Correspondance de Napoléon – Février 1813
Paris, 9 février 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Doc de Feltre, j’ai ordonné la formation d’un 6e bataillon bis à chacun des régiments de la Grande Armée.
Mon intention n’a pas été de conserver six bataillons à ces régiments. Voici de quelle manière je désire que la réorganisation de ces régiments soit faite :
Le 1er bataillon doit être reformé dans les places de l’Oder; le reste des cadres se reformera à Erfurt.
Le 2e bataillon se reformera à Erfurt : il sera recruté avec les 700 hommes qui ont eu ordre de partir, et aussitôt après il se dirigera, comme je l’ai ordonné, sur Leipzig et Wittenberg, où il recevra des ordres du vice-roi.
J’attends votre rapport pour faire partir 4 ou 500 hommes qui se rendront également à Erfurt, où ils recruteront la partie du 1er bataillon qui s’y réunira. Cela se mettra sur-le-champ en marche pour les places de l’Oder, et par ce moyen les 1er et 2e bataillons seront réorganisés entièrement.
Les 3e, 4e et 6e bataillons se rendront en France, où ils trouveront un 6e bis. Mon intention est que le 6e bis et deux des autres bataillons forment deux bataillons, le 3e et le 4e. Le 5e restera comme dépôt.
Je ferai partir, aussitôt que faire se pourra, les 4 ou 500 hommes qui sont nécessaires pour compléter les deux premiers bataillons.
Je ferai partir un bon bataillon, le 4e bataillon qui est le 6e bis actuel, complété en officiers et sous-officiers et à 840 hommes, et par ce moyen j’aurai trois bataillons à la Grande Armée.
Je garderai les cadres du 3e bataillon pour recevoir des hommes de la conscription de 1814 et former des demi-brigades provisoires, chargées de la défense des côtes.
Ainsi, au lieu de quatre bataillons, les régiments de la Grande Armée n’en auront que trois sur l’Oder. Or, pour ces bataillons, il faut 2,500 hommes. Ces 2,500 hommes pourront à peine être fournis par la conscription de 1813 et par la conscription des quatre années.
S’il était des régiments qui eussent conservé un plus grand nombre d’officiers et de sous-officiers, et qui eussent éprouvé moins de pertes, sur le compte que vous m’en rendrez, on pourrait approuver l’organisation du 6e bataillon; mais, d’après les renseignements que j’ai, je ne crois pas qu’il y en ait beaucoup dans ce cas.
- S. Comme je venais de signer cette lettre, je reçois les états du vice-roi. Il en résulte que, même en comprenant les cadres des 6e bataillons bis, on aura de la peine à former les quatre bataillons par régiment. Puisque tous les régiments ont deux compagnies sur l’Oder, l’une du 1er bataillon, l’autre du 5e bataillon, que le vice-roi a réunie au 1er bataillon au lieu de l’y incorporer, ce sera donc quatre compagnies des 1er bataillons à reformer à Erfurt, et six des 2e bataillons. Le reste sera formé au dépôt.
Il n’y aura plus de major en second attaché aux régiments de la Grande Armée; ils seront tous rappelés. Destinez-les à commander les régiments provisoires ou à remplacer les majors qu’on nommera au commandement de ces mêmes régiments. Je préfère que tous les majors en second qui sont à la Grande Armée, et dont la plupart sont déjà de retour à Mayence, aillent commander les dépôts, où ils se reposeront, et que les meilleurs majors, en les prenant parmi ceux des régiments qui concourent à la formation des régiments provisoires, soient nommés colonels en second et envoyés aux régiments pour les commander. Au surplus, je fais faire de cette disposition l’objet d’un décret.
Paris. 9 février 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, la 1e division de la jeune Garde sera commandée par le général de division Barrois. Vous lui donnerez ordre d’en prendre le commandement demain; elle sera composée de deux brigades.
La 1e brigade sera composée de deux bataillons de fusiliers et de quatre bataillons formés des 2e de voltigeurs et des 2e de tirailleurs; elle sera sous les ordres du général Rothenburg.
La 2e brigade sera composée de quatre bataillons du 6e bis et de deux bataillons de Pupilles; elle sera commandée par le général de brigade Tindal.
Le général Barrois aura avec lui un général adjudant général et deux adjoints.
Artillerie. — Cette division aura quatre batteries d’artillerie à pied, formant trente-deux pièces de canon, avec double approvisionnement et dix-huit caissons d’infanterie. Cette artillerie sera commandée par un major de la Garde.
Génie. — Un chef de bataillon du génie commandera le génie ; il aura sous ses ordres une compagnie de sapeurs avec ses outils, et une compagnie de marins de la Garde.
Administration. —Cette division aura un commissaire des guerres, deux adjoints, et une compagnie d’équipages militaires, dont six caissons seront chargés d’effets d’ambulance.
Cavalerie. — Il sera attaché à cette division un escadron de grenadiers à cheval de 250 hommes, un escadron de dragons de 250 hommes, deux escadrons de chasseurs de 500 hommes, un escadron de lanciers du 2e régiment, de 250 hommes; ces cinq escadrons seront commandés par le major Leclerc, de la Garde; chacun des quatre régiments aura au moins un chef d’escadrons.
Deux batteries d’artillerie à cheval, de douze pièces, seront attachées à cette colonne de cavalerie.
125 grenadiers et 250 chevaux, 125 dragons et 250 chevaux, 250 chasseurs et 500 chevaux, 125 lanciers et 250 chevaux du 2e régiment, total 625 hommes et 1,250 chevaux, partiront de Paris avec cette division; les chevaux seront bien harnachés et équipés et se rendront à Fulde; ce qui montera 625 hommes de ceux qui s’y trouvent, et complétera à 1,250 hommes ladite colonne de cavalerie.
Si toute l’artillerie n’est pas prête au moment du départ de la division, on ne fera partir que ce qui sera prêt.
Les officiers et sous-officiers des cadres qui ne seraient pas prêts rejoindraient en route, soit à Mayence, soit à Fulde. Le général d’artillerie doit à cet effet donner des ordres nominatifs.
On aura soin de faire partir des effets d’habillement pour que tous ces officiers et sous-officiers se trouvent habillés à leur arrivée.
Les officiers de santé seront en nombre suffisant.
Il y aura une compagnie de boulangers, de force suffisante pour pouvoir faire par jour 24,000 rations de pain.
Le commandant du génie aura dans sa compagnie de sapeurs une escouade de maçons pour construire des fours, et dans ses caissons les outils nécessaires pour cette construction. Enfin les différents employés d’administration nécessaires seront attachés à celte division.
Le 15 de ce mois, il sera passé la revue de cette division dans la cour des Tuileries : tous les hommes seront présents, les caissons d’ambulance et d’équipages militaires seront chargés; tous les ouvriers s’y trouveront.
L’artillerie seule, étant à la Fère, ne sera pas à cette revue ; elle se réunira le 15 et passera à la Fère la revue du général Drouot.
Il me sera rendu compte si cette division est prête à partir le 16.
Paris, 9 février 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Il est convenable que vous fassiez connaître au roi d’Espagne, en chiffre et par quadruplicata, que je vois avec la plus grande peine qu’il ait perdu deux mois aussi importants que décembre et janvier, où les Anglais étaient dans l’impuissance de rien faire, et qu’il n’ait point profité de cette circonstance pour pacifier la Navarre, la Biscaye et l’Aragon; qu’il demande sans cesse de l’argent; que l’argent est là, et qu’il laisse sans raison dévaster ces belles provinces par Mina ; que je lui ai plusieurs fois donné l’ordre de se rendre à Valladolid, mais que la nonchalance de la direction des affaires en Espagne est inconcevable. Comment, en effet, n’a-t-il pas maintenu ses communications ? Et comment, après avoir eu connaissance du 29e bulletin, n’a-t-il pas senti la nécessité d’être promptement en communication avec la France ?
Il n’y a pas un moment à perdre ; que le Roi se rende à Valladolid, en faisant occuper Madrid et Valence par son extrémité gauche.
Écrivez-lui que le temps perdu est irrémédiable; que les affaires tourneront mal, si promptement il ne met plus d’activité et de mouvement dans la direction des affaires ; qu’il est nécessaire d’occuper Valladolid, Salamanque et de menacer le Portugal ; que les Anglais paraissent se renforcer en Portugal, et qu’ils semblent avoir le double projet, ou de pousser en Espagne, ou de partir du port de Lisbonne pour faire une expédition de 25,000 hommes, partie Anglais et partie Espagnols, sur un point quelconque des côtes de France, pendant le temps que la lutte sera engagée dans le Nord ; que, pour empêcher l’exécution de ce projet, il est nécessaire que l’armée d’Espagne soit toujours prête à prendre l’offensive et à menacer de se porter sur Lisbonne et de conquérir le Portugal, si les Anglais affaiblissaient leur armée d’Espagne. Il faut donc que le Roi occupe Valladolid et Salamanque, et qu’il remplisse le triple but de tenir en échec l’armée anglaise, d’avoir ses communications aussi promptes que faciles avec la France, afin de savoir tout ce qui se passe, et qu’il emploie le temps où les Anglais ne feraient rien pour pacifier la Biscaye et la Navarre ; que cette instruction doit être considérée comme instruction générale pour toute la campagne ; qu’enfin, si la force des armées françaises en Espagne restait oisive et laissait les Anglais maîtres de faire des expéditions sur nos côtes, la tranquillité de la France serait compromise. Il faut donc, je le répète, que le Roi ait des communications très-rapides et très-sûres, et qu’il soit toujours en mesure de prendre l’offensive.
Paris, 9 février l813.
Au général Duroc, duc d Frioul, grand maréchal du palais, à Paris
Vous trouverez ci-joint copie de la lettre que j’écris au ministre de la guerre. Comme il perdra deux jours à vous l’envoyer, donnez d’avance tous les ordres nécessaires. Faites appeler le général Barrois pour lui faire connaître la marque de confiance que je lui donne. Il faut qu’il ait son commissaire des guerres, ses chirurgiens et qu’il mette tout en état.
Faites-moi connaître de quelle manière on pourrait organiser les deux compagnies d’artillerie à cheval. Mon intention serait de les organiser à Mayence. Les chevaux, l’habillement et les recrues pourraient être envoyés d’ici. Par ce moyen, cette division de la Garde aurait déjà quarante-quatre bouches à feu.
Remettez-moi l’état de la division de la vieille Garde qui est à la Grande Armée, infanterie, cavalerie et artillerie, afin que je voie quelle serait la force totale de ces deux divisions.
Paris, 9 février 1813.
INSTRUCTION POUR LE CAPITAINE ATTHALIN, OFFICIER D’ORDONNANCE DE L’EMPEREUR, À PARIS.
Partez sur-le-champ pour Wesel; vous y resterez vingt-quatre heures. Vous me ferez connaître la situation des approvisionnements et des différents dépôts d’infanterie et de cavalerie qui sont dans cette place, ainsi que la situation des nouveaux régiments qu’a organisés le duc de Padoue. Vous vous informerez si les chevaux et les hommes qu’ont offerts les villes et les communes sont levés.
Rendez-vous de là auprès du général Lauriston qui doit être à Hambourg ou à Hanovre. À Hambourg, restez-y quarante-huit heures. Faites-moi connaître si les 100 chevaux que donne la ville sont fournis, et quel est l’esprit des habitants.
Rendez-vous de là à Hanovre, où vous resterez cinq jours, et envoyez-moi l’état de tous les marchés de chevaux qui ont eu lieu depuis novembre; de tous les chevaux qui ont été reçus, de la distribution qui en a été faite, de l’endroit où ils sont existants, enfin de ce qui reste à recevoir; ainsi que la situation des équipages et de l’armement et habillement de tous les corps.
De là, vous vous rendrez auprès du général Sébastiani, qui doit être à Brunswick. Vous m’enverrez la situation de son corps de cavalerie, et me ferez savoir quand il aura 2,000 chevaux en état d’entrer en ligne. Vous resterez plusieurs jours pour parcourir les cantonnements des régiments. Vous me ferez connaître ce qui reste à l’armée en cadres; où sont les colonels, ceux qui existent ou qui sont absents; où sont les majors et les chefs d’escadrons, etc.; enfin vous m’enverrez tous les renseignements qui pourront me mettre au fait de la situation des régiments qui composent le corps du général Sébastiani.
Rendez-vous après cela à Magdeburg, et rendez-moi compte de tout ce qui est relatif aux fortifications, à l’artillerie et aux approvisionnements. J’ai ordonné qu’une partie des faubourgs fût abattue et nivelée; vous veillerez à ce que ces ordres soient exécutés, sans avoir égard à quoi que ce soit. II ne s’agit ni de si, ni de mais, ni de car, lorsqu’il y va de la sûreté d’une place de cette importance. Vous me rendrez compte des troupes qui se trouvent dans la place, de celles qui passent, de la situation des magasins et approvisionnements. Et quand vous serez resté suffisamment à Magdeburg et que le général Lauriston y sera arrivé, comme il m’écrira tous les jours, vous pourrez vous rendre à Spandau et à Berlin.
Avant de quitter l’Elbe, vous vous rendrez aussi au corps de cavalerie que commande le général Latour-Maubourg et qui doit être de ce côté. Vous m’enverrez sur ce corps les mêmes observations que sur celui du général Sébastiani.
A Spandau, vous visiterez les fortifications. À Berlin, vous verrez le général Bourcier et m’enverrez la situation générale des remontes. Ayez soin de m’écrire tous les soirs ce que vous avez vu. Passez la journée à courir, et le soir écrivez-moi. Artillerie, génie, troupes, approvisionnements, fortifications, remontes : je dois voir dans vos lettres ce que j’aurais vu moi-même, si j’étais sur les lieux.
Quand vous serez à Hanovre, vous m’enverrez vos lettres par une estafette, qui les remettra à l’estafette de l’armée, sur le point de la route qui sera le plus voisin de Hanovre.
J’ai donné des ordres pour qu’à Magdeburg et sur l’Oder on coupât les bois tant pour le palissadement des places que pour des blindages.
- S. Faites partir vos équipages et vos chevaux, parce que vous ne reviendrez pas. Vous attendrez des ordres ultérieurs entre Berlin, Küstrin et Magdeburg.
Palais des Tuileries, 9 février 1813.
DÉCRET.
Art. 1er. Les places de secrétaire du portefeuille et de secrétaire-archiviste de notre cabinet sont supprimées.
Art. 2. Le service du cabinet sera fait par les deux secrétaires du cabinet.
L’un sera plus spécialement chargé du service des expéditions et archives et des détails d’ordre intérieur; il aura sous ses ordres le bureau des archives.
L’autre sera plus spécialement chargé du service des traductions et gazettes étrangères ; il aura sous ses ordres le bureau des traductions.
Art. 3. Il y aura sous les secrétaires du cabinet deux premiers commis du cabinet, qui les seconderont dans leur service.
Les appointements des premiers commis du cabinet sont fixés à 12,000 francs pour chacun.
Art. 4. Il n’est rien changé à ce qui a été réglé précédemment pour l’organisation du cabinet topographique.
Art. 5. Il y aura toujours de service au cabinet, nuit et jour, un secrétaire du cabinet, un premier commis et le directeur du cabinet topographique ou un de ses adjoints.
Art. 6. Notre grand chambellan est chargé de l’exécution du présent décret, qui sera communiqué aux officiers de la Maison.
Paris, 10 février 1813.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris.
Monsieur te Duc de Bassano, écrivez à M. de Saint-Marsan par un courrier que le grand recrutement qu’on fait dans toute la Prusse, avec des officiers auxquels le Roi ne peut pas se fier, ne peut que nous alarmer, et que je désire que tout reste tranquille.
Paris, 10 février 1813.
Au prince Lebrun, gouverneur général des départements de la Hollande, à Amsterdam.
J’ai ordonné que 3,000 hommes de régiments provisoires, tous Français, se missent en marche pour Amsterdam, afin de vous donner des forces suffisantes pour réprimer la malveillance. Vous n’avez pas besoin d’ordres d’ici pour faire venir à Amsterdam des canonnières avec des équipages français. Parlez-en au préfet maritime; j’en écris au surplus au ministre de la marine.
Publiez que je vais bientôt me rendre à Amsterdam pour aller visiter le Texel.
Paris, 10 février 1813.
A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Posen.
Mon Fils, il faut faire cesser le recrutement des Prussiens, et se contenter des troupes du général Bülow comme elles sont. Donnez partout vos ordres en conséquence.
Paris, 11 février 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, le vice-roi me mande qu’il ne pense pas que les cadres des cinq bataillons que chaque régiment de la Grande Armée a dû envoyer, soit à Erfurt, soit à Augsburg, puissent fournir davantage que la formation de deux bataillons, tant en officiers qu’en sous-officiers.
Mon intention est de reformer les régiments de la Grande Armée à quatre bataillons; ils sont aujourd’hui à cinq, et, en comprenant le 6e bis, ce serait six bataillons qui seront réduits à quatre.
Je pense donc qu’il faut changer le numéro du 6e et l’appeler 4e et donner l’ordre que les 3e et 4e bataillons soient formés le plus tôt possible.
Le 1er et le 2e bataillon seront formés à Erfurt; le 3e et le 4e au dépôt, ainsi que le 5e ; il n’y aura plus ni 6e ni 6e bis.
Ces régiments auront de quoi bien compléter trois bataillons; il restera donc un cadre du 4e pour recevoir la conscription de 1814.
Je pense qu’il est nécessaire d’envoyer un bon nombre d’officiers et de sous-officiers à tous ces cadres. Il faudrait leur envoyer pour sous-lieutenants beaucoup de jeunes gens sortant des écoles, et une partie des 1,000 sous-officiers retirés des dépôts. Je n’approuve pas la destination que vous avez donnée à ces 1,000 sous-officiers; il faut, avant tout, les envoyer aux régiments qui reçoivent la conscription des différentes années.
Paris. 11 février 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
La conscription de 1813 n’est pas levée dans le département de la Lippe. Vous y avez levé la conscription de 1812; avant de lever celle de 1814, il sera nécessaire de lever celle de 1813. Dans les départements de la Hollande vous n’avez levé que la conscription de 1811 ; mais je crois que par mon décret du 20 janvier j’ai levé celle de 1812. Dans la 32e division militaire, on n’a levé que la conscription de 1812; avant d’y lever la conscription de 1814, il faut lever celle de 1813. Il y a à recevoir de ces départements la conscription de 1813, et puis celle de 1814. Il ne peut donc pas être question d’y lever celle des quatre années arriérées; on peut seulement l’y laisser en suspens. Faites-moi un rapport particulier qui indique où en est la conscription des départements de la Hollande et de la 32e division militaire. Ont-ils été taxés dans la même proportion que la France ? Quand est-ce qu’on a levé la conscription de 1811 ? Quand lèvera-t-on celle de 1812, celle de 1813, celle de 1814 ?
L’Italie est au courant, et je crois qu’on y a levé la conscription de 1813 ; à Rome on a levé la conscription de 1813; ainsi il me parait que toute l’Italie est au courant.
J’ai décidé que la portion qui revenait à la marine de la conscription de la Hollande sur 1811, 1812, 1813 et 1814, lui serait accordée, et que les 10,000 hommes qui lui reviennent sur la conscription de 1814 lui seraient également accordés.
Quant à la conscription des 100,000 hommes, comme de raison, elle ne fournira rien pour la marine.
Paris, 11 février 1813.
Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris
Je donne ordre qu’on laisse sur le Saint-Bernard et le Castiglione les 98 artilleurs de marine qui s’y trouvent, et je désire que vous fassiez compléter sur-le-champ les équipages de ces deux vaisseaux. S’il est nécessaire, on leur fournira une garnison française de 100 hommes pour chacun. Mais mon intention est de ne diminuer en rien l’état des armements à Venise; ce qui mettrait l’ennemi à même de diminuer ses croisières dans l’Adriatique, et ce serait d’ailleurs un pas rétrograde qui pourrait avoir un effet moral que je veux prévenir.
Règle générale : je ne veux diminuer mes armements nulle part, si ce n’est que je consens à n’armer que cinq vaisseaux au Texel et que dix-huit vaisseaux dans l’Escaut ; et qu’au Texel et dans l’Escaut j’armerai, non pas toutes les mauvaises frégates hollandaises, mais toutes les frégates françaises, tant dans l’un que dans l’autre port.
Paris, 11 février 1813.
Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris
Il y avait à la Grande Armée trois équipages de marins de la Garde ; ils ont beaucoup souffert. Mon intention est, de ces trois, de n’en compléter qu’un pour l’armée et de reformer les deux autres, l’un sur l’escadre de Brest, l’autre sur l’escadre de Toulon, avec des hommes dignes de ce corps d’élite. Ces équipages pourront être bien composés, sans affaiblir l’armée navale.
Paris, 11 février 1813.
Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris
La Couronne, l’Audacieux et le Polyphème étaient bien peu avancés au 1er janvier 1813, et vous les avancez bien peu dans le courant de 1813, puisque vous ne proposez de les porter qu’aux 6 vingt-quatrièmes les trois. Je désire que vous les portiez aux 10 vingt-quatrièmes, de manière à pouvoir les lancer tous les trois en 1814. Les vaisseaux que j’ai au Texel sont mauvais; ceux-ci, au contraire, seront bons : c’est donc un grand avantage que d’avoir, sans accroissement de dépenses, de bons au lieu de mauvais vaisseaux. D’ailleurs, j’ai besoin de donner du travail à Amsterdam.
A Rotterdam, j’aurai besoin de finir le Piethein, non pour le besoin que j’ai de ce vaisseau, mais afin de pouvoir disposer de la cale pour un autre vaisseau et pour donner du travail à Rotterdam.
Il faut pousser également à Rotterdam les trois frégates, au lieu des 8 vingt-quatrièmes, aux 12 vingt-quatrièmes, afin qu’on puisse les mettre toutes trois à l’eau en 1814. Cette augmentation de travaux sera utile à la Hollande.
Pour Anvers, je n’ai rien à observer : j’aurai trois vaisseaux de trois ponts, un de 80 et deux de 74, prêts à être lancés en 1814; mais il doit être bien entendu que l’armement de tous ces vaisseaux doit être prêt.
Je n’ai rien à dire pour Dunkerque et le Havre. J’approuve également le projet pour Cherbourg : deux vaisseaux seront mis à l’eau et trois seront poussés de manière à pouvoir être lancés eu 1814. Il faudrait que la membrure du Havre, au lieu d’être de 74, fût de 80 canons.
A Brest, on mettra l’Orion en rade. J’approuve ce que vous proposez.
J’approuve également le travail pour Lorient, ainsi que celui de Nantes, de Rochefort, de Bordeaux et de Bayonne.
J’approuve le travail de Toulon, celui de Gênes, de Livourne et de Civitavecchia.
Quant à Venise, il faut que les travaux y soient aussi considérables qu’en 1812, par le besoin de laisser de l’argent à Venise, mais j’approuve que rien ne soit mis à l’eau, en sorte que le travail soit réparti sur les quatre vaisseaux et les trois frégates en construction.
Il résulte donc de tout cela que mon intention est que les travaux de la Hollande et de Venise soient augmentés. Soumettez-moi actuellement le projet pour l’armement de la campagne prochaine, il faut garder les deux équipages danois et porter l’escadre de l’Escaut à dix-huit vaisseaux. Cette escadre fixe beaucoup l’attention de l’Angleterre. Les Américains verraient avec peine que nous en désarmions une partie; ils croient cette escadre en général armée de bons matelots, parce qu’ils y croient beaucoup d’hommes du Nord, dont ils font beaucoup plus de cas que des hommes du Midi.
Quant à Brest, Toulon et Cherbourg, il faut y armer le plus que l’on pourra.
Faites-moi un rapport sur les chaloupes canonnières dans le Zuiderzee, l’Escaut et la rade de Cherbourg, pour la défense de ces trois points importants. Ayez le moins de chaloupes canonnières possible à Boulogne, mais le plus possible à Cherbourg, parce que cela concourt à la défense de la rade et donne des hommes disponibles pour tout.
Vous mettrez six vaisseaux de l’escadre de l’Escaut sous les ordres de deux contre-amiraux, et vous leur ferez connaître qu’ils doivent partir dans le courant du mois d’octobre pour remplir une mission, et que s’ils n’étaient pas sortis avant le mois de novembre, ces escadres devront hiverner à Flessingue.
Faites-moi connaître le nombre de vaisseaux à armer cette année sur l’Océan et la Méditerranée, ainsi que le supplément nécessaire à votre budget pour subvenir à cette augmentation de travaux. Je désire que rien ne puisse faire naître dans la marine l’opinion qu’elle est abandonnée, et les circonstances de mes finances ne sont pas telles qu’il faille que la marine s’en aperçoive d’aucune manière.
Il sera nécessaire de créer de nouveaux équipages ou d’augmenter l’effectif de ceux qui existent, afin d’employer la conscription de 1814.
Paris, 11 février 1813.
À Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Posen.
Mon Fils, il y a à Magdeburg 500 gendarmes à cheval ; faites-les venir à Berlin, où ils seront utiles pour la police de cette grande ville.
Paris, 11 février 1813.
Au général comte de Lauriston, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Hambourg.
Monsieur le Comte Lauriston, je reçois vos lettres d’Osnabrück des 6 et 7 février. Je vous ai mandé qu’il fallait que vos quatre divisions du corps d’observation de l’Elbe se réunissent sans délai à Magdeburg, et que vous vous occupassiez là sérieusement de tout ce qui est relatif à l’organisation de ces quatre divisions, en mettant dans toutes les places d’officiers vacantes les officiers qui arrivent à Magdeburg, en renvoyant les mauvais officiers et en les remplaçant par de bons ; en faisant faire tous les jours l’exercice à feu à ces régiments et en les faisant tirer à la cible. Apprenez-leur surtout à former le bataillon carré, bataillon par bataillon, avec la plus grande promptitude, afin qu’ils soient en mesure contre la cavalerie.
Le ministre de l’administration de la guerre donne les ordres les plus positifs pour qu’on épuise les ressources du pays, afin de se procurer selles et habillements. Les cavaleries qui sont arrivées sur l’Elbe doivent avoir fourni des hommes.
Paris, 13 février 1813.
Au général comte Fontanelli, ministre de la guerre et de la marine du royaume d’Italie, à Milan.
Faites partir quatre canonnières ou bâtiments légers pour se rendre à Corfou et stationner dans le port ; ils aideront aux communications avec la France et à l’approvisionnement de la place.
Paris, 13 février 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, je vous envoie la formation que je crois devoir donner au 1er et au 2e corps d’observation du Rhin. Faites dresser les états de ces corps en conséquence.
Vous me ferez connaître l’époque précise où chaque régiment sera réuni à Mayence, et quand ces corps auront leur artillerie, leurs sapeurs et leurs officiers du génie. Vous y mettrez tous les généraux de division et de brigade et les adjudants commandants.
FORMATION DU 1er CORPS D’OBSERVATION DU RHIN.
1e division. — Général Souham : 2 bataillons du 6e régiment provisoire, 2 du 10e 2 du 14e 2 du 17e 2 du 21e 2 du 24e 4 du 22e de ligne; total, 16 bataillons.
2e division. — Général Girard ou général Ricard (le premier arrivé) : 2 bataillons du 2e régiment provisoire, 2 du 29e léger, 4 du 145e de ligue, 4 du 136e 4 du 138e ; total, 16 bataillons.
3e division. — Général Brenier : 2 bataillons du 4e régiment provisoire, 4 du 139e de ligne, 4 du 140e, 4 du 141e; total, 14 bataillons.
4e division. — Général Dubreton, général Ricard ou général Girard : 2 bataillons du 96 léger, 4 du 142e de ligne, 4 du 144e, 2 du 18e régiment provisoire, 2 du 19e; total, 14 bataillons.
Récapitulation : 1e division, 16 bataillons; 2e division, 16 ; 3e division, 14; 4e division, 14; total, 60 bataillons.