais du territoire du Danemark, un bâtiment chargé d’une riche cargaison. Faites des démarches telles que le Danemark restitue la valeur de ce bâtiment.

 

Paris, 25 novembre 1803

Au citoyen Melzi

Citoyen Melzi, Vice-Président de la République italienne, je ne puis que blâmer la conduite d’Aldini, et je ne conçois pas en effet comment un membre du Conseil législatif peut s’absenter de Milan sans votre permission; je crains que ce ne soit là un peu la faute de la Constitution. Le Conseil législatif devrait, comme à Paris, être tout entier dans la main du Gouvernement. Faites venir Aldini à Paris; dites-lui que j’approuve tout ce que vous avez fait dans une circonstance aussi urgente.

Parme et Plaisance conviennent bien à la République italienne; mais ils sont l’objet d’une négociation qui fixe déjà l’attention de toute l’Europe. C’est un moyen de paix, et je ne pourrais me décider à commettre la précipitation de réunir aujourd’hui ce pays que par une compensation qui m’aidât véritablement à soutenir la guerre. Cette compensation ne pourrait se trouver que dans une somme d’argent assez considérable, et je connais assez la situation de la République italienne pour croire qu’elle pût trouver difficilement cette somme. Cependant, voyez. Vous savez qu’un gouvernement se forme de l’opinion publique, et marche avec ce qu’impose l’opinion publique, qui raisonne et calcule tout.

Quant au concordat il diffère peut-être un peu de celui de la République; mais il faut avouer aussi que les circonstances sont un peu différentes. Mettez tous vos soins à vous procurer cette paix religieuse qui, une fois perdue, ne peut se recouvrer qu’avec tant de peine.

 

Paris, 25 novembre 1803

A LA CONSULTE D’ÉTAT DE LA RÉPUBLIQUE ITALIENNE

Citoyens Consultateurs, j’ai reçu votre lettre du 27 septembre. Le concordat fait avec le Saint-Siége est fondé sur des bases raisonnables. Il est discuté depuis deux ans. Je désire qu’il soit pour la République un objet de tranquillité intérieure. Il est plus facile de prévenir des discussions religieuses que de les apaiser quand le mal est fait.

 

Paris, 25 novembre 1803

AU CORPS LÉGISLATIF DE LA RÉPUBLIQUE ITALIENNE

Citoyens Législateurs, j’ai reçu votre message du 20 octobre. J’ai été sensible aux sentiments que vous m’exprimez.

Les lois rendues dans votre dernière session ont puissamment contribué à consolider l’état de prospérité ou est la République. J’attends les mêmes résultats de cette session; et il n’est aucun moment, dans quelque circonstance que je puisse me trouver, où le bonheur et la prospérité de la République italienne ne soient l’objet de ma pensée et de ma sollicitude.

 

Paris, 25 novembre 1803

Au général Berthier, ministre de la guerre

Je vous envoie, Citoyen Ministre, un projet d’arrêté sur lequel je vous prie de me faire connaître votre opinion. Vous me le présenterez définitivement avec la répartition des conscrits par départements. Faites faire un travail, en même temps, pour organiser la Garde en conséquence de cela.

Un chevron distinguerait les anciens soldats.

Chaque compagnie serait composée de 120 hommes, dont 60 seraient recrutés par l’armée et 60 par la conscription.

On établirait indépendamment deux compagnies da dépôt, l’une pour les chasseurs, l’autre pour les grenadiers. On pourrait porter à 150 hommes chaque compagnie de dépôt; ce qui porterait la force de la Garde à 5,000 hommes.

Quant à l’administration, la Garde sortant des régiments serait payée comme elle l’est aujourd’hui : les conscrits n’auraient que 10 sous par jour, à peu près comme l’infanterie qui est en garnison à Paris; mais ils se trouveraient également payés, moyennant la haute paye qu’ils auraient de chez eux.

Après cinq ans de service dans la Garde, un conscrit pourrait être admis à faire partie des premières escouades, mais seulement jusqu’à concurrence de moitié des places vacantes, l’autre moitié devant toujours être remplacée par les corps de l’armée.

Ce dernier règlement est moins pressé; on peut se donner le temps de le faire. L’important est de s’occuper du premier, afin de faire sur-le-champ l’appel, et d’être à même d’en faire marcher dans deux mois une partie avec la Garde.

PROJET D’ARRÊTÉ

  1. Il sera fait un appel de 1,200 conscrits sur l’armée de réserve de l’an IX et de l’an X, et de 1,200 sur celle des années XI et XII, pour faire partie de la Garde du Gouvernement.
    II. Ces conscrits seront choisis parmi ceux jouissant par eux-mêmes ou par leur famille d’une haute paye de 10 sous par jour.
    III. La répartition de ces conscrits entre les départements sera faite conformément an tableau ci-joint.
    IV. Ils seront placés dans les compagnies de chasseurs et de grenadiers, à raison de 50 hommes par compagnie.
    V. La moitié des hommes que devra fournir chaque département devra avoir au moins la taille de 5 pieds 5 pouces, et l’autre moitié au moins celle de 5 pieds 2 pouces.
    VI. Le ministre de la guerre est chargé de l’exécution du présent arrêté.

 

Paris, 25 novembre 1803

Au général Berthier, ministre de la guerre

Je désire, Citoyen Ministre, que vous donniez l’ordre au commandant de l’école de Fontainebleau de faire dresser un état de quarante jeunes gens, âgés de plus de dix-huit ans, les plus instruits, sachant parfaitement le maniement des armes, et capables d’occuper une « place de sous-lieutenant dans un corps.

Vous me proposeriez de les nommer sous-lieutenants dans chacun des quarante bataillons faisant partie des camps de Saint-Omer, Montreuil et Bruges.

Je désirerais également que vous fissiez dresser dans le prytanée de Saint-Cyr un état de soixante jeunes gens âgés au plus de seize ans, ayant plus de 5 pieds, et qui seraient propres à être attachés à chacun de ces quarante bataillons, en qualité de caporaux-fourriers.

Je désire accélérer le temps où cette jeunesse devra entrer dans l’armée, afin qu’elle puisse acquérir de l’expérience dans l’expédition actuelle.

 

Paris, 25 novembre 1803

ARRÊTÉ

ARTICLE 1er. – Il sera formé, des ouvriers des chantiers de constructions navales établis sur les bords de la Seine à Paris, quatre compagnies d’ouvriers, de 100 hommes chacune. On réunira dans chacune de ces compagnies les charpentiers de la marine et les ouvriers levés des environs de Paris.
ART. 2. – Le ministre de la marine fera une instruction pour le détail de leur organisation.
ART. 3. – Ces compagnies seront dirigées sur Boulogne et partiront de Paris : la 1e, le lundi 6 de ce mois; la 2e, le lundi 13; la 3e, le lundi 20; la 4e, le lundi 27.
Elles recevront l’assurance qu’elles ne passeront point au delà de Boulogne et ne seront point employées ailleurs.
Chaque compagnie sera accompagnée d’un chariot chargé de ses outils.
ART. 4. – Chacune de ces compagnies sera commandée par un sous-ingénieur constructeur de marine ou par un enseigne de vaisseau. Il y sera de plus attaché un élève de l’école polytechnique, ayant le traitement et faisant les fonctions d’aide-ingénieur constructeur de la marine.
ART. 5. – Le ministre de la marine est chargé de l’exécution du présent arrêté.