Correspondance de Napoléon Ier – Octobre 1811

Anvers, 1er octobre 1811.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Le général Clarke
Le général Clarke

Monsieur le Duc de Feltre, je réponds à votre lettre du 28 sep­tembre [1]bureau de l’artillerie. J’ai vu avec intérêt le projet de plate­forme des batteries à plaque. Il faudrait ordonner que dans une batterie de six mortiers le heurtoir ne fût pas placé partout de même, de sorte que la ligne de tir variât d’un certain nombre de degrés, et qu’un commandant de batterie put tirer l’un ou l’autre mortier, selon qu’il aurait à tirer d’un coté ou de l’autre, et conserver ainsi dans tous les cas l’avantage de faire tirer dans la ligne du tir. Aujourd’hui on a l’habitude de faire placer la plate-forme parallèlement, de sorte que, pour faire tirer à 15 degrés, à droite ou à gauche, il faut placer le mortier en écharpe, inconvénient qui peut être évité par la précau­tion que je viens de prescrire. En effet, la plate-forme tirant sur des vaisseaux, qui sont des objets mobiles, il n’y a pas de raison pour leur donner à tous une même direction. L’artillerie fera une instruction qui fera connaître de combien de degrés on peut varier la posi­tion du heurtoir dans une batterie de mer. A cette observation il faut en joindre une autre, c’est que je pense que la plate-forme ne doit pas être un parallélogramme, mais un trapèze. En effet, si l’on devait tirer dans la ligne de tir perpendiculairement au heurtoir, un paral­lélogramme serait convenable; mais, puisqu’on doit pouvoir tirer à 15 ou 20 degrés à droite et à gauche, la forme d’un trapèze est préférable; de sorte que les lambourdes, au lieu d’être égales, seront toutes inégales, et je serais porté à penser que la dernière lambourde devrait être double de la première. Faites faire un mémoire là-dessus par des officiers d’artillerie, car ils savent tous par expérience qu’en tirant à droite ou à gauche de la plate-forme le recul jette le mortier hors de la plate-forme; ce qui ne serait pas si cette plate-forme était un trapèze.

 

Anvers, 2 octobre 1811

Le vice-amiral Decrès
Le vice-amiral Decrès

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Comte Decrès, j’ai sur le chantier treize vaisseaux, deux sont pour le compte de cette année; il n’en reste donc plus que onze; sur ces onze, il m’en faut six pour l’année prochaine il me reste plus que cinq ; ce qui ne peut me fournir les six vaisseau de 1813. D’ailleurs mon intention serait de construire chaque année huit vaisseaux au lieu de six. En effet, je m’étais contenté de six parce que je craignais la difficulté des équipages; mais huit équipages hollandais sont tout prêts, et en changeant mes projets sur la flottille de Boulogne j’y trouverais au moins la valeur de six équi­pages. Je désirerais donc, s’il était possible, voir mettre à l’eau demain les deux vaisseaux qui sont prêts et les faire remplacer sur-le-champ par deux vaisseaux de 80 : cela aurait aussi le bon effet de deux vaisseaux lancés en ma présence.

Le bassin peut contenir dix-huit vaisseaux. Je n’en ai que seize et, quand même le Duguesclin devrait encore aller au Rupel, le Rupel a des emplacements particuliers pour trois ou quatre vaisseaux. Sur les huit vaisseaux à mettre à l’eau l’année prochaine, je voudrais que quatre pussent l’être dans le courant du mois de mars, de sorte qu’au mois de juin j’aie vingt-quatre vaisseaux français.

Proposez-moi aussi des mesures, soit pour se procurer du bois, soit pour faire venir le bataillon d’ouvriers militaires qui est à Bou­logne, enfin toute mesure tendant à donner une nouvelle activité à ce chantier, puisqu’il est réellement le seul que l’on puisse mener aussi vite et aussi loin que l’on veut.

Proposez-moi sur-le-champ la formation de l’équipage du Trajan et des deux vaisseaux qui vont être mis à l’eau.

 

Anvers, 3 octobre 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Comte Decrès, je vous renvoie le rapport de la mission sur les expériences des chameaux sur le Rivoli, que j’ai lu avec un singulier intérêt. Je désire que l’on profite de cette expérience, et savoir si l’on ne pourrait pas s’en servir pour faire sortir des vaisseaux du Havre, de la Loire, et pour faire passer, si cela était nécessaire, un vaisseau de l’île de Ré dans la Gironde.

 

Anvers, 3 octobre 1811

Au vice-amiral comte Missiessy, commandant l’escadre de l’Escaut, à Anvers

Portrait de lamiral Missiéssy
Portrait de lamiral Missiéssy

Monsieur le Comte Missiessy, l’un de nos vice-amiraux, comman­dant notre escadre de l’Escaut, ayant été satisfait de ce que nous avons vu sur notre escadre, nous vous chargeons, par la présente, de le faire connaître par un ordre du jour aux officiers et aux équi­pages. Votre ministre de la marine vous communiquera les diffé­rentes grâces que nous avons voulu leur accorder.

Nous désirons que notre escadre, augmentée de l’Illustre, formant ensemble dix-sept vaisseaux et plusieurs frégates, soit constamment en appareillage et en disposition de sortir, et que, toutes les fois que le temps le permettra, une division navigue dans les passes, sou­tenue par d’autres divisions à différentes hauteurs, notre but étant d’exercer nos marins aux manœuvres, de les rendre pratiques du fleuve et de tenir les escadres ennemies toujours en haleine.

Il est nécessaire, pour l’exécution de nos projets, qu’entre le Texel et l’Escaut, l’ennemi soit obligé d’avoir une escadre de vingt-cinq à trente vaisseaux. Nous chargerons notre ministre de la marine de nous rendre un compte journalier de vos opérations.

Il est également dans nos intentions que vous désigniez les douze meilleurs vaisseaux pour une expédition, et qu’ils soient munis de beaucoup de choses qui nous ont paru manquer lors de notre revue, et du nombre de mois de vivres suffisant pour pouvoir être prêts à chaque instant à exécuter nos ordres. Notre ministre de la marine vous fera connaître plus en détail nos intentions.

Nous ne doutons pas de votre zèle et du talent que vous déploierez pour répondre à la confiance que nous avons mise en vous.

 

Anvers, 3 octobre 1811

Eugène de Beauharnais
Eugène de Beauharnais

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, j’ai reçu l’état par lequel vous me faites connaître ce qui manque aux différents régiments de l’armée d’Italie pour que chaque bataillon soit au complet de 840 hommes. Il est nécessaire que vous ne dérangiez rien à ces bataillons, mais que vous les égalisiez et les fassiez tiercer pour qu’ils soient tous égaux en qualité de sous-officiers et soldats anciens et nouveaux; de manière que vous puissiez prendre les bataillons indistinctement. Vous ferez ôter des 5e batail­lons ce qui est disponible pour les répartir dans les quatre premiers. C’est dans cette situation que vous ferez exercer mes régiments. En en passant la revue, vous m’enverrez un état de situation qui fasse connaître la force de chaque bataillon, s’il venait à recevoir l’ordre de partir, ce qui est aux hôpitaux ou détaché. Il ne vous échappera pas que le mois d’octobre est le mois où il y a le plus de maladies en Italie : le nombre en est triple de ce qu’il est au printemps. Je vous enverrai des hommes pour compléter les quatre bataillons de chaque régiment; et, si le cas arrivait de faire partir des troupes, je me déciderais, selon les circonstances, à faire partir deux, trois ou quatre bataillons; mais cela ne peut être décidé qu’au dernier moment. Il faut qu’à vos exercices les quatre bataillons s’y trouvent; je préfère prendre les quatre bataillons, ne fussent-ils qu’à 600 hommes, à voir le 4e au rebut. En passant votre revue, vous devez faire rentrer dans les rangs les caporaux et sergents qui n’auraient pas deux ans de service, à moins que ce ne soit des caporaux-fourriers sortant des lycées ou des hommes qui soient très lettrés.

En passant votre revue, faites-moi aussi connaître la situation de la comptabilité, la qualité des draps qu’a fournis l’administration  de la guerre, enfin tout ce qui peut m’inléresser là-dessus.

 

Anvers, 3 octobre 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 25 septembre. Vous vous trompez lorsque vous pensez qu’en France les enfants trouvés sont au compte de l’État : ils ne coûtent rien à l’État; ce sont des dépenses communales et départementales. Les œuvres pies sont si riches en Italie, qu’il serait insensé de faire de cela une dépense communale et même départementale. Mais en Italie on a l’usage funeste de garder ces enfants jusqu’à leur majorité; en France, on ne les garde que jusqu’à l’âge de douze ans. Vous pourriez faire former un bataillon de tous ceux qui ont plus de quinze ans, comme je l’ai fait en France pour les bataillons de pupilles.

 

Gorcum, 6 octobre 1811

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Bigot de Préameneu, ministre des cultes (Julien Leopold Boilly)
Bigot de Préameneu, ministre des cultes (Julien Leopold Boilly)

Monsieur le Comte Bigot Préameneu, je vous renvoie vos lettres. Vous avez bien fait d’exiger que tous les évêques, même ceux qui n’avaient pas de bulles, rentrassent à leurs diocèses, et que personne ne restât à Paris. Ne souffrez la présence d’aucun à Paris. Renvoyez également mes aumôniers, hormis le cardinal et l’évêque de Ver­sailles, qui se trouve près de son diocèse. Envoyez-moi les lettres à signer pour les différents sièges vacants, afin de voir si le Pape veut ou non donner l’institution à mes évêques. Faites connaître aux évêques députés que je ne répondrai à aucune lettre, que je ne prendrai aucune décision, que lorsque mes évêques auront leurs bulles. Je suis trop vieux et trop accoutumé aux ruses italiennes pour me laisser duper par eux. Les évêques doivent insister là-dessus avec la plus grande force. Je ne recevrai même pas la députation, si elle ne rapporte les bulles d’institution de tous mes évêques; je ne renverrai le bref au Conseil d’État, pour être communiqué aux évê­ques, que lorsque tous les diocèses vacants auront leurs bulles. Il faut que la députation des évêques vous envoie un procès-verbal constatant qu’ils ont notifié au Pape que le décret s’applique à tous les évêchés de l’Empire, dont les États de Rome font partie.

 

Gorcum, 6 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Après avoir visité la Hollande, je compte me rendre à Wesel, à Venlo, à Juliers, pour visiter ces places. Donnez des ordres pour que les directeurs de génie et d’artillerie s’y trouvent.

 

Gorcum, 6 octobre 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je vous envoie une lettre du général Berthier. Vous verrez ce qu’il dit de l’exploitation de la forêt de Soccia. Il me semble qu’il serait fort inutile de faire flotter ces mâts jusqu’à Sagone. Cette idée est ridicule; il vaudrait mieux les envoyer par des gabares sur Ajaccio. Reste d’ailleurs à savoir le degré d’intérêt que la marine attache à avoir des arbres de cette longueur.

 

Utrecht, 7 octobre 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Il n’est rien dû à M. Percheron, payeur de la marine, qui a eu l’impertinence d’occuper une maison où il ne devait pas loger. Il ne devait pas l’occuper : d’abord parce que c’est celle du maréchal Soult, et que dès lors elle était acquise au général commandant le camp; 2° parce que cette maison était la plus belle de Boulogne sans exception, et qu’il n’appartenait pas à un payeur de s’y loger; il devait se rendre plus de justice; 3° parce que le camp n’a jamais cessé d’exister à Boulogne, et que le jour où il n’y aurait plus de camp, il n’y aurait plus de payeur de la marine, puisqu’il n’y aurait plus de flot­tille, et qu’il n’y a de troupes qu’à cause de cette flottille.

Bien loin de blâmer le duc d’Elchingen, je trouve qu’il a poussé trop loin la complaisance. Je l’aurais tancé vivement s’il m’eût dit que cela était par votre ordre. Il était logé à la citadelle, sans allocation, comme aurait pu l’être un capitaine, tandis que M. le payeur avait un palais et une grande cour.

Je ne suis pas content de ce que vous avez fait dans cette circonstance. Vous ne traitez pas bien mes maréchaux; ce n’est pas le moyen de leur donner de la considération et de les attacher au service. Vous ne devez pas tenir la balance entre un maréchal de l’Empire et un employé des finances.

Vous devez donc donner l’ordre au sieur Percheron de déloger sur-le-champ, de céder au maréchal Ney la maison qui lui est due, et vous ferez connaître à ce payeur qu’il est un impertinent de ne pas se loger conformément à son état, et qu’il ne lui est rien dû. N’étant pas le premier employé à Boulogne, mais le huitième ou le dixième, qu’il prenne le huitième ou le dixième logement.

Si le logement avait été occupé par le maréchal quand je suis passé à Boulogne, je l’aurais occupé. Ce payeur avait un logement quatre fois meilleur que le mien. Cela est de l’absurdité, et je suis surpris de voir que vous vous laissiez duper à ce point.

Le rôle du ministre de la guerre sur toute chose, dans une pareille discussion, était d’être pour le maréchal.

 

Utrecht, 8 octobre 1811.

Hugues-Bernard Maret, duc de Bassano.
Hugues-Bernard Maret, duc de Bassano.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, je vous envoie une nouvelle lettre du prince d’Eckmühl. Vous verrez qu’il a toujours des inquiétudes sur la Prusse. Il serait fâcheux que le comte Saint-Marsan se laissât jouer.

Je vous envoie également une lettre danoise dont je désire que vous fassiez votre profit. Envoyez donc un vice-consul à Kolberg et sachez ce qui s’y fait. Cette négligence de n’avoir personne à Kolberg est impardonnable.

 

Utrecht, 8 octobre 1811

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur le Comte Bigot de Préameneu, je ne veux point de Sulpiciens dans le séminaire de Paris. Je vous l’ai dit cent fois, je vous le répète pour la dernière; prenez des mesures telles que cette con­grégation soit dissoute.

 

Utrecht, 8 octobre 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris.

Jean-Gérard Lacuée de Cessac (1753 - 1841)
Jean-Gérard Lacuée de Cessac (1753 – 1841)

Je viens de passer en revue les 18e, 56e, 73e et 124e. Le 18e se plaint que ses tricots sont extrêmement mauvais, de sorte que des culottes faites depuis trois mois ne sont d’aucun usage, au lieu que des culottes faites avec du tricot qu’ils achètent, faites depuis dix-huit mois, sont bonnes. Ce régiment se plaint que les draps sont aussi mal teints : effectivement les habits sont blanchâtres. J’ai trouvé le 56e à peu près nu. Le 124e a encore 600 habits blancs. Vous lui avez donné pour 400 conscrits des habits bleus qui sont en magasin; le dépôt de ce régiment est à Abbeville; il avait des habits blancs dont il a habillé ses conscrits.

 

Utrecht, 9 octobre 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Le maréchal Berthier, prince de Neuchâtel et de Wagram (1753-1815) portrait de Chatillon Auguste de, d'après Pajou Augustin - Muzeo
Le maréchal Berthier, prince de Neuchâtel et de Wagram (1753-1815) portrait de Chatillon Auguste de, d’après Pajou Augustin – Muzeo

Mon Cousin, écrivez au roi d’Espagne que jusqu’à nouvel ordre il peut retenir à Madrid ce qui viendrait de France destiné pour l’armée du Midi, vu que cette armée n’en a pas besoin. Réitérez en même temps l’ordre que tout ce qui appartient à l’armée du Centre, et qui se trouve à l’armée du Midi, soit restitué sans délai à l’armée du Centre. Écrivez également à Sa Majesté Catholique que je donne des ordres pour que l’urgent qu’elle désire lui soit envoyé.

J’approuve l’arrêté qu’a pris le duc de Dalmatie pour lever des compagnies franches formées des Français qui sont en Andalousie.

 

Amsterdam, 12 octobre 1811

Au général comte Bertrand, gouverneur général des provinces illyriennes, à Zara

Monsieur le Comte Bertrand, je reçois votre lettre du 30 septembre. Faites donc mettre à Trieste deux frégates en construction. Faites passer des marchés, et qu’avant le mois de janvier prochain elles soient mises sur le chantier. Faites faire également des prépa­ratifs pour mettre en construction un vaisseau de ligne.

 

Amsterdam, 13 octobre 1811

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur le Comte Bigot de Préameneu, j’ai reçu les différentes lettres au Saint-Père pour l’institution des évêques : je crois qu’il faut faire l’opération toute à la fois. Présentez-moi des nominations pour tous les évêchés vacants, pour Verceil, Séez, etc. Le ministre des cultes d’Italie doit également me présenter des nominations aux évêchés italiens vacants. Il faut arranger les choses de manière qu’il y ait un évêque des États de Rome ou d’Italie et un de France; il faut également comprendre dans les présentations l’évêché de Bois-le-Duc. Par ce moyen, le Pape donnant des bulles à tous les évêques, le décret du concile se trouve bien ratifié et ne laisse plus aucun prétexte pour la suite.

 

Amsterdam, 14 octobre 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre que le 8e convoi de fonds continue sa marche et se dirige sur Valladolid, d’où les 800.000 francs destinés au roi d’Espagne et à l’armée du Centre partiront sous bonne escorte. Le reste du convoi continuera sa route pour Salamanque, pour remettre les 500,000 francs destinés à l’armée du Nord, les 300,000 francs destinés à la division Souham et les 1,500,000 destinés à l’armée de Portugal.  L’adjudant commandant Thierry aura soin de faire partir sous ses yeux, et avec une forte escorte, le convoi pour Madrid. Proposez-moi la distribution du 9e convoi et l’époque de son départ.

 

Amsterdam, 14 octobre 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, il n’y a à Danzig que 15,000 hommes. Mon intention est donc que vous fassiez partir en une seule colonne, et sous les ordres d’un bon commandant, du 20 au 25 octobre, le régiment de Bade et le régiment de Hesse qui sont l’un et l’autre à Stettin, avec leur compagnie d’artillerie, pour qu’ils se rendent sans délai à Danzig; ce qui augmentera la garnison de cette place de prés de 3,000 hommes. Vous ferez partir sans délai le 1er régiment polonais, qui est à Küstrin, pour se rendre à Posen et rejoindre son 4e bataillon. Ce régiment, que je destine à faire partie de la garnison de Danzig, tiendra jusqu’à nouvel ordre garnison à Thorn. Il sera entretenu à mes frais; mais, pendant le temps qu’il restera à Thorn, il sera nourri par le Grand-Duché ; il travaillera aux fortifications de Thorn. Il sera là à la disposition du général Rapp pour joindre sa division; ce qui portera à 21 ou 22,000 hommes disponibles les troupes sous les ordres du général Rapp. Vous ferez remplacer le régiment polonais à Küstrin par un régiment français que ferez partir de Magdeburg; de sorte que toute la division Dessaix se trou­vera réunie entre Stettin et Küstrin. Vous aurez soin de faire con­naître que ces mouvements sont commandés par la nécessité de remplir les vides que les maladies de l’automne ont faits dans les différentes garnisons.

 

Amsterdam, 15 octobre 1811.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Donnez ordre aux deux régiments de carabiniers, au 1er de cuiras­siers, au 8e et aux trois autres régiments de cuirassiers de se rendre à Cologne, eu partant douze heures après la réception de votre ordre. La division composée des deux régiments de carabiniers et du 1er ré­giment de cuirassiers se réunira à Cologne. La division composée des quatre régiments se réunira à Bonn.

Faites partir également douze pièces d’artillerie légère pour cha­cune de ces deux divisions. Ces pièces seront attelées par les chevaux les plus près, mais elles le seront définitivement par ce qui est dispo­nible des quatre bataillons du train qui sont en Allemagne.

Tous ces mouvements se feront sous le prétexte de passer ma revue. Le général Nansouty commandera ces deux divisions. Envoyez-y des généraux de brigade, de ceux qui étaient employés dans les cuiras­siers, de manière qu’il y ait au moins deux généraux de brigade pour les deux divisions. Mon intention est d’envoyer les deux divisions à Erfurt, après qu’elles auront passé ma revue; mais ceci est un secret, je désire qu’elles arrivent inopinément à Erfurt. Comme je suis bien aise effectivement de les passer en revue, je vous expédie une estafette extraordinaire pour que vous ne tardiez pas un moment à leur envoyer des ordres. Ces régiments, se trouvant à Metz et environs, auront peu de chemin à faire pour se rendre à Bonn et à Cologne. Le général Nansouty accélérera leur marche le plus possible.

Les carabiniers et le 1er régiment de cuirassiers laisseront leur 5e escadron. Les autres régiments de cuirassiers laisseront un dépôt. Vous préviendrez ces régiments que le but de leur réunion est spé­cialement de passer ma revue.

Je vous ai mandé que la 3e division, qui a servi à mon entrée à Amsterdam, est en route pour Munster.

P. S. Faites toutes les dispositions nécessaires pour l’organisation de ces divisions, forges, ambulances, officiers du génie, d’artillerie officiers d’état-major, adjoints, administration, etc. Mais, comme l’envoi de tout ce monde ne laissera pas que de faire du bruit à Paris contentez-vous d’en faire dresser les états, sans qu’on le sache, pour mettre cela en mouvement dans le courant de novembre. Ces divi­sions devant séjourner à Erfurt

 

Amsterdam, 18 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Donnez ordre dans les trois îles de Ré, d’Oléron et d’Aix, à Belle-Île, aux deux régiments de la Méditerranée, ainsi que dans tous les autres bataillons qui se complètent avec des conscrits réfractaires, à Toulon, en Corse, dans l’île de Walcheren, etc. , de faire l’état de tous les hommes qui ont déserté après avoir rejoint leur corps, et comptant déjà plus de six mois de services effectifs. Aussitôt que j’aurai cet état, mon intention est d’ordonner que ces hommes soient réunis pour un service spécial dans ces îles; car ce serait une duperie que de confondre ces hommes, qui connaissent déjà le service mili­taire et qu’on n’a pu y accoutumer, avec des jeunes gens qu’on peut espérer fixer à ce service lorsque la première répugnance sera vaincue.

 

Amsterdam, 18 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je reçois votre projet de décret sur l’admission des élèves d’artillerie. Il contient justement le contraire de ce que j’ai prescrit; par conséquent je ne l’adopte pas et m’en tiens au décret que j’ai pris. Faites-le exécuter. Toutes les fois que le génie civil ou le génie militaire auront pris à l’École polytechnique les élèves qui leur sont nécessaires, je ne m’oppose pas à ce que l’artillerie prennent ensuite les élèves de cette école qui se présenteraient pour ce service; mais ce qui m’importe c’est d’avoir toutes les places de l’artillerie remplies et pour cela de faire désigner dans les soixante lycées au moins quatre jeunes gens par lycée destinés pour l’artillerie. On les fera examiner et, lorsqu’ils justifieront des qualités nécessaires, on pourra les envoyer à Metz, si l’école est assez grande pour les recevoir, ou dans toute autre école.

L’école de Saint-Cyr ne doit pas fournir plus que je n’ai fixé. La ressource de cette école est précieuse pour l’infanterie ; il ne faut pas la fermer entièrement.

 

Amsterdam, 19 octobre 1811.

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Comte Decrès, après avoir vu la rade du Texel, ce port me parait plus important que je ne l’avais cru. La rade exté­rieure, où peuvent mouiller huit ou dix vaisseaux et dont la sortie est facile, est tellement rapprochée de terre qu’il est à l’abri de toutes les tentatives de l’ennemi, moyennant les ouvrages projetés; ce qui est une grande découverte, non-seulement pour le Texel, mais en­core pour les escadres de Flessingue et du Nord. Je désirerais que la Ville d’Amsterdam reçût un équipage français; que le Doggersbanck reçut un équipage hollandais, le Ruyter un équipage français, et l’Evertsen un équipage hollandais, et qu’il fût placé deux équipages hollandais sur les deux frégates; ce qui ferait neuf équipages hollan­dais au Helder et deux équipages français. On attacherait à chacun des équipages français quatre canonnières, ce qui ferait pour les équi­pages français huit canonnières, et à chacun des neuf équipages hol­landais quatre canonnières, ce qui ferait pour les équipages hollandais trente-six canonnières. Il y aurait donc quarante-quatre canonnières destinées à la formation des équipages et à la défense des différentes passes du Zuiderzee. A mesure que les équipages pourraient être accrus par la conscription et l’inscription maritime, on porterait les équipages des canonnières à six par vaisseau; ce qui emploierait 300 hommes par vaisseau pour les équipages des canonnières et exi­gerait que les équipages des vaisseaux fussent complétés à 1,000 ma­telots. On aurait alors dans le Zuiderzee soixante-six canonnières, qui seraient tenues toujours en mouvement pour l’instruction des conscrits et la formation des équipages. Les quatre frégates qui vont être mises à l’eau avant le mois de mars donneront lieu à la formation de quatre nouveaux équipages, auxquels on attacherait vingt-quatre canonnières. De sorte qu’au mois d’avril prochain on aurait au Texel, mouillés dans la rade extérieure, neuf vaisseaux, quatre bonnes frégates et deux frégates hollandaises, formant quinze équipages, dont dix hollandais et cinq français; ces quinze équipages auraient cent quatorze canonnières ou goélettes. On aurait donc l’avantage d’avoir une expédition qui menacerait l’Angleterre bien plus que toute autre expédition, et d’avoir une grosse flotte de transport.

Il serait nécessaire d’avoir un contre-amiral français de choix pour commander en second l’escadre; de diriger dès ce moment les cinq équipages de haut bord (les deux qui doivent monter les vaisseaux et les trois qu’emploieront les trois nouvelles frégates); enfin de former sur-le-champ les dix équipages hollandais, en en nommant les officiers et l’état-major, en y incorporant les bataillons de flottille  et en appelant la conscription; et de donner l’ordre sur-le-champ pour que les vaisseaux et frégates soient préparés à Medemblik, de manière à rejoindre le plus tôt possible au Texel. On m’a parlé de deux vaisseaux de la compagnie des Indes qui se trouvaient à Enkhuisen, à Harlingen ou au Helder. Il faut me présenter un rapport pour les faire mettre en état, parce qu’ils seront fort utiles à joindre comme écuries à cette expédition.

Quant aux constructions, je pense qu’il faut placer sans délai un vaisseau de 74 sur le chantier vacant à Amsterdam , et en mettre deux autres à mesure que les plus avancés seront mis à l’eau (ces trois vaisseaux remplaceront trois vaisseaux hollandais) ; qu’il faut mettre sur l’autre cale qui existe un brick, de sorte que l’année pro­chaine il y aurait sur le chantier d’Amsterdam trois vaisseaux, deux frégates et un brick; qu’il faut mettre sur le chantier de Medemblick une frégate, de sorte qu’en 1814 je pourrai rejeter sur de bons vaisseaux français des équipages parfaitement formés sur les vaisseaux actuels hollandais, et me servir des vaisseaux hollandais comme de grosses flûtes armées, pour compléter l’expédition.

J’aurai donc, en 1814, neuf vaisseaux de ligne de 74 et même de 80, du modèle français. Je dis de 80, parce que, du moment que l’escadre doit mouiller dans la grande rade, il n’y a aucune difficulté à en achever l’armement dans la grande rade et à la faire sortir du mauvais passage avec vingt pieds d’eau. J’aurai de plus neuf françaises, et de plus trois ou quatre bricks français; total, vingt et un vaisseaux de guerre français bons marcheurs; à quoi il faut ajouter neuf vaisseaux de guerre hollandais, trois vaisseaux de 50, deux frégates hollandaises et cinq corvettes ou gros transports; total : dix-neuf vaisseaux gros transports, et enfin une flottille de 100 canonnières; ce qui présente une expédition formidable, pouvant porter 20,000 hommes et 2,000 chevaux, et comptant cependant cinquante gros bâtiments; expédition qui, mouillée dans la grande rade, serait d’un immense résultat pour mes projets.

Je pense que cette expédition sera beaucoup mieux placée au Texel que si elle était dans l’Escaut, parce que, mouillée dans la grande rade du Texel, elle y est comme en pleine mer, presque à l’abri des places, et qu’il est impossible qu’une expédition de cinquante vaisseaux réunis au Texel n’en sorte pas quand on veut, soit avant Noël, soit à la fin de février, et qu’on ne peut pas en dire autant de l’Escaut.

Cela comporte la nécessité de mettre en état le Helder. Du côté de terre, j’ai vu peu de positions où un petit nombre d’hommes puisse défendre plus longtemps la rade, les magasins et le port contre une grosse armée. Dès le mois de décembre prochain mon escadre y sera à l’abri, et dans l’année prochaine le port de Nieuwe-Diep et tout le système seront parfaitement à l’abri.

Du coté de la mer, il est indispensable que vous ordonniez aux sieurs Blanken et Sganzin d’organiser sérieusement un projet qui sera discuté cet hiver et mis à exécution l’année prochaine. J’ai fait pour cet objet un fonds spécial de 4 millions, indépendant de votre budget, qui sera pris sur les fonds de Hollande et mis incessamment à Votre disposition

Ces projets sur le Helder rendent nécessaires des projets pour l’armement de la rade de Delfzyl. Je désire que vous m’apportiez demain les cartes et plans de cette rade, afin que je puisse établir un projet pour qu’une escadre venant du Texel, de Flessingue ou de Cherbourg, s’y trouve en tout temps en parfaite sûreté.

Je vous prie de m’apporter demain un rapport sur tous ces projets, avec un décret pour arrêter définitivement tout ce qu’il y a à faire, et jusqu’alors de ne regarder ceci que comme une indication sur le travail que je vous demande.

Présentez-moi aussi un projet de lettre à l’amiral Dewinter, pour lui faire connaître que mon intention est qu’il ne sorte pas cette année.

 

Amsterdam, 19 octobre 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

I,a connaissance que j’ai prise du Helder m’a fait concevoir des idées différentes de celles que l’on m’avait données. Je pense donc que, ce point devenant très-important, une grande quantité d’artillerie y deviendra très nécessaire. Trente ou quarante mortiers de 11 pouces à la Gomer hollandais ne seront point de trop pour ce point. Je m’empresse de vous le mander, afin que vous preniez vos mesures pour vous procurer des mortiers de 11 pouces, qui sont préférables aux mortiers ordinaires, parce qu’ils sont de calibre hollandais et que des bombes de ce calibre se trouvent en Hollande. Donnez donc des ordres pour que ces mortiers ne soient pas envoyés à Anvers et soient prêts à être envoyés au Helder.

 

Amsterdam, 20 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

La place de Delfzyl est de la plus grande importance, puisqu’elle a une rade qui peut contenir quarante vaisseaux de guerre. Je désire donc qu’aux conseils de décembre on me présente une carte très bien faite, dont les distances soient très exactes, non seulement de Delfzyl et environs, mais encore des deux bancs qui sont dans la rade.

 

Amsterdam, 21 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je suppose que vous avez pris des mesures pour qu’aux conseils de décembre il me soit présenté des projets pour construire des tours ou forts dans les îles des Wadden, de sorte qu’avec quelques pièces de canon 50 hommes puissent se défendre pendant un gros siège, et qu’elles soient approvisionnées pour un mois. Si ces dispositions ne sont pas faites, ne perdez pas un moment à les faire. Que les officiers viennent en décembre avec les projets, sondes, profils et cartes ; car j’entends profiter de l’hiver pour occuper toutes les îles.

 

Amsterdam, 20 octobre 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris.

On se plaint à Paris de la mauvaise qualité du pain qui est distribué à la garnison. On assure qu’on y emploie de la farine de pois. Portez une attention sévère là-dessus.

 

Amsterdam, 20 octobre 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, le 12e bataillon des équipages militaires qui est à votre armée a six compagnies de 40 caissons chacune, indépendam­ment des prolonges forges; ce qui fait 240 caissons d’équipages militaires. Ces 240 caissons ne peuvent porter chacun que 1,000 ra­tions; ils ne sont propres qu’au transport du biscuit; ils transportent peu de farine, peu de blé, et ne sont point propres au transport des fourrages; ils n’ont qu’un seul but d’utilité, c’est de transporter le pain du four ou du magasin aux corps. Mais, pour ce service, chaque bataillon a un caisson. Je juge convenable qu’il y ait dans chaque corps de votre armée d’autres caissons servis par les équipages mili­taires, à raison d’un caisson par bataillon.

Le corps de l’Elbe étant calculé sur cent bataillons doit avoir 100 caissons. En en mettant 20 de plus pour la cavalerie, pour les déficit, cela formera trois compagnies de 40 caissons chacune, qu’il faut que vous conserviez, lesquels seront attelés par les transports
militaires, et qui, avec les 100 qu’ont les bataillons, feront environ 200 caissons, ou des moyens de transport pour deux jours de pain
fabriqué. Mon intention est que les trois autres compagnies aient des chariots propres à transporter le pain et le biscuit, comme ceux que j’ai organisés pour l’armée d’Espagne. Je donne ordre que 60 de ces chariots, qui sont d’une construction plus forte, soient envoyés à
Wesel. On vous en enverra 60 autres en 1812. Ainsi les 4e, 5e et 6e compagnies du 12e bataillon d’équipages militaires seront composées de 120 chariots. Ces 120 chariots porteront 480 milliers pesant de biscuit ou de farine, au lieu de 120 milliers que porteraient 120 caissons. Le ministre directeur de l’administration de la guerre vous écrira probablement d’envoyer des chevaux à Wesel pour prendre
les 60 chariots qui sont dirigés sur cette place. Vous laisserez alors les 60 caissons qui sont attelés par ces chevaux à la disposition du
ministre de l’administration de la guerre, soit pour les corps, soit pour les autres services. Il serait utile de placer les chevaux du 12e bataillon d’équipages militaires en échelons, pour faire, à demi-fatigue, les transports journaliers de Wesel sur les régiments. Par ce moyen, ces transports ne coûteraient rien. En supposant 80 lieues de Wesel à Hambourg, chaque convoi ferait 12 lieues en deux ou trois étapes. On en profiterait pour rapporter ce que les corps auraient à renvoyer à leurs dépôts. Cela doit être fait sans presse et sans fatiguer les chevaux. Je désire que vous me fassiez connaître ce que vous ferez là-dessus; car, s’il faut ménager les chevaux, il ne faut point les laisser dans une inactivité totale. Cette mesure ne peut qu’être avantageuse, en ce qu’elle sera utile au service, que les chevaux seront entretenus dans l’habitude du travail, et qu’elle m’épargne des dépenses.

 

Amsterdam, 21 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous renvoie votre projet pour la Bidassoa. J’approuve fort que l’on fasse du côté de France un tambour pareil à celui du côté d’Espagne. La tour modèle, qui coûtera, je crois, une soixantaine de mille francs, sera remise à l’année prochaine, et vous me présenterez aux conseils de décembre un projet pour déplacer le pont, changer la direction de la route et reporter le passage dans l’endroit le plus favorable, de manière à avoir une bonne tête de pont qui fasse une défense permanente. Sans doute que la Bidassoa a des gués, mais ces gués, qui sont souvent impraticables, ne peuvent pas servir au passage d’une armée.

Il serait convenable d’avoir là un réduit qui nous rendit absolument maîtres de cette rivière et protégeât le territoire de l’Empire.

 

Amsterdam, 21 octobre 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Reggio, de réunir le 23e et le 24e régiment de chasseurs et les trois régiments qui font partie du camp de Groningen, sur la route d’Amersfoort à Utrecht, avec des troupes du camp d’Utrecht. Dans la journée du 29, je passerai par cette route; je m’arrêterai plusieurs heures pour voir les régiments d’infanterie et de cavalerie que je n’ai pas vus, et faire manœuvrer tous les autres. Comme il n’y a pas de temps à perdre, il faut que cet ordre parte de chez le duc de Reggio avant minuit.

 

Amsterdam, 21 octobre 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand maréchal du palais, à Amsterdam.

Monsieur le Duc de Frioul, je vous envoie mon itinéraire. Remet­tez-en copie au grand écuyer et au colonel général de ma Garde, et donnez tous les ordres qui seront convenables.

 

Amsterdam, 22 octobre 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, les 4e bataillons des 19e, 40e, 93e, 56e, 2e, 37e et 123e, ce qui fait sept bataillons, ont été envoyés à Wesel et à Stras­bourg pour se compléter à 900 hommes. Je garderai à Strasbourg les bataillons du 3e et du 105e. J’enverrais volontiers ces sept batail­lons à leurs régiments pour opérer le tiercement; mais, comme ces régiments sont en France, il y aurait trop de facilité pour la déser­tion. Je me suis décidé à vous les envoyer. Formez-en une ou deux bonnes brigades sous les ordres d’un général de brigade ferme, qui se charge de leur instruction et de leur tenue, et qui s’applique à empêcher la désertion. Ce sera 6,000 hommes que vous aurez sous la main ; et, selon les circonstances, je me déciderai à les faire servir à compléter vos régiments ou à tenir garnison à Magdeburg et sur les côtes. Pendant ce temps les régiments arriveraient sur l’Elbe, s’il y avait guerre; ils trouveraient leurs bataillons et l’encadrement se ferait. Ces régiments, à l’exception du 123e ont cinq bataillons, ayant eu leur 6e bataillon formé lorsque le 4e était en Catalogne. Portez donc une attention particulière à ces bataillons aussitôt qu’ils vous arriveront. Indépendamment de ces sept bataillons, les dépôts de Wesel et de Strasbourg vous auront fourni, avant le mois de février, une douzaine de mille hommes, en y comprenant ce que vous avez reçu.

Je crois vous avoir écrit que la 3e division de cuirassiers arrivait à Munster. Je compte y envoyer une brigade de cavalerie légère, que je verrai à Utrecht, composée des 23e et 24e régiments de chasseurs. Le département de la Lippe peut très-bien nourrir 4,000 chevaux. Ce sera 4,000 chevaux qui seront tout prêts pour vous soutenir et marcher avec vous en cas d’événement.

J’ai aussi fait mettre en mouvement mes sept autres régiments de cuirassiers et de carabiniers, qui formeront deux divisions, ayant douze pièces de canon. Je les verrai à Düsseldorf, où je serai dans les premiers jours du mois prochain. Je compte diriger sur Erfurt une de ces divisions et garder l’autre division à Düsseldorf. Ainsi donc vous aurez quinze régiments de cuirassiers formant quatre divisions, ayant quarante-huit pièces d’artillerie légère, et dix régiments de cavalerie légère formant cinq brigades; ce qui devrait faire près de 20,000 hommes de cavalerie. Mon intention est d’em­ployer tout l’hiver à compléter, organiser et arranger toute cette cavalerie.

Je vous ai demandé un état de situation de votre armée au 15 octobre, mais surtout un grand détail de votre artillerie. Je vous ai écrit hier sur vos transports militaires. J’ai deux bataillons du train, de 240 caissons chacun, complétés et prêts à partir. Il est nécessaire que l’artillerie de vos quatre divisions de cuirassiers soit tout entière servie par vos quatre bataillons du train.

 

Amsterdam, 22 octobre 1811

NOTE AU SUJET DE L ÉTABLISSEMENT D’UN FORT SUR LE BANC DU ZUIDERGAZ

1° La distance de la limite de l’estran à l’extrémité du Zuiderbank est de 1,360 toises.

M. Blanken veut s’avancer en mer de 160 toises; il placera donc des pièces de 36 à 1,200 toises du banc; l’ennemi ne passera guère qu’à 100 toises du banc; la batterie de 30 sera donc à 1,100 toises de l’ennemi : sous quel angle faut-il pointer une pièce de 36 pour arriver à ces 1,100 toises ?

Le général Chasseloup propose de s’éloigner de l’extrémité de la plage de 40 toises et de se placer à 1,400 toises du banc et à 1,300  du vaisseau ennemi : sous quel angle faut-il pointer des pièces de 36 pour arriver à ces 1,300 toises ?

2° Ayant considéré le fort Blanken sous le point de vue artillerie, considérons-le sous le rapport du génie.

M. Blanken évalue à un million la construction de son fort et de la digue qui le joindra à la terre.

Peut-il l’élever assez pour le défiler des petites dunes ? Le peut-il pour le défiler des grandes dunes ? Peut-il avoir aux angles du fort des cavaliers qui se défileront de la plage ? Si cela se peut, combien cela coûterait-il ?

3° Le fort proposé par le général Chasseloup, combien coûterait-il ? L’artillerie de campagne suffira pour l’enlever. Combien en coûterait-il pour le mettre à l’abri d’une attaque des dunes ? On conçoit que le fascinage de M. Blanken coûte peu, que son talus est indiffé­rent, parce qu’il est dans l’eau. Il n’en est pas de même à terre. Pour mettre son fort à l’abri d’un coup de main, le général Chasseloup dépensera un million, parce qu’on conçoit que sur du sable, où l’on ne peut s’environner d’eau et de terre, il faut maçonner.

Résumé. — II faut comparer l’angle de pointage pour les distances de 1,100 et 1,300 toises; comparer la dépense du fort proposé par M. Blanken et de celui que propose ou proposera le général Chasseloup.

Si la dépense était la même, on pense que le premier est préfé­rable, parce qu’il sera plus fort si l’on y met quelques bâtiments à l’abri de la bombe, parce que les 160 toises d’eau qui environnent le fort Blanken sont le plus grand obstacle qu’on puisse opposer à l’ennemi.

Avant tout il faut avoir un profil exact du fort projeté, à 900 toises de distance dans les terres, sur toutes les directions.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Une grande quantité d’affûts de côte existe depuis Anvers jusqu’à Lillo, sur l’une et l’autre rive. Il est nécessaire qu’aux conseils de décembre un état m’en soit remis par vous, parce qu’il est important de désarmer ces batteries pour en conserver les affûts et employer les pièces à d’autres destinations. A mesure que l’armement de Flessingue, de Cadzand et de Borssele devient plus respectable, une portion des batteries du haut Escaut devient d’une précaution trop scrupuleuse et fait faute pour nos besoins réels.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je viens de signer des décrets pour l’armement des batteries et des forts Lasalle, Dugommier, du Falga et de la place de Naarden.

Je vous prie surtout de réitérer des ordres pour que toute l’artil­lerie inutile, pour que tous les fusils et munitions soient dirigés sur Naarden. C’est une excellente place, qui est la citadelle de tout le pays. De là on a le Zuiderzee pour se porter partout ; c’est donc là que doit être le centre de tous nos approvisionnements.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Mes intentions ne sont pas exécutées en Hollande. Il y a partout de l’artillerie, des armes et de la poudre, et je veux n’y avoir que l’artillerie nécessaire pour la défense des côtes et des places, du Helder, d’Hellevoetsluis, de Brielle, de Gorcum et de Naarden, en plaçant à Naarden un équipage de campagne de soixante et douze bouches à feu en réserve, pour armer la ligne d’Amsterdam ou toute autre ligne en cas d’événement. Je désire donc qu’une salle d’armes de 20,000 fusils soit placée à Naarden. Vous faites évacuer les fusils sur Delfzyl : je ne veux rien à Delfzyl, tout sur Naarden, qui est une très bonne place, la clef du Rhin et d’Amsterdam par sa situation sur la Zuiderzee. Je désire qu’un approvisionnement de fusils et des armes y soient renfermés. Je pense qu’il faut 20,000 fusils en Hollande pour armer au besoin la population ; mais ces 20,000 fusils doivent arriver à Naarden.

Il ne faudrait placer sur les côtes que des canons de fer. Je crois que la marine pourra en donner trente, dont elle ne peut pas se servir, parce qu’ils ne sont pas de notre calibre. Tout ce qui sera inutile aux places du Helder, de Naarden, de l’Ile de Goere et d’Hellevoetsluis, de Brielle, de Gorcum, pour la direction d’Amsterdam, doit être évacué sans délai sur Anvers, où doivent se trouver tous les moyens de subvenir aux besoins imprévus de la Hollande, que ne pourrait pas fournir l’armement de Naarden.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

J’ai oublié de vous écrire qu’une tour de 1e classe à Blankenberghe serait assez inutile et qu’une simple tour de 3e classe suffira. S’il en est encore temps, donnez des ordres pour que le modèle de cette tour soit changé. Nous avons tant de points importants, qu’il ne faut pas prodiguer les moyens dans les lieux qui ne le compor­tent pas.

Je crois vous avoir mandé qu’Ostende est extrêmement mal armé, et que je désirerais qu’en décembre un état m’en fût remis, avec l’indication des batteries sur un plan, afin que je puisse régler cet armement.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

NOTE SUR LA DÉFENSE DE LA HOLLANDE.

CHAPITRE  – DU HELDER.

I. Le Helder est le point le plus important de la Hollande. Du Helder dépend le Zuiderzee; tant qu’on est maître du Helder, on l’est du Zuiderzee, parce que l’ennemi ne peut y faire entrer aucune escadre; et tant qu’on est maître du Zuiderzee, on l’est de toute la ligne depuis le Helder jusqu’à Naarden. Le Helder doit être fortifié de manière que 3 à 4,000 hommes puissent s’y défendre quatre où cinq mois.

La dune ou la position du fort Morland est la clef du Helder. Il faut construire sur cette dune un beau fort en maçonnerie. L’importance qu’il y a à donner à cet ouvrage la plus grande défense exige qu’un million ou deux y soient employés.

De la batterie de la Révolution dépend la rade intérieure. Ainsi, maître du fort Morland, l’ennemi n’aurait encore rien; il faudrait qu’il s’emparât du fort Lasalle pour être maître de la batterie de la Révolution. Les batteries du Réparateur et du (…) peuvent se défendre après la batterie de la Révolution, et, cette dernière détruite, fermer encore la rade.

Enfin un fort doit être établi à l’embouchure de Nieuwe-Diep, lequel sera le réduit de toutes les positions du Helder et protégera une forte batterie et qui défendra également la rade.

Avant que l’ennemi puisse faire entrer ses vaisseaux, dans la rade et inquiéter l’escadre française, il faudra qu’il fasse trois sièges indépendants, ce qui ne peut pas employer moins de quatre mois, et ces trois forts n’ont pas besoin, à la rigueur, de plus de 3,000 hommes pour leur défense.

2. Mais non seulement il faut empêcher l’escadre ennemie d’entrer dans le Zuiderzee, et protéger l’escadre française, mais il faut encore défendre le Nieuwe-Diep, canal de 1,400 toises, où pendant l’hiver mouille l’escadre et qui peut contenir quarante vaisseaux de guerre. C’est là où seront l’arsenal, les chantiers et tous les magasins de la marine. Pour couvrir ce port, il faut faire un fort à l’écluse, qui croise ses feux avec le fort Lasalle et qui soit protégé par le fort Morland. Il faut armer le fort actuel du Nieuwe-Werk, qu’il faut considérer comme une forte redoute dans l’eau.

Avec ces quatre forts, l’ennemi ne pourra ni entrer dans le Zuiderzee ni inquiéter l’escadre française. Il ne pourra détruire l’arsenal de la marine et bombarder les vaisseaux dans le port qu’après avoir pris le fort qui sera sur l’écluse; il ne pourra prendre ce fort qu’après avoir pris le fort Lasalle : telle est la configuration du terrain; et il ne pourra prendre le fort Lasalle qu’après avoir pris le fort Morland. Ce qui prouve ce qui a été dit plus haut, que le fort Morland est la clef du Helder.

Il faut faire le projet de ces quatre forts.

Un million sera dépensé l’année prochaine au fort Morland, un million au fort de l’Écluse; 500,000 francs pour finir le fort Lasalle et 500,000 francs pour les autres dépenses. Les travaux seront dirigés de manière qu’en octobre 1812 les forts Morland et Lasalle et de l’Écluse soient mis en état de défense et puissent même soutenir un siège en règle.

3. Le premier objet des fortifications du Helder est sans doute de défendre le Zuiderzee et l’escadre, le second de défendre le port et les établissements de la marine; mais il en est un troisième.

Entre les forts Morland et Lasalle se trouve un banc qui sépare la rade extérieure de la rade intérieure. Il n’y a là que 22 pieds d’eau et seulement sur la largeur d’une centaine de toises, de sorte qu’il n’y a qu’un très petit nombre de vents pour sortir. Il est donc nécessaire d’être maître de la rade extérieure.

A 10 ou 1800 toises du fort Morland, il faut, à la laisse de basse mer, construire un fort et l’environner de plusieurs batteries. Il faut qu’il puisse défendre autant que possible du coté de terre les batteries construites sur les dunes. Ce fort se trouvera éloigné de 1,600 toises du banc qui ferme la rade, et à 1,200 toises du lieu où doivent passer les vaisseaux ennemis pour attaquer notre escadre, qui mouil­lerait dans la rade extérieure. Les ingénieurs de la marine sont char­gés de construire, à 150 toises en avant dans la mer, un nouveau fort contenant une trentaine de bouches à feu. Le fort que construira la terre à la laisse de basse mer protégera celui-ci du côté de terre et on sera comme une suite. Il est nécessaire que ce fort soit fini l’année prochaine; il faut en faire le projet. Il doit pouvoir soutenir quinze ou vingt jours de tranchée ouverte. Ce fort étant à 1,200 toises du fort Morland pourra être coupé par l’ennemi, mais la garnison pourra toujours se retirer par mer.

Ce fort doit être armé de huit mortiers à plaque portant à 2,000 toises, de douze mortiers à la Gomer, à grande portée; total, vingt mortiers, et vingt pièces de 36; total, quarante bouches à feu. Il doit avoir en outre, du côté de terre, tout ce qui sera nécessaire pour sa défense. Ce fort s’appellera le fort du Falga.

Par ce grand et bel établissement, la rade extérieure du Texel pourra contenir en sûreté quinze ou vingt vaisseaux de guerre. Cette escadre sera là comme en pleine mer et pourra appareiller par tous les vents, une escadre sortant de l’Escaut peut s’y réfugier à chaque instant, puisqu’il n’y a aucun obstacle pour son entrée. Il est donc urgent d’établir ces batteries.

4. Dans ce moment-ci le fort Lasalle remplit son but, et un millier d’hommes y défendraient une escadre pendant plus de six semaines. Si ce fort avait existé il y a quinze ans, deux escadres hol­landaises n’auraient pas été perdues. Le décret que je viens de prendre ordonne le prompt armement des forts Lasalle, Morland et du nou­veau fort (le fort du Falga), que l’on doit construire l’année pro­chaine. Ces batteries ne seront pas fermées à la gorge, mais il est urgent qu’elles existent, afin de protéger notre escadre si elle sortait ou si une autre arrivait.

J’ordonne également l’armement avant le 1er décembre de la batte­rie du Nieuwe-Werk, qu’on appellera la redoute Dugommier.

5. A 5 lieues en arrière, du côté de Zand, il sera fait un projet pour construire un fort pentagonal ou hexagonal, à grandes dimen­sions. Ce fort aura pour objet de nous tenir maîtres des digues qui vont à Petten, à Medemblik et à Alkmaar, et de protéger les ouvra­ges avancés. C’est dans ce fort qu’à la première nouvelle d’une des­cente la tête des troupes de la Hollande viendrait se rallier pour observer l’ennemi et le mettre entre deux feux, et, si l’ennemi était assez fort pour investir aussi ce dernier point, les troupes qui arriveraient à Alkmaar auraient du moins de grands avantages pour en faire lever le siège.

Ainsi ces cinq ou six ouvrages, qui me coûteront 5 à 6 millions et qui peuvent être mis en état de défense dans la première campa­gne, et perfectionnés dans la seconde et dans la troisième, assurerait la rade, le port et les arsenaux, du Helder, le Zuidersee et toute la Hollande.

CHAPITRE II. PROLONGATION DE LA LIGNE DU RHIN

La ligne du Rhin est la ligne de l’Empire. Les têtes de pont de Huningue, de Kehl et de Kastel.  Wesel et les nombreuses places que nous avons sur cette ligne, la rendent formidable; de Wesel par Coeverden et Groningen notre ligne s’appuie sur Delfzyl, mais cette ligne étendue est faible. Il faudrait considérer l’Yssel comme seconde ligne. Cette ligne est encore faible; il en faut une troisième appuyant sa gauche sur Naarden et sa droite à Gorcum, et qui se joint par Nimègue et Grave à Wesel. Cette ligne couvre Amsterdam, le Texel, et dès lors toutes nos escadres, La Haye, Leyde, Rotterdam, les bouches de la Meuse, Hellevoetsluis, c’est-à-dire toute la Hollande. Tout ce qui est à droite de cette ligne est de peu d’importance, et quand ce pays serait deux ans au pouvoir de l’ennemi, on le retrouverait encore comme il était avant cet intervalle.

La ligne de Naarden à Gorcum doit donc être considérée comme la vraie ligue de l’Empire. Il faut la bien reconnaître, la bien tracer, faire préparer les inondations et s’occuper des modèles de tours pou­vant contenir 50 hommes et que l’on placerait le long des digues. Une cinquantaine de ces tours et formant corps de garde et servant de réduit aux batteries, assureront parfaitement cette ligne. Le décret que j’ai pris aujourd’hui contient des dispositions pour l’armement de Naarden.

Un projet sur Gorcum a été demandé; il faut considérer cette place comme tête de pont pour entrer de France en Hollande.

Quant aux digues d’Amsterdam, il faut en faire lever des plans exacts. Il est d’ailleurs un point à occuper entre Amsterdam et Haarlem, afin d’obliger l’ennemi qui viendrait du Helder à faire le tour de la mer de Haarlem. Le reste des inondations serait utile si les habitants voulaient se défendre ; on retarderait ainsi l’ennemi de l’ennemi de quelques jours, et cela donnerait le temps d’accourir. Il faut avoir le plan de ces inondations sur une grande échelle, et que les points importait y soient bien marqués et bien dessinés.

 

CHAPITRE III. — LE TEXEL.

Il faut donner ordre que le projet soit fait pour que le port du Texel soit environné d’une enceinte bastionnée, qu’une batterie de quatre pièces de fort calibre soit placée sur la pointe à droite du port et que les deux petits forts à droite et à gauche soient armés, que les deux fronts du fort qui regardent la hauteur soient relevés, aient des parapets de 12 à 15 pieds au moins et des pièces sur affûts de place.

Il faut donner des noms à ces quatre forts.

Moyennant ces quatre forts, qui embrassent 2,000 toises, il devra être facile de débarquer le monde qu’on voudra pour reprendre l’Ile si l’ennemi l’avait occupée, et avec de telles précautions jamais le Texel ne sera attaqué.

Les îles de Wieland et de Terschelling doivent être occupées par des tours, dépendre de la 17e division militaire; elles seront sous le commandement du commandant du Texel, comme le décret de ce jour le porte.

 

CHAPITRE IV. — L’EMBOUCHURE DE LA MEUSE

Après le Texel, l’embouchure de la Meuse est le point le plus important.

Hellevoetsluis et Brielle sont de bonnes places qu’il faut tenir en état.

L’île de Goeree est d’un grand intérêt. Il faut perfectionner les ouvrages de Ooltgensplaat.

Couverte par l’île de Goeree et le Helder, la Hollande est inatta­quable.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris.

Il serait convenable de prendre des mesures pour donner du vin aux troupes en Hollande pendant les mois de juillet, août, septem­bre et octobre.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je vous envoie une lettre du vice-roi. Faites solder au trésor d’Italie tout ce qui lui est dû. Cela est d’autant plus facile que, comme je vous l’ai dit, j’ai beaucoup d’argent en Italie. Remettez-moi sous les yeux ce qui est relatif au budget de 1812.

Faites-moi connaître votre opinion sur la dernière question conte­nue dans la lettre du vice-roi. J’ai trois vaisseaux à Venise. Ce serait une chose extrêmement avantageuse que de les avoir à Ancône ou à Pola. Il y a plus de facilité après le mois de décembre pour les envoyer dans un de ces deux ports. En janvier le temps est ordinairement bon; les nuits sont longues; l’ennemi est éloigné et ne commence à faire ses dispositions qu’après l’équinoxe de mars. S’il résulte des signaux de la tour de Saint-Marc et des rapports des croisières qu’il n’y a pas de vaisseaux de ligne ennemis dans le nord de l’Adriatique, il n’y a pas d’inconvénient à avoir à Malamocco la Princesse-de-Bologne, des bricks et des canonnières, et à faire sortir en même temps le Rivoli. Le Rivoli, ayant une fois franchi la passe, fera route immédiatement pour Ancône ou pour Pola. Après cela, les chameaux rentreraient et prendraient le Régénératore, lequel se dirigeraient incontinent sur un des deux ports. On ferait ensuite la même opération pour le Mont-Saint-Bernard.

Il me semble qu’il n’y a rien à objecter contre cette manœuvre, puisque enfin un vaisseau, une frégate et deux bricks ne peuvent pas craindre deux ou trois frégates. En faisant sortir les vaisseaux de grand matin, on peut espérer qu’à midi ils seront sous voiles et pourront partir pour un des ports. Trois vaisseaux à Ancône ou à Poli seraient d’un tout autre effet qu’à Malamocco. Trois vaisseaux à Ancône ou à Pola ne seront probablement pas bloqués cet hiver, ils pourront faire beaucoup de sorties, tandis qu’il est à craindre que l’année prochaine, au mois d’avril, ils ne soient bloqués par des vaisseaux anglais; ce qui rendrait l’opération beaucoup plus difficile.

Je vous prie de me faire un rapport là-dessus et de me faire un projet de lettre que j’écrirai au capitaine Barré pour lui faire connaître ma volonté. Dans une mer où j’ai un port fortifié, à toutes les aires de vent, cette opération, faite convenablement, ne me parait pas avoir de danger, d’autant plus que dans une petite mer entourée de côtes on sait tous les jours ce qui se passe.

Faites-moi connaître si vous avez donné ordre à la frégate la Flore d’entrer à Venise pour se réparer. Si cela est, cette frégate pourrait accompagner les vaisseaux.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris.

Votre projet de décret sur les équipages ne me convient pas. Je vous le renvoie et j’y joins une esquisse du décret comme je le voudrais.

Il faut que vous y mettiez les numéros des bataillons à créer, et que vous le fassiez précéder d’un rapport qui me fasse connaître parfaitement où en sont toutes les opérations. Joignez-y un état au 1er octobre de la situation des équipages. Vous indiquerez dans cet état ce que les équipages ont du recevoir de la conscription de 1811, ce qu’ils ont reçu et ce qui leur reste à recevoir. Vous indiquerez aussi la distribution des 1,400 conscrits hollandais, afin de ne pas les reporter dans l’Escaut ou dans le Zuiderzce.

Si vous avez besoin d’être à Paris pour bien rédiger le projet de décret, je n’y vois pas de difficulté, pourvu que vous me le présen­tiez avant le 15 novembre, avec la nomination des officiers et des états-majors.

Ce qui est important actuellement, c’est de donner l’ordre à l’équi­page du capitaine Etienne, qui est dans la Meuse, de venir dans le Zuiderzee; de donner ordre au 13e équipage, qui est à Boulogne, de monter vingt-sept chaloupes canonnières et de venir avec dans l’Es­caut ; enfin de donner ordre au bataillon de la flottille de l’Escaut de monter vingt-sept chaloupes canonnières et d’entrer sans délai dans le Zuiderzee, où ce bataillon aura ordre de se mettre en croisière, mais, avant même de donner ces ordres à ces deux bataillons, je désire connaître quels sont les conscrits qu’ils doivent recevoir; sont-ce des Hollandais ou des Français ?

En attendant, je désire que vous donniez des ordres pour que les deux frégates qui sont à Medemblik soient transportées au Helder et armées, pour que les quatre vaisseaux qui sont à Medemblik soient mis en état et pourvus de tout ce qui est nécessaire pour être en rade au Texel à la fin de février; enfin, que vous ordonniez qu’une partie des canonnières qui viennent dans l’Escaut se rendent dans le Zuiderzee, afin d’y avoir cent trente goélettes, canonnières ou bricks, et de pouvoir subvenir à tous les mouvements.

Je désire aussi que vous me fassiez un rapport sur la flottille de Boulogne. Vingt-sept canonnières vont se rendre dans l’Escaut ; un nombre s’est rendu à Cherbourg; un nombre s’est rendu à Dunkerque et à Ostende; que doit-il rester à Boulogne et que reste-t-il à Boulogne ? Quel est le parti convenable à prendre pour conserver les avantages que m’a produits la flottille sans en avoir les inconvénients ?

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, prêtez encore un million à la Saxe sur l’emprunt. S’il vous est possible, faites croire que ce sont des particuliers qui en ont pris les bons. Régularisez ensuite cela avec le domaine extraordinaire.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au général Savary, duc de Rovigo, ministre de la police générale, à Paris

Je verrais avec plaisir que le roi Charles IV quittât Marseille avec tout son monde et se rendît à Rome. Je vous autorise à lui envoyer de Paris les hommes qui ont sa confiance, pour lui faire cette proposition. Je voudrais qu’il profitât du reste de la saison pour se mettre en marche. Sur son passage on lui rendra les plus grands honneurs, et même, s’il veut visiter l’escadre à Toulon, mon intention est qu’il y soit reçu comme roi. Les garnisons lui fourniront des escortes et les généraux commandant les divisions par lesquelles il passera devront l’accompagner. Il pourrait de Nice passer par le col de Tende, de là se rendre à Plaisance et à Rome. Vous devez lui faire donner l’assurance que je lui accorderai le même traitement qu’il a aujour­d’hui. S’il a des dettes, je ne puis pas les payer, vu que l’Espagne me coûte trop et que 2 millions dans sa situation doivent suffire à tout. Quant à sa résidence à Rome, on pourra le loger à la villa Borghèse ou dans un des palais que j’ai dans cette ville.

Faites cette affaire délicatement. Quand vous serez assuré qu’il veut partir, vous ferez expédier les ordres convenables par le ministre de la guerre. Il est toujours bon que les Bourbons soient à Rome ; leur séjour sera utile à cette grande ville. Si cependant le roi préférait rester à Marseille, il faudrait l’y laisser.

La duchesse de Bourbon, la duchesse d’Orléans et le prince de Conti sont en Catalogne fort malheureux. Comme je continue de leur faire une pension, il serait bon de leur proposer également de se rendre à Rome. Ils devront traverser promptement les départements méridionaux, sans qu’on leur rende aucun honneur, et même vous aurez soin que leur passage ne puisse faire aucune sensation. S’ils peuvent obtenir un passeport de la croisière anglaise, ce que je crois possible, il vaudrait mieux qu’ils s’embarquassent à Barcelone pour débarquer à Cività-Vecchia.

 

Amsterdam. 23 octobre 181

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, j’ai envoyé de la Garde 200 vélites en Espagne. Mon intention est qu’un détachement de grenadiers à cheval rentre en France. Vous donnerez donc l’ordre au général Dorsenne de faire partir cet escadron pour Vitoria et de me faire connaître quand il arrivera. Il est aussi dans les vieux chasseurs de ma Garde un certain nombre d’hommes que je désire qu’on me renvoie. Ecrivez au duc d’Istrie d’en faire la note. Je désire qu’on me renvoie jusqu’au nombre de cinquante ceux qui sont le plus accoutumés à mon service. Réitérez l’ordre au général Lepic de rentrer en France.

Il y a à l’armée du Nord beaucoup d’artillerie, puisque la division Souham a vingt pièces de canon. Donnez ordre au général Dorsenne de renvoyer en France une des trois compagnies de canonniers à pied de ma Garde attachées aux régiments. Il peut garder le matériel et les chevaux, s’il en a besoin. Je désire qu’il me renvoie aussi les hommes à pied du train de la Garde qui n’ont pas de chevaux. Proposez-moi enfin de donner à l’armée du Nord deux compagnies d’artillerie légère, afin de faire revenir les deux compagnies d’artillerie légère qui servent les douze pièces de la Garde à cette armée. L’armée de Portugal doit avoir trop de compagnies d’artil­lerie légère.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, je vous renvoie la lettre du général Dorsenne; vous pouvez l’autoriser à garder les officiers de l’ex-garde royale hollandaise et à les placer définitivement dans ma Garde.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 11 octobre. J’attache comme vous la plus grande importance à ce que le Rivoli, le Mont-St-Bernard et le Régénératore, accompagnés de la Princesse-de-Bologne, de deux bricks et de toutes les canonnières que vous pourrez trouver à Venise, se rendent à Malamocco. Qu’on profite de l’été de la Saint-Martin et d’un temps convenable pour faire passer le Rivoli, accompagné de la Princesse-de-Bologne et des deux bricks. En commençant à huit heures du matin l’opération, à midi le vaisseau doit être libre et voguer sur Ancône ou sur Pola. Le Mont-Saint-Bernard et le Regeneratore sortiront immédiatement après, et il me semble qu’ils doivent pouvoir passer le surlendemain du passage du premier; il ne doit pas falloir plus de trente-six heures pour appliquer les chameaux. Le désir qu’a le capitaine d’aller voir Ancône est naturel, il n’y a que de l’utilité à ce qu’il reconnaisse ces parages. Faîtes-le partir en poste et par terre. S’il pouvait même voir Pola, il n’y aurait pas d’inconvénient. Avant que les vaisseaux soient à Malamocco, le commandant recevra une lettre qui ordonnera leur sortie. Je suppose que vous présiderez vous-même à cette importante opération; que vous préviendrez le général Bertrand pour qu’il fasse vérifier l’état des batteries de Pola; que, si vous n’avez point de télégraphe sur la côte, jusqu’à la pointe de Pola ou d’Ancône, vous vous ferez instruire par des courriers extraordinaires de tout ce qui serait signalé, du moment que vous serez assuré qu’il n’y a pas de vaisseau de 74 ennemis dans le nord de l’Adriatique, vous n’avez aucune chance à courir. Vous avez des avisos, des goélettes, des demi-chebecs, etc., à Venise, vous pouvez en former une chaîne très loin en mer, qui vous fera connaître, tous les jours, par des signaux l’état des choses. La frégate la Flore est-elle entrée à Venise pour se réparer ? Si cela est, il faudrait la retenir pour accompagner les vaisseaux à leur sortie de Malamocco.

 

Amsterdam, 23 octobre 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, j’attache une grande importance à ce que les quatre bataillons de mes régiments soient traités de même, qu’ils soient tous maintenus en égalité et qu’il n’y ait aucune différence du 4e au 1er. Si les colonels s’aperçoivent qu’on néglige les 4e bataillons, ils croient que ces bataillons ne doivent pas les suivre; ils en font le refuge de tous leurs vieillards et hommes impotents, et si, plus tard, je veux faire marcher ces 4e bataillons, je ne les trouve plus. D’un autre coté, les officiers qui attendent leur retraite passent dans ces 4e bataillons, y restent, y continuent à occuper des emplois qu’ils ne peuvent plus remplir. Faites venir au camp, s’il doit durer encore quelque temps, les 4e bataillons, autant que cela vous sera possible. Je vais vous envoyer beaucoup de conscrits réfractaires qui sont en Corse et à Toulon pour compléter vos corps.

 

Rotterdam, 25 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, j’ai vu aujourd’hui la fonderie de la Haye. J’ai ordonné qu’on y fondit deux pièces de 48 dont les moules existent; ce qui fera dix au lieu de huit. J’ai vu les mortiers, mais ce n’est point ce que je demande. Les mortiers que j’ai vus ont une chambre qui ne contient que onze livres de poudre, et les mortiers à plaque que j’ai demandés doivent en contenir vingt-cinq à trente livres. La bombe des mortiers de la fonderie de la Haye ne peut pas porter au delà de 1,600 toises. Si par la dénomination de mortiers à plaque vous entendez ces mortiers, vous êtes dans une grande erreur. J’ai déjà eu lieu de m’apercevoir de l’effet de ce funeste quiproquo à Cherbourg. Il y a là des mortiers à plaque qui n’ont qu’une portée ordinaire, hormis qu’ils n’ont point de tourillons, de sorte que leur plus grande portée ne va pas au delà de 1,600 toises. Beaucoup de mortiers à plaque sont dans ce cas. Les mortiers que je veux avoir doivent contenir dans leur chambre vingt-cinq à trente livres de poudre et porter leur bombe à 2,000 toises. Je suis étonné que e bureau de l’artillerie n’ait pas compris mes intentions. Donnez sur-le-champ des ordres pour que le but que j’ai indiqué soit rempli tant à la Haye qu’à Strasbourg; et sur vos états ne donnez la dénomination de mortiers à plaque qu’à ceux qui portent leur bombe au moins à 1,900 toises. Si les mortiers qu’on fond à Strasbourg ressemblent à ceux de la fonderie de la Haye, je ne puis les employer aux îles d’Hyères, et ils sont loin de remplir mon but. L’officier d’artillerie qui est à la fonderie de la Haye est d’une parfaite ignorance et n’a aucune connaissance de son métier.

Quand vous aurez rectifié cette erreur importante, donnez des ordres pour que les mortiers soient fondus et prêts à recevoir une destination au 1er janvier. On n’a le projet de les couler qu’au mois de mars, de sorte qu’ils ne seraient en place qu’au mois de mai ou au mois de juin.

Vous saviez que le directeur d’Amsterdam était malade, vous deviez y envoyer un autre officier à qui je pusse parler et qui pût répondre à mes questions. Je n’ai rencontré que des officiers entendant médiocrement ce que je leur demandais. C’est un soin que le chef d’une arme ne doit jamais manquer d’avoir.

Il est nécessaire de commander à la Haye et dans les fonderies à portée de Flessingue, de Toulon, de l’île d’Aix, des mortiers à la Villantroys, tels qu’on en a fondu devant Cadix. L’avantage qu’ont ces mortiers de porter leurs projectiles à 2,500 toises est immense, puisque cela seul peut empêcher une escadre de profiter d’un mouillage. C’est le cas d’en avoir aux îles d’Hyères, à l’île d’Aix et dans l’Escaut.

J’ai fait tirer des bombes, mais les fusées sont trop courtes : elles restent en l’air et ne sont d’aucun effet.

 

Rotterdam, 26 octobre 1811

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur le Comte Bigot de Préameneu, je vous ai prescrit de faire partir pour leurs diocèses tous les évêques indistinctement. Je vois cependant que plusieurs sont encore à Paris, entre autres l’évêque de Saint-Flour, auquel vous avez même dit que vous avez reçu des bulles du Pape. Je vous recommande encore de ne rien dire et de faire partir tout le monde (j’en excepte cependant les évêques de la commission), de ne donner aucune bulle et de garder le plus profond secret sur toutes les affaires ecclésiastiques.

 

Rotterdam, 26 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

L’enceinte de Cherbourg sera-t-elle dans le cas d’être armée au 1er janvier ? Quelle est la situation actuelle des travaux ? Qu’est-ce qu’il faudrait faire pour arriver à ce résultat ? Vous sentez l’impor­tance que j’attache à avoir une cinquantaine de pièces en batterie sur la nouvelle enceinte de Cherbourg, à avoir les portes fermées et les ponts-levis établis. En employant les mois de janvier et février à bien armer la place, elle serait à l’abri d’un coup de main ; ce qui serait une chose bien avantageuse.

 

Rotterdam, 26 octobre 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Comte Decrès, je vous envoie un projet de décret pour que vous le soumettiez à ma signature, après avoir fait vos observations sur la grande activité que je veux donner aux chantiers de Hol­lande. J’ai trois objets : frapper l’opinion de l’Angleterre, qui a tant de communications avec ce pays-ci ; pour cela il faut frapper l’opinion de la Hollande et lui faire concevoir l’espérance du prompt rétablisse­ment de la marine; compenser par l’activité des arsenaux maritimes la suppression des ateliers militaires que j’ôte au pays, et donner du pain aux ouvriers, enfin arriver au résultat bien essentiel d’avoir en 1814 neuf vaisseaux dans le Texel, bons marcheurs, et qui remplacent les neuf vaisseaux actuels, auxquels il paraît qu’on ne peut pas avoir grande confiance. Pour atteindre ce but, les deux cales d’Amsterdam ne pourraient suffire, puisqu’elles ne pourront donner tout au plus que cinq vaisseaux ; mais je compte sur quatre cales, qui seront établies au Texel même à la fin de 1812, et qui me donneront quatre vaisseaux pour 1814. J’aurai à cette époque des équipages très bien formés pour monter ces neuf vaisseaux et des matelots en nombre suffisant pour les neuf vaisseaux hollandais, qui, bien qu’ils ne soient pas destinés à une expédition, seront armés en guerre; de manière qu’il faille aux Anglais plus de quinze vaisseaux pour bloquer le Helder. Le chantier de Rotterdam étant absolument le même que celui d’Anvers, je me servirai des cinq vaisseaux que je veux y con­struire, d’ici à 181 4, pour faire une escadre détachée à l’embouchure de la Meuse, supposé qu’on puisse y trouver protection, ou pour les faire aller dans l’Escaut par l’intérieur. Sur les huit vaisseaux que j’ai demandés dans l’Escaut chaque année, je déduirai les deux qu’on peut faire à Rotterdam. Je trouve plus convenable de répartir les travaux que de les concentrer sur un même point, où ils sont déjà trop forcés.

J’ai dû attendre d’avoir vu moi-même les localités pour prendre un parti sur l’organisation de la marine en Hollande. Ayant d’ailleurs conservé les impositions hollandaises pendant 1811, j’étais presque obligé de maintenir la même organisation de la marine, et de considérer la Hollande comme une seule administration. Aujourd’hui je n’y vois plus aucun intérêt, aucune connexion entre l’arsenal du Zuiderzee et celui de la Meuse, et je pense qu’il est préférable d’établir deux préfets maritimes, qui auraient chacun un arrondissement de côtes distinct. S’il y avait quelque objection contre la création d’une préfecture maritime à Rotterdam, il faudrait plutôt la réunir à celle d’Anvers que la laisser dépendre de celle d’Amsterdam. Je ne vois pas quelle objection on pourrait faire contre l’établissement d’une préfecture maritime à Rotterdam, puisque j’y ai aujourd’hui un vice-amiral qui coûte autant qu’un préfet, et qu’un arsenal où l’on con­struit quatre ou cinq vaisseaux mérite une administration à part. Lorient en est la preuve. Quant à l’inscription maritime, Dordrecht et toutes les côtes de la Meuse pourraient faire partie de l’arrondissement de Rotterdam. Je désire un projet de décret là-dessus, dans lequel la question relative aux syndics de la marine soit résolut; il y a en Hollande les plus grandes espérances pour la marine, mais elles ne sauraient se réaliser si l’on retirait l’administration de la marine de leur pays. On trouvera dans les arrondissements d’Amsterdam et de Rotterdam autant de matelots qu’il en faudra pour armer les vaisseaux qu’on y aura construits.

 

Rotterdam, 26 octobre 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le corps d’observation de l’Elbe (Le corps d’observation de l’Elbe était le premier des trois corps dont se composait l’armé d’Allemagne. Néanmoins, le prince d’Eckmühl conserva le titre de commandant de l’armée d’Allemagne jusqu’au 24 octobre 1811), à Hambourg

Mon Cousin, je vous envoie la copie d’un décret que je viens de prendre. Il est basé sur le rapport du ministre de l’administration de la guerre, duquel il résulte que vous avez en Allemagne 9191 hom­mes présents dans vos dix régiments de cavalerie; que ces régiments ont 986 hommes à leurs dépôts et 496 hommes à recevoir de la conscription, et qu’il ne leur manque en conséquence que 400 hom­mes. Je donne ordre que ces 400 hommes soient pris sur ceux que vous recevez des dépôts de Strasbourg et de Wesel, en ayant soin de choisir des conscrits réfractaires, et non des déserteurs, et des hommes des départements de l’ancienne France, lesquels seront habillés et équipés aux régiments mêmes, en Allemagne. Je donne en même temps l’ordre que, sans perdre de temps, les hommes disponibles aux différents dépôts en France partent pour vous rejoindre, mon intention étant qu’au 1er janvier chacun de vos régiments de cava­lerie ait un effectif de 1,050 hommes en Allemagne et 50 hommes en France. La 3e division, qui est à Erfurt, a 2,289 hommes pré­sents; elle a 1,500 hommes aux dépôts; il lui manque 600 hommes pour être au complet de 1,100 hommes par régiment. J’ordonne aux dépôts de Wesel et de Strasbourg de vous fournir ces 600 hommes. Quant aux chevaux, il résulte que 9,160 chevaux sont en Allemagne, que 240 sont aux dépôts, que 83 sont à recevoir sur les commandes faites et que 500 chevaux manquent au complet de vos dix régiments de cavalerie; qu’à la 3e division de cuirassiers, qui part de Munster, 2,200 chevaux sont présents aux escadrons de guerre; que 480 sont aux dépôts et que 457 sont à recevoir sur les commandes faites. Le décret que j’ai pris pourvoit à l’achat de ces chevaux. Tenez la main à ce qu’on n’achète que de bons chevaux et qui soient en état d’entrer ou campagne en janvier 1812. Ainsi vos seize régiments présenteront au 1er février 16,000 hommes à cheval. Je ne parle point du régi­ment de chevau-légers.

La division qui se rend à Erfurt fait partie du corps d’observation de l’Elbe ; pourvoyez à tout ce qui lui est relatif. Mon intention est que la ligne d’étapes de cette division passe à Wesel et à Munster, et de là à Erfurt. Wesel doit être le pivot et le point d’appui de tout.

Je pars demain pour me rendre à Wesel et à Düsseldorf. Je passerai la revue de deux autres divisions qui arrivent à Cologne. J’attends l’état de situation de votre armée au 15 octobre, avec le détail de l’artillerie, pour ordonner une augmentation d’artillerie, dont il me semble que vous n’avez pas assez. Mon intention est de tenir tous les corps de votre armée au complet, munis de tout et pouvant, vingt- quatre heures après en avoir reçu l’ordre, entrer en campagne.

 

Rotterdam, 26 octobre 1811

Au général comte Bertrand, gouverneur général des provinces illyriennes, à Spalatro (Spalato, Split – ndlr)

Monsieur le Général Comte Bertrand, je suis à Rotterdam. Je viens de visiter la Hollande, dont je suis extrêmement satisfait. Je n’ai trouvé aucun peuple qui sentit mieux les avantages d’être réuni à l’Empire et de former une grande nation dans l’Europe. J’y trouve des ressources considérables pour ma marine. J’ai été fort content de la position du Helder; il n’en est aucune qu’on puisse plus facilement fortifier, et déjà le fort Lasalle est tel, qu’au mois de décembre, étant armé, il faudra trente jours de tranchée ouverte pour le prendre. J’ai fait fortifier les dunes, qui sont la clef de la position; j’y ai fait construire un gros fort en maçonnerie. J’ai trouvé les rades extérieures fort belles; je fais construire un fort à 2,000 toises dans les dunes pour les défendre.

Les régiments croates ont eu une désertion considérable dans le Frioul ; il paraît qu’on ne porte pas assez de censure dans le choix des officiers : on sera obligé de les remplacer par des Français.

J’espère que vous m’apprendrez bientôt que vous avez un vaisseau sur le chantier à Trieste. J’attends que vous m’envoyiez un rapport sur Raguse; mon intention est qu’on travaille sérieusement en 1812 aux fortifications de cette place, afin que mes escadres y soient en sûreté. J’attends donc un mémoire détaillé sur les fortifications, la manière dont il faut les conduire pour arriver à ce grand but.

 

Rotterdam, 26 octobre 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 17 sur Palmanova. Je déciderai aux conseils de décembre ce qu’il faudra y faire en 1812. Mais mon but se trouve déjà rempli; les lunettes et le corps de la place sont en état : on ne sera plus obligé d’armer et de désarmer à la moindre alerte. Les magasins à poudre sont en nombre suffisant; les flancs bas, les casernes défensives existantes doivent déjà mettre 2,500 hommes à l’abri de la bombe; tout le reste peut donc se faire progressivement. Mais où je désire porter les principales ressources du royaume, c’est à Venise. Faites faire des projets. Il faudrait y dépenser deux millions l’année prochaine, et surtout à Malghera. Le grand nombre de matelots, d’ouvriers, les établissements que j’ai là, veulent qu’on porte la plus sérieuse attention sur ce point important. Mantoue est assez fort ; d’ailleurs cette place est aujourd’hui en seconde ligne, Palmanova parait avoir acquis le degré de force convenable. Legnago, Peschiera, remplissent leur but. Venise, Ancône et les places maritimes, sont les points où il faut dépenser jusqu’à trois millions en 1812. Il faut de très-beaux projets pour Malghera ; il en faut pour Brondolo : ce sont les deux clefs de Venise. Avec ces deux points fortement occupés, la grande quantité de canonnières, de prames, de bateaux, que la situation de ma marine me permet d’avoir, cette place sera suffisamment gardée. Il faut de fortes batteries à Malamocco, tenir les magasins du fort en état, et, s’il est nécessaire, y faire quelques ouvrages. Chargez un officier d’en rédiger tous les pro­jets, afin qu’on puisse faire à Venise une forte campagne l’année prochaine.

Je suis à Rotterdam. J’irai d’ici dans le grand-duché de Berg, et après cela à Fontainebleau. J’ai été extrêmement content de la Hol­lande. Ces gens n’ont conservé de souvenir de leur indépendance que pour sentir les avantages de la réunion et y trouver l’uniformité des lois, un système modéré de contributions et une marche régu­lière dans les affaires. Ils sont plus Français qu’aucuns habitants des pays réunis. Quant au roi, ils n’ont conservé d’autres souvenirs de lui, si ce n’était que c’était un bon homme, fort changeant, qui avait peu de vues d’administration, et qu’il défaisait le soir ce qu’il avait entrepris le matin. Je n’ai vu nulle part autant de mouvement et d’aussi bons sentiments. En cela mon attente a été, je l’avoue, agréa­blement surpassée. J’ai plusieurs vaisseaux sur les chantiers, et ils me seront extrêmement utiles pour ma marine, car ils sont tous mate­lots; c’est un pays extrêmement intéressant.

 

Château de Loos, 28 octobre 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Raguse d’envoyer au général Dorsenne une de ses cinq compagnies d’artillerie à cheval, et au duc de Dalmatie d’envoyer une des compagnies d’artillerie à cheval de l’armée du Midi au duc de Raguse. Lorsque le duc de Raguse aura reçu la compagnie d’artillerie légère de l’armée du Midi, il enverra au général Dorsenne une autre compagnie d’artillerie légère; de sorte que l’armée de Portugal aura quatre compagnies d’artillerie, l’armée du Midi quatre compagnies d’artillerie légère, et l’armée du Nord en aura deux. Vous ferez connaître au général Dorsenne cette disposition, et vous lui ordonnerez, quand il aura reçu ces compagnies, de renvoyer les compagnies d’artillerie à cheval de la Garde à Bayonne. Le général Dorsenne peut garder les chevaux, le matériel et même les soldats du train, jusqu’à ce qu’ils soient remplacés. Vous lui ferez comprendre que j’ai des raisons pour désirer que mon artillerie à cheval rentre en France ; que mon intention est même de faire rentrer le train, hormis les soldats attachés au train de la Garde, qui reste avec la jeune Garde. Mandez à cet effet au général Dorsenne que, s’il peut faire remplacer la compagnie du train de la Garde par des hommes à pied du train qui seraient dans le ressort de son armée, il le fasse, sans quoi je verrai à y pourvoir.

Donnez des ordres tellement positifs aux ducs de Raguse et de Dalmatie, qu’ils ne puissent pas en éluder l’exécution. Écrirez en chiffre au duc de Raguse que le retour de la Garde à cheval est attaché à ce mouvement.

 

Château de Loos, 29 octobre 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Envoyez un courrier extraordinaire à Zwolle de manière qu’il soit arrivé avant cinq heures du matin, et donnez ordre au général Duvivier de faire partir de Zwolle pour Groningen, demain, le 125e; mais de rester toute la journée de demain à Zwolle avec les 2e et 37e, et de partir après-demain pour se rendre à Munster, où il passera l’hiver avec sa brigade. Il aura soin de faire venir ses com­pagnies d’artillerie, les hommes restés à Groningen et sur la côte, et de prendre des mesures pour que les convalescents et les malades arrivent en droite ligne de Groningen sur Munster.

Vous lui ferez connaître que les 4e bataillons, forts de 900 hom­mes, vont rejoindre ses régiments, ce qui portera sa brigade à dix  bataillons, et qu’il les tienne en état d’entrer en campagne au 1er mars; vous instruirez de cela le ministre de la guerre.

Le 125e restera jusqu’à nouvel ordre à Groningen. Le 23e de chasseurs ira aussi à Munster.

 

Nimègue, 30 octobre 1811

Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 26 octobre. Je serai demain à Wesel ; ainsi vous voyez que je me rapproche. Je crois vous avoir déjà mandé que je suis extrêmement satisfait de la Hollande.

 

Nimègue, 30 octobre 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Les pièces de 3 des régiments sont attelées de quatre chevaux. C’est trop pour ces pièces; ce qui a le double inconvénient d’em­ployer trop d’efforts en raison de la charge et de rendre plus difficile le service dans les intervalles des bataillons. Je désire donc savoir s’il y aurait de l’inconvénient à ne leur donner que deux chevaux.

Tous les caissons d’artillerie des corps ont quatre chevaux; cela a le même inconvénient. Ne serait-il pas possible d’avoir, comme les Autrichiens, des caissons légers qu’on attellerait de deux chevaux ? Ce caisson et l’avant-train donneraient suffisamment de munitions; les pièces pourraient alors avoir deux caissons, et les deux caissons de surplus resteraient avec le parc de la division ou avec les gros caissons du régiment; cela aurait toute espèce d’avantages.

J’ai trouvé l’artillerie actuelle des régiments trop embarrassante avec six gros caissons à quatre chevaux. Je voudrais donc une pièce de trois attelée de deux chevaux et deux caissons attelés de 4 chevaux ; ce qui ferait 6 chevaux au lieu de 12. On pourrait mettre 2 chevaux haut le pied pour être attelés au caisson; mais pour cela il faudrait des caissons plus légers, et que tous les régiments n’eussent que des pièces de 3 et pas de pièces de 6.

J’attendrai le rapport que vous ferez faire là-dessus par le comité d’artillerie. Il pourrait y avoir de l’avantage pour les manœuvres et beaucoup d’économie; car, par exemple, les quatre pièces des régi­ments du corps d’observation de l’Elbe emploient 16 chevaux, ils n’en auraient plus que 8, et avec ces 8 chevaux restants on pourrait avoir deux pièces et deux caissons.

 

Nimègue, 30 octobre 1811.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Le corps d’observation de l’Elbe venant à être composé de neuf divisions, c’est-à-dire de plus de cent quarante bataillons et de 120,000 hommes d’infanterie, il est nécessaire que vous en organisiez l’artillerie en conséquence. Chaque division a une batterie d’artillerie à pied de huit pièces, c’est-à-dire soixante et douze pièces, une batterie d’artillerie à cheval de six pièces, c’est-à-dire cinquante-quatre; cent huit pièces de régiment et deux batteries ou seize pièces de réserve, ce qui ne fait que cent quarante-deux pièces d’artillerie de ligne et cent huit de bataillon, et en tout cela ne fait que deux cent cinquante pièces. Il est vrai que cette armée a quatre divisions de cuirassiers, et que, si l’on réunit toute la cavalerie, on aura quarante-huit pièces d’artillerie légère; mais cela ne me parait pas suffisant, puisque cela ne fait encore que cent quatre-vingt-dix pièces de ligne pour 120,000 hommes d’infanterie et 25,000 hommes de cavalerie, ou trois cents pièces de canon en tout; ce qui ne fait pièces par 1,000 hommes.

Je pense qu’il faudrait augmenter la réserve. Proposez-moi à l’organisation du parc comme si cette armée devait agir seule, indépendamment du corps d’observation du Rhin et du corps d’observation d’Italie. Si vous manquiez de compagnies d’artillerie légère, on pourrait donner à la 6e division deux batteries d’artillerie à pied.

 

Nimègue, 30 octobre 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre au 24e régiment de chasseurs de se rendre à Munster, où il fera brigade avec le 23e, sous les ordres d’un général de brigade que le ministre de la guerre y enverra sans délai. Donnez ordre que le camp d’Utrecht soit dissous. Le 18e régiment de ligne se rendra à la Haye, ou il tiendra garnison ; le 93e restera à Utrecht; le 124e se rendra à Nimègue, et le 56e sera réparti entre l’Utrecht, Amsterdam et Arnheim. Ces régiments ne feront aucun ser­vice, se tiendront prêts à partir à chaque moment et ne pourront être employés par les généraux commandant les divisions qu’en cas d’événements imprévus et en en prévenant sur-le-champ le ministre de la guerre. Le général Maison restera à Utrecht, conservera le commandement de ces quatre régiments, en passera l’inspection fré­quemment, les tiendra toujours en état de partir, en enverra l’état tous les cinq jours au ministre de la guerre, et obéira aux ordres des généraux de division, si des cas imprévus rendaient nécessaire le mouvement de ces troupes. Le duc de Reggio et les officiers de son état-major qui étaient employés à Utrecht laisseront leurs bagages à Utrecht et pourront vaquer à leurs affaires, mais de manière à retour­ner en poste s’il était nécessaire. Faites part de ces dispositions au ministre de la guerre et au général commandant la 17e division mili­taire. Donnez ordre au régiment espagnol de se diriger sur Minden, où il sera sous les ordres du prince d’Eckmühl et fera partie du corps d’observation de l’Elbe.

 

Nimègue, 30 octobre 1811

ORDRE AU CAPITAINE GOURGAUD, OFFICIER D’ORDONNANCE DE L’EMPEREUR, A NIMEGUE.

L’officier d’ordonnance Gourgaud se rendra à Munster. Il prendra des renseignements sur les maladies, la récolte, le casernement de la ville et du département, sur la santé des troupes et sur le nombre de régiments de cavalerie et d’infanterie qu’on peut cantonner dans le département. Il viendra me faire son rapport à Wesel, et il ne restera que vingt-quatre heures à Munster.

 

Nimègue, 30 octobre 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg.

Mon Cousin, je vous ai fait connaître que mon intention était de porter avant le mois de janvier votre armée à neuf divisions, savoir: la le, la 2e, la 3e, la 4e, et la 5e division chacune à quinze bataillons français et à deux bataillons étrangers; ce qui fera soixante et quinze bataillons français, deux espagnols, six portugais et deux croates; total : quatre-vingt-cinq bataillons. La 6e division sera portée à treize bataillons, la 7e à quinze, la 8e à quinze, la 9e à seize; ce qui fera en tout plus de cent quarante bataillons et près de 120,000 hommes  d’infanterie. Plus, dix régiments de cavalerie légère, y compris le régiment polonais qui est à Danzig, formant cinq brigades ou 17,000 hommes de cavalerie, et indépendamment de 6,000 cuiras­siers, formant deux divisions, qui pourront joindre en cas d’évènement; ce qui ferait donc une armée de 150,000 hommes, que je veux entretenir toujours disponible et prête à marcher.

Faites-moi connaître l’organisation qu’il faudrait donner à tout votre parc d’artillerie, si cette armée devait agir seule; combien, dans ce cas, de bataillons de transports militaires; quelle organi­sation du génie et des sapeurs, et enfin quelle augmentation d’état-major général.

Si vous deviez opérer seul, une armée de neuf divisions ne peut pas être commandée sans lieutenants généraux ; faites-moi connaître vos idées là-dessus.

 

Nimègue, 30 octobre 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, il faut faire faire l’exercice à feu aux jeunes soldats et les faire tirer à la cible; c’est un argent bien dépensé. Vous devez avoir à Hambourg, à Stettin, à Magdeburg et dans les batteries, des poudres de moins bonne qualité qui pourraient être employées à cet usage. Il est très important que les soldats tirent à la cible.

 

Nimègue, 30 octobre 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg||

Mon Cousin, j’envoie le 2e et le 37e de ligne à Munster. Le 2e de ligne a quatre bataillons et n’a que 2,300 hommes; le 37e a quatre bataillons et n’a que 1,000 hommes; l’un a 600 malades et en a près de 1,000 ; ces malades rejoindront avant le mois de janvier. Ces deux régiments ont leurs 6e bataillons, parce que leurs 4e ba­taillons étaient en Catalogne. Ces 4e bataillons sont à Strasbourg, à Wesel pour prendre des conscrits réfractaires, qui se rendront bientôt à Munster et porteront alors ces deux régiments avec un régiment à un taux raisonnable. Mon intention est que ces deux régiments avec un régi­ment de la division Compans forment une 8e division. Faites-moi connaître le général que vous désirez pour commander cette division. Je donne ordre que deux superbes bataillons espagnols, forts de 1,600 hommes, partent du camp d’Utrecht pour se rendre à Minden. Vous les placerez avec la division Friant; j’espère qu’on en sera content; il y a un an qu’ils sont formés. Je vous enverrai trois autres régiments portugais de même force, et chacun de deux bataillons, pour être également joints à d’autres divisions. Je vous enverrai encore deux bataillons croates pour être réunis à votre 5e division. De sorte que vous recevrez deux bataillons espagnols, six bataillons portugais et deux bataillons croates; ce qui portera chacune de vos cinq premières divisions à dix-sept bataillons au lieu de quinze. La 6e division, qui est composée des trois régiments de Hambourg, aura cette année trois petits régiments; mais ces trois régiments seront complétés par la conscription que je vais lever en janvier; ainsi, en supposant l’entrée en campagne au mois de mars, la 6e division aura treize bataillons. Je m’oppose entièrement à ce que vous mettiez aucun conscrit réfractaire dans ces trois régiments, 127e, 128e et 129e. J’ai donné l’ordre au ministre de la guerre de vous envoyer l’artillerie et tout ce qui est nécessaire pour la 8e division. Mon inten­tion est de vous donner une 9e division, qui sera composée de quatre bataillons illyriens, qui sont à Turin et qu’on me dit très-beaux, et de douze bataillons suisses; ce qui mettra votre armée tout à fait sur un pied respectable. Je suppose que les quatre bataillons du train d’artillerie pourront suffire aussi au service des 8e et 9e divisions.


 

References

References
1bureau de l’artillerie