Correspondance de Napoléon Ier – Novembre 1812

Viazma, 1er novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Viazma.

Mon Cousin, écrivez au général Charpentier que le 8e corps sera demain à Dorogobouje, où sera après-demain le quartier général; qu’il est nécessaire qu’il renforce tous les postes de communication, afin que les communications soient libres et la correspondance rapide. Dîtes-lui que tous les vivres, pain, biscuit, farine, bœufs, eau-de-vie, etc., soient dirigés sur Dorogobouje; il y dirigera également tous les caissons charges de vivres qui pourraient arriver, ainsi que ceux qui auraient pu être envoyés sur Yelnia. Nous aurons grand besoin de subsistances à Dorogobouje.

 

Viazma, 1er novembre 1812.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, écrivez au baron Reinhard pour qu’il fasse sentir au Roi combien il est ridicule de transformer l’église principale des protestants, de Cassel, en église catholique; qu’il est très-dangereux de toucher aux matières de religion, et que cela ne fait qu’aigrir les peuples; que Cassel, étant une ville protestante, il faut y laisser les protestants tranquilles. Si les paroles ne suffisaient pas, le baron Reinhard remettrait une note, pour témoigner mon mécontentement d’une mesure, aussi intempestive et aussi contraire à la politique.

 

Viazma, 2 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Viazma.

Mon Cousin, écrivez au duc de Reggio que j’ai appris avec la plus grande satisfaction que sa blessure était guérie et qu’il était dans le cas de reprendre du service; qu’en conséquence, mon intention est qu’il retourne au 2e corps pour en prendre le commandement.

Mandez au duc de Bellune  que j’apprends les événements de Polotsk et sa marche de ce côté; que j’espère qu’il aura repoussé Wittgenstein et repris Polotsk.

Écrivez-lui, en chiffre, que l’armée est en marche, comme je l’en ai déjà instruit, trouvant que l’hiver était trop long pour le passer loin de mes flancs; qu’il est probable que je me porterai la droite sur la Dvina et la gauche sur le Borysthène, et que par là nous nous trouverons en contact.

 

Semlevo, 2 novembre 1812

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le duc de Bassano, je reçois vos lettres du 29 octobre. Il faudrait, sur le marché que vous avez conclu pour les farines en faire verser 10,000 quintaux à Vitebsk et 10,000 à Smolensk. Il est important d’en avoir autant à Polotsk. Des marchés particuliers peu­vent y pourvoir. Pressez la formation des magasins et la livraison de tout ce que doit fournir le pays. J’approuve la mesure que vous avez prise relativement au transport des subsistances de Minsk. Le temps continue à être ici très-beau, ce qui est extrêmement favorable.

 

Slavkovo, 3 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, le nombre d’hommes de cavalerie à pied, est encore plus considérable que celui qui a été envoyé au général Bourcier; dites-le-lui. Il faut acheter des chevaux le plus possible, mais surtout faire le plus vite quon pourra.

 

Slavkovo, 3 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, le ministre de la guerre m’annonce que 290 moulins sont partis de Paris le 5 octobre. Quand vous lirez cette lettre nous serons au 5 novembre; ces moulins devront donc être arrivés à Vilna. J’attends avec impatience la nouvelle de leur arrivée. Nous n’avons pas avis de l’arrivée à Smolensk des deux pre­miers convois de moulins, qui cependant sont passés depuis un mois et quinze jours à Vilna.

Je n’ai pas de nouvelles du duc de Bellune; j’espère en recevoir demain à Dorogobouje.

 

Slavkovo, 3 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Slavkovo.

Mon Cousin, écrivez au duc d’Elchingen qu’aussitôt qu’il aura pris le commandement de l’arrière-garde il fasse filer l’armée le plus vite possible, car on use ainsi le reste du beau temps sans marcher. Le prince d’Eckmühl retient le vice-roi et le prince Poniatowski pour chaque charge de Cosaques qu’il aperçoit.

 

Slavkovo, 3 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Slavkovo.

Mon Cousin, donnez ordre aux bataillons des 127e, 128e et 129e, qui sont à Stettin, de se rendre à Danzig. Donnez ordre aux deux bataillons du 29e qui sont à Erfurt, aux 3e bataillons du 3e régiment et au 3e bataillon du 105e, qui sont également à Erfurt, de se rendre aussi à Danzig.

 

Slavkovo, 3 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Slavkovo.

Mon Cousin, donnez ordre que la brigade westphalienne qui avait été mise à la disposition du duc de Castiglione soit rendue au Roi; elle lui est nécessaire pour compléter son contingent.

 

Slavkovo, 3 novembre 1812.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je réponds à votre lettre du 3 octobre.

La cohorte de gardes nationales de la 32e division militaire fera partie de la brigade de cohortes qui est dans la 32e division, et qui, je crois, n’est composée que de 5 cohortes ; ainsi cette brigade sera composée de 6 cohortes.

Indépendamment de cette brigade ou de ces 6 cohortes, il faut 6 autres cohortes dans la 32e division, ce qui fera 12; quant à la 31e division, c’est-à-dire Groningen, vous pouvez y détacher 2 cohortes des brigades qui sont en Hollande ; cela n’a rien de commun avec les 12 cohortes de la 32e division.

Les 12 cohortes de la 32e division doivent toutes être composées d’anciens Français, hormis la cohorte du pays.

Mon intention est que les généraux de brigade chargés des cohortes n’en changent jamais.

Le général Saint-Cyr aura donc sous ses ordres 12 cohortes, qu’il placera à Lübeck, Hambourg et Bremen.

Le général commandant la 31e division aura 2 ou 3 cohortes de celles destinées à la défense de la Hollande; mais cela fait un système à part, et je n’approuve pas que dans votre lettre du 3 vous réunis­siez la 32e et la 31e division; cela n’a rien de commun.

Dans le premier état de situation des cohortes, mettez-moi bien de quels départements sont les cohortes, car c’est pour moi un grand objet de considération.

Je crois vous avoir expliqué qu’on ne devait pas renvoyer des conscrits d’un département dans un autre pour compléter les cohortes; les cohortes sont essentiellement départementales, et leur organisation primitive doit toujours être maintenue. Je crains que le directeur de la conscription n’ait pas bien compris cela.

 

Slavkovo, 4 novembre 1812.

ORDRE DU JOUR.

[1]Bien que signé par le major général, cet ordre du jour a été dicté par l’Empereur.

La volonté de l’Empereur est, si l’infanterie ennemie suit l’armée dans son mouvement, de marcher à sa rencontre, de l’attaquer, de la culbuter et de la faire en partie prisonnière; à cet effet, l’Empereur a fait choix d’une position intermédiaire entre le poste de Slavkovo et Dorogobouje. L’Empereur sera à cette position demain à la pointe du jour avec sa Garde; Sa Majesté désignera l’emplacement des troupes, qui doivent se masser et se cacher de manière à être couvertes par l’arrière-garde, commandée par le duc d’Elchingen, et être en mesure de déboucher sur l’ennemi avec toute l’armée, lorsque celui-ci croira n’avoir affaire qu’à l’arrière-garde, et aller à sa rencontre.

M. les maréchaux prendront les mesures pour que les soldats absents rejoignent les drapeaux, que chaque division ait son artille­rie, que les bagages filent sur Dorogobouje et Smolensk. Des gen­darmes de la ligne et d’élite seront placés à Dorogobouje pour faire rejoindre tous les hommes isolés, excepté les malades. Le duc d’Abrantès se tiendra prêt à partir avec son corps, infanterie, cavalerie et artillerie, au premier ordre, et enverra à cet effet un officier de confiance près du major général.

Tous les hommes de troupes à cheval qui sont à pied et qui forment les régiments aux ordres du général Charrière seront réunis et reformés à Dorogobouje, de manière que ces régiments soient prêts à avoir l’honneur de marcher avec les grenadiers, formant une brigade particulière sous les ordres du général Charrière. Les parcs de réserve d’artillerie et du génie, et notamment celui de la Garde aux ordres du général Sorbier, se tiendront en mesure de pouvoir se porter sur la positron désignée ci-dessus.

Les commandants du génie et de l’artillerie s’y trouveront, ainsi que le général Éblé ; s’y trouveront également des sapeurs, marins et pontonniers. Les généraux tiendront la main à ce que les armes soient en bon état et à ce que les soldats aient leurs cartouches.

Sa Majesté le roi de Naples se rendra demain de bonne heure sur la position pour létudier et recevoir les ordres de l’Empereur.

Le maréchal duc d’Elchingen, faisant l’arrière-garde, manœuvrera d’après les dispositions ci-dessus, de manière que l’infanterie enne­mie puisse être attirée après-demain matin sur la position, et que nous puissions la surprendre par une attaque générale faite à l’improviste.

Le secrétaire d’État comte Daru fera les fonctions d’intendant gé­néral de l’armée, en l’absence du général comte Dumas, malade, il fera ses dispositions et prendra toutes les mesures nécessaires pour pourvoir au service de santé et d’ambulance et que tout soit rendu et préparé sur la position.

En conséquence au présent ordre du jour, chacun, sans autre ordre, fera toutes les dispositions en ce qui peut le concerner.

L’Empereur attend le rapport de ce qui s’est passé hier pour fixer son opinion : comment le corps ennemi qui s’est hasardé à vouloir couper les communications entre les divisions françaises n’a-t-il pas été pris ?

 

Slavkovo, 4 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Slavkovo.

Mon Cousin, écrivez au prince d’Eckmühl que je ne reçois pas de compte de ce qui s’est passé depuis qu’il fait l’arrière-garde, et surtout dans la journée d’hier, et que ce compte m’est nécessaire pour connaître l’état des choses.

 

Dorogobouje, 5 novembre 1812, dix heures du soir.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dorogobouje.

Mon Cousin, donnez ordre au vice-roi de partir demain matin, à cinq heures, de la position qu’il occupe, pour passer la rivière et se porter à Doukhovchtchina. Il préviendra le prince d’Eckmühl, qui ne fera aucun mouvement, afin que le vice-roi passe avant lui. Le vice-roi enverra à ses bagages, qui ont dû parquer, l’ordre de passer le pont à trois heures du matin.

Donnez ordre au duc d’Abrantès de se porter à sept ou huit lieues de Smolensk, par la rive gauche du Borysthène, à peu près au point le plus saillant de la rivière du côté de Bielkino, et de couper là la route de Yelnia par des postes de cavalerie. Il se mettra avant tout en communication avec le général Baraguey d’Hilliers, auquel vous réitérerez les ordres de se rapprocher de Smolensk. Enfin vous ordonnerez au duc d’Abrantès d’écrire par Smolensk au moins tous les jours.

Donnez ordre au 5e corps de filer demain après le vice-roi, et de se rendre en toute diligence sur Smolensk ; d’y envoyer tous ses ba­gages et d’y réunir tous ses hommes isolés. Donnez ordre que tous les bagages continuent leur mouvement sur Smolensk.

À deux heures après minuit, lorsque j’aurai reçu des nouvelles de l’arrière-garde, je donnerai des ordres pour le duc de Trévise, pour la Garde, pour la cavalerie, pour le 1er et pour le 3e corps.

 

Dorogobouje, 5 novembre 1812.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vois avec mécontentement que la frontière des Pyrénées est insultée par une cinquantaine de brigands espagnols. Je vous avais mandé de diriger de ce côté une brigade de cohortes de gardes nationales ; il y en a en Poitou qui sont aujour­d’hui peu utiles. Que font d’ailleurs les gardes nationales destinées à la défense des Pyrénées ? Les cohortes de gardes nationales ne doivent pas entrer en Espagne, mais seulement garder les frontières. Prenez des mesures pour que ces événements n’arrivent plus.

 

Dorogobouje, 6 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dorogobouje.

Mon Cousin, écrivez au prince d’Eckmühl que, si ce matin à neuf heures, comme tout le porte à penser, l’arrière-garde n’a devant elle que des Cosaques et de la cavalerie, et que son corps soit, comme je le suppose, dépourvu de vivres, il est nécessaire qu’il se porte à dix ou à douze lieues de Smolensk, sur la route d’Yelnia à Smolensk, en trois jours et en suivant la route dont le tracé est ci-joint; il trouvera ici des guides. Ses bagages et une division pour les escorter suivront la route de Smolensk. Il serait nécessaire qu’il fasse dans la journée d’aujourd’hui au moins quatre lieues, et, en en faisant demain sept et après-demain sept, cela ferait dix-huit lieues, et, comme il y a vingt-huit lieues d’ici à Smolensk par la route qu’on lui trace, il ne serait qu’à dix lieues de Smolensk. Selon les localités, il peut se tenir à deux lieues plus loin ou plus près de Smolensk ; il se can­tonnera là, s’il n’y a rien de nouveau, et je recevrai ses rapports à Smolensk après-demain. Le duc d’Abrantès a suivi une route à peu près pareille et doit se placer à six ou sept lieues de Smolensk au coude de la rivière. Le général Baraguey d’Hilliers, qui était à Yelnia, a dû partir ce matin et faire le même mouvement pour se rapprocher de Smolensk. On dit le pays beau et ayant beaucoup de vivres. Il se mettra en correspondance avec ces différents corps, et ce mouvement sera d’autant plus avantageux qu’il n’y a pas de fourrages à Smolensk, et qu’il pourrait recevoir là ses bagages, y rester quelques jours en cantonnement, y recevoir ses détachements qui sont avec le géné­ral Baraguey d’Hilliers, et partir ensuite de là pour prendre ses cantonnements.

P. S. Donnez l’ordre aux deux brigades de la cavalerie légère du 1er corps qui sont avec le duc d’Elchingen de rejoindre le prince d’Eckmühl.

 

Dorogobouje, 6 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dorogobouje.

Écrivez au vice-roi qu’il arrive à Doukhovchtchina le plus tôt qu’il lui sera possible, et envoie sur-le-champ, pour se mettre en commu­nication avec Smolensk, une colonne d’infanterie et de cavalerie à mi-chemin. Il sera là à même de donner des nouvelles des mouve­ments ultérieurs de l’ennemi; il poussera des postes de cavalerie jus­qu’à Stobna, afin d’avoir promptement des nouvelles, et que je puisse lui transmettre des ordres, selon les circonstances, pour le faire venir à Smolensk ou Vitebsk, ce qui dépendra des nouvelles que j’aurai des mouvements ultérieurs qu’aura faits l’ennemi dans trois jours, et de ce qui se sera passé sur la Dvina.

 

Mikhaïlovka, 7 novembre 1812

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mikhaïlovka.

Mon Cousin, écrivez au duc de Bellune la lettre suivante :

En clair :

J’ai mis votre lettre du 2 sous les yeux de l’Empereur. Sa Majesté ordonne que vous réunissiez vos six divisions et que vous abordiez sans délai l’ennemi, et le poussiez au-delà de la Dvina; que vous repreniez Polotsk.

En chiffre :

(Vous devez avoir reçu ce chiffre du général Nansouty. )

Ce mouvement est des plus importants. Dans peu de jours, vos derrières peuvent être inondés de Cosaques; l’armée et l’Empereur seront demain à Smolensk, mais bien fatigués par une marche de 120 lieues sans s’arrêter. Prenez l’offensive, le salut des armées en dépend; tout jour de retard est une calamité. La cavalerie de l’armée est à pied, le froid a fait mourir tous les chevaux. Marchez, c’est l’ordre de l’Empereur et celui de la nécessité.

Envoyez cette lettre au général Charpentier par l’estafette qui va partir dans une heure; il l’enverra par un officier au duc de Bellune.

 

Mikhaïlovka, 7 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mikhaïlovka.

Mon Cousin, écrivez an général Charpentier que l’Empereur sera de­main ou après à Smolensk ; que le vice-roi sera le 8 à Doukhovchtchina ; qu’il faut diriger les Polonais sur la route de Mohilef, à quatre ou six lieues de la ville, sans les laisser entrer en ville; qu’il faut diriger toute la cavalerie à pied à trois lieues de Smolensk, dans la même direction; qu’il fasse connaître les cantonnements que provisoirement pourront prendre le 1er corps, le 8e, et la Garde, sans entrer en ville, où se portent l’artillerie et la cavalerie montée. Désignez-moi des endroits sur l’une et l’autre rive près des fourrages.

 

Smolensk, 9 novembre 1812.

ORDRE.

TITRE Ier.

Art. 1er.  Il sera formé un corps actif de 6,000 hommes de cava­lerie, composé d’une division de cavalerie légère et d’une division de cuirassiers et de dragons, lequel sera destiné à couvrir les cantonnements de l’armée pendant l’hiver.

ART. 2. Le général de division Bruyère aura le commandement de la cavalerie légère, le général de division….. aura celui de la division de grosse cavalerie; le générai Latour-Maubourg commandera ce corps.

Art. 3. Ce corps sera composé de tous les hommes disponibles, choisis parmi les plus anciens, des quatre corps de cavalerie, et il sera procédé à sa formation de la manière suivante.

TITRE II.

ART. 1er.  La division de cavalerie légère sera composée de quatre régiments dits régiments de piquets, qui seront formés : le premier avec les hommes montés de la 1e division de cavalerie légère; il portera le nom de régiment-piquet n° 1 ; chacun des sept régiments de cette division fournira une compagnie composée d’un capitaine, un lieutenant, deux sous-lieutenants, un maréchal des logis chef, deux maréchaux des logis, un brigadier-fourrier, deux brigadiers, deux trompettes, soixante cavaliers; total, soixante et douze.

Ceux de ces régiments qui ne pourraient fournir ce nombre de­vront le compléter aussitôt qu’il leur arrivera des hommes montés; ceux des régiments qui pourraient fournir plus de soixante et douze hommes donneront deux compagnies; ceux qui pourront fournir plus de cent vingt hommes en formeront trois.

Art. 2. Les compagnies des trois brigades de la 1e division de cavalerie légère formeront ainsi au moins trois escadrons pour le 1er régiment-piquet; le général de division désignera pour le com­mander un colonel, deux chefs d’escadron, un adjudant-major et deux adjudants sous-officiers.

Art. 3. Le 2e régiment-piquet de cavalerie légère sera formé de la même manière par la 2e division de cavalerie légère.

ART. 4. Le 3e régiment-piquet sera formé de même par la 3e di­vision.

Art. 5. Le 4e régiment-piquet sera formé de même par la 4e di­vision.

Art. 6. Les 1er, 2r, 3e, 4e et 5e régiments de chevau-légers for­meront chacun autant de compagnies qu’ils auront de fois soixante et douze hommes montés, et il en sera formé autant de régiments qu’il y aura de fois quatre escadrons ; ils seront numérotés régiments-piquet n° 5 et suivants, et formeront la 4e brigade de la division légère active.

Art. 7. Le roi de Naples désignera quatre généraux de brigade, pris dans les quatre divisions de cavalerie légère, pour servir dans celle-ci. Le général de division désignera un colonel, deux chefs d’escadron, etc., par régiment, comme il est dit pour le premier, art. 2 du Titre Ier.

TITRE III.

Art. 1er. Les 1er et 2e divisions de cavalerie, composées chacune de trois régiments, formeront une compagnie ou un escadron selon leurs forces et formeront le 1er régiment-piquet de cuirassiers.

Les 2e et 4e divisions formeront le 2e régiment-piquet, les quatre régiments de dragons de la 6e formeront le 3e régiment-piquet, et les quatre régiments de la 7e division formeront le 4e régiment-piquet.

Art. 2. Il sera procédé à leur formation de la manière prescrite pour la cavalerie légère.

Art. 3. Le roi de Naples désignera deux généraux de brigade, pris parmi ceux employés présentement dans les divisions de grosse cavalerie, pour commander chacun deux régiments-piquet; le général de division désignera par régiment le même nombre d’officiers supé­rieurs que dans les régiments de cavalerie légère.

Art. 4. Tous les détachements qui font partie des régiments ou escadrons de marche, sous les ordres des généraux Evers et Baraguey d’Hilliers, seront incorporés de suite dans les régiments-piquet.

TITRE IV.

Art. 1er. Toutes les compagnies ou escadrons qui seront fournis aux régiments-piquet seront traités comme détachés et continueront à faire partie de leurs régiments respectifs.

Art. 2. Les colonels auront soin que la sellerie, l’habillement et l’armement des compagnies détachées aux régiments-piquet soient dans le meilleur état possible.

Art. 3. Ce corps de cavalerie active devra être tenu le plus pos­sible au complet; à fur et mesure qu’un officier, sous-officier et cavalier deviendra malade ou blessé, son régiment le remplacera sans délai.

Art. 4. Cette opération terminée, les quatre corps de cavalerie se mettront en mouvement pour se porter avec tous les hommes à pied et des petits dépôts dans les cantonnements d’hiver, et les chevaux éclopés qui sont en deçà du Dniepr joindront leurs régiments ; les hommes à pied auront des cartouches et marcheront avec les officiers, en règle, pour pouvoir se défendre contre les partis ennemis et défendre leurs cantonnements.

Art. 5. Tous les régiments de marche, détachements des petits dépôts, qui de derrière viendraient à l’armée, seront dirigés sur leurs régiments ; ce n’est que de là qu’ils partiront pour compléter ou aug­menter, s’il y a lieu, le corps actif, jusqu’au moment où, par l’arrivée des chevaux de remonte, chaque régiment pourra avoir de 3 à 400 hommes à mettre en campagne, époque à laquelle tout rentrera dans l’ordre primitif.

 

Smolensk, 9 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, il est nécessaire que la journée de demain soit em­ployée à se réunir. Vous voudrez bien en conséquence donner ordre au 5e corps, cavalerie, infanterie, artillerie et bagages, de se porter à deux lieues, au plus à trois lieues, sur le chemin de Mstislavl, où tout le corps se réunira. Des officiers d’état-major et des officiers des régiments resteront au pont pour diriger les voitures, les fractions de corps et les hommes isolés sur le lieu où se réunira le corps.

Le 8e corps se portera entre Smolensk et la poste de Drozjino, infanterie, cavalerie, etc., et prendra la même précaution de tenir des officiers au pont pour diriger les hommes.

Toute l’artillerie de la Garde et l’artillerie générale appartenant au parc général se réuniront dans un village à une ou deux lieues sur la route de Krasnoï. Le parc du génie se réunira avec le parc d’artil­lerie sur la route de Krasnoï.

Les quatre corps de cavalerie se réuniront dans quatre villages, à une ou deux lieues de Smolensk; généraux, artillerie, administra­tion, tout se réunira dans ces villages. Les généraux enverront leurs officiers d’état-major au pont; les colonels y enverront des officiers pour ramasser tous les hommes isolés. Le régiment des hommes isolés de cavalerie du général Charrière sera en conséquence dissous. Les hommes à pied appartenant aux brigades attachées aux 1er et 3e corps d’armée se réuniront avec le 4e corps de cavalerie dans le village qui lui est destiné. Tout ce qui appartiendrait au 4e corps d’armée, que commande le vice-roi, pourra se réunir sur la rive droite et de manière à ne pas gêner la circulation. Le quartier général entrera dans Smolensk.

Tout le corps du duc de Trévise, y compris la division Claparède et la division Roguet, se réunira dans les faubourgs de Smolensk; la vieille Garde se réunira dans la ville, de sorte qu’après-demain tous ces corps ralliés puissent se mettre en marche. Un village sera désigné pour la réunion des équipages militaires. Le dépôt de la Garde à pied et à cheval se mettra demain en marche pour Krasnoï.

 

Smolensk, 10 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, envoyez au vice-roi un officier d’état-major, qui sera escorté par quelques hommes de son corps, pour lui faire connaître qu’il doit arriver le plus tôt possible sur Smolensk.

 

Smolensk, 11 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, donnez ordre que le corps du général Baraguey d’Hilliers soit dissous. Les 1,000 hommes de la Garde impériale rejoindront la Garde, à la pointe du jour, demain. Les 1,565 hom­mes du 1er corps rejoindront le 1er corps. Les 500 hommes du 3e corps attendront à Smolensk le passage du 3e corps. Le 11e esca­dron, le 10e, le 9e, enfin toute la cavalerie, rejoindront leurs corps respectifs dans la journée de demain. L’artillerie sera envoyée au général la Riboisière. Donnez ordre au général Baraguey d’Hilliers d’aller prendre le gouvernement de Königsberg, en place du général Loison.

 

Smolensk, 11 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, écrivez sur-le-champ par l’estafette, et, si l’estafette est partie, par un officier polonais, au général Dombrowski qu’il doit, par-dessus tout, se charger de la défense de Minsk.

 

Smolensk, 11 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, donnez ordre à la division Heudelet de se mettre en marche pour se rendre à Danzig ; elle sera remplacée par la division Lagrange. Vous annoncerez d’ailleurs que la 35e division, com­mandée par le général Grenier, arrivera d’Italie dans le courant de décembre. Mandez au duc de Castiglione de rendre à la Westphalie sa colonne mobile, ainsi qu’à la Saxe, afin que ces deux puissances aient moyen de recruter leur contingent. Donnez ordre aux 2,000 che­vaux qui font partie de la brigade du général Cavaignac de les mettre en marche, sans délai, pour se rendre à Elbing. Vous devez déjà avoir donné ordre aux bataillons des 127e et 128e de se rendre à Danzig.

 

Smolensk, 11 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, recommandez bien aux gouverneurs de Minsk et de Vilna de ne pas employer contre l’ennemi les régiments de marche, soit de cavalerie, soit d’infanterie; que c’est détruire des ressources sans profit; que ces régiments sont hors d’état de se battre; qu’on peut bien les arrêter à Vilna ou à Minsk, pendant quelques jours, pour le service de la place et pour faire nombre, mais que c’est une vraie folie de les envoyer devant l’ennemi ; qu’on me fait perdre ainsi beaucoup de monde, et qu’on m’ôte les moyens de recruter mes cadres. Écrivez sur-le-champ à Krasnoï et à Orcha, pour qu’on y retienne les troupes qui se rendraient à Smolensk ; toutes les troupes qui seraient en marche d’ici à Krasnoï doivent retourner à Krasnoï; celles qui seraient entre Krasnoï et Orcha retourneraient à Orcha.

Mandez au prince Poniatowski qu’il est nécessaire qu’il se rende, avec son corps d’armée, à Mohilef ; que je le laisse maître de prendre la route qu’il croira la plus directe ou la meilleure, à l’exception de la grande route de Krasnoï, que suivra l’armée et qu’il ne faut pas trop embarrasser; qu’arrivé à Mohilef il cherchera à réorganiser son corps, en y réunissant des régiments de marche qui lui appartiennent et que le gouverneur de Minsk a retenus; qu’après cette première opération il s’occupera de resserrer tous ses cadres en une division, et qu’ensuite les cadres qui se trouveront disponibles, il les ramè­nera à Varsovie pour y prendre les hommes qui s’y trouvent et s’y compléter; qu’il peut partir demain 12.

 

Smolensk, 12 novembre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, répondez au général Bourcier qu’au lieu de 2,000 che­vaux il faudrait qu’il traitât à Varsovie au moins pour 5,000 che­vaux, dont 1,000 de trait; qu’il y a des armes de toute espèce à Kovno et à Vilna, qu’il doit y en avoir à Varsovie. Ordonnez au général d’artillerie d’écrire à cet effet au général Bourcier. Faites con­naître au général Bourcier que les dépôts de Lepel et d’Orcha ont quelques effets de harnachement, mais que les hommes démontés pendant la campagne, et depuis le départ de Moscou par le mauvais temps, n’ont pas pu emporter leurs selles, faute de moyens de trans­port, et que ce nombre est très-considérable; que j’estime que les commandes doivent être de 30,000 chevaux, dont 7 à 8,000 de trait et des équipages militaires.

 

Smolensk, 14 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, je fais sauter les remparts de Smolensk, et je me rends à Orcha. Nous avons ici 9 à 10 degrés de froid. J’ai reçu vos lettres du 10.

Je trouve que vous avez perdu bien inutilement un mois pour commencer à passer des marchés de chevaux. Cette perte est irrépa­rable. Faites passer des marchés pour des chevaux d’artillerie et d’équi­pages. Notre consommation en chevaux est énorme, et nos besoins urgents.

 

Smolensk, 14 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.

Mon Cousin, écrivez au duc d’Elchingen que je me rends à Krasnoï; qu’il est nécessaire qu’il continue de faire l’arrière-garde ; que le prince d’Eckmühl le soutiendra ; qu’il doit rester dans la posi­tion où il est toute la journée d’aujourd’hui; que demain, 15, il prendra la position du couvent et des faubourgs, et que le 16 il fera sauter la ville en s’en allant, ou simplement prendra la position de la tête de pont pour ne faire sauter la ville que le 17, si tout n’était pas prêt ; qu’il est nécessaire qu’il se concerte avec le prince d’Eckmühl ; que je lui recommande surtout de faire en sorte que les pièces et les munitions soient détruites et qu’on laisse le moins de Français possible dans la place.

 

Smolensk, 14 novembre 1812.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Les 200 moulins que vous nous avez expédiés sont distribués; mais il paraît qu’on leur reproche déjà d’être mal faits ; la noix n’est pas assez trempée. J’ai ordonné à des officiers d’artillerie d’en dresser un procès-verbal. Le fait est qu’il y en a déjà qui ne peuvent plus servir. Les ouvriers de Paris ont fait cela comme chose de pacotille. Préparez-en un nombre d’autres pour réserve.

 

Krasnoï, 15 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Krasnoï.

Mon Cousin, je ne puis que vous témoigner mon mécontentement de ce que vous n’avez pas prévenu le commandant des dépôts de cavalerie de Gorki du mouvement de l’armée et de celui qu’il avait à faire au-delà du Dniepr. Il y a trois jours que je vous en ai donné l’ordre, et le commandant de Krasnoï ne le reçoit qu’aujourd’hui. Faites partir sur-le-champ un officier d’état-major; qu’il marche toute la nuit, et imiterez cet ordre au commandant du détachement de cavalerie à Gorki.

 

Doubrovna, 18 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Doubrovna.

Mon Cousin, écrivez au gouverneur de Minsk que je serai demain à Orcha ; faites-lui connaître que j’ai ordonné au 2e corps, avec une division de cuirassiers et 100 pièces de canon, commandés par le duc de Reggio, de se porter en toute hâte et en ligne directe sur Borisof, pour assurer ce poste important et de là marcher sur Minsk. En attendant, le général Dombrowski se rendra avec sa division dans cette place et observera ce que fait le corps qui est à Minsk. Recom­mandez-lui d’envoyer des agents du pays au duc de Bassano et au prince Schwarzenberg, et d’avoir soin de vous écrire fréquemment.

 

Doubrovna, 18 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Doubrovna.

Mon Cousin, donnez ordre au général Dombrowski de se rendre à Borisof, où il sera sous les ordres du duc de Reggio, et en attendant de prendre toutes les mesures pour mettre à l’abri ce poste important. Faites-lui connaître que le quartier général se porte entre Orcha et Borisof. Comme la division Dombrowski a plus d’artillerie qu’il ne lui est nécessaire, et que l’armée en a besoin par les pertes faites sur les glaces, vous demanderez au général Dombrowski de vous faire connaître s’il peut fournir une batterie de six pièces, de quel calibre, et ce qui lui resterait après.

 

Doubrovna, 19 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Doubrovna.

Mon Cousin, faîtes partir l’aide de camp du duc de Reggio; il sera porteur pour le duc de Bellune du duplicata de la lettre que vous lui avez écrite hier. Vous ferez connaître au duc de Reggio que le duc de Bellune doit lui avoir transmis les ordres pour marcher sur Borisof ; que j’arrive à Orcha aujourd’hui 19 à midi; qu’il ne saurait arriver trop tôt à Borisof. Mandez-lui qu’il fasse connaître le jour où il arrivera pour y former l’avant-garde de toute l’armée et prendre la route de Minsk, sur laquelle l’Empereur va se porter; qu’il dérobe ce mouvement à l’ennemi, au moins autant de temps que cela lui sera possible; qu’il prépare trente pièces de canon pour remettre aux autres corps d’armée à Borisof, où il est possible qu’il se rencontre avec l’armée ; que cela aura le double avantage d’alléger le 2e corps et de fournir aux autres corps une artillerie qui leur est fort nécessaire.

Écrivez au duc de Bellune que j’arrive à Orcha aujourd’hui à midi, qu’il est nécessaire que la position qu’il prendra le mette plus près de Borisof, de Vilna et d’Orcha que l’armée ennemie; de tâcher de masquer le mouvement du duc de Reggio et de faire croire, au con­traire, que je me porte sur le général Wittgenstein, manœuvre assez naturelle; que mon intention est de me porter sur Minsk, et, quand on sera maître de cette ville, de prendre la ligne de la Berezina; qu’il serait donc possible qu’il reçût l’ordre de se porter sur Berezino, de couvrir par-là la route de Vilna et de se trouver réuni, en com­munication avec le 6e corps ; qu’il étudie ce mouvement et vous fasse connaître ses observations; qu’aussitôt qu’il aura fait connaître la situation de l’artillerie qu’il peut céder aux autres corps, on lui en­verra des ordres pour le point vers lequel elle peut être dirigée.

Assurez-vous que le duc de Bellune a un chiffre, afin de pouvoir écrire dans les lettres quelques mots en chiffre qui empêchent que ses lettres ne soient utiles à l’ennemi dans le cas où elles tomberaient dans ses mains; cette mesure est indispensable, vu la quantité de Cosaques qui vont se trouver partout.

 

Orcha, 20 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, rien de nouveau depuis ma dernière lettre, dont je vous envoie un duplicata. Je me dirige sur Borisof pour marcher sur Minsk, ou, si l’ennemi est trop fort, me diriger par Borisof sur Vileïka et Vilna. Nous avons trouvé ici une soixan­taine de pièces d’artillerie qui nous sont inutiles. Dirigez par eau, par terre, de toutes les manières, l’équipage de siège sur Danzig, d’abord les pièces, après les poudres.

Écrivez en chiffre et confidentiellement au ministre de la police générale. Ma santé est fort bonne. Je n’ai point de nouvelles du maréchal Ney; j’en désespère, tâchez de m’envoyer des vivres sur Vileïka. Surtout envoyez-moi des nouvelles par des affidés; je vous en expédierai un tous les jours.

Prévenez le prince Schwarzenberg que je marche sur Minsk et que je compte sur lui.

 

Baran, 20 novembre 1812, au soir.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le duc de Bassano, mes inquiétudes sur le maréchal Ney ont cessé. Il vient de nous rejoindre. Je me suis décidé à diriger toute l’armée, même le duc de Reggio et le duc de Bellune, sur Borisov et de là sur Minsk. Ma grande inquiétude, c’est pour les vivres.

 

Baran, 21 novembre 1812, trois heures du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Baran.

Mon Cousin, instruisez le duc d’Elchingen que douze pièces d’ar­tillerie qui étaient attachées au général Latour-Maubourg, et qui sont à une lieue d’Orcha sur cette route, lui sont destinées ; qu’il est né­cessaire qu’il les fasse reconnaître afin de les prendre le plus tôt possible avec ses troupes; qu’il fasse prendre aussi des fusils pour les hommes désarmés. Donnez ordre que le général Marchand re­joigne le duc d’Elchingen avec tous les hommes appartenant aux 3e, 2e et 9e corps. Mandez au duc d’Elchingen que je désire connaître l’heure à laquelle ses troupes seront réunies dans la ville et pourront prendre position sur la hauteur, pour suivre le mouvement et déblayer Orcha.

Mandez au prince d’Eckmühl que je désire qu’il m’envoie sur-le-champ toutes les cartes qu’il pourrait avoir du gouvernement de Minsk, vu que nous n’avons plus aucune carte.

Expédiez un courrier au gouverneur de Minsk, qui est à Borisof, pour lui faire connaître que vous avez envoyé l’ordre au général Dombrowski de rallier toute sa division ; que, s’il n’avait pas reçu votre ordre, il le lui réitère en lui communiquant votre lettre; que l’Empereur est mécontent que ce général ait disséminé ses forces, et que dans des circonstances comme celles-ci il n’ait pas tout son monde dans la main; qu’il ait soin d’instruire le duc de Reggio et de vous instruire exactement de tout ce qui arriverait; qu’il est sur­prenant qu’il n’ait pas encore reçu quelque agent de Vilna. Mandez à ce gouverneur de vous envoyer une ou deux personnes connaissant parfaitement les routes du gouvernement de Minsk et le pays, sur­tout de Borisof à Minsk.

Mandez au prince d’Eckmühl qu’il fasse sortir toutes les voitures d’Orcha et fasse connaître l’heure à laquelle la ville pourra être désencombrée ; au vice-roi de prendre un soin particulier d’organiser son artillerie, de faire connaître le lieu où elle se trouve, la position qu’il occupe, et d’aider à faire déblayer toutes les voitures inutiles qui sont à Orcha ; chargez-le de faire connaître l’heure à laquelle le duc d’Elchingen sera rallié à Orcha et pourra en partir.

Expédiez l’aide de camp du général Partouneaux au duc de Bellune, en lui envoyant le duplicata de la lettre que lui a portée hier le général Dode. Mandez-lui que, comme vous apprenez qu’il s’est ré­pandu le bruit dans l’armée que le duc d’Elchingen avait été coupé, vous croyez nécessaire de le rassurer à ce sujet; que ce maréchal, ayant fait son mouvement par la rive droite, a rejoint hier à Orcha.

 

Tolotchine, 22 novembre 1812.

ORDRE DU JOUR.

Les bagages seront réduits.                                             |

Tout officier général ou d’administration qui a plusieurs voitures en fera brûler la moitié et remettra les chevaux au parc d’artillerie. Le major général est chargé de l’exécution du présent ordre.

 

Bobr, 23 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Bobr.

Mon Cousin, écrivez au duc de Bellune, qui doit être ce soir à Kholopenitchi, pour lui faire connaître que je suis à Bobr, que le duc de Reggio est sur Borisof; qu’il est important qu’il fasse couper la route de Lepel, comme il se le proposait, du côté de Barany, afin d’être certain que Wittgenstein ne porte rien sur le duc de Reggio, et que s’il y portait quelque chose il doit l’attaquer vigoureusement; que j’espère qu’il m’aura écrit et que je recevrai ce soir un de ses officiers; qu’il est probable que je parte demain pour Borisof; que , aussitôt que j’aurai reçu l’officier qu’il n’aura pas manqué de m’envoyer, je lui écrirai de nouveau; que notre arrière-garde est à Tolotchine.

 

Bobr, 23 novembre 1812

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Bobr.

Mon Cousin, expédiez un des aides de camp du duc de Reggio pour lui faire connaître que je suis arrivé ici avec les trois divisions de la Garde et la cavalerie ; que j’attends avec impatience d’apprendre dans la nuit ce qu’il aura fait dans la journée d’aujourd’hui, qu’il est maître d’un passage sur la Berezina et qu’il y fait établir des ponts, que j’espère qu’il aura pris des précautions pour que notre correspondance puisse être extrêmement rapide, et qu’il aura laissé à cet effet des postes intermédiaires.

 

Bobr, 24 novembre 1812, cinq heures du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Bobr.

Mon Cousin, donnez ordre que tous les détachements polonais qui sont avec le général d’Alorna ou en arrière joignent le général Zayonchek, qui réunira également aujourd’hui le plus de monde qu’il pourra et prendra les ordres du duc d’Elchingen, sous les ordres duquel je le place.

Donnez ordre au général Claparède de continuer sa route aussitôt qu’il aura fini son opération, et de faire aujourd’hui quatre ou cinq lieues.

La 1e division de la jeune Garde, la division de la vieille Garde, la division Roguet, la cavalerie de la Garde, l’artillerie du général Sorbier, chaque division ayant son artillerie, avec l’artillerie de ré­serve en arrière, partiront aujourd’hui pour faire une marche sur Borisof. La division Delaborde se mettra en mouvement au jour, la vieille Garde à neuf heures et la division Roguet successivement. L’artillerie du général Sorbier, celle même qu’il a prise hier, partira à six heures du matin pour passer le défilé. Les équipages charges de biscuit suivront la Garde et se mettront également en mouvement à six heures du matin. Le duc de Trévise aura soin que tout ce qui dépasserait le front de sa division soit couvert par un bon bataillon de la jeune Garde.

 

Bobr, 24 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Bobr.

Mon Cousin, donnez ordre an général Zayonchek de faire brûler la moitié des carrosses, cabriolets, fourgons de bagages ou d’effets, petites voitures de toute espèce qu’a son corps d’armée, de manière à réduire à moitié les voitures de son corps, ce qui sera encore trop; , de réunir à cet effet tous les bagages, caissons de bagages et caissons de comptabilité au-delà du Bobr, et d’y faire son opération de réduc­tion ce matin avant neuf heures.  Il remettra au général Sorbier 120 chevaux et environ 80 cognats, ce qui fera 200 chevaux, et davantage s’il le peut. Si ce contingent n’était pas fourni, il préviendra que demain, à mon passage, je ferai brûler toutes les voitures et fourgons de son corps. Vous enverrez un officier d’état-major avec 50 gendarmes pour assister à cette opération. Le général Sorbier y enverra un officier d’artillerie, quelques canonniers et 50 soldats du train pour prendre les chevaux.

Vous donnerez ordre au duc d’Abrantès de faire brûler la moitié des voitures, cabriolets, fourgons, carrosses, etc., qui sont avec son corps d’armée et avec la cavalerie à pied, et de fournir des chevaux et des cognats au général Sorbier; il fera connaître le nombre qu’il aura pu fournir.

Donnez ordre au général Claparède de réunir tous ses bagages au-delà du Bobr et de faire brûler la moitié des carrosses, cabriolets, fourgons de bagages et voitures de toute espèce qu’il a sous son es­corte, de manière à pouvoir fournir 120 chevaux et 80 cognats au général Sorbier; le général Sorbier enverra un officier d’artillerie et 50 soldats du train pour recevoir les chevaux, et vous enverrez des officiers d’état-major et de la gendarmerie pour assister à ces opé­rations. Réitérez l’ordre à toute l’armée pour que les fourgons et les voitures inutiles soient brûlés et qu’aucun individu du grade de colonel et au-dessous ne puisse avoir plus d’une voiture, soit cabriolet, soit voiture, soit fourgon. Vous ferez connaître au général Sorbier que, s’il n’avait pas ces chevaux, il doit vous le faire savoir sans délai, vu qu’il est indispensable qu’il emmène tous les approvisionnements du 2e corps et qu’on ne laisse aucune pièce ni caisson de munitions en route.

 

Bobr, 24 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, le général Dombrowski, qui était à la tête du pont de Borisof, s’est laissé forcer le 21. Le duc de Reggio est arrivé le 23 à Borisof, a repris la ville et battu les deux divisions russes qui sont là. On dit Lambert blessé grièvement. Mais le pont ‘est brûlé; on espère en construire un dans la journée. Il fait froid.

Ma santé est fort bonne. Il me tarde bien d’avoir des lettres de Vilna et de Paris.

Je n’ai reçu aucun agent de vous. Cela était pourtant facile. Je n’ai point de nouvelles de Schwarzenberg. Où est-il ? Faites faire à Vilna une grande quantité de vivres.

 

Lochnitsa, 25 novembre 1812, une heure du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Lochnitsa.

Mon Cousin, expédiez sur-le-champ votre aide de camp Flahault au duc de Reggio ; qu’il y arrive le plus tôt possible et lui remette la lettre suivante :

« Par votre lettre du 24, à cinq heures du soir, vous me faites connaître que vous croyez avoir besoin d’être soutenu pour opérer le passage de la rivière. Le duc de Trévise sera aujourd’hui à Borisof de bonne heure avec deux divisions de la Garde. Le duc de Bellune a eu hier un combat, qui, à en juger par la canonnade, a dû durer quelque temps, entre Kholopenitchi et Barany. Vous aurez sans
doute fait préparer des chevalets au moins pour deux ou trois ponts.

Le général Éblé doit être arrivé à Borisof. Si vous n’avez pas passé cette nuit, il devient très-urgent dans les circonstances actuelles de passer aujourd’hui.»

 

Lochnitsa, 25 novembre 1812, au matin.

A Joachim Napoléon, roi des Deux-Siciles, commandant la cavalerie de la Grande Armée, à Borisof

Le duc de Bellune arrivera à midi à Kostritsa et sera en mesure ce soir de passer la rivière. Faites préparer des chevalets pour jeter, un pont. Le général Éblé et beaucoup de sapeurs sont arrivés. Ce soir nous exécuterons le passage avec le corps d’Oudinot, celui du ; duc de Bellune, la Garde impériale et successivement les autres corps; mais avec ces trois corps seulement, qui forment neuf divisions, il y a de quoi battre tout ce qui se trouve devant Borisof, et avec l’aide de Dieu balayer entièrement la rive droite, et faire une opération qui ait de l’influence sur le reste de la campagne. Communiquez cela au duc de Reggio et faites-moi connaître son opinion et la vôtre sur tout cela.

 

Lochnitsa, 25 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Lochnitsa.

Donnez l’ordre au duc de Trévise de partir avec la division Delaborde et son artillerie, à six heures du matin, et de se porter d’abord sur Nemanitsa. La vieille Garde et la division Roguet, la cavalerie de la Garde, celle de Latour-Maubourg, se mettront en marche à huit heures. Il sera tenu des brigades de gendarmerie pour empêcher les traînards, les éclopés et la cavalerie démontée de s’approcher de Borisof et de dépasser le village de Nemanitsa.

 

Lochnitsa, 25 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Lochnitsa.

Donnez ordre au général Claparède de se mettre en mouvement de bonne heure pour se porter avec tous ses bagages et son convoi entre Lochnitsa et Nemanitsa; et il passera le ravin qui est entre ces deux endroits. Donnez le même ordre au duc d’Abrantès.

Donnez ordre :

Au duc d’Elchingen, de s’approcher le plus qu’il pourra de Borisof, afin de pouvoir cette nuit passer la rivière; il s’arrêtera à Nemanitsa, et de ce point fera demander des ordres pour sa position ;

Au prince d’Eckmühl, de continuer son mouvement; vous le lais­serez maître de prendre la position qu’il jugera convenable entre Kroupki et Natcha;

Et au vice-roi, de rester selon les circonstances à Natcha ou de prendre position entre Natcha et la poste, selon ce qui se sera passé chez le prince d’Eckmühl.

Faites connaître à ces généraux que je compte forcer le passage de la Berezina la nuit prochaine avec le 2e corps, le 9e et la Garde impériale, et successivement soutenu par le duc d’Elchingen et par tous les autres corps; qu’aussitôt que ce passage aura réussi je leur enverrai des ordres de venir aux ponts; que je compte, avec les trois premiers corps ci-dessus nommés, attaquer tout ce que l’ennemi a sur la rive droite.

 

Stoudienka, 27 novembre 1812, une heure du matin.

Au capitaine de Mortemart, officier d’ordonnance de l’empereur, à Stoudienka.

L’officier d’ordonnance Mortemart se rendra en toute diligence à Borisof; il rencontrera en route le général Claparède avec le trésor; il lui fera connaître qu’il doit avoir reçu l’ordre par l’état-major général, daté du 27, à une heure du matin, de se rendre en toute diligence au passage, afin de soutenir le maréchal duc de Reggio, en laissant le trésor sous une escorte de 50 hommes, jusqu’à ce que le détachement que doit fournir le vice-roi ou le duc d’Abrantès soit arrivé ; que, d’ailleurs, ce convoi ne doit pas perdre un moment à se rendre aux ponts. S’il rencontre en route le vice-roi et le prince d’Eckmühl en deçà de Borisof, il leur dira d’accélérer leur marche, et, si la fatigue de leurs troupes est telle qu’ils ne puissent pas avancer, il les engagera à faire toutes les démonstrations possibles pour inquiéter l’ennemi, soit par des tirailleurs, soit par des batteries, etc. Le duc de Reggio était cette nuit devant le village de Stakhof (à deux lieues du passage et à une lieue et demie de Borisof), et l’ennemi était dans ce village; ainsi toute démonstration d’une rive sur l’autre l’inquiétera beaucoup et l’obligera à envoyer des ba­taillons pour garder ses flancs.

Il tâchera d’arriver à Borisof entre deux et trois heures du matin. Il se rendra chez le duc de Bellune; il lui fera connaître que le major général lui envoie l’ordre, en date de minuit et demi le 27, de se rendre sur-le-champ au passage, afin de pouvoir soutenir le duc de Reggio, dont il lui fera connaître la position ainsi que celle de l’ennemi; qu’il est nécessaire que le duc de Bellune fasse partir sur-le-champ une division et successivement l’autre; que Borisof sera gardé par une brigade de la 12e division qu’il rappellera à cet effet, si les circonstances le permettent, à moins que le prince d’Eckmühl ne s’y trouve arrivé et obligé de s’y reposer, auquel cas il pourrait s’en charger. Il restera jusqu’au jour à Borisof; il verra la contenance qu’a l’ennemi vis-à-vis Borisof, s’il a évacué cette position ou s’il tient. Ensuite il viendra me rendre compte du lieu où se trouvent toutes les troupes.

 

Stoudienka, 27 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Stoudienka.

Mon Cousin, donnez ordre au maréchal duc d’Elchingen de passer la rivière avec tous les Polonais, ce qu’il a réuni du 3e corps et la division Claparède, qui va arriver à la pointe du jour et que je mets sous ses ordres, et avec ces troupes de soutenir le maréchal duc de Reggio s’il était attaqué ce matin. Aussitôt que le duc de Bellune sera arrivé, il se portera également pour soutenir le duc de Reggio. Enfin le duc de Trévise, avec la jeune Garde, passera la rivière pour soutenir également le duc de Reggio. Je voudrais re­tarder ce dernier mouvement jusqu’à ce que les troupes du vice-roi fussent arrivées ici, dans la crainte qu’il ne vienne à paraître des troupes de Wittgenstein sur cette rive.

 

Stoudienka, 27 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, je viens de passer la Berezina; mais cette rivière qui charrie beaucoup de glaces rend très-difficile la stabilité de nos ponts. L’armée qui était opposée à Schwarzenberg voulait nous disputer le passage; elle est cette nuit concentrée sur la rive droite de la Berezina, vis-à-vis de Borisof. Le froid est très- considérable; l’armée est excessivement fatiguée. Aussi je ne perds pas un moment pour nous rapprocher de Vilna, afin de nous re­mettre un peu. Il est possible que je prenne la route de Zembine, Plechtchennitsy, Smorgoni et Ochmiana. Faites faire une grande quantité de pain biscuité et de biscuit. Je suppose que vous avez donné constamment de nos nouvelles à Paris. J’ai reçu votre lettre du 22, dont M. Abramowicz était porteur; c’est la première que je reçois.

Que fait donc le prince de Schwarzenberg ?

 

Zanivki, 27 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Zanivki.

Le duc de Bellune gardera les ponts et la ville de Stoudienka ; il enverra des partis pour ne pas être surpris par les mouvements de l’ennemi; il mettra le meilleur ordre possible au passage des ponts et veillera à ce qu’on travaille à les tenir en état.

Le vice-roi passera dans la nuit avec son artillerie, et prendra son bivouac au village brûlé, en arrière de la jeune Garde.

Le prince d’Eckmühl passera demain, dans la matinée, avec son artillerie, et prendra également position en arrière du village brûlé.

On fera passer jour et nuit toutes les voitures de bagages et des officiers blessés; tout cela se dirigera sur Zembine.

L’intendant général fera passer dans la nuit les bataillons des transports militaires qui étaient à la suite de la Garde ; ils serviront à évacuer tous les blessés du duc de Reggio, de l’affaire d’hier ; en conséquence, le chef d’état-major et l’ordonnateur feront connaître le lieu où se trouvent les blessés.

Il est nécessaire que le duc de Bellune prenne une bonne po­sition hors du village, sur les hauteurs, avec son infanterie, artillerie et cavalerie, afin de pouvoir tenir là plusieurs jours et jusqu’à ce que toutes les voitures, bagages et effets quelconques soient passés.

 

Zanivki, 28 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Zanivki.

Donnez ordre au vice-roi de partir demain, à la petite pointe du jour, de Zembine pour se porter sur Plechtchennitsy, avec tout ce qu’il escorte. Le duc d’Abrantès marchera derrière lui avec toute la cavalerie à pied. Le vice-roi prendra sous ses ordres la cavalerie polonaise que commande le colonel Tyszkiewicz, qui jettera des partis pour éclairer tous les mouvements de la route de droite et de gauche, et se mettra le plus tôt possible en communication avec le général de Wrede qui est à Vileïka.

Le prince d’Eckmühl arrivera demain à Zembine, avant huit heures du matin ; il est important que cette petite ville ne reste pas sans être occupée.

Le colonel polonais a dû faire observer le coté de Veselovo et Rogatka pour y observer les Cosaques; le vice-roi enverra des agents polonais dans toutes les directions.

 

Zanivki, 28 novembre 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Zanivki.

Donnez ordre au général de Wrede, qui est à Dokchitsy, de se rendre à Vileïka, d’y réunir des vivres, d’assurer les ponts, d’envoyer des partis sur la route d’Ilya et sur la vieille route de Minsk, et de communiquer à Smorgoni avec l’adjudant commandant d’Albignac.

Cette lettre sera portée par l’homme qu’a envoyé le général de Wrede : l’adresser au général Krasinski. Si elle est remise en quinze heures de temps, il y aura une récompense de 50 napoléons, qui seront donnés aussitôt qu’il viendra nous l’apprendre.

 

Zanivki, rive droite de la Berezina, prés Zembine, 29 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, j’ai reçu votre lettre du 25 no­vembre, où vous ne me parlez pas de France, et ne me donnez aucune nouvelle d’Espagne. Il y a cependant quinze jours que je n’ai reçu aucune nouvelle, aucune estafette, et que je suis dans l’obscur de tout.

Je marche sur Vileïka. Il est convenable que Wrede et autres s’y réunissent pour en assurer les ponts et en construire un; ayez-y des outils et ce qui est nécessaire pour cela.

Nous avons eu hier une affaire très-chaude contre l’amiral Tchitchakof et Wittgenstein. Nous avons battu le premier, qui nous a attaqués par la rive droite, sur la chaussée de Borisof. Le second, qui voulait forcer les ponts sur la Berezina, a été contenu. Nous avons fait 6,000 prisonniers; mais nous sommes fort affligés de la perte d’une brigade de 3,000 hommes du général Partouneaux, qui, s’étant trompée de chemin, s’est égarée et apparemment a été prise. Nous n’avons pas de ses nouvelles depuis deux jours. Le duc de Reggio et beaucoup de généraux ont été blessés.

L’armée est nombreuse, mais débandée d’une manière affreuse. Il faut quinze jours pour les remettre aux drapeaux, et quinze jours, où pourra-t-on les avoir ? Le froid, les privations ont débandé cette armée. Nous serons sur Vilna : pourrons-nous y tenir ? Oui, si l’on peut y tenir huit jours; mais si l’on est attaqué les huit premiers jours, il est douteux que nous puissions rester là. Des vivres, des vivres, des vivres ! sans cela il n’y pas d’horreurs auxquelles cette masse indisciplinée ne se porte contre cette ville. Peut-être cette armée ne pourra-t-elle se rallier que derrière le Niémen. Dans cet état de choses, il est possible que je croie ma présence à Paris né­cessaire pour la France, pour l’Empire, pour l’armée même. Dites-m ‘en votre avis.

Il doit y avoir eu plusieurs estafettes de prises; si vous n’avez pas reçu de mes nouvelles depuis le 11, écrivez à Paris.

Je désire bien qu’il n’y ait à Vilna aucun agent étranger. L’armée n’est pas belle à montrer aujourd’hui; quant à ceux qui y sont, il faudrait les éloigner; on pourrait, par exemple, leur dire que vous vous rendez, que je me rends à Varsovie, et les y diriger de suite en les faisant partir à jour nommé.

 

Plechtchennitsy, 30 novembre 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna

Monsieur le Duc de Bassano, je serai le 2 à Molodetchna. J’ai écrit à Wrede de se rendre à Vileïka. Envoyez des vivres, pain, biscuit, à notre rencontre. Mettez une bonne garnison pour mettre la police et arrêter les isolés; j’en ai plus de 40,000 que les fa­tigues, le défaut de nourriture et le froid font voyager en vagabonds ou mieux en brigands. Si l’on ne peut nous donner 100,000 rations de pain à Vilna, je plains cette ville. Des vivres en abondance peuvent seuls tout remettre en ordre. Le gouverneur peut venir à ma rencontre pour m’instruire de l’état des choses.

L’armée est horriblement fatiguée. Voilà quarante-cinq jours de marche. Elle a des besoins de toute espèce.  II faut que le gouverneur et le gouvernement prennent des mesures pour faire donner à manger partout aux isolés, mais les arrêter et les conduire aux drapeaux. Beaucoup de fermeté et des vivres partout, et tout se remettra moyennant peu de jours. Envoyez-moi des nouvelles de Schwarzenberg, de Minsk et de Sacken.

Je vous ai mandé que j’ai battu l’amiral Tchitchakof et ses quatre divisions et lui ai fait 6,000 prisonniers. Je l’ai réduit à 7,000 hommes d’infanterie et à 6,000 de cavalerie. J’ai battu Wittgenstein au passage de la Berezina. Il n’y a point de nouvelles de Koutouzov, mandez cela à Schwarzenberg. Dites-lui qu’une brigade de la division Partouneaux s’est égarée pendant la nuit comme elle était en marche pour rejoindre le pont, et qu’elle s’est jetée dans les postes ennemis. Je la crois perdue. Ils feront sonner cela, mais ce n’est qu’un accident très-malheureux. Dites-lui que je désire entrer en quartiers d’hiver et que mon armée a besoin de se remettre de ses fatigues.

Faites envoyer à Daru, qui est intendant, les états des effets d’habillement qui se trouvent à Kovno, Vilna et Danzig. Des vivres à Vilna, des vivres dans tous les districts, pain, viande et eau-de-vie. Quels seraient autour de Vilna les cantonnements où l’on pourrait le mieux vivre ? Y a-t-il des chevaux ? Où et combien ? Nous en avons grand besoin. Bourcier ne doit pas compter sur des effets de harnachement : nous ne ramenons rien que des hommes, et seule­ment quelques sabres. L’opération de l’ennemi sur Minsk, qui nous a obligés à prolonger notre retraite vingt-deux jours, et l’inaction honteuse du duc de Bellune, qui n’a pas attaqué, nous ont fait un mal affreux. Sans ces accidents, je serais resté à Smolensk, Vitebsk, Orcha, Mohilef. Le prince de Schwarzenberg m’a cruellement compromis !

Vous ne me parlez pas de Paris ; cependant il y a vingt jours que je n’en ai eu de nouvelles. Où sont les dix-huit estafettes qui manquent ? Comment va l’Impératrice ?


 

References

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1 Bien que signé par le major général, cet ordre du jour a été dicté par l’Empereur.