Correspondance de Napoléon – Juin 1800

Juin 1800

 

Milan, 6 juin 1800 (17 prairial an VIII)

PROCLAMATION

Soldats! un de nos départements était au pouvoir de l’ennemi; au consternation régnait dans tout le midi de la France; la plus grande partie du territoire du peuple ligurien, le plus fidèle ami de la république, était envahie. La république cisalpine, anéantie dès là campagne passée, était devenue le jouet du régime féodal. Vous avez marché, et déjà la joie et l’espérance succèdent, dans notre patrie et en Italie, à la consternation et à la crainte.

Soldats! vous rendrez la liberté et l’indépendance au peuple de Gênes, qui sera pour toujours délivré de ses éternels ennemis.

Vous êtes dans la capitale de la Cisalpine ! L’ennemi épouvanté n’aspire plus qu’à regagner ses frontières; vous lui avet enlevé ses magasins et ses parcs de réserve: le premier acte de la campagne est terminé !

Soldats!. des millions d’hommes, vous l’entendez tous les jours, vous adressent des paroles de reconnaissance. Aura-t-on donc impunément violé le territoire français ? Laisserez-vous retourner dans ses foyers l’armée qui a porté l’alarme dans vos familles ? Vous avez couru aux armes! Eh bien ! maintenant, volez à la poursuite de nos ennemis, opposez-vous à leur retraite; arrachez-leur les lauriers dont ils se sont parés… Vous apprendrez ainsi au monde que la malédiction de Dieu est sur les insensés qui osent insulter le territoire du grand peuple.

Soldats, le résultat de nos efforts sera gloire sans nuage et paix solide!

 

Torre de Garofolo, le 16 juin 1800 (27 prairial an VIII)

Aux consuls.

Le lendemain de la bataille de Marengo, citoyens consuls, le général Mélas a fait demander aux avant-postes qu’il lui fût permis de m’envoyer le général Sekal. On a arrêté, dans la journée, la convention dont vous trouverez ci-joint copie (il s’agit de la convention dite d’Alexandrie). Elle a été signée dans la nuit, par le général berthier et le général Mélas. J’espère que le peuple français sera content de son armée !

 

Lyon, le 29 juin 1800 (10 messidor an VIII)

À Lucien (ministre de l’Intérieur)

Je reçois, Citoyen Ministre, votre lettre du … J’arriverai à Paris à l’improviste. Mon intention est de n’avoir ni arcs de triomphe, ni aucune espèce de cérémonie. J’ai trop bonne opinion de moi pour estimer beaucoup de pareils colifichets. Je ne connais pas d’autre triomphe que la satisfaction publique. (Bonaparte arrivera le 2 juillet, dans la nuit, à Paris)

 

Juin 1800

 

Torre de Garofolo, le 16 juin 1800 (27 prairial an VIII)

Aux consuls.

Le lendemain de la bataille de Marengo, citoyens consuls, le général Melas a fait demander aux avant-postes qu’il lui fût permis de m’envoyer le général Skal. On a arrêté, dans la journée, la convention dont vous trouverez ci-joint copie (il s’agit de la convention dite d’Alexandrie.) Elle a été signée dans la nuit, par le général Berthier et le général Melas. J’espère que le peuple français sera content de son armée !

 

Marengo, 16 juin 1800

À Sa Majesté l’Empereur et Roi

J’ai l’honneur d’écrire à votre Majesté pour lui faire connaître le désir du peuple français de mettre un terme à la guerre qui désole nos pays.

L’astuce des Anglais a empêché l’effet que devait naturellement produire sur le cœur de Votre Majesté ma démarche à la fois simple et franche.

La guerre a eu lieu. Des milliers de Français et d’Autrichiens ne sont plus ….. Des milliers de familles désolées redemandent leurs pères, leurs époux, leurs fils…Mais le mal qui est fait est sans remède ; qu’il nous instruise du moins et nous fasse éviter celui que produirait la continuation des hostilités ! Cette perspective afflige tellement mon cœur, que, sans me rebuter de l’inutilité de ma première démarche, je prends derechef le parti décrire directement à Votre Majesté, pour la conjurer de mettre un terme aux malheurs du continent.

C’est sur le champ de bataille de Marengo, au milieu des souffrances et environné de 15,000 cadavres, que je conjure Votre Majesté d’écouter le cri de l’humanité, et de ne pas permettre que la génération de deux braves et puissantes nations s’entr’égorge pour des intérêts qui leur sont étrangers.

C’est à moi de presser Votre Majesté, puisque je suis plus près qu’elle du théâtre de la guerre. Son cœur ne peut pas être si vivement frappé que le mien.

Les armes de Votre Majesté ont assez de gloire ; elle gouverne un très-grand nombre d’États. Que peuvent donc alléguer ceux qui, dans le cabinet de Votre Majesté, veulent la continuation des hostilités ?

Les intérêts de la religion et de l’Église ?

Pourquoi ne conseille-t-on pas à Votre Majesté de faire la guerre aux Anglais, aux Moscovites, aux Prussiens ? Ils sont plus loin de l’église que nous.

La forme du gouvernement français, qui n’est point héréditaire, mais simplement électif ?

Mais le gouvernement de l’Empire est aussi électif ; et d’ailleurs Votre Majesté est bien convaincue de l’impuissance où serait le monde entier de rien changer à la volonté que le peuple français a reçue de la nature de se gouverner comme il lui plaît. Et pourquoi ne conseille-t-on pas à Votre Majesté d’exiger du roi d’Angleterre la suppression du Parlement et des Etats, ou des Etats-Unis d’Amérique la destruction de leur Congrès ?

Les intérêts du Corps germanique ?

Mais Votre Majesté nous a cédé Mayence, que plusieurs campagnes n’ont pu mettre en notre pouvoir, et qui était dans le cas de soutenir plusieurs mois de siège ; mais le Corps germanique demande à grands cris la paix, qui seule peut le sauver de son entière ruine ; mais la plus grande partie du Corps germanique, les États mêmes du roi d’Angleterre, seul instigateur de la guerre, sont en paix avec la République française.

Un accroissement d’États en Italie pour votre Majesté ?

Mais le traité de Campo-Formio a donné à Votre Majesté ce qui été constamment l’objet de l’ambition de ses ancêtres.

L’équilibre de l’Europe ?

La campagne passée montre assez que l’équilibre de l’Europe n’est pas menacé par la France, et les événements de tous les jours prouvent qu’il l’est par la puissance anglaise, qui s’est tellement emparée du commerce du monde et de l’empire des mers, qu’elle peut seul résister aujourd’hui à la marine réunie des Russes, des Danois,Suédois, des Français, des Espagnols et des Bataves. Mais Votre Majesté, qui a un grand commerce aujourd’hui, est intéressée à l’indépendance et à la liberté des mers.

La destruction des principes révolutionnaires ?

Si Votre Majesté veut se rendre compte des effets de la guerre, elle verra qu’ils seront de révolutionner l’Europe en accroissant partout la dette publique et le mécontentement des peuples.

En obligeant le peuple français à faire la guerre, on l’obligera à ne penser qu’à la guerre, à ne vivre que de la guerre, et les légions françaises sont nombreuses et braves.

Si Votre Majesté veut la paix, elle est faite : exécutons de part et d’autre le traité de Campo-Formio, et consolidons, par un supplément, la garantie des petites puissances, qui, principalement, paraît avoir été cause de la rupture de la paix.

Donnons le repos et la tranquillité à la génération actuelle. Si les générations futures sont assez folles pour se battre, eh bien, elles apprendront, après quelques années de guerre, à devenir sages et à vivre en paix.

Je pouvais faire prisonnière toute l’armée de Votre Majesté. Je me suis contenté d’une suspension d’armes, ayant l’espoir que ce serait un premier pas vers le repos du monde, objet qui me tient d’autant plus à cœur, qu’élevé et nourri par la guerre, on pourrait me soupçonner d’être plus accoutumé aux maux qu’elle entraîne.

Cependant Votre Majesté sent que, si la suspension d’armes qui a lieu ne doit pas conduire à la paix, elle est sans but et contraire aux intérêts de ma nation.

Ainsi, je crois devoir proposer à Votre Majesté :

1° Que l’armistice soit commun à toutes les armées ;
2° Que des négociateurs soient envoyés, de part et d’autre, secrètement ou publiquement, comme Votre Majesté le voudra, dans une place entre le Mincio et la Chiese, pour convenir d’un système de garantie pour les petites puissances, et expliquer les articles du traité de Campo-Formio que l’inexpérience aurait montrés devoir l’être.

Si Votre Majesté se refusait à ces propositions, les hostilités recommenceraient ; et, qu’elle me permette de le lui dire franchement, elle serait, aux yeux du monde, seule responsable de la guerre.

Je prie Votre Majesté de lire cette lettre avec les mêmes sentiments qui me l’ont fait écrire, et d’être persuadée qu’après le bonheur et les intérêts du peuple français, rien ne m’intéresse davantage que la prospérité de la nation guerrière dont, depuis huit ans, j’admire le courage et les vertus militaires.

 

Milan, 17 juin 1800

Au général Moreau, commandant en chef l’armée du Rhin

Le sort de l’Italie, Citoyen Général, vient d’être décidé par deux batailles assez sérieuses, l’une à Montebello, près Casteggio, l’autre entre Marengo et San-Giuliano. Desaix, qui était arrivé la veille, a été tué à cette dernière. Sa famille et la République font une grande perte ; mais la nôtre est plus grande encore.

M. Melas se trouvait, après cette bataille, enveloppé de tous côtés ; il a signé la convention que vous trouverez ci-jointe.

Il fait ici, comme à votre armée, un temps assez mauvais, ce qui nous fatigue beaucoup ; tous les soirs nous avons deux heures de pluie.

J’arrive à Milan, et je suis un peu fatigué. Je vous écrirai plus en détail un autre jour.

…………………..

Dès l’instant que la plus grande partie des places fortes sera dans nos mains, je ferai signifier à la cour de Vienne que les expressions du premier article, jusqu’à la réponse de la cour de Vienne, doivent s’étendre à quinze jours seulement. Ce temps est nécessaire à l’armée pour organiser son artillerie.

 

Milan, 17 juin 1800

Au citoyen Carnot, ministre de la guerre

Vous trouverez ci-joint un arrêté que je vous prie de communiquer aux Consuls. Vous sentez combien il est essentiel qu’il soit tenu extrêmement secret. Il faut que tout le monde ignore cette réunion des 24e, 25e et 26e divisions militaires à l’armée de Batavie, jusqu’au moment où le corps d’armée sera à quatre ou cinq marches au-delà de Mayence.

J’ai prévenu, depuis longtemps, le général Augereau de se tenir prêt à ce mouvement. Masquez-le, et faites croire, le plus possible qu’inquiet sur la Vendée vous y faites passer des troupes de la Batavie.

 

Milan, 17 juin 1800

ARRÊTÉ

Bonaparte, Premier Consul de la République française, arrête :

ARTICLE 1er. – Il sera établi à Milan un ministre extraordinaire du Gouvernement français.
ART. 2. – Le ministre sera chargé de toutes les relations avec Gouvernement cisalpin ; aucun agent français ne pourra avoir de communication avec ce gouvernement que par son entremise.
ART. 3. – Les fonds provenant, soit des contributions établies par le Gouvernement ou par le général en chef, soit des biens appartenant aux puissances en guerre avec la France, seront perçus sous l’autorité et la surveillance du ministre extraordinaire. Il sera, à cet effet, établi près de lui un trésorier français, dans la caisse duquel tous les fonds seront versés.
ART. 4. – Les fonds versés dans la caisse extraordinaire ne pourront en sortir que par les ordres du ministre français et pour 1es besoins de l’armée.
ART. 5. – Le ministre extraordinaire pourra seul convoquer l’assemblée générale de la Consulte établie pour préparer le travail la commission et de la législation de la République cisalpine, et présidera.

 

Milan, 17 juin 1800

ARRÊTÉ

Bonaparte, Premier Consul de la République françaises considérant que la République cisalpine a été reconnue libre et indépendant par l’Empereur et la plus grande partie des puissances de l’Europe, il est de la loyauté du peuple français, et conforme à son désir, de mettre un terme à la guerre qui dévaste le continent, et de procéder à la réorganisation de ladite République, arrête :

ARTICLE 1er. – Il sera réuni, à Milan, une Consulte chargée de préparer l’organisation de la République, et de rédiger les lois et règlements relatifs aux différentes branches de l’administration publique.
ART. 2. – La Consulte sera composée de 50 membres, et présidée par le ministre extraordinaire de la République française.
ART. 3. – La Consulte, dans sa première séance, arrêtera son ordre de travail et sa division en sections.
ART. 4. – La Consulte sera tenue de s’occuper de tous les projets de règlements urgents dont la demande lui serait faite par la commission extraordinaire du Gouvernement.

 

Milan, 17 juin 1800

ARRÊTÉ

Bonaparte, Premier Consul de la République française, arrête :

ARTICLE ler. – Le gouvernement de la République cisalpine sera provisoirement exercé par une commission extraordinaire de neuf membres, qui réuniront tous les pouvoirs de la République, excepté le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif.
ART. 2. – Cette commission proposera à la Consulte établie par l’arrêté de ce jour les lois et règlements qui lui paraîtront nécessaires.
ART. 3. – Elle pourra conserver, dans les tribunaux actuels, les juges en exercice, ou les remplacer, à son choix.
ART. 4. – Elle établira dans chaque département un commissaire qui sera chargé de tous les détails de l’administration.
ART. 5. – Le commissaire aura sous ses ordres tous les agents municipaux et tous les fonctionnaires civils de son arrondissement ; il correspondra directement avec la commission extraordinaire.
ART. 6. – Les impositions actuelles sont maintenues telles qu’elles ont été établies pour l’an 1800 ; la commission pourra en créer de nouvelles, avec le consentement formel de la Consulte.
ART. 7. – Tous les fonctionnaires publics sont tenus de rester à leur poste et de continuer leur service, sous l’autorité du Gouvernement provisoire, jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné.

 

Milan, 17 juin 1800

Au général Berthier, commandant en chef l’armée de réserve, à Torre dei Garoffoli

Je vous envoie, Citoyen Général, un arrêté dont je vous d’envoyer copie au général Masséna et au général Turreau.

Plaisance est rendue : la garnison est prisonnière sur parole ; est forte de 1100 hommes. Elle servira à échanger les 1100 hommes qui ont été faits prisonniers à Marengo et qui sont à Alexandrie.

 

Milan, 17 juin 1800

ARRÊTÉ

Bonaparte, Premier Consul de la République, arrête :

ARTICLE 1er – Le général Masséna prendra toutes les mesures pour faire occuper, en conséquence de la convention du 27 prairial les forteresses de Ceva, Coni, Savone et la ville de Gênes.
ART. 2. – Le général Turreau, en vertu de ladite capitulation, occupera Turin.
ART. 3. -Le général en chef Berthier fera occuper Milan, Arona, Pizzighettone, Alexandrie, Tortone.

 

Milan, 17 juin 1800

BULLETIN DE L’ARMÉE DE RÉSERVE

Les canonniers de la garde des Consuls se couvrent de gloire dans toutes les affaires. A la bataille de Montebello, ils étaient, avec les tirailleurs et trois pièces d’artillerie, toujours à vingt pas de l’ennemi. Le citoyen Marin-, sous-lieutenant de cette compagnie, se distingue d’une manière toute particulière.

  1. Melas a eu, dans la bataille de Marengo, deux chevaux tués sous lui et une contusion au bras.

Le général Saint-Julien, avec quatre ou cinq autres généraux, avaient (sic) été faits prisonniers ; mais ils ont eu le temps de se sauver pendant que nos soldats se jetaient sur les pièces.

Plusieurs des grenadiers hongrois et allemands prisonniers, passant auprès du Premier Consul, le reconnurent, ayant été faits prisonniers dans les campagnes de l’an IV et de l’an V. Beaucoup se mirent à crier avec une espèce de satisfaction : Vive Bonaparte !

Le Premier Consul disait, en revenant de la bataille et voyant une grande quantité de soldats blessés dans le dénuement et les embarras suites inévitables d’une grande bataille : « Quand on voit souffrir m tous ces braves gens, on n’a qu’un regret, c’est de n’être pas blessé comme eux, pour partager leurs douleurs. »

Les généraux, officiers et soldats de l’armée autrichienne sont indignés contre Thugut. Ils rendent justice aux bonnes intentions de leur empereur, et ils paraissent convaincus que nous ne nous battons que pour vendre plus cher le café et le sucre des Anglais.

Un général autrichien de beaucoup de mérite disait au quartier général : « Nous n’aurons de repos et de bonheur sur le continent que lorsque, d’un concours unanime, nous en interdirons l’accès à cette nation vénale et mercantile qui calcule sur notre sang pour l’accroissement de son commerce. »

Tous paraissent convaincus que, si nous n’avons pas la paix, c’est la faute de l’Angleterre et de leur ministère.

L’armée autrichienne paraît très-attachée au prince Charles, et elle attribue sa disgrâce à quelques plaisanteries lâchées par l’archiduc contre Thugut, et à son opinion bien connue de faire la paix.

A Paris comme à Vienne, en France comme en Allemagne, à l’armée française comme à l’armée autrichienne, tout le monde veut la paix. Les intrigues et les guinées des Anglais, l’influence de l’impératrice et la disgrâce du prince Charles paraissent seules l’empêcher.

Si l’Empereur avait été sur le champ de bataille de Marengo, son cœur se serait livré aux sentiments d’humanité qui lui sont naturels, et il conclurait la paix ; et, s’il a de la religion, il pensera qu’il doit y avoir châtiment pour celui qui, par ambition on faiblesse, est coupable de tant de malheurs.

Mais, quand une partie de l’Italie resterait à l’Empereur, qu’en ferait-il ? Peut-il du fond de son palais, à Vienne, gouverner les peuples de l’Allemagne et des rives de l’Adda ? S’il savait combien il a été mal servi par ses agents en Italie, combien de vexations, de vols, d’emprisonnements ont été faits sous son nom, il n’attacherait pas grand prix à la possession d’un pays où il ne peut plus qu’être en horreur.

Parce que le Gouvernement français a pris un ton de modération, fondé sur la confiance du peuple et sur des bases solides, on l’a cru faible et pusillanime. On ne croyait pas à la première armée de réserve, et on la tournait en ridicule ; on ne croira sans doute à la seconde que lorsqu’elle frappera.

Le frère du général Watrin a été tué à la bataille de Marengo c’était un officier d’un grand mérite.

Le château de Plaisance a capitulé ; la garnison est prisonnière de guerre.

 

Milan, 18 juin 1800

Aux Consuls de la République

Je reçois, Citoyens Consuls, votre courrier du 22. Je vous envoie une nouvelle copie de la convention. Dans les premiers jours de messidor, toute les places seront en notre pouvoir.

Vous trouverez ci-joint le bulletin de l’armée et la capitulation de Plaisance.

A la nouvelle du débarquement à Quiberon, j’allais me rendre droit dans la Vendée ; mais les nouvelles que je reçois du rembarquement retarderont mon départ de quelques jours.

Aujourd’hui, malgré ce qu’en pourront dire nos athées de Paris, je vais en grande cérémonie au Te Deum que l’on chante à la métropole de Milan.

 

Milan, 18 juin 1800

Au citoyen Carnot, ministre de la guerre

Le général Lacombe Saint-Michel, Citoyen Ministre, qui avait été chargé de la formation d’un équipage de siège pour la citadelle Turin, doit commencer ses opérations pour assiéger Peschiera et Porto-Legnago, que j’ai le projet de faire attaquer à la fois, lors il reprise des hostilités. Il n’aura pas besoin d’amener de Franc (matériel; il trouvera plus de canons qu’il ne lui en faut dan@ citadelles qui sont en notre pouvoir. Il suffira qu’il amène des ouvriers, des canonniers et le plus d’attelages qu’il pourra.

Je compte faire détruire la plus grande partie de ces places ; il est donc nécessaire d’envoyer le plus promptement possible trois ou quatre compagnies de mineurs, pour finir en peu de temps.

 

Milan, 18 juin 1800

Au général Berthier, commandant en chef l’armée de réserve, à Tortone.

Je reçois, Citoyen Général, votre lettre d’hier, 28. J’admire votre confiance. Il faut, le plus promptement possible, y porter remède, afin de ne pas en être dupe.

Il paraît que la première colonne sera partie lorsque vous recevrez cette lettre. Faites-la marcher à petites journées, de manière qu’elle ne soit à Castel-San-Giovanni que le 2 ou 3 messidor au soir.

Réunissez derrière la Trebbia, à grandes marches, toute la division Loison, ainsi que les Italiens et le bataillon du général Moncey, qui se trouvent à Plaisance.

Vous saurez le ler, à midi, si vous avez Alexandrie, Pizzighettone et Milan.

Vous saurez, le 2 an matin, si vous avez Turin. Dans ce cas, le général Loison laissera passer la première colonne autrichienne. Dans le cas contraire, le général Loison déclarera qu’elle ne peut pas passer qu’on ne soit en possession des places.

Je ne peux pas concevoir comment on ne nous rend Savone et Gênes que le 5 messidor. Est-ce pour laisser aux Anglais le temps d’y jeter garnison anglaise ? Cependant la seconde colonne part le ler messidor. Il faudrait, aux termes du traité, qu’elle ne partît que le 5, on bien qu’on nous livrât Coni, Gênes, Savone, ler messidor. En fait d’affaires, tous ces différends ne sont rien. S’ils sont de bonne foi, qu’importe qu’ils nous livrent les places un ou deux jours plus tôt; S’ils ne sont pas de bonne foi, il faut prendre nos précautions.

D’ailleurs, le 7 messidor, ils peuvent avoir reçu la réponse de Vienne, et, dès lors, le général Melas n’est plus responsable de rien.

Mon intention est positivement que vous retardiez le départ de la seconde colonne, et que le fort Urbain nous soit remis le plus tôt possible ; il n’est pas si loin.

Dans tous les cas, faites marcher, avant la seconde comme avant la première colonne, des troupes avec de l’artillerie et plus nombreuses qu’elles. Ayez soin aussi qu’il ne parte aucune artillerie avec l’armée, même de campagne, qui serait de calibre ou fonderie italienne, piémontaise ou française. La convention est assez avantageuse pour les Autrichiens. Dans la même position, ils ne se seraient pas comportés comme nous.

Je voudrais aussi que M. Melas, de sa personne, ne partît quand nous aurons Gênes.

 

Milan, 18 juin 1800

Au général Brune, commandant l’armée de réserve de 2e ligne, à Dijon

Vous serez déjà instruit, Citoyen Général, des résultats des batailles de Montebello et de Marengo, et de la convention conclue avec M. de Melas. Vous voyez que nous avons fait rapidement assez bonne besogne.

Je vous destinais à la prise de toutes les places du Piémont. Je sais que cette guerre de siége, que vous n’avez pas encore faite, vous aurait été agréable sou s le rapport de l’instruction ; mais puisque ces places sont en notre pouvoir, mon intention est de vous employer comme ministre extraordinaire chargé de l’organisation du Piémont. Ces fonctions sont à la fois importantes et conforme à l’habitude que vous avez déjà de manier les hommes et de les conduire au but.