Correspondance de Napoléon – Juillet 1813
Juillet 1813
Dresde, 1er juillet 1813.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg
Mon Cousin, le major général vous fera connaître la nouvelle formation que j’ai donnée à l’armée. J’ai créé un 13e corps, dont je vous ai donné le commandement. Je destine ce corps à la défense de la 32e division. Vous aurez sous vos ordres les deux divisions françaises du 13e corps, la division danoise et la 50e division; ce qui vous fera la valeur d’une soixantaine de bataillons. La confiance que j’ai en vous, et qui me porte à vous laisser à la tête d’une position aussi importante, m’a mis dans le cas de faire ces changements. Toutes les divisions, étant chacune de quatorze bataillons, sont plus maniables. La 3e division bis étant dissoute, chaque bataillon qui la compose rejoindra son régiment.
Je donne ordre qu’on vous envoie le matériel qui vous est nécessaire pour organiser l’artillerie. Vous devez avoir quatre batteries à pied pour les 3e et 4e divisions, trente-deux pièces ; deux batteries de réserve pour le 13e corps, seize pièces; une batterie à cheval pour le 13e corps, six pièces; total, sept batteries pour le 13e corps ou cinquante-quatre pièces; plus une batterie d’artillerie à cheval, six pièces, et une batterie à pied pour la 50e division, huit pièces ; ce qui vous fera soixante-huit pièces d’artillerie.
Vous aurez quatre compagnies d’équipages militaires, les 3e, 4e, 5e et 6e du 12e bataillon.
Le général Bourcier a dû vous envoyer un régiment de marche de cavalerie de 1,250 hommes à pied, qui se compose de deux escadrons de cavalerie légère, 500 hommes, un escadron de dragons, 250 hommes, et deux escadrons de cuirassiers, 500 hommes; total, 1,250 hommes. Je donne ordre qu’on vous envoie des dépôts de France de quoi compléter le 28e de chasseurs à 1,250 hommes. Vous monterez tous ces hommes ; ce qui, avec le régiment lithuanien, vous fera près de 3,000 chevaux. Veillez à ce qu’on ne mette dans le 28e de chasseurs, qui doit rester à Hambourg, aucun homme de la 32e division ni des départements de la Lippe et de la Hollande.
Dresde, 1er juillet 1813.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg
Mon Cousin, il serait possible que l’armistice fût prolongé jusqu’au 15 août. Si je me décide à cette mesure, ce sera spécialement pour Hambourg, puisque cela vous ferait près d’un mois de gain, ce qui vous donnerait moyen d’achever l’armement et les ouvrages de Hambourg et de mettre cette place et Harburg en meilleur état. Les bataillons de la 3e division bis auraient aussi le temps d’arriver et la 50e division se compléterait à 10,000 hommes. Tenez cette nouvelle secrète, mais agissez toujours comme si les hostilités devaient recommencer au 20 juillet.
Dresde, 1er juillet 1813.
Au maréchal Soult, duc de Dalmatie, lieutenant de l’Empereur, commandant en chef des armées en Espagne, à Dresde
Mon Cousin, vous partirez aujourd’hui avant dix heures du soir. Vous voyagerez incognito, en prenant le nom d’un de vos aides de camp. Vous arriverez le 4 à Paris, où vous descendrez chez le ministre de la guerre; vous irez avec lui chez l’archichancelier. Il vous mettra au fait de la dernière situation des choses. Vous ne resterez pas plus de douze heures à Paris ; de là vous continuerez votre route pour aller prendre le commandement de mes armées en Espagne. Vous réécrirez de Paris.
Pour éviter toutes les difficultés, je vous ai nommé mon lieutenant général, commandant mes armées en Espagne et sur les Pyrénées. Mon intention n’en est pas moins que vous receviez les ordres de la Régence, et que vous écriviez et rendiez compte au ministre de la guerre de tout ce qui concerne votre commandement. Vos rapports me parviendront par ce ministre. Les gardes et toutes les troupes espagnoles seront sous vos ordres.
Vous prendrez toutes les mesures pour rétablir mes affaires en Espagne, pour conserver Pampelune, Saint-Sébastien et Pancorvo, enfin toutes mesures que les circonstances demanderont.
Mon intention est que tous les généraux ou officiers que vous jugeriez convenable de renvoyer en France restent à Bayonne, et qu’aucun d’eux ne puisse aller à Paris sans un ordre du ministre de la guerre.
Dresde, 1er juillet 1813.
Au général Mouton, comte de Lobau, commandant la Vieille Garde, à Dresde
Ayant donné au duc de Dalmatie une mission qui le tiendra pendant plusieurs mois éloigné de l’armée, mon intention est que vous soyez chargé des fonctions qu’il remplissait pour le commandement de ma Garde, infanterie, cavalerie et artillerie. Tous les rapports vous seront adressés, et vous ferez avec moi tout le travail pour l’organisation et les mouvements.
Dresde, 1er juillet 1813.
Au général comte Lemarois, gouverneur de Magdebourg
Monsieur le Comte Lemarois, il serait possible que l’armistice fût prolongé jusqu’au 15 août. C’est une raison de travailler avec plus d’activité aux ouvrages de Werben. Je ne puis que vous répéter ce que je vous ai écrit là-dessus. Tenez secret ce qui est relatif à la prolongation de l’armistice.
Je suppose que vous avez pris des dispositions pour construire des écuries, et que vous avez pris des planches partout où vous en aurez trouvé ; enfin que le général Bourcier est déjà en marche pour se rendre avec sa cavalerie sur Magdeburg.
Dresde, 1er juillet 1813.
Au comte Daru, directeur de l’administration de la guerre, à Dresde.
Monsieur le Comte Daru, nommez une commission pour faire l’épreuve des moulins portatifs. On en placera cinq dans un atelier où l’on fera moudre à chacun cinq quintaux par jour, et pendant plusieurs jours de suite. On tiendra procès-verbal de cette épreuve. Je désire avoir ce procès-verbal, afin d’arrêter mes idées sur ces moulins, dont il parait que le succès est encore contesté. Faites commencer l’épreuve demain.
Quant à la répartition de ces moulins, il me semble qu’il suffît d’envoyer le modèle à Hambourg, où le prince d’Eckmühl en fera construire, ce qui en fera cent d’économisés. Il en restera donc six cents ; il faut les distribuer, non par corps d’armée, mais par régiment.
Ce qui m’importe surtout, c’est d’avoir le procès-verbal de ces moulins, car il serait inutile de faire une dépense dont le succès ne serait pas sûr.
Dresde, 1er juillet 1813.
Au baron de La Bouillerie, trésorier général de la couronne et du domaine extraordinaire, à Paris
Je ne comprends rien à votre lettre du 26. Je ne vous ai pas autorisé à avancer 3 millions à la Garde, mais seulement 1 million. Je ne sais pas quel autre que moi a le droit de vous donner des ordres; je ne comprends donc rien à votre lettre. Il ne faut pas tomber une autre fois dans une pareille légèreté. En place de ce million que vous avancerez successivement à la Garde, vous aurez soin de prendre des ordonnances qui seront payées au trésor quinze jours plus tôt ou quinze jours plus tard.
Dresde, 1er juillet 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
On m’assure que le sieur , colonel du 4e régiment étranger, n’a jamais fait la guerre ; qu’il n’a point la tenue d’un officier supérieur; que sa femme, qui a une conduite équivoque, se mêle des affaires du régiment. Mon intention est que vous me fassiez sur-le-champ un rapport sur cet officier, et que vous n’attendiez pas ma réponse pour l’appeler à d’autres fonctions. Choisissez, pour le remplacer, un de nos bons colonels, Français de naissance. Ce corps est beau, il lui faut un bon commandant. Faites aussi une enquête sur les chefs de bataillon : il n’y a pas d’inconvénient à y mettre de
bons chefs de bataillon français.
Dresde, 1er juillet 1813.
A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan.
Mon Fils, l’Autriche continue à se comporter mal. Des régiments doivent avoir été mobilisés du côté de Vienne pour se porter en Styrie. Il est de fait cependant qu’avec tous les efforts imaginables l’Autriche ne peut pas avoir sur pied plus de 100,000 hommes, qu’elle est obligée de partager entre vous, la Bavière et le corps d’armée qui est ici. Envoyez des espions pour être bien au fait de tous les régiments qui arrivent, et connaître leurs divisions à mesure qu’elles se forment. Faites bien reconnaître par les ingénieurs le terrain entre la Piave et Graz.
J’ai cependant accepté la médiation de l’Autriche. Des négociations vont s’ouvrir à Prague le 5 juillet. Il paraît qu’on a des projets de prolonger l’armistice jusqu’au 16 août. Il est cependant toujours nécessaire que vous soyez à la lin de juillet en colonnes, depuis la Piave jusqu’à l’Adige. Padoue n’est pas un pays sain; il n’y faut pas laisser de troupes pendant les chaleurs. Je suppose que vous n’en avez pas laissé à Mantoue. Les meilleurs cantonnements, dans cette saison, sont Vérone, Brescia et Bassano. Ne me mettez personne à Trévise; Trévise n’est pas assez sain. Feltre et Conegliano sont plus sains.
Je vois avec plaisir que nous correspondons par l’estafette en quatre-vingt-seize heures. Tenez-moi donc bien au fait de tout ce qui se passe, et envoyez-moi tous les cinq jours l’état de situation de votre corps, de votre artillerie, de votre génie, et que je voie bien les généraux qui vous arrivent.
Dresde, 2 juillet 1813.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde.
Monsieur le Duc de Bassano, le roi de Westphalie désire avoir des troupes françaises à son service : cette mesure me paraît indispensable. Je désire, en conséquence, que le baron Reinhard se rende près du Roi et rédige une convention à cet égard.
1° La France fournira au Roi les hommes nécessaires pour former un régiment de quatre escadrons de hussards, chaque escadron de 250 hommes, ce qui ferait un complet de 1,000 hommes à cheval ; tous les officiers et sous-officiers seront Français. Le Roi fera la demande des officiers, avec lesquels il traitera de gré à gré. Ils passeront au service de Westphalie avec un grade supérieur à celui qu’ils ont au service de France. Après avoir été employés deux ans dans ce nouveau grade au service de Westphalie, ils seront susceptibles de le conserver dans l’armée française, s’ils y rentrent du gré du ministère de France et de celui de Westphalie. Les hommes, officiers et soldats, auront le même traitement qu’en France, tant pour la solde que pour les masses. Ils auront droit à des retraites et à des récompenses ; ils ne seront tenus de prêter aucun serment particulier, leur obéissance au Roi étant suffisamment comprise dans leur serment comme Français et dans le serment qu’ils ont prêté à l’Empereur.
2° Il sera fourni de la même manière le cadre d’une compagnie d’artillerie à cheval de 200 hommes. Les soldats du train seront des Westphaliens.
3° Aussitôt qu’il sera possible, on organiserait de la même manière un régiment d’infanterie légère de deux bataillons, chaque bataillon de six compagnies, chaque compagnie de 140 hommes, ayant une compagnie d’artillerie avec deux pièces de canon, et une compagnie de dépôt. Ce régiment serait spécialement chargé de la garde de Cassel.
Dans le même traité, on pourrait aussi dire que le Roi formera un escadron de gardes du corps de 250 Français, pour garder sa personne concurremment avec les gardes du corps westphaliens. Il pourra former ce corps de l’élite des Français qui auront été à son service, et d’hommes tirés, quand ce serait possible, des régiment« de la Garde impériale. Pour les deux régiments d’infanterie légère, le Roi pourrait avoir en France des recruteurs qui enrôleraient des hommes à prix d’argent : bien entendu qu’on ne prendrait pas d’hommes de la conscription. Quant au régiment de hussards ou chevau-légers français, aussitôt que la convention sera signée, je ferai fournir les hommes nécessaires, afin que le Roi puisse les monter promptement et en former autour de sa personne un corps qui ait quelque consistance : ce régiment s’appellerait hussards de la garde..
Dresde, 2 juillet 1813.
Au général Savary, duc de Rovigo, ministre de la police général, à Paris.
Je vous ai déjà mandé qu’il fallait mettre dans le Moniteur tout ce que les journaux anglais publient sur les affaires de Sicile (Moniteur du 8 juillet). Il y a beaucoup d’articles que vous ne mettez pas et sur lesquels il faudrait appuyer, entre autres les violences exercées envers la reine Caroline, qu’on a envoyée à Constantinople, et toutes les scènes qu’on a faites au roi.
Dresde, 2 juillet 1813.
Au général comte Belliard, aide-major général de la Grande Armée, à Dresde.
Présentez-moi un projet d’organisation pour la cavalerie de l’armée. Il faut qu’il y ait un général de division ou de brigade pour commander la cavalerie attachée à chaque corps d’armée, qui sera au moins d’un millier de chevaux.
Le 1er corps, que commande le général Vandamme et qui sera le 8 à Wittenberg, a le 9e régiment de chevau-légers. Donnez des ordres pour que tous les détachements de ce régiment le rejoignent à Wittenberg. Il faudra y joindre un deuxième régiment pour faire un millier de chevaux, et vous me proposerez un général de brigade pour commander la cavalerie de ce corps.
Le 2e corps a aujourd’hui une division de cavalerie. Il faut lui former une brigade composée de deux régiments, faisant 800 à 1,000 chevaux, avec un général de brigade pour la commander.
Le 3e corps a le 10e hussards et un régiment badois, commandés par le général Beurmann, cela fait plus de 1,200 chevaux, ce qui est suffisant.
Le 4e corps a deux brigades wurtembergeoises, qui font 1,500 chevaux, ce qui est suffisant.
Le 5e corps a aujourd’hui une division. Il faudra lui former une brigade composée de deux régiments, faisant de 800 à 1,000 chevaux, avec un général de brigade pour la commander.
Le 6e corps aura également une brigade qu’il faut former de deux régiments, avec un général pour la commander.
Le 7e corps aura une brigade saxonne.
Le 8e corps est le corps polonais.
Le 11e corps aura quatre escadrons napolitains, un escadron de Würzburg et le 44 de chasseurs italiens; ce qui fait plus de 1,000 hommes. 11 faut un général de brigade pour commander cette cavalerie.
Le 12e corps aura la cavalerie westphalienne et la cavalerie hessoise, faisant plus de 1,500 hommes. Il faudra un général de brigade.
Le 13e corps aura le 28e de chasseurs, un régiment de marche qui se rend à pied à Hambourg pour y être monté, et le 17e lithuanien. Il faudra un général de division pour commander cette cavalerie.
Après avoir ainsi pourvu au commandement de la cavalerie attachée aux corps d’armée, vous me proposerez les généraux à placer pour commander les divisions et les brigades des quatre corps de cavalerie.
Il y a plusieurs généraux qu’il conviendrait de remplacer, tels que des généraux de brigade hollandais, qui n’ont jamais fait la guerre, ou de mauvais généraux de cavalerie.
Nous avons de bons généraux de cavalerie; il faut chercher où ils se trouvent.
Mon intention est qu’il soit formé, dans chacun de ces quatre corps, un corps de partisans de 1,500 hommes, commandés par un général de brigade, qui ne recevrait que l’instruction générale de battre le pays pour éclairer la marche de l’armée et aller à la recherche des partisans ennemis. Il faudrait trouver pour ces commandements quatre hommes dans le genre du général Ameil. Ces corps de partisans feraient partie respectivement d’un corps de cavalerie, de manière que, quand leurs hommes seraient fatigués, ils pourraient être relevés par d’autres détachements du même corps.
Dresde, 3 juillet 1813.
Au général comte Lemarois, gouverneur de Magdebourg.
Monsieur le Comte Lemarois, vous avez plein pouvoir à Magdeburg. À la moindre opposition de la part des habitants ou du préfet, vous devez mettre la ville en état de siège et eu prendre la police. Si le bâtiment de la douane peut servir pour hôpital, vous avez bien fait de le prendre, mais vous n’avez pas assez d’hôpitaux. Dans toutes les guerres, et surtout dans celle-ci, où la force de l’ennemi est dans sa cavalerie légère, c’est dans les places fortes qu’il faut placer les hôpitaux. Marchez donc vivement et faites-vous obéir.
Si le fort de Werben ne peut pas être mis en état avant la fin du mois, il ne faudrait y rien faire; cela y attirerait l’ennemi, qui déferait ce que nous aurions fait, ce qui est toujours une insulte.
En prenant la douane, vous ne faites plus d’écuries que pour 1,500 chevaux ; dans une ville comme Magdeburg, il me paraît bien extraordinaire que vous ne trouviez pas des écuries pour 500 chevaux.
Marchez avec activité et convertissez tout Magdeburg en hôpitaux, en écuries, en arsenaux et en logements de troupes.
Dresde, 3 juillet 1813.
Au comte Daru, directeur de l’administration de la guerre, à Dresde.
Monsieur le Comte Daru, faites-moi connaître ce que j’ai ordonné pour les hôpitaux, et présentez-moi un projet d’ordre pour que j’aie les hôpitaux et dépôts de convalescents ci-après :
À Dresde, des hôpitaux pour 8,000 malades, des dépôts pour 2,000 convalescents; à Magdeburg, des hôpitaux pour 4,000 malades, des dépôts pour 2,000 convalescents; à Wittenberg, des hôpitaux pour 1,000 malades, des dépôts pour 1,000 convalescents; à Torgau, des hôpitaux pour 1,000 malades, des dépôts pour 1,000 convalescents; à Erfurt, des hôpitaux pour 4,000 malades, des dépôts pour 2,000 convalescents; à Leipzig, des hôpitaux pour 2,000 malades, des dépôts pour 1,000 convalescents; à Glogau, des hôpitaux pour 4,000 malades, des dépôts pour 2,000 convalescents; total, des locaux pour 24,000 malades, 11,000 convalescents. Mon intention est de me servir des places fortes spécialement pour contenir mes hôpitaux et dépôts de cavalerie. La distribution ci-dessus entre les places placerait environ 35,000 malades et convalescents, c’est-à-dire à peu près tous les malades de l’armée.
Dresde, 3 juillet 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, le roi de Westphalie a besoin d’avoir un régiment de hussards français à son service, car il n’a personne autour de lui, et le pays peut être agité de manière qu’il ne s’y trouve pas en sûreté. Mon intention est de lui fournir 1,200 hommes; faites-moi connaître de quel dépôt on pourra les tirer. On les fera partir en pantalons et en vestes; le Roi les habillera et les montera. Il faut aussi lui donner des officiers; vous prendrez mes ordres sur ceux qu’on pourrait lui accorder.
Dresde, 3 juillet 1813.
À Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Monza.
Mon Fils, j’approuve remplacement que vous donnez au corps d’observation d’Italie; savoir, depuis l’Isonzo jusqu’à l’Adige. D’ailleurs, au fur et à mesure que les événements s’avanceront, je vous préviendrai s’il faut rapprocher de la Piave les divisions qui seraient à Brescia ou à Vérone.
Dresde, 4 juillet 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin; donnez ordre aux marins de la Garde d’armer autant de bateaux qu’ils le pourront. Vous y ferez placer 1,000 malades, du nombre de ceux qui ne peuvent être guéris avant trois mois, et on les conduira à Magdeburg, où ces bateaux seront chargés en retour, de vivres et d’objets d’artillerie que cette place doit fournir.
Dresde est encore encombré d’une trop grande quantité de malades et de blessés ; il est important de la diminuer, puisque, dès que les hostilités auraient recommencé, les blessés arriveraient de tous les points à Dresde. Je crois qu’il y a aujourd’hui à Dresde 9,000 malades ou blessés, sans compter les blessés qui sont campés et qui seront bientôt guéris; sur ces 9,000 malades ou blessés, je suppose qu’un millier sera bientôt guéri, et qu’au moins 2,000 seront évacués soit sur Magdeburg, pour ceux qui peuvent être guéris dans quelques mois, soit sur la France, pour tous ceux qui sont amputés ou hors de service.
Donnez ordre qu’on mette la plus grande activité possible dans toutes ces évacuations.
Dresde, 4 juillet 1813,
Au maréchal Kellermann, duc de Valmy, commandant supérieur des 5e, 25e et 26e divisions militaires, à Mayence.
Mon Cousin, je reçois votre lettre du 2 juillet. Je vois avec plaisir que le corps d’observation de Bavière arrive à 18,000 hommes. J’ai envoyé le général Bonet pour commander la 42e et la 43e division. Je désire que vous pressiez le plus possible la formation de l’artillerie de ce corps.
Dresde, 5 juillet 1813.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Bassano, faites connaître au baron Alquier que j’approuve son projet de faire sur Danzig des expéditions de plusieurs bâtiments de trente tonneaux. Je vois que l’expédition d’un de ces bâtiments ne coûtera que 3 ou 4,000 francs; comme j’ai donné 50,000 francs pour cet objet, il pourra donc en faire partir dix ou douze.
Mon intention est qu’il parte successivement un de ces bâtiments toutes les semaines. Chacun d’eux portera, 1° une lettre en chiffre du baron Alquier au gouverneur, le général Rapp, dans laquelle il lui fera connaître la position des affaires de l’Europe; à cet effet, vous enverrez au baron Alquier le chiffre dont le major général se sert avec le général Rapp ; 2° la suite des Moniteur et des gazettes de Copenhague depuis le 1er mai jusqu’à l’époque du départ du bâtiment; 3° du vin, du rhum, de l’eau-de-vie, des médicaments, du riz, des harengs, enfin tout ce que pourra porter le bâtiment en objets de nature â être utiles à la garnison. Arrivée à Danzig, la cargaison appartiendra au patron, qui la vendra ce qu’il pourra. 11 serait de la plus grande importance de faire arriver à Danzig de la viande salée, du poisson sec et autres choses qui peuvent remplacer la viande, ainsi que du riz.
Quant aux gratifications, le patron recevrait à son arrivée 2,400 francs du général Rapp, ce qui serait porté dans la lettre chiffrée, et 2,400 francs à son retour à Copenhague. Ces 4,800 francs ne feraient point partie des frais de l’expédition, et dès lors ne seraient pas pris sur le fonds de 50,000 francs pour lequel un crédit sera ouvert au baron Alquier. L’expédition de dix bâtiments, à 3,000 francs pour chacun, ne ferait que 30,000 francs; mais il lui est ouvert un crédit de 50,000 francs, afin qu’il puisse faire partir des bâtiments d’un port plus considérable, qui porteraient une plus grande quantité de riz, de poissons secs, de beurre, etc.
Faites connaître au baron Alquier qu’il a carte blanche pour cet objet, et qu’il est inutile qu’il perde un temps précieux à consulter. Le prince de Neuchâtel lui enverra des lettres par le général Rapp ; mais, dans le cas où il n’en aurait point reçu, il n’en fera pas moins partir chaque semaine un bâtiment. C’est une grande consolation pour une garnison que de recevoir des nouvelles par les lettres d’un homme£ accrédité comme ambassadeur.
Vous manderez de plus au baron Alquier que ces expéditions ne peuvent pas être considérées comme un moyen d’approvisionnement pour cette place et sont seulement des moyens de communication ; mais qu’il doit y avoir des moyens de pourvoir à cet approvisionnement, surtout vers l’arrière-saison, quand les glaces obligeront les Anglais à s’éloigner. Les expéditions de ce genre doivent être une affaire d’or pour ceux qui les feront.
Voici les principes sur lesquels elles pourraient être faites : le baron Alquier s’engagera à payer un prix qu’il stipulera pour chaque quintal métrique de blé, de riz, de ‘viande salée, de poissons secs, etc., ou pour chaque barrique d’eau-de-vie, de rhum ou de vin, etc., qui seraient introduits dans Danzig. Des marchandises coloniales pourraient aussi y être introduites; vous lui ferez connaître qu’il peut fixer ces prix au double, et même au quadruple de ce que valent en temps ordinaire les mêmes objets vendus à Danzig; mais que tous les risques de l’expédition doivent être au compte de l’armateur. En prenant des papiers prussiens, ces expéditions n’offriront presque aucun danger pour des marins habiles qui pourront entrer de nuit dans Danzig.
Les bâtiments pourront se charger, à leur retour, de bois et de tout ce que Danzig fournirait. Les objets livrés à Danzig seront payés comptant, à Copenhague,- sur le vu des récépissés du général Rapp. Les fonds pourraient être déposés d’avance chez un banquier danois. Au reste, tous les risques doivent être au compte de l’armateur, sans quoi on ne pourrait réussir. L’opération doit être faite assez en grand pour faire entrer dans Danzig 5 ou 6 millions de rations de vivres, en blé, riz, viande salée, etc. ; à cet effet, il y sera employé 3 ou 4 millions de francs.
Si un armateur voulait lier son opération avec l’introduction des denrées coloniales en France, cela pourrait avoir lieu ; mais tout doit être calculé en argent pour connaître à quoi s’en tenir. Le mieux serait donc de ne traiter que pour de l’argent et à prix fixe. Le baron Alquier doit pouvoir trouver facilement des Danois, et même des Suédois, qui entreprendront cette spéculation.
Quant au fort de Weichselmünde, il n’y a pas de doute qu’il est en notre pouvoir; s’il n’y était pas, il serait aussi impossible d’entrer par mer dans Danzig que dans Magdeburg. On pourrait donc stipuler dans le traité que les pertes occasionnées par suite de la prise de Weichselmünde par l’ennemi ne seraient pas au compte de l’armateur.
Quoique Danzig soit bien approvisionné, cette place est d’une si grande importance, que le baron Alquier doit avoir carte blanche pour cette opération.
Recommandez-lui de traiter cette affaire très-secrètement; il doit employer des agents habiles et ne rien épargner. Chacun des bâtiments expédiés pour cet approvisionnement porterait aussi une lettre chiffrée de lui et des journaux.
Comme j’attache à cette opération la plus haute importance, je désire que vous envoyiez à Copenhague quelqu’un qui soit bien au fait des affaires maritimes, pour être chargé de toute la comptabilité de cette opération sous les ordres du baron Alquier. Je n’aime pas que mes ministres aient des fonds entre leurs mains ; le baron Alquier dirigera toute l’opération ; mais la personne que vous enverrez, et qui doit être d’une probité reconnue, tiendra la caisse; mais ceci ne s’applique qu’à la grande opération de l’approvisionnement. Pour la première opération sur le fonds de 50,000 francs, cela ne vaut pas la peine. Je suis convaincu que d’ici au mois de novembre Danzig peut être approvisionné par le Danemark et la Suède pour six mois.
Suivez cette affaire avec la plus grande activité. Écrivez tous les jours au baron Alquier, et faites-lui connaître que je compte sur 5 à 6 millions de rations de vivres d’ici au 1er décembre.
Dresde, 5 juillet 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Écrivez au général Bertrand, à Leipzig, qu’il faut laisser passer tous les marchands qui se présenteront pour la foire de Naumburg, mais qu’il faut interroger tout ce qui viendra de l’autre côté de l’Elbe sur ce qui se passe à Berlin et sur l’armée prussienne.
Dresde, 5 juillet 1813
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, il faudrait que le général de gendarmerie eût une correspondance avec le commandant de gendarmerie du duc de Reggio, afin d’avoir des rapports de tout ce qui arrive de Berlin et l’interrogatoire qu’il fera subir à cet effet aux voyageurs.
Écrivez au général Lapoype, à Wittenberg, et aux commandants de Torgau et de Dessau, d’interroger tout ce qui passerait l’Elbe, venant du côté de la Prusse, pour avoir des nouvelles de l’ennemi.
Pressez le commandant de Torgau d’accélérer le départ de l’artillerie de Torgau pour Wittenberg, et chargez le général Lapoype de faire mettre sur-le-champ cette artillerie en batterie.
Donnez-moi un état général (en le faisant mettre sur la carte) de toutes les positions qu’ont choisies les commandants, depuis Hambourg jusqu’à la Bohême, pour établir des maisons retranchées. Instruisez le commandant du génie des dix à douze mille outils qui sont arrivés à Torgau, pour qu’il puisse s’en servir pour ses travaux.
Dresde, 5 juillet 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, donnez ordre que tous les ponts que l’ennemi a brulés dans sa retraite, depuis Lützen jusqu’ici et depuis Iéna jusqu’ici, soient incessamment réparés et remis dans l’état où ils étaient. Donnez des ordres aux baillis et envoyez des officiers sur ces deux lignes. Il faut que ces ponts soient rétablis dix jours après la réception de votre ordre. Dans l’état actuel, les débouchés sont difficiles, et ils seraient impraticables l’hiver.
Dresde, 5 juillet l813
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, écrivez au roi de Bavière pour qu’il vous fasse connaître avec quelle partie de ses forces actives le général de Wrede pourrait entrer en Bohême, si, dans te cas où l’Autriche nous déclarait la guerre, le théâtre de la guerre se portait sur Prague, tandis que le vice-roi entrerait en Styrie.
Dresde, 5 juillet 1813.
Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris
J’attends avec impatience des renseignements de l’armée d’Espagne. J’ai donné au duc de Dalmatie toute l’autorité nécessaire pour réorganiser l’armée. J’ai défendu au roi d’Espagne de se mêler de mes affaires. Je suppose que le duc de Dalmatie renverra aussi le maréchal Jourdan. À moins que les pertes ne soient plus considérables que je ne le sais en ce moment, j’espère que 100,000 hommes vont se trouver réunis sur la Bidassoa et aux débouchés de Jaca, et que, aussitôt que vous aurez pu lui réunir quelque artillerie et quelques transports, le duc de Dalmatie se portera en avant pour délivrer Pampelune et rejeter les Anglais au-delà de l’Èbre. Cependant je suis encore dans l’obscur des événements, et je ne sais pas encore bien ce qui s’est passé.
Dresde, 5 juillet 1813.
Au maréchal Gouvion Saint-Cyr, à Dresde
Je vous destine à commander un corps d’observation qui serait porté de 30 à 60,000 hommes, selon les circonstances, et qui, de Königstein, manœuvrerait sur les deux rives de l’Elbe et pourrait déboucher sur un corps qui, de Bohême, se porterait sur Dresde par Neustadt, Zittau ; ou bien qui, par la rive gauche, s’y porterait par Peterswalde ou Karlsbad. Je désire donc que vous alliez reconnaître Königstein ; que vous y voyiez les ouvrages que j’ai fait faire ; que vous reconnaissiez les trois débouchés qui vont sur Stolpen, Schandau et Krossen. Je désire que vous donniez vos instructions aux ingénieurs sur la manière d’être maître du grand défilé.
Voyez également sur la rive gauche les communications de Königstein avec les routes qui de Dresde vont à Peterswalde, et la manière de s’assurer du passage des ravins. Voyez les positions à occuper entre Peterswalde et Dresde, parcourez toute la frontière le long de la Bohème et voyez tous les débouchés qui s’y trouvent; on m’assure qu’il y en a onze, mais qu’il n’y en a qu’un qui puisse servir aux mouvements d’une grande armée. Parcourez toutes ces localités sans faire connaître votre grade; étudiez le terrain, et poussez même jusqu’au débouché qui de la Bohême descend sur Hof.
Dresde, 5 juillet 1813.
Au comte Daru, directeur de l’administration de la guerre, à Dresde.
Monsieur le Comte Daru, faites-moi connaître comment il serait possible de se procurer 100,000 boisseaux d’avoine pour la cavalerie de la Garde, qui en manque. En ai-je à Torgau ? En ai-je à Wittenberg? En ai-je à Magdeburg ? Enfin pourrait-on se procurer ici 100,000 boisseaux d’avoine, et à quel prix ? Proposez-moi demain, à mon lever, des ouvertures là-dessus.
Dresde, 5 juillet 1813.
NOTE SUR LE CAMP RETRANCHÉ DE DRESDE.
Comme je l’ai dit hier, je ne trouve pas le camp retranché et les ouvrages de la rive droite assez avancés pour entreprendre le camp retranché de la rive gauche. Qu’est-ce que les ouvrages de ce camp ? Ils ne forment pas un camp retranché ; le dispositif n’en est pas bon : un cercle qui refuse ses ailes est une mauvaise disposition de guerre. Sur la rive droite j’ai voulu un camp retranché, parce qu’on peut supposer que des circonstances de guerre pourraient m’obliger à défendre la rive droite et à y mettre 50 à 60,000 hommes. Je ne peux plus comprendre le camp retranché sur la rive gauche : la droite en aval et la gauche en amont j’y serais bloqué et je perdrais mes communications avec la France. Si des circonstances de guerre m’obligeaient à prendre sur cette rive la position d’un camp retranché, j’en choisirais la direction, non pas le long de la rivière, mais dans le sens perpendiculaire à son cours. Ce dispositif ne servira donc à rien. Je ne dois ni ne peux prévoir le cas où je serais obligé de défendre la rive gauche en me jetant sur la rive droite : aussi n’est-ce pas un camp que j’ai voulu faire, mais les faubourgs que j’ai voulu couvrir. Au reste, on ne peut couvrir ces derniers contre une attaque sérieuse, et c’est mal s’engager que d’entreprendre une chose qui ne serait pas possible.
La place a 1,200 toises de pourtour; il y a une escarpe et une contrescarpe; la partie démolie peut être dans un étal tel, qu’eue force l’ennemi à ouvrir la tranchée, et, en supposant qu’il arrive par la rive droite et qu’il vienne opérer sur la rive gauche, les ponts, magasins, hôpitaux, manutentions sont en sûreté : c’est le résultat d’une place forte; il ne faudrait que de 3 à 6,000 hommes pour le remplir. Si dans une guerre l’ennemi avait une cavalerie plus nombreuse que la nôtre (ce qui le porterait à hasarder la sienne, surtout si elle lui était inutile un jour de bataille), et qu’elle eût l’instinct de ce genre d’opérations, la place de Dresde rendrait-elle ses faubourgs, cette cavalerie eût-elle les pièces légères qu’elle conduit à sa suite ? Non. Il n’est pas de commandant sachant son devoir qui voulût céder les faubourgs à de la simple cavalerie. Seulement il faut aider ce commandant; c’est le seul but que je me suis proposé. Il faut lui préparer des fermetures, de manière que la population et les ressources des faubourgs soient à l’abri de toute attaque de la cavalerie légère. C’est ce qui me porte à penser que créneler les murs, s’assurer des communications pour que des pièces de campagne puissent parcourir au trot l’enceinte des faubourgs, fermer par des palanques les ouvertures où il n’y a pas de murs, ne conserver que six ou huit issues pour la circulation publique, forme l’ensemble de ce qui est à exécuter pour préparer la défense des faubourgs. Les sorties devront être fermées par de bonnes barrières et couvertes avec des tambours en charpente; les maisons doivent être crénelées, et l’on doit désigner à l’avance celles à occuper. En cas d’insuffisance des murailles, on aurait des palanques. Le génie demande pour cela 20,000 palissades ; c’est tout ce que l’on peut demander.
Tous ces ouvrages une fois faits, on sera toujours à temps de placer des lunettes en avant des débouchés qu’on laissera ouverts. Ainsi, au résumé, je demande un projet qui rende impraticables toutes les issues qui des faubourgs conduisent à la campagne ; il y en a aujourd’hui quarante à soixante; je demande qu’elles soient rendues impraticables en premier et en deuxième ligne, et qu’il n’y ait que six portes au moins et douze au plus; les postes qui les garderont devront pouvoir communiquer entre eux et le long des fossés où est la palanque, de manière que le service des faubourgs se fasse comme celui de la place. Je pense que, pour le moment, c’est tout ce que l’on peut entreprendre. Quand cela sera exécuté, je verrai ce qu’il y aura à faire. Je tiendrais également au projet d’abandonner le faubourg que j’habite, dans le cas où la garnison se trouverait trop faible pour le défendre, et de se retirer derrière la petite rivière, où une seule issue, comme le pont, est suffisante.
Cette manière d’envisager la question est la plus naturelle; elle donne moins d’ouvrage; elle donnera une meilleure défense, parce que des maisons qui auront des vues sur les points à défendre et des mura qui seront crénelés seront toujours plus forts qu’une simple palanque. Il me faut donc un projet pour ce système de défense.
Dresde, 6 juillet 1813.
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris
Mon Cousin, j’ai ordonné que des réquisitions fussent faites dans les départements environnant Bayonne pour les besoins de l’armée d’Espagne. Le comte Mollien, qui a les copies de mes décrets, les mettra sous vos yeux.
Dans la distribution que j’ai signée pour le mois de juillet, j’ai ouvert un crédit en bons de la caisse d’amortissement; il faut que dans le conseil des ministres vous insistiez pour que les ministres de la guerre et de l’administration de la guerre mettent tout leur discernement à bien employer ces bons. Il est tout simple que, l’argent n’arrivant pas aussitôt que les besoins, j’emploie cette ressource. Ces bons ne peuvent jamais être comparés à des assignats, puisqu’ils portent intérêt à 5 pour 100, qu’ils sont remboursables dans un an ou dix-huit mois, et qu’en attendant ils sont admissibles en payement des biens des communes ; que, d’ailleurs, la quantité des biens en vente est de beaucoup supérieure à la quantité des bons en émission. Insistez là-dessus, et soutenez le courage du comte Mollien, qui parfois a des vues de finances trop étroites. Veillez aussi à ce que les ministres aident le trésor de tous leurs efforts.
Dresde, 6 juillet 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, vous demandez 300,000 francs pour rétablir le matériel de l’artillerie de l’armée d’Espagne. Vous avez vu que j’ai mis un million à votre disposition pour les dépenses de cette armée ; mon intention est que vous preniez un soin particulier d’y employer des bons de la caisse d’amortissement le plus que vous pourrez.
Je désire également que vous fassiez couper dans les forêts, soit impériales, soit communales, soit même dans celles des particuliers, tous les bois dont on aura besoin pour des palissades, pour des blindages et pour les constructions d’artillerie. Vous vous concerterez à ce sujet avec le ministre des finances, qui abrégera toutes les formes. Cela ne sera porté dans les comptes que pour mémoire et cela ne me coûtera rien.
Il est important que sur les fonds rentrés avec l’armée, n’importe à quel corps ils appartiennent, il soit payé un mois de solde à l’armée. Vous ne payerez ni gratification, ni traitement extraordinaire, mais simplement la solde, en la donnant aux soldats pour cinq jours, et par mois aux officiers.
Vous aurez soin de déclarer aux généraux que tous les frais de représentation et dépenses extraordinaires qui leur étaient alloués sur pays ennemi sont comme non avenus en France. N’ayez aucun égard aux réclamations. L’armée d’Allemagne ne jouit pas de ces suppléments, et d’ailleurs cela n’a jamais été accordé que sur des fonds de réquisition ; le trésor ne peut pas les reconnaître. Vous refuserez toutes les demandes d’indemnités pour pertes d’équipages. Ils ont fait ces pertes après une bataille et par leur faute.