Correspondance de Napoléon – Mars 1804
Mars 1804
Paris, 1 mars 1804
Au général Soult, commandant le camp de Saint-Omer
Vous savez sans doute que Pichegru a été arrêté hier. Il n’a pu servir de ses pistolets ni de son poignard. Il s’est battu une demi-heure avec trois ou quatre gendarmes d’élite à coups de poing. Le plaisir qu’a éprouvé le peuple de Paris de cette arrestation fait son éloge. J’ai fait fermer les barrières de Paris et investir les murailles de sentinelles. J’ai fait rendre une loi qui condamne à mort tout individu qui recèlerait Georges et ses compagnons. Il est dit dans la loi qu’ils sont soixante, parce que des dépositions le portent; pour moi, je ne pense pas qu’ils soient plus de trente à quarante. J’ai d’ailleurs lieu d’être satisfait de la contenance de Paris et de toute la France.
Je ne puis concevoir comment les quatre chaloupes d’Étaples ne sont pas encore armées, et comment vous en avez encore à Boulogne une en armement et deux en construction. Faites-moi connaître quand elles seront finies.
Je vous prie de me faire connaître si les matelots sont complets sur la flottille de transport, car il serait très-malheureux d’avoir là des bâtiments et pas de matelots.
Je désire également que, dans le premier état que vous m’enverrez de la flottille, vous fassiez porter les bateaux destinés à porter des pièces de campagne, et les chaloupes canonnières qui ne seraient pas encore installées en belle. Faites-moi aussi connaître comment sont installées les 50 péniches qui sont à Boulogne.
Les corps ont quelques malades; d’un autre côté, les malades qu’ils avaient à leur arrivée au camp doivent avoir rejoint leurs dépôts. Les conscrits doivent aussi commencer à arriver. Je désire donc que vous fassiez appeler les chefs de corps, que vous leur demandiez le nombre d’hommes qu’ils pourraient tirer des dépôts, afin de compléter leurs bataillons à 800 hommes.
Causez avec le général Lacrosse pour savoir si les chaloupes et bateaux canonniers sont, à l’heure qu’il est, installés conformément à l’ordre qui a été donné. Allez vous-même visiter les magasins de biscuit, et voyez celui qui y est depuis le plus de temps, afin de vous s’il est gâté. Allez aux caves, et goûtez quelques pièces de vin prises au hasard; faites-en autant pour l’eau-de-vie. Il ne faut pas attendre au dernier moment où l’on s’apercevrait qu’une partie des vivres serait gâtée, ce qui serait sans remède.
J’imagine que les ambulances de l’armée sont organisées, et qu’il y a existant, de médecins, chirurgiens et administrateurs, le nombre suffisant.
Faites passer au général Davout la nouvelle relative à Pichegru.
Paris, 1er mars 1804
Au contre-amiral Decrès
Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire exécuter le plus promptement possible les dispositions suivantes :
Il sera formé une flottille de péniches composée de huit divisions, chacune composée de quatre sections, ou bataillons; chaque section, ou bataillon, composée de neuf péniches.
Chaque division de péniches sera commandée par un officier ayant le grade de capitaine de frégate, ou au moins de lieutenant de vaisseau.
Les sections, ou bataillons, seront organisés de manière que seulement il y en ait trois qui portent des obusiers de 6 pouces, et six qui portent des pièces de 4.
La flottille de péniches se trouvera ainsi composée de 288.
Les 72 péniches actuellement à Boulogne ou Calais formeront les deux premières divisions.
Le commandant de la flottille désignera, dans le port de Boulogne, le lieu où devront se tenir toutes les péniches.
Paris, 2 mars 1804
Au citoyen Réal, conseiller d’État
Le citoyen Réal doit faire arrêter, ce soir ,deux principaux agents des intrigues qui se trament ici. Il serait nécessaire de saisir en même temps leurs papiers.
La Rochefoucauld demeure rue du Faubourg-Saint-Denis, n° 16, à gauche, maison un peu enfoncée, chez un boucher dont la femme est sœur de la femme de chambre de Madame La Rochefoucauld. Il doit y avoir là des papiers. Il est bon de les faire saisir en même temps que se fera l’arrestation au rendez-vous où ils doivent être.
Paris, 2 mars 1804
DÉCISION
Le ministre de la guerre propose d’établir un poste français à Meppen, en donnant les explications convenables au duc d’Aremberg, pour intercepter des marchandises anglaises. | Accordé. Vous écrirez au général de l’armée de Hanovre qu’il aura l’air de le faire sans ordre et qu’il tiendra bon jusqu’à nouvel ordre. |
DÉCISION
Le ministre de la guerre rend compte que la compagnie franche du Liamone rend à Paris; il prie le Premier Consul de lui désigner une destination. | Ils seront dirigés sur Sens. On leur donnera là six jours de repos, et, comme ils auront probablement besoin de souliers, on leur en fera trouver là 80 paires. On les fera marcher de manière qu’ils aient, tous les trois jours, séjour. On les dirigera de là sur le camp d’Ambleteuse, où ils feront partie du 3e bataillon du 3e régiment d’infanterie légère, qui se trouve à ce camp. Le ministre donnera également ordre à Antibes, au dépôt de ce bataillon, qu’on le passe en revue, et qu’on fasse partir tout ce qui est disponible pour la même destination. |
Paris, 2 mars 1804
Au général Soult, commandant le camp de Saint-Omer
Citoyen Général Soult, je reçois votre lettre du 8 ventôse. Je désire que vous mettiez des écuries pour 400 chevaux à la disposition des deux régiments de la brigade de cavalerie du camp de Montreuil.
Je vous prie également de me faire connaître combien il y a d’écuries à Calais qui ne doivent point venir à Boulogne parce qu’elles firent trop d’eau, pour que j’en dispose également pour la réserve de cavalerie, afin que toute la cavalerie de l’armée ait déjà une partie des écuries qui lui sont nécessaires. Par ce moyen il ne restera plus, à mesure que les écuries arriveront, qu’à compléter ce que chacun doit avoir.
Par l’état que vous m’avez envoyé, il résulte que nous aurions des écuries pour 6,188 chevaux. Il faut ajouter 1,000 chevaux qui seront embarqués sur les bateaux canonniers ou sur les corvettes armées en guerre, et 1,000 chevaux que fournira la flottille Nous aurions donc 8,188 chevaux.
Nos besoins se composent :
De 2,000 pour l’artillerie;
1,600 pour la Garde, compris 300 pour l’artillerie;
600 pour votre brigade de cavalerie;
600 pour celle de Montreuil;
600 pour celle de Bruges;
1,800 pour la réserve de cavalerie.
Il en resterait donc un millier pour l’état-major, ce qui est plus que suffisant, et les chevaux des administrations, ambulances, etc.
J’ai donné l’ordre au ministre de la marine pour la formation d’une flottille de péniches.
Faites-moi connaître si l’on a pris des mesures pour construire l’écluse de chasse, ainsi que les dégradations que la mer a faites, au 15 ventôse, soit au fort en bois dit Fort-Rouge, soit aux forts de l’Heurt et de la Crèche, et si tout se prépare pour qu’au premier beau temps on puisse reprendre et terminer ces ouvrages.
Paris, 2 mars 1804
Au contre-amiral Decrès
Je suis instruit, Citoyen Ministre, que Nelson a écrit à l’amiral Latouche pour lui proposer un échange de prisonniers. Je désire savoir quelle réponse il lui a faite. Dans tous les cas, faites-lui connaître que tout échange est impossible; que le roi d’Angleterre n’a voulu établir aucun échange, ayant persisté à y mettre des conditions inusitées et arbitraires.
Mon intention est de ne recevoir aucun parlementaire à Toulon, et j’attends que ces dispositions seront sévèrement exécutées. Les parlementaires des Anglais ne sont que des espionnages. D’ailleurs, vous leur avez, je crois, désigné la Ciotat. C’est donc là qu’ils doivent se rendre.
Paris, 3 mars 1804
NOTE POUR LE CITOYEN REAL
Un nommé Valcour, qui est un des agents ordinaires de l’armée de Condé, doit être dans une campagne près de Thionville. Voyez d’ailleurs Fouché. Expédiez en poste un officier intelligent avec trois gendarmes d’élite pour l’arrêter.
Paris, 4 mars 1804
NOTE POUR LE CITOYEN RÉAL
Le bailli de Crussol a été capitaine des gardes du comte d’Artois. Il va chez madame Grolier, qui peint et voit des artistes. Il ne serait pas inutile d’avoir un agent introduit dans cette société. Il serait bon aussi d’avoir un historique de la conduite de ce Crussol, et de savoir quand il a quitté l’armée des princes.
Paris, 4 mars 1804
DÉCISION
Caffarelli, préfet maritime, fait connaître l’impression produite à Brest par l’arrestation du général Moreau. (Louis-Marie-Joseph, comte de Caffarelli, 1760-1845, premier préfet maritime de Brest) | Il n’y aurait pas d’inconvénient d’écrire à Caffarelli, d’ordonner au frère de Moreau, lieutenant de vaisseau, de se rendre à Morlaix, dans sa famille, et d’y rester jusqu’à nouvel ordre. |
DÉCISION
Rapport du citoyen Cretet sur les ports de Dielette et Carteret (Manche) | Il serait bien Plus convenable que l’ingénieur de Cherbourg, Cachin, se rendît sur les lieux. Mon intention serait d’avoir à Carteret un port capable de contenir une flottille d’une centaine de chaloupes et bateaux canonniers, pouvant porter 8 à 10.000 hommes, force plus que suffisante pour s’emparer des îles Jersey. |
Paris, 4 mars 1804
Au général Soult, commandant le camp de Saint-Omer
Citoyen Général Soult, je vous laisse le maître de mettre en liberté les trois marins de Boulogne; mais recommandez-leur bien de ne plus se laisser prendre par les Anglais, car l’expérience a prouvé que les pêcheurs ne sont pris que lorsqu’ils le veulent bien, et que cela est très-suspect.
Faites-moi donner des renseignements sur le capitaine Lostanges, de l’honneur duquel la marine est parfaitement sûre.
Paris, 4 mars 1804
Au contre-amiral Decrès
Je désire, Citoyen Ministre, que vous fassiez connaître par une lettre officielle, au général Truguet, que le Gouvernement l’autorise à prendre le titre d’amiral. Faites-lui connaître également que la somme de 5,000 fr. sera mise chaque mois à sa disposition pour les dépenses extraordinaires que ce nouveau titre exigera, ainsi que pour les dépenses secrètes qui seront nécessaires, soit pour surveiller son escadre, soit pour avoir des nouvelles des escadres ennemies.
Paris, 5 mars 1804
Au général Berthier
Le bataillon des vélites, Citoyen Ministre, placé à Saint-Germain, est près d’une trop grande ville. D’ailleurs, d’un moment à l’autre, il est probable que le château de Saint-Germain sera utilisé pour d’autres établissements. Je désirerais donc que les vélites fussent placés soit au château d’Écouen, soit à celui de Villers-Cotterets, ou dans tout autre château de ce genre, pourvu cependant qu’il soit éloigné de Paris de plus de trois lieues et moins de douze. Faites faire les recherches et proposez-moi l’emplacement convenable.
Paris, 6 mars 1804
Au citoyen Melzi
Citoyen Melzi, Vice-Président de la République italienne, j’ai chargé Marescalchi de vous instruire de tout ce qui se passe ici. Vous devez ajouter une pleine foi au rapport qui m’a été fait par le grand juge. Il n’y a rien de plus que cela. Cette affaire en serait à peine une pour moi, sans la part qu’y a le général Moreau, qui s’est rendu complice de ces misérables, chose que j’ai été trois jours sans pouvoir me la persuader. Mais les preuves se sont multipliées tellement qu’il ne m’a plus été possible d’arrêter le cours de la justice. Paris et la France ne sont qu’une famille, n’ont qu’un sentiment, une opinion.
Faites-en part à la Consulte d’État. N’ajoutez aucune croyance à tous les faux bruits qu’on pourrait répandre. Je n’ai couru aucun danger réel, car la police avait les yeux sur toutes ces machinations. J’ai eu la consolation de ne pas trouver un seul homme, de tous ceux que j’ai placés dans cette immense administration, dont j’aie à me plaindre. Moreau est le seul; mais il était depuis longtemps éloigné du Gouvernement.
Paris, 6 mars 1804
Le secrétaire d’État au général Berthier
Le Premier Consul, Citoyen Ministre, désire avoir sous les yeux la correspondance du général en chef de l’armée de Rhin-et-Moselle en l’an V. Dans les correspondances militaires du Directoire qui sont aux archives du Gouvernement, il ne reste que quelques pièces de celles dont il s’agit. Le dossier de cette armée a passé, après le 18 fructidor, dans le cabinet du ministre Scherer, et la plus grande partie des pièces qui le composaient n’a pas été rendue; elle doit se retrouver dans vos bureaux.
Je vous prie, Citoyen Ministre, de donner des ordres pour qu’on remette au porteur tout ce qu’on pourra recueillir, dans vos bureaux ou au dépôt de la guerre, de la correspondance du général en chef de l’armée de l’armée de Rhin-et-Moselle; cette recherche est urgente.
Paris, 7 mars 1804
DÉCISION
Le ministre de la guerre soumet au Premier Consul des renseignements transmis par le général Leval, commandant la 5e division militaire, et un rapport du commandant d’armes de Huningue sur un mouvement des Autrichiens dans le canton de Schaffhouse, | Envoyer sur-le-champ un adjudant général pour se rendre à à Schaffhouse, et dans toutes les possessions autrichiennes en Souabe; de là, parcourir le Tyrol, aller jusqu’à Salzburg et Passau. S’il voyait des mouvements extraordinaires de troupes, il en préviendrait par un courrier, et continuerait sa route. |
Paris, 7 mars 1804
Au général Soult, commandant le camp de Saint-Omer
Dans le Moniteur ci-joint, vous verrez le nom des brigands jusqu’à ce moment à notre connaissance; hormis Georges, tous les plus importants sont déjà arrêtés.
Une lettre d’Angleterre à Munich, que nous avons arrêtée, charge à Paris de faire des adresses aux armées pour qu’on prenne la défense de Moreau et Pichegru; et des fonds considérables sont déjà envoyés dans ce pays pour arriver à cet objet.
J’ai ordonné au général Moncey de prescrire au commandant de la gendarmerie de votre camp d’arrêter tous les marchands ou individus qui, sous quelque figure que ce soit, tiendraient des propos. Portez-y une attention particulière; les Anglais, envoient partout des agents; ils font des sacrifices considérables pour arriver à leurs fins. Ayez une commission militaire composée d’hommes énergiques, et faites des exemples. Vous êtes à Boulogne inondé d’espions.
J’imagine que vous recevrez, par les vents qui règnent ces jours-ci, un grand nombre de bâtiments. Je brûle d’apprendre que vous avez plus de 100 chaloupes canonnières dans votre port.
Instruisez-vous si chaque péniche, bateau on chaloupe canonnière a des grappins pour l’abordage.
J’ai renvoyé tous les criminels dont il est question au tribunal criminel de la Seine, qui commence la procédure. Sous quinze jours cela sera terminé.
Nous avons d’assez bonnes nouvelles des Indes, où les Anglais éprouvent beaucoup d’échecs. Nos frégates corsaires font des prises immenses.
Je désire beaucoup que tous les bataillons soient au moins à 800 hommes; dès que les conscrits seront habillés, je pense que les chefs de corps feront bien de les faire venir. Je pense qu’ils pourront mieux s’instruire au camp qu’ils ne pourront le faire au dépôt.
Nous attendons les nouvelles d’Angleterre; la mort du roi ou sa folie (Georges III, 1738-1820. En janvier et mars, il a eu de nouvelles attaques. On pense de nos jours, que le roi était atteint de porphyrie aigue) sera un nouveau sujet de calamité pour le pays.
Il doit être arrivé un certain nombre de caïques à Boulogne; faites-moi connaître combien il y en a d’arrivées.
Paris, 7 mars 1804
Au général Soult
En vous écrivant de mettre à la disposition du camp de Montreuil des écuries pour 400 chevaux, je ne songeais pas qu’il n’y avait encore qu’un régiment; n’en mettez donc que pour 300 chevaux.
Dans votre prochaine lettre, faites-moi connaître quand l’écluse de chasse pourra être finie.
Je ne sais pourquoi on retire les sommes à votre disposition et qui sont très-utiles par la manière dont vous les employez pour que le service ne cesse pas.
Je désirerais que vous fissiez vérifier si les pièces de 16 en bronze que nous avons peuvent aller sur les affûts marins de 18.
J’attendrai, pour faire la distribution entre les différents ports des bâtiments-écuries et autres, que j’aie reçu un croquis sur la situation de ces ports.
Paris, 8 mars 1804
DÉCISION
Rapport du grand juge sur la division marquée des nobles et des roturiers, à Turin, dans les bals du carnaval. | Renvoyé au ministre de l’intérieur, pour faire connaître combien cette division me déplaît et est contraire aux principes du Gouvernement. |
DÉCISION
Mémoire du citoyen Lepaultre sur le commerce, les manufactures, le régime intérieur d’une partie de la Russie, et sur les villes et ports de la mer Noire et de la mer d’Azof. | Renvoyé au ministre de l’intérieur pour prendre connaissance de ce mémoire, qui paraît fort important. |
La Malmaison, 8 mars 1804
Au général Dessolle
Citoyen Général Dessolle, commandant l’armée de Hanovre par intérim, j’ai reçu votre lettre du 10 ventôse. Je suis bien aise que, dans ces circonstances, vous vous trouviez avoir le commandement de l’armée de Hanovre. Vos sentiments pour la République et pour moi me sont connus depuis bien des années. Je désire que vous exerciez la plus grande surveillance pour arrêter les espions et agents anglais dont vous devez être inondé. Une correspondance de Drake, ministre anglais à Munich, que j’ai interceptée, me démontre que les Anglais mettent tout en oeuvre pour faire des dupes de vos cotés.
Dans tous les cas, si, dans cette circonstance fâcheuse, vous perdez des hommes qui vous aimaient, restez persuadé que j’ai toujours pensé que j’avais auprès de vous la priorité et l’ancienneté. Rien n’égale la profonde bêtise de toute cette trame, si ce n’est sa méchanceté. Le cœur humain est un abîme qui trompe tous les calculs; les regards les plus pénétrants ne peuvent le sonder.
Tous les jours nous faisons des arrestations. Je crois avoir la certitude que Georges est encore à Paris avec plusieurs hommes de sa bande. Je doute qu’il échappe encore longtemps à la police.
Paris, 8 mars 1804
DÉCISION
Le citoyen Lebrun (Il s’agit du fils du Consul Lebrun), aide de camp du Premier Consul, demande des instructions concernant le service des marins de la Garde qui sont à Rouen. | Je prie le ministre de la marine de donner des ordres pour le service des marins de la Garde. Il n’est pas juste qu’ils soient sous les ordres de tout le monde; ils ne doivent connaître que leurs officiers. |
Paris, 9 mars 1804
Au contre-amiral Decrès
J’ai là votre rapport sur les approvisionnements du Nord. Il n’y pas les documents nécessaires pour établir le compte en argent et en matière des trois individus qui ont géré cette affaire. Je pense qu’il convient de le faire examiner par une commission du Conseil d’État.
Les dépenses à faire cette année sont bien considérables. Il sera peut-être bon de ne dépenser que 1,500,000 francs, si c’est possible, pour le dernier semestre, et l’on pourrait fournir les sept autres dans les premiers mois de l’an XIII.
Paris, 9 mars 1804
DÉCISION
Le ministre de l’intérieur propose de nommer le citoyen Vauquelin (Louis Nicolas Vauquelin, 1763-1829. Chimiste éminent. Il fera partie de la première promotion de la Légion d’Honneur) professeur au Muséum d’histoire naturelle. | Refusé, attendu que le Premier Consul ne veut pas que trois places soient réunies sur la même tête, et que le citoyen Vauquelin en occupe deux; s’il veut renoncer à l’une d’elles, le Premier Consul verra avec plaisir la désignation d’un savant aussi distingué. |
Paris, 9 mars 1804
Au général Dejean
Il faut faire faire, Citoyen Ministre, des drapeaux pour les troupes des camps de Saint-Omer, Montreuil, Bruges, pour l’infanterie de ligne seulement. La cavalerie et l’infanterie légère en ont eu. Faites-les garder en dépôt à Saint-Omer jusqu’à mon arrivée. Mon intention est de les donner moi-même aux corps.
Paris, 9 mars 1804
Au général Soult
J’ai reçu votre lettre du 16 ventôse. Les deux profils des ports d’Ambleteuse et Wimereux me paraissent clairs. Je désire en avoir de pareils tous les quinze jours. Faites-m’en faire de pareils pour Boulogne et Étaples.
Je désire qu’on puisse, à Ambleteuse, dans le premier compartiment, creuser un emplacement pour quatre ou cinq bricks, et qu’on creuse pour mettre cette petite portion au niveau du fond de l’entrée des jetées.
J’ai donné les ordres qu’on commençât sur-le-champ l’écluse de chasse; faites-moi connaître si on s’en occupe.
Il n’est pas dit de quel calibre sont les obusiers dont vous me parlez. Je désire savoir si toutes les chaloupes ont un obusier de 8, et, dans le cas contraire, pourquoi elles n’en ont pas.
Vous mettez que les caïques n’ont qu’une pièce de 12; ce doit être une erreur; ce sont des pièces de 24 dont elles doivent être armées.
Paris, 9 mars 1804
Au général Moncey, premier inspecteur général de la gendarmerie
Citoyen Général Moncey, il paraît que des brigands ont cherché à se rembarquer au Havre, et qu’il se passe quelque chose d’extraordinaire sur cette côte. Il est convenable d’y envoyer un officier intelligent.
Paris, 9 mars 1804
Au général Rapp, en mission à Toulon
Citoyen Général Rapp, je désire que vous preniez des renseignements détaillés qui me fassent connaître le temps où les quatre vaisseaux désarmés et en radoub pourront être réunis à l’escadre qui est en rade. Ces renseignements une fois pris, vous vous rendrez à Marseille pour y observer l’esprit des troupes et des habitants. Vous vous arrêterez un jour à Toulouse et à Lyon pour le même objet. Vous reviendrez en toute diligence à Paris.
Paris, 9 mars 1804
Au général Davout, commandant le camp de Bruges
Citoyen Général Davout, je reçois votre lettre du 16 ventôse. J’ai fait connaître à l’amiral Ver Huell que je n’approuvais pas que les bateaux canonniers passassent par les canaux. Il n’y a pas d’inconvénient de faire suivre cette route aux bateaux de transport. J’imagine que d’Ostende à Flessingue vous avez établi des détachement de cavalerie mobile; la côte doit en être couverte, de manière que si un bâtiment venait à échouer, il fût sur-le-champ protégé. Vous devez aussi avoir des batteries mobiles d’artillerie légère, d’une pièce au moins par lieue, pour pouvoir protéger un bâtiment qui sera coupé et poursuivi. C’est par là que, sur les côtes de Bretagne, de Normandie et du Boulonnais, nous avons conservé un grand nombre de bâtiments, et plus que tout cela l’honneur attaché à notre pavillon en déconcertant l’ennemi, qui voit nos expéditions et nos mouvement sans pouvoir les empêcher.
Il est convenable que toutes les fois que vous attendrez des convois de Flessingue, et qu’en général la mer sera bonne, une portion de vos chaloupes canonnières, bateaux canonniers et péniches, soit en rade pour protéger leur arrivée.
Voilà le moment où la guerre va s’engager entre vôtre rade et 1es Anglais. Il faut ne point épargner les boulets et les bombes, et, dès l’instant que l’ennemi est à portée, faire tirer avec la plus grand activité. Les canonniers de vos côtes sont quelquefois en retard. Je crois que vous n’avez point de pièces de canon de 24 légères. Dans ce cas, vous pourrez toujours vous servir avantageusement de six pièces de 12 et de six obusiers. Je ne sais si vous avez des obusier que nous appelons prussiens, qui vont plus loin que les autres et dont la chambre contient quatre livres de poudre. Ces douze pièces d’artillerie seraient partagées à droite et à gauche du port, et seraient destinées à se porter sur la laisse de basse mer, pour protéger les bâtiments en rade ou dont on signalerait l’arrivée.
Faites lever un plan de la rade, et faites-y tracer la ligne d’embossage que doit prendre la flottille toutes les fois qu’elle sortira pour exercer ou pour protéger l’arrivée de bâtiments. Ayez soin que la distance des batteries de la laisse de basse mer aux mortes et vives eaux y soit exactement marquée.
Les corvettes de pêche doivent rester à Dunkerque. S’il y a un malentendu, écrivez au commandant de la marine à Dunkerque. Dès qu’elles seront toutes réunies là, allez en passer la revue, formez-en les garnisons, et faites-les aller plusieurs fois en rade.
Le général Dumas méprise sans doute cette lettre anonyme, quoique signée, qu’il a reçue.
Nous arrêtons tous les jours, à Paris, quelques brigands subalternes, de ceux portés sur la liste qui a été imprimée.
Le procès de Moreau, Pichegru, etc., s’instruit au tribunal criminel de la Seine. Les preuves sont très-nombreuses.
Je désire que vous m’envoyiez un profil où vous ferez marquer le montant de la mer aux moyennes, vives et mortes eaux, dans les ports d’Ostende et de Nieuport.
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A 9 heures du soir.
Georges vient d’être arrêté, à sept heures du soir, sur la place de l’Odéon. Ce brigand a tiré quatre coups de pistolet, qui heureusement n’ont blessé qu’un homme. Il a été pris vivant et sans avoir aucun mal. Il était déguisé en fort de la halle, et allait à un rendez- vous pour avoir des renseignements sur la possibilité de franchir les murailles des barrières, qui, comme vous le savez, sont investies de sentinelles à cinquante pas de distance. Des brigands s’y sont présentés et ont été pris ou fusillés. Nous gardons le blocus encore quelques jours pour quatre ou cinq brigands d’une certaine importance.
Cette nouvelle est déjà sue dans Paris et fait sur le peuple un plaisir touchant. Faites-la passer à Marmont et Monnet.
La Malmaison, 9 mars 1804
Au contre-amiral Ver Huell
Monsieur le Contre-Amiral Ver Huell, j’ai reçu votre lettre du 15 ventôse. J’ai appris avec plaisir votre arrivée à Ostende; je vous fais mon compliment sur la manœuvre hardie qui vous y a conduit. Je n’approuve point qu’on fasse passer les bateaux canonniers par les canaux où passent les transports. Il faut que les bâtiments de guerre s’accoutument à la mer. Je désire donc qu’ils passent tous, dans des temps favorables et de la manière dont vous le déciderez, par mer.
Faites vérifier si, sur le rivage d’Ostende à Cadzand, il y a des batteries mobiles, afin que, s’il arrivait que des bâtiments échouassent sur la côte, ils fussent protégés, et que, dans aucun cas, l’armement et les hommes ne soient perdus.
J’apprends avec plaisir qu’on vous a fourni les matelots nécessaires; armez promptement votre seconde partie, car partout tout se prépare.