Correspondance de Napoléon Ier – Avril 1810

Paris, 3 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie le rapport du sieur Laborde. Je n’ai point de difficulté d’accorder des croix d’or et d’ar­gent de la Légion d’honneur aux individus qu’il propose. Quant à la Couronne de fer, je vous dirai confidentiellement que je ne désire pas la donner aux Autrichiens; je préfère leur donner des croix françaises.

Il est question de Mme. Lazawski dans ce rapport, mais c’est un soin qui regarde l’Impératrice, et dont il ne faut pas que le départe­ment s’occupe.

 

Paris, 3 avril 1810

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à Amsterdam

Je ne pense pas qu il soit convenable que vous fassiez une procla­mation à vos peuples. Faites simplement au Corps législatif un mes­sage, qui ne sera pas imprimé, où vous direz que l’indépendance de la Hollande ne peut exister qu’autant qu’elle ne sera pas incompatible avec les intérêts de la France; qu’on ne saurait se dissimuler que la Hollande est située aux débouchés de la France, et que, si l’on ne prend pas à tâche d’éviter ce qui peut contrarier le système de la France, la perte de l’indépendance de la Hollande pourra en être la suite; que l’Empereur, se croyant contrarié par la Hollande dans ses mesures de blocus, avait résolu de la réunir à la France.

Un message de cette espèce n’a pas besoin d’être imprimé : tout le monde connaît la situation de la Hollande.

 

Paris, 3 avril 1810

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Monsieur mon Frère, je ne diffère point à informer Votre Majesté de mon mariage avec l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche. Je ne doute pas qu’elle ne partage la joie que je ressens par suite d’un évé­nement aussi intéressant pour ma Maison impériale et pour le bonheur de mes peuples. Les assurances que Votre Majesté m’en donnera ne pourront qu’ajouter encore à ma satisfaction.

Je saisis avec plaisir cette occasion pour lui renouveler les senti­ments de la parfaite estime et de la tendre amitié avec lesquels je suis, Monsieur mon Frère, de Votre Majesté, le bon frère.

Napoléon.

Même lettre au roi de Bavière.

 

Paris, 3 avril 1810

A Élisa Napoléon, Grande-Duchesse de Toscane, à Florence

Ma chère Sœur, je m’empresse de vous informer de mon mariage avec l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche. Les liens du sang et l’attachement que vous m’avez toujours témoigné me sont un sûr garant que vous prendrez le plus vif intérêt à un événement aussi intéressant pour ma Maison impériale. Vous ne doutez pas du plaisir que j’ai de contribuer à tout ce qui peut vous être agréable, et c’est avec plaisir que je saisis cette occasion pour vous renouveler les assurances de la tendre amitié avec laquelle je suis, ma chère Sœur, votre bon frère.

 

Paris, 4 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, le traité étant échangé avec la Hol­lande, il faut que le Roi nomme un commissaire pour faire la remise du Brabant. Faites part du traité aux ministres de la guerre et de l’intérieur, pour qu’ils fassent prendre possession des provinces cédées, et mandez au ministre de l’intérieur de me présenter un projet de sénatus-consulte pour la réunion de ce pays à la France. Envoyez au ministre des finances une copie du traité, afin qu’il me présente un projet de décret pour porter la ligne des douanes sur la frontière, et pour mettre sous le séquestre toutes les denrées coloniales qui se trouvent dans les provinces cédées, me réservant de statuer sur ce qui sera convenable.

 

Paris, 4 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Due de Feltre, faites connaître au duc de Reggio les provinces hollandaises réunies à la France. Donnez-lui l’ordre de ren­voyer en Hollande toutes les troupes hollandaises qui se trouvent dans cette partie.

Proposez-moi tout ce qui est nécessaire pour l’organisation et l’administration, et ce qu’il faut faire à l’égard du commandement des troupes hollandaises.

Placez les troupes de manière qu’elles gardent les côtes et empêchent la contrebande.

Concertez-vous avec le ministre des finances pour les douanes, et avec le ministre de la marine pour la disposition des chaloupes canon­nières et petits bâtiments, de manière que la contrebande ne puisse avoir lieu.

Écrivez au duc de Reggio que toutes les denrées coloniales qui se trouvent en Brabant soient confisquées; c’est l’opération la plus im­portante de toutes.

 

Compiègne, 5 avril 1810

A M. Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police générale, à Paris

Je vous envoie des lettres de la reine d’Etrurie. Il paraît que cette pauvre femme perd la tête. Il est convenable que vous preniez secrè­tement des mesures pour qu’elle ne parte pas, en recommandant qu’on ne fasse pas d’esclandre ni rien qui puisse lui être désagréable.

 

Compiègne, 9 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Je vous renvoie les dépêches du général Suchet. Témoignez-lui mon extrême mécontentement. Il a compromis l’honneur de mes armes et a contrevenu non seulement à mes ordres formels, mais aux premiers principes de la guerre. Sa retraite de Valence ne peut être considérée par l’Europe que comme une grande victoire des insurgés et n’est propre qu’à rehausser la rébellion. Il était bien na­turel de penser que, sans moyens de siège, sans artillerie, il ne pouvait réussir contre Valence, et mon indication était assez précise. Je voulais joindre son corps à celui de Catalogne, prendre Lérida et marcher ensuite, avec des forces immenses, sur Valence. Je blâme cette conduite, qui est tout au moins légère et qui a compromis la réputation de mes armes. A la guerre, le premier principe du général en chef, c’est de cacher ce qu’il fait, de voir s’il a les moyens de surmonter les obstacles, et de tout faire pour les surmonter quand il est résolu. Il est évident que ce n’est pas l’ordre de prendre Lérida qui l’a rappelé de son expédition de Valence, puisqu’il avait reçu cet ordre avant, mais qu’il a reconnu la légèreté de son mouvement lorsque Valence n’a pas voulu ouvrir ses portes.

 

Compiègne, 9 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, vous donnerez ordre au général Duquel de distribuer les vingt escadrons de gendarmerie de la manière suivante : quatre escadrons en Biscaye, quatre en Navarre, six dans la partie de l’Aragon qui est entre l’Ebre et la France, de manière que toutes les vallées, de l’Èbre à la France, soient surveillées, et que cette gen­darmerie puisse correspondre avec la gendarmerie de France; et six dans la province de Santander, de sorte que la correspondance de Vitoria à Bilbao et à Santander soit constamment libre.

Mon intention est que, par l’établissement de ce service, les trois provinces de Biscaye, la Navarre, la partie de l’Aragon qui est entre l’Èbre et la province de Santander, soient parfaitement organisées et soumises à une police régulière. Les six escadrons de la province de Santander feront la police sur les environs de Miranda, de Briviesca et jusqu’à Burgos.

Écrivez au général Suchet que mon intention n’est pas qu’il garde à Saragosse aucun escadron de gendarmerie, mais qu’il les tienne cantonnés dans toutes les vallées de l’Aragon entre l’Èbre et la France.

 

Compiègne, 10 avril 1810

Au prince Cambacérès, archichancelier de l’Empire, à Paris

Mon Cousin, je vous envoie un projet d’organisation des nouvelles provinces réunies à la France. Réunissez chez vous les présidents des sections du Conseil d’État, de l’intérieur, de la guerre, de la ma­rine, des finances et de la justice, et faites rédiger un projet de décret complet sur l’organisation de ces départements. La division territo­riale me parait bonne; mais il faut désigner les sous-préfectures et les cantons, décider de quelle cour d’appel le pays ressortira, ou, s’il faut en créer une nouvelle, décider le nombre des tribunaux, le nombre des députés au Corps législatif, organiser les collèges, arrê­ter les classes et tout ce qui est du ressort de la marine, enfin régler toutes les parties de l’administration. Je désire que ce travail puisse avoir passé au Conseil et être signé avant le 15.

Le décret contiendra autant de titres qu’il y aura de parties diffé­rentes d’administration. Il faudra parler des affaires ecclésiastiques, régler le diocèse ou consistoire auquel appartiendront les différentes églises. Il faudra dire que les impositions se percevront jusqu’en 1811 comme elles sont établies ; les préfets seront chargés de veiller à leur répartition. Le ministre des finances donnera des ordres pour que les versements aient lieu dans une caisse particulière. Il sera déclaré qu’à dater du 1er mai il ne sera plus fait aucune réquisition et qu’on se comportera comme en pays français. La publication du Code Napoléon se fera le 1er mai. Au 1er janvier 1811, les finances seront administrées comme dans les départements de la France. Le ministre des finances sera chargé de présenter un rapport et un projet de décret sur ce que le pays paye aujourd’hui et sur ce qu’il doit payer.

 

Compiègne, 10 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous envoie un rapport du minis­tre Marescalchi. Parlez de son contenu au prince Kourakine et écrivez au duc de Vicence. Faites-leur comprendre qu’il est contraire à nos principes de gouvernement de voir un sujet servir sous des drapeaux étrangers ; que notre législation est telle, qu’elle ne reconnaît point le caractère de consul étranger dans un sujet, et qu’elle le prive des immunités de ces places ; qu’enfin je désire qu’aucun Français ni Italien ne soit employé dans un service étranger.

 

Compiègne, 10 avril 1810

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur le Comte Bigot Préameneu, je reçois votre rapport sur le clergé de Rome. Je désire que vous me présentiez un projet de travail, 1° pour supprimer les moines et leur donner des pensions; 2° pour astreindre les évêques et chanoines au serment d’obéissance prescrit par le Concordat ; 3° pour réunir les évêchés et paroisses de manière à en réduire le nombre. Ce travail, une fois adopté, servira de règle. On commencera par décréter la disposition relative à la prestation de serment, et successivement toutes les autres. Il faudrait me présenter de pareilles dispositions pour la Toscane, qu’on exé­cutera graduellement, dans le but de supprimer les couvents et de réduire les évêchés et paroisses.

On pourrait dès aujourd’hui décréter que les évêchés de Porto-Santo et de Rufino sont réunis à celui de Rome. Il faut ordonner à monsignor Severoli, évêque de Viterbe, de retourner dans son dio­cèse, et séquestrer ses revenus jusqu’à ce qu’il y soit retourné.

 

Compiègne, 10 avril 1810

Au comte Daru, intendant général de la maison de l’Empereur, à Paris

Monsieur le Comte Daru, au lieu de prendre un décret détaillé pour la galerie du Louvre, je n’ai arrêté que les dispositions indispensablement nécessaires pour donner de l’activité aux travaux actuels. Je manque de logements aux Tuileries, et je désirerais beaucoup en avoir. Je désire connaître quand le pavillon Marsan sera habitable. Je pense que le premier tiers de la galerie sera terminé cette année ; j’ai accordé les fonds nécessaires. Cette partie fournira quelques loge­ments, mais ne pourra pas recevoir un souverain étranger. Je désire avoir habitable le logement de la colonnade de Perrault. Faites-moi un rapport là-dessus. J’ai besoin d’un logement aux Tuileries, et, faute de cela, je suis entraîné à chaque instant dans des dépenses extraordinaires.

 

Compiègne, 10 avril 1810

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Compiègne

Mon Fils, j’approuve la nomination que vous avez faite de d’Anthouard et d’Alberti comme commissaires pour la fixation des limites avec la Bavière. Suivez vivement cet important objet, et faites les actes nécessaires pour la réunion du Tyrol italien et pour son orga­nisation à l’instar des autres provinces du royaume, sous le rapport de la justice, des finances, des impositions, de la guerre, etc. Je ne pense plus à cette affaire, et je m’en repose entièrement sur vous.

 

Compiègne, 14 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, vous trouverez ci-jointe une dépêche télégraphique en date d’hier. Je n’ai pas jugé à propos de la renvoyer au ministre de la marine, puisque cela le regarde moins que vous. Prenez des renseignements sur ce Mackensie (commissaire anglais envoyé pour négocier l’échange des prisonniers). Comme j’ai annoncé à l’Europe, et que je l’ai fait mettre dans le Moniteur, que cette démarche serait un commencement d’ouverture de paix, les Anglais faisant cette démarche, il y a lieu de penser qu’elle est de consé­quence , surtout si M. Mackensie est un homme de quelque habileté. Faites-moi connaître qui je pourrais envoyer. Ce M. Mackensie parle-t-il fiançais ?

 

Compiègne, 14 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, envoyez une copie du procès-verbal qui a été fait lors du traité avec la Hollande au ministre de la guerre, en lui faisant connaître qu’il est secret. Le ministre de la guerre fera là-dessus une note au duc de Reggio pour lui servir de règle.

 

Compiègne, 15 avril 1810

NOTES POUR LE MINISTRE DES CULTES.

Sa Majesté désire que le ministre des cultes rédige sur les affaires du clergé des dispositions générales et complètes, où il n’y aura pas seulement des principes arrêtés, mais où l’on comprendra même toutes les mesures de détail qu’il convient d’adopter. Ce ne sera pas, à proprement parler, un décret, puisqu’il n’aura pas force d’exécu­tion, qu’il ne sera pas remis en minute à la secrétairerie d’État, qu’il ne sera pas expédié et qu’il restera entre les mains du ministre.

Dans ces dispositions générales, on détaillera, par titres, toutes les mesures qu’on pourrait être dans le cas de prendre ; on établira les choses comme elles devraient être et d’une manière absolue, comme s’il n’y avait point de pape, et sans avoir égard ni aux circon­stances du moment ni à des considérations quelconques. On joindra à ce travail les mémoires et les états à l’appui.

Lorsqu’on jugera qu’il convient d’exécuter quelques parties de ces dispositions, elles seront converties en décret, et l’on arrivera successivement au développement du système complet. Ainsi on ne sera plus fatigué par des rapports successifs ; mais, chaque fois qu’il y aura une mesure à prendre, le ministre rappellera ce qui est fait et ce qui reste à faire.

Ces dispositions générales doivent se diviser par territoires et par ordre de matière.

Ainsi on traitera du Piémont, et cette division de territoire se sub­divisera en évêchés, en circonscriptions de paroisses et en mesures relatives aux ordres religieux, qui se divisent en religieux ayant des revenus et religieux mendiants, et en religieuses. S’il n’y a rien à faire en Piémont quant aux ordres religieux, et si toutes les lois sur cette matière ont été publiées dans ce pays, il en sera cependant encore question dans les dispositions générales, et l’on dira que tous les religieux doivent se rendre aux lieux de leur naissance ou dans tel lieu qui sera désigné de concert par l’évêque et le préfet, pour y être à la disposition des évêques, des curés et des desservants. Ainsi les religieux seront utiles à l’administration de l’Église et seront disséminés.

Quant à la Ligurie et aux États de Parme et de Plaisance, il y a dans ces pays des couvents à supprimer. Les évêchés, les chapitres et les paroisses, y sont trop nombreux.

Ces indications suffisent pour faire connaître de quelle manière l’Empereur entend que ce grand travail soit fait. Il doit présenter, sous tous les rapports possibles, l’ensemble des mesures à prendre relativement au clergé.

Le ministre des cultes est invité à traiter cette question : quels sont les moyens à prendre pour effectuer la réduction des évêchés, en restant le plus possible dans l’esprit de l’Église, soit en ne supprimant pas les diocèses, mais en les réunissant, soit en faisant précéder la réduction d’une déclaration portant : qu’il ne doit y avoir que tel nombre d’évêchés; qu’il est de principe que, en matière de circon­scription , si la puissance ecclésiastique est nécessaire, l’intervention de la puissance civile n’est pas moins indispensable.

On doit trouver dans les règles de l’Église que telle population, telle étendue de territoire, est nécessaire pour l’établissement d’un évêché. Il est très probable qu’on trouvera quelque chose à cet égard dans la doctrine des conciles.

Il convient d’écrire à la Consulte de Rome de prendre les disposi­tions suivantes : quinze jours après la publication de l’arrêté de la Consulte, tous les prêtres séculiers, tous les religieux et toutes les religieuses étrangers à Rome se retireront dans leur pays natal. Aussitôt qu’ils seront partis, la Consulte fera prêter serment, en com­mençant par les évêques.

 

Compiègne, 15 avril 1810

DÉCISION.

 

M. le comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, fait connaître à l’Empereur que les projets du pont de Bordeaux ayant été successivement étudiés, s’élèvent aujourd’hui, pour compléter sa solidité, à 4,400,000 francs ; que les entrepreneurs qui s’offraient d’abord à le construire, au moyen d’un péage, se sont retirés. On demande si l’Empereur veut que cette utile construction s’exécute sur les fonds du trésor, sauf à établir un péage qui rendrait plus de 100,000 franc, à l’État. Renvoyé à un conseil d’administration des ponts et chaussées, qui se tiendra cette semaine.

On fera l’analyse du travail, de manière que d’un coup d’œil on voie le système de tarif de l’octroi. On dira combien paiera un homme, un cheval, un âne, une
 charrette, un chariot, une voiture, etc. La conclusion du rapport sera que le pont doit être fait par use société ; la caisse des canaux avancera les fonds, les ac­tions seront de 10,000 francs; on les vendra. Ainsi cette dépense ne sera pas à la charge de l’État. L’octroi restera le temps nécessaire pour rembourser la dépense du pont. L’intérêt de l’action sera de 5 pour 100; le surplus sera placé en fonds d’amortissement. Si l’intérêt absorbait le produit, la ville de Bordeaux ferait annuellement sur son budget un fonds d’amortissement, et acquerrait ainsi un pont qui est pour elle de première nécessité. La ville pourrait acheter pour elle les terrains de la Bastide et faire son fonds d’amortissement sur les bénéfices.

Envoyez, avant le conseil, ce  travail, les projets et plans, au général comte Bertrand.

Faire le projet d’un pont à Saint-André de Cubzac sur la Dordogne.

 

Compiègne, 16 avril 1810

A M. Gaudin, duc de Gaète, ministre des finances, à Paris.

Faites-moi connaître si vous avez payé quelque chose à Mlle. d’Or­léans et au prince de Conti pour 1809 et 1810.

 

Compiègne, 16 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Écrivez au duc d’Auerstaedt de donner des ordres à Hambourg pour inquiéter et prendre, s’il est possible, le rocher de Helgoland.

 

Palais de Compiègne, 17 avril 1810

DÉCRET.

Article premier. — Il est formé une armée sous la dénomination d’Armée de Portugal. Elle sera composée des 2e, 6e et 8e corps de l’armée d’Espagne, qui conserveront leur organisation actuelle.

ARt. 2. — La comptabilité de cette armée sera séparée de celle de l’armée d’Espagne, à dater du 1er mai. Elle aura un chef d’état-major, un intendant général, un général commandant la cavalerie, un général commandant l’artillerie, un général commandant le génie.

An. 3. — Nos ministres de la guerre, de l’administration de la guerre, du trésor public, notre major général, sont chargés de l’exécution du psent décret, qui ne sera pas imprimé.

 

Compiègne, 17 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, je vous renvoie un rapport du sieur Denniée. Le roi d’Espagne ne doit être pour rien dans cette confiscation et la disposi­tion des marchandises anglaises en Andalousie. Il n’est que le com­mandant de mon armée. Toutes les marchandises anglaises, toutes les créances anglaises, à quelque titre et de quelque espèce que ce soit, doivent être versées dans la caisse de l’armée. Ce n’est pas avec les troupes espagnoles que le Roi conquiert l’Espagne. Je ne vois pas pourquoi on veut toujours se refuser les moyens de payer l’armée.

 

Compiègne, 19 avril 1810

ORDRES RELATIFS AUX PLACES D’ITALIE.

Place de Palmanova. — II y a une lunette entièrement termi­née, deux autres dont les escarpes et contrescarpes seulement sont unies, deux dont l’escarpe est fondée et élevée à six pieds, enfin quatre autres qui n’ont d’achevé que les contrescarpes. On estime à 600,000 francs la somme nécessaire pour achever les travaux à faire à ces différentes lunettes. A la fin de 1811, elles seraient terminées. On verrait, à cette époque, s’il convient de les fermer toutes à la gorge, ou si 600,000 francs nécessaires à cet objet seront mieux em­ployés à d’autres travaux. Il semble que, à la manière dont le fossé est appuyé à deux traverses casematées, la gorge est assez défendue; il paraîtrait suffisant de la fermer par des palissades, lorsque l’attaque serait décidée pour un front.

Il est nécessaire de terminer une gorge le plus tôt possible, en l’appuyant bien aux deux traverses casematées, afin de pouvoir arrê­ter un budget bien détaillé pour la construction des autres.

La défense d’une place n’est point organisée lorsque tous les éta­blissements militaires ne sont pas à l’abri de la bombe. Il en résulte qu’au premier accident le commandant réunit son conseil de guerre et propose de rendre la place. C’est ainsi qu’avec quelques mortiers et obusiers l’ennemi s’empare d’une place qui, bien organisée, aurait soutenu un long siège. La place de Palmanova est assez forte par elle-même pour se défendre, mais il faut l’organiser et mettre à l’abri tous les établissements militaires. Au moment de l’investissement, il est trop tard pour faire des blindages, à moins que le commandant ne soit un homme d’un caractère ferme ; ce sur quoi on ne doit pas toujours compter. Il faut raisonner dans la supposition qu’il sera un homme médiocre : la ville de Flessingue a été prise, quoiqu’il y eut tous les bois nécessaires pour blinder tous les établissements. Pour que Palmanova puisse remplir son objet, il faut lui donner des moyens d’abri tels qu’au commencement de la guerre on puisse prescrire au commandant le placement de toutes choses.

Sa Majesté désire qu’on lui présente un projet sur ce principe. Elle ne peut accorder plus de 500,000 francs par an et plus de deux millions en quatre ans, 1810 compris. Cette somme devra être ré­partie : 1° pour un magasin à poudre de 500 milliers ; 2° pour des salles d’artifices ; 3° pour deux hôpitaux de 200 lits chacun ; 4° pour des casemates dans un nombre déterminé ; 5° des ateliers pour un magasin d’affûts et trois forges d’artillerie ; 6° un logement pour le commandant d’état-major et les officiers d’artillerie; 7° une manu­tention pour 6,000 rations par jour, avec les magasins pour les farines et pour les blés. Il serait à propos de diviser cet établissement en deux, parce qu’en cas d’accident il y en aurait toujours un qui échapperait.

Place d’Osoppo. — Sa Majesté demande un projet pour une dépense de 500,000 francs à faire en quatre ans, 125,000 francs par an. On pourrait accélérer les travaux et finir en deux ans, afin de garder moins longtemps un atelier.

Il faut établir à Saint-Roch un ouvrage carré de 30 toises de côté, revêtu et ayant un bon fossé. On devra construire à l’abri des obus un corps de garde pour une quarantaine d’hommes, auxquels on assurera les moyens de se procurer de l’eau sous la protection du fort d’Osoppo. Cet ouvrage peut suffire. Il ne sera attaqué que d’un côté. On pourrait faire en avant des ouvrages de campagne dont il serait le réduit. Il faut achever le camp retranché et avoir des bâtiments pour mettre à l’abri un approvisionnement de poudre suffisant.

Le royaume d’Italie achètera le château et le mettra en bon état pour en faire une caserne. Lors des opérations, on pourra y placer les malades ou des objets du matériel de l’armée.

Place de Venise. — Sa Majesté s’occupe d’abord du fort de Malghera. Ce fort, qui est la clef de Venise, doit être une bonne place, d’une capacité suffisante, et ayant toutes les défenses dont elle est susceptible. Il convient de tout faire pour assurer la communication avec Venise, parce que c’est cette communication qui fait sa force; mais il faut aussi qu’elle ait tout ce qui lui serait nécessaire pour se soutenir pendant quinze jours, indépendamment de Venise. On peut faire de ce fort une bonne place à bon marché. Puisqu’il y a de l’eau pour la couvrir de trois côtés, on peut donc se borner à en défendre un seul. L’espèce de bonnet-de-prêtre tracé dans l’intérieur de la place en serait le réduit. Il faut y placer les établissements sous un bon cavalier qui dominerait la campagne. Il parait qu’on peut faire en avant d’une partie de l’enceinte une inondation et un tracé, de manière à protéger le reste et à donner un plus grand développement à la place. Il peut arriver que Mestre devienne un jour le dépôt de toute l’armée d’Italie. Un bon général qui serait obligé d’évacuer la Piave, se jetant sur Venise, pourrait prendre pour protection Malghera, se placer sur le flanc de l’ennemi et l’empêcher ainsi de se porter plus avant. Alors il faudrait que Malghera renfermât tous les équipages de l’armée. Cette place, dans le projet actuel, se trouvant acculée aux marais, un général habile n’oserait pas faire cette opération. Le tracé actuel, qui n’est guère que de 1,000 toises de développement, n’est qu’un tracé de campagne qui ne suffit pas. Il faut revoir ce projet et le mo­difier de manière à donner à la place des propriétés plus étendues et d’accord avec le rôle important qu’elle peut jouer.

Sa Majesté demande qu’on lui présente, pour Venise et ses dépen­dances, un projet de quatre millions à dépenser en quatre ans, y com­pris 1810.

Place de Mantoue. — Il faut achever l’ouvrage de Belfiore pour 300,000 francs, le camp retranché pour 50,000, Saint-Georges pour 700,000, le pâté de la Rotta pour 230,000, le pont opposé à la citadelle pour 100,000, un petit magasin à poudre à Pietole pour 40,000, et appliquer à Pietole le reste des fonds dont on pourra dis­poser. Ces fonds sont fixés pour quatre ans à 1,600,000 francs, ou 400,000 francs par an.

On demandait 4,400,000 francs pour terminer les travaux. Il faut diviser cette dépense et employer d’abord aux travaux indiqués ci-dessus les 1,600,000 francs accordés pour les quatre premières an­nées, y compris 1810.

Sa Majesté désire qu’on lui présente un projet dans ce système, pour lequel on peut s’écarter des proportions de détail établies ci-dessus.

Place de Porto-Legnago.— Il faut faire un projet pour dépen­ser 800,000 francs en quatre an, ou 200,000 francs par an.

Place de Peschiera. — IL faut faire un projet pour employer 600,000 francs en quatre ans, à raison de 150,000 francs par an.

Place de Rocca d’Anfo. — Il faut faire un projet pour employer 400,000 francs en quatre ans, ou 100,000 francs par an.

Place d’Ancône. — On demande un million pour fortifier Montegarnetto. On ne peut accorder plus de 500,000 francs, en quatre ans. Il faut employer cette somme à mettre Ancône en état de soutenir un siège. Les défenses à faire ensuite pour compléter cet ouvrage sont renvoyées au delà de quatre ans. Il en est de même du cavalier du camp retranché. On affectera aux travaux du camp retranché 300,000 francs à dépenser en quatre ans. On emploiera de même à l’enceinte de la ville 200,000 francs en quatre ans. Les dépenses à faire à Ancône pourraient donc être distribuées de la manière suivante : pour le fort de Montegardetto, 500,000 francs; pour un magasin à poudre dans ce fort, 300,000 ; pour l’enceinte de la ville, 200,000 ; pour une forte redoute à la Maison Brûlée, 200,000 ; pour deux magasins à poudre de 100 milliers chacun, 90,000; pour la batterie de l’île, 100,000 ; pour la batterie du Lazaret, 50,000. Ces dépenses iraient à 1,490,000 francs, mais on peut aller à 1,600,000 francs en quatre ans.

On proposera la répartition la plus convenable de cette somme, et on fera ensuite un projet pour le bombardement.

9° Place d’Arcole. — Sa Majesté désire qu’on lui présente un projet en règle, et qu’on prenne, dans toutes les hypothèses, des mesures pour conserver ce qui est fait. Le projet d’Arcole, l’emploi des fonds à accorder pour les différents objets ci-dessus et la suite des rapports sur ces ouvrages à faire dans le royaume d’Italie, seront présentés à Sa Majesté.

RÉCAPITULATION.

Palmanova. 2,000,000 francs pour 4 an 500,000 francs par an
Osoppo 500,000           — 125,000 francs –
Venise 4,000,000        — 1,000,000        —
Mantoue 1,600,000        400,000           —
Porto-Legnago 800,00 — 200,000   —
Peschiera 600,000  — 150,000   —
Rocca d’Anfo 400,000           – 100,000            —
Ancône 1,600,000   — 400,000           —
11,500,000   — 2,875,000   —

 

Compiègne, 20 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je vous envoie le projet du roi de Naples pour l’expédition de Sicile. Mon intention est que mes troupes soient commandées par des généraux français. Le général Cavaignac, n’étant pas à mon service, ne peut commander mes troupes.

Faites connaître au Roi que j’approuve son plan et que je désire qu’il s’occupe de réunir les moyens nécessaires pour l’exécuter.

 

Compiègne, 20 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Comme il est possible que j’aille très promptement à Anvers, à Cadzand et à Flessingue, je vous prie de réitérer les ordres pour que les travaux soient en grande activité, pour que les affûts soient rendus dans ces places, et que le tout soit dans un état satisfaisant de défense. Faites-moi connaître le nombre des batteries qui seront élevées pour la défense de l’Escaut et sur quelle espèce d’affûts, au 1er juin, au 1er juillet, et ainsi de suite jusqu’au 1er octobre. Je suppose que vous avez dirigé un grand nombre d’affûts de côte sur ce point. Il est né­cessaire que les pièces puissent tirer sous l’angle de plus de 30 degrés.

 

Compiègne, 20 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je désire avoir à Ancône, pour l’armement de la côte, soixante bouches à feu, en fer ou en bronze, de 36, de 24 et de 18, montées sur affûts de côte et de siège, qui puissent tirer même sous l’angle de 35 degrés. J’y voudrais également quinze mortiers, dont cinq à plaque. Concertez-vous pour cela avec le royaume d’Italie, qui doit en avoir en suffisance dans ses places. Faites-moi connaître, en cas que les ressources du royaume d’Italie fussent insuffisantes, ce que Turin pourrait fournir, surtout en mortiers à plaque. J’en avais fait fondre l’année passée à Turin.

 

Compiègne, 20 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

J’approuve les dispositions suivantes pour la démolition des forti­fications de Girone : les trois forts de la Reine Anne, des Capucines et du Connétable, seront démolis ; les fronts de la ville opposés à ces forts, depuis le bastion 33 jusqu’au bastion 34, seront également démolis, et particulièrement les bastions 33, 34, 44, 47, 48 et 49. On démolira ensuite un front de l’enceinte du Mercadal.

Le fort de Montjuich sera conservé.

Vous enverrez à Girone cent cinquante milliers de poudre.

Vous donnerez ordre à la 4e compagnie du 1er bataillon de mineurs, qui se rend à Metz, de continuer sa route sur Girone, où elle sera employée aux travaux de démolition.

J’approuve l’emploi de 50,000 francs, savoir : de 25,000 francs pour achat de 5,000 outils et de 25,000 francs pour frais de démolition. Cette somme sera prise, comme vous le proposez, sur les fonds affectés par l’article 7 du budget du génie pour les dépenses d’années.

 

Compiègne, 20 avril 1810

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je vous renvoie les instructions du sieur du Moutier (Commissaire français envoyé à Morlaix pour traiter avec M. Mackensie, commissaire anglais, de l’échange des prisonniers) ; elles me paraissent bien, hormis que j’en ai effacé l’autorisation que vous lui donnez d’admettre en compte moins de 17,000 Hanovriens. Il a été fait à ce sujet une capitulation ; elle doit être suivie. Le sieur du Moutier enverra des courriers, et on lui répondra. Il est nécessaire que vous joigniez à ses instructions cette capitulation, qui a été signée par le maréchal Mortier et le comte de Wahnoden. Vous ferez remar­quer qu’elle a été signée par un parent du Roi et l’un de ses princi­paux officiers. Cette capitulation a été mise dans le Moniteur, et vous en trouverez l’original à la guerre. Il est indispensable que le sieur du Moutier en soit muni.

Donnez l’ordre au sieur du Moutier de partir sans délai, et ouvrez-lui un crédit pour les dépenses qu’il sera dans le cas de faire.

 

Compiègne, 20 avril 1810

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Comte Decrès, j’ai reçu votre rapport sur les forces françaises, que j’ai dans l’Adriatique. Je m’arrête définitivement au parti suivant. Il sera pris sur les trois bricks que j’ai à Venise la partie d’équipages nécessaire pour armer la Favorite, que ma narine ita­lienne remettra à ma marine française, en tenant pour cet objet un compte double avec la marine italienne. Vous pourrez donner en échange les bricks que vous ne pourrez pas armer. La Caréna est déjà armée et montée par les Italiens ; la Bellone le sera incessam­ment. Ces trois frégates se rendront à Ancône aussitôt que possibel; ce qui, joint à l’Uranie, à la Caroline et aux trois bricks qui sont dans ce port, fera une division de cinq frégates et de trois ou quatre bricks. Vous me présenterez un officier intelligent pour commander, sous les ordres du vice-roi, cette division, qui aura ordre de tenir la mer et de ne pas se laisser bloquer par des forces inférieures. Au mois de décembre, le Rivoli pourra être mis à l’eau; et ces cinq fré­gates pourront recevoir l’ordre de protéger l’entrée en mer du Rivoli, et de rester auprès de lui pendant les trois ou quatre jours que durera son armement. Le Rivoli sera monté par l’équipage de l’Uranie qui, venant avec les quatre frégates à Ancône, viendra en sûreté à Venise et y entrera pour se désarmer. Le Régénératore, monté par les Italiens, viendra à Ancône; ce qui donne l’espoir d’avoir, en 1811, deux vaisseaux, quatre frégates et trois ou quatre bricks à Ancône. Cette force obligera les Anglais à tenir trois vaisseaux pour bloquer ce port.

J’ordonne qu’une quinzaine de mortiers et une soixantaine de pièces de gros calibre soient mis en batterie à Ancône, du côté de la mer. Donnez des ordres pour qu’on vous fasse connaître s’il y a quelque chose à craindre des brûlots, et s’il y a lieu d’établir des chaînes qui ferment hermétiquement le port.

Témoignez mon mécontentement au commandant de l’Uranie de ce qu’il s’est laissé approcher par une frégate sans sortir pour la chasser, quoiqu’il eût une frégate et trois bricks de la marine italienne sous ses ordres. Quant aux bâtiments qui sont à Trieste, on mettra à la disposition du duc de Raguse, pour être armée par la marine illyrienne, la frégate susceptible d’être armée qui est à Trieste, et on dépècera les autres bâtiments, en les mettant, moyennant estimation, à la disposition de la marine italienne, pour être transportés à Venise, en se servant des mâtures, des canons, et de tout ce qu’on en pourra utiliser.

Envoyez copie de cette lettre au vice-roi, en lui faisant connaître qu’il est nécessaire de fortement armer la côte dAncône.

 

Compiègne, 20 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, écrivez au général Suchet que je suis très mécontent qu’il se soit porté sur Valence au lieu de marcher sur Lérida, ainsi que j’en avais donné l’ordre. Vous lui témoignerez aussi mon mécon­tentement de ce qu’il n’était pas devant Lérida dans les premiers jours de mars. Quand même son artillerie n’eût du être arrivée que pour le 20 avril, il fallait qu’il vint prendre position en avant de Lérida et qu’il poussât de forts partis pour entrer en communication avec l’ar­mée de Catalogne. Il aurait dû laisser une forte division pour obser­ver Valence, contenir le pays et voir les mouvements que l’ennemi pouvait faire en mer. Le général Suchet a été, malgré mes ordres, à Valence; il en est revenu très légèrement; il a compromis ses troupes ; au lieu de remplir la mission dont il était chargé, il a laissé inactive la belle armée que je lui ai confiée. Cette conduite n’a nulle­ment répondu à mon attente. Le duc de Castiglione, dans la marche qu’il vient de faire sur Villafranca le 20 mars, a dû être fort surpris de ne pas trouver de troupes pour appuyer sa droite. Il est indispen­sable que le général Suchet répare ses sottises.

 

Compiègne, 20 avril 1810

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à Amsterdam

Mon Frère, je reçois votre lettre du 18 avril ; je l’ai renvoyée à mon ministre de la guerre. Je ne veux que la stricte exécution du traité. Il faut que l’état-major aille d’abord à Utrecht, pour se porter ailleurs. J’ai chargé, au reste, mon ministre de la guerre de régler tous ces détails avec votre ambassadeur. Quand un traité existe, ce sont les termes de ce traité qui servent seuls de loi, et mon interven­tion n’est plus nécessaire en rien. Toutefois ne doutez jamais de la volonté où je suis de saisir toutes les occasions de vous être agréable.

 

Compiègne, 21 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Les traverses casematées qu’on a projetées pour les digues de Flessingue et Breskens doivent être à l’abri de la bombe, ce qui est facile en chargeant les voûtes de terre. Il ne faut faire de chemin à côté des traverses que pour le passage strictement nécessaire à l’artillerie.

Une des conditions essentielles des traverses, c’est qu’elles ne doivent point être aperçues. Les tirailleurs placés sur la route pourront voir le long de la digue, mais ceux qui sont dedans ne doivent tirer que dans l’étendue d’une place d’armes, c’est-à-dire à peu près à 10 toises. Elles doivent être couvertes, à cette distance, par un massif de terre.

 

Compiègne, 21 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Faites connaître au roi de Naples et à Corfou que la garnison de Corfou fait partie de l’armée de Naples et que le général Donzelot est sous les ordres du roi de Naples, non comme roi, mais comme commandant de mon armée.

Prenez des mesures promptes et efficaces pour approvisionner Corfou de vivres, de munitions d’artillerie, de canonnière et de tout ce qui est nécessaire pour la défense et le ravitaillement de cette ile. Tâchez surtout d’y faire passer des vivres pour plusieurs années.

Donnez ordre au vice-roi d’y envoyer de Venise et d’Ancône 5,000 quintaux de blé.

 

Compiègne, 21 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, les troupes françaises qui sont en Hollande peuvent rester organisées comme elles le sont aujourd’hui. S’il y a plus de 6,000 hommes, le surplus sera à mes frais. Il est nécessaire qu’il y ait un arrangement de détail qui règle les armes et le traitement des troupes que j’ai en Hollande. C’est un objet qui a toujours été du ressort du département de la guerre.

Gendarmerie. — Chargez le général Lauer d’aller organiser les deux compagnies de gendarmerie des départements des Bouches-du-Rhin et des Deux-Nèthes. J’ai réglé dans le décret d’organisation, que vous devez avoir reçu, le nombre de brigades dont ces deux compagnies doivent être composées. On prendra dans le 1er régiment provisoire de gendarmerie ce qui sera nécessaire pour compléter la compagnie des Deux-Nèthes et former la nouvelle compagnie des Bouches-du-Rhin. Le général Lauer désignera 25 gendarmes et un lieutenant pour le service de l’état-major du duc de Reggio et du corps d’observation de Hollande; le reste sera dissous et rentrera dans les légions.

Artillerie. — Chargez le général Dulauloy de faire l’inspection générale de l’artillerie et d’organiser les places et surtout les côtes. Il désignera les places qui, étant sur les côtes, doivent rester armées, et celles qui sont à désarmer. Il arrêtera leur armement, désignera les magasins, gardes-magasins, ouvriers d’états et autres services de l’artillerie. Les compagnies des garde-côtes doivent être organisées sans délai ; placez-y des officiers français tirés des vétérans, en ayant soin de les prendre parmi ceux qui ont servi dans l’artillerie. Le général Dulauloy fera armer les batteries les plus importantes des Îles. Je désire qu’elles soient armées de canons de fer; on pourra les tirer d’Anvers ou des nouvelles places que j’ai acquises. Pendant le temps qu’il emploiera à armer ses batteries, il vous enverra un travail général que vous présenterez à mon approbation. Le général Dulauloy comprendra dans son organisation le service de l’île de Cadzand et des rives de l’Escaut jusqu’à Anvers. Il correspondra journellement avec vous. Vous désignerez environ 200 canonniers vétérans, tirés de Normandie et de Bretagne, pour faire le service dans ces Iles.

Génie. — Envoyez le général Dejean, premier inspecteur général du génie, organiser lui-même le service du génie dans tous ses dé­tails, constater l’état des places, déterminer leur approvisionnement, reconnaître les employés et mettre enfin le service de son arme en parfait état. Nommez sans délai pour l’artillerie et le génie des direc­teurs et des officiers en résidence, actifs et capables. Mou intention est que les îles de Beveland, de Walcheren et de Schouwen aient un centre de défense qui les mette à l’abri d’un coup de main et des petites expéditions de l’ennemi. Le plan de défense de Flessingue que j’ai arrêté remplit mes intentions pour l’île de Walcheren. J’attendrai le rapport du ministre Dejean et les projets du génie pour approuver les travaux à faire à Nord-Bevelamd et à Schouwen. Faites connaître au général Dejean que, quand il aura arrêté les projets relatifs aux côtes, il visite le tracé et les travaux ordinaires d’Anvers et de Flessingue, et qu’il vous instruise des observations qu’il fera sur ce qui peut m’intéresser. Comme je veux, sous six semaines, visiter moi-même ce pays, je désire trouver tout organisé et n’avoir que des éloges à donner au génie.

Division militaires. — Le département des Bouches-du-Rhin fai­sant partie de la 25e division militaire, il suffira d’avoir un général à Bois-le-Duc, sous les ordres du général de la division. Il sera néces­saire que le général commandant la 25e division et l’ordonnateur se rendent à Bois-le-Duc et à Nimègue, et organisent le service dans leur arrondissement. Le général Dallemagne,  qui commande la 25e division militaire, ne paraît pas capable d’être chargé d’un sur­croît de travail. Mon intention est de donner le commandement de la 25e division militaire au général Puthod. Je n’ai pas besoin de vous dire que sa division sera dissoute, et que ce qui resterait de l’armée du Nord et de l’armée du Brabant doit recevoir une autre destination. Le général d’Hastrel pourra rester pour commander le département des Bouches-du-Rhin. Le quartier général de la 24e division militaire doit se porter à Anvers. Le commandant de la division et l’ordonna­teur doivent visiter leur arrondissement pour y organiser le service. Je désire avoir trois généraux de brigade : un pour l’île de Walcheren, un pour l’île de Sud et Nord-Beveland , et le troisième pour l’île de Schouwen.

Vous avez à nommer un grand nombre de commandants de place. Mon intention est de les prendre parmi ceux qui existent, de même que pour les gardes-d’artillerie et du génie, afin que cet accroissement de territoire ne me soit pas un accroissement de dépense. J’ai dans les places de Flandre, de la Meuse et de la Somme, des comman­dants de place qui me sont parfaitement inutiles et qui me coûtent beaucoup d’argent. J’en ai dans le royaume d’Italie, qui me sont éga­lement inutiles. Le royaume d’Italie a pris assez de consistance pour que les commandants italiens puissent suffire ; proposez-moi donc de les supprimer. Tout cela peut être l’objet d’une économie importante.

Les cinq régiments de ligne qui sont dans le Brabant seront répartis de la manière suivante : trois pour Berg-op-Zoom, Breda, Anvers et les îles, et deux pour le département des Bouches-du-Rhin. Faîtes-moi connaître si à Breda ou à Berg-op-Zoom les fourrages sont bon marché; j’y placerai un des deux régiments de cavalerie que j’ai à Saint-Omer. Vous me présenterez un travail peur les compagnies de vétérans à établir dans les places de Breda, Berg-op-Zoom et autres de la partie du territoire cédé.

A dater du 1er mai, l’armée du duc de Reggio s’appellera Corps d’Observation de la Hollande. Son commandement finira où commence la France. Mon intention est que ce maréchal ne reçoive rien du trésor hollandais ; vous lui ferez toucher le même traitement qu’à la Grande Armée et sur mon trésor.

Faites rendre à la marine les 200 hommes qu’elle a fournis.

La 18e demi-brigade provisoire est suffisante pour l’île de Walcheren, surtout lorsque trois régiments seront si près. N’oubliez pas de me faire dans le mois de juin un rapport pour diminuer encore la garnison de l’île de Walcheren; je préfère courir quelques risques, qui me paraissent chimériques, au mal certain de voir périr mes soldats de maladie. Arrivé au mois de juillet, à moins de circon­stances extraordinaires, mon intention n’est pas de maintenir plus de 600 hommes dans Flessingue. Le régiment prussien et le bataillon colonial sont très propres à ce genre de service.

Douanes. — Le décret que vous aurez reçu vous aura fait con­naître mes intentions sur les douanes. Donnez ordre aux commandants militaires et à la gendarmerie de prêter main-forte pour la saisie de toutes les marchandises coloniales entre mes anciennes et nouvelles frontières et pour empêcher la contrebande. Donnez ordre au duc de Reggio de prendre des mesures pour confisquer les dépôts de mar­chandises anglaises dans les lieux où sont ses troupes, et de s’attacher à empêcher la contrebande et le commerce anglais.

 

Compiègne, 22 avril 1810

Au comte Daru, intendant général de la maison de l’Empereur, à Paris

Monsieur le Comte Daru, je désire avoir cette statue de Pompée, mais la somme demandée me parait bien forte ; voyez s’il n’y aurait pas moyen de l’acquérir à moins.

Napoléon.

 

Compiègne, 23 avril 1810

A Frédéric-Guillaume III, roi de Prusse, à Berlin

Monsieur mon Frère, les félicitations que Votre Majesté m’a adressées à cette occasion [1]le mariage de l’Empereur. , dans la lettre qu’elle a chargé le maré­chal comte de Kalkreuth de me remettre, m’ont vivement touché. Votre Majesté ne pouvait choisir personne qui me fût plus agréable, et j’ai été bien aise de pouvoir lui témoigner personnellement mon estime. Je lui ai fait connaître le prix que j’attache aux assurances qu’elle me donne de ses intentions et de ses sentiments. Je ne doute pas que son envoyé ne lui rende un compte fidèle de tous ceux que je lui ai exprimés pour elle, et surtout du désir que j’ai de contribuera sa satisfaction personnelle. Je saisirai toujours avec un nouveau plaisir les occasions de lui renouveler les assurances de la sincère estime et de la parfaite amitié avec lesquelles je suis, etc.

 

Compiègne, 22 avril 1810

A Auguste, duc de Saxe-Gotha, à Gotha

Mon Cousin, je connais trop bien les sentiments que vous avez pour ma personne pour n’être pas persuadé que vous éprouverez une vive satisfaction en apprenant mon mariage avec l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche. Les félicitations que vous m’avez adressées sur cet événement ne pouvaient que m’être très agréables. Je désire qu’il se présente des circonstances qui me permettent de vous donner des preuves de l’intérêt bien sincère que je prends à tout ce qui peut contribuer à votre prospérité et à celle de votre Maison. Je profite avec plaisir de cette occasion pour vous assurer de mon attachement et de ma constante affection.

[2]Même lettre, avec quelques variantes, aux princes de la Confédération du Rhin, à la Confédération suisse, à la ville de Danzig, aux villes de Hambourg, de Lubeck et de Brème.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, j’approuve votre projet de à mes ministres auprès des princes de la Confédération. Recomman­dez-leur, en l’envoyant, de la tenir très secrète, et d’arriver à ce pas avec adresse, sans brusquerie, et sans montrer une prétention qui pourrait compromettre mes intérêts les plus réels.

J’approuve aussi la lettre que vous voulez écrire à M. Didelot pour mes secrètes intentions relativement à la triple alliance [3]Triple alliance du Nord, d’après la minute : projet d’alliance secrète avec la Suède, le Danemark et le duché de Varsovie .

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, j’approuve le congé que vous propo­sez pour M. Derville, mon chargé d’affaires dans le Valais. Dites-lui de venir à Paris, où il pourra être consulté sur les affaires relatives à ce pays; il faudra qu’il se munisse, en conséquence, de tous les renseignements nécessaires. Faites-moi connaître si j’ai lieu d’être satisfait de ceux qui gouvernent actuellement dans le Valais; ce n’est que dans ce cas que je leur permettrai de m’envoyer une députation.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie un portefeuille avec les affaires relatives à la Saxe.

Il me semble qu’on démolit les fortifications de Dresde. Donnez pour instruction à mon ministre de veiller à ce que l’on travaille aux fortifications de Wittenberg; il faut que la Saxe ait une place forte pour y déposer en sûreté ses arsenaux, son artillerie et ses magasins.

Je vous renvoie aussi les affaires de Stuttgart; je n’ai parcouru ces dépêches que légèrement ; s’il y avait quelque chose qui demandât une décision, vous me le feriez connaître.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie toutes les dépêches relatives aux affaires de Hollande, que j’ai trouvées dans vos porte­feuilles.

Demandez au sieur la Rochefoucauld une analyse de l’emprunt de la Prusse, et faites-lui connaître qu’il doit l’encourager de tous ses moyens; que même, s’il le faut, il peut promettre une garantie de ma part, dans le cas où il arriverait des événements supérieurs à la Prusse, et qu’il peut faire mettre dans les journaux du pays tout ce qui peut favoriser l’emprunt de la Prusse. Je n’entendrais pas m’engager à payer l’intérêt, si la Prusse tardait à le payer, mais je m’engagerais volontiers à rassurer contre tout événement de force majeure.

Vous pouvez écrire en Hollande qu’on peut laisser entrer les bâti­ments chargés de sel, s’ils n’ont rien payé aux Anglais.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie toutes les dépêches de Prusse que j’ai trouvées dans vos portefeuilles, depuis le 21 mars jusqu’au 4 avril. Il résulte d’une note de M. de Goltz que la Prusse me doit encore 86,500,000 francs. L’emprunt de Hollande est de 38 millions; il restera donc à trouver 48 millions. Il y a 12 millions de lettres de change protestées de Magdeburg qui sont à payer sans délai. Enfin ces 48 millions, à 5 millions par mois, seraient payés en neuf mois. Un arrangement de cette espèce pourrait avoir lieu, et la Prusse serait libérée. Mais je ne me déferai d’aucune forteresse que lorsque, sur les 86 millions, j’en aurai au moins 50 dans les mains. En économisant et en licenciant ses troupes, la Prusse arri­vera à ce résultat. Je désire beaucoup que vous parveniez à faire avec M. de Kalkreuth ou avec M. de Krusemark une convention dans ce sens, et prendre des mesures pour favoriser l’emprunt de Hollande.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie le travail d’Autriche. Présentez-moi un projet de note à M. de Metternich. Vous lui ferez connaître dans cette note que j’accorde volontiers à l’empereur d’Au­triche la permission d’emprunter 30 millions de florins sur le pied de 20 kreutzers, ce qui fait 25 millions tournois. Il pourra ouvrir des emprunts à Paris, à Gènes, à Amsterdam, Francfort, etc., non seulement je l’y autorise, mais vous lui direz que je suis bien aise de donner à l’empereur des preuves de mon désir de lui être agréable, et de favoriser ses projets.

Sur la seconde note, répondez à M. de Metternich que vous êtes autorisé à entrer en négociation sur l’établissement d’une factorerie à Fiume, sur le règlement des relations commerciales entre les pro­vinces illyriennes et l’Autriche, ainsi que sur un traité général de commerce. Concertez-vous sur cet objet important avec M. Aldini et le ministre de l’intérieur, et voyez ce que vous pourrez conclure là-dessus.

Répondez à la troisième note que vous êtes autorisé à conclure un arrangement pour les sujets mixtes de la Confédération, en prenant pour base ce qui a été réglé par les traités pour les autres pays.

Présentez-moi des projets de notes pour M. de Schwarzenberg; vous lui direz que mon intention est que le traité de Vienne soit ponctuellement exécuté pour tout ce qui concerne les provinces illy­riennes. Vous lui ferez aussi connaître que des ordres sont donnés pour que tous les prisonniers de guerre autrichiens soient rendus, et que j’ai demandé un rapport à mon ministre des finances sur l’affaire des frères Kreuzer, ainsi que sur celle du comte Maldonado. Faites-lui également connaître que ceux de mes sujets qui se sont révoltés , en Dalmatie pendant la dernière guerre éprouveront les effets de mon indulgence. Vous écrirez au ministre de la guerre dans le sens de la réponse que vous ferez.

Présentez-moi un rapport sur la réclamation de M. Otto en faveur du comte de Sikingen.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, j’approuve le projet d’instruction pour la remise de Bayreuth. Il faut y ajouter que le général Compans se concertera avec l’intendant de la province pour stipuler la remise des meubles et de tous les revenus arriérés. J’approuve également les instructions de M. Jollivet pour la remise de Fulde et de Hanau.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, répondez à M. de Gallo qu’il est sans inconvénient qu’on nomme en Russie une légation napolitaine, mais que je désire qu’elle ne s’y rende pas. Quant à la cour de Vienne, le Roi ne doit pas y nommer de légation, puisque cette cour ne l’a reconnu que comme roi de Naples, et que la présentation des lettres de créance éprouverait des difficultés qui me seraient fort désagréables.

 

Compiègne, 24 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, j’approuve ce que la Consulte a fait pour l’ancien roi de Sardaigne. Je ne me refuse point à donner un secours fixe à ce prince, mais je désirerais auparavant une lettre ou quelque chose qui me fit connaître ses demandes et ses besoins.

 

Compiègne, 24 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, témoignez mon mécontentement au duc de Castiglione de sa retraite sur Girone. Si, au lieu de rester dans Barcelone au milieu d’actions et de réactions, il avait été à la tête de ses troupes et ne les eût pas confiées à des généraux de peu d’expérience, il aurait jeté Caro dans la mer, balayé tout ce qui était devant lui, et aurait trouvé des vivres dans la plaine de Lérida. Je n’ai point reconnu là le zèle qu’il avait toujours montré pour mon service et pour la gloire de mes armes. Ce n’est point en restant dans les capitales éloignées de l’armée que des généraux en chef peuvent acquérir de la gloire et mériter mon estime.

Donnez ordre au maréchal Macdonald de partir dans le plus court délai pour prendre le commandement de l’armée et le gouvernement de la province. Mettez-le au fait de ce qui s’est passé. Il vous sera facile de lui faire comprendre que le maréchal Augereau, cassé et infirme, au lieu de commander lui-même ses troupes, les a laissées à son frère, officier très médiocre, et qu’il est revenu lorsqu’il y avait encore des ennemis à combattre; que les plaines entre Lérida et Tarragone sont bonnes et abondantes en vivres, et qu’il faut de l’énergie et du mouvement.

Vous trouverez ci-joint le décret qui nomme le maréchal Macdonald commandant de l’armée de Catalogne et gouverneur général du pays.

Après la dénonciation du maréchal Augereau contre le général Duhesme, le consul de France et autres individus, il faut demander des renseignements précis, les noms des membres de la commission formée par le maréchal Augereau, les résultats de l’enquête, les interrogatoires du général Duhesme et des autres prévenus. Il y avait bien autre chose à faire que de réjouir les Espagnols par cette réaction.

 

Compiègne, 25 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, faites démentir la ridicule lettre que le journal de Francfort me fait écrire au prince Charles. Il faut le faire dans des termes qui ne blessent point l’Autriche, en rendant seulement hommage à la vérité. Invitez le sieur Hédouville à sur­veiller cette gazette qui met tant de bêtises sous mon nom.

 

Compiègne, 25 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, il n’y a pas de doute que les Hollan­dais ne doivent payer qu’à dater du 1er avril. Il n’y a pas de doute que les corsaires peuvent prendre les bâtiments en fraude qui seraient dans les rades et passes de Hollande, car, s’il y en avait, mes douanes ont le droit de les aller saisir. Je ne vois donc pas quelle difficulté cela peut faire. Au reste, s’il y a des discussions, elles doi­vent être jugées par moi. La Hollande ne doit point tolérer la contre­bande ; voilà le fait.

 

Compiègne, 25 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, il me semble que le traité que vous avez signé le 24 avril avec M. de Taube n’avance rien. Il faudrait savoir ce que donne le roi de Wurtemberg, et il ne peut se dispenser de céder le duché de Nellenburg au grand-duc de Bade. Si la portion de territoire qu’il cède au grand-duc de Bade rentre dans ses Étata et est comme une pierre d’attente pour pouvoir reprendre ce duché, ce sera un sujet d’incertitude et d’inquiétude pour le pays, an lieu d’être un sujet de tranquillité et de consolidation.

 

Compiègne, 25 avril 1810

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie les dépêches de Constantinople et de Perse. Il ne faut pas que mon envoyé à Constantinople montre aucun sentiment hostile contre l’Autriche, à cause de son pavillon. Ce sont des misères auxquelles je ne veux prendre aucun intérêt. Dites à l’ambassadeur turc d’expédier un courrier à Constantinople pour écrire contre les Moruzzi (les Morassi étaient des Grecs, drogmans de la Porte, vendus aux Anglais et  très hostiles à l’ambassade de France) et demander catégoriquement qu’ils soient chassés.


Je vous ai écrit de renvoyer l’ambassadeur de Perse, mais sans mauvais traitement. Vous lui direz que je ne veux pas le voir et que je suis mécontent que la Perse ait fait céder les intérêts de sa politi­que à quelques milliers d’écus qu’ont donnés les Anglais ; que, lorsque l’empereur de Perse voudra renouer ses liaisons avec moi, il devra d’abord chasser les Anglais de chez lui.

 

Compiègne, 25 avril 1810

Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris

Monsieur le Comte de Montalivet, vous avez écrit une lettre au prince Kourakine; je vous prie de m’en envoyer copie. C’est, en général, une mauvaise chose que d’écrire aux ministres étrangers, puisqu’il y a des nuances qui peuvent compromettre le cabinet. C’est au ministre des relations extérieures seul à faire ces réponses.

 

Compiègne, 25 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Les commandements d’armes ont été mal divisés ; un général de division commandant d’armes de première classe se trouve obligé d’obéir au général de brigade qui commande le département, et souvent il en résulte de l’incertitude dans le service. Cet inconvénient se fait même sentir pour les places de deuxième classe confiées aux géné­raux de brigade. Je désire, en conséquence, une autre division dans les commandements d’armes, et je vous charge de me faire un rap­port sur cette partie. Désormais aucun général de division ne sera employé comme commandant d’armes, et il conviendra de créer une cinquième classe, qui sera affectée aux capitaines. Quel était autre­fois le système adopté pour le commandement ou le gouvernement des places ? La méthode usitée aujourd’hui n’a-t-elle point été établie dans le cours de la révolution ? Cette méthode est extrêmement dispendieuse en raison des traitements considérables attribués aux grades supérieurs.

 

Compiègne, 25 avril 1810

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Mon intention est de faire une expédition dans les îles Jersey et de charger de cette expédition la division Grandjean. En conséquence, les trois régiments et l’état-major de cette division se rendront de Reims à Cherbourg. Jai à Cherbourg deux vaisseaux de guerre pour protéger cette expédition. Le 5e léger en fera partie, ce qui fera un corps de 7 à 8,000 hommes. J’ai spécialement en vue, dans cette expédition, d’inquiéter les Anglais et de les obliger à tenir beaucoup de monde à Jersey.

 

Compiègne, 25 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez l’ordre au général Rogniat de se rendre devant Lérida pour diriger le siège de cette place. La 4e et la 6e compagnie du 4e bataillon de sapeurs et un détachement de la 4e compagnie du train du génie, conduisant trente-deux caissons chargés de huit à dix mille outils, seront employés au siège de Lérida. La 1e et la 8e com­pagnie du 4e bataillon de sapeurs seront employées au siège de Ciudad-Rodrigo. La 6e et la 9e compagnie du 2e bataillon de sapeurs et les 7e et 8e du même bataillon, avec un détachement de voitures por­tant dix mille outils, se rendront à Madrid. Ce qui reste disponible du train du génie sera réparti entre Lérida, Ciudad-Rodrigo et Madrid, pour être à la disposition de l’armée d’Andalousie. Donnez ces diffé­rents ordres.

 

Compiègne, 25 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre au 1er régiment de marche d’infanterie, composé de détachements appartenant au 1er corps d’armée, qui se trouve dans la Navarre, faisant partie de la division Dufour, de se réunir tout entier et de se rendre à Madrid, où il sera dissous et rejoindra le 1er corps.

Donnez ordre au 43e bataillon de la flottille et à un bataillon d’ou­vriers de la marine de partir de Saint-Sébastien pour Madrid, d’où ils se rendront devant Cadix. J’entends ceux qui ne faisaient pas partie de la Grande Armée.

Donnez ordre à l’autre bataillon de la flottille et à l’autre bataillon d’ouvriers de la marine, ceux qui étaient à Orléans, qui sont à Saint-Sébastien, de se rendre, sous les ordres du colonel Baste, au quar­tier général de Burgos, à la suite de la Garde; ils seront sous les ordres du général Dorsenne. Les uns et les autres seront sous les ordres des généraux qui commandent le génie et feront partie du parc du génie.

Donnez ordre au 5e régiment de marche, qui fait partie de la divi­sion Seras, de se rendre, savoir: le 1er bataillon à Valladolid, où il sera dissous, et les différents détachements envoyés aux bataillons qu’il a au 6e et au 8e corps. Le 2e bataillon sera également dissous; le détachement du 121e sera envoyé à Saragosse ; celui du 122e à la division Bonet, et ceux des 32e et 58e au 8e corps.

Donnez ordre que le 6e régiment de marche d’infanterie, qui fait partie également de la division Seras, soit dissous, et que les déta­chements appartenant au 6e corps, savoir, ceux des 6e léger, 39e, 76e, 59e, 50e, 69e, 82e, etc., se réunissent en une compagnie à Vitoria, et se rendent de là à Salamanque ; que les détachements apparte­nant au 8e corps, savoir, ceux des 65e, 25e, 19e, 70e, 86e, etc., se réunissent en une compagnie et se rendent à leurs régiments pour y être incorporés.

Tous les détachements qui appartiennent aux 1er, 2e, 4e et 5e corps, se réuniront en un corps et se dirigeront sur Madrid.

Le bataillon d’Isembourg et celui du régiment de Prusse se ren­dront à Pampelune pour y tenir garnison.

Le bataillon de marche de la légion de la Vistule sera également envoyé dans la Navarre, où, s’il est nécessaire, le général Dufour sera autorisé à le garder.

Le bataillon badois se rendra à Madrid pour rejoindre son corps.

Je suppose que vous avez donné ordre au régiment d’infanterie du grand-duché de Hesse de se rendre à Vitoria.

Donnez l’ordre à la brigade Lamartinière de se réunir en règle par régiment et de partir pour Madrid, où cette brigade sera dissoute et d’où chaque détachement rejoindra son régiment.

Tous les régiments de marche de cavalerie ont déjà été dissous. Par ce nouvel ordre tous les régiments de marche d’infanterie le sont, et l’armée du Midi se trouvera renforcée d’une grande quantité de troupes.

 

Compiègne, 25 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, le général Dorsenne a l’ordre de se rendre à Burgos pour prendre le commandement de ma Garde, qui est composée de la division Roguet, formée de deux régiments de fusiliers et de tirail­leurs, et de la division Dumoustier, qui, d’Angers, a ordre de se rendre sur Burgos, et qui est également formée de deux régiments de fusiliers et de tirailleurs. Chacune de ces divisions est forte de 6,000 hommes et a huit pièces de canon de bataille, indépendamment de douze pièces d’artillerie légère, qui joindront la division Dumoustier à son passage à Bordeaux ; ce qui portera l’artillerie à vingt-huit pièces. Je donne ordre aux lanciers de Berg et aux chevau-légers polonais de se réunir à Bayonne ; ce qui, joint aux deux régiments de chasseurs, dragons et grosse cavalerie, portera la cavalerie à 2,500 hommes. Je donne ordre au général Lepic d’aller prendre le commandement de cette cavalerie. Vous donnerez ordre au général Dorsenne de correspondre avec vous et de ne recevoir d’ordre que de vous. Il occupera Burgos, Aranda, et maintiendra la communication avec Santander, Vitoria et Santo-Domingo. Vous lui donnerez le commandement supérieur de la province de Burgos. J’ai joint à ma Garde un corps de marins, commandé par le colonel Baste, et un corps d’ouvriers de la marine; ce qui portera ce corps à 16 ou 17,000 hommes. Vous donnerez pour instruction au général Dor­senne que, en cas que les Anglais marchent contre le duc de Rivoli, il est maître de marcher à son secours ; mais que, hors ce cas-là, il doit s’appliquer à maintenir la tranquillité sur le Douro et jusqu’à Santander, faire des colonnes pour protéger les communications avec la Navarre et pour maintenir sa communication avec Valladolid. Vous donnerez ordre au général Dorsenne d’être rendu le 12 mai à Burgos, d’avoir toujours 500,000 rations de biscuit pour marcher avec la Garde, de faire augmenter la défense du fort de Burgos, et de mettre tout dans la meilleure situation de défense et de tranquillité dans les pays environnants. Vous joindrez à ma Garde le bataillon de Neuchâtel et la compagnie des guides de l’armée. J’ai donné ordre que les 3e, 4e et 7e demi-brigades provisoires, avec le régiment d’infan­terie du grand-duché de Berg, sous les ordres d’an général de brigade, partent pour Bayonne, et de là pour Vitoria. Vous me ferez connaître le jour où arrivera cette demi-brigade d’arrière-garde, pour que je lui donne de nouveaux ordres.

 

Compiègne, 25 avril 1810

Au maréchal Bessières, duc d’Istrie, commandant la cavalerie de la garde impériale, à Paris

Mon Cousin, je désirerais augmenter les dragons, chasseurs et grenadiers de ma Garde en Espagne, en prenant dans mes vélites des hommes qui ont peu fait la guerre et qui ont besoin de la faire pour acquérir de l’expérience, de sorte que je n’aurais à Paris que de vieux chasseurs, grenadiers et dragons. Je remplacerai les vélites par la voie de la conscription, au lieu que mes vieux soldats me seraient plus difficiles à remplacer.

 

Compiègne, 26 avril 1810

Au comte Defermont, intendant général du domaine extraordinaire de la couronne, à Paris

Monsieur le Comte Defermont, je vous envoie des pièces par lesquelles le roi de Westphalie demande que tous les domaines réservés en Westphalie et en Hanovre soient mis à sa disposition, à la charge par lui de rembourser les donataires en bons, qui s’éteindraient successivement comme ceux stipulés par le dernier traité. Les domaines réservés s’élèvent pour la Westphalie à environ 6,975,000 francs, pour le Hanovre, d’après le décret de ce jour, à 4,494,000; ce qui fait un total approximatif de 11,469,000 francs de revenu. Sur ce fonds, il me reste encore à disposer, savoir : en Westphalie, de 177,900 francs environ ; en Hanovre, restant de crédit de la 4e classe, réduit par le décret de ce jour, 398,690; total du revenu qui est encore disponible, 576,590 francs.

Je consens à ce que tous les domaines qui n’ont pas encore été distribués soient rétrocédés au Roi, moyennant le payement de leur valeur, calculée au denier vingt, en bons de 10,000 francs, portant intérêt à 4 pour 100 et payables de six mois en six mois chez un banquier à Paris ; de sorte que désormais, au lieu de donner des domaines en Westphalie ou en Hanovre, je donnerai de ces bons.

Quant aux domaines que j’ai déjà distribués, beaucoup de dona­taires n’ont pas encore été mis en possession ; je désire que vous m’en remettiez le relevé. A l’égard de ceux-là, je ne vois pas de difficulté à ce que vous stipuliez pour eux les mêmes conditions de rétroces­sion que pour les domaines dont je n’ai pas encore disposé.

Enfin, quant aux biens dont les donataires sont actuellement en possession, le domaine extraordinaire pourrait consentir à ce que tout donataire qui voudrait remettre son lot au Ri pût le faire aux mêmes conditions de remboursement que les précédents. Ainsi, par exemple, pour un individu ayant 4,000 francs de revenu, le Roi donnerait huit bons de 10,000 francs, représentant un capital de 80,000 francs, ces bons portant intérêt à 4 pour 100, payables chez un banquier à Paris, et remboursables d’année en année, de manière que le total du prix serait remboursé en vingt années.

Dans l’état actuel des choses, il y a 11,469,000 francs de revenus réservés, tant en Westphalie qu’en Hanovre. Je calcule que cette somme se distribue de la manière suivante : en dotations au-dessus de 4,000 francs, 7,284,000 francs; en dotations de 4,000 francs, 2,340,000; en dotations de 2,000 francs, 892,000 ; restant à dis­tribuer, 576,000; total, 11,092,000; restant employés en complé­ment de dotation, 377,000; total égal, 11,469,000 francs.

Il ne serait pas avantageux aux donataires qui ont plus de 4,000 fr. d’entrer en arrangement avec le Roi, et ce traité ne peut être admis­sible que pour ceux qui ont 4,000 francs et moins de 4,000 francs, ou dont le revenu serait trop faible pour supporter des frais d’admi­nistration. En supposant donc que tous ceux qui ont 4,000 francs et au-dessous consentissent à s’arranger, cela ferait environ 3,630,000 francs de rente que le Roi acquerrait moyennant 7,260 bons de 10,000 francs, remboursables en vingt années, à raison de 363 bons par année, et de plus le payement de l’intérêt à 4 pour 100 ; ce qui ferait, pour la première année, le payement d’un intérêt de 2,904,000 francs.

Il faudrait de plus établir dans ce traité deux classes : 1° la classe de ceux qui sont actuellement en possession et qui accèdent au traité ; ils doivent conserver hypothèque spéciale sur leur bien, et le Roi doit s’engager à ne pas vendre ce bien jusqu’à ce que le remboursement en ait été entièrement acquitté, afin qu’en cas d’un événement quel­conque ces propriétaires conservent toujours leur gage; 2° quant à la partie qui m’appartient ou dont les propriétaires n’ont pas encore l’investiture, il faudrait assigner une hypothèque spéciale et générale sur tous les biens.

Négociez cet arrangement avec le ministre des finances de Westphalie, afin quà mon retour d’Anvers vous puissiez signer. Si vous avez besoin de renseignements, demandez-les par courrier extraor­dinaire, et mettez de l’activité dans cette affaire. Consultez ceux des acquéreurs qui sont ici et qui ont 4,000 francs. Enfin rendez-moi compte des progrès de cette négociation , et ne signez rien sans m’a voir présenté le traité.

Vous recevrez de la secrétairerie d’État un décret par lequel je viens de lever toutes les difficultés sur les dotations du Hanovre.

 

Compiègne, 26 avril l810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, je vous renvoie toutes les pièces de la correspon­dance d’Espagne. Faites-en faire un extrait pour le Moniteur, que vous me montrerez demain à Saint-Quentin avant de l’envoyer. Vous mettrez sous le titre de Siège de Cadix le journal de ce siège, depuis le commencement jusqu’aujourd’hui ; s’il y a quelque chose d’incon­venant, vous le supprimerez ; sous le titre de Comptes journaliers des escarmouches et affaires peu importantes qui ont eu lieu dans les diffé­rentes parties de l’Espagne, le rapport succinct des affaires de Malaga, de Ronda, des petits débarquements des Anglais, de la petite affaire du général Foy, de la reconnaissance dans le nord du général Sainte-Croix, de la marche du général Suchet sur Valence (en imprimant les pièces qui ont été émises à cette occasion), des affaires du géné­ral Bonet. Il faut nommer les officiers qui se sont distingués, car, quoiqu’ils aient eu part à des affaires peu importantes, ils n’en ont pas moins risqué leur vie. D’ailleurs cela donnera des connaissances sur les affaires d’Espagne.

 

Compiègne, 26 avril 1810

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, écrivez au roi d’Espagne que je suis instruit qu’il fait renvoyer les aigles retrouvées à Bailén par le général Dessolle; que cela ne m’est pas agréable ; qu’il doit charger de cette mission un simple officier, un capitaine ou un lieutenant-colonel, mais non un officier du grade du général Dessolle, qui est nécessaire en Espa­gne. Si le général Dessolle était déjà parti, prévenez le général Belliard pour qu’il le retienne et l’empêche de passer Madrid, en lui faisant connaître mes motifs.

 

Compiègne, 26 avril 1810

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à Amsterdam

Je pars demain pour Anvers; j’irai jusqu’à Flessingue et la fron­tière. Je désire que vous me fassiez passer les prospectus de l’emprunt de Prusse et me fassiez connaître à quel taux emprunte la Prusse, et s’il réussira, les époques de payement, etc. Tout cela écrit, non pas en argot de commerce, mais de manière que je le comprenne.

 

Compiègne, 26 avril 1810

A Hortense Napoléon, reine de Hollande, à Amsterdam

Ma Fille, j’ai reçu votre lettre. Je suis bien aise que vous soyez arrivée avec vos enfants en bonne santé. Je pars demain pour Anvers, où je serai le 1er mai; j’aurai là de vos nouvelles. On m’assure que vous êtes contente du Roi et de la Hollande, ce qui me fait grand plaisir.

 

Compiègne, 26 avril 1810

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Paris

Mon Frère, je viens de donner des ordres relatifs à vos différentes affaires. Je n’ai pas de renseignements assez détaillés sur l’arriéré du Hanovre; je vais m’en faire faire le rapport. Je crois qu’on demande 14 millions; je saurai si cette somme est véritablement due, et dans tous les cas je suis disposé à la réduire et à traiter favorablement votre pays. J’ai accordé sur les revenus domaniaux en Hanovre la déduction de tous les produits qui étaient étrangers aux domaines.

J’ai réduit les dotations assignées sur ces revenus, de manière à faire disparaître le déficit. Enfin j’ai autorisé l’intendant général de mon domaine extraordinaire à entrer en arrangement avec votre ministre des finances pour la vente des domaines qui m’appartiennent encore ou qui appartiendraient à des individus ayant des dotations de 4,000 francs et au-dessous. Quant aux biens qui sont actuellement en la possession des donataires, je n’y puis rien. J’ai donc fait en cela tout ce que vous désiriez.

 

Compiègne, 26 avril 1810

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, je désirerais que vous vinssiez à Anvers de votre per­sonne pour voir l’escadre et les localités, qu’il est bon à votre âge de connaître. Je ne sais pas si vous avez vu Boulogne depuis que j’y ai fait construire une flottille. Je compte être à Anvers le 1er mai. Tâchez d’y être du 3 au 4. Cependant, comme ce voyage n’est que pour votre instruction, faites là-dessus ce qui vous conviendra.

 

Compiègne, 28 avril 1810

A l’Impératrice Joséphine, au château de Navarre

Mon amie, je reçois deux lettres de toi. J’écris à Eugène. J’ai or­donné que l’on fit le mariage de Tascher avec la princesse de la Leyen.

J’irai demain à Anvers voir ma flotte et ordonner des travaux. Je serai de retour le 15 mai.

Eugène me dit que tu veux aller aux eaux; ne te gênes en rien. N’écoutes pas les bavardages de Paris; ils sont oisifs, et bien loin de connaître le véritable état des choses. Mes sentiments pour toi ne changent pas, et je désire beaucoup te savoir heureuse et contente.

 

Laeken, 30 avril 1810

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je reçois votre lettre du 29 avril.

La communication du commissaire anglais avec l’Angleterre, par parlementaire, est de droit commun. Je ne vois pas de difficulté non plus à ce qu’il communique avec ses parents et amis qui sont prison­niers en France.

Écrivez à M. du Moutier qu’il ne doit remettre aucune note par écrit que la minute ne vous en ait été soumise et qu’elle ne vous ait été renvoyée approuvée.

Vous pouvez faire répondre par votre chef de division, en réponse à la lettre du 22 avril du commissaire anglais, qu’il est probable que, sa négociation une fois terminée, il n’y a aucune espèce de difficulté à ce qu’il se rende à Paris.

Je vous envoie un projet de note à présenter par M. du Moutier. Il vous sera facile de lui expliquer l’esprit et le sens de cette note. C’est le commissaire anglais qui en a donné la première idée : mettre les prisonniers des deux masses belligérantes en liberté à la fois est une grande idée. Nous n’avons pas seulement des prisonniers en An­gleterre ; nous en avons aussi au pouvoir des gouvernements de Cadix, de Valence et dans les trois îles d’Espagne. Je ne puis donc renvoyer tous les prisonniers espagnols qui sont en France sans qu’on me ren­voie les prisonniers français qui sont dans ce pays. Nous évaluons à 10 ou 12,000 les prisonniers qui restent au pouvoir des Espagnols, et nous avons plus de 40,000 Espagnols. La proposition à laquelle nous adhérons est donc toute contre nous. Vous remarquerez que nous renvoyons en masse les prisonniers français et anglais, parce que les deux nations traitent directement et loyalement. Nous n’irons à craindre aucune réticence; il n’en est pas de même avec les Espa­gnols , qui ont des gouvernements révolutionnaires qui n’offrent au­cune garantie. Le gouvernement serait responsable du refus des juntes espagnoles, puisqu’il est comptable de tous les Français.

Nous ne pouvons nous dissimuler que ce commissaire anglais pourra, après avoir reçu les prisonniers anglais, puisque le nombre des prisonniers français est plus considérable, demander en compen­sation une certaine quantité d’Espagnols. S’il faisait cette proposition et qu’il y tint, il n’y aurait pas d’inconvénient, sans entrer dans la discussion des Hanovriens pris avant la guerre ni dans la distinction des rangs, de faire une note et de dire que, indépendamment des Anglais qu’on remettra directement en Angleterre, on y remettra éga­lement 10,000 Espagnols. Par ce moyen, on éviterait toute discus­sion , et supposé que les gouvernements révolutionnaires d’Espagne ne voulussent pas renvoyer les Français, l’Angleterre aurait eu l’équi­valent de son échange.

Il me semble que cette manière de présenter la question, en divisant les principes d’exécution, est grande et avantageuse aux deux puissances.

Enfin, si l’on voulait prendre les mêmes errements qu’en 1780, nous y consentons, et, si, au lieu d’argent, on veut des Espagnols, nous y consentons encore.

Vous devez faire observer au sieur du Moutier qu’il est possible qu’il n’y ait que 5 à 6,000 Hanovriens dans les rangs anglais; mais par les rapports des prisonniers faits dans les armées des généraux Stuart, Moore et Wellington, nous savons qu’un grand nombre de prisonniers de la capitulation du Hanovre sont morts dans les hôpi­taux ou ont été tués, que d’autres font partie d’expéditions éloignées; qu’ainsi le calcul de 3 à 4,000 n’est pas admissible; que le principe de prendre des individus anglais voyageant est une conséquence des principes du droit maritime anglais, qui prend des négociants, des marchands, même de simples passagers ; que, sans entrer dans des discussions d’individus, il est plus naturel de trancher la question en évitant cette difficulté.

Si ce projet ne convenait pas au gouvernement britannique, le sieur du Moutier en présenterait un autre basé sur le cartel de 1780.

Préparez ces dépêches. Vous me les lirez demain matin, et vous les ferez immédiatement partir par un courrier extraordinaire pour Morlaix.

PROJET DE CARTEL.

  1. Tous les Français, Italiens , Napolitains, Hollandais, Russes, Danois et autres sujets alliés, amis ou au service de France, qui seraient retenus en Angleterre, en Espagne, en Sicile, en Portugal, au Brésil ou dans tout autre pays allié de l’Angleterre, dépendant de Sa Majesté Britannique ou occupé par ses armées, sans considération de grade ni de qualité, seront mis en liberté.
  2. Tous les Anglais, Siciliens, Portugais,   Espagnols,  Hanovriens, sujets ou au service de ces nations, seront mis en liberté et renvoyés chez eux de France, d’Italie, de Hollande, de Russie et de tous les pays alliés ou dépendants de la France ou occupés par ses armées.
  3. Les deux articles précédents recevant leur exécution, il ne restera plus de prisonniers pour raison de guerre des deux masses belligérantes dans les uns et les autres pays.
  4. L’exécution de ces articles aurait lieu de la manière suivante:

          1° Tous les prisonniers français ou du royaume d’Italie qui sont retenus en Angleterre, à Malte, en Sicile, seront transportés sur le point le plus près de la côte de France, et la remise en sera faite à des commissaires français nommés à cet effet.

Tous les Anglais retenus en France, de quelque grade et sous quelque dénomination que ce soit, comme prisonniers de guerre, seront mis en liberté, et remis sur le point le plus près de la côte d’Angleterre à des commissaires anglais nommés à cet effet.

2° Tous les Hanovriens faisant partie de l’armée de Hanovre qui ont été ou sont au service de l’Angleterre ne seront pas inquiétés dans leurs biens; ils seront censés échangés ou l’avoir été, et ceux actuel­lement existant en Hanovre seront déliés de l’obligation que leur imposait la capitulation.

3° Tous les Français retenus en Espagne ou dans les pays apparte­nant à l’Espagne seront mis en liberté; la libération en sera faite entre les généraux français et les commandants des villes qui leur seront opposés. La remise pourra avoir lieu, ou par renvoi par mer dans un des ports de Toulon ou de Rochefort, des individus retenus dans les différentes villes d’Espagne et dans les Îles, ou par le renvoi aux avant-postes des différents corps de l’armée française en Espagne.

La remise des Espagnols prisonniers en France aura lieu, soit par le renvoi en masse en Angleterre, par 1,000 hommes, au fur et à mesure que les Français auront été rendus par les gouvernements espagnols, soit par le renvoi dans les différentes villes d’Espagne. La France s’engage, lorsque tous les prisonniers français auront été remis, à renvoyer le surplus des Espagnols sans échange, de sorte qu’après l’exécution du présent article il ne reste en France aucun prisonnier de guerre espagnol.

4° Le même procédé sera suivi pour les prisonniers portugais et siciliens.

5° Le gouvernement britannique s’entendra, pour l’exécution de ces principes, avec les gouvernements russe et danois, en ce qui les concerne;

6° Des commissaires seront nommés de part et d’autre, l’un pour résider à Londres et l’autre à Paris, pour tenir la main à l’exécution des dispositions du présent cartel et pourvoir à tout ce qui pourrait survenir.


 

References

References
1 le mariage de l’Empereur.
2 Même lettre, avec quelques variantes, aux princes de la Confédération du Rhin, à la Confédération suisse, à la ville de Danzig, aux villes de Hambourg, de Lubeck et de Brème.
3 Triple alliance du Nord, d’après la minute : projet d’alliance secrète avec la Suède, le Danemark et le duché de Varsovie