Correspondance de Napoléon – Février 1807
Février – 1807
Willenberg , ler février 1807, midi.
Ta lettre du 11, de Mayence, m’a fait rire.Il parait que ce petit monstre de baron de Kepen parle fort haut et boude. (NDLR. Censuré dans l’édition Napoléon III)
Je suis aujourd’hui à quarante lieues de Varsovie; le temps est froid, mais beau.
Adieu, mon amie, sois heureuse, aie du caractère, et surtout pas jalouse. La caque sent toujours le hareng, disait un ligueur (NDLR. idem)
Willenberg, ler février 1807.
A l’impératrice
Mon amie, la lettre du 20 janvier m’a fait de la peine; elle est trop triste. Voilà le mal de ne pas être un peu dévote ! Tu me dis que ton bonheur fait ta gloire – cela n’est pas généreux; il faut dire, le bonheur des autres fait ma gloire; cela n’est pas conjugal; il faut dire, le bonheur de mon mari fait ma gloire; cela n’est pas maternel; il faudrait dire, le bonheur de mes enfants fait ma gloire; or, comme les peuples, ton mari, tes enfants, ne peuvent être heureux qu’avec un peu de gloire, il ne faut pas tant en faire fi. Joséphine, votre cœur est excellent, et votre raison faible; vous sentez à merveille, mais, vous raisonnez moins bien.
Voilà assez de querelle; je veux que tu sois gaie, contente de ton sort, et que tu obéisses, non en grondant et en pleurant, mais de gaieté de cœur, et avec un peu de bonheur. Tes nuits sont longues; ce petit baron de Kepen parle bien haut, baise-le de ma part (NDLR. idem)
Adieu, mon amie, je pars cette nuit pour parcourir mes avant-postes.
Willenberg, 1er février 1807.
A M. Régnier (Claude Ambroise Régnier, duc de Massa, 1746-1814. Il est depuis l’an X, Grand Juge)
Je lis dans le Moniteur du 21 janvier un article Cause célèbre sur une affaire de Jacques Turc. Je désire que vous me fassiez un rapport sur cette affaire. (Jacques Turc avait été assassiné par son père et son frère en août 1806).
Willenberg, 1er février 1807
A M. Cambacérès
Je reçois votre lettre du 20 janvier. Je suis aujourd’hui à Willenberg, à quarante lieues de Varsovie. Je manœuvre sur l’ennemi. S’il ne se retire pas à temps, il pourrait fort bien être enlevé.
Willenberg, ler février 1801
Au général Lacuée
Si l’appel pour la conscription de la réserve n’est pas fait, je préférerais des Champenois, des hommes de la Meuse-Inférieure ou des Bourguignons, pour la garde de Paris, à des hommes d’Eure-et-Loir, de l’Aisne, etc.
Willenberg, ler février 1807
Au vice-amiral Decrès
Je vois avec plaisir dans le rapport de M. Sganzin, du 20 janvier, que dès ce moment cinq ou six vaisseaux de guerre peuvent entrer dans le port de Flessingue. Mais que cela soit certain, et que, lorsqu’ils se présenteront, il n’y ait ni si ni mais qui fassent qu’ils n’y entrent pas.
Nominez un des vaisseaux de ligne que vous mettez en construction le Polonais, une frégate la Vistule, un vaisseau de 74 le Pultusk-, un autre le Golymin.
J’attends toujours la solution du problème que j’ai proposé . Avoir des vaisseaux que l’on puisse construire à Dunkerque, à Nantes, etc., qui en sortent armés en flûte. Ces vaisseaux tireraient beaucoup moins, parce qu’ils seraient armés avec des canons de bronze.
Willenberg, 1er février 1807
Au vice-amiral Decrès
J’approuve ce que vous avez fait relativement au vaisseau qui est en Amérique, et dont le détail est contenu dans votre lettre du 20, hormis la vente au gouvernement américain de ce vaisseau, à moins que ce ne soit pour s’en servir comme flûte pour le commerce. Mais ce que vous avez prescrit est fort sage; le désarmer, et, si cela est nécessaire, le démolir.
J’ai ordonné à M. Talleyrand de vous envoyer toutes les instructions relatives aux deux frégates à envoyer dans le golfe Persique.
Willenberg, 1er février 1807
A M. de Talleyrand
Monsieur le Prince de Bénévent, n’oubliez pas les instructions à faire pour la mission de Perse et l’expédition de deux frégates pour le golfe Persique. Vous savez quelles instructions vous devez faire, et l’agent que vous devez employer. Il faut que vingt-quatre heures après l’arrivée de M. Jaubert à Varsovie, il se mette en route.
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Nous sommes aux prises ; quelques petites affaires ont eu lieu.
Willenberg, 1er février 1807
Au général Clarke
Le brigade légère des 23e et 19e chasseurs a dû effectivement se rendre à Stettin; vous en avez probablement reçu l’ordre à l’heure qu’il est.
Il doit y avoir beaucoup de poudre à Willenberg; on peut en faire passer sur Spandau.
Il faudrait faire passer deux cents chevaux commandés par un bon officier, qui feraient des patrouilles entre l’Oder et la Vistule et arrêteraient le brigandage. Écrivez au général Dombrowski, qui est du côté de Thorn; il a 3,000 hommes de levées polonaises, et secondera vos opérations.
Vous avez dû recevoir également l’ordre de réunir les Italiens à Stettin, ainsi que les fusiliers de la Garde. Küstrin aurait, comme je vous l’ai dit, besoin de deux cents hommes de cavalerie, afin de parcourir le pays de là à la Vistule et nettoyer le pays.
Voyez le général Dorsenne; il trouvera facilement dans son dépôt de quoi fournir à cette organisation. Le 15e, quand il arrivera de Hanovre, pourra bien être envoyé pour balayer ces derrières, car il est temps d’en finir. Faites donc en sorte que mes dragons soient bientôt disponibles.
Willenberg, 1er février 1807
Au général Duroc
Le courrier de Paris qui a passé à Varsovie vingt-quatre heures après moi ne m’apporte point de lettre de vous. J’en suis fâché; je désire que vous m’instruisiez des détails militaires, des petits bruits de l’opinion et des détails des magasins des subsistances; tout ceci est d’un grand intérêt pour moi.
Willenberg, 2 février 1807, 3 heures du matin.
Au général Savary, commandant le 5e corps, à Brok
J’apprends qu’Ostrolenka est sans infanterie; il est nécessaire qu’il y en ait, sans quoi votre cavalerie sera écrasée par les Cosaques; envoyez-y-en donc en toute diligence. Le maréchal Davout quitte, le 2 au matin, Myszyniec pour se porter sur Ortelsburg; mais il laisse une avant-garde de deux régiments et de deux cent cinquante chevaux qu’il enverra sur la Skva, à deux lieues d’Ostrolenka, afin de contenir les partis ennemis.
Le général Oudinot arrive à Varsovie le 2; le 4 il sera à Pultusk, Mon intention est de le tenir là, tant pour protéger la ligne de l’Omulew, derrière laquelle se font mes communications, que pour vous servir de corps de réserve. Si les forces de l’ennemi sont telles que vous preniez le parti de rester sur la défensive, je pense convenable que vos plus grandes forces soient à Ostrolenka pour vous maintenir en communication avec moi et appuyer ma droite. Occupez Pultusk, et laissez le général Campana à Brok avec une brigade, avec laquelle il se retirerait sur Sierock, s’il était poussé. Cependant je ne suppose pas que l’ennemi ait là plus de 20,000 hommes. Si vous l’avez attaqué, et que vous l’ayez mis en déroute, après l’avoir convenablement poursuivi, ne vous engagez pas trop.
Willenberg, 2 février 1807, 3 heures et demie du matin.
Au grand-duc de Berg
L’État-major vous donne des ordres de mouvement pour aujourd’hui. La nouvelle de votre arrivée à Passenheim ne m’est arrivée qu’à deux heures du matin; c’est trop tard; j’ai besoin d’être prévenu de bonne heure pour donner des ordres; il aurait fallu me prévenir hier, du moment que vous aperceviez un corps de 2,000 hommes de cavalerie. Faites de cette manière demain. Je ne sais si le maréchal Ney est à Hohenstein; je n’ai pas reçu de nouvelles de lui depuis celles que vous connaissez. Le général Augereau est arrivé à Neidenburg. Le général Davout sera à Ortelsburg de bonne heure. Il n’y a pas d’ennemi de ce côté.
Si l’ennemi n’a que 12 ou 15,000 bommes à Allenstein, il faut le pousser vigoureusement et tâcher de les avoir.
Si l’ennemi était plus fort que je ne pense, vous en auriez des informations cette nuit et demain matin. à mesure que vous avanceriez. Alors il faudrait prendre position à Allenstein, et, dans la journée, les maréchaux Davout et Augereau se réuniraient. A ce que je puis conjecturer par des instructions très-neuves, je suis fondé à penser que l’ennemi n’aura pas plus de 15,000 hommes demain à Allenstein. Marchez bien en règle et ne partez que lorsque le jour sera bien fait.
Willenberg, 2 février 1807, 3 heures et demie du matin.
Au maréchal Soult, à Passenheim
Mon Cousin, j’ai reçu votre lettre. J’ai donné directement ordre à votre 3e division de partir avant le jour pour vous joindre. S’il n’y a point d’autres nouvelles, et que les renseignements que le grand-duc de Berg et vous recevrez portent à penser que l’ennemi n’a pas plus de 12 à 15,000 hommes à Allenstein, il faut l’y attaquer.
Le maréchal Ney aura dû être hier à Hohenstein et devait marcher sur Allenstein. Si l’ennemi y avait plus de 15,000 hommes, il faudrait prendre position, et, dans la nuit, je pense qu’il serait facile de réunir plus de 80,000 hommes. Je pars ce matin de bonne heure et je marche à la tête de ma Garde. Si vous avez des nouvelles de l’ennemi, instruisez-m’en par des officiers; il vaut mieux faire un mot d’écrit et me renvoyer par un officier quelconque, cela étant plus important. Comme le maréchal Davout arrive de bonne heure à Ortelsburg, s’il était nécessaire, je le ferais toujours avancer sur vous.
Willenberg, 2 février 1807, 4 heures du matin.
Au général Gardanne, à Passenheim
Vous accompagnerez la tête de la cavalerie jusqu’au plus à deux lieues et demie, à moins que, dans cet intervalle, elle ne rencontre une bonne division ennemie en position devant elle. Dans ce cas vous reviendrez m’en prévenir au grand galop. Si, à deux lieues et demie de son point de départ, elle ne rencontre rien, vous viendrez également m’en instruire et viendrez à ma rencontre sur la route de Passenheim.
Willenberg, 2 février 1807, 7 heures du matin.
Au grand-duc de Berg, à Passenheim
Le maréchal Ney mande qu’il sera aujourd’hui avec tout son corps d’armée, à Hohenstein. L’ennemi est toujours disséminé, ne parait pas faire de grand mouvement, et occupe encore un grand espace terrain.
Le maréchal Augereau se met également en marche. Ainsi j’espère que vous serez de bonne heure à Allenstein. Tâchez de communiquer avec les maréchaux Augereau et Ney. Je crois qu’en poussant vivement l’ennemi, on lui fera beaucoup de mal.
Willenberg, 2 février 1807, 8 heures du matin
Au maréchal Davout, à Ortelsburg
Mon Cousin, nous avons occupé hier Passenheim, où l’ennemi dans l’inquiétude de nos mouvements, commençait à arriver. Envoyez aussitôt que vous pourrez, une de vos divisions à Mensguth. Celle du général Gudin se rend entre Ortelsburg et Willenberg. Vos trois divisions seront, par ce moyen, en colonne à quinze lieues derrière Bischofstein. On dit que l’ennemi a du monde à Sensburg. On ne croit pas qu’il en ait à Wartenburg. Toutefois il en sera chassé aujourd’hui, ainsi que d’Allenstein. Je pars moi-même pour Passenheim à l’instant même. Je vous prie de me renvoyer l’officier d’ordonnance, quand vous saurez l’heure à laquelle chacune de vos divisions arrivera, et écrivez-moi plusieurs fois dans la nuit. J’ai besoin d’avoir fréquemment des nouvelles.
Willenberg, 2 février 1807.
A M. Fouché
J’ai parcouru l’histoire du Directoire, de Lacretelle; elle m’a paru écrite en bon esprit.
J’ai remarqué, sur le siège de Saint-Jean-d’Acre, des choses ridicules, telles que celles sur Sidney Smith, qui n’est qu’un fou qui n’a rien fait. Il n’avait que deux vaisseaux de guerre avec lesquels il croisait, et par là il maintenait les Turcs maîtres de la mer; du côté de terre, il n’a contribué en rien au siège. Si M. Lacretelle fait une autre édition, il faut qu’il change cela pour la vérité de l’histoire. C’est la seule chose qui m’a frappé, parce qu’elle tend à donner de la réputation à un homme qui ne le mérite pas.
Ce qu’il dit de Phélippeaux et autres ingénieurs émigrés, cela est vrai.
Willenberg, 2 février 1807
Au vice-amiral Decrès
J’ai reçu la lettre par laquelle vous me faites connaître que la marine fournira 5 ou 6,000 hommes pour la défense de Brest et des batteries de la rade. J’ai vu cet état avec grand plaisir. Faites-les armer, habiller et discipliner. Je crois vous avoir autorisé à faire désarmer les cinq vaisseaux à une époque déterminée.
Willenberg, 2 février 1807.
A M. Maret, à Varsovie
Monsieur Maret, pressez le gouvernement pour que toutes les mesures soient prises pour habiller les troupes et les armer. Je lui ai donné toutes les impositions, ce qui ne laisse pas d’être important; je lui ai prêté un million : je désire avoir un corps de troupes. Faites mettre dans la gazette que la levée de la noblesse, sous les ordres du général Dombrowski, a investi Kolberg et Danzig, et borde toute la Vistule. Actuellement que l’armée est éloignée de Plock, voyez ce que l’on organise les bataillons de Plock. Je désirerais avoir l’organisation des trois légions, telle que le gouvernement l’a arrêtée, les noms des officiers, tels qu’ils ont été nommés. On a demandé l’administration 6,000 lits : c’est trop, 3,000 suffisent; d’ailleurs j’ai ordonné l’envoi de beaucoup de matelas ici. Que M. Daru se fasse remettre sous les yeux les ordres que j’ai donnés, et qu’il presse les envois. Il peut en faire venir même de Breslau. Varsovie aura assez d’objets à fournir sans ceux-là.
Willenberg, 2 février 1807.
A M. Daru
Monsieur Daru, l’urgence des circonstances m’a obligé à revenir au système des magasins. Les capotes et les souliers envoyés de Berlin ne valent rien. Les capotes de Leipzig sont ridiculement petites; j’en ai vu qui ne vont pas jusqu’aux genoux. Prescrivez des conditions pour les mesures des capotes, telles qu’on ne puisse s’en écarter, rendez les commissaires responsables des capotes et des souliers qu’ils. recevront. Les souliers, surtout ceux qu’on a donnés à Berlin, sont de la plus mauvaise qualité.
Willenberg, 2 février 1807.
Au général Clarke
J’ai reçu la lettre que M. la Bouillerie vous a écrite en date du 21 janvier. Il est tout simple que les états de Daru et les siens ne soient pas d’accord, puisque l’un parle de recettes annoncées, l’autre de sommes réalisées. La province de Magdeburg doit rendre six millions. Le bordereau des effets trouvés est dans les mains
de l’intendant. Mon intention est de ne rien rendre, sauf sur les contributions; c’est à M. la Bouillerie à voir ce qu’il a réalisé. Cela seul fait une différence de cinq à six millions.
Pour Cassel, j’ai remplacé la contribution par la restitution des sommes placées par l’Électeur, qui se montent à seize millions. Pour Halberstadt, il y a une différence de … mille francs sur Keberstadt; la Bouillerie approfondira cela. Il y en a une de 100,000 francs sur Brunswick; approfondir cela.
Pour la contribution extraordinaire, il est ridicule que Stettin ne verse rien; donnez les ordres les plus positifs qu’il y ait deux millions de versés avant la fin du mois. Cette partie est très-arriérée dans votre gouvernement pour la rentrée. La Silésie, la Saxe, tout le monde paye; il n’y a que la Prusse qui ne paye pas. Quant aux contributions, il est incroyable que cela ait si peu rendu. Que fait M. Estève ? Il fait des états et dort. Il doit faire le budget, mois par mois, de la monarchie prussienne. Toutes les branches du revenu ne rendent pas ce qu’elles doivent rendre : le sel, rien; l’imposition directe ne rend pas. On ne peut être plus mécontent que je le suis de son administration. Occupez-vous de cette partie importante.
Les capotes et souliers qu’on a fournis à Berlin sont très-mauvais. Faites faire la visite des magasins, et voyez quel est le commissaire des guerres qui reçoit de la si mauvaise drogue.
Passenheim, 3 février 1807, 3 heures du matin.
Au maréchal Bessières
Mon Cousin, vous ferez partir, à quatre heures du matin, un piquet de 50 chasseurs avec deux officiers de votre état-major. Ils iront jusqu’à Allenstein. En route, du moment qu’ils entendront le canon, ils expédieront une ordonnance avec une note qui fera connaître où ils ont entendu le canon, et le nombre des coups qu’ils ont entendus. Une demi-heure après ils expédieront une autre ordonnance, pour faire connaître si la canonnade augmente. Ils auront soin de dire dans quelle direction ils l’ont entendue. Ils continueront ainsi de vous instruire, de demi-heure en demi-heure, par une ordonnance, jusqu’à Allenstein. S’ils n’entendent ni n’apprennent rien, ils vous expédieront une ordonnance à demi-chemin pour faire savoir qu’il n’y a rien de nouveau.
Passenheim, 3 février 1807, 5 heures du matin.
Au maréchal Soult, à Allenstein
Mon Cousin, partez à la pointe du jour pour vous rendre à Gusttadt. Je donne ordre au maréchal Ney de se porter sur votre gauche et d’intercepter la route d’Osterode à Guttstadt. La division Friant qui est à Mensguth, part aujourd’hui de bonne heure pour se renre à Wartenburg; le reste du corps du maréchal Davout la suit. Comme il pourrait se faire que je ne fusse point là, j’écris an grand-duc Berg de pousser en avant le division Friant, si les circonstances l’exigeaient. Le maréchal Augereau ne pourra être qu’aujourd’hui à Allenstein.
Quoique le prince se trouve avec vous, je n’en désire pas moins que vous correspondiez fréquemment avec moi. Instruisez-moi donc fréquemment, dans la journée, de tout ce qui viendra à votre connaissance; et, si vous rencontrez l’ennemi, faites-moi connaître directement ce que vous pensez de son nombre. Si vous êtes entre Guttstadt et que l’ennemi se soit retiré, envoyez-moi, comme aujourd’hui, les renseignements que vous avez pu recueillir. Recommandez à vos généraux de division de marcher serrés, en ordre, leur artillerie placée comme elle doit être, et faites-leur connaître que c’est une marche de guerre.
Éclairez bien votre gauche; faites-moi connaître si la rivière l’Alle et la rivière de la Passarge sont entièrement gelées, de manière qu’on ne doive les compter pour rien.
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Rappelez Guyot et votre cavalerie légère. J’aimerais mieux la voir sur votre gauche.
Passenheirn, 3 février 1807, 5 heures du matin.
Au grand-duc de Berg, à Allenstein
Paszkowski n’est arrivé qu’à quatre heures du matin; il parait qu’il s’est perdu. Je me porterai de bonne heure à Alienstein. Je su pose que l’ennemi sera en marche pour se réunir à Guttstadt. J’approuve que vous partiez à la pointe du jour pour marcher à lui, éclairant bien surtout votre flanc gauche. Si vous avez pu avoir des nouvelles du maréchal Ney, mettez des postes intermédiaires pour pouvoir correspondre avec lui pendant votre marche. Je lui ai donné l’ordre de marcher entre Wartenburg et Allenstein, de manière à couper la route d’Osterode à Guttstadt.
Faites-moi connaître si la division Klein vous a rejoint.
Je donne ordre an maréchal Davout de se porter à Wartenburg; la division Friant, qui est à Mensguth, y sera de bonne heure. S’il y avait des événements pressants, vous pourriez lui envoyer des ordres. Il faut aujourd’hui tâcher de vous éclairer le plus en avant que vous pourrez, et beaucoup interroger partout où vous passerez. Il faut que les trois divisions du maréchal Soult marchent réunies et soient à portée de vous soutenir. Le maréchal Augereau ne pourra être qu’aujourd’hui à Allenstein. Ce qui serait parfait serait si le maréchal Ney pouvait un peu gagner et venait flanquer votre gauche. Je vous envoie Corbineau, que vous garderez jusqu’à ce que vous soyez entré à Guttstadt ou que vous soyez en présence d’une forte ligne. Je donne ordre qu’il ait avec lui quinze chasseurs de ma Garde. Il faut qu’il m’en expédie un avec un billet de lui au moins toutes les heures. Je ne reçois point assez de nouvelles.
Passenheim, 3 février 1807, 6 heures du matin.
Au grand-duc de Berg, à Allenstein
Tout porte à penser que l’ennemi tâchera de se réunir à Guttstadt; il est impossible de concevoir qu’il laisse tourner son flanc gauche. Le maréchal Ney est destiné à couvrir votre gauche; je n’ai pas de nouvelles qu’il soit arrivé à Hohenstein, quoique je n’en doute pas. Écrivez-lui encore, en partant, qu’il est essentiel qu’il parte de bonne heure pour flanquer votre gauche et prendre part au combat qui peut avoir lieu aujourd’hui.
La route d’Allenstein à Osterode est-elle libre ? Si le maréchal Ney n’était point arrivé à Hohenstein, il faudrait marcher avec beaucoup plus de prudence; car si l’ennemi, au lieu de se retirer à Guttstadt, marchait de Mohrungen , Liebstadt ou d’Osterode sur Allenstein, on serait fort inquiété. Il faut donc que l’infanterie marche doucement et bien en règle, et que vous ayez vos reconnaissances de Mohrungen, Liebstadt et Osterode.
Faites-moi connaître où se trouvent les divisions Klein et d’Hautpoul; pourront-elles être aujourd’hui à Allenstein ? Faites donc bien constamment éclairer votre gauche.
Faites-moi connaître par le retour de M. de Castille le nombre d’officiers et la force des reconnaissances que vous avez envoyés sur Mohrungen, Osterode et Liebstadt, afin que je voie si la position d’Allenstein est suffisamment garantie et si je puis en faire dépasser ma Garde pour pouvoir vous soutenir. Faites-moi connaître par la même occasion les nouvelles du maréchal Ney, de Hohenstein.
Passenheim, 3 février 1807, 6 heures du matin
Au maréchal Davout, à Ortelsburg
Mon Cousin, l’état-major vous envoie des ordres et doit en avoir envoyé directement au général Friant de se diriger de Mensguth sur Wartenburg. Dirigez la division Morand sur Passenheim, et portez-vous-y vous-même. Faites-moi connaître l’heure à laquelle vous serez à Passenheim, afin que, si je devais changer la direction de la division Morand, je puisse le faire. Je pense que nous ne sommes pas éloigné d’une affaire. Il est possible que l’ennemi, pour se rallier, se batte aujourd’hui avec 30 ou 40,000 hommes qu’il a. Ne vous pressez pas d’envoyer la division Gudin à Mensguth; laissez-la se reposer aujourd’hui à Ortelsburg. Qu’il fasse faire la soupe et se tienne prêt à partir. Qu’il envoie seulement une avant-garde de quatre compagnies de voltigeurs à Mensguth, avec un officier intelligent qui puisse recueillir les rapports de ce qui se passerait à Bischofsburg. Qu’il fasse courir le bruit qu’il marche sur Rastenburg et Nikolaiken. D’après votre dernier rapport, il paraît qu’il n’y aurait que 3 à 4,000 hommes et deux ou trois escadrons de cavalerie à Sensburg.
Passenheim, 3 février 1807.
Au général Duroc
Rapp aurait dû me donner des nouvelles de ce que les Autrichiens disent que fait Essen. Veillez à ce que les caissons de chaque corps, à leur départ de Varsovie, soient remplis de pain et dirigés sur les corps. Il me tarde de savoir le général Oudinot à Pultusk, pour que nos communications soient bien assurées. S’il était arrivé à Varsovie deux cents hommes des dépôts de dragons, chasseurs et hussards, on pourrait en former un escadron qui servirait au général Oudinot le temps que cela serait nécessaire, et qui seraient après renvoyés à leurs corps respectifs. Dites-lui que le général Grandeau est à Myszyniec avec un régiment, deux cents chevaux et deux pièces de canon, qu’il borde la Skwa et a six cents chevaux entre Ostrolenka et Myszyniec. Il est convenable que le général Oudinot envoie dans ces deux endroits pour connaître les mouvements de l’ennemi de ce côté. Les premières mesures qu’il a à prendre sont d’abord de maintenir nos communications, de chasser les partis ennemis et se porter sur la petite rivière de l’Omulew. Après ce premier but, sa destination est de soutenir le général Savary dans ses opérations. Comme je vois, par les états, que son corps sera le 3 à Varsovie, c’est-à-dire le 5 à Pultusk, et que de Pultusk à Allenstein, où est l’armée ce soir, il y a quatre jours, il ne peut nous joindre avant le 10. Il y a quatre marches; j’aurai le temps de lui envoyer des ordres. Que sa première brigade arrivée, il la pousse sur Pultusk, et qu’avec tout son corps il soutienne Ostrolenka et le général Savary. C’est parce que je compte sur lui que j’ai retiré une division que je voulais laisser là. Faites-moi connaître ce que je puis compter des 6,000 Polonais qui sont à Varsovie. A mesure que j’avance, les troupes, même médiocres, sont utiles, pour protéger nos communications, escorter les convois, etc.
Passenheim, 3 février 1807
A M. Daru
Monsieur Daru, il ne faut pas diriger le quartier général les caissons qui appartiennent aux corps; il faut les remplir de pain et les diriger sur les corps respectifs. Il ne faut diriger sur le quartier général que les caissons qui n’appartiennent à aucun corps. Je vois par vos lettres qu’il est parti, le 31 janvier, quatre caissons portant 4,000 rations pour le 5e corps : j’imagine que vous ne les aurez pas dirigés sur le quartier général; qu’il est parti, le 29, quarante-six caissons et trente-deux voitures découvertes; le 30, quarante caissons; le 31, vingt caissons : j’imagine que vous ne comprenez point dans ce nombre de voitures celles qui appartiennent aux corps. Veillez à ce que la manutention de Modlin fasse du pain. Réitérez les ordres à Sicrock et à Pultusk, pour que les commissaires des guerres fassent partir le pain, s’il n’est déjà parti.
Passenheim, 3 février 1807
A M. Maret
Faites mettre dans le Moniteur que Sa Majesté l’Empereur est partie de Varsovie le 30 janvier, est arrivée à Pultusk le même jour à Prasznysz le 31, à Willenherg le ler février. Cela calmera l’inquiétude, jusqu’à ce que l’on puisse envoyer des nouvelles.
Passenheim. 3 février 1801
A M. de Talleyrand
Monsieur le Prince de Bénévent, s’il m’arrivait des dépêches très importantes, il faudrait les garder jusqu’à ce que ceci ait pris une assiette plus décidée. Jusqu’à cette heure l’ennemi est poussé. On s’aperçoit qu’il voit notre manœuvre avec peine et qu’il voudrait l’empêcher, ce qui me ferait penser qu’il se trouve enfourné. Le bruit du pays est qu’il est de tous côtés en retraite, pour tâcher d’éviter le coup qui le menace. Si vous pouvez tirer quelques nouvelles des Russes par la Galicie, faites-les-moi passer. Il fait un beau froid d’un et deux degrés, et le temps est superbe.