Correspondance de Napoléon – Juillet 1813

Magdeburg, 12 juillet 1813.

Au comte Daru, directeur de l’administration de la Grande Armée, à Dresde.

Monsieur le Comte Daru, les 250 malades que vous avez expédiés de Dresde sont arrivés ici en trois jours et demi. Comme il ne manque pas de marins de la Garde à Dresde, faites-les partir avec le plus de bateaux qu’il sera possible de trouver, et évacuez ainsi autant de blessés et malades que vous pourrez. Vous pouvez en diriger 1,000 sur Torgau, 1,000 sur Wittenberg et au moins 15 à 1600 sur Mag­deburg. Ce sera donc environ 4,000 blessés ou malades, que vous tirerez de Dresde.

200,000 boisseaux d’avoine sont chargés ici pour être transportés à Dresde. Je donne ordre que, sur les 8,000 quintaux de farine qui étaient destinés au général Vandamme, on n’en expédie que 4,000 à Dresde.

Écrivez à Wittenberg qu’on prenne les maisons qu’occupait l’uni­versité, pour porter à mille le nombre des lits d’hôpitaux qu’on doit établir dans cette place.

Je comprends ces diverses dispositions dans un ordre du jour que je viens de signer.

 

Magdeburg, 12 juillet 1813.

Au général comte Lemarois, gouverneur de Magdeburg.

Monsieur le Comte Lemarois, réunissez chez vous le commissaire ordonnateur et l’agent supérieur des vivres de la place, ainsi que le commandant du génie et celui de l’artillerie, pour régler définitive­ment l’approvisionnement de siège de Magdeburg. Votre première opération devra donc être d’arrêter la colonne de ce qui est néces­saire pour cet approvisionnement ; comme nous sommes au moment de la récolte, c’est maintenant qu’il faut le compléter. Je pense qu’il doit être établi sur le pied de 20,000 hommes et 2,000 chevaux pendant deux cents jours ; sauf à se procurer, au moment de l’in­vestissement , des blés, des fourrages et des bestiaux par voie mili­taire , autour de la place, en aussi grande quantité que l’on pourra ; et dans un pays aussi fertile, en battant l’estrade à dix lieues à la ronde, on doit pouvoir beaucoup augmenter cet approvisionnement. Le foin et la paille actuellement existants seront remplacés par de nouveau foin et de nouvelle paille, et seront mis en consommation à fur et mesure des remplacements. Ces fourrages seront placés sur trois points différents, de manière qu’on ne risque jamais que d’en perdre une partie. Présentez-moi un projet pour requérir le foin, la paille et l’avoine nécessaires dans un rayon de trente lieues autour de la place. Il est convenable de bien compléter, sur-le-champ, l’appro­visionnement en viandes salées. Quant aux viandes fraîches, on aura le temps de s’en procurer au dernier moment : d’ailleurs il y aura un fonds d’approvisionnement existant par ce qui vient de Hambourg. Il faudra aussi avoir un approvisionnement de tous les objets néces­saires pour 4,000 malades pendant deux mois.

J’ai ordonné qu’il y eût à Magdeburg, outre l’approvisionnement de siège, un approvisionnement fixe pour 10,000 hommes pendant un an, dont la moitié aux frais du royaume de Westphalie et l’autre moitié aux frais de la France; ce qui fait pour 10,000 hommes pen­dant six mois. Faites-moi connaître si la partie aux frais de la West­phalie a été réunie, ainsi que la partie aux frais de la France.

 

Magdeburg, 13 juillet 1813.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde

Monsieur le Duc de Bassano, j’ai reçu votre lettre du 11. Je serai cette nuit à Leipzig, et dans la nuit du 14 au 15 à Dresde. J’irai de Leipzig à Dresde par la rive gauche.

 

Magdeburg, 13 juillet 1813.

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, j’ai reçu votre lettre du 8 juillet. Il n’y a pas de doute que les événements d’Espagne occasionneront un supplément de 6 à 10 millions au budget des dépenses de l’admi­nistration de la guerre. Vous avez vu de quelle manière j’ai fait cette distribution, en exigeant que les payements fussent faits en bons et que les services se fissent par réquisition. Je ne me dissimule pas qu’il peut y avoir des inconvénients à cette manière de faire le service, mais cela me paraît sans remède. Cela aura du moins l’avantage d’accélérer la vente des biens des communes.

 

Dresde, 15 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez au duc de Bellune que vous m’avez mis sous les yeux sa lettre du 13; qu’elle n’a fait que confirmer l’opinion où j’étais qu’il a mal agi le jour où il a hésité et consulté la commission de Neumarkt; que les Russes eux-mêmes s’en sont moqués; que les Prussiens n’auraient voulu rien céder, et que si sur tous les autres points on en avait agi comme lui, on n’aurait pas même eu Dessau, quoique Dessau fût sur la rive gauche ; qu’enfin il ne fallait pas faire une question de ce qui était de droit ; que j’ai donc perdu, par son hésitation, le cercle de Krossen et ce débouché important; que je suis également mécontent qu’il ait donné des ordres au général Vial et à la 5e division ; qu’il est temps enfin de savoir obéir, et de savoir aussi se contenir dans ses bornes.

 

Dresde. 15 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, tons les rapports qui me reviennent sur les moulins portatifs, me les présentent comme peu utiles dans les places fortes, où des moulins composés de meules ordinaires mises en mouvement par des chevaux ou par des hommes, sont préférables, vu qu’on assure que les nouveaux moulins ne donnent pas de son, et dès lors ne rendent qu’une farine grossière qui ne peut être de quelque usage que dans les circonstances urgentes.

Ordonnez la construction, dans les places fortes, de meules à mettre en mouvement par des chevaux et par des hommes ; et faites distribuer tous les moulins qui sont à Magdeburg et à Dresde à tous les corps, à raison de deux par bataillon; ceux de Magdeburg seront donnés au corps du général Vandamme. Faites-moi connaître le nombre qu’il en faudrait pour en donner trois par bataillon. Il fau­drait prescrire de les faire porter sur les caissons d’ambulance des bataillons.

 

Dresde, 15 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez sur la ligne à tous les maréchaux pour leur faire connaître que la prolongation de l’armistice a été consentie jus­qu’au 10 août par l’intermédiaire de l’Autriche; que cependant rien n’a encore été signé par les plénipotentiaires de Neumarkt, qui n’avaient pas d’instructions et qui probablement les recevront dans peu de jours; que toutefois il est nécessaire de se tenir prêt à rentrer en campagne, si l’ennemi dénonçait l’armistice le 20 juillet.

Écrivez la même chose au prince

 

Dresde, 16 juillet 1813.

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Duc Decrès, j’ai reçu votre lettre du 10 juillet. Je ne pourrais partager l’opinion qu’une escadre ennemie peut mouiller en dedans du Verdon qu’autant que vous trouveriez dans cette rade un mouillage éloigné de plus de 2,400 toises de tous les points de la côte ; or, certainement, un tel mouillage n’y existe point. Je ne comprends pas davantage comment nos vaisseaux pourraient être attaqués dans la rade de Tal mont, à moins que vous ne supposiez que l’ennemi eût fait un débarquement. Faites toujours passer la frégate dans la rade de la Gironde, puisque cela est nécessaire au projet de croisière pour l’hiver prochain.

Voici bientôt le temps où toutes les frégates doivent avoir leurs instructions, afin qu’elles soient en appareillage au 15 septembre.

 

Dresde, 16 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Castiglione d’envoyer le général du génie Dode parcourir toute la ligne des frontières de Bohême, depuis Passau jusqu’au-delà de Karlsbad. Ce général fera connaître le nombre de débouchés qui, de Bohême, vont en Bavière, en distinguant ceux qui peuvent servir pour une armée de ceux qui ne peuvent servir que pour des détachements. Il indiquera également les positions qu’on pourra prendre pour empêcher une armée de déboucher, il portera une attention spéciale aux débouchés qui vien­nent sut Bayreuth, sur Hof, sur Zwickau et Chemnitz.

 

Dresde, 16 juillet 1813.

Au général Arrighi, duc de Padoue, commandant le 3e corps de cavalerie, à Leipzig

Monsieur le Duc de Padoue, je désire avoir des ménagements pour la Saxe, qui me fournit dans ce moment 20,000 hommes d’in­fanterie et 4,000 de cavalerie, et qui supporte effectivement tout le poids de la guerre. Faites-moi un rapport sur toutes les réquisitions que vous avez faites à Leipzig, sur ce qui a été fourni et sur les moyens d’alléger les charges imposées à ce pays.

Faites-moi connaître combien il y a d’hommes et de chevaux au dépôt de Leipzig. Le prince de Neuchâtel pense qu’il y a plus de chevaux que d’hommes.  Il est urgent de supprimer le dépôt de Leipzig. S’il y a plus de chevaux que d’hommes, je vous ferai envoyer des hommes; si, au contraire, il y avait plus d’hommes que de che­vaux, il faudrait envoyer le surplus des hommes à Magdeburg.

La ville de Leipzig devait fournir 3,000 habits à Wittenberg; ils n’y sont pas encore arrivés. Prenez des mesures pour en hâter la livraison.

Il m’a paru que Leipzig était entouré d’une muraille et n’avait qu’un certain nombre de portes. Mon intention serait de faire arranger ces portes de manière que la garde bourgeoise pût mettre la ville à l’abri des Cosaques. Je ne verrais pas de difficulté à y laisser un bataillon d’infanterie et quatre pièces de canon, ce qui, avec la garde bourgeoise, suffirait pour défendre la ville contre 12 ou 1500 Cosa­ques. Envoyez-moi le plan de la ville, en me faisant connaître votre opinion sur ce projet. Je désire que vous me répondiez sur-le-champ à ces différentes demandes.

J’ai donné des ordres pour qu’à Wittenberg, Magdeburg et Torgau, on laissât passer toutes les marchandises françaises et saxonnes expé­diées par le commerce de Leipzig.

 

Dresde, 16 juillet 1813.

Au maréchal Kellermann, duc de Valmy, commandant supérieur des 5e, 25e et 26e divisions militaires, à Mayence.

Mon Cousin, faites connaître à l’Impératrice, par le télégraphe, que l’armistice est prolongé jusqu’à la mi-août et que le duc de Vicence et le comte de Narbonne se sont rendus à Prague comme mes plénipotentiaires au congrès.

 

Dresde, 16 juillet 1813.

Au maréchal Kellermann, duc de Valmy, commandant supérieur des 5e, 25e et 26e divisions militaires, à Mayence.

Mon Cousin, faites préparer ma maison à Mayence. Je vous confie, pour vous seul, que l’Impératrice se rendra le 23 ou le 24 à Mayence, et que peut-être irai-je l’y voir. Je désire que cela ne se sache pas d’avance.

 

Dresde, 17 juillet 1813.

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur le Comte Bigot de Préameneu, mon Ministre des cultes, l’évêque de Nantes était le prêtre le plus éclairé de l’Empire, le doc­teur le plus distingué en Sorbonne : il peut être mis à côté des évêques qui ont le plus honoré l’Église gallicane. Personne n’était plus pénétré du véritable esprit de l’Évangile; personne ne savait mieux respecter les droits des souverains et distinguer les droits de l’Église d’avec les abus monstrueux et les maximes folles et insensées de la cour de Rome, maximes aujourd’hui si ridicules, et qui ont fait verser tant de sang et causé tant de déchirements dans les siècles d’ignorance. Si tous les théologiens, si tous les évêques avaient aussi bien connu l’esprit de la religion et avaient eu autant de lumières et de bonne foi, Luther, Calvin et Henri VIII n’auraient pas fait secte, et le monde entier serait catholique. Je désire qu’aux frais de notre trésor impérial un monument soit élevé dans la cathédrale de Nantes à la mémoire de ce digne prélat.

 

Dresde, 17 juillet 1813.

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, je reçois votre lettre du 12 juillet. J’y vois un état des bons de la caisse d’amortissement qui se monteraient à 195 millions; mais je ne vois pas bien si c’est de l’argent mangé. Par exemple, les 71 millions qui sont à la caisse de la couronne et du domaine extraordinaire doivent être mangés. Il en doit être de même de ceux portés à la Banque. Je ne suis pas sûr que les 62 mil­lions qui sont à la caisse de service soient également mangés : ils peuvent y être comme appartenant à la caisse générale. Je ne puis avoir d’idée de cette affaire qu’autant que les comptes seront portés au livre du mois, parce que les comptes isolés ne disent rien, au lieu qu’un compte général où tout est porté dans la même hypothèse m’offre bien mieux l’ensemble des choses. Il faudrait donc ajouter au livret un état pour les bons de la caisse d’amortissement, comme vous y avez ajouté un état pour les obligations.

Mais je pense que ce n’est pas suffisant, et qu’il faudrait, en outre, mentionner vis-à-vis l’article des recettes de douanes, et vis-à-vis les recettes provenant des ventes des domaines communaux, la portion de ces bons, non pas de ceux que vous avez reçus, mais de ceux que vous avez mangés, c’est-à-dire négociés et fait entrer dans des paye­ments. Au reste, ceci est un détail de comptabilité, et vous êtes plus à même que moi de juger ce qui convient à cet égard. Je désire seu­lement que dans le prochain état vous mettiez ce qui est nécessaire pour bien m’éclaircir la situation des bons. Les bons ordinaires de la caisse d’amortissement ne peuvent pas entrer dans la recette, puis­que vous n’avez droit à aucun, et que s’il s’en trouve à la caisse, c’est comme lettre de change ou argent; ainsi il n’y a point de recette à faire pour ceux-là. Si je dis mal, vous me rectifierez.

À l’article des Bons des douanes, il faudrait mettre : le payement sur les cinquante licences a été évalué tant; il a été perçu tant en argent ; il ne restait donc par présomption à recevoir que tant ; pour cette somme, on a créé tant de bons, dont tant ont fait recette au tré­sor et ont été donnés en payement. Même mention sera faite pour les bons communaux. Vous sentez le besoin de faire bien cadrer cela avec les comptes du mois; car, enfin, en lisant ce livret, et ré­capitulant mes ressources, je ferais un faux raisonnement si je disais : je devais recevoir 148 millions de bons des communes; je n’ai reçu qu’un million : j’ai donc 147 millions à recevoir. Ce calcul serait faux, si en même temps le trésor avait employé dans ses paye­ments 147 millions de bons, puisque cette ressource se trouverait ainsi mangée d’avance. Arrangez donc ces états de manière qu’ils ne me laissent aucun doute et qu’il n’y ait aucun double emploi.

 

Dresde, 17 juillet 1813.

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg

Mon Cousin, mon officier d’ordonnance qui était allé à Groningen arrive ; il m’assure que tout ce que j’ai prescrit d’expédier sur Ham­bourg est parti, même les batteries de réserve, et que le premier convoi doit être armé aujourd’hui 17. Le duc de Valmy me mande également que les 200,000 kilogrammes de poudre qui devaient être expédiés de Wesel doivent être arrivés à Hambourg. Ainsi voilà Hambourg, pour l’artillerie, dans h situation la plus respectable. Je suppose que les travaux se continuent pendant tout le mois de juillet avec la plus grande activité, et qu’au 15 août, époque où l’on pourrait recommencer les hostilités, Hambourg sera dans une situation de défense également respectable.

Je désire toujours qu’avec tout le 13e corps, c’est-à-dire la 3e di­vision et la 40e, ayant en réserve tout ce qu’il y aura de disponible de la 50e, toute votre artillerie de campagne, et enfin les Danois, vous puissiez occuper un camp sur la rive droite, en avant de Ham­bourg, de sorte qu’ayant une vingtaine de mille hommes dans la main vous soyez inattaquable par des forces supérieures, et que vous puissiez pourtant les menacer et les contenir jusqu’à ce qu’un corps de 80,000 hommes, que je ferai marcher sur Berlin, ait tourné tout cela et vous ait mis à même de marcher en avant. En même temps, votre présence en avant de Hambourg, ayant ainsi une position of­fensive, aura l’avantage d’obliger l’ennemi à avoir des forces de votre côté, et de l’empêcher de se concentrer contre l’armée que j’enverrai sur Berlin.

 

Dresde, 17 juillet 1813.

Au général comte Sorbier, commandant l’artillerie de la Grande Armée, à Dresde.

Il est probable que la campagne commencera du 15 au 20 août. La première opération sera de bloquer Küstrin et Stettin. Il serait donc nécessaire d’avoir tout prêt à Glogau les boulets, la poudre et les munitions d’artillerie nécessaires pour compléter l’approvisionne­ment de ces deux places; de sorte que si, huit jours après, l’armée se portait dans une autre direction, les places restassent parfaitement ravitaillées sous le point de vue de l’artillerie.

Je désire donc que vous fassiez dresser l’état de l’armement de Küstrin et de Stettin, et que vous me fassiez connaître ce qui manque, d’après les états qu’ont apportés les officiers venus dernièrement de ces placée. Comme ces approvisionnements devront être tirés de Glogau, il est indispensable de réunir dans cette place tout ce qui sera nécessaire, et de s’assurer des bateaux qui en devront faire le transport sur Stettin et Küstrin.

Une autre opération, qui sera également des premières de la cam­pagne, sera le siège de Spandau : c’est en conséquence que je vous ai donné ordre de faire préparer un équipage de siège à Magdeburg, à Torgau et à Wittenberg, afin de le diriger sur Spandau quand il sera temps, et de pouvoir prendre cette place en peu de jours.

 

Dresde, 17 juillet 1813.

Au comte Daru, directeur de l’administration de la Grande Armée, à Dresde.

Monsieur le Comte Daru, une des premières opérations de la cam­pagne, qui probablement commencera du 15 au 20 août, sera le ra­vitaillement des places de Stettin et de Küstrin. Je désire que vous me dressiez l’état de tout ce qui manquera au 1er septembre à ces deux places, pour pouvoir les réapprovisionner, proportionnément à la garnison qu’elles ont, jusqu’au 1er juin prochain.

L’ordonnateur Daure fera ces états en deux parties : 1° ce qu’on embarquera à Glogau, et 2° ce qu’on trouvera dans les environs de ces places. Pour les farines et blés, on embarquera à Glogau au moins la moitié du nécessaire, et on fera en sorte de se procurer le reste aux environs. Pour le riz, il faudra avoir à Glogau toute la quantité nécessaire. Pour les légumes, on pourra les trouver autour des places. Les vins, les eaux-de-vie, les médicaments, il faudrait les avoir à Glogau, pour les embarquer sur l’Oder. Les bois, les four­rages, les avoines, la viande sur pied, on les trouverait à vingt lieues autour des places. Les viandes salées, il faudrait les avoir préparées à Glogau.

Faites-moi donc un travail raisonné là-dessus, et fondé sur les der­niers états de situation que vous avez reçus. Les effets d’habillement nécessaires, chemises, souliers, etc., seront embarqués à Glogau. Dressez-moi un état d’après lequel on puisse voir clairement tout ce qu’il y a à réunir à Glogau et à y tenir prêt à être embarqué pour descendre l’Oder jusqu’à Küstrin et Stettin.

 

Dresde, 17 juillet 1813.

Au comte Daru, directeur de l’administration de la Grande Armée, à Dresde.

Monsieur le Comte Daru, il serait nécessaire d’expédier de Mag­deburg, de Wittenberg et de Dresde un approvisionnement suffisant de vins pour l’hospice de Glogau, qui paraît en manquer.

 

Dresde, 18 juillet 1813.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Monza.

Mon Fils, je reçois votre lettre du 11 juillet. J’envoie dans les provinces illyriennes le duc d’Otrante comme gouverneur, et le gé­néral Fresia pour commander les troupes. J’ai ordonné au ministre de l’administration de la guerre d’accélérer l’envoi des gibernes et des sacs en peau qui vous manquent encore. Je pense que les hostilités ne commenceront que vers le 15 août; vous avez donc encore un mois. Je suppose que le général Grenier est déjà à Udine avec deux ou trois divisions. Hâtez le plus que vous pourrez l’organisation de vos troupes.

J’attends depuis longtemps le régiment de hussards croates; faites-moi connaître quand il a passé à Vérone, et où il est actuellement.

 

Dresde, 18 juillet 1813.

Au général comte Hogendorp, gouverneur de Hambourg.

Monsieur le Général Hogendorp, je reçois votre lettre du 14 juillet. J’y vois que vous venez d’éprouver un nouveau malheur : vous avez perdu votre dernier enfant. Je prends part à vos chagrins, et je désire que l’assurance que je vous en donne puisse vous être de quel­que consolation.

 

Dresde, 19 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, vous écrirez la lettre ci-jointe aux commissaires de Neumarkt. Ils pourront en remettre une copie non certifiée aux com­missaires des alliés, mais en disant que celte lettre n’était pas faite pour leur être communiquée, et qu’ils ne le font que pour mieux leur donner à connaître ma pensée.

Ils feront observer combien cette contradiction entre le général en chef et les agents diplomatiques est nuisible, et combien il est fâ­cheux que pour des vétilles on retarde une négociation qui pourrait amener la paix. Ils diront que le duc de Vicence n’est point parti à cause de cette incertitude, et ne partira point tant que la prolongation de l’armistice ne sera pas signée à Neumarkt, parce que, dans les affaires militaires, nous ne pouvons nous en rapporter qu’à cette signature garantie par l’honneur militaire, et non aux formes diplo­matiques, trop souvent démenties par les puissances étrangères ; mais que deux heures après la réception de la signature de Neumarkt le duc de Vicence partira pour Prague. Ils ajouteront, dans le discours, qu’on pourrait sur-le-champ dénoncer l’armistice et continuer les négociations pendant qu’on se battrait.

Recommandez aux commissaires de tâcher de savoir où est l’em­pereur Alexandre.

 

Dresde, 19 juillet 1813.

A MM de Moustier et de Flahault, commissaires pour l’armistice, à Neumarkt

Messieurs, je n’ai pu voir qu’avec la plus grande peine la lettre de M. le général en chef Barclay de Tolly à MM. les plénipotentiaires russe et prussien.

L’armée française n’a jamais eu besoin de l’armistice, et si Sa Majesté avait pu penser que le 20 juillet arriverait sans qu’on ait pu commencer aucune négociation, elle n’aurait jamais adhéré à la sus­pension des hostilités. En effet, la proposition de l’armistice n’a eu lieu que peu de jours après une bataille gagnée ; les armées alliées auraient été obligées de repasser la Vistule. Le corps du général Woronzoff, qui s’était engagé sur Leipzig, avait une armée française de 15,000 hommes à deux journées de Dessau, qui manœuvrait sur son pont ; enfin les corps du prince d’Eckmühl et du général Vandamme et le corps auxiliaire danois, qui débouchaient par Ham­bourg, allaient se réunir sur Berlin avec le corps du duc de Bellune et le corps du duc de Reggio.

Mais, désirant la paix, Sa Majesté a sacrifié toute espèce d’avan­tages à l’espérance devoir une négociation entamée pour la paix.

Cependant la négociation qui aurait dû être ouverte le 10 juin, ce qui, jusqu’au 20 juillet, aurait donné les quarante jours qui parais­saient nécessaires, n’avait pu être commencée, par le refus des puissances alliées d’envoyer leurs plénipotentiaires dans un Um intermédiaire. Ce n’est qu’à la fin de juin que M. le comte Metternich a eu une conférence avec les alliés, et le 30 juin il est venu à Dresde. Sa Majesté ne fit pas à ce ministre la proposition de prolonger l’ar­mistice; car elle considérait, cette prolongation, comme contraire à ses intérêts. Seulement on proposa que, dans la convention où il s’agissait d’accepter la médiation de l’Autriche, il fut dit que les négociations continueraient, quand même l’une ou l’autre armée dénoncerait l’armistice au 20 juillet. Ce n’eut pas été le premier exemple qu’une négociation eût marché pendant qu’on se battait.

Sa Majesté, toutefois, constante dans son désir de ne pas répandre un sang inutile, ne se refuse pas à une prolongation d’armistice calculée de manière à acquérir les quarante jours qui étaient néces­saires pour la négociation.

On croyait que les plénipotentiaires se réuniraient le 5 juillet à Prague, ce qui, au 15 août, aurait fait les quarante jours, Sa Ma­jesté s’engagea donc à ne pas dénoncer l’armistice jusqu’au 10 août et l’Autriche se chargea d’y faire adhérer les alliés.

Effectivement, des notes signées par le chancelier Hardenberg et par le comte de Nesselrode, datées du 11 juillet, et que les Autri­chiens nous ont transmises, ont fait connaître que les alliés n’ont écrit que le 11 et que la communication de leur lettre n’a pu arriver à Dresde que le 16. Le congrès n’a donc pu s’ouvrir le 5 juillet. À moment même, je recevais de vous, Messieurs, la nouvelle que les plé­nipotentiaires des alliés avaient reçu du général en chef Barclay de Tolly l’ordre de conclure une prolongation de l’armistice. Sa Ma­jesté a donc nommé pour ses plénipotentiaires le duc de Vicence et le comte de Narbonne. On n’attendait plus pour faire partir leurs pouvoirs que la signature de la prolongation de l’armistice, et l’on avait l’espoir que la négociation pourrait s’ouvrir le 18.

Votre lettre, Messieurs, éloigne encore cet espoir. M. le général en chef Barclay de Tolly propose que l’armistice n’ait lieu que jusqu’au 4 août. Sa Majesté voit avec peine que pour des vétilles on retarde ainsi l’ouverture d’une négociation importante.

Sa Majesté ne verrait aucun inconvénient à y consentir, s’il était possible que, obligée de son côté à ne pas dénoncer l’armistice d’ici au 10 août, elle admit cependant que les alliés pussent dénoncer l’armistice au 4. D’ailleurs, la déclaration des deux cours en date du 11 juillet est positive. Vous ferez donc remarquer, Messieurs, que le congrès se trouve encore retardé; qu’il est impossible d’adhérer à la proposition de M. le général en chef Barclay de Tolly, puisque les cours alliées, par le canal de leurs agents diplomatiques, ont adhéré à la convention proposée par l’Autriche; qu’il faudrait alors rapporter cette convention de médiation, et qu’en vérité il y aurait du ridicule à opérer tant de retardement pour six jours.

Il faut que les alliés se forment de la position de l’armée française une idée aussi étrange que celle qu’ils s’en étaient formée avant la bataille de Lützen, pour supposer que les hostilités puissent offrir des probabilités en leur faveur. Ils seront repoussés au-delà de la Vistule plus promptement qu’ils ne l’ont été encore au-delà de l’Elbe; ils trouveront une armée qui, en infanterie, cavalerie et artillerie, les surprendra davantage encore que ne les ont surpris les armées françaises à Lützen, etc. Je me permets, Messieurs, cette digression, parce qu’en vérité il y a de la désobligeance et même de l’insulte à en agir ainsi avec une armée qu’on devrait traiter au moins sur le pied de l’égalité, lorsque elle-même consent à mettre de côté tout sentiment de supériorité. Je ne doute pas que M. le général en chef Barclay de Tolly n’ait consulté Sa Majesté l’empereur de Russie; mais Sa Majesté parait être éloignée de son quartier général. Il en résultera encore des retards, et cela éloignera donc l’ouverture du congrès.

Cependant il serait impossible de négocier, si ce n’est dans une position égale de part et d’autre. Il est donc probable qu’avant plu­sieurs jours le congrès ne peut pas avoir lieu. Nous aurons alors atteint la fin de l’armistice sans avoir les quarante jours nécessaires pour négocier et arriver à la conclusion de la paix.

Mais Sa Majesté ne voit pas de difficulté à ce que, le terme de l’armistice expirant au 10 août sans que les négociations soient ter­minées , si une des deux parties belligérantes veut dénoncer l’armis­tice, les hostilités commencent le 16, tandis que les négociations continueraient néanmoins pendant l’espace de quarante jours à dater de la réunion des plénipotentiaires, quoique Sa Majesté, constante dans -son principe, soit toujours prête, tant qu’il y aura un espoir fondé de faire la paix, à sacrifier l’inconvénient pour elle de laisser faire à l’ennemi des fortifications sur la gauche de l’Oder et de perdre la bonne saison pour arriver avant l’hiver sur la Vistule. Au reste, les plénipotentiaires, une fois réunis à Prague, statueront sur toutes les questions et sur la conduite à tenir ultérieurement, après le 16 août.

Vous ne manquerez pas, Messieurs, de faire observer, d’ailleurs, que l’époque de la moisson du seigle serait une époque tout à fait favorable à l’Empereur, puisque alors tous les habitants de la cam­pagne sont dans les champs, et que la Prusse, sur le territoire de laquelle se ferait la guerre, éprouverait d’autant plus de mal que ses moissons seraient troublées et ne pourraient se faire.

Quant à la seconde question, elle est conforme à l’usage de la guerre. Nous ne pouvons point nous en dispenser; d’autant plus que des lettres que nous recevons de Danzig, du 6 juillet, nous apprennent que le prince de Wurtemberg persiste à ne fournir des vivres que dans une quantité bien insuffisante; il ne veut en fournir que le quart de ce qui est nécessaire. Je fais trop de cas de l’honneur de M. le général en chef, et M. le baron Barclay de Tolly nous a donné trop de preuves de la loyauté de son caractère, pour ne pas penser qu’il donne les ordres convenables pour assurer l’exécution de ce qui est convenu. Toutefois les règles de la prudence et mon devoir me prescrivent de me mettre à même de rendre compte à l’Empereur de l’exécution des conditions.

  1. S. On peut envoyer à Danzig le parlementaire par la route qu’on voudra; on peut le faire passer de nuit par les endroits qu’on ne voudrait pas qu’il vît; on peut même lui bander les yeux : tout cela est conforme aux usages militaires.

Faites bien comprendre à ces Messieurs que nous ne voulons dans aucune circonstance rien dicter; mais que nous ne voulons pas qu’on nous dicte rien, et que toutes les fois que nous nous bornons à demander l’égalité la plus parfaite, on ne peut rien nous refuser. Or nous sommes engagés jusqu’au 10 août, il faut donc que les alliés s’engagent jusqu’au 10 août.

Dresde, 19 juillet 1813.

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg

Mon Cousin, je viens de conclure un traité offensif et défensif avec le Danemark. Je vais vous en faire connaître les principales disposi­tions pour votre gouverne; mais vous devez les tenir secrètes jusqu’à nouvel ordre. Le Danemark s’engage à déclarer la guerre à la Russie, à la Prusse et à la Suède, au moment de la reprise des hos­tilités , tout comme la France s’engage à la même époque à déclarer la guerre à la Suède. Le Danemark doit mettre à vos ordres une division de 10,000 hommes d’infanterie, 2,500 chevaux, quarante pièces de canon, ce qui fera au total plus de 12,000 hommes. Ces troupes, aussitôt qu’elles auront le pied sur mon territoire, doivent, quant à la solde, être payées par moi, comme les troupes françaises. Le Danemark aura vingt canonnières pour la défense de l’Elbe, les­
quelles seront réunies à vingt canonnières françaises. Le Danemark doit me fournir 10,000 chevaux, moyennant le payement que j’en ferai argent comptant. Le contingent danois pourra être employé jusqu’à la Vistule. Le Danemark doit approvisionner et armer Glück­stadt, de manière que cette place puisse soutenir six mois de blocus et un siège proportionné à sa force.

De mon côté, je dois joindre aux troupes danoises un corps d’ar­mée de 20,000 hommes. Si les circonstances appelaient mes troupes dans le Holstein, elles seraient nourries par le pays, mais je payerais leur solde. Je fournirai vingt chaloupes ou canonnières pour la défense de l’Elbe ; je ferai armer et approvisionner Hambourg, de manière que cette place puisse soutenir six mois de blocus et un siège proportionné à sa force. Je dois payer les 10,000 chevaux en argent comptant.

Les ratifications s’échangeront demain, à Dresde. A cette occasion, il sera signé une petite convention relativement à la fourniture des chevaux, pour en régler l’âge, la taille et le prix. J’ai fait demander que 5,000 me fussent livrés avant le 15 août, et 5,000 avant le 1er septembre. Il sera important d’avoir le pins tôt possible ces che­vaux. Il ne faut pas pour cela rapporter la réquisition, ni aucun marché, vu que j’ai dans mes dépôts de cavalerie encore 10 à 12,000 hommes à monter. Demain partiront probablement les rati­fications. Vous en serez instruit et verrez alors le général danois. Il sera même bon que vous passiez la revue du corps d’armée; et dès ce moment vous le ferez payer, en payant les présents sous les armes sur le pied français.

Votre corps d’armée se composera donc : 1° de la 3e division, qui, avant le 10 août, sera composée de quatorze bataillons ; 2e de la 40e division, quatorze bataillons; total, vingt-huit bataillons actifs; 3° de la 50e division, qui pourra toujours vous offrir douze batail­lons en réserve; total, quarante bataillons.

Je suppose qu’avant cette époque vous pourrez toujours avoir 3,000 hommes de cavalerie, ce qui vous fera un corps de 25,000 Français et de 12,000 Danois, ou de 35 à 40,000 hommes. Toutes ces troupes, prenant une bonne position en avant de Hambourg, im­poseront au prince royal et pourront prendre l’offensive, comme je vous l’ai mandé, aussitôt que ma gade sera entrée à Berlin.

Votre artillerie sera composée de deux batteries à cheval, douze pièces; cinq batteries à pied, quarante; deux batteries de réserve, seize; total, soixante-huit pièces.

Les Danois ont quarante pièces : sur ces quarante pièces, il y en a vingt de 6, dont seize pièces et quatre obusiers, et vingt pièces de 3. Lorsque vous en serez là, vous leur proposerez de garder leurs pièces de 3, et d’employer les attelages, charretiers et canonniers, à atteler et servir huit pièces de 6 et quatre obusiers, savoir douze pièces. Ces douze pièces ont besoin chacune de deux caissons, ce qui fera, avec les rechanges et forges, 40 voitures. Les vingt pièces de 3 exigeraient 40 voitures. Le nombre sera donc égal. Seule­ment il faudrait quelques chevaux de plus, dans le cas où l’usage des Danois serait d’atteler les pièces de 3 avec deux chevaux. Ce sera donc huit pièces de 6 et quatre obusiers que vous aurez à fournir aux Danois. Quant aux caissons, on les convertira en caissons de 6. Les Danois se trouveront avoir trente-deux bouches à feu, qu’on or­ganisera comme les nôtres. Ces trente-deux pièces jointes aux soixante-huit de votre corps feront un parc de cent pièces de canon.

Du 10 au 15 août, tout ce qui est nécessaire pour compléter le 28e de chasseurs sera arrivé; cela vous fera 1,000 chevaux; vous pouvez compléter les Lithuaniens à 5 ou 600 chevaux; ce qui, joint aux 2,400 chevaux de la brigade de cuirassiers de Hambourg, mettra sous vos ordres plus de 4,000 chevaux, qui feront avec les 2,000 chevaux danois 6,000 chevaux. Vous avez déjà trois généraux de brigade : restera un général de division de cavalerie à vous en­voyer pour commander toute cette cavalerie.

Je suppose que tout ce qui est nécessaire pour compléter l’appro­visionnement de Hambourg sera arrivé et que Hambourg, Harburg et les îles seront bien armés dans les premiers jours d’août. S’il en est besoin, il faudra tout négliger pour concentrer toutes vos forces sur la rive droite, en vous appuyant sur Hambourg. Quand même l’ennemi passerait l’Elbe entre Hambourg et Magdeburg, cela ne devrait avoir aucune influence sur vous, dont l’armée aurait toujours derrière elle Hambourg et le Holstein, et, par cette position sur la rive droite, conserverait l’offensive, quand même l’ennemi aurait passé sur la rive gauche.

Si, au moment de la reprise des hostilités, vous pouvez même réunir une plus grande partie de cavalerie, on vous la laissera; elle marcherait avec vous pour rejoindre l’armée par Berlin. Vous pour­riez emmener avec vous les 1,200 chevaux que vous a envoyés le général Bourcier. Je ne puis que vous répéter que ceci ne doit en rien déranger les mesures que vous avez prises. Il faut seulement que vous demandiez des selles au général Bourcier. Je pense que ce général peut avoir à sa disposition 3,000 selles, et que vous pouvez en faire faire à Hambourg.

Je n’instruis pas le général Bourcier du traité dont je viens de vous parler; demain on lui en donnera communication. Ce général compte avoir des dispositions faites pour 12,000 chevaux; si on y ajoute les 10,000 chevaux des Danois, cela fera 22,000 chevaux. Je crois que le général Bourcier a 11,000 hommes à pied à monter : ce serait donc 5 à 6,000 hommes à pied à faire venir de France. Les 5,000 autres seraient pris dans les dépôts de cavalerie, au fur et à mesure que la cavalerie active aurait des hommes démontés. Considérez cette remonte des Danois comme augmentant nos moyens, sans contremander aucune des mesures que vous avez prises.

 

Dresde, 19 juillet 1813.

À Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Monza.

Mon Fils, je reçois votre lettre du 14 juillet. J’ai envoyé le duc d’Otrante comme gouverneur des provinces illyriennes. Il passera par Graz; il ira vous voir. Interrogez-le longuement sur tout ce qu’il aura vu à Graz, et envoyez-m’en un rapport.

Écrivez au ministre pour qu’il vous envoie des généraux de bri­gade. Redoublez de précaution partout pour vous garantir de la peste. Vous ne devez pas souffrir que des généraux de brigade soient chefs d’état-major; il ne doit y avoir dans ces places que des adju­dants commandants. Faites en conséquence entrer le général Dupeyroux dans une division.

 

Dresde, 19 juillet 1813.

Au général Haxo, commandant le génie de la garde impériale, à Dresde

Partez avant minuit pour vous rendre à Luckau. Je partirai moi-même à deux heures du matin pour m’y rendre. Je prendrai la route de Grossenhayn ; prenez la route de Hoyerswerda. Vous verrez Luc­kau et Lübben, et vous serez à même de recevoir mes ordres, mon intention étant d’établir dans ces deux endroits, et par le secours des eaux et des palissades, une place où trois bataillons avec vingt pièces de canon puissent mettre à l’abri une boulangerie, un hôpital et quelques munitions de réserve. Le colonel Blin s’est déjà occupé de ce travail. Il faut que ces places soient en état de me servir au 15 août. Je vous envoie les plans et rapports qui m’ont été remis sur ce3 deux localités.

 

Luckau, 20 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Luckau.

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Raguse de faire mettre la place de Bunzlau à l’abri d’un coup de main et en état de résister plusieurs jours à une avant-garde d’infanterie et de cavalerie. Don­nez le même ordre au général Reynier pour la place de Gœrlitz, et au prince de la Moskova pour la place de Liegnitz. Il faut que dans chacune de ces places deux bataillons d’infanterie, avec deux ou trois pièces de canon, puissent bien se défendre. Il faut principale­ment employer, comme moyens de défense, les eaux et les bois. Enfin je désire que dans quinze jours les hôpitaux, magasins, dé­pôts de convalescents, etc., soient à l’abri de toutes les attaques de l’infanterie légère et de la cavalerie ennemie.

 

Luckau, 20 juillet 1813.

Au comte Daru, directeur de l’administration de la Grande Armée, à Dresde.

Monsieur le Comte Daru, l’employé des transports qui a amené le convoi de 4,000 quintaux de farine en a laissé plus du quart en route; on est même porté à penser qu’il en a vendu une partie. Faites faire à ce sujet une enquête sévère, mon intention étant, s’il est reconnu coupable, d’en faire faire une justice exemplaire.

 

Dresde, 22 juillet 1813.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde

Monsieur le Duc de Bassano, je vous envoie un rapport du mi­nistre de la guerre. Envoyez-en copie à mon ministre à Cassel. Aus­sitôt que la convention sera signée1, ces 1,200 hommes seront à la disposition du Roi. Si la convention n’est pas signée, alors on pren­dra mes ordres pour les diriger sur le dépôt de Magdeburg.

 

 

Dresde, 22 juillet 1813.

Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 17 juillet. Je suis revenu ce matin d’une course d’une cinquantaine de lieues que j’ai faite en basse Lusace.

Je suppose que l’Impératrice est partie et qu’elle couchera ce soir à Chalons. Je ne pense pas qu’elle soit avant le 25 à Mayence ; je compte y être rendu pour ce jour-là.

 

Dresde, 22 juillet 1813.

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je reçois votre lettre du 16 juillet. Il faut que vous preniez pour la marine le tiers des Hollandais; je reprendrai plus tard un millier d’anciens Français. Mais les Hollandais ne valent rien pour le service de terre; ils n’ont que de l’eau dans les jambes.

 

Dresde, 23 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, écrivez aux maréchaux qui commandent les différents corps d’armée que je désire qu’ils passent revue de leur corps dans les premiers jours d’août, afin de proposer à toutes les places vacantes et de renvoyer tous les officiers qui, par leur âge ou par toute autre raison, seraient incapables de faire campagne.

Donnez ordre également que l’on tire à la cible, et que chaque maréchal établisse un prix par compagnie, ou par bataillon, pour celui qui tirera le mieux. Le but est non-seulement d’exercer la troupe, mais aussi de mettre un peu de gaieté et d’intérêt dans les camps. Enfin il est convenable qu’on y établisse toute espèce de jeux et tout ce qui peut donner de l’émulation. Comme ma fête tombe à peu près vers l’époque de la rupture de l’armistice, proposez-moi une mesure pour que l’armée la célèbre le dimanche précédent, qui est le 8 août. Les préparatifs qu’on fera dans tous les camps aratiseront d’autant le soldat. Faites-moi connaître ce qui a été fait à Vienne à une époque semblable.

 

Dresde, 23 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Donnez ordre que toute l’armée tire à la cible de la manière suivante.

Chaque compagnie tirera un coup à la cible, et les neuf meilleurs tireurs auront une gratification de 3 francs.

Les neuf meilleurs tireurs de chaque compagnie se réuniront pour tirer à la cible par bataillon, ce qui fera cinquante-quatre par batail­lon; les neuf meilleurs tireurs auront chacun un prix de 6 francs.

Les neuf meilleurs tireurs de chaque bataillon se réuniront pour tirer à la cible par division, ce qui, en supposant les divisions l’une portant l’autre de douze bataillons, fera cent huit tireurs par divi­sion; les neuf meilleurs auront chacun un prix de 12 francs.

Les neuf meilleurs tireurs qui auront eu le prix de chaque divi­sion seront réunis pour tirer à la cible, ce qui, à raison de trois divisions par corps d’armée, fera vingt-sept tireurs; et les neuf meilleurs tireurs du corps d’armée auront chacun un prix de 20 francs.

Le 27 juillet, chaque compagnie tirera à la cible.

Le 28, les neuf meilleurs tireurs de chaque compagnie tireront à la cible du bataillon.

Le 29, les neuf meilleurs tireurs de chaque bataillon tireront à la cible de la division.

Le 1er août, les neuf meilleurs tireurs de chaque division tireront à la cible du corps d’armée.

La dépense de cet exercice, qui aura lieu dans tous les corps d’armée, ne sera que d’une cartouche par homme, et, quant aux prix, la dépense peut être évaluée de la manière suivante :

1e Prix de 3 francs, cible des compagnies. — Neuf prix de 3 francs coûteront 27 francs par compagnie; ce qui fera pour un bataillon, à raison de six compagnies, 162 francs; pour une division, à raison de douze bataillons, 1,944 francs; et pour un corps d’armée, à raison de trois divisions par corps d’armée, 5,832 francs.

2° Prix de 6 francs, cible des bataillons. — Neuf prix de 6 francs coûteront 54 francs par bataillon : ce qui fera pour une division, à raison de douze bataillons, 648 francs ; et pour un corps d’armée, à raison de trois divisions, 1,944 francs.

3° Prix de 12 francs, cible des divisions. —Neuf prix de 12 francs coûteront par division 108 francs; ce qui fera par corps d’armée, à raison de trois divisions, 324 francs.

4° Prix de 20 francs, cible par corps d’armée. — Neuf prix de 20 francs coûteront par corps d’armée 180 francs.

Ainsi la dépense des prix sera par corps d’armée : pour la cible des compagnies, 5,832 francs; pour la cible des bataillons, 1,944 francs; pour la cible des divisions, 324 francs; pour la cible des corps d’armée, 180 francs; total, 8,280 francs. Ainsi, pour dix corps d’armée, ce serait une dépense qui n’excéderait que peu 80,000 francs. Ceux qui obtiendront le prix du corps d’armée, 20 francs, auront obtenu celui de la division, 12 francs, celui du bataillon, 6 francs, et celui de la compagnie, 3 francs ; ce qui leur fera un prix total de 41 francs.

Les maréchaux prescriront tout ce qui sera nécessaire pour faire de ces exercices autant de petites fêtes. La musique accompagnera ceux qui auront remporté les prix. Mon but étant 1° d’apprendre aux troupes à tirer, 2° d’égayer le camp, vous recommanderez qu’on fasse tout ce qu’on pourra pour obtenir ces deux résultats.

 

Dresde, 23 juillet 1813.

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Il y a bien longtemps que vous ne m’avez envoyé un livret de situation des équipages militaires, de sorte que, à l’exception des bataillons qui sont à la Grande Armée, savoir les 2e, 6e, 7e, 9e, 10e, 12e, 14e,.15e, 17e, ce qui fait neuf, j’ignore où se trouvent les autres. Ils sont probablement en Espagne. Les hommes doivent avoir ramené leurs chevaux; il n’y aurait donc que des voitures à leur donner.

 

Dresde, 24 juillet 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, mandez au général Vandamme qu’il est probable que son corps opérera par Wittenberg; que je désire qu’il prenne ses mesures de manière qu’au 10 août il ait pour vingt jours de vivres ; savoir : quatre jours de pain, six jours de biscuit et dix jours de farine. Il se procurera cela chez les princes de Dessau. Il faudra qu’il ait aussi un approvisionnement assuré en viande et en eau-de-vie pour vingt jours. Vous lui ferez connaître que les 1er, 2e et 3e compagnies du 10e bataillon des équipages militaires sont desti­nées à son corps d’armée. Il doit déjà avoir une partie de la 1e com­pagnie, et il recevra bientôt le reste de celle-là et la 2e compagnie, qui s’organisent à Cassel. La 3e compagnie s’organise à Wesel, d’où elle le rejoindra. Aussitôt que le général Vandamme aura deux de ces compagnies, il enverra la compagnie du 14e bataillon au duc de Bellune.

Demain 25 juillet, quatre bataillons de la 6e division bis doivent arriver à Magdeburg; il y aura donc à Magdeburg deux bataillons westphaliens, deux bataillons du 134e deux bataillons du 4e régi­ment polonais et quatre bataillons de la 6e division bis; total, dix bataillons. Aussitôt que ces dix bataillons seront réunis à Magdeburg, ce que je suppose être le 25 ou le 26, le général Vandamme fera partir la division Teste, pour se rapprocher d’une marche de Tessau, en portant son quartier général à Kœthen ou à Bernburg, de sorte que la division Philippon puisse, en une marche, passer le pont de Wittenberg ; que la 2e division puisse le passer en deux marches, et que la 23e division puisse le passer en trois marches.

Recommandez au général Vandamme de s’occuper de la formation du 9e de lanciers et du régiment de Dessau. Il doit avoir actuellement tous ses bataillons ; faites-lui connaître que j’espère qu’après la revue, qu’il doit passer le 5 août, il rendra compte qu’il a toute son infan­terie, toute son artillerie, ses ambulances, ses administrations, etc.