Correspondance de Napoléon – Février 1806

Paris, 19 février 1806

Au général Junot

Je vois avec plaisir que le village de Mezzano, qui a le premier pris les armes, sera brûlé. Donnez un grand éclat à cette exécution; faites-en faire une grande description dans tous les journaux. Il y aura beaucoup d’humanité et de clémence dans cet acte de rigueur, parce qu’il préviendra d’autres révoltes.

Vos lettres sont toujours datées de Parme; je ne vois pas que vous ayez été à Bardi, à Borgo-di-Taro, et dans toute la vallée. Je désire que vous vous portiez partout, et qu’il n’y ai pas un gros bourg que vous n’ayez vu. Parlez ferme et faites sentir aux habitants l’énormité de leur crime. L’évêque de Plaisance a plusieurs prêtres, malheureux scélérats, en prison; faites-les traduire devant une commission militaire. Je n’ai pas besoin de l’évêque de Plaisance pour punir ceux qui désobéissent à mes lois. Ne souffrez pas que l’on dise dans le public du mal des administrateurs qui ont précédé; n’en parlez qu’à moi; mais instruisez-moi de tout; j’en ferai un sévère exemple.

Quoique Bobbio ne soit pas de votre arrondissement, rendez-vous-y aussi. Visitez toutes les montagnes. Je veux faire bientôt commencer un chemin de Plaisance à Sestri ; vous devez avoir des ingénieurs des ponts et chaussées.

 

Paris, 19 février 1806

INSTRUCTIONS POUR LE CAPITAINE DE VAISSEAU MEYNE

Monsieur Meyne, Capitaine de nos vaisseaux, nous avons fait choix de vous pour commander une division composée de nos frégates l’Armide, la Gloire, la Thétis et la Minerve, à l’effet de suivre d’abord, sous les ordres du contre-amiral Allemand commandant une de nos escadres, la destination que nous lui avons donnée, et qui a pour objet d’intercepter le commerce des Anglais, Suédois et Russes à l’entrée de la mer de Danemark. Vous ferez donc partie de cette escadre jusqu’au moment où le contre-amiral vous fera le signal de suivre votre destination particulière. La croisière de cet officier général ne durera qu’autant que le comporteront les événements et le calcul des chances d’être plus tôt ou plus tard découvert par des forces supérieures de l’ennemi.

Lorsque le contre-amiral Allemand vous aura fait le signal de suivre votre destination particulière, vous rallierez les frégates sous vos ordres, pour manœuvrer d’une manière indépendante et conforme à ce que nous allons vous prescrire par les présentes instructions.

Notre intention est qu’alors vous vous portiez sans délai dans les mers du Groenland et du Spitzberg pour y détruire la pêche de l’ennemi.

Nous vous faisons connaître, par une copie d’instructions jointes à celles-ci, les opérations dont nous avons chargé dans ces mers notre capitaine de frégate Leduc commandant l’une de nos divisions. Nous attendons qu’il parviendra à y détruire une grande partie des pêcheurs ennemis; mais votre opération a pour but d’arrêter tous ceux qui lui auraient échappé et qui dans leur dispersion feraient leur retour.

Votre arrivée dans ces mers aura encore cet avantage de lui procurer un renfort considérable, dans le cas où l’ennemi, ayant été prévenu de sa mission, y aurait envoyé des forces.

Il ne peut rien être précisé sur les moyens d’opérer votre réunion avec cette première division, puisque ces opérations dépendront des temps, de la mer et de la situation des glaces.

Mais les mêmes éléments qui auront guidé sa marche devant régler la vôtre, il est probable que vous la rencontrerez facilement ou que vous vous procurerez de ses nouvelles.

Si vous vous réunissez au capitaine Leduc, la division qu’il commande se trouvera sous vos ordres, et alors vous donnerez à la destruction des pêcheurs une extension proportionnée à celle de vos forces. En conséquence, vous partagerez la division en autant de parties que vous le jugerez convenable pour le plus grand et le plus prompt succès de vos opérations.

Il ne sera pas inutile d’établir, au commencement du mois d’août, deux bâtiments en croisière sur le parallèle et à peu de distance du cap Nord , en Laponie, pour intercepter les bâtiments anglais et russes qui, vers cette époque font leur retour de la mer Blanche.

Lorsque vous jugerez à propos de quitter les mers du Nord, vous partagerez votre division de manière à occuper successivement les différents points de croisière qui sont indiqués dans nos instructions au capitaine Leduc. Vous donnerez aux divers bâtiments tels points de réunion que vous jugerez convenables. Vous les tiendrez réunis autant que vous le voudrez , et vous pourrez aussi détacher définitivement le capitaine Leduc avec sa division pour se porter dans des parages opposés à ceux que vous parcourrez vous-même. Vous lui recommanderez de ne s’y maintenir que le temps opportun pour que l’ennemi n’ait pas celui de s’y joindre, et de les quitter sous toutes voiles pour se rendre à de grandes distances dès qu’il se croira découvert.

Cette partie de votre mission dépend encore des événements qui vous seront survenus dans votre campagne, de l’état de nos bâtiments et de vos vivres; et nous en subordonnons l’objet à votre discernement et votre expérience.

Vous suivrez à l’égard des prisonniers la même mesure qui est prescrite au capitaine de frégate Leduc, soit qu’il s’agisse de les expédier en parlementaires, soit que vous croyiez devoir les débarquer sur les côtes voisines.

En même temps que vous établirez deux bâtiments en croisière sur le cap Nord pour intercepter ceux qui viennent de la mer Blanche, vous pourrez revenir avec les cinq autres en croisière à l’entrée de la Baltique, pour vous emparer des bâtiments qui en sortent vers le mois de septembre.

Vous y détruirez tous les bâtiments que vous aurez peu d’espérance d’amener dans nos ports ou ceux de nos alliés. Cependant, si vous faisiez des captures qui s’élevassent à plusieurs millions et que vous eussiez un approvisionnement de vivres suffisant, vous êtes autorisé à les réunir en convoi pour les conduire aux Antilles. Ceci est laissé à votre libre disposition et au parti que vous croirez devoir prendre dans le plus grand intérêt de notre service.

Jusqu’à présent nous avons supposé que vous avez rencontré dans la mer du Nord notre division aux ordres du capitaine Leduc. Si cela n’avait pas eu lieu, vous opéreriez dans cette mer comme si ses instructions vous avaient été adressées à vous-même et à vous seul.

Mais, après une courte croisière sur le cap Farewell, vous ferez en sorte de vous retrouver à l’entrée de la Baltique dans les premiers jours de septembre, pour continuer ensuite vos opérations dans le sens de ce qui vient de vous être prescrit par les présentes instructions.

En vous les donnant, nous avons eu pour but de vous faire connaître les points principaux de l’expédition que nous avons conçue et dont nous vous chargeons supérieurement. Mais nous n’entendons pas y avoir tout prévu, et nous nous en rapportons à votre zèle, votre discernement et votre courage, sur les modifications que les circonstances pourront exiger dans leur exécution pour le plus grand intérêt de notre service.

Lorsqu’il vous sera impossible de tenir la mer plus longtemps, vous rentrerez dans celui de nos ports que vous pourrez atteindre.

Fait en notre palais des Tuileries et signé de notre main, à Paris, ce 19 février 1806.

(En marge du registre de la marine qui contient ces instructions, on lit « Annulées : ces instructions ne sont ici portées que comme projet de croisière. »)

 

Paris, 19 février 1806

INSTRUCTIONS POUR LE CAPITAINE DE FRÉGATE LEDUC

Monsieur Leduc, Capitaine de frégate, ayant résolu de porter une division de nos forces navales dans les mers du Nord pour y détruire la pêche que nos ennemis y ont faite jusqu’à ce jour avec sécurité nous avons fait choix de vous pour commander nos frégates la Syrène, la Guerrière et la Revanche, que nous destinons à cette expédition.

Les présentes instructions vous feront connaître le plan des opérations dont nous entendons vous charger.

Les frégates que nous venons de dénommer doivent être pourvues de quatre mois d’eau et sept mois de vivres. Elles mettront sous voiles, sous votre commandement, aussitôt qu’il se présentera une circonstance favorable pour leur appareillage.

Elles dirigeront leur route de manière à arriver dans les mers du Groenland et du Spitzberg vers le 20 mai.

Si votre départ a lieu à une époque qui vous laisse trop de temps pour cette traversée, vous croiserez sur les Acores, à trente lieues environ dans le nord-ouest de Corvo et Flores, jusqu’à l’époque présumée où vous devrez faire route pour le Nord, de manière à arriver vers le 20 mai sur les parages de vos opérations.

Il est bien entendu que ce point de croisière ne vous est désigné qu’autant qu’il concorderait avec la durée du temps dont vous pourrez disposer. Vous êtes le maître de le transférer partout où vous le jugerez convenable.

En vous dirigeant vers les mers du Nord, vous ferez en sorte de n’être aperçu ni des bâtiments qui naviguent aux environs des côtes d’Islande, ni des îles Feroë. Il sera donc convenable que vous passiez à mi-canal de ces îles.

On ne peut point assigner jusqu’à quelle latitude notre division devra se porter, attendu que cette navigation dépendra du plus ou moins de difficultés que lui présentera l’état de la mer et des glaces dans ces latitudes élevées.

On ne peut pas non plus désigner les méridiens qu’elle devra plus particulièrement parcourir, les circonstances précitées décidant essentiellement les points que les pêcheurs peuvent occuper.

Nos frégates, sous votre commandement, devront toujours être prêtes à combattre; mais elles s’attacheront à masquer leurs batteries et leur pavillon, de manière à n’être pas connues comme bâtiments de guerre.

Notre division évitera, autant que possible, la rencontre des bâtiments isolés, dans sa traversée; et c’est lorsqu’elle sera arrivée aussi nord qu’elle pourra parvenir, qu’elle commencera ses opérations.

Elle se divisera, pour le plus grand succès, ainsi que vous le jugerez à propos.

Elle détruira, dans sa traversée du sud au nord, tous les bâtiments anglais, suédois et russes, qu’elle ne pourra éviter.

Parvenue aux plus hautes latitudes qu’elle pourra atteindre, elle détruira, avec toute l’activité possible, les nombreux baleiniers de nos ennemis qui s’y trouvent. Elle suivra ses opérations de la même manière en redescendant vers l’Islande, et en se portant sur tous les points où ils sont réunis en plus grand nombre.

Après avoir ainsi balayé tous les parages où elle aura pu se porter, notre division pourra se partager en deux parties pour doubler l’Islande : une frégate passerait à l’ouest de cette île et du cap Nord; elle détruirait tous les pêcheurs ennemis qui se trouveront sur sa partie occidentale; en même temps les deux autres frégates passeront à l’est de la pointe de Langanes, pour doubler la partie orientale de l’Islande, opérant de la même manière.

Par ce moyen cette île sera contournée, à l’ouest par une frégate, et à l’est par deux autres; et toute la pêche de l’ennemi sur ces côtes devra être cernée et détruite. Ceci est subordonné à l’opinion que vous vous serez formée de la position de la pêche et des forces de l’ennemi.

Vous désignerez le point de réunion de la division, et vous lui donnerez d’ailleurs tel point de rendez-vous que vous jugerez convenable, en cas de séparation.

Le port de Patrecks-Fjörd, situé à la côte nord-ouest de l’Islande, par 66° 20′ de latitude, pourrait être désigné; mais on ignore la protection que des bâtiments de guerre y trouveraient, et, à moins de renseignements satisfaisants à cet égard que vous obtiendriez, il faut éviter les relâches dans les ports, dans tous les cas qui ne l’exigeront pas.

Un point de rendez-vous, pour des bâtiments en état de tenir la mer, est préférable à la voile sur des points donnés de l’Islande, parce qu’on ne peut y être ni surpris ni bloqué par l’ennemi.

Après avoir donné à vos opérations dans ces mers toute l’extension que permettront les circonstances et que comportent votre intelligence et votre dévouement pour notre service,, vous dirigerez celles ultérieures d’après la saison où vous vous trouverez avoir terminé les précédentes et les renseignements que vous vous serez procurés.

Vous pourrez vous porter sur le cap Farewell, situé par 59° 34′ de latitude, pour y intercepter les baleiniers et les navires qui sortent du détroit de Davis et de la baie d’Hudson. Pour cela vous établiriez votre croisière par échelons de quinze à seize lieues du-dit cap.

Vous ne devrez pas rester dans ces parages après le 15 août, parce qu’alors la navigation en est fermée.

De là vous vous porterez sur la côte nord-ouest d’Écosse. Vous détruirez tous les bâtiments ennemis que vous pourrez rencontrer. La majeure partie de cette côte étant sans défense, vous y ferez tous les débarquements que vous jugerez praticables, soit pour enlever des bâtiments dans des ports ou anses, soit pour insulter et détruire les faibles batteries que l’ennemi peut y avoir. Vous vous attacherez principalement à casser les tourillons des canons qui s’y trouveraient.

Vous descendrez, en opérant de la même manière et avec rapidité, sur la côte occidentale d’Irlande.

Vous ne la prolongerez pas au delà des approches du Shannon , où vous pourriez trouver les croisières de l’ennemi , et de ce point vous vous porterez en croisière sur le banc de la Grande-Sole. C’est par les 49 degrés de latitude nord, dans le parage compris entre le 22e et le 17e degré de longitude occidentale, que passent ordinairement tous les bâtiments qui, pour atterrir sur l’Angleterre, vont chercher la sonde du banc des Soles; et vous y resterez aussi longtemps que vous pourrez présumer que votre station n’y sera pas connue.

Avant de vous diriger de l’Écosse sur l’Irlande, vous aurez pu établir une croisière de quelques jours à l’entrée du canal Saint- Georges.

Du banc des Soles, si vos vivres vous le permettent, vous irez établir une nouvelle croisière entre Madère et les Acores, et tout le temps qu’il vous sera possible de passer à la mer sera employé aux diverses stations où vous jugerez pouvoir troubler le commerce de l’ennemi, avec l’attention de ne rester dans les divers parages que vous occuperez que le temps que vous présumerez n’y être pas découvert par les avis que pourraient donner les neutres et les bâtiments ennemis qui vous auraient échappé.

L’art consiste à faire subsister la guerre par les succès qu’elle procure.

Nous vous avons ordonné de détruire tous les pêcheurs qui tomberont en votre pouvoir; vous prendrez préalablement sur chacun d’eux tous les agrès, munitions, vivres et eau, qu’ils pourront vous fournir, pour vous mettre à même de prolonger le plus possible votre campagne, que nous vous autorisons à porter jusqu’à quatorze mois, si cela dépend de vous.

Quant à l’eau, il vous aura été facile de la remplacer par les glaces dans les latitudes élevées.

Dans tout le cours de votre mission, vous n’amarinerez que ceux des bâtiments de grande importance que vous aurez la probabilité d’introduire dans nos ports et ceux de nos alliés. Vous coulerez ou brûlerez tous les autres.

Vous pourrez conduire et vendre aux Canaries ceux qui, par leur richesse, mériteront d’être conservés; et, partout où vous seriez obligé de relâcher, il faut faire en sorte que les dépenses de votre relâche soient couvertes par le produit de vos prises.

Les prisonniers que vous ferez devront être réunis sur celles de vos prises que vous choisirez, et, comme leur nombre ne ferait que vous embarrasser, vous les ferez mettre à terre, dans la première partie de votre mission, sur tel point de la Laponie danoise ou de la Norvège que vous jugerez à propos. Lorsque vous descendrez dans les latitudes plus méridionales, vous pourrez les expédier en parlementaires pour l’Angleterre, dès que vous aurez touché dans un port quelconque de nos alliés. Si ces bâtiments chargés de prisonniers vous occasionnaient de trop graves embarras avant vos relâches, vous ne les expédieriez en pleine mer que sur des navires qui n’auraient point de Français à bord.

Vous êtes autorisé à employer sur notre division tous les marins étrangers qui désireront y prendre service, et à y contraindre ceux des neutres que vous trouveriez sur des bâtiments ennemis, en tant que leurs services vous paraîtront utiles.

En vous donnant les présentes instructions, nous avons eu pour but de vous faire connaître le but principal de l’expédition que nous avons conçue et dont nous vous chargeons. Il consiste à causer le plus grand préjudice à l’ennemi par la destruction de sa pêche dans les mers du Nord, et sur tous les points où vous conjecturerez ensuite pouvoir vous porter à des entreprises qui lui seront nuisibles.

Nous vous prescrivons aussi de prolonger votre croisière autant qu’il sera possible, soit par vos propres moyens, soit par ceux que vous procureront vos prises.

Lorsqu’il vous sera devenu impossible de tenir plus longtemps la mer, vous rentrerez dans celui de nos ports que vous pourrez atteindre.

Au surplus, comme nous n’entendons pas avoir tout prévu dans les présentes instructions, nous nous en rapportons à votre discernement, votre expérience et votre courage, sur les modifications que les circonstances pourront exiger, dans leur exécution, pour le plus grand intérêt de notre service.

Fait en notre palais des Tuileries, et signé de notre main, à Paris, le 19 février 1806.

 

Paris, 19 février 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je reçois votre lettre du 14. J’ai vu avec plaisir la bonne conduite des Milanais lors de votre arrivée. J’attendrai votre travail sur les domaines nationaux du pays vénitien. Ce dont je me plains relativement à l’exécution de mes ordres militaires, c’est que le 3e régiment d’infanterie légère ne soit pas encore arrivé à Parme. La mesure de la levée des gardes nationales aura coûté de l’argent, aura été une raison de désordre, et ne pouvait rien produire de bon; fallait-il tout au plus demander au duché de Parme un bataillon au lieu de 12,000 hommes. Ce sont des choses passées; je ne vous en parle que pour l’expérience de l’avenir; il faut marcher un peu doucement.

 

Paris, 20 février 1806

NOTES POUR LE MINISTRE DE L’INTÉRIEUR, DICTÉES EN SÉANCE DU CONSEIL D’ÉTAT.

l° Le ministre de l’intérieur présentera un projet de décret pour arrêter définitivement le plan de la place du Panthéon. Cette place embrassera l’espace tracé en ligne rouge sur la plan qui a été dressé. Elle doit être faite dans trois ans, afin qu’elle se trouve terminée lorsque la nouvelle destination du Panthéon sera en activité.

2° On assure que la cour de cassation n’est pas établie d’une manière convenable au Palais de Justice. Sa Majesté désire que le ministre de l’intérieur prenne connaissance de l’établissement actuel et des moyens à adopter pour l’améliorer, soit en transportant le tribunal criminel au Temple et la prison d’État à Vincennes, soit de toute autre manière.

Le ministre visitera en même temps la maison du dépôt existant à la préfecture de police, pour en rendre compte à Sa Majesté, dont l’intention est que ce lieu, où les personnes même les plus innocentes peuvent se trouver conduites, soit tel que, du moins, on n’y éprouve aucune privation.

  1. Bigot de Préameneu, Regnaud et Cretet ayant déjà été chargés de l’exécution des intentions de Sa Majesté, le ministre trouvera convenable de se faire accompagner par eux.

 

Paris, 20 février 1806

OBSERVATIONS SUR LE BUDGET DE LA VILLE DE PARIS, DICTÉE EN CONSEIL D’ADMINISTRATION

Les différents articles de dépenses proposés pour 1806 ayant été mis successivement en discussion, Sa Majesté prescrit les dispositions et les réductions suivantes :

TITRE 1er

PREMIÈRE SECTION

DÉPENSES MUNICIPALES ORDINAIRES

CHAPITRE Ier – PRÉFECTURE, MAIRIE CENTRALE

Les dépenses de ce chapitre montant à 70,500 francs sont allouées.

CHAPITRE II. – MAIRIES D’ARRONDISSEMENT

ARTICLE ler- Loyer de bâtiments : 37,960 francs 70 centimes. Cette dépense est allouée pour cette année; mais Sa Majesté désire que le ministre de l’ intérieur présente un projet pour que les  mairies soient établies dans des bâtiments appartenant à la commune, soit bâtiments nationaux, soit maisons des hôpitaux.

Les autres dépenses sont allouées.

CHAPITRE III. – RÉPARTITION ET CONTENTIEUX DES CONTRIBUTIONS

Ce chapitre, dont les demandes s’élèvent 159,783 francs 31 centimes, n’est alloué que pour 140,000 francs.

Les demandes des chapitres IV, V et VI sont allouées.

CHAPITRE VII – INSTRUCTION PUBLIQUE.

La demande pour ce chapitre est de 76,290 francs.

La somme allouée est réduite à 55,000 francs.

CHAPITRE VIII. – GARDE MUNICIPALE.

Les demandes de ce chapitre s’élèvent à la somme de 1,920,890 francs. Cette dépense est allouée pour 1,500,000 francs.

Sa Majesté charge M. Lacuée de lui présenter un projet de décret pour établir que la commune ne doit payer que des masses à la garde municipale, et de décharger les maires de Paris de l’obligation de passer les revues, qui seront faites désormais par M. Chadelas, inspecteur aux revues de la garde impériale, désigné à cet effet par Sa Majesté.

  1. Lacuée est chargé de prendre connaissance de ce qui concerne les 73 adjudants de place dont la solde est portée pour une somme de 168,298 francs, et d’examiner, 1° s’ils ont des brevets de l’Empereur; 2° si, en exécution des décrets, ils ne devraient pas être réduits à 24, à mesure des vacances; 3° si, des vacances ayant eu lieu, on a néanmoins procédé au remplacement.
  2. Chadelas vérifiera si ces officiers ont été payés suivant les règles de la comptabilité. Dans le cas où les payements auraient été faits irrégulièrement, ils ne seraient pas passés en compte au receveur général payeur et demeureraient à sa charge.

CHAPITRE IX. – OUVRIERS POMPIERS.

Les demandes s’élèvent à 347,346 francs.

Cette dépense n’est allouée que pour la somme de 240,000 francs.

CHAPITRE X. – GRANDE VOIRIE.

Les demandes s’élèvent à 103,885 francs.

Cette dépense n’est allouée que pour la somme de 60,000 francs. Dans les sommes demandées se trouve, article 4, celle de 50,000 francs pour indemnités de retranchements de terrains cédés par suite d’alignement.

  1. Regnaud ayant fait des observations contre la décision qui autorise ces indemnités, Sa Majesté le charge de lui faire un rapport particulier sur cet objet.

CHAPITRE XI. – DIRECTION DES TRAVAUX PUBLICS.

La somme demandée pour ce chapitre est allouée.

CHAPITRE XII. – TRAVAUX D’ARCHITECTURE.

Les demandes pour ce chapitre s’élèvent à 128,350 francs.

Cette dépense n’est allouée que pour la somme de 80,000 francs.

CHAPITRE XIII. – CARRIÈRES.

La dépense de ce chapitre est allouée.

CHAPITRE XIV. – TRAVAUX HYDRAULIQUES.

La demande pour ce chapitre est de 42,500 francs.

Elle n’est allouée que pour 36,000 francs.

A l’occasion de ce chapitre, on remarque qu’il y a deux divisions de travaux hydrauliques. Sa Majesté charge le ministre de l’intérieur de lui proposer, pour l’an 1807, la réunion de ces deux divisions.

CHAPITRE XV. – CULTES.

La demande pour ce chapitre est de 138,033 francs.

Elle n’est allouée que pour 120,000 francs.

Les demandes pour les chapitres XVI et XVII sont allouées.

CHAPITRE XVIII. – COMPAGNIES DE RÉSERVE.

Les demandes pour ce chapitre s’élèvent à 110,966 francs.

La dépense n’est allouée que pour 80,000 francs.

CHAPITRE XIX. – CONTRIBUTION FONCIÈRE DES PROPRIÉTÉS COMMUNALES.

Cet article de dépense, montant à 14,750 francs, est supprimé.

DEUXIÈME SECTION.
DÉPENSES EXTRAORDINAIRES.

CHAPITRE 1-. – DÉFICIT OU DÉPENSES ARRIÉRÉES ANTÉRIEURES A L’AN XIV.

Ce chapitre s’élève à 694,885 francs.

Cette dépense est ajournée jusqu’après vérification de la comptabilité arriérée.

Les demandes pour les chapitres II, III , IV et V sont allouées.

CHAPITRE VI. – GARDE MUNICIPALE.

Les demandes pour ce chapitre s’élèvent à 227,757 francs.

Cette dépense n’est allouée que pour 150,000 francs.

CHAPITRE VII. – POMPIERS, ACHAT D’USTENSILES.

Cette dépense, portée à 50,000 francs, n’est allouée que pour 30,000 francs.

CHAPITRE VIII. – ACQUISITIONS DE TERRAINS CÉDÉS A LA VOIE PUBLIQUE.

Cette dépense est allouée.

CHAPITRE IX. – ACQUISITIONS DE TERRAINS POUR ÉTABLISSEMENTS PUBLICS.

Les demandes s’élèvent à 337,726 francs.

Cette dépense n’est allouée que pour 300,000 francs.

CHAPITRE X. – MONUMENTS.

Cette dépense, montant à 100,000 francs, n’est point allouée. Dans le projet de décret qui sera présenté par le ministre de l’intérieur pour ordonner l’agrandissement de la place située au bas du pont au Change, on accordera à la ville le produit de la démolition du grand Châtelet.

CHAPITRE XI. – GROSSES RÉPARATIONS DE PLUSIEURS ÉTABLISSEMENTS PUBLICS, COMMUNAUX.

Cette dépense est portée à 674,342 francs.

Elle n’est allouée que pour 400,000 francs.

CHAPITRE XII. – GROSSES RÉPARATIONS DES ÉTABLISSEMENTS HYDRAULIQUES.

La demande, qui s’élève à 25,000 francs, est allouée.

CHAPITRE XIII. – CANAL DE L’OURCQ.

Cette dépense est allouée.

CHAPITRE XIV. – CULTES.

Cette dépense, qui s’élève à 200,000 francs, n’est allouée que pour 80,000 francs.

CHAPITRE XV. – FÊTES PUBLIQUES.

Cette dépense, qui est portée à 300,000 francs, n’est allouée que pour 150,000 francs.

CHAPITRE XVI. – DÉPENSES DIVERSES.

Cette dépense, montant à 842,895 francs, est allouée.

CHAPITRE XVII. – DÉPENSES IMPRÉVUES.

Cette dépense, montant à 300,000 francs, est allouée.

CHAPITRE XVIII. – COMPAGNIES DE RÉSERVE.

Cette dépense, montant à 78,625 francs, est allouée.

TITRE II.

DÉPENSES DES HOSPICES.

Dépenses des hospices montant à 4,741,022 francs.

Cette dépense est allouée.

TITRE III.

PRÉFECTURF DE POLICE.

La demande s’élève à 2,501,629 francs. Elle est allouée pour 2,400,000 francs.

Les différents articles des dépenses pour l’année 1806 ayant été ainsi arrêtés, Sa Majesté ordonne que le budget définitif, réglé d’après ces bases, sera présenté dans un conseil d’administration qui se tiendra jeudi 27 février.

 

Paris, 20 février 1806

ORDRES CONCERNANT L’INSTRUCTION PUBLIQUE, DICTÉS EN CONSEIL D’ADMINISTRATION

  1. le conseiller d’État Fourcroy, chargé de la direction de l’instruction publique, fait un rapport général sur les établissements d’instruction publique, et des rapports particuliers sur les écoles primaires et secondaires, le lycée, le Prytanée militaire français, le Collège de France, les écoles de droit et le Conservatoire de musique.

Lycées. Sa Majesté ordonne qu’il lui soit présenté un projet de décret pour l’établissement, dans le courant de 1806, des lycées de Pau, de Cahors, de Rodez, de Liège et de Clermont.

Prytanée militaire. Sa Majesté désire que le ministre de l’intérieur lui présente un état des revenus dont jouissait le Prytanée, et un projet de décret pour en ordonner le remplacement.

Elle invite le ministre directeur de la guerre à nommer, dans la semaine, les différents officiers qui doivent être employés dans ce lycée pour la police et l’instruction militaire des élèves.

Écoles de droit. Sa Majesté charge le ministre de l’intérieur d’écrire au directeur de l’école de droit de Paris qu’il est revenu à l’Empereur que récole accorde trop facilement des diplômes pour les différents grades, et qu’ainsi le bien que Fou se promettait de ces établissements se trouve considérablement atténué; que Sa Majesté espère que le directeur prendra des mesures pour qu’il ne parvienne désormais que des rapports favorables sur l’école de droit de Paris, qui ne peut obtenir de véritables succès que par une réputation sans tache.

Sa Majesté désire en même temps que le ministre lui présente un projet de décret,

1° Pour ordonner que les fonds libres de l’école de droit de Paris seront placés sur le grand-livre de la dette publique et sous le nom de récole de droit;

2° Que le produit de ces fonds sera consacré à la formation d’un pensionnat qui sera établi à l’école d’Harcourt, ou dans tout autre lieu convenable, et où seront admis des pensionnaires dont les pensions seront acquittées sur ces rentes; que ces pensions, accordées par l’Empereur, le seront par moitié aux élèves des lycées qui les obtiendront au concours, et aux fils de présidents, procureurs généraux et juges des cours d’appel et criminelles, des présidents et procureurs impériaux des tribunaux de première instance.

Conservatoire de musique. Sa Majesté désire que le ministre lui présente :

1° La proposition d’augmenter récole de déclamation;

2°, Un projet pour rétablissement d’un pensionnat.

  1. Lacuée fait un rapport sur la situation de l’école polytechnique; il demande,

1° Que le collège de Boncour soit réuni au Prytanée, ainsi que les maisons qui ont du jour sur cet établissement, et qui y sont, pour ainsi dire, enclavées;

2° Qu’il soit établi à l’école un cours de langue et de littérature françaises.

Sa Majesté charge le ministre de lui faire un rapport sur ces différents objets.

  1. Lacuée demande que le restant du crédit pour premier établissement, montant à 22,597 francs, soit acquitté par le ministre de la guerre.

Sa Majesté décide que ce restant de crédit sera acquitté, et qu’à l’avenir toutes les dépenses de l’école polytechnique seront ordonnancées par le seul ministère de l’intérieur. Le ministre est invité à lui présenter un projet de décret à cet égard.

  1. Lacuée demande ensuite que les officiers qui ne sont pas encore nommés le soient sans délai, et que deux adjudants sous-officiers de plus soient attachés à l’école.

Ces demandes sont agréées : les choix seront faits parmi les officiers et sous-officiers de la garde impériale.

Sa Majesté invite le ministre de l’intérieur à lui faire un rapport sur l’école de médecine, l’école vétérinaire, les écoles d’arts et métiers de Compiègne, de Trèves et de Beaupreau, et sur toutes autres écoles spéciales, ainsi que sur le projet proposé d’établir chez les sieurs Lenoir et Fortin des élèves pour la fabrication des instruments de précision.

Sa Majesté ordonne que tous les rapports et projets de décrets demandés lui seront présentés dans la séance du conseil d’administration qui se tiendra samedi prochain ler mars 1806.

 

Paris, 20 février 1806

A M. Cretet

Mon intention est qu’on commence au mois de juin à construire un pont vis-à-vis l’École militaire.

Faites-moi connaître si la société qui a déjà eu le privilège de deux premiers ponts veut se charger de la construction de ce troisième. Quand bien même elle ne s’en chargerait pas, proposez-moi un décret pour l’octroi. J’accorderai des fonds en attendant que l’octroi soit cédé à quelque compagnie. Cela est important, pour que le roulage qui vient d’Orléans n’entre pas dans Paris. Cela d’ailleurs complète l’entourage de Paris.

Il me paraît qu’on est content des ponts en fer; on pourrait faire celui-ci d’après le même système. Faites ce qui est nécessaire pou pousser, cette année, autant que possible, les travaux.

 

Paris, 21 février 1806

DÉCISION

Le ministre de la police propose à l’Empereur de lever dans les département de l’ouest, parmi les anciens chouans et autres hommes sans état, un corps auquel on donnerait le nom de Chasseurs impériaux de l’Ouest. On verrait avec plaisir dans le pays l’éloignement de ces individus.Il me semble que le corps corps de la Tour d’Auvergne devait remplir ce but. Il faudrait d’abord envoyer tous ces hommes à ce corps. S’il ne remplissait pas ce but, le ministre me fera connaître par quelle raison.

 

Paris, 21 février 1806

A l’Électeur de Bade

Les envoyés de Votre Altesse Électorale m’ont remis sa lettre. Je leur ai témoigné sur-le-champ le plaisir que j’éprouvais de la commission dont vous les aviez chargés. Je me suis empressé de munir de mes pleins pouvoirs mon grand maréchal du palais, le général Duroc, qui m’apprend à l’instant qu’il a signé le contrat du prince électoral avec ma fille. Les sentiments que je porte au prince Charles changeront de nature, mais ne seront pas plus vrais que ceux que je lui ai voués depuis que je le connais et que le vieil attachement que j’ai pour vous et votre famille. Que Votre Altesse se repose avec confiance dans mon estime, mon amitié et ma constante protection pour elle et sa Maison.

 

Paris, 21 février 1806

A la Margrave de Bade

Madame ma Cousine, la lettre de Votre Altesse, du 3 février, m’a été très-agréable. L’assurance de vos sentiments d’amitié m’est chère au pair du cas que je fais de sa personne. J’ai aimé le prince Charles lorsque aucun lien ne m’attachait à lui : aujourd’hui qu’il épouse ma fille, il trouvera en moi une tendresse qui ne cédera qu’à celle que vous lui portez. Je me flatte que vous avez les mêmes sentiments pour ma fille, et que vous ne doutez pas de mon désir de trouver des circonstances de vous être agréable; car vous ne sauriez douter de mon estime et de ma sincère amitié. J’ai estimé Votre Altesse pour ses grandes qualités avant de la connaître; depuis que je l’ai connue, et dans les nouvelles circonstances qui vont unir nos enfants, elle peut compter sur moi comme sur une des personnes les plus désireuses de lui plaire.

 

Paris 21 février 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, vous trouverez ci-joint une déclaration faite par le général Solignac. Vous écrirez au receveur pour que le maréchal Masséna fasse verser les deux millions qu’il a reçus dans la caisse des contributions. Écrivez en même temps à ce maréchal qu’il ne doit point se dissimuler que les gouvernements provisoires ne pouvaient lui faire d dons qu’au détriment de l’armée; qu’il ne peut faire ainsi tort à ses camarades; qu’il est plus honorable pour lui de recevoir de l’Empereur sa part des gratifications comme un témoignage de sa satisfaction pour les services qu’il a rendus, et qu’il faut que les noms des officiers auxquels il a donné des gratifications soient envoyés.

 

Paris, 21 février 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je reçois votre lettre du 15, à deux heures du matin, avec la lettre du général Molitor, datée de Fiume. J’approuve l’envoi d’un régiment au général Molitor; mais il n’y a rien de plus absurde que la nouvelle qu’il a reçue. Les Serviens sont attaqués en ce moment par les Turcs du côté de Belgrade, et ils ont autre chose à faire que de se battre contre nous. Ils sont d’ailleurs bien éloignés de ce projet. Au surplus l’absurdité d’un pareil bruit n’étonne pas. Les Francs sont à Raguse, comme en Égypte, ignorants, bêtes et vils. Cependant il n’y aurait rien d’impossible que les Russes pensassent à nous enlever la Dalmatie. Ils pourraient le faire avec 6,000 hommes; mais il leur faut des ordres de leur cour, et je ne pense pas qu’ils soient eu mesure pour cet objet. Du reste c’est pour protéger la division de Dalmatie que je vous ai ordonné de laisser le corps du général Marmont dans le Frioul, organisé et prêt à se porter partout où il sera nécessaire.

La corbeille de la princesse Auguste part demain pour Milan; elle est très-belle. Je lui envoie en même temps une bibliothèque de livres choisis. Le prince Royal, son frère, est ici depuis quinze jours; je le fais chasser trois fois par semaine avec moi, ce qui lui donne l’habitude du cheval. Caffarelli est resté malade à Vienne; il n’est pas encore tout à fait rétabli; du moment qu’il le sera, je vous l’enverrai.