Correspondance de Napoléon – Janvier 1810
Janvier 1810
Palais des Tuileries, 1er janvier 1810.
DÉCRET.
Les statues des généraux Saint-Hilaire, Espagne, Lasalle, Lapisse, Cervoni, Colbert, Lacour, Hervo, morts au champ d’honneur, seront placées sur le pont de la Concorde, conformément au projet qui nous sera présenté par notre ministre de l’intérieur.
Paris, 2 janvier 1810.
Au général comte Lauriston, aide de camp de l’Empereur, à Paris
Monsieur le Général Lauriston, rendez-vous dans l’île de Cadzand; voyez en détail les forts qu’on construit sur la côte. Visitez la place de l’Écluse. De là, passez à Flessingue; faites le tour de l’île de Walcheren et prenez connaissance en détail de la situation des choses. De là, vous irez dans le Sud-Beveland, vous visiterez le Sloe. Vous reviendrez par Bath, Berg-op-Zoom, Breda et Anvers.
Vous m’écrirez de Cadzand, de Flessingue et de l’endroit où vous serez, tous les jours. Je désire être au fait de tout, de la population, des revenus, de l’esprit des habitants, des magasins de marchandises anglaises qu’a dû faire séquestrer le duc d’Istrie. Vous marquerez sur un plan de l’île de Walcheren ce que les Anglais ont fait sauter, ce qui existe et ce qu’il y a à faire. Si les fortifications et bassins sont susceptibles d’être réparés sans trop de dépense, vous arrêterez un projet des travaux à faire et un système d’inondation pour accroitre les fortifications et ajouter à la défense. Vous vous assurerez si des vaisseaux de ligne anglais ont passé par le Sloe, et vous verrez ce qu’il y a à faire pour l’empêcher à l’avenir. Vous prendrez des renseignements sur le siège, sur la conduite de la garnison et des habitants, sur ce qu’ont fait les Anglais. Vous prendrez les mêmes détails à Berg-op-Zoom et Anvers. Vous me préviendrez du jour où vous serez à Anvers, où vous trouverez mes ordres ultérieurs.
Paris, 3 janvier 1810.
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, comme le Hanovre et Magdeburg sont des pays de cavalerie, il faut que les 18,000 hommes que doit nourrir le roi de Westphalie consistent en 12,000 hommes d’infanterie et en 6,000 hommes de cavalerie.
Paris, 3 janvier 1810.
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, faites-moi connaître ce qui revient à l’archichancelier d’État pour son traitement comme grand dignitaire.
Faites-moi également connaître quand vous me remettrez le travail relatif aux affaires de Rome; j’ai hate de les terminer.
Paris, 3 janvier 1810
Au comte Regnaud, de Saint-Jean d’Angely, ministre d’État, président de section au Conseil d’État
Monsieur le Comte Regnaud, j’ai lu avec intérêt le tableau que vous m’avez envoyé sur la situation du budget des villes en 1808.
Cela me porte à étendre la mesure, et à soumettre au Conseil d’État les budgets des villes dont le revenu ne s’élève pas à plus de 5,000 francs. Je vois que les villes ont 14 millions d’actif et 85 millions de passif, ce qui fait à peu près 100 millions; et qu’elles ont en caisse, pour 1809, 8 millions, 4 millions à la caisse d’amortissement pour éteindre les dettes, et 1,100,000 francs portés à la colonne En acquit de dettes. Je désirerais que vous me fissiez un rapport sur ces dettes, sur le mécanisme adopté à la caisse d’amortissement pour les éteindre, et sur ce qu’il y aurait à faire pour cela et pour les mettre au courant. Je vois que les dépenses municipales se montent à 8 millions, ce qui me parait une somme très-forte.
En jetant les yeux sur le tableau, je tombe sur la ville de Niort, qui est portée pour 216,000 francs de rente, et dont l’octroi est à 140,000 francs. Il faut qu’il y ait, sur cet octroi, quelque chose de contraire aux lois, car l’octroi de Niort ne peut pas rendre 140,000 francs.
Paris, 3 janvier 1810
Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris
Je vous envoie la note des savants ou gens de lettres auxquels je fais des pensions sur les journaux. Faites-moi connaitre ceux qui se seraient le plus distingués depuis deux ans dans la littérature et les sciences.
ÉTAT DES GENS DE LETTRES ET SAVANTS
QUI ONT DES PENSIONS SUR LES JOURNAUX
- Haüy, 6,000 francs; Bernardin de Saint-Pierre, 2,000 francs, Dutheil, 2,000 francs; Gasselin, 2,000 francs; Coraï, 2,000 francs. (Décret du 21 février 1806.)
- Monge, 6,000 francs; Gianni, 3,000 francs; Lebrun, 1,200 francs; Legendre, 3,000 francs. (Décret du 10 mars 1806.)
MM Barré, 4,000 francs; Radet, 4,000 francs; Desfontaines, 4,000 francs. (Décret du 4 avril 1806.)
- Monsigny, 2,000 francs. (Décret du 4 mai 1806.)
- Palissot, 3,000 francs. (Décret du 31 mai 1806.)
- Villevieille, 2,000 francs. (Décret du 9 septembre 1806.)
- Chénier, 6,000 francs. (Décret du 4 septembre 1807.)
- Ducray-Duminil, 3,000 francs. (Décret du 17 septembre 1807.)
- Baour-Lormian, 6,000 francs. (Décret du 30 septembre 1807.)
- Picard, 6,000 francs. (Décret du 28 octobre 1807.)
- Delrieu, 2,000 francs. (Décret du 20 août 1808.)
- Luce de Lancival, 6,000 francs. (Décret du 6 février 1809.)
Paris, 3 janvier l810
Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris
Monsieur le Comte Mollien, vous m’avez remis un compte du trésor public au 1er octobre. Je désire savoir quand vous pourrez me remettre un pareil compte au 1er janvier, parce que je suis bien aise d’asseoir les calculs de l’année sur ce nouveau compte. Je vous prie de m’apporter demain, à quatre heures après midi, les décrets que j’ai pris l’année passée lorsque j’ai réglé le service, et les renseignements nécessaires sur la manière dont les exercices arriérés doivent être soldés et sur ce qu’il est convenable de faire pour régler le service de cette année. Portez-moi aussi le budget de l’armée du Rhin de l’année passée, enfin tous les décrets et pièces propres à me mettre à même de prendre une décision pour assurer le service de 1810.
Paris. 3 janvier 1810
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, je vous renvoie tous les projets de budget que vous m’avez remis sur les places de guerre, pour que vous les rédigiez conformément au modèle que je vous ai adressé pour la place d’Alexandrie. Il faut me faire signer une répartition générale entre toutes ces places, de manière que cela monte à la même somme que l’année passée, mais en laissant de côté une somme considérable pour les travaux de l’Escaut.
Paris, 3 janvier 1810
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Ayant donné l’ordre de prendre possession de Walcheren en mon nom, je suppose que vous avez fait les dispositions nécessaires pour l’armement des batteries de cote et pour mettre cette île à l’abri de toute attaque.
Paris, 3 janvier 1810
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
J’attends des rapports des officiers sur Flessingue les travaux à y faire seront compris dans le budget de cette année. Puisque les Anglais ont eu la bonté de laisser les fortifications intactes, il faut ne point perdre de temps à les réparer. Le général Chasseloup peut s’y rendre dès demain pour voir ce qu’il y a à faire; il visitera le cours de l’Escaut et pourra être de retour le 15 avec le colonel Decaux, pour rendre compte au conseil d’administration.
Vous trouverez ci-jointes des notes pour la mission du général Chasseloup.
NOTES POUR LE GÉNÉRAL CHASSELOUP.
D’après les premiers renseignements qui viennent de Flessingue, il parait que les Anglais ont laissé intactes les fortifications, qui consistent en une enceinte bastionnée et demi-lunes, fossés avec escarpe et contrescarpe et pleins d’eau. Cela seul vaut plusieurs millions. Il sera donc convenable de réarmer et réoccuper Flessingue. Mais, naturellement, Flessingue, pour être occupé avec succès, doit avoir sur les digues des forts qui éloignent l’ennemi, forts que j’ai fait tracer et commencer. Il faut les achever promptement, c’est le principal. Un ou deux forts au milieu de l’inondation, à quatre ou cinq cents toises, soutenus par deux ou trois beaux forts, sont importants.
Le général Chasseloup verra ce qu’il y a à faire à Cadzand, où le principal est d’avoir un fort à l’abri de… (manque dans la minute), qui protège les batteries.
A Rammekens : voir s’il serait possible de lier ce fort par une inondation avec Flessingue; voir ce que coûtera le rétablissement du bassin et la construction nécessaire pour mettre le magasin à poudre à l’abri de la bombe; voir si on pourrait établir quelques batteries avancées, soit sur des bancs de sable, soit sur des atterrissements.
Mais, si le bassin peut être facilement rétabli, Flessingue servira comme point d’appui de la flottille qui défendra l’Escaut.
Tout cela doit être médité par l’officier du génie et être l’objet de calculs particuliers.
Paris, 3 janvier 1810.
Au comte Aldini, ministre secrétaire d’État au royaume d’Italie, à Paris
Présentez-moi un projet de message au sénat et un projet de dotation (entendez-vous avec Prina) pour régler le sort du vice-roi comme prince italien. Par le statut du royaume, je l’ai appelé au trône en cas que je n’aie point d’enfant; mais, comme prince italien, il lui faut un apanage; je pense donc qu’un million en domaines est convenable. Je lui donnerai également la villa Bonaparte; cela formera l’apanage de la branche du prince de Venise dans tous les temps.
Paris, 5 janvier 1810
Au comte Régnaud, de Saint-Jean d’Angely, président de section au Conseil d’État, à Paris
L’affaire de Dupont, de Marescot et de Vedel ne peut rester plus longtemps en suspens, et il est convenable que le public connaisse cette affaire sous son véritable point de vue. Je désire donc que vous fassiez un rapport étendu au parquet, avec les pièces à l’appui, tendant à demander que la haute cour soit saisie de cette affaire, demande qui me sera faite par l’archichancelier ou tout autre; ce qui sera un motif pour faire imprimer les pièces et ordonner la transmission à la haute cour. Après cela, les opérations de la haute cour se suivront.
Paris, 5 janvier 1810.
Au comte Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police générale, à Paris
Il y a un mauvais ouvrage d’un sieur Bruguières, intitulé Napoléon en Prusse (poème épique en douze chants), qu’on croit avoué par le Gouvernement. Tous les souverains lui envoient des présents. Faites critiquer cet ouvrage comme je crois qu’il le mérite, car je ne l’ai que légèrement parcouru.
Paris, 5 janvier 1810,
A M. Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police générale, à Paris
J’apprends qu’une trentaine de jeunes gens de l’École polytechnique se sont portés au domicile d’un écrivain pour le battre.
Je désire que cette affaire soit portée devant les tribunaux et que les délinquants soient punis conformément aux lois. Témoignez mon mécontentement au gouverneur de l’École polytechnique, et que ces jeunes gens sachent que je les ferai punir, lorsqu’ils se conduiront mal.
(Lecestre)
Paris, le 6 janvier 1810
A Monsieur de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, aucune de mes affaires n’avance. Celle de la Hollande ne fait point un pas; présentez une note au ministre des affaires étrangères, conformément à ma lettre au Roi; dites-lui que je ne puis laisser cette nation l’auxiliaire de l’Angleterre; tombez sur les mauvais conseillers du Roi, et insistez sur la nécessité de recourir à toute la puissance que Dieu m’a donnée, pour faire du mal à l’Angleterre et pour nuire à son commerce dans l’alliance qu’il a contractée avec le commerce de Hollande.
Paris, 7 janvier 1810.
Monsieur mon Frère, j’apprends avec plaisir, par la lettre que vous m’avez écrite, l’heureuse arrivée de Votre Majesté dans la capitale de son royaume. Je suis bien aise que Votre Majesté ait été satisfaite de l’accueil qui lui a été fait dans mes États; il m’a été très agréable de l’y recevoir et de trouver une pareille occasion de lui témoigner la sincérité de mes sentiments.
Paris, 7 janvier 1810, 8 heures du soir
A l’impératrice Joséphine, à Malmaison
J’ai été bien content de t’avoir vue hier ; je sens combien ta société a de charmes pour moi.
J’ai travaillé aujourd’hui, avec Estève (Martin-Roch-Xavier Estève – 1772 – 1853 – administrateur général des finances et domaines des pays conquis au-delà du Rhin, puis trésorier général de la Couronne). J’ai accordé 100.000 francs pour 1810, pour l’extraordinaire de Malmaison. Tu peux donc faire planter tant que tu voudras ; tu distribueras cette somme comme tu l’entendras. J’ai chargé Estève de te remettre 200.000 francs aussitôt que le contrat de la maison Julien sera fait. J’ai ordonné que l’on paierait ta parure de rubis, laquelle sera évaluée par l’Intendance, car je ne veux pas de volerie de bijoutiers. Ainsi voilà 400.000 francs que cela me coûte.
J’ai ordonné que l’on tint le million que la liste civile te doit, pour 1810, à la disposition de ton homme d’affaires, pour payer tes dettes.
Tu dois trouver, dans l’armoire de Malmaison, 5 à 600.000 francs ; tu peux les prendre pour faire ton argenterie et ton linge.
J’ai ordonné qu’on te fit un très beau service de porcelaine ; l’on prendra tes ordres pour qu’il soit très beau.
(Lettres à Joséphine)
Paris, 8 janvier 1810
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie le projet de traité avec le roi de Westphalie, avec les modifications suivantes:
1° Je ne puis donner la souveraineté du Hanovre au roi de Westphalie, parce que je n’ai point cette souveraineté; mais je puis lui céder le Hanovre et mes droits sur cette province; c’est tout ce que je puis faire.
2° Il faut mettre à l’artic1e 8 : « La première série sera payable en 1813, à raison de quatre bons par trimestre. Les quatre bons du premier trimestre devront être payés le 30 janvier; les quatre bons du deuxième trimestre, le 30 avril; les quatre bons du troisième trimestre, le 30 juillet; et les quatre bons du quatrième trimestre, le 30 octobre. La deuxième série sera payée de la même manière en 1814, et ainsi de suite jusqu’en 1822. L’intérêt sera payé à 5 pour 100, à dater du 1er janvier 1810, à Paris, par un banquier qui sera désigné par le roi de Westphalie, deux fois par an, à raison de 400,000 francs le 31 juillet, et de 400,000 francs le 31 décembre. Les mêmes payements auront lieu en 1811 et en 1812. En 1813 l’intérêt sera payé de même, mais seulement pour neuf séries; en 1814 il ne sera payé que pour huit séries, et ainsi de suite jusqu’à entière extinction.
Le banquier du Roi payera les intérêts à la caisse du domaine extraordinaire, qui, si elle a vendu ces bons, donnera au banquier la liste des personnes qui en seront propriétaires.
Article 10 : mettre que le contingent pourra être fixé à 20,000 hommes d’infanterie, à 4,000 de cavalerie et à 2,000 d’artillerie et sapeurs.
Je ne comprends pas l’article 3. Le revenu net des biens du Hanovre est de 5,200,000 francs, sur lesquels j’ai donné 4,559,000 francs ; il ne reste donc plus que 641,000 francs au lieu de 1,200,000 francs. Les 4,559,000 francs des biens du Hanovre donnés par l’Empereur, ou compris dans la quatrième classe encore à donner, seront reconnus par le roi de Westphalie, lequel s’engagera à les maintenir à perpétuité irrévocablement, et à en favoriser la vente. Le surplus des domaines existant en Hanovre sera laissé au Roi. Les domaines accordés ne seront soumis à aucune imposition pendant dix ans, après lesquels ils seront soumis aux mêmes impositions que les autres biens du pays. Par cette rédaction, je laisse au Roi 6 à 700,000 francs de domaines encore disponibles.
Paris, 8 janvier 1810.
A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, je vois avec plaisir, par la lettre que vous m’avez écrite de Saarbrücken, que vous avez voyagé jusque-là sans accident.
Je désire que le reste de votre voyage soit également heureux pour la Reine et pour vous; et je serai satisfait d’apprendre bientôt l’arrivée de Votre Majesté dans la capitale de ses États.
Paris, 8 janvier 1810
A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart
Monsieur mon Frère, je reçois la lettre que Vous m’avez écrite d’Épernay. Je vois avec plaisir que Votre Majesté a été satisfaite du séjour qu’elle vient de faire dans ma capitale. Je suis fâché de n’avoir pu la voir avant son départ. Les affaires d’Allemagne vont être incessamment terminées, et j’espère que Votre Majesté sera satisfaite des arrangements qui seront pris à ce sujet.
Paris, 9 janvier 1810
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, répondez au ministre de Naples que les choses ne peuvent pas être ainsi; que les dettes sur mon trésor de France sont constatées et n’ont besoin d’aucune vérification, puisque c’est de l’argent avancé en France; que les autres datent du moment même où j’ai cédé le pays; que des mesures doivent être prises sur-le-champ pour les acquitter, ou qu’on doit s’attendre que je donnerai des ordres à mes généraux pour me solder par mes mains; que les engagements qu’on prend avec moi sont sacrés et que je sais les faire respecter, même des princes les plus puissants; que le règlement de ces comptes est nécessaire pour régler les comptes du trésor public, de la Légion d’honneur et autres établissements; qu’il ne s’agit pas de gagner du temps, mais d’arriver à une prompte conclusion.
Vous répondrez au général Ver Huell que les satisfactions données pour l’attentat commis par l’officier hollandais ne sont pas suffisantes; qu’insulter à mon pavillon est un crime d’État à cause des conséquences; que je ne saurais être plus mécontent des officiers hollandais, qui ne montrent du zèle et de l’activité que contre mon pavillon.
Répondez à M. de Cetto que je ne saurais être satisfait de son mémoire; que ce n’est point avec des mots et des exposés de principes qu’on gouverne les nations; que la constitution actuelle du Tyrol ne peut convenir; que les moyens de la Bavière pour y faire la police et faire respecter les lois sont nuls; que ce pays a été brisé dans ses habitudes et dans ses institutions; que le Tyrol se serait révolté contre la Maison d’Autriche si elle eût agi comme les Bavarois; que c’est en y laissant des états et des institutions sanctifiés par le temps que la Maison d’Autriche s’est attaché les habitants; que, si je me mêle des affaires de la Bavière dans ce pays, c’est que cela importe à la sûreté de la Confédération; que je ne puis consentir à laisser le Tyrol dans la situation où il se trouve; qu’il est indispensable que la Bavière lui donne une constitution qui se rapproche des habitudes et des coutumes des montagnards, et un gouvernement central qui parle à leur imagination, les attache et leur retrace la forme de gouvernement que leur avait donnée l’Autriche en leur donnant un prince de son sang; qu’il faut prendre des mesures promptes pour rompre les liens qu’aurait le Tyrol avec l’Autriche et y établir une police sévère et active; mais que, si le gouvernement bavarois se sert de phrases et de discussions de principes, le Tyrol se révoltera de nouveau et inquiètera la Bavière et la Confédération. Celte affaire est très importante, et je désire pouvoir retirer mes troupes du Tyrol. Parlez-en au Roi lui-même, et avancez la négociation.
Paris, 9 janvier 1810
A M. Gaudin, duc de Gaète, ministre des finances à Paris
Il se fait à la police deux perceptions : une perception sur les passeports et une perception pour les ports d’armes.
En 1808, il a été délivré 637,000 passeports qui, à 2 francs chaque, devaient faire 1,274,000 francs; mais la police en déduit 82 centimes pour la régie du timbre, 7 centimes et demi aux préfets pour indemnité de non-valeurs dans la perception; ce qui fait que le produit de cette année n’a été que de 712,987 francs. Sur cette somme le ministre ôte encore 221,000 francs pour fourniture de papier; le papier coûte 3 sous la feuille; faites-moi connaître si cela n’est pas trop cher et à quel prix il fournit le timbre. Si l’on portait cette charge de 2 francs à 10, on se ferait une ressource de 6 millions, qui, bien administrée, pourrait en rendre 5 au trésor public. Vous me ferez un rapport là-dessus.
Le droit de port d’armes se paye 10 francs; on a accordé cette année 44,000 permissions; ce qui a fait 440,000 francs. Il est clair qu’il n’y aurait aucun inconvénient à porter le droit à 30 francs; ce qui pourrait faire une ressource de 1,200,000 francs.
En Italie, ces deux branches de revenu ne laissent pas d’être avantageuses.
Faites-moi connaître si on ne pourrait pas faire entrer cela dans les finances, si la régie ne pourrait pas fournir le papier pour l’une et l’autre espèce de permission, et si enfin cela ne serait pas susceptible d’une augmentation.
Paris, 9 janvier 1810
A M. Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police générale, à Paris
Monsieur le Duc d’Otrante, j’ai signé les décrets qui reçoivent vos comptes des dépenses secrètes pour l’exercice 1808. En les examinant, j’ai trouvé quelques articles susceptibles d’observations, et je vous en fais part pour que désormais ces petites irrégularités n’aient plus lieu. Dans le compte général des dépenses secrètes, vous portez au chapitre des Dépenses arriérées 21,000 francs qui appartiennent au chapitre des frais de police des préfets. Il est vrai que, si vous les aviez portés dans ce dernier chapitre, la dépense eût alors dépassé le crédit mais le virement que vous avez fait pour remédier à cet inconvénient n’est pas régulier. Vous n’avez pas joint aux quittances la procuration qui a dû autoriser le sieur. . . . à toucher à votre caisse le traitement du gouverneur général de Paris. Vous n’avez pas signé pour acquit les bons de votre traitement supplémentaire. Enfin, il y a une légère erreur de 1 franc 45 centimes dans le compte du barème fait au sieur. . . . . n° 94, chapitre III, article 2, état n° 16. Dans vos comptes du Droit de port d’armes et du Produit des passeports, je vois que vous avez laissé à la disposition du préfet de police, d’un part 8,000 francs, et de l’autre 2,769 francs pour remboursement de dépenses étrangères, et la perception de ces droits. Ceci n’est exact, et ces dépenses devaient être imputées sur d’autres fonds. Enfin je pense que le prix de 3 sous par feuille, auquel vous avez réduit les frais de fabrication du papier à passeport, doit être encore susceptible de réduction.
Quant à la rétribution imposée sur les journaux, je vois que vous payez sur ce produit, indépendamment des pensions que j’ai accordées, 6,000 francs à MM. Daunou, Lemontey, Chénier, pour indemnités de leurs travaux sur l’histoire de France ; 9,000 francs au sieur Esménard pour un travail particulier, et divers secours à des hommes de lettres. Ces hommes les méritent, mais vous ne devez pas les donner sans ma signature; c’est la règle.
Paris, 9 janvier 1810.
Au comte Molé, directeur général des ponts-et-chaussées, à Paris
Je suis instruit que le préfet de Seine-et-Marne, propriétaire d’une usine dans ce département, détourne des fonds destinés à la reconstruction du pont de Souppes et les emploie à des travaux qui donnent de l’eau à son usine; qu’il se dispense aussi de l’entretien et des réparations à faire à une chaussée pour conserver une quantité d’eau suffisante. Envoyez un auditeur, ayant votre confiance, pour faire une enquête sévère sur cet objet, sans que le préfet, le sieur Lagarde, en soit instruit, ce préfet ayant beaucoup de protections dans les bureaux.
Paris, 9 janvier 1810
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, dirigez la division que commande le général Rouyer sur Châlon, où l’on prendra des moyens pour l’embarquer jusqu’à Tarascon. De là, elle se rendra en Catalogne, sous les ordres du duc de Castiglione. Ce sera donc un renfort de 5,000 hommes, qui sera utile au duc de Castiglione.
Paris, 9 janvier 1810.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Je trouve les prétentions qui s’élèvent entre les généraux et les auditeurs ridicules. Reprenez vertement les deux auditeurs en question, et écrirez à M. Dauchy pour qu’il prévienne à l’avenir ces abus. J’ai accordé la Légion d’honneur qu’a demandée le maréchal Marmont pour sept des principaux habitants de la Dalmatie. Je trouve la demande de quinze mille fusils à donner aux Croates bien prématurée et bien hasardée; il faut bien se garder d’en rien faire. On pourrait tout au plus en donner là une compagnie par régiment. Le maréchal Marmont est-il sûr que ces gens-là ne s’en serviront pas contre lui ?
Il ne faut pas les armer avant qu’on les connaisse et qu’on en soit sûr.
Qu’on en arme un millier d’hommes, et pas plus. Témoignez au maréchal Marmont que cette légèreté dans une affaire de cette importance me parait fort extraordinaire.
Paris, 9 janvier 1810.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, écrivez au maréchal Marmont qu’il ne faut pas que, pour économiser les ressources du pays, il affaiblisse ses corps en renvoyant ses malades sur les derrières, parce que ces malades s’en iront en France; qu’il faut qu’il établisse des hôpitaux régimentaires.
Écrivez au vice-roi de faire rentrer en Italie tous les régiments français qui étaient à l’armée d’Allemagne, et de les cantonner dans des garnisons définitives, sur le pied de paix. Recommandez-lui de choisir des cantonnements où ils puissent passer l’été et par conséquent très sains. L’ancienne armée de Dalmatie seule restera dans les provinces illyriennes.
Ordonnez également qu’on retire du Tyrol les troupes qui y sont inutiles, et d’y laisser de préférence des Italiens, les pertes étant plus faciles à réparer en Italie.
Demandez un projet de répartition de l’artillerie de l’armée d’Italie entre les places, telles que Palmanova, Mantoue, Pavie, etc. Les troupes de cette armée doivent être mises sur le pied de paix.
Donnez ordre au maréchal Macdonald de se rendre à Paris. Le général Grenier restera comme inspecteur.
Enfin prescrivez des mesures pour mettre de l’économie dans les dépenses.
Donnez l’ordre que tout ce qu’il y aurait à l’armée d’Italie faisant partie des régiments d’Isembourg et de la Tour d’Auvergne retourne à Naples.
Paris, 9 janvier 1810.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris
Je vous prie de me remettre un état de la situation de la division Reynier, du 8e corps, des brigades de dragons et de tout ce qui est dirigé sur l’Espagne, artillerie, équipages, avec le lieu où cela est, jour par jour. J’ai besoin de cet état pour faire mes combinaisons.
Paris, 9 janvier 1810
A Mme la maréchale duchesse de Montebello, à Paris
Ma Cousine, je viens de nommer le général Kirgener commandant du génie de ma Garde, et je suis aise d’avoir fait par là une chose qui vous soit agréable.
9 janvier 1810
Note pour le général Savary, duc de Rovigo, commandant la gendarmerie d’élite
Il parait que le prêtre Guillevic (recteur de Ploemeur, lors de la guerre des Chouans, ami de Cadoudal, réfugié en Angleterre, près du comte d’Artois), vendéen connu, était à la parade. Des hommes qui le connaissent l’ont vu. Prenez des mesures pour le saisir.
(Brotonne)
Paris, 9 janvier 1810
A Napoléon, prince royal des Deux-Siciles, à Naples (Napoléon-Achille, fils aîné de Murat – 1801-1847)
Mon neveu, j’ai vu avec plaisir les expressions de votre attachement pour moi et la preuve de vos progrès dans la lettre que vous m’avez écrite, à l’occasion du changement d’année. Vous ne pouvez point douter des sentiments avec lesquels je suis votre bon oncle
(Brotonne)
Paris, 9 janvier 1810
Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris
J’ai des renseignements que le commerce de Marseille se plaint de mon consul de Voize, à Tunis. Ordonnez une sévère enquête sur cet objet et sachez ce qui en est.
(Brotonne)
Paris, 9 janvier 1810
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le duc de Cadore, faîtes-moi un projet de réponse à cette lettre. Écrivez au comte de Saint-Marsan que je désirerais beaucoup qu’un arrangement définitif eût lieu pour le paiement des contributions, afin que je ne sois pas obligé de garder une pareille quantité de troupes à Magdebourg et sur les frontières de la Prusse.
(Brotonne)
Paris, 10 janvier 1810
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, vous trouverez ci-joint un rapport du ministre des finances et un autre du ministre de l’intérieur sur le grand objet de nos relations actuelles avec l’Amérique. Je désire que vous me fassiez un rapport sur l’histoire de nos relations avec les États-Unis depuis le traité de Mortefontaine, et que vous y joigniez toutes les pièces originales, traduites en français, dont parlent les deux ministres. Joignez-y aussi les principales notes du ministre d’Amérique, afin que je voie bien quelle est la situation présente de nos rapports avec l’Amérique et le parti que j’ai à prendre. Ayant peu de confiance en Turreau, qui, d’ailleurs, a quitté la France depuis longtemps, je désire changer la légation, ou du moins envoyer en Amérique un homme de confiance qui connaisse mes intentions et qui soit assez adroit pour donner l’impulsion convenable aux affaires importantes dont je voudrais le charger. Ayez plusieurs conférences, si cela est nécessaire, avec le ministre d’Amérique ainsi qu’avec le secrétaire de légation qui vient d’arriver de Londres, et remettez-moi un rapport bien détaillé sur cette portion importante de la politique actuelle. Enfin faites-moi connaître votre opinion sur ce qu’il conviendrait de faire pour sortir de la position où nous nous trouvons. Vous joindrez à votre rapport la copie des différents actes que j’ai publiés et qui règlent notre législation des neutres, ainsi que les actes de l’Angleterre sur ce sujet, traduits également en français.
Toutes les mesures que j’ai prises, comme je l’ai déjà dit plusieurs fois, ne sont que des mesures de représailles. Je ne reconnais aucune des prétentions des Anglais sur les neutres, ce qu’ils appellent leur code maritime. Les Anglais eux-mêmes n’ont jamais eu la prétention de me le faire reconnaître. Cette prétention aurait été sans but, puisque le code n’est dirigé que contre la France. Cependant l’Amérique et les puissances du Nord n’ont pas non plus reconnu les prétentions de l’Angleterre, ou du moins ne les ont reconnues qu’en partie. La législation maritime de l’Angleterre, jusqu’à ces dernières années, était tyrannique, mais elle n’était pas totalement insupportable. Les Anglais ont tout culbuté en s’arrogeant le droit de déclarer en état de blocus tons les ports d’un pays, les côtes et un empire tout entier. C’est interdire tout commerce et ne plus reconnaître de neutres pour les pays qu’elle veut mettre en état de blocus. Je n’ai rien dit de l’influence que l’Angleterre prétendait exercer sur les neutres; ce n’est qu’à la nouvelle extension donnée au droit de blocus que j’ai opposé le décret de Berlin, et même le décret de Berlin ne doit être considéré que comme un blocus continental et non maritime; car c’est ainsi qu’il a été exécuté. Je ne le regarde en quelque sorte que comme une protestation et une violence opposée à une violence.
Il n’a été réellement exécuté que pour Hambourg, le Weser et les côtes du continent, et des déclarations ont été données aux neutres portant que son exécution ne s’étendrait point en pleine mer. Jusque là il y avait peu de mal; les neutres entraient encore dans nos ports ; mais les ordres du conseil de la Grande-Bretagne ont nécessité mon décret de Milan, et dès lors, il n’y a plus eu de neutres. Ce décret n’a qu’un but, c’est celui de me mettre à l’abri, moi et les autres nations, du droit intolérable que s’arrogeait l’Angleterre d’imposer un octroi de navigation sur le commerce et les vaisseaux de toutes les nations, prétention par laquelle elle traitait la mer comme je puis traiter la Seine, l’Escaut et le Rhin. Cette prétention exigeait l’interdiction de tout commerce, et l’on ne devait calculer aucune conséquence quand il s’agissait de s’y opposer. On m’assure aujourd’hui que les Anglais se sont relâchés, qu’ils ne lèvent plus de taxes sur les bâtiments : faites-moi connaître s’il y a un acte authentique qui l’annonce; et, s’il n’y en a pas, faites-moi connaître si le fait est vrai; car, une fois que je serai assuré qu’un octroi de navigation ne serait point établi par l’Angleterre, je pourrai me relâcher sur bien des choses.
Je ne serais point éloigné de signer un traité avec l’Amérique, par lequel elle s’engagerait, 1° à ne jamais souffrir que, sous aucun prétexte, il fût mis par l’Angleterre un droit sur son commerce et ses bâtiments; 2° à ne jamais souffrir que l’Angleterre lui interdise le commerce de la France sous prétexte du droit de blocus ou tout autre prétexte, attendu qu’il est possible que certains points soient bloqués, mais que tout un empire ne saurait l’être; 3° à ne jamais souffrir que ses bâtiments, pour arriver en France, soient obligés par les Anglais à relâcher dans quelqu’un des ports des possessions britanniques. Moyennant ces trois conditions, je pourrais, de mon côté, déclarer, 1 ° que mes corsaires et bâtiments de guerre n’exerceront aucune visite sur les bâtiments américains, si ce n’est la visite nécessaire pour vérifier si le bâtiment est réellement américain et n’appartient point à une nation ennemie; 2° que les vaisseaux américains seront reçus dans mes ports et soumis seulement aux droits de douanes ordinaires, pourvu toutefois qu’ils viennent directement des États-Unis, d’un autre port de France, d’un pays allié de la France, ou d’un pays neutre; car je ne puis consentir à admettre des bâtiments américains qui viendraient des ports de l’Angleterre.
Je trace ici ces idées à la hâte; elles seront rectifiées quand j’aurai sous les yeux toutes les pièces et le rapport que vous devez me faire; mais, pour que vous ayez des bases pour votre travail, j’ai voulu vous faire connaître mes principales idées. Vous sentez l’importance de garder sur cet objet le plus grand secret. Présentez-moi votre rapport le plus promptement possible; les matériaux du travail que je vous demande doivent exister dans votre ministère.
Paris, 10 janvier 1810
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le duc de Cadore, j’ai reçu l’état des consuls qui sont en France. Faîtes-moi connaître le traitement qu’ils touchaient à l’étranger et celui dont ils jouissent en France.
(Brotonne)
Paris, 10 janvier 1810.
Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris
Mon sieur le Comte Bigot de Préameneu, donnez ordre au général Miollis de faire emballer toutes les archives du Saint-Siège et de les envoyer en France sons bonne escorte.
Paris, 10 janvier 1810.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre secrétaire d’État, à Paris
Je vous envoie des notes de M. Bacher. Écrivez au conseiller d’État Beugnot pour qu’il fasse apposer le séquestre sur les biens des individus au service de Prusse et d’Autriche, qu’il prononce le rappel de ceux qui seraient au service de ces deux puissances et de l’Angleterre, qu’il fixe un délai après lequel leurs biens seraient séquestrés et leurs personnes déclarées inhabiles à succéder.
Donnez une instruction détaillée au comte Beugnot, parce que ce qu’il fera servira de règle pour les autres. Il faut donc que ce soit bien conforme aux principes.
(Lecestre)
Paris, 11 janvier 1810
QUESTIONS AU COMITÉ DES ÉVÊQUES.
Ce comité, nommé le 16 novembre 1809, était ainsi composé: le cardinal Fesch, président; le cardinal Maury, archevêque-évêque de Montefiascone; Louis-Mathias de Barral, archevêque de Tours; Jean-Baptiste Canavery, évêque de Verceil; Jean-Baptiste Bouclier, évêque d’Evreux; Charles Mannay, évêque de Trèves; Jean-Baptiste Duvoisin, évêque de Nantes. L’abbé Fontana, supérieur des Barnabites, et l’abbé Emery, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice, furent adjoints au comité; mais on ne trouve pas leur signature au bas du mémoire rédigé par les évêques en réponse aux questions de l’Empereur. Un résumé de !a réponse des évêques est annexé à la lettre à Bigot de Préameneu du 13 janvier.
PREMIÈRE SÉRIE
1° Le gouvernement de l’église est-il arbitraire ?
2° Le Pape peut-il, par des motifs d’affaires temporelles, refuser son intervention dans les affaires spirituelles ?
3° et 4°. Il est hors de doute que, depuis un certain temps, la cour de Rome est resserrée dans un petit nombre de familles; que les affaires de l’Église y sont examinées et traitées par un petit nombre de prélats et théologiens, pris dans de petites localités des environs, et qui ne sont pas à portée de bien voir les grands intérêts de l’Église universelle, ni d’en bien juger.
Dans cet état de choses, convient-il de réunir un concile ?
Ne faudrait-il pas que le consistoire ou conseil particulier du Pape fût composé de prélats de toutes les nations pour éclairer Sa Sainteté ?
5° En supposant qu’il soit reconnu qu’il n’y ait pas de nécessité de faire des changements dans l’organisation actuelle, l’Empereur ne réunit-il pas sur sa tête les droits qui étaient sur celle des rois de France, des ducs de Brabant et autres souverains des Pays-Bas, des rois de Sardaigne, des ducs de Toscane, etc., soit pour la nomination des cardinaux, soit pour toute autre prérogative ?
DEUXIÈME SÉRIE. – QUESTIONS PARTICULIÈRES A LA FRANCE.
1° Sa Majesté l’Empereur ou ses ministres ont-ils porté atteinte au Concordat ?
2° L’état du clergé de France est-il, en général, amélioré ou empiré depuis que le Concordat est en vigueur ?
3° Si le Gouvernement français n’a pas violé le Concordat, le Pape peut-il arbitrairement refuser l’institution aux archevêques et évêques nommés, et perdre la religion en France comme il l’a perdue en Allemagne, qui, depuis dix ans, est sans évêques ?
4° Le Gouvernement français n’ayant point violé le Concordat, si, d’un autre côté, le Pape refuse de l’exécuter, l’intention de Sa Majesté est de regarder ce Concordat comme abrogé : mais, dans ce cas, que convient-il de faire pour le bien de la religion ?
TROISIÈME SÉRIE.
1° Sa Majesté, qui peut, à juste titre, se considérer comme le chrétien le plus puissant dans le rang suprême auquel la Providence l’a élevé, sentirait sa conscience troublée si elle ne portait aucune attention aux plaintes des églises d’Allemagne sur l’abandon dans lequel le Pape les laisse depuis dix ans. Sa Majesté le conjure d’y rétablir l’ordre. L’archevêque prince Primat vient encore de lui adresser ses représentations à cet égard. Si le Pape continue, par des raisons temporelles ou par des sentiments haineux, à laisser ces églises dans l’état de perdition et d’abandon, Sa Majesté désire, comme suzerain de l’Allemagne, comme héritier de Charlemagne, comme véritable empereur d’Occident, comme fils aîné de l’Église, savoir quelle conduite elle doit tenir pour rétablir le bienfait de la religion chez les peuples d’Allemagne.
2° Il est besoin qu’il y ait une nouvelle circonscription d’évêchés dans la Toscane et dans d’autres contrées; si le Pape refuse de coopérer à ces arrangements, quelle marche Sa Majesté devrait-elle suivre pour les régulariser ?
3° La bulle d’excommunication du 10 juin 1809 étant contraire à la charité chrétienne ainsi qu’à l’indépendance et à l’honneur du trône, quel parti prendre pour que, dans des temps de trouble et de calamité, les Papes ne se portent pas à de tels excès de pouvoir ?