Correspondance de Napoléon – Janvier 1812
Janvier 1812
2 janvier 1812
Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris
Monsieur le Comte de Cessac, je vous envoie pour votre gouverne l’organisation de la Grande Armée. Le corps de l’Elbe formera deux corps. Il est nécessaire d’envoyer un ordonnateur à chaque corps et tout le personnel d’administration qui est indispensable. Présentez-moi un projet d’organisation. Comme je n’ai pas encore organisé en deux corps le corps d’observation de l’Elbe, envoyez-y tout double.
NOTE SUR L’ORGANISATION DE LA GRANDE ARMÉE.
La Grande Armée sera partagée en quatre corps : le corps d’observation de l’Elbe en fera deux; le corps d’observation de l’Océan en fera un ; le corps d’observation d’Italie en fera un autre.
La Grande Armée sera organisée en 15 divisions d’infanterie.
1e division : 13e léger, 5 bataillon; 17e de ligne, 5 bataillons; 30e de ligne, 5 bataillons; régiment badois (celui qui est à Danzig), 2 bataillons; total, 17 bataillons.
2e division : 15e léger, 5 bataillons; 33e de ligne, 5 bataillons; 48e de ligne, 5 bataillons; régiment espagnol, 2 bataillons; total, 17 bataillons.
3e division : 17e léger, 5 bataillons; 12e de ligne, 5 bataillons; 21e de ligne, 5 bataillons; 127e de ligne, 2 bataillons; total, 17 bataillons.
4e division : 33e léger, 4 bataillons; 85e de ligne, 5 bataillons; 108e de ligne, 5 bataillons; régiment de Hesse-Darmstadt (celui qui est à Danzig), 2 bataillons; total, 16 bataillons.
5e division : 25e de ligne, 5 bataillons; 57e de ligne, 5 bataillons; 61e de ligne, 5 bataillons; 111e de ligne, 5 bataillons; total, 20 bataillons.
6e division (se réunit à Osnabrück) : 26e léger, 4 bataillons; 56e de ligne, 5 bataillons; 19e de ligne, 5 bataillons; 128e de ligne, 2 bataillons; total, 16 bataillons.
7e division (toute cette division, commandée par le général Granjean, est réunie à Danzig) : 5e polonais, 3 bataillons; 10e polonais, 3 bataillons; 10e polonais, 3 bataillons; 4e westphalien, 2 bataillons; 8e westphalien, 2 bataillons; Saxons, 2 bataillons; Bavarois, 2 bataillons; total, 17 bataillons.
8e division (se réunit à Munster) :11e léger, 4 bataillons; 2e de ligne, 5 bataillons; 37e de ligne, 5 bataillons; 124e de ligne, 3 bataillons; total, 17 bataillons.
9e division (se réunit à Nimègue) : Croates, 2 bataillons; Suisses, 9 bataillons; 123e de ligne, 3 bataillons; total, 14 bataillons.
CORPS D’OBSERVATION DE L’OCÉAN.
10e division (le lieu de réunion n’est pas encore fixé) : 24e léger, 4 bataillons; 46e de ligne, 5 bataillons; 72e de ligne, 4 bataillons ; 126e de ligne, 3 bataillons; le régiment portugais, 2 bataillons; total, 18 bataillons.
11e division (le lieu de réunion n’est pas encore fixé) : régiment illyrien, 4 bataillons; 4e léger, 1 bataillons; 18e léger, 4 bataillons ; 93e de ligne, 5 bataillons ; 2e régiment portugais, 2 bataillons; total, 19 bataillons.
12e division (le lieu de réunion n’est pas encore fixé) : 29e léger, 4 bataillons; 44e de ligne, 2 bataillons; régiment provisoire de Boulogne, 2 bataillons; 125e de ligne, 3 bataillons; 129e de ligne, 2 bataillons; total, 13 bataillons.
CORPS D’OBSERVATION D’ITALIE.
13e division (se réunit à Bolzano) : 8e léger, 2 bataillons; 84e de ligne, 4 bataillons; 92e de ligne, 4 bataillons; 106e de ligne, 4 bataillons; Croates, 2 bataillons; total, 16 bataillons.
14e division (se réunit à Trente) : 18e léger, 4 bataillons ; 9e léger, 4 bataillons; 35e de ligne, 4 bataillons; 53e de ligne, 4 bataillons; régiment espagnol, 2 bataillons; total, 18 bataillons.
15e division italienne (se réunit à Brescia) : 3e léger italien, 4 bataillons; Dalmates, 3 bataillons; 2e italien de ligne, 3 bataillons; 3e italien de ligne, 4 bataillons; 5e italien de ligne, 2 bataillons; total, 16 bataillons.
CAVALERIE – BRIGADES DE CAVALERIE LÉGÈRE.
1e brigade, général Pajol : 2e de chasseurs, 9e de cavalerie légère polonais, qui est à Danzig.
2e brigade, général Bordesoulle : 1er et 3e de chasseurs.
3e brigade, général Jacquinot : 7e de hussards, 9e de chevau-légers.
4e brigade, général Piré : 8e de hussards, 7e de chasseurs.
5e brigade, général Castex : 33e et 24e de chasseurs.
Ces cinq premières brigades sont au corps d’observation de l’Elbe.
6e brigade, général Corbineau ; 7e et 20e de chasseurs, 8e de chevau-légers.
7e brigade, général Saint-Geniès : 11e et 12e de chasseurs.
8e brigade, général Burthe : 5e et 9e de hussards.
9e brigade, général Mouriez : 11e de hussards, 6e de chevau-légers.
Pour ces quatre brigades, le lieu de réunion n’est pas encore fixé.
10e brigade, général Gérard : 6e et 25e de chasseurs.
11e brigade, général Gautherin : 6e de hussards, 8e de chasseurs.
Ces deux brigades se réuniront sur la Brenta, du côté de Bassano.
12e brigade, général Ferrières : 9e et 10e de chasseurs.
Cette brigade se réunira sur l’Oglio et sur Brescia.
13e brigade, général italien Villata : 2e et 3e de chasseurs.
Cette brigade se réunira sur l’Oglio et sur Brescia.
RÉSERVE DE CAVALERIE.
1e division (en Hanovre), général Saint-Germain : 2e, 3e et 9e de cuirassiers; le 1e de lanciers sera attaché à cette division.
2e division (à Bonn), général Beaumont : 5e, 8e et 10e de cuirassiers, 2e de lanciers.
3e division (à Erfurt), général Doumerc : 4e, 7e et 14e de cuirassiers, 3e de lanciers.
4e division (à Cologne) : 1er et 2e carabiniers, 1er de cuirassiers, 4e de lanciers.
5e division (en Hanovre), général Valence : 6e, 11e et 12e de cuirassiers, 5e de lanciers.
6e division : 7e, 23e, 28e et 30e de dragons; se réunira sur le Mincio.
Paris, 3 janvier 1812
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, je désirerais que vous me fissiez un rapport, destiné à être imprimé, dans lequel vous me ferez connaître ce qui résulte de la correspondance sur l’affaire du général Girard. Il parait que le général Briche était posté du côté par où venait l’ennemi, et qu’il a été parfaitement surpris, n’étant pas bivouaqué, mais couché dans une bonne maison, et les chevaux de ses hussards dessellés, je vous dicterai ce rapport (Ce rapport n’a pas été retrouvé). Mon but est de frapper l’esprit des colonels et généraux de troupes légères, et de rappeler, en principe, qu’un colonel de chasseurs ou de hussards qui, au lieu de passer la nuit au bivouac et en correspondance continuelle avec ses grand’gardes, se couche, mérite la mort.
Je crois que le maréchal Mortier a des renseignements là-dessus.
Comme en cela je n’ai pas en vue l’affaire du général Briche, mais de remonter l’esprit de la cavalerie légère, il faut que ce rapport soit bien frappé.
Paris, 3 janvier 1812
Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris
Monsieur le Comte Mollien, vous envoyez à Hambourg plus d’argent que vous n’en recevez. Cependant Les douanes font une opération désavantageuse pour le trésor en envoyant de l’argent à Paris, parce que le directeur des douanes y a un petit intérêt. Prenez de promptes mesures là-dessus, afin que cette double opération, contraire aux intérêts du trésor, cesse et n’ait plus lieu à l’avenir.
Paris, 3 janvier 1812
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Hambourg
Mon Cousin, je suppose que vous avez déjà reçu le décret du 12 décembre sur Danzig. Vous y verrez que j’ai fait un fonds de 12,000 francs, moyennant lequel je dois avoir à Danzig 33,000 quintaux métriques de blé, ou 66,000 quintaux poids de marc, 3,900 quintaux métriques de riz, savoir 1,900 pour l’approvisionnement de siège et 2,000 pour la réserve, 612,000 décalitres d’avoine. Les fonds sont accordés pour tout cela. Il est nécessaire que, sur les 66,000 quintaux de blé, 50,000 soient convertis en farine au 1er mars; que cette farine soit prête à être entonnollée, et que les tonneaux soient d’une dimension telle qu’ils puissent facilement se placer sur nos nouveaux chariots. Tout cela doit être préparé de manière que, lorsque le mouvement sera démasqué, en puisse faire embariller la farine sans donner l’alerte, et la faire passer soit par la Vistule, soit par le Frische Haff, soit par terre au moyen des équipages. Il faut aussi que les 600,000 rations de biscuit soient dans des caisses qui aillent parfaitement sur les nouveaux caissons. De même pour les 2,000 quintaux métriques de riz qui n’appartiennent pas à l’approvisionnement de siège. Je vous ai déjà mandé qu’indépendamment de ce riz vous eussiez à envoyer tout le riz qui est à votre disposition soit à Hambourg, soit à Magdeburg, soit dans les places de l’Oder. Moyennant ces précautions, on pourra être assuré d’avoir 600,000 rations de biscuit et 50,000 quintaux de farine poids de marc; ce qui fera à peu près pour 200,000 hommes pendant trente jours. Ce sera un approvisionnement raisonnable, mais il faut que tout cela soit disposé de manière à pouvoir être transporté à deux ou trois cents lieues, et notamment de riz.
Je désirerais avoir un rapport qui me fit connaître les moyens de mouture qu’on a à Danzig.
Paris, 3 janvier 1812
À Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan
Mon Fils, le ministre de la guerre vous a transmis mes ordres pour l’organisation des 13e, 14e et 15e divisions, pour celle des quatre brigades de cavalerie légère et de la division de dragons. Cachez votre mouvement le plus longtemps que vous pourrez, en commençant par tout ce qui est insignifiant, c’est-à-dire par ce qui est le plus éloigné. J’ai décidé que la 13e division serait réunie à Bolzano et jusqu’aux limites du territoire bavarois; que la partie de la division qui vient des provinces illyriennes se rendrait à Linz ; hormis toutefois les Croates, qui ne doivent partir que bien habillés et bien armés ; que la 14e division se réunirait du côté de Trente et de Roveredo, et la 15e division à Lodrone, à la Rocca d’Anfo, à Brescia et à Salo; que deux brigades de cavalerie légère se réuniraient dans la vallée de la Brenta, de manière que la tête ne sort qu’à une marche de Trente, et les deux autres brigades dans la vallée de la Chiese, de manière à pouvoir promptement déboucher par la Rocca d’Anfo; que la division de dragons se réunirait sur le Mincio; le grand parc, les transports militaires et le génie, à Vérone : bien entendu que chaque division aura avec elle son artillerie, son détachement du génie et tout ce qui lui est nécessaire. Comme il est possible que les divisions restent dans cet état pendant douze ou quinze jours, il faut que des mesures soient prises pour les subsistances et pour que les divisions mènent avec elles huit jours de vivres, pour pouvoir marcher rapidement. Vous ne ferez aucune demande de passage en Bavière, ni aucune démonstration ; quand le cas arrivera, je donnerai les ordres nécessaires.
Il faut m’envoyer un autre état de formation de votre corps, qui soit mieux fait. Prenez les mesures nécessaires pour que toutes les compagnies des régiments italiens soient fortes de 140 hommes, et pour que vos seize bataillons aient 13,440 hommes, leurs compagnies d’artillerie régimentaires non comprises. Il est même nécessaire qu’il y ait dix hommes de plus par compagnie, de sorte qu’à son passage à Ratisbonne le corps italien se trouve avoir 13,440 hommes présents sous les armes.
Le 8e et le 18e régiment d’infanterie légère pourront avoir le même complet, puisque ces régiments viennent de recevoir 400 hommes réfractaires. Les Croates devront avoir le même complet.
Quant aux autres régiments français, il faut les porter à ce complet aussitôt que possible. Le bataillon du 10e de ligne doit être arrivé; vous le ferez sur-le-champ incorporer. Vous pourrez incorporer également les deux bataillons du 2e régiment de la Méditerranée qui ont 1,500hommes, ce qui vous fera près de 2,000 hommes. Le 4e bataillon du 8e léger est parti à la fin de décembre des îles d’Hyères, composé de conscrits réfractaires, pour rejoindre son régiment ; vous aurez ainsi trois bataillons du 8e léger, au lieu de deux; vous ferez tiercer ce 3e bataillon avec les deux autres. Comme j’attache une grande importance à ce que le corps d’observation d’Italie parte complet, écrivez au prince Borghèse pour savoir ce que les dépôts qui sont dans son gouvernement peuvent fournir à vos régiments.
Je donne ordre d’ailleurs que les bataillons du régiment de la Méditerranée qui sont à l’île d’Elbe et en Corse suivent le mouvement pour vous joindre. Je désirerais que tous vos bataillons pussent passer le Tyrol forts de 840 hommes chacun. Il faudra former à Trente un dépôt pour tous les hommes malades et fatigués; à mesure qu’ils guériront, ils viendront vous rejoindre; on ne les fera partir que lorsqu’il y en aura 1,500 ou 2,000, avec les effets que les corps voudront envoyer. Toutes les compagnies de pontonniers qui sont en Italie ou dans le gouvernement du prince Borghèse doivent se réunir à Vérone, ainsi que la plus grande partie des compagnies de sapeurs, les compagnies de pontonniers complétées à 120 hommes et les compagnies de sapeurs à 140 hommes. Il en est de même des compagnies de mineurs. Tout cela arrivé à la Grande Armée sera distribué dans les corps selon l’organisation.
Les régiments de chasseurs italiens sont bien faibles; il faudrait porter à 1,100 hommes et 1,000 chevaux. Vous devez avoir des hommes disponibles; faites-les armer et habiller, pour porter vos régiments à 1,200 hommes. Ils pourront partir à pied, avec leurs selles, et prendre leurs chevaux à Dresde ou à Posen, où vous les aurez fait acheter d’avance. Tous les régiments de cavalerie légère française ont des marchés passés pour 300 chevaux du côté de Hambourg et de Hanovre, de sorte qu’ils seront à 1,000 chevauxdans le courant de mars. La garde doit être au grand complet, de sorte que vous vous trouverez avoir 46 à 47,000 hommes d’infanterie, sans compter l’artillerie et le génie. Vous devez avoir deux bataillons d’équipages militaires, un français et un italien. En attendant que les nouvelles voitures soient faites, on se servira des anciennes; mais ne les faites partir de Plaisance qu’au dernier moment, c’est-n-dire au commencement de février, puisque, pour arrivera Vérone, je ne crois pas qu’il faille plus de sept à huit jours. Vous renverrez les cadres des bataillons du 10e et du 20e à leurs dépôts, et ceux des bataillons du 2e régiment de la Méditerranée à Toulon. Assurez-vous, avant le départ de ces cadres, que les sous-officiers ont deux ans de service; s’ils ne les avaient pas, faites faire l’échange avec de vieux sergents et caporaux de vos régiments.
Le ministre de l’administration de la guerre a dû donner des ordres pour que tous les employés de l’administration fussent rendus à Milan le 15 février.
Faites-moi connaître où en est la conscription italienne de 1812. La conscription de 1811 est-elle toute levée ?
Paris, 4 janvier 1812
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, vous réunirez chez vous le grand écuyer, le duc d’Istrie, le général La Riboisière, l’ordonnateur de la Garde, et vous leur demanderez des réponses à ces questions :
1° Quelle est l’espèce de voiture de transport dont se servent les Russes et les Polonais dans leurs pays ? 2° Combien de pareilles voitures coûteraient-elles à faire faire ? 3° Combien pèsent-elles ? 4° Combien portent-elles de quintaux ? 5° De combien de gros chevaux d’attelage ont-elles besoin ? 6° Ne serait-il pas convenable d’avoir, à la suite de l’année, en Pologne, un ou plusieurs bataillons attelant ces voitures ?
Paris, 5 janvier 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, donnez ordre que les trois régiments polonais, la compagnie d’artillerie et les sapeurs polonais qui sont en Andalousie, partent à la réception de votre lettre pour se rendre à Burgos. Vous ferez comprendre au duc de Dalmatie que cet ordre ne souffre point de délai. Vous donnerez ordre au maréchal Suchet de diriger les trois régiments de la Vistule, avec tous les Polonais qu’il a, sur Tudela, où ils recevront de nouveaux ordres. Ces ordres seront donnés en chiffre; vous les réitérerez, et vous ferez sentir à ces maréchaux l’importance de leur prompte exécution.
Palais de Saint-Cloud, 6 janvier 1812
NOTE DICTÉE EN CONSEIL DU COMMERCE ET DES MANUFACTURES.
Il convient que le ministre de l’intérieur fasse un rapport qui fera connaître la quantité d’arpents en betteraves demandée à chaque département, la quantité fournie, les fabriques qui y sont établies, en faisant connaître les causes qui ont empêché la réalisation de qu’on avait espéré.
Le ministre de l’intérieur ferait ensuite une nouvelle distribution pour les semailles de l’année prochaine. Les betteraves se sèment au mois de mars ; ainsi on a le temps nécessaire.
La seconde opération consisterait à rédiger un projet de décret, qui dirait que tout individu qui voudra établir une fabrique devra prendre une patente; que tous ceux qui en ont établi jusqu’à ce jour les conserveront de droit, et feront connaître s’ils veulent continuer de fabriquer en 1812.
Tous ceux qui voudront s’engager à fabriquer telle quantité, dont le minimum serait cinquante milliers, demanderont la patente. Les raffineurs auront la préférence; à cet effet, le préfet leur écrirait pour leur demander s’ils veulent en profiter.
Il sera donné jusqu’à quatre ou cinq cents patentes.
On fera comprendre dans le rapport que, déjà cette année, le cultivateur a souffert, parce que les fabriques n’ont pas été en proportion avec la culture.
Tout individu patenté (en réalisant ces conditions, c’est-à-dire se trouvant en octobre prochain en mesure de fabriquer) obtiendra la garantie :
1° Qu’aucun droit ne sera établi de quatre ans sur l’objet de la fabrication ;
2e Une déclaration serait faite que si, par le résultat de ces mesures, les cinq cents fabriques sont en activité au mois d’octobre, le sucre de canne sera prohibé dans l’Empire comme marchandise anglaise.
Il faudrait y ajouter la seconde condition, que les départements auraient porté la culture au complet.
On voit là un sacrifice du Gouvernement pendant quatre ans au profit du peuple, parce que le sucre ne pourra pas se soutenir à 6 francs lorsqu’il y aura cinq cents fabriques.
Les fabricants auront quatre ans d’exemption des contributions et seront sûrs de la continuation du système continental par la prohibition.
Enfin, tout se trouverait préparé pour la régie au bout de quatre ans, et le Gouvernement, laissant subsister le prix d’alors, aurait le bénéfice à son profit. En supposant le sucre à 40 sous, ce serait, sur une consommation de 30 millions, un bénéfice de 60 millions.
Il serait convenable d’établir aussi quatre belles fabriques dans les quatre points de la France où il y a le plus de betteraves, et où l’on pourrait espérer d’exploiter de quoi faire de 1 million à 4 millions de sucre, en les plaçant sur des canaux ou rivières. On a neuf mois d’ici au mois d’octobre pour organiser ces fabriques. Ce serait une avance qui n’irait pas à 2 ou 3 millions, et qui mettrait le Gouvernement bien au fait de cette affaire. On placerait de bons chimistes à la tête de ces établissements, et l’on y enverrait beaucoup d’élèves.
Parie, 6 janvier 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, il y a dans les Rêveries du maréchal de Saxe, parmi beaucoup de choses extrêmement médiocres, des idées sur la manière de faire contribuer les pays ennemis sans fatiguer l’armée, qui m’ont paru bonnes. Lisez-les et mettez-en le contenu dans une instruction qui sera destinée à être envoyée à mes généraux en Espagne.
Paris, 6 janvier 1812
Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris
Monsieur le Comte de Cessac, la rareté des chevaux, la difficulté de les remplacer et l’avantage qu’ont les bœufs, en ce qu’il est facile de s’en procurer partout et qu’ils se nourrissent plus aisément, me portent à désirer d’avoir un ou plusieurs bataillons des transports militaires attelés de bœufs ; faites-moi un rapport sur les poids qu’ils pourraient traîner, enfin sur ce qu’ils coûteraient.
Paris, 6 janvier 1812
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Hambourg
Mon Cousin, vous aurez reçu un décret ayant pour objet d’armer la grosse cavalerie de mousquetons, portés comme la cavalerie les portait autrefois. Mettez une attention particulière à ce que vos régiments de cuirassiers soient pourvus de ces mousquetons, et à ce qu’ils les reçoivent dans le commencement de février. Ordonnez qu’on fasse des arrangements en conséquence aux selles. Faites faire l’exercice aux régiments pour leur apprendre à charger et à décharger cette arme, et les premiers éléments de la manœuvre à pied, afin que, se trouvant dans un village et mettant pied à terre pour défiler, ils sachent se mettre ensemble.
J’ai ordonné que les chevau-légers seraient armés de carabines; je désirerais bien que les Polonais en eussent; j’apprends qu’ils n’en ont que six par compagnie, ce qui est ridicule, ayant affaire aux Cosaques, qui sont armés de pied en cap. Faites-moi connaître si le 9e de lanciers en a.
Paris, 7 janvier 1812
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Hambourg
Mon Cousin, j’approuve le départ du 12e convoi de fonds, qui portera, savoir :
Argent Traites TOTAUX.
Pour le 130e régiment……….. 100,000f 50,000f 150,000f
Pour les escadrons de gendarmerie de la Navarre, de la Biscaye et de
Burgos……………………………….. 100,000 100,000 200,000
Pour la garnison de Santona. . . . 50,000 « 50,000
Pour le reste de l’armée du Nord. . 300,000 300,000 600,000
Pour le Roi……………………. 250,000 250,000 500,000
Pour l’armée du Centre……… 100,000 150,000 250,000
Pour l’armée de Portugal….. 100,000 150,000 250,000
TOTAUX………………………… 1,000,000 1,000,000 2,000,000
Faites partir sur-le-champ ces 2 millions, sans délai.
Paris, 7 janvier 1812
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Hambourg
Mon Cousin, je ne conçois pas ce que vous voulez dire, qu’on a ôté les vivres aux Polonais : je suppose que ce sont les vivres de campagne, mais qu’on leur donne le pain ; car il serait trop absurde et trop contraire aux intérêts du trésor du pays de leur donner le pain en argent.
L’essai du prince Poniatowski ne signifie rien. Jamais on n’a prétendu que les gardes nationales pussent se réunir; mais on a entendu qu’en leur donnant une ville, telle que Grodno, Cracovie ou même Pultusk, elles ne se laisseraient pas rançonner par un détachement de trente ou quarante Cosaques. Si l’on obtient ce résultat, il ne faut pas demander plus, et il suffit que les villes et les derrières de l’armée se mettent à l’abri des incursions de la cavalerie légère, par la raison qu’elles ont des armes.
Paris, 7 janvier 1812
NOTE POUR M. BARBIER, BIBLIOTHÉCAIRE DE L’EMPEREUR , À PARIS.
L’Empereur demande une histoire de la Courlande, et tout ce qu’on peut trouver d’historique, de géographique et de topographique sur Riga, la Livonie, etc.
Paris, 9 janvier 1812
Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris
Monsieur le Comte Decrès, dans l’instruction au capitaine Meynard, faites-lui connaître la situation de Tortose, dont nous sommes maitres, celle de Valence (au 25 décembre cette place était assiégée, ce qui donnait lieu à de grands mouvements de la place à la mer), enfin celle de Malaga; nous l’occupons. D’ailleurs, sur la partie méridionale de l’Espagne cet officier trouvera à Alger les renseignements qui lui seront nécessaires. Il remplira à Alger la même mission que doit y remplir le commandant de l’Aérienne et de la Pénélope. Laissez-le maître d’établir sa croisière où il voudra. Faites-lui connaître d’où l’ennemi tire ses blés. Le capitaine Meynard a février et mars pour croiser. La corvette (brick ou gros aviso), bonne marcheuse, restera dans Tarragone. Mettez sur ce bâtiment un officier que vous désignerez pour commander le port de Tarragone et diriger les envois de cette place sur Barcelone. Si jamais ces frégates étaient bloquées dans Tarragone, il serait nécessaire qu’elles contribuassent de toutes leurs ressources à la défense de la place, et vous devez leur en donner l’ordre; mais j’espère que ce cas n’arrivera pas, et que, dans les vingt-quatre heures, elles se trouveront sous voile. Le capitaine aura soin de prendre les paquets du gouverneur.
Paris, 9 janvier 1812
DÉCISION.
Le ministre de la marine propose à l’Empereur de nommer membres de la Légion d’honneur MM. de Panât et de la Reinty, auditeurs au Conseil d’État, qui viennent d’accomplir avec succès une mission à Batavia. | Ils sont trop jeunes. Si je donne la Légion d’honneur pour avoir été aux colonies, qu’aurai-je doncà donner à ceux qui prendront des bâtiments anglais ? |
Paris, 10 janvier 1812
A M. Collin, comte de Sussy, conseiller d’État, directeur général des douanes, à Paris
Monsieur le Comte de Sussy, j’ai décidé qu’il y aurait à l’avenir un ministre des manufactures et du commerce, et je vous ai désigné pour remplir ces hautes fonctions. Je devais reconnaître ainsi les bons services que vous avez rendus en organisant les douanes comme elles le sont aujourd’hui.
Le département des manufactures et du commerce aura dans ses attributions : la direction et l’administration du commerce, son mouvement dans les ports et dans les diverses places de l’intérieur ; les manufactures et les règlements de police qui y sont relatifs ; la nomination des agents de change et des courtiers; les administrations sanitaires (à l’exception de celle de Toulon) ; la formation et l’administration des produits indigènes ; l’examen des divers procédés d’amélioration des fabriques; la surveillance de l’administration des douanes, le personnel de cette administration, la proposition des tarifs et de tous les règlements relatifs à cet objet; la surveillance relative aux approvisionnements généraux de l’empire, au mouvement, à l’entrée et à la sortie des denrées; la correspondance avec les consuls près les puissances étrangères sur les affaires relatives au commerce; la formation du conseil général de commerce et le rapport de toutes les affaires soumises ou à soumettre au conseil impérial des prises. Dans peu de jours vous prêterez serment.
Paris, 10 janvier 1812
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Hambourg
Mon Cousin, j’ai formé quatre corps d’armée. Le corps d’observation de l’Elbe sera composé de vos cinq premières divisions et des le et 2e brigades de cavalerie légère. Le 1er corps de l’Elbe sera commandé par le duc de Reggio et sera composé des 6e, 8e et 9e divisions et des 5e et 6e brigades de cavalerie légère. Le quartier général du duc de Reggio sera à Munster, et tout sera réuni au 15 février.
Le corps d’observation de l’Océan sera composé des 7e, 10e et 11e divisions, et des 9e et 14e brigades de cavalerie légère. Deux de ces divisions seront réunies à Mayence, avec le quartier général, l’artillerie, etc., au 15 février. La 12e division ne peut se réunir que dans le courant d’avril.
Le corps d’observation d’Italie sera composé des 13e, 14e et 15e divisions, et des 12e et 13e brigades de cavalerie légère.
Ma cavalerie de réserve sera divisée en trois corps, chaque corps commandé par un lieutenant général.
Le 1er corps de cavalerie sera composé de la 1e division de cavalerie légère, commandée par le général Bruyère, composée des 3e et 4e brigades; de la 1e division de cuirassiers, commandée par le général Saint-Germain, et de la 5e division de cuirassiers, que commande le général Valence. Il sera attaché une batterie d’artillerie légère à la division Bruyère. Ce corps, ayant ainsi trente pièces d’artillerie légère, sera commandé par le général Nansouty.
Le 2e corps de cavalerie sera composé de la 2e division de cavalerie légère, que commande le général Wattier, formée des 7e et 8e brigades, lesquelles se réunissent à Mayence, de la 2e et de la 4e division de cuirassiers.
Le 3e corps de cavalerie sera composé de la 3e division de cavalerie légère, commandée par le général Kellermann et formée des 10e et 11e brigades, laquelle se réunit à Vérone, de la 3e division de cuirassiers, que commande le général Doumerc, et de la division de dragons qui se réunit à Vérone.
Tout le monde sera rendu à son poste et prêt à marcher au 15 février.
J’ai cru devoir vous donner avis de cette formation de l’armée pour que vous vous en formiez une idée. Le 125e est laissé jusqu’à ce qu’il soit remplacé du côté d’Eraden. J’ai ordonné que les 4e, 5e et 6e compagnies du 6e bataillon d’équipages militaires soient formées sous votre direction. Vous vous servirez des cent vingt caissons et harnais d’ancien modèle du 12e bataillon, et vous prendrez les hommes dans la 32e division militaire. Le ministre de l’administration de la guerre vous écrira pour les cadres.
Paris, 12 janvier 1812
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, les Croates ne me paraissent pas assez organisés pour partir ; je désire qu’ils restent à Paris jusqu’à nouvel ordre. Il est nécessaire qu’avant de partir ils aient leurs caissons, leur compagnie d’artillerie, leurs sacs bien garnis, deux paires de souliers dans le sac et une aux pieds ; qu’on les fasse un peu manœuvrer, et qu’on complète et ajuste leur habillement. Je les verrai à la première parade que je passerai en février, et je donnerai alors des ordres pour leur départ.
Faites passer la revue du 24e léger demain matin, pour que les hommes éclopés et marqués pour la retraite ne suivent point le régiment. Il est nécessaire d’attacher un major en second à ce régiment.
Enfin, il faudrait faire une ordonnance sur une manière d’attacher leur lance à leur cheval, lorsque les chevau-légers combattent à pied, afin qu’ils aient toute liberté de se servir de leur carabine.
Paris. 13 janvier 1812
Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris
Monsieur le Comte de Cessac, je viens de vous accorder un supplément de 2,400,000 francs sur le budget de Danzig de 1811. Mon intention est que vous achetiez sans délai 100,000 quintaux de froment, 100,000 quintaux de seigle et un million de boisseaux d’avoine.
Je vous ai donné l’ordre, que je réitère, que le riz qui est à Passau , à Hambourg et dans les places de l’Oder, entre les mains des administrations françaises, et à Magdeburg, fût sans délai dirigé sur Danzig. Je charge le directeur général des douanes d’empêcher toute vente de riz, et de mettre à votre disposition, pour être dirigé sur Danzig, tout le riz qui est à Hambourg et autres places d’Allemagne.
Mon intention n’est pas de le payer au prix de l’entrepreneur, qui est de vingt-cinq pour cent trop cher, mais de le payer au plus bas prix possible. Je n’ai pas besoin de vous recommander qu’il faut qu’on mette de l’adresse dans ces achats. Par ce moyen, j’aurai au 1er mars, savoir : à la réserve, 200,000 quintaux de froment et de seigle ; à l’approvisionnement de siège, 70,000 ; total, 270,000 quintaux. Sur ces 270,000 quintaux, 70,000 seront convertis en farine, bien embarillés, et pouvant faire trente jours de marche. J’aurai à la réserve 4,000 quintaux de riz; à l’approvisionnement de siège, 4,000 quintaux de riz; venant de Passau et des places de l’Oder, 4,000 quintaux de riz; total, 12,000 quintaux de riz. J’aurai à la réserve 1,400,000 boisseaux d’avoine; à l’approvisionnement de siège, 600,000 boisseaux d’avoine; total, 2 millions de boisseaux.
J’aurai donc 20 millions de rations de pain, ou pour une armée de 400,000 hommes pendant cinquante jours; j’aurai 20 millions de rations de riz à une once par jour, ou pour 400,000 hommes pendant cinquante jours. J’aurai 2 millions de boisseaux d’avoine, ou pour 50,000 chevaux pendant cinquante jours. Je suppose que je ne me trompe pas dans ces différentes données. Indépendamment de cela, il y a un grand approvisionnement sur l’Oder.
Quant au biscuit, je désire que le biscuit qui est à Danzig puisse être encaissé et embarillé en peu de jours, de même que les 1,800,000 rations qui existent dans les places de l’Oder, de manière à pouvoir se transporter promptement ; ce qui fera 2,300,000 rations de biscuit. Faites-moi connaître le temps qu’il faudrait à Danzig pour fabriquer 1,700,000 rations, ayant besoin de 4 millions de rations de biscuit. Comme ce temps est le plus favorable aux achats, il est nécessaire que vous donniez des ordres sans délai.