Correspondance de Napoléon – Février 1806
Paris, 21 février 1806
Au prince Eugène
Mon Fils, je ne puis encore former une compagnie de gardes d’honneur de Venise, puisque Venise n’est pas encore réunie à mon royaume d’Italie. Vous avez très-mal fait de prendre un décret pour dessécher les marais de Capa d’Istria, et d’avoir affecté des domaines nationaux à cette dépense : je n’approuve pas ce décret. Vous vous êtes aussi trop pressé de faire des changements aux douanes de Venise, relativement aux vins. Votre décret sur les finances, daté de Venise du 7 février, paraît tendre à faire entrer de la mauvaise monnaie dans le trésor. Vous ne pensez pas que j’ai besoin de beaucoup d’argent. Avant que je puisse confirmer le décret d’importation des vins de Venise, il faut que je sache ce que cela fera perdre au trésor.
Ménagez mes fusils; le ministre de la guerre se plaint que vous en employez beaucoup. Ne prenez pas surtout des fusils francais pour l’armée italienne sans que je vous y autorise. Le général Laplanche-Mortière, avec quatre bataillons d’élite, doit vous arriver; faites rejoindre son corps à chacun de ces bataillons; ce sont les 9e, 13e et 81e de ligne. Je vois que le 9e est à Vérone et que son dépôt est à Legnago. Réunissez les corps; sans cela il n’y a point d’ordre. Vous le savez, vous qui avez été chef de corps. Je vois que le 60e est à Venise, et son dépôt à Palmanova; cela ne vaut rien. Dans votre état de situation, il n’est pas dit où est le 106e. Le 3e de chasseurs est à Padoue, et son dépôt à Codogno. Vous ne me dites pas où est le dépôt du 5e de ligne. Écrivez au général Menou pour que les dépôts des régiments qui composent votre armée rentrent sous votre commandement et quittent la France. Il faut réunir les dépôts des corps qui sont en Dalmatie à Venise, à Trévise, ou à Palmanova, à votre choix. Vous ne me dites pas où est le dépôt du 8e d’infanterie légère, non plus que du 13e et du 81e de ligne. Le 4e de cuirassiers est à Trévise et son dépôt est à Lodi; idemle 6e; idem le 7e; idem le 8e; cela ne vaut rien. Le 15e est à Udine, et son dépôt est à Vigevano; le 19e à Sacile, et son dépôt à Vigevano; le 23e est à Pordenone, et son dépôt à Verceil ; le 24e est à Latisana, et son dépôt à Codogno. Réunissez-les dans des garnisons fixes; placez-les dans des endroits sains et où les fourrages soient à bon marché. Faites partir les pionniers noirs pour l’armée de Naples. Comment se fait-il que ce corps soit réduit à 450 hommes ? Il est très-mal placé à Palmanova. Le royaume de Venise doit très-bien fournir au peu d’hommes que vous avez. Je ne vois pas la situation du corps du général Marmont dans votre état; envoyez-lui un aide de camp pour la lui demander. Ne mettez aucun corps que le sien entre l’Isonzo et le Tagliamento. Les 5e, 23e et 79e qui sont en Dalmatie, doivent être au grand complet de guerre et portés à 3,000 hommes. Les conscrits qui n’auraient point de destination doivent être spécialement affectés à ce corps. Je ne vois pas, dans votre état, qui commande l’artillerie et le génie du corps du général Molitor en Dalmatie. J’estime qu’il lui faut au moins quatre compagnies d’artillerie au grand complet de guerre, c’est-à-dire à 100 hommes, un colonel d’artillerie directeur, un lieutenant-colonel sous-directeur, une demi-compagnie d’ouvriers. Je ne vois pas non plus combien il a de pièces de canon. Ces états sont très-mal faits. Envoyez-lui deux compagnies de sapeurs au grand complet de guerre et quatre capitaines en second d’artillerie; indépendamment de cela, envoyez-lui deux compagnies d’artillerie italienne au grand complet de guerre. Il me paraît qu’il n’a point de cavalerie; je crois qu’il ne lui en faut pas beaucoup, mais il lui en faut un peu. Envoyez-lui un petit régiment de chasseurs. J’approuve fort que vous lui ayez envoyé le 81e; faites-lui passer, de plus, un bataillon d’élite. Faites-lui passer le 8e d’infanterie légère, et remplacez ce régiment dans l’Istrie par le 60e de ligne; de sorte que le général Molitor aura le 8e d’infanterie légère, les 5e, 23e, 79e et 81e de ligne, quatre compagnies d’artillerie française, deux de sapeurs, une demi-compagnie d’ouvriers, douze pièces d’artillerie, deux compagnies d’artillerie italienne, un régiment de chasseurs; ce qui, avec les conscrits que vous lui enverrez le plus tôt possible, ayant soin de les habiller et de les armer auparavant, portera son corps à 15,000 hommes. Envoyez-lui un commissaire ordonnateur, un inspecteur aux revues, trois commissaires des guerres, un adjudant commandant et trois généraux de brigade, y compris ceux qu’il a. Le général Seras aura dans l’Istrie le 13e et le 60e, deux compagnies d’artillerie, douze pièces de canon, une compagnie d’artillerie italienne, une demi-compagnie d’ouvriers, un régiment de chasseurs, un directeur d’artillerie, un directeur du génie; le tout formant un corps de 6,000 hommes, il restera au général Miollis les 9e, 53e et 106e de ligne.
Vous devez avoir reçu à Vérone les conscrits partis de Strasbourg. J’en ai vu passer un convoi de 2,000. Il y a dans le royaume d’Italie un grand nombre de commandants de place qui y sont inutiles ; envoyez-les dans les places de l’Istrie et de la Dalmatie. Je n’ai rien vu de mal fait comme l’état de situation que vous m’avez envoyé. Le général Charpentier ne se donne pas les peines convenables; faites mieux que cela.
Envoyez en Istrie et en Dalmatie des cartouches et des biscuits en grande quantité. Si un régiment de cavalerie était de trop en Istrie et en Dalmatie, envoyez-y au moins un escadron. Enfin ne vous endormez point. Songez bien que la paix peut n’être pas aussi sûre que vous pourriez le penser; que la Dalmatie peut être attaquée par les Russes. J’imagine que Lauriston a été en prendre possession. Si vous lui aviez donné des ordres contraires, révoquez-les, car mon intention est qu’il y aille.
Paris, 21 février 1806
Au prince Eugène, vice-roi d’Italie, à Milan
Vous trouverez ci-joint une déclaration faite par le général Solignac. Pourvoyez à la rentrée de 5 millions de contributions provenant des provinces de l’État de Venise. Faîtes-la porter jusqu’à 7 millions. Prenez toutes mesures pour réprimer les abus et remédier à ceux qui se sont introduits. J’ai fait donner ordre au maréchal Masséna de faire verser les 2 millions qu’il a soustraits.
(Lecestre)
Paris , 22 février 1806
A M. Rémusat, premier Chambellan
J’ai ordonné au ministre de la police de faire verser, à compter du ler vendémiaire an XIV jusqu’au 1er janvier 1807, la somme de 150,000 francs par mois dans votre caisse, ce qui fera 2,250,000 francs pour les quinze mois. Voyez à faire faire recette de l’arriéré; je l’appliquerai ensuite à tous les besoins des arts , sciences, musique et théâtres, selon les circonstances.
Paris, 22 février 1806
A M. Champagny
Monsieur Champagny, j’ai reçu la liste que vous m’avez envoyée des individus susceptibles d’obtenir de l’emploi qui s’étaient fait inscrire dans la garde d’honneur. Témoignez-leur ma satisfaction de la marque de zèle qu’ils m’ont donnée. Vous pouvez même faire écrire à chacun en particulier, pour leur donner à entendre que je serai bien aise de faire quelque chose pour eux.
Paris, 22 février 1806
A M. Champagny
Monsieur Champagny, on m’assure que l’ancien château de Charette, qui avait coûté 80,000 francs en assignats, a été acheté 110,000 francs en argent, pour servir à l’établissement d’un haras, qu’on a été trompé, et que l’estimateur du gouvernement a reçu 30,000 francs de cadeau.
Paris, 22 février 1806
A M. Chabot (de l’Allier)
Immédiatement après avoir reçu votre lettre, je vous ai nommé inspecteur des écoles de droit. J’ai été bien aise de vous donner cette preuve de mon estime. Vous pouvez compter que vous et les vôtres trouverez toujours en moi l’appui que je dois à toutes les personnes qui ont aussi bien servi la patrie et moi que vous l’avez fait dans toutes les circonstances.
Paris, 22 février 1806
A la princesse Élisa
Ma Sœur, je vous recommande de ne faire porter à votre cour que des soieries et des batistes, et d’en exclure les cotons et mousselines, afin de favoriser et de donner cours aux produits de l’industrie française.
Paris, 22 février 1806
A M. Collin, directeur général des douanes
Monsieur Collin, envoyez-moi un projet qui ouvre les douanes de mon royaume d’Italie aux toiles peintes, soieries et à tous les objets de manufactures françaises dont vous me ferez l’énumération. Envoyez-moi en même temps un projet pour défendre l’entrée dans mon royaume d’Italie des toiles de coton et marchandises anglaises. Vous devez avoir la minute du travail que vous avez fait à Milan ou, au moins, le tarif qui pourra vous servir à rédiger ces projets. Proposez-moi aussi une note des changements qu’on pourra faire dans les douanes d’Espagne pour favoriser nos manufactures ; car, une fois que j’en serai bien instruit, j’obtiendrai ce qui sera nécessaire.
Paris, 22 février 1806
A M. Lebrun
Mon Cousin, j’ai appris avec peine la manière dont les douanes sont administrées à Gênes. Vous montrez trop de faiblesse pour le commerce de cette ville. Faites faire des visites et poursuivez les contrebandiers. On m’assure qu’on a osé dire, en plein conseil, que, si l’on voulait mettre de l’ordre dans le port franc , le stylet jouerait. Pardieu, dites-leur bien que nous nous connaissons depuis longtemps, et qu’il y a une furieuse différence de moi aux Autrichiens de 1745. Soyez inflexible, car je veux que mes douanes soient organisées.
Paris, 22 février 1806
A M. Crétet
J’ai ordonné qu’à compter du 1er janvier 1806 la police verserait 100,000 francs par mois pour travaux ordonnés à Paris. Faites faire recette de janvier et février, soyez exact à demander le versement , car, quand la police a des fonds entre les mains, elle trouve moyen de les dépenser. Ensuite je veux les employer à l’utilité de la capitale et aux autres travaux que ceux ordonnés. Voyez ce qu’on pourrait faire de ces 1,200,000 francs cette année.
Paris, 22 février 1806
A M. Fouché
Monsieur Fouché, je vous envoie le budget des dépenses secrètes de votre ministère, pour l’an XIV et 1806. Je n’ai point accordé de gratification pour le caissier, parce qu’il n’a point suivi le budget de l’année dernière; s’il dépasse celui de cette année, je le destituerai. Mon intention est que ce qui est accordé aux inspecteurs le soit sur un état de revue approuvé tous les six mois par moi. Il faut aussi que les conseillers d’État qui voyagent aient une rétribution fixe. Il y a, dans l’état des dépenses imprévues, des appointements d’employés, ce qui ne devrait pas être. J’y vois également 12,000 francs payés à M. Bourrienne pour frais de voitures, et une somme de 16,000 francs pour supplément de frais de bureaux des conseillers d’État. Comme je porte la plus grande sévérité dans tout ce qui est comptabilité , mon intention est qu’on exécute à la lettre les articles de mes budgets.
Paris, 22 février 1806
NOTE POUR M. LACÉPÈDE
On a lu avec intérêt la note de M. lzquierdo. On l’invite à voir fréquemment le ministre du trésor public pour les affaires avec l’Espagne. On attache un grand intérêt à être recouvert des immenses avances qu’on a faites pour cet objet.
Une chose très-agréable que pourrait faire l’Espagne serait de permettre, par les Pyrénées, l’introduction des soieries, toiles peintes batistes françaises. On vient de défendre l’introduction , dans les États de France, des cotons anglais. Le fait est que l’Espagne est fournie par les Anglais de ces cotonnades, que la France pourrait fournir. On ne demande que la préférence. Il est de l’intérêt de l’Espagne de maintenir la balance du commerce français pour soutenir sa marine. L’Espagne ne fabrique pas assez de toiles peintes pour sa consommation. L’arrangement proposé serait une chose extrêmement agréable.
Paris, 22 février 1806
DÉCISION
Le ministre de la guerre propose à l’Empereur d’autoriser une retenue de la valeur de 5,034 paires de souliers sur le traitement du général Donzelot, chef d’état-major du 7e corps d’armée, qui, de son autorité, a fait distribuer à son corps des souliers appartenant au 3e corps d’armée. | J’approuve l’ordre qu’a donné le maréchal Berthier, qui est toute justice. Il n’est point convenable que, lorsque des troupes sont absentes, on s’empare leurs souliers. Faites connaître au général Donzelot mon mécontentement et l’ordre que j’ai donné. Cependant lui faire remise de la retenue de ses appointements, remplacer ces souliers au corps du maréchal Davout par ceux qui sont à Strasbourg. |
Paris, 22 février 1806
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, votre aide de camp m’apporte votre lettre du 16.
Une lettre du 14, dont je vous ai envoyé un duplicata par ma lettre du 17, doit certainement vous être parvenue. Vous devez donc être sorti d’embarras, et je compte qu’Anspach est occupé à l’heure qu’il est. Le général Molitor partait de Fiume le 9 février; il paraissait avoir éprouvé quelques difficultés de la part des Autrichiens.
Chargez le général Andréossy de passer une convention avec le département de la guerre à Vienne, pour le passage de Monfalcone en Istrie et en Dalmatie; car il me faut une communication, et on ne me refusera pas ce que l’on accordait aux Vénitiens.
Que les journées d’étapes soient les plus courtes possible et tracées par la grande route, de manière que les charrois puissent passer. Je ferai tout payer comptant, et je m’engagerai même à ne pas faire passer plus de 300 chevaux ou un régiment à la fois. Cette petite convention militaire est assez essentielle à finir, pendant que nous sommes encore à Braunau et que nous avons encore la haute main sur l’Autriche.
Je ne trouverai pas d’objection, si on le désire, à prévenir les autorités de Fiume ou de Laybach quatre, cinq ou six jours d’avance; mais il faut que je passe.
Dites au général Andréossy que je le placerai comme il le désire, et que je ne l’ai point employé en Autriche parce qu’on m’y a témoigné un grand désir de n’y pas avoir un militaire, surtout de la Grande Armée.
Paris, 22 février 1806
Au prince Eugène
Mon Fils, je suis extrêmement mécontent que vous ayez donné au général Lauriston des ordres contraires à ceux que je lui avais donnés. Je l’ai chargé de prendre possession de la Dalmatie; qu’il s’y rende sans délai. Cette manière de faire est d’une légèreté inconcevable. Sous quelque prétexte que ce soit, ne rapportez aucun de mes ordres ; vous n’en avez pas le droit.
Paris, 22 février 1806
Au vice-amiral Decrès
Monsieur Decrès, il faut que demain, avant minuit, les ordres pour Allemand partent. Une fois les frégates sorties de Rochefort l’éveil sera donné, et peut-être Allemand ne pourra plus sortir; c’est par cette lenteur que les opérations maritimes manquent.
Paris, 23 février 1806
INSTRUCTIONS POUR LE CONTRE-AMIRAL ALLEMAND
Monsieur le Contre-Arniral Allemand, nous avons ordonné que notre escadre sous votre commandement serait munie de quatre mois d’eau et de sept mois de vivres, et composée de nos vaisseaux le Majestueux, Le Magnanime, le Jemmapes, le Lion, le Sufren, de nos frégates la Minerve, l’Armide, la Gloire, la Thétis, l’Infatigable et de nos corvettes les Landes, le Sylphe, le Palinure, le Lynx.
Nous vous faisons savoir que notre intention est que vous saisissiez la première occasion favorable pour appareiller avec toute l’escadre sous vos ordres.
Nous avons chargé notre ministre de la marine de vous transmettre des instructions nautiques sur les routes que vous aurez à suivre, et nous allons vous faire connaître le plan des opérations dont nous entendons vous confier l’exécution.
Notre escadre doit, autant que la mer et les vents le lui permettront, se trouver à l’entrée de la mer de Danemark vers la fin d’avril pour y intercepter tous les bâtiments anglais, suédois et russes qui y entrent ou en sortent à cette époque.
Pour atteindre ce but, vous établirez une croisière dans le sud et sud-sud-ouest du cap Derneuss; vous lui donnerez toute l’extension que comportent le nombre des bâtiments de notre escadre et la nature du temps et des vents, afin de découvrir les bâtiments qui viendront reconnaître ce cap pour entrer dans la Baltique et ceux qui sortent de cette mer.
La durée de votre croisière dans ces parages ne peut être déterminée que par les événements et par les calculs, auxquels ils donneront lieu, des chances que courra notre escadre d’être plus tôt ou plus tard découverte par l’ennemi. Vous retiendrez les neutres dans l’escadre, autant qu’il sera possible, pour les empêcher de porter l’avis de votre présence aux croiseurs ennemis, et vous les relâcherez en quittant ces parages.
Vous brûlerez tous les bâtiments ennemis de peu d’importance, et même ceux , de quelque prix qu’ils soient, que vous auriez peu d’espoir de faire entrer dans nos ports ou ceux de nos alliés, ou dont la conservation affaiblirait trop vos équipages.
Si la valeur de vos prises s’élevait à plusieurs millions, et notamment s’il en était de chargées de mâtures précieuses, cuivres et munitions navales, il serait avantageux à notre service que vous les réunissiez en convoi et que vous les fissiez escorter jusqu’à notre île de la Martinique, où elles aborderont au port de la Trinité, et les bâtiments d’escorte ne resteront dans les Antilles que vingt-quatre heures, pour faire leur eau et se rendre immédiatement aux rendez-vous que vous leur aurez donnés en les expédiant.
Ces rendez-vous seront très-secrets, et les paquets ne devront en être ouverts par les capitaines qu’après avoir appareillé des Antilles, afin d’y laisser parfaitement ignorer le projet de vos opérations.
L’expédition de ce convoi de prises pour les Antilles n’est que facultative, et nous vous laissons l’arbitre du parti que les circonstances vous conseilleront à cet égard.
Lorsque vous croirez devoir quitter la croisière du cap Derneuss , vous détacherez une division de quatre frégates, sous le commandement du capitaine de nos vaisseaux Meyne, pour pénétrer dans les mers du Groenland et du Spitzberg, conformément aux instructions que nous avons jugé à propos de lui délivrer, et dont il n’ouvrira le cachet que lorsque vous lui aurez fait le signal de suivre sa mission particulière.
Les opérations ultérieures auxquelles est destinée notre escadre restant sous votre pavillon exigent que, sans avoir touché dans aucune île ou port d’Amérique, elle se trouve dans les eaux des îles de Tortola au 1er août prochain.
Il sera donc nécessaire de pourvoir à vos remplacements d’eau avant de gagner ces nouveaux parages.
Lors donc que vous quitterez la croisière du cap Derneuss, vous pourrez prolonger les côtes septentrionales et occidentales de l’Écosse pour détruire tous les bâtiments ennemis qui, dans cette saison, naviguent avec sécurité.
Mais l’objet important est de vous rendre sur un point, tel que les Canaries, pour y prendre des rafraîchissements et remplacer votre eau.
De tous les convois que l’ennemi expédie des Antilles, il n’en est aucun dont le départ varie moins que celui qui en appareille chaque année au commencement d’août; cette époque est commandée par l’hivernage, qui force tous les bâtiments marchands en partance à quitter alors les Antilles.
Notre intention est que vous fassiez tout ce qui dépendra de vous pour parvenir à vous emparer de ce convoi, qui n’est pas escorté par plus de deux vaisseaux, une frégate et quelques corvettes. Les informations qui nous sont parvenues à cet égard nous ont fait connaître que, pendant les années précédentes , et surtout la guerre dernière, tous les bâtiments de commerce anglais qui se trouvaient dans l’archipel des îles du Vent, destinés pour l’Europe, ont dû être rendus dans la rade de Saint-Christophe au ler août, et que ce jour-là même ils doivent en partir, sous peine de doubler le prix des assurances à cause des dangers de l’hivernage.
De la station de Saint-Christophe, le convoi va mouiller aux petites îles de Tortola, d’où il débouque vingt-quatre heures après. (débouquer : sortir d’une passe étroite, d’un canal, d’un détroit, pour gagner la haute mer – Petit Larousse 2001)
C’est à ce débouquement qu’il faut envelopper et prendre ce convoi.
Il ne s’agit que d’arriver dans les eaux de Tortola au ler août prochain, et cela brusquement et sans que l’escadre ait été aperçue auparavant d’aucune colonie, et ait laissé passer aucun bâtiment qui pourrait y porter la nouvelle de son arrivée.
Supposant que vous ayez fait votre eau aux Canaries, il sera facile de calculer, à quelques jours près, votre traversée jusqu’à Tortola, d’autant que, prenant assez de temps par devers vous, vous pourrez modérer votre route pour arriver à jour fixe. Il ne doit pas vous échapper que devancer sur Tortola l’époque du Ier août, c’est courir le risque presque certain d’y être découvert et de manquer l’expédition. Au reste, lorsque vous arriverez dans ce parage, il faut vous tenir au large de l’île et faire observer le débouquement par vos bricks, qui, placés par échelons, vous feront leurs signaux de loin et sans que vous soyez aperçu.
Le convoi pris, vous le conduirez à Porto-Rico, et vous ferez pourvoir à la vente des prises par des commissaires que vous chargerez de ce soin, et, après vous être procuré en toute diligence des remplacements d’eau et de vivres, vous partirez sans rien attendre pour diriger la suite de vos opérations, ainsi que le comporteront les circonstances et l’intérêt de notre service.
Dans votre relâche à Porto-Rico, vous ne négligerez rien de ce qui pourra être utile an commandant et à la garnison de Porto-Rico, dont il vous sera facile d’avoir des nouvelles récentes dès le premier moment de votre arrivée.
Le succès de cette expédition est calculé sur l’expérience de ce qui a eu lieu précédemment; il est possible qu’il y ait eu quelques changements sur les dates citées; mais, au reste, arrivé aux débouquements de Tortola, vous rencontrerez bientôt des bâtiments venant des Antilles, qui, de quelque nation qu’ils soient, vous donneront des informations que vous apprécierez, et qui pourront vous déterminer sur tout ce qu’il y aura à faire.
Vous pourrez même faire explorer, à la pointe du jour du 3 août, la rade de Tortola par un de vos bricks, qui altérera son gréement et aura masqué sa batterie pour ne pas être suspect.
Enfin votre expérience, votre sagacité et les avis qui vous parviendront vous dicteront les mesures que comportera l’état des choses.
Les rapports qui nous sont parvenus représentent le mouillage de Tortola comme incapable de résistance, et le convoi comme facile à détruire en rade. Mais nous ne vous donnons cette indication que comme ayant besoin d’être appuyée par des documents plus positifs, et il ne vous sera pas impossible, si le départ du convoi était retardé, d’en obtenir des neutres que vous rencontrerez, lesquels pourront même vous fournir à prix d’argent des pilotes pour cette entreprise, si elle est véritablement praticable.
Si, contre notre espérance, des événements quelconques ne vous permettaient pas de rencontrer le convoi de Tortola, dès que vous serez fondé à ne plus conserver d’espoir de ce côté, vous devrez vous rendre sur Terre-neuve pour y détruire la pêche de l’ennemi sur le banc et dans toutes les anses et haies où vous pourrez pénétrer. Ces expéditions vous occuperont probablement jusqu’à la fin du mois d’août.
Notre intention est que vous prolongiez les croisières de notre escadre autant que le comporteront vos vivres, d’autant que, plus son retour dans nos ports sera différé, plus il sera favorisé par la saison.
Vous devrez vous attacher à retirer des prises que vous ferez tous les vivres, eau, agrès, toiles, etc., qui pourront être utiles à notre escadre et la mettre en état de tenir plus longtemps la mer.
A votre retour, vous pourrez vous porter de nouveau sur la côte d’Irlande, puis sur le banc des Soles, pour consommer ce qui vous restera de vivres, et vous changerez successivement et rapidement vos croisières pour ne pas donner à l’ennemi le temps de vous y joindre.
Enfin vous ne rentrerez dans nos ports que lorsque l’état de nos vaisseaux et celui de leurs vivres ne vous permettront plus de tenir la mer.
Votre mission contre le convoi des Antilles est d’une grande à portance; mais, s’il arrivait qu’à votre première relâche vous n’eussiez plus le temps disponible pour arriver au ler août sur Tortola, nous vous prévenons que l’ennemi expédie des convois nombreux sur le cap de Bonne-Espérance; vous pourriez donc croiser à l’ouest des îles du Cap-Vert pour les attendre, ou vous porter sur les Acores pour y intercepter le convoi des Antilles. Vous vous déterminerez à l’une ou à l’autre opération, selon les circonstances. Vous pourrez aussi vous porter plus tôt qu’il n’a été indiqué ci-dessus sur Terre-Neuve. Mais ces croisières ne doivent avoir lieu qu’autant qu’il vous serait impossible de remplir l’objet principal, qui consiste à intercepter le convoi de Tortola.
En vous donnant les présentes instructions, nous n’entendons pas avoir tout prévu; mais nous avons eu pour but de vous faire connaître les objets essentiels de l’expédition que nous avons conçue, nous vous autorisons à porter dans leur exécution toute l’extension ou les modifications que les circonstances vous paraîtront comporter pour le plus grand succès de votre mission.
Nous nous confions particulièrement en vous pour la direction de l’importante expédition que nous remettons à votre expérience, vos talents et votre courage.
(En marge du registre de la marine qui contient ces instructions, on Ji x Annulées. Ces instructions ne sont portées ici que comme projet de croisière)
Paris, 24 février 1806
A M. Cambacérès
Je suis-instruit qu’il s’imprime un ouvrage intitulé Mémoires de Louis XIV, écrits par lui-même, chez un libraire nommé Garnery, rue de Seine, hôtel de la Rochefoucauld. Envoyez chercher le libraire et dites-lui qu’il ne l’imprime pas sans que vous l’ayez lu. Un ouvrage de cette nature ne peut s’imprimer sans que la police en soit instruite. Lisez effectivement cet ouvrage et dites-moi ce que vous en pensez.
Paris, 25 février 1806
NOTES SUR LES THÉÂTRES IMPÉRIAUX, DICTÉES EN CONSEIL D’AMINISTRATION
- de Lucay, chargé de la direction et de la surveillance principale de l’Académie impériale de musique, fait un rapport général sur la situation de ce théâtre, et présente les états à l’appui de la comptabilité.
Sa Majesté prescrit les dispositions suivantes :
Le terrain non bâti existant dans la rue de Louvois, vis-à-vis la partie latérale du théâtre , sera acquis, et un magasin pour les décorations de l’Opéra sera construit sur cet emplacement. Les frais d’acquisition, de construction et tous autres frais et dépenses ne doivent pas excéder, sous aucun prétexte, la somme de 150,000 francs. Les plans et devis remis par M. Lucay seront soumis, d’après les ordres du ministre de l’intérieur, à l’examen du comité de consultation des bâtiments.
La salle du théâtre Favart sera louée pour servir aux répétitions. Le prix de cette location ne doit pas excéder 36,000 francs.
La construction des petites loges au quatrième est autorisée; cette dépense, qui ne doit pas excéder 10,000 francs, sera prise sur les fonds généraux du budget.
- Lucay pourra prendre sur les mêmes fonds une somme annuelle de 3,000 francs, qui sera donnée en traitement à un maître de danse chargé de terminer l’instruction des élèves de la danse, au sortir de l’école.
A partir du 1er mars, il y aura à l’Opéra quatre représentations par semaine, et des mesures seront prises de manière à pouvoir, dans les temps d’affluence, et notamment à l’époque des fêtes du mois de mai, donner cinq représentations.
On représentera, dans le courant de l’année, huit nouveautés, parmi lesquelles seront comprises la Médée, de M. Fontenelle, et les Danaïdes, de Sallieri. La liste de ces nouveautés et les dispositions à prendre pour l’exécution de cet ordre seront arrêtées dans le courant de mars. On fera connaître ces dispositions par le moyen des papiers publics.
Le jury pour la réception des ouvrages sera réorganisé. M. de Lacépède sera invité à le présider. M. de Rémusat fait un rapport sur la situation du Théâtre-français, et présente la comptabilité de ce théâtre et les états à l’appui.
Sa Majesté ordonne que les 152,000 francs montant de la retenue opérée sur les parts seront versés à la caisse d’amortissement, qui en fera le placement au grand-livre, sous le nom des sociétaires du Théâtre-français, et de manière à constater la portion appartenant à chacun d’eux.
La somme de 100,000 francs en rentes, accordée par Sa Majesté par le décret du 13 messidor an X pour encouragement à l’art dramatique, sera inscrite au compte du ministère de l’intérieur, avec une indication générale qui fera connaître son affectation spéciale, de manière à ne pas faire un titre aux sociétaires, tandis que Sa Majesté a eu l’intention de procurer un bien permanent au théâtre et de pouvoir transmettre ces avantages à une société, si celle-ci venait à se dissoudre pour quelque cause que ce fût.
- Auguste de Talleyrand, chargé de la direction et de la surveillance principale de l’Opéra-Comique, fait un rapport sur la situation de ce théâtre et sur sa comptabilité, et présente les états à l’appui.
- de Rémusat rend successivement compte de la situation et de la comptabilité des Bouffons et du théâtre de l’Impératrice.
Des observations ayant été soumises à Sa Majesté sur les moyens d’améliorer la situation des divers théâtres de la capitale, qui , pour la presque totalité, ne se soutiennent qu’au moyen des secours du Gouvernement, Sa Majesté invite le ministre à s’occuper de la rédaction d’un règlement qui aurait pour objet de statuer qu’aucun théâtre ne pourrait s’établir sans l’autorisation de Sa Majesté; que, pour obtenir cette autorisation , les entrepreneurs s’adresseraient au ministre de l’intérieur, lui feraient connaître leurs moyens pour la suite de l’entreprise, et fourniraient le cautionnement qui serait réglé pour la sûreté soit des acteurs, soit des fournisseurs du théâtre; que tous les théâtres actuellement existants à Paris, les quatre grands exceptés, remettront, dans le courant d’un mois, leur état de situation en recettes et en dépenses, au ministre de l’intérieur; que tous ceux qui se trouveraient en déficit et hors d’état de couvrir leurs dépenses par leurs produits seraient forcés de se liquider dans un délai fixé, afin de ne point aggraver encore le sort de leurs créanciers, en perpétuant une existence qui, lors même qu’elle les ruine, établit une concurrence désavantageuse aux autres théâtres; qu’après la chute de ceux qui se trouveront dans ce cas, tout nouveau théâtre autorisé payera à l’Opéra une rétribution qui sera déterminée.
Le ministre de l’intérieur, en présentant ces règlements, proposera des idées sur la législation des théâtres dans les départements; leurs rapports avec les théâtres de quelques principales villes, leur dépendance de l’autorité, et les modifications qu’on pourra être dans le cas d’introduire à l’égard des droits appartenant ou devant appartenir aux familles des auteurs morts ou vivants.
Paris, 24 février 1806
A M. Talleyrand
Monsieur Talleyrand, faites connaître mon mécontentement en Espagne de la mauvaise conduite du régiment espagnol de Zamora, dans la Rivière de Gênes; des soldats de ce régiment m’ont tué deux gendarmes. Écrivez également à mon ministre à Florence, pour demander réparation positive de la mort de mes deux gendarmes tués à Rapallo, et pour exiger que six hommes de ce régiment soient fusillés. Si l’on ne me donne pas réparation, je ferai entrer deux régiments en Toscane, et je ferai massacrer tous ceux du régiment de Zamora que je rencontrerai.
Paris, 25 février 1806
Au général Junot
Je reçois vos lettres du 18 février. Je ne comprends pas comment il peut y avoir de l’incertitude sur vos pouvoirs; le décret est précis. Vous avez des pouvoirs extraordinaires; cela est très-nécessaire dans ces moments-ci. Tous les sujets que vous demandez de France pour préfets vous seront envoyés.
Je vous ai déjà écrit de faire arrêter les trois individus dont vous vous plaignez, et de les envoyer à Paris. Vous pouvez suspendre les fonctionnaires qui, se conduiraient mal, même les juges. Je confirmerai vos arrêtés et les destituerai sur-le-champ.
Je ne sais comment ce qui concerne le garde-meuble de Parme n’est point réglé. Faites venir Salmatoris à Parme, cela le regarde comme conservateur des biens de la Couronne au delà des Alpes. Écrivez-lui de venir vous voir, et de faire arranger le palais pendant la campagne. Je ne vois pas d’inconvénient à ce qu’il serve au gouverneur général en mon absence. J’ai vu avec plaisir que Mezzano avait été brûlé, et que les commissions militaires font de sévères exemples. Toutes vos lettres sont datées de Parme; quand en recevrai-je de Bardi, de Borgo-di-Taro et des différents points de l’Apennin ? Vous dites qu’il vous faut des compagnies de gendarmerie de plus, et vous ne me dites pas ce qu’il vous en faut encore, et les lieux où vous voulez les placer. Ne m’écrivez jamais des choses vagues. Quand j’aurai reçu ces détails, je ferai partir sur-le-champ les compagnies dont vous avez besoin. Ne faites rien sans me consulter. Je ne sais pourquoi le 67e n’est pas encore arrivé à Gênes. Si cela dépendait de vous, envoyez-le sur-le-champ.
Paris, 25 février 1806
Au prince Eugène
Mon Fils, je reçois votre lettre du 17 février. Je ne connais rien à l’administration de mon royaume d’Italie; si vous ne m’en instruisez pas davantage, je correspondrai avec mes ministres par un secrétaire d’État. Je ne connais pas davantage les affaires de mon armée. Indépendamment des contributions de guerre, les peuples de Venise doivent les impôts ordinaires de brumaire, frimaire, nivôse, janvier et février, ce qui fait plus de quatre mois. Vous parlez de vos dépenses et vous ne parlez point de vos recettes. l’aperçu de vos dépenses n’est pas clair; on ne sait pas pourquoi il vous faut 990,000 francs pour la solde et 800,000 francs pour l’administration. Il faut envoyer des états en détail et par arme. Croire que le pays de Venise ne rendra que huit millions est une chose par trop absurde; et je ne sais sur quoi vous fondez que, sur vingt-quatre millions de revenus, il en passera quinze millions pour les charges dont le pays est grevé. Ne changez rien dans le pays vénitien sans que je vous en donne l’ordre. Laissez le pays comme il était sous l’administration des Autrichiens, qui ont de l’économie; laissez les mêmes appointements que payaient les Autrichiens, et ne vous entraînez pas dans des dépenses que je ne puis faire. Il est bien question dans ce moment-ci de s’occuper de dessèchements et de ces branches de dépenses aux extrémités du royaume! Tout cela n’est que ridicule. Je ne sais si les douanes, les impositions directes ou indirectes de toute espèce sont organisées et rendent. Vous dites que j’ai reçu tous les comptes : je n’ai rien reçu de ce que j’ai demandé; je n’ai reçu qu’un état de situation de votre armée, très-mal fait; et je suis fort étonné que le général Charpentier me fasse un état de situation où la moitié des choses manque. Vous ne m’avez pas envoyé d’état des revenus du pays vénitien, des domaines nationaux, des mainmortes, des fortifications, de l’artillerie qui vous reste; je n’ai rien du tout, de manière que je ne sais rien. D’un autre côte, je n’ai pas de compte de mes affaires d’Italie; je ne sais comment la guerre peut dépenser tant d’argent, n’ayant pas de troupes; et, dès lors, qu’en fait-on ? M. Joubert, commissaire ordonnateur, doit vous remettre l’état précis de ce que vous coûte chaque conseil d’administration de l’armée, suivant les principes de notre administration , masse par masse. Les ministres doivent faire connaître à quoi ils emploient l’argent. Mon intention est qu’à compter du 1er mars aucune dépense ne puisse être faite sans mon ordre, et que les choses soient rétablies comme elles étaient avant la guerre. Envoyez-moi donc l’état de distribution du crédit à accorder aux ministres pour le mois de mars. Je n’ai pu encore obtenir un budget de 1806 corrigé d’après les circonstances. Enfin je n’ai rien dans les mains, et je connais moins les affaires de mon royaume d’Italie que celles de l’Angleterre. En résumé, envoyez-moi l’état de la solde au ler janvier, arme par arme; l’état de ce qu’ont coûté en janvier les différentes masses de l’armée; l’état des revenus et de tout ce qu’a rendu le pays vénitien, comme impôts ordinaires, depuis l’arrivée des Français; l’état de ce que le pays rend chaque mois, imposition par imposition; l’état des contributions qui ont été levées au profit des officiers particuliers de l’armée; l’état de mon budget de 1806 corrigé et amendé, selon les circonstances actuelles; le budget de 1805, tel que je l’ai arrêté, avec ce qui est entré au trésor, ce qui en est sorti et ce qu’a dépensé chaque ministre. Enfin partez du principe que je ne veux rien dépenser cette année dans le pays vénitien, parce que j’ai besoin d’argent; qu’il faut que le corps du général Marmont, les troupes qui sont en Dalmatie, et celles sous vos ordres, ainsi que les nombreuses recrues que je vous enverrai dans le courant de l’année pour porter ces corps au complet, soient nourris par le pays; que les 1,600,000 francs par mois que paye mon trésor d’Italie doivent être depuis le 1er février à ma disposition, pour être employés aux dépenses de ma marine. Envoyez-moi l’état de tous les biens nationaux du pays de Venise.
Paris, 25 février 1806
Au prince Eugène
Mon Fils, Lauriston m’envoie tous les décrets relatifs à l’organisation de la marine de Venise, du 7 février. Vous marchez avec trop de précipitation. Il m’en coûtera autant à Venise qu’à Brest, et cela sans rien faire. Mon intention est de conserver tout sur le même pied que du temps des Autrichiens. On n’attend pas les ordres et l’on ne sait ce qu’on fait en Italie. Vous avez fait mettre une frégate en construction sans que le plan en ait été arrêté. Vous croyez qui cela se fait de cette manière ! Faites suspendre les travaux jusqu’à ci que mon ministre de la marine ait envoyé le plan de la frégate; on me fera des patraques, comme tout ce qui a été construit à Venise et il ne m’en coûtera pas moins fort cher.
Paris 25 février 1806
Au prince Eugène
Mon fils, envoyez à Naples tous les officiers napolitains qui se trouvent dans les corps ou dans l’état-major de mon royaume d’Italie. Vous les adresserez au prince Joseph, qui les emploiera dans des corps napolitains.
Paris, 25 février 1806.
Au prince Joseph
Mon Frère, j’ai reçu votre lettre du 14. Je vous fais mon compliment sur la reddition de Naples et des autres places. J’ai donné ordre que tous les officiers napolitains qui sont à Paris et dans mon royaume d’Italie vous fussent envoyés. Vous pouvez les prendre tous.
Paris, 26 février 1806.
DÉCISION
Le ministre de la guerre soumet à l’Empereur des états d’objets d’artillerie pris sur les ennemis et reçus dans les magasins de Neuf-Brisach et de Strasbourg. | M. Dejean demandera des comptes à jour. Les pièces prises à la garde de Russie seront données à la garde impériale. Deux pièces russes seront données à chacune des villes qui envoient au couronnement. Le ministre présentera un projet de décret. |
Paris, 25 février 1806
A la princesse Auguste
Ma Fille, je vous envoie mon portrait comme une preuve de mon estime et de mon amitié. J’ai reçu votre dernière lettre. J’ai écouté avec grand plaisir tout le bien qu’on me dit de vous. J’imagine qu vous avez reçu votre corbeille; je vous ai envoyé en même temps une bibliothèque. Dites à Eugène combien je l’aime et combien je suis aise d’apprendre que vous êtes réciproquement heureux.
Recevez, ma Fille, ma bénédiction.