Correspondance de Napoléon – Février 1812

DE LA DIVISION DE FLOTTILLE DE L’ESCADRE.

La division de flottille de l’escadre sera composée comme les pre­mières, plus vingt-trois péniches; sa destination est d’exercer les marins toutes les fois que les vaisseaux et frégates seront empêchés d’appareiller; et, dans ce cas, il vous est recommandé de les tenir sous voiles toutes les fois qu’il vous sera possible, surtout par des vents frais et une mer houleuse, afin de saisir toutes les occasions d’habituer les jeunes marins au mouvement de la mer et à l’exercice des manœuvres.

Ces vingt-trois canonnières et vingt-trois péniches seront une réserve de flottille à votre entière disposition, pour être employée, selon que les circonstances le comporteront, partout où sa présence pourra être utile, et vous désignerez un ou plusieurs officiers supé­rieurs de l’escadre pour la commander, toutes les fois qu’elle aura à exécuter des mouvements d’instruction, d’attaque ou de défense.

Vous vous servirez des péniches pour tenir celles de l’ennemi éloi­gnées des côtes de Cadzand et de Walcheren.

Indépendamment des comptes qui vous seront rendue par les com­mandants des deux premières divisions et par ceux des stationnaires de Willemstad et Zierikzee, chacun d’eux, devra adresser directement à notre ministre de la marine un rapport hebdomadaire sur tout ce qui intéressera le service.

Nous vous réitérons, Monsieur le Vice-Amiral, l’ordre de veiller à ce que tous les bâtiments de cette flottille s’exercent continuelle­ment à la voile, afin que les équipages y acquièrent toute l’instruc­tion que peut leur procurer ce genre de navigation.

Vous voudrez bien donner à chacun des commandants de flottille et à ceux des stationnaires toutes les instructions de détail qui doi­vent résulter de la présente et vous en adresserez une copie à notre ministre de la marine pour nous être présentée.

Nous n’avons pas entendu prescrire par la présente toutes les dis­positions que vous aurez à prendre pour la défense des côtes placées sous votre commandement, attendu qu’elles doivent dépendre de circonstances qu’on ne peut prévoir; mais nous comptons que, quel­ques événements qui puissent survenir, vous saurez employer les forces qui vous seront confiées de la manière la plus conforme à l’intérêt de notre service et à l’honneur de nos armes.

 

Paris. 19 février 1812.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, vous recevrez un décret par lequel j’ordonne la démolition des maisons et autres bâtisses qui gênent les fortifications de Magdeburg. Vous enverrez ce décret au roi de Westphalie. Il est nécessaire que l’exécution en soit prompte, parce que la sûreté de la place est compromise. Il faut que les habitants aient délogé et que les toits soient découverts dans le commencement de mars, et qu’on démolisse toutes ces maisons à la fois. Le Roi cédera, en indemnité aux propriétaires, des domaines situés dans la province de Magdeburg ; j’ai inséré cette obligation dans mon décret.

 

Paris. 19 février 1812.

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, je vous autorise à négocier les actions que vous avez du canal du Midi à raison de 12,000 francs par action. À ce taux, vendez-en autant qu’il se présentera d’acquéreurs. Faites faire exactement les versements au trésor de la Couronne, pour que cela ne forme pas d’embarras. Réglez également le prix que l’on peut faire donner des actions du canal du Loing.

 

Paris, 19 février 1812.

Au maréchal Bessières, duc d’Istrie, commandant la garde impériale, à Paris

Mon Cousin, vous n’avez pas répondu à ma quatrième question : De quoi se compose une division d’ambulance de la Garde ? Vous me dites qu’elle se compose de ce qui est nécessaire pour une divi­sion de 10,000 hommes; cela n’est pas suffisant ; faîtes m’en remettre le détail.

Pour le 7e bataillon du train des équipages, l’habillement des conscrits est-il prêt, de sorte que les conscrits puissent avoir leurs habits et leurs masses de linge et de chaussures quarante-huit heures après leur arrivée ?

Les 500 conscrits des équipages militaires de la Garde ont-ils leurs habits, et quarante-huit heures après leur arrivée pourra-t-on les leur fournir ?

Il paraît que le 7e bataillon doit recevoir 240 voitures. Écrivez au ministre de l’administration pour savoir où ces voitures doivent être prises; il est nécessaire qu’elles soient rendues à Metz ou à Mayence au ler mars.

Je vous renvoie la réponse de l’ordonnateur, pour que vous y met­tiez en marge ce qui existe et quel doit être le complet en hommes, en chevaux, en harnais et en voitures de toute espèce.

 

Paris, 19 février 1812.

Au maréchal Bessières, duc d’Istrie, commandant la garde impériale, à Paris

Mon Cousin, faites partir le 3e régiment des grenadiers à pied de ma Garde, demain 20, pour Metz, sans le faire passer par Paris. Ce régiment emmènera avec lui son artillerie et ses caissons.

Donnez ordre aux chevau-légers polonais de se rendre à Compiègne demain 20. Vous leur enverrez à Compiègne l’ordre de se diriger sur Mayence par la route la plus courte, sans cependant passer par Metz, cette route étant suffisamment encombré. Gardez le secret, de manière que les Polonais ne sachent pas où ils vont. Je n’ai pas besoin, de dire qu’ils emmèneront avec eux leurs forges, leurs caissons et tout ce qui leur appartient.

Vous donnerez l’ordre à un détachement de 150 de mes chasseurs de se rendre à Compiègne, ainsi qu’à un détachement de 50 gen­darmes d’élite. De Compiègne, tout cela partira pour Mayence.

Ayez soin que ces mouvements se fassent de nuit et que les troupes ne sachent pas où elles vont.

 

Paris, 19 février 1812.

DÉCISION.

 

Le grand juge, ministre de la justice, soumet à l’Empereur un rapport au sujet des Français qui, se trouvant au service d’une puissance étrangère, acceptent des titres honorifiques. L’Empereur décide qu’en France ces titres ne seront pas reconnus, et il ordonne que, dans l’Almanach impérial, on les désigne sous leur nom de famille ou sous leur nom de terre, mais sans titre.

 

Paris, 19 février 1812.

DÉCISION.

 

Le ministre de la marine soumet à l’Empereur le rapport du conseil d’en quête relatif au général Ernouf et aux colonels Cambriel et Madiez. Renvoyé au  grand juge, pour faire arrêter le capitaine général qui commandait aux Saintes, et les autres individus qui demeurent prévenus dans cette affaire en conséquence du rapport du conseil d’enquête; faire mettre les scellés sur leurs papiers, et les traduire devant les tribunaux, conformé­ment aux lois de l’Empire.

 

 

Paris, 21 février 1812

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez l’ordre au prince d’Eckmühl de commencer son mouvement sans délai. A cet effet, vingt-quatre heures après la réception de votre lettre, les deux divisions de cuirassiers se réuni­ront à Magdeburg; toute la division Gudin se réunirontMagdeburg.

Le parc d’artillerie et celui du génie se mettront en marche de Minden par le Mecklenburg sur Stettin, ou à une marche de cette ville. La division Gudin doit passer l’Elbe le 29, s’il est possible, et se diriger sur Stettin. Ce mouvement se fera par trois colonnes : 1e colonne, la brigade de cavalerie légère du général Piré, au régiment d’infanterie et plusieurs batteries de canon ; 2e colonne, une division de cuirassiers avec son artillerie et un régiment d’infanterie; 3e colonne, la 3e division de cuirassiers. Il faut que tout cela arrive le plus tôt possible à Stettin. En même temps, la division de cuirassiers qui est à Erfurt se portera sur Magdeburg ; le prince d’Eckmühl la laissera sur l’Elbe, à moins de circonstances imprévues.

La division Morand se mettra en marche avec son artillerie et ses équipages et s’approchera de Stettin en deux marches.

La division qui est à Rostock pourra se mettre en marche plus tard; elle se portera à deux marches de Stettin.

Du 5 au 10 mars, le corps d’armée du prince d’Eckmühl doit être tout entier dans sa main, savoir : son quartier général à Stettin; la division Dessaix à Küstrin, ayant un régiment à Glogau; les quatre autres divisions, une à Stettin, une à Prenzlow, une à Anklam, une à Strelitz ou tout autre lieu, mais pouvant en deux jours, après en avoir reçu l’ordre, passer l’Oder à Stettin.

La division de cavalerie légère du général Bruyère sera sur la droite de l’Oder, couvrant tout l’Oder depuis Küstrin jusqu’à Stettin, pous­sant des postes sur les routes de Kolberg, de Landsberg, de Danzig, et communiquant avec la brigade Pajol, qui est en avant.

La 2e brigade de cavalerie légère sera à Küstrin, occupant Landsberg et communiquant avec Posen et avec la division Bruyère. Le général Bruyère aura son quartier général à Stargard.

Les cuirassiers seront placés le long de l’Oder, à Schwedt par exemple, et dans les lieux où ils seront le mieux nourris. Je suppose qu’ils ont leurs mousquetons, leurs cartouches, et qu’ils peuvent se garder eux-mêmes dans leurs cantonnements.

Le général Carra Saint-Cyr, qui commande la 32e division mili­taire, sera sous les ordres du prince d’Eckmühl ; il lui rendra compte de tout. Il aura la division princière pour garder le Mecklenburg et la 32e division militaire.

Il est important, en exécutant ce mouvement, qu’aucun homme ne passe l’Oder avant le 8 mars. Ainsi, au 8 mars, le prince d’Eckmühl doit avoir son corps groupé sur l’Oder, la cavalerie légère doit passer l’Oder, et le prince d’Eckmühl arriver de sa personne en poste à Stettin, avec son quartier général.

Le général Gudin, qui traverse la Prusse, la traversera avec les précautions convenables.

Le contingent de Mecklenburg pourra encore rester du côté de Rostock, et on pourra lui donner quelques jours pour la rejoindre.

Dans une lettre que je vous écrirai demain, je vous ferai connaître la conduite à tenir envers la Prusse.

Le prince d’Eckmühl aura donc sous ses ordres cinq divisions d’in­fanterie, le 1er corps de réserve de cavalerie, que commande le général Nansouty, ses deux brigades de cavalerie légère, la 7e divi­sion d’infanterie, qui est à Danzig, et les contingents du Mecklenburg; ce qui lui fera, tout compris, une armée de 100,000 Français. Le corps saxon sera également sous ses ordres. Indépendamment de ce, il aura toute la division Daendels, composée des brigades de Würzburg, de Hesse et de Bade, formant 15,000 hommes d’infan­terie et 1,500 hommes de cavalerie. Il se servira de cette division pour garder la Poméranie suédoise et le Mecklenburg. Il tiendra prêt un bataillon de chaque nation pour le faire entrer à Küstrin aussitôt que la division Dessaix quittera cette place.

Le prince d’Eckmühl formera un dépôt, selon l’usage, lequel sera composé des hommes malingres et estropiés des régiments de ses divisions, et qui restera à Stettin avec six bataillons de la division Daendels, qui ne viendront à Stettin que lorsque le moment d’aller en avant sera arrivé.

Le 85e, qui est à Glogau, se tiendra prêt à se rendre à Posen, aussitôt que la division Dessaix arriverait dans cette ville.

 

Paris, 21 février 1814.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Le major général écrira au duc de Raguse qu’il a mal compris mes intentions sur Valence ; que j’ai ordonné de faire marcher sur cette place 12,000 hommes, en comprenant les troupes de l’armée du Centre; que j’ai entendu que ce mouvement se ferait par Cuenca; qu’il y avait déjà à Cuenca 4,000 hommes; que le Roi en donnerait 3,000 autres, et que c’était donc 3 ou 4,000 hommes de l’armée de Portugal à faire filer sur Cuenca; que ses plaintes ne sont pas fondées; qu’il aurait été insensé au Roi de se porter de Cuenca sur Albacete ; que ce mouvement aurait permis à l’ennemi, qui était à Requena, de marcher sur Madrid ; qu’il était évident que cette opé­ration d’Albacete ne pouvait se faire à moins de forces immenses, puisqu’elle demandait une grande ligne d’opération et qu’elle n’aurait pas donné de résultat pour la prise de Valence; car, si le maréchal Suchet avait été battu au passage des lignes, cette opération ne signifiait rien ; que l’art de la guerre ne consiste pas à diviser ses troupes ; que l’opération de Cuenca par Requena, communiquant par la gauche avec le maréchal Suchet avant d’attaquer l’ennemi, était une véritable opération militaire; que 3,000 hommes de plus avec le général Darmagnac n’auraient affaibli en rien l’armée de Portugal ; que les Anglais ne s’en seraient pas aperçus ; que cette opération eût même pu se faire en envoyant des troupes de l’armée du Centre et en remplaçant par des troupes de l’armée de Portugal les troupes qui se seraient portées sur Cuenca; que sans doute la route de Cuenca n’est pas bonne pour l’artillerie, mais qu’il n’y avait pas besoin d’ar­tillerie contre les insurgés, et que d’ailleurs le maréchal Suchet en avait; que c’est une faute du duc de Raguse qui n’est pas justifiable, puisqu’il était devant l’ennemi et qu’il est évident qu’il exposait tout le nord de l’Espagne; que, s’il eût fallu faire une grande opération d’armée, on eût préféré la faire faire par le duc de Dalmatie, et l’on eût prévu le cas où les Anglais auraient marché sur Madrid ou sur Salamanque.

 

Paris, 21 février 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Le major général écrira au duc de Raguse que j’ai lu ses lettres du 6 février; que je suis extrêmement peiné qu’il ait envoyé la divi­sion Bonet à l’armée du Nord ; que cette division est la seule qui puisse occuper avec profit les Asturies, parce que le soldat connaît l’Espagne et les habitants; qu’il valait mieux ne rien envoyer à l’armée du Nord et renvoyer la division Bonet dans les Asturies ; que mon intention est que, dans quelque endroit qu’elle se trouve, elle retourne dans cette province ; que, pour le Nord , il vaut mieux avoir la division Bonet dans les Asturies qu’à Burgos ; que l’armée de Por­tugal est en l’air, et que la communication avec Irun n’est pas tenable, si l’on n’a pas les Asturies ; qu’il faut occuper les Asturies quand on est à la hauteur de Salamanque, et occuper la ligne de Potes et de Reynosa quand on est à la hauteur de Valladolid ou de Burgos ; mais que laisser les paysans maîtres des montagnes, communiquant avec la mer, c’est le plus grand malheur qui puisse arriver en Espagne ; que la population de la Galice refluera dans les provinces occupées par l’armée; que l’expérience a prouvé cette théorie; que, quand le duc d’Istrie fit évacuer les Asturies, tout le pays fut en mouvement ; qu’il faut 6,000 hommes pour garder les montagnes; qu’on les place dans les Asturies ou à Santander, c’est la même chose, avec cette différence qu’en les plaçant à Santander, ils ne couvrent pas le royaume de Léon et l’occupent pas cette province, qui est la plus importante pour les insurgés ; que je mets à sa disposition la division Bonet à cet effet ; qu’il la fasse diriger sur les Asturies par le chemin que le général Bonet jugera le meilleur; que vous lui avez fait connaître que Sa Majesté n’approuve pas la dissémination de son armée ; qu’elle ne voit dans sa conduite que des tâtonnements. Comment, à Valladolid, prétendre être instruit à temps de ce que fera l’ennemi. Cela n’est possible dans aucun pays et surtout dans un pays insurgé. Comment préjugera-t-il ce que fera l’ennemi étant à Valladolid ? Que vous ne pouvez que lui répéter que Sa Majesté ne voit d’opération honorable pour ses armées que d’occuper Salamanque, d’avoir des avant-gardes légères faisant le coup de fusil sur les frontières de Portugal et avec Ciudad-Rodrigo, d’avoir son armée centralisée autour de lui à quatre ou cinq marches; que, jusqu’à ce que l’armée du Centre ait pu placer des troupes à Almaraz, que l’armée de Portugal ait occupé Salamanque et que l’opération du duc de Dalmatie sur Merida et Badajoz ait de l’influence sur l’ennemi et se soit fait sentir, il peut laisser une division légère, prête à le rejoindre sur Talavera, occupant Almaraz; que, lorsqu’il aura occupé Salamanque, que ses avant-postes auront pris cette direction, et que cette espèce de vésicatoire militaire aura fait son effet sur l’ennemi et se soit fait sentir, il pourra faire rapprocher de lui la divi­sion qu’il aura laissée sur le Tage, et que l’armée du Centre pourra donner des troupes pour garder la vallée; qu’il s’occupe trop de ce qu’il ne le regarde pas, et pas assez de ce qui le regarde ; que sa mission a été de défendre Almeida et Ciudad-Rodrigo, et qu’il a laissé prendre ces places; qu’il a le nord à maintenir et à administrer, et qu’il abandonne les Asturies, c’est-à-dire le seul moyen de le gou­verner et de le contenir; qu’il va s’embarrasser si lord Wellington envoie une ou deux divisions sur Badajoz, quand Badajoz est une place très-forte et que le duc de Dalmatie a 80,000 hommes, lorsqu’il peut être secouru par le maréchal Suchet, enfin lorsque, si lord Wellington marchait sur Badajoz, il a un moyen sur, prompt et triomphant de le rappeler, celui de marcher sur Ciudad-Rodrigo et Almeida.

Que son armée se compose de huit divisions ; qu’une division doit rester dans les Asturies; qu’il ne doit y compter que pour la faire marcher sur la Galice; que, quand même après une bataille avec les Anglais il serait battu, il ne doit pas faire évacuer les Asturies par cette division, mais la faire filer par les montagnes à sa droite ; que les coups de fusil arriveront en peu de jours à Mondragon, si l’on n’occupe pas les montagnes; que la division des Asturies est une divi­sion qui, en cas d’évacuation de Salamanque, de Valladolid, devrait suivre le mouvement dans les montagnes, sans quoi la position de Burgos ne serait pas tenable, pas même celle de Vittoria; que d’ail­leurs, encore une fois, il a à lutter non-seulement contre l’armée anglaise, mais aussi contre la Galice; que ces 6,000 hommes qui se porteraient en avant par les débouchés de la Galice contiendront cette province; que l’on peut dire que 6,000 hommes dans les Asturies équivalent à 18,000 qu’il faudrait de plus à Astorga et sur le litto­ral ; que les insurgés, sans communication après la prise de Valence, étaient au désespoir; que l’arrivée des bandes à Potes et à Oviedo et le rétablissement de leurs communications avec la mer leur ont rendu le courage; et tout cela par défaut de réflexion et de connaissance des localités.

Qu’en résumé, de ses huit divisions, une doit être dans les Asturies et n’en point bouger ; que les sept autres doivent être réunies autour de Salamanque; ce qui lui a fait une armée de 50,000 Français, avec une artillerie de cent pièces de canon, lesquels dans un terrain étudié, couvert par des bouts de flèche, ayant leurs vivres assurés et leur appui à Salamanque, ne seraient pas vaincus par 80,000 hom­mes ; que toutefois il faut bien se garder de faire à Salamanque un camp retranché : que les Anglais le croiraient sur la défensive et n’auraient plus de craintes, et que c’est une place forte qu’il faut avoir à Salamanque.

 

Paris, 22 février 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre au duc d’Elchingen de porter son quar­tier général à Erfurt, du 5 au 10 mars. Le 2e corps de cavalerie de réserve, composé de la division de cavalerie légère du général Wattier et des deux divisions de cuirassiers des généraux Sébastiani et Defrance, sera sous ses ordres.

La division de cavalerie légère que commande le général Wattier se mettra en mouvement, de manière à passer le Rhin à Mayence le 27, et se dirigera sur Weimar. Cette division aura ses batteries d’ar­tillerie légère avec elle et son mouvement s’opérera par brigade. La division Sébastiani pourra passer le Rhin à Coblence et se diriger sur Weimar. La division Defrance pourra passer le Rhin à Düsseldorf et se diriger sur Paderborn et de là sur Leipzig. Toute l’artillerie de ces deux divisions de cuirassiers qui est à Wesel en partira le 28 avec le parc de la réserve de cavalerie, et se dirigera sur Paderborn, où elle se réunira à la division de cuirassiers du général Defrance, et mar­chera sous sa protection jusqu’à Leipzig. La division d’infanterie qui est à Mayence, avec le parc du corps d’armée, se mettra en mouve­ment le 28 et se dirigera sur Erfurt. Le parc restera à Gotha.

La division d’infanterie qui est à Düsseldorf et le régiment portu­gais qui est à Coblence, et qui ira rejoindre la division à Düsseldorf, se dirigeront sur Paderborn et de là sur Leipzig.

Il est nécessaire que le duc d’Elchingen envoie la situation de chaque régiment et de son artillerie, des équipages militaires et de toute l’artillerie du corps d’armée. Vous ferez connaître à ce maré­chal que son corps doit passer l’Elbe à Wittenberg. Recommandez-lui de faire marcher ses troupes doucement, de manière à ne pas fatiguer ses chevaux.

 

Paris, 22 février 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, faites connaître au roi de Westphalie que son corps d’armée doit être réuni du 10 au 15 mars à Halle; qu’aucunes troupes westphaliennes ne doivent occuper Brunswick, Magdeburg, ni les environs ; qu’il peut occuper Halle et le pays de Dessau, et que son corps est destiné à passer l’Elbe au pont de Dessau.

Vous aurez soin d’informer le roi de Westphalie du mouvement des différentes troupes qui traversent ses États.

 

Paris, 22 février 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, écrivez au prince d’Eckmühl qu’il ne doit pas laisser retourner en Suède les deux régiments qui sont en Poméranie; qu’il ne doit pas laisser retourner en Suède le colonel Peyron; qu’il ne doit pas recevoir le nouveau gouverneur qui viendrait de Suède ; que la raison de cela est très-simple, c’est que toute communication avec la Suède est interdite; que tout individu qui viendrait de Suède en Poméranie doit être envoyé à son quartier général ; qu’indépen­damment des troupes alliées il doit laisser provisoirement un régi­ment français en Poméranie ; que la division qui est en Poméranie doit être la dernière à bouger, puisqu’elle est la plus près de Stettin; que, même lorsqu’elle marchera, elle doit toujours laisser une bri­gade en Poméranie. Vous chargerez le prince d’Eckmühl de réitérer l’instruction de ne souffrir dans la Poméranie aucune communication que ce soit avec la Suède.

 

Paris, 22 février 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Reggio de mettre en mou­vement la division Legrand, aussitôt la réception du présent ordre, et de la diriger sur Magdeburg ; de mettre en mouvement la division Verdier et de la diriger sur Brunswick ; de mettre en mouvement la division Belliard et de la diriger sur Munster; de porter son quartier général à Magdeburg, où il est nécessaire qu’il soit rendu le 5 mars ; de réunir sur l’Elbe la 3e division de cuirassiers que commande le général Doumerc, qui, jusqu’à nouvel ordre, fera partie de son corps d’armée. La brigade de cavalerie légère du général Castex, qui est dans la Poméranie, fera partie du corps du duc de Reggio, mais elle restera jusqu’à nouvel ordre dans la Poméranie; le duc de Reggio enverra reconnaître sa situation. Aussitôt que la brigade Corbineau sera arrivée, il la dirigera sur Magdeburg; il fera filer également son parc sur Magdeburg. Le duc de Reggio aura ainsi dans la main les divisions Legrand et Verdière, et une division de cuirassiers à Magdeburg et à Brunswick. Lorsque je serai informé du jour où la division Belliard arrivera à Munster, je me réserve de donner des ordres pour son mouvement ultérieur. La division Belliard a un régi­ment suisse à Strasbourg; ce régiment suisse se rendra en droite ligne de Strasbourg à Magdeburg et en passant par Würzburg, con­formément aux ordres que je donnerai. Instruisez de cela le général Belliard et le duc de Reggio.

Les trois compagnies du 6e bataillon d’équipages militaires, que le prince d’Eckmühl a eu ordre de former, seront attachées au 2e corps d’observation de l’Elbe; il est nécessaire que le duc de Reggio leur donne des ordres et accélère leur formation. Écrivez-en au prince d’Eckmühl et au général commandant la 32e division militaire.

Vous donnerez l’ordre que les 5e bataillons des 56e et 19e et le 4e bataillon du 123e rejoignent leurs régiments à leur passage à Mag­deburg. Le tiercement se fera entre tous les bataillons.

 

Paris, 23 février 1812.

Au général comte de La Riboisière, commandant l’artillerie de la Grande Armée, à Paris

Monsieur le Comte de la Riboisière, commandant l’artillerie de la Grande Armée, j’ai besoin de connaître si l’artillerie est prête à satis­faire aux différents ordres que je donne aux corps d’armée.

Le ler corps de l’Elbe, avec le 1er corps de la réserve de cava­lerie , se met en mouvement à la fin du mois pour arriver dans les premiers jours de mars sur l’Oder. Le parc de Minden suit ce mouvement et se rend à Stettin.

Le 2e corps, avec la division de cuirassiers qui appartient au 3e corps de la réserve de cavalerie, se met également en mouve­ment à la fin de ce mois et se porte sur Magdeburg.

Le 3e corps ou corps d’observation de l’Océan, emmené par le duc d’Elchingen, passe le Rhin à la fin de ce mois et se dirige sur Leipzig et Erfurt. Le 2e corps de la réserve de cavalerie suit ce mouvement. Le parc doit se rendre à Gotha.

Le 4e corps débouche par Innsbruck avec le 3e corps de la réserve de cavalerie, et dans les premiers jours de mars il sera sur Ratisbonne.

Je n’ai encore donné aucun ordre au parc général de l’armée, ni à l’équipage de pont. Je désire recevoir de l’artillerie un rapport qui me fasse connaître si tous les mouvements préparatoires du personnel, du personnel et des attelages ont eu lieu de manière que tout soit à son poste et que le service puisse se faire selon la rigueur de l’organisation.

S’il est quelques voitures à laisser en arrière non attelées, je désire savoir quel en est le nombre, quelle est l’espèce de voitures et quand elles seront attelées pour rejoindre. Y a-t-il un parc général, ou a-t-on tout confondu avec chaque corps d’armée ? Y a-t-il un parc général pour la réserve de cavalerie, comme cela a eu lieu dans les précédentes guerres, ou n’y a-t-il qu’un parc attaché à chaque corps de la réserve de cavalerie ? Enfin, quand le personnel et les attelages de l’équipage de pont pourront-ils passer le Rhin ? Combien y aura-t-il de chevaux ? Combien de voitures ? Que chargera-t-on sur ces voi­tures ? Quand pourront-elles passer le Rhin ? Le matériel des équi­pages de siège est-il prêt à Danzig et à Magdeburg, ainsi que le personnel ? Où seront-ils au 1er avril ?

 

Paris, 23 février 1812.

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac, je ne vois pas que des dispositions se fassent pour aller prendre les voitures qui se construisent dans les arsenaux, soit de la guerre, soit de la marine, et il me semble que l’on perd un temps précieux. Faites-moi un rapport là-dessus. Il est bien nécessaire que tout ce qui peut partir parte, car les transports vont se trouver à un ou deux mois de l’armée. Faites-moi connaître si les compagnies du 2e bataillon des équipages militaires, qui de­vaient partir de Sampigny avec des voitures de nouveau modèle, sont parties ; si elles ne le sont pas et qu’il faille encore retarder leur départ, faites-les partir avec d’anciennes voitures.

 

Parsi, 23 février 1812

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, faites-moi connaître où est le major inspecteur des équipages militaires. Il serait convenable qu’il fût près de vous. C’est un homme qui devient important. Vous avez reçu le décret par lequel je lui ai adjoint pour l’inspection deux chefs de bataillons et deux adjudants, capitaine et lieutenant. Présentez-moi ce major, que je désire connaître, et qu’il se mette au fait du service, de la situation et de la distribution des bataillons.

 

Paris, 23 février 1812.

Au capitaine d’Hautpoul, officier d’ordonnance de l’Empereur, à Paris

Monsieur d’Hautpoul, partez sans délai pour remplir la mission qui vous sera indiquée dans la note ci-jointe.

NOTE POUR MON OFFICIER D’ORDOXNANCE D’HAUTPOUL.

Rendez-vous à Metz. Vous y visiterez le personnel, le matériel et les attelages de l’artillerie qui doit être attachée à la réserve de la Garde. Vous visiterez également les bataillons d’équipages militaires qui se trouvent à Metz. Vous irez à Sampigny. Vous verrez cet éta­blissement en détail, et vous me ferez connaître combien il y a de chariots ; quels sont les cadres de bataillons d’équipages militaires, et déjà formés et qui y sont arrivés ; quelle est la quantité de chariots de nouveau modèle déjà confectionnés, et combien on pourra en fournir au 1e mars.

Quand vous serez resté six jours à Metz, vous vous rendrez à Mayence, et vous y verrez également quelle est la situation du parc général de l’armée, soit de l’artillerie, soit du génie, matériel, per­sonnel et attelages. Comme le corps du duc d’Elchingen va faire un mouvement, voyez bien dans quelle situation partent les différentes divisions d’artillerie.

Vous m’écrirez tous les jours, de Mayence, ce qui viendra à votre connaissance sur la force des troupes, la manière dont elles sont équipées, leur santé, leur armement, etc.

 

Paris, 24 février 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, mandez au prince d’Eckmühl de ne réformer aucun homme; mais que tous les hommes doivent suivre jusqu’à Stettin, et que là, au passage de l’Oder, il sera formé, comme il a toujours été dans l’usage de la Grande Armée, un dépôt d’hommes vieux, infirmes et hors d’état de faire la campagne; les malades sortant des hôpitaux s’y joindront, et cela formera un bataillon d’un millier d’hommes, qui sera utile à Stettin; et, lorsqu’il en sera temps, on y enverra un inspecteur qui en passera la revue pour faire rentrer en France ceux qui seraient incapables de servir même dans cette place.

Quant aux chevaux marqués pour la réforme, en temps de guerre on ne doit réformer aucun cheval qu’au préalable le colonel ne s’en soit procuré un pour le remplacer. Ce n’est qu’avec cette précaution qu’on peut réformer; et, dans tous les cas, le remplacement doit précéder.

 

Paris, 24 février 1812.

À Alexandre Ier, empereur de Russie, à Saint-Pétersbourg

Monsieur mon Frère, après l’arrivée du courrier que le comte Lauriston a expédié le 6 de ce mois, j’ai pris le parti de causer avec le colonel Czernitchef sur les affaires fâcheuses survenues depuis quinze mois. Il ne dépend que de Votre Majesté de tout terminer. Je prie Votre Majesté de ne jamais douter de mon désir de lui donner des preuves de la considération distinguée que j’ai pour sa personne.

NAPOLÉON.

 

Paris, 26 février 1812.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, je vous envoie une lettre du prince d’Eckmühl. Mandez-lui qu’il me semble avoir entendu dire qu’on avait trouvé des pièces à Stralsund. Il doit y en avoir; qu’on en fasse la recherche. S’il ne s’en trouvait point, il est indispensable qu’on y envoie une vingtaine de canons en fer, afin d’armer spécialement la côte de Stralsund, pour assurer la communication avec l’île de Rügen. Il faut établir dans cette île, au point où le canal est le plus étroit, un réduit qui puisse donner refuge à la garnison si l’ennemi débarquait, pour de là revenir à Stralsund, ou qui lui permette de recevoir des secours pour culbuter l’ennemi qui aurait débarqué. Le prince d’Eckmühl fera envoyer là six ou huit bateaux canonnière ; il doit y en avoir à Lubeck ; s’il n’y en a pas à Lubeck, on peut en faire passer par le Danemark, ou, ce qui est meilleur, envoyer des marins à Stralsund et y faire établir ces bâtiments. Faites connaître ces dépo­sitions au général Chasseloup, et prescrivez-lui d’envoyer un officier du génie avec des instructions pour remplir mes intentions. On doit travailler à cela avec une activité convenable. Il faut que des chaloupes ou péniches ennemies ne puissent jamais se placer entre Stralsund et l’île de Rügen. Vous instruirez également de mes intentions le général commandant l’artillerie de l’armée. Il est nécessaire deplacer une des compagnies d’artillerie destinées au parc dans la Poméranie pour servir les batteries, et plusieurs officiers d’artillerie organiser ce service.

 

Paris, 26 février 1812.

Au général comte de La Riboisière, commandant l’artillerie de la Grande Armée, à Paris

Monsieur le Général Comte la Riboisière, je reçois votre rapport du 24. J’approuve que chacun des trois corps de cavalerie ait son parc, et que, par conséquent, les trente pièces d’artillerie légère attachées à chacun de ces corps aient leur double approvisionnement, indépen­damment du parc général.

Faites-moi faire l’état des armes, soit fusils, carabines, soit pisto­lets, nécessaires tant pour armer la cavalerie (car la cavalerie est armée de mousquetons et de carabines) que pour pouvoir en fournir à l’infanterie dans des circonstances imprévues.

Je ne pense pas qu’il soit convenable que les corps d’armée n’aient qu’un approvisionnement et demi. Je pense qu’il faut leur laisser leur approvisionnement entier, vu que les corps peuvent opérer à une distance les uns des autres telle qu’ils se trouvent absolument hors de portée avec le parc.

Dans les quartiers d’hiver ou de rafraîchissement, on pourra se servir des chevaux, tant de la Garde et de la réserve de la Garde que des équipages de pont et des équipages de siège, pour les mouve­ments extraordinaires. La réserve de la Garde formera réellement le porc. Ainsi le parc ne serait composé que de soixante bouches à feu de rechange, des affûts de rechange, de quelques caissons de parc et d’un bon nombre de caissons d’infanterie. Comme vous avez l’expérience de plusieurs campagnes faites dam le même pays, j’attendrai votre rapport là-dessus avant de prendre une décision définitive.

Je désire que l’équipage de pont parte de Strasbourg ou de Mayence, attelant des charrettes ou chariots d’artillerie, qui pourront par la suite servir aux équipages de siège. Je désirerais que ces chariots fussent chargés d’outils à pionniers et de fusils ; nous avons suffisam­ment de poudre. Je vois que l’équipage de pont a des chevaux à Wesel, à Mayence, à Strasbourg; faites dresser l’état des charrettes d’artillerie que ces chevaux peuvent prendre dans chacune de ces places, et la quantité d’outils, d’armes, fusils, carabines, sabres dont on peut les y charger. Je n’entends pas que l’équipage de pont fournisse rien à l’équipage de campagne, car, ces chevaux une fois partis avec l’équipage de campagne, je n’aurai rien et je me trouverai sans équipage de pont. Les outils à pionniers devant être laissés à Danzig, les chevaux de l’équipage de pont laisseront là les voitures pour l’équipage de siège et feront le service de l’équipage de pont. Je ne vois donc pas beaucoup d’inconvénient à faire atteler à ces che­vaux des camions, des porte-corps et autres voitures servant aux équipages de siège, quoique je pense que ces voitures devraient être construites à Danzig. Entendez-vous là-dessus avec le général Chasseloup.

Je vous ai mandé que les deux divisions de grosse cavalerie qui sont à Bonn et à Cologne se rendent à Leipzig et à Weimar ; il faut donc que l’artillerie de ces deux divisions se trouve en même temps dans ces villes. Il faut que le parc du 1er corps de cavalerie se trouve avec ce corps au corps d’observation de l’Elbe, et que le parc du 2e corps se rende à Weimar, où va se trouver réuni le 2e corps de cavalerie.

Remettez-moi des états du personnel de l’artillerie, en nommant les colonels, majors et chefs de bataillon, afin que je connaisse les officiers qui seront présents au 1er mars et ceux qui ne rejoindront que dans le courant de mars.

 

Paris, 26 février 1812.

NOTE POUR M. BARBIER, BIBLIOTHÉCAIRE DE L’EMPEREUR, À PARIS.

L’Empereur désire remplacer dans sa bibliothèque les romans et la plus grande partie des poésies par des ouvrages d’histoire. Je prie M. Barbier de rassembler un choix d’ouvrages de ce genre et de m’envoyer, en attendant, une Histoire de France, de Velly, complétée jusqu’à la Révolution. Sa Majesté désire lire cette Histoire.

Le Secrétaire du Cabinet,

MENEVAL.

 

Paris, 27 février 1812.

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac, je réponds à votre rapport du 22 fé­vrier sur les remontes. J’y vois que vous proposez une nouvelle répar­tition pour les remontes à faire en Allemagne. Il me semble qu’il y aurait bien de l’inconvénient à faire de nouvelles dispositions avant d’être sûr que les premières soient exécutées. J’ai demandé en Alle­magne 8,300 chevaux, savoir : 1,300 de carabiniers et de cuirassiers, 640 de dragons, 2,175 de chevau-légers, 4,210 de chasseurs et de hussards; total, 8,325; ce qui, avec les 300 de la Garde impériale, fait 8,600 chevaux, rien que pour la cavalerie. Pour ces 8,600 che­vaux, j’ai envoyé en Allemagne 5,900 hommes ; il restera donc encore à faire partir 2,000 hommes à pied. Il faut que je sois certain de me procurer ces 8,600 chevaux avant de rien changer aux dispositions faites. La seule mesure qu’il y ait à prendre actuellement, c’est d’en­voyer à Hanovre 250 chasseurs portugais à pied, avec leurs selles, et, en conséquence, sur les 500 chevaux qui ont été commandés pour eux à Épinal, d’en donner 250 à d’autres corps. Ce qui serait égale­ment important, c’est de faire l’état, 1° de ce que chaque régiment devait envoyer en Allemagne en conséquence du décret du 19 janvier, et 2° des hommes partis, avec l’époque de leur départ, de manière à bien déterminer ce qui avait été envoyé au 15 février en hommes, selles, brides, etc., afin de voir d’un coup d’œil ce qui manque et ce que les dépôts des régiments ont encore à fournir en hommes, selles, etc. J’ai reçu la nouvelle que le roi de Danemark avait con­senti à la sortie de 6,000 chevaux du Holstein, sans payer de droits. Aussitôt que le général Bourcier aura déployé tous ces moyens et qu’on aura connaissance du résultat des différentes demandes faites, on pourra voir s’il y a lieu de faire partir pour l’Allemagne de nou­veaux détachements d’hommes à pied et de nouveaux envois de harnais.

 

Paris, 27 février 1812.

Au comte Daru, ministre secrétaire d’État, à Paris

Monsieur le Comte Daru, je vous envoie les pièces de la commis­sion d’enquête (Sur la capitulation du général Dupont, à Bailén). Je vous prie de les lire avec attention pour m’en faire un rapport. Vous en ferez un recueil lié ensemble, auquel vous joindrez la demande, faite par le comte Regnaud, de la convocation de la haute cour, ma lettre à l’archichancelier (voir 12 février) sur ce qu’il m’expose que la réunion de la haute cour a des inconvénients, mon décret pour la formation du conseil d’enquête, les interrogatoires et enfin les réponses des accusés. Vous me remettrez cela sous les yeux, pour que je prenne un décret définitif sur cette affaire.

 

Paris, 27 février 1812.

NOTE POUR LE COMTE DARU, MINISTRE SECRÉTAIRE D’ÉTAT, À PARIS.

Je désire que le Comte Daru voie le ministre de la guerre ou les bureaux pour arriver au résultat suivant :

J’ai beaucoup d’Espagnols ; le fait est qu’au milieu de l’Allemagne ils sont plus français qu’allemands. Je n’ai pas eu à me repentir des Portugais que j’ai, et je n’entends dire que du bien des Espagnols qui existent depuis un an en Italie et en Allemagne. Il faut savoir si je n’ai pas créé un nouveau régiment d’infanterie ; je crois avoir créé un nouveau bataillon de sapeurs.

Voici ce que je voudrais faire. Je veux un beau régiment de cava­lerie; les soldats existent; quant aux officiers, ils seraient : le colonel, Français; les officiers, moitié Français, moitié de ceux qui ont prêté serment. Je ne prendrai que des hommes qui ont servi dans la cava­lerie espagnole. Il y a un régiment qui a été désarmé après l’affaire de la Romana, et qui doit fournir des sujets. Aussitôt que ces hommes seraient habillés de la manière la moins chère et cependant de ma­nière à les reconnaître d’un coup d’œil, on les enverrait en Allemagne, où ils se remonteraient.

Quels sont les officiers, bons officiers de cavalerie, qui ont prêté serment ?

J’ai de très-belles compagnies d’artillerie légère; je ne crois pas qu’il convienne de créer des compagnies d’artillerie espagnoles, mais je ne verrais aucun inconvénient à joindre à chaque régiment d’artil­lerie à cheval un sergent et une escouade de 15 hommes. On pren­drait des canonniers tout faits; ils s’amalgameraient et, si cela réussissait, on donnerait de l’extension à cette mesure.

On pourrait faire la même chose pour toute l’artillerie : 1 officier, 2 sergents et 25 ou 30 hommes par régiment, si on a des officiers d’artillerie espagnols qui aient prêté serment.

Enfin, la même chose pour les bataillons du train. On joindrait à chaque compagnie du train 10 ou 12 hommes du train espagnols; cela ne formerait point de nouveaux corps; ils seraient surveillés par la masse.

L’exécution de cette mesure aurait lieu sans retard. Si cela réussis­sait, on mettrait dans chaque compagnie d’infanterie un dixième d’Espagnols. J’ai déjà des Romains, des Toscans, et cela réussit à merveille.

Je préfère commencer par des canonniers et soldats du train, parce que ce sont des corps qui ont un esprit à part et qui désertent moins.

Qui empêcherait encore de faire un bataillon d’équipages militaires espagnols, en lui donnant des officiers et quelques surveillants français ? Ces hommes accoutumés à servir des chevaux feraient bien leur service et m’épargneraient des Français.

Si ces mesures réussissaient, je me trouverais avoir un résultat de 80,000 hommes qui recruteraient mon armée et m’attacheraient la population d’Espagne, car, une fois s’étant battus avec les Français, ils se trouveraient tout à fait français.

On pourrait même prendre le régiment de la Méditerranée qui est à Toulon, faire venir le cadre dans le Nord et le remplir d’Espagnols. Les officiers et sous-officiers seraient Français, comme de raison ; seulement, on mettrait un tiers de sous-officiers espagnols, et l’on y amalgamerait quelques officiers espagnols. On pourrait orga­niser ainsi le régiment de la Méditerranée et quelques bataillons de celui de Walcheren, et avoir ainsi six bataillons ; bien entendu que rien de cela ne resterait en France et que tout suivrait l’armée.

Je voudrais entendre une discussion là-dessus.

En amalgamant les Espagnols avec les Français, il y a l’inconvénient que, si cela ne réussit pas, il y aura des déserteurs dans tous les régiments, ce qui est désagréable; cependant 10 hommes par com­pagnie ne feraient que 60 hommes par bataillon, et, en les choisissant bons sujets, la désertion serait moindre ou n’affecterait pas. En ayant ces régiments tout d’Espagnols avec des officiers français, ce sont des régiments qu’on essaye, sur lesquels on ne compte point.

J’ai demandé des hommes pour organiser trois équipages de bœufs; si je voulais y mettre un tiers d’Espagnols parmi ceux qui savent con­duire les bœufs, je pourrais faire quatre bataillons; cela m’emploierait 500 Espagnols.

J’ai demandé deux bataillons à la comtoise; si je voulais y mettre un tiers d’Espagnols, cela me ferait de quoi former trois bataillons au lieu de deux ; en prenant parmi ceux qui sont accoutumés à ce métier, cela m’emploierait 700 Espagnols.

J’ai six bataillons d’équipages militaires; en en mettant 100 par bataillon, cela ferait encore 600 Espagnols. Ainsi cela ferait en tout 1,800 Espagnols pris parmi ceux qui sont habitués à ce service.