Correspondance de Napoléon – Février 1804
La Malmaison, 13 février 1804, 5 heures.
Au citoyen Réal
Citoyen Réal, Conseiller d’État, je vous envoie la lettre du général Savary. Renvoyez-la au général Moncey, avec la lettre ci-jointe, par laquelle je lui donne l’ordre de faire partir sur-le-champ, en poste, un officier et deux brigades de la légion de gendarmerie d’élite pour Gournay, un officier et deux brigades pour Forges, un officier et 30 gendarmes à cheval pour se rendre en toute hâte à Lyons.
Je donne ordre également qu’on fasse partir 50 dragons et un officier de Beauvais pour Gournay, où ils se rendront à marches forcées.
Je donne ordre également que l’on fasse partir 50 hommes à cheval pour Vernon, 50 pour Limay et 50 pour Meulan.
Ces détachements sont destinés à prêter main-forte à la gendarmerie et à se porter à la rencontre des brigands dans les bois, ou le long de la Seine, pour les saisir au moment où ils voudraient la passer.
Je serai ce soir, à dix heures, aux Tuileries.
Ci-joint des renseignements qui peuvent avoir des conséquences.
La Malmaison, 13 février 1804
Au général Moncey
Vous ferez partir sur-le-champ, en poste, un officier et deux brigades de la gendarmerie d’élite pour Gournay, un officier et deux brigades pour Forges, un officier et 30 gendarmes à cheval pour se rendre en toute hâte à Lyons.
J’envoie l’ordre à Beauvais d’en faire partir 50 dragons et un officier pour Gournay, où ils se rendront à marches forcées.
Je donne ordre également que l’on fasse partir 50 hommes à cheval pour Vernon, 50 pour Limay et 50 pour Meulan.
Ces détachements sont destinés à prêter main-forte à la gendarmerie et à se porter avec elle à la rencontre des brigands.
Je serai ce soir, à dix heures, aux Tuileries.
La Malmaison, 13 février 1804
Au général Moncey
Citoyen Général Moncey, Premier Inspecteur général de la gendarmerie, par la lettre ci-jointe du général Savary, vous verrez qu’on a vu dans les forêts de Lyons, de Gournay et de Neufchâtel, des bandes de brigands. Faites partir sur-le-champ en poste, de manière qu’ils y arrivent avant la journée de demain, un officier et deux brigades de la légion d’élite, qui se rendront à Gournay, un autre officier et deux brigades, qui se rendront à Forges. Ils prendront les mesures convenables pour se procurer des chevaux de réquisition à la journée. Vous donnerez aux officiers l’argent et les autorisations nécessaires.
Faites partir dans la nuit un officier et 30 gendarmes à cheval, qui se rendront en toute hâte à Lyons. J’ai donné l’ordre au ministre de la guerre de faire partir de Beauvais un officier et 50 dragons pour Gournay.
Prévenez de nouveau le capitaine de gendarmerie de l’Eure et le général du département qu’il paraît que les brigands fileront de forêt en forêt pour traverser la Seine et se jeter dans le département de l’Eure, et qu’ils erreront dans les forêts de Lyons, Gournay et Forges.
Le chef d’escadron de gendarmerie Lacour aura sans doute été prévenu par Savary, et aura pu se mettre en mouvement avec les 100 dragons sous ses ordres.
La Malmaison, 13 février 1804
Au général Moncey
Citoyen Général Moncey, Premier Inspecteur général de la gendarmerie, je reçois votre lettre. Je vous ai écrit à six heures pour ordonner le départ de deux détachements de la gendarmerie d’élite chacun composé d’un officier et deux brigades, pour se rendre en poste à Forges et Gournay, ainsi que le départ de 30 gendarmes pou se rendre sur leurs chevaux à Lyons.
Faites partir, dans la nuit, en poste, 20 gendarmes d’élite à pied, qui se rendront à Dieppe. Vous prendrez, à cet effet, deux diligences.
Apportez-moi ce soir, à dix heures, aux Tuileries, la note de toute la gendarmerie qui a été envoyée, afin que je désigne plusieurs officiers supérieurs pour coordonner ces mouvements. Je vous ai écrit d’écrire dans l’Eure. Certainement ils chercheront à traverser l’Eure pour se jeter dans l’Orne. Il y a là un général zélé qui a quelque troupes; qu’il les forme en colonnes pour se concerter avec la gendarmerie, et se mette en correspondance avec les piquets qui peuvent se trouver sur la rive droite de la Seine. Envoyez à Rouen 10 gendarmes d’élite et un officier pour aider la gendarmerie dans cette ville.
La Malmaison, 13 février 1804
Au général Berthier
Donnez ordre, Citoyen Ministre, par un courrier extraordinaire qu’un officier et 50 hommes du dépôt du 14e régiment de dragons qui doit être à Beauvais, se rendent à Gournay à marches forcée d’où ils se mettront à la poursuite, d’une bande de brigands qui se trouve entre Gournay et Forges, et donneront main-forte à la gendarmerie.
Avant de donner cet ordre, vérifiez si ce dépôt est arrivé à Beauvais. Le général Lucotte veillera à ce que ce détachement ne manque de rien.
Écrivez au général commandant à Rouen de tenir un fort poste cavalerie à Pont-de-l’Arche, qui puisse se porter le long de la rivière de la Seine si les brigands tentaient de la passer, ou dans les bois à leur rencontre, et donner main-forte à la gendarmerie.
Donnez ordre au gouverneur de Paris de faire partir 50 hommes à cheval pour Vernon, 50 pour Limay et 50 pour Meulan.
Ces détachements de cavalerie prêteront main-forte à la gendarmerie, soit pour marcher à la rencontre des brigands qui sont dans les forêts de Gournay, soit pour les saisir au moment où ils voudraient passer la Seine.
Prévenez le général Moncey de ces mouvements.
La Malmaison, 13 février 1804, 8 heures du soir.
Au général Soult, commandant le camp de Saint-Omer
Nous sommes depuis huit jours à la poursuite de 40 brigands, composés de Georges et de sa bande, qui ont débarqué, en trois fois différentes, entre le Tréport et Dieppe.
Une troisième bande doit débarquer, composée de 20; comme nous en avons arrêté tous les hommes qui doivent leur faire des signaux, Savary les attend à Biville.
Il est cependant nécessaire que vous doubliez les postes sur la côte, afin que, s’il arrivait, ce que je ne pense pas, qu’ils ne pussent pas débarquer, à cause des vents, aux points où on les attend, qu’ils ne débarquassent pas sur les côtes de votre année.
Faites arrêter sur-le-champ les matelots et équipages du pêcheur qui a communiqué avec les Anglais; je me reproche d’avoir négligé, dans le temps, de le faire arrêter.
…………………………………. (ligne illisible)
…………………………………. (ligne illisible)
Faites arrêter l’agent que le nommé (illisible) avait, de son propre mouvement, envoyé à Boulogne.
Ayez une conférence secrète avec le maire et autres; tous ceux que, dans le fond de leur conscience, ils croient avoir des conférences avec l’Angleterre, faites-les arrêter sur-le-champ.
Plus de treize de ces premiers brigands sont arrêtés; une bande est dans les forêts de Gournay, d’Eu, de Forges et de Lyons. Enfin ce misérable Pichegru est venu avec Georges et ses brigands dans Paris; nous savons où ils ont couché dimanche. Des dépositions d’hommes arrêtés compromettent même des généraux aujourd’hui plus marquants. Si cela se confirme, j’en ferai bonne justice.
J’ai cru devoir vous faire connaître sur-le-champ les premiers soupçons, afin que cela puisse vous mettre sur les traces de quelque intrigue que ce soit, s’il y en a dans votre armée.
N’ayant pas le temps d’écrire à Davout, faites-lui passer ces mêmes renseignements.
A l’obscurité qui règne dans une des parties de ma dépêche, vous devez sentir que je ne tiens pas encore à cette dernière partie pour prononcer.
La police me fait espérer que, dans la fin de cette journée, elle aura Lajolais, Pichegru et Georges.
Paris, 14 février 1804
Au général Davout, commandant le camp de bruges
Citoyen Général Davout, je donne ordre au général Ver Huell de faire partir pour Ostende la première partie de la flottille batave. Dès l’instant qu’elle sera arrivée, vous y ferez fournir les garnisons par les corps qui sont désignés dans l’instruction que je vous ai envoyée. Les corvettes de pêche doivent avoir eu l’ordre de partir pour Dunkerque. Une partie de vos écuries devrait être aussi rendue à Boulogne ou à Calais. Toutefois, voilà déjà deux divisions de votre armée dont les moyens d’embarquement sont assurés. Il me semble qu’une seconde partie de la flottille batave pourra aussi bientôt partir. Il paraît que Dunkerque a besoin de garnisons. Les garnisons qui débarqueront de la première partie de la flottille batave seront envoyées sur-le-champ à Dunkerque. Il ne doit être mis aucun soldat sur bâtiments de transport. Ces soldats ne peuvent rien ajouter à la défense de ces bâtiments, et, s’il arrive que les événements de mer font tomber au pouvoir de l’ennemi, c’est ajouter à ce malheur la perte de plusieurs braves gens.
Nous avons découvert ici une trame ourdie avec beaucoup mystère. Georges et une trentaine de brigands de sa bande était cachés à Paris depuis plusieurs mois. Pichegru était avec eux de quinze jours. Une partie est arrêtée; on est à la poursuite de l’autre partie. Leur ligne de communication de Paris au Tréport est saisie et il y a quelque probabilité d’avoir dans les mains Pichegru et Georges. D’autres individus sont évidemment compromis. J’attends que cela s’éclaircisse davantage pour en faire une sévère justice. On m’assure qu’il y a dans votre armée quelques officiers du 11e régiment de chasseurs qui nourrissent des sentiments de faction. Il y en a qui prétendent même que le colonel est un homme sur lequel le Gouvernement ne doit pas exclusivement compter.
Paris, 15 février 1804
Au citoyen Régnier
Il est nécessaire, Citoyen Ministre, en même temps que vous ferez arrêter le général Moreau, de faire mettre les scellés sur ses papiers, tant à Paris qu’à Grobois, afin de faire procéder à leur dépouillement.
Paris, 15 février 1804
Au citoyen Lavalette
Citoyen Lavallette, Commissaire du Gouvernement près les postes, on m’assure qu’un des directeurs de la poste recevait les lettres du général Moreau. Arrêtez ses paquets et faites-les ouvrir pour en tirer les lettres adressées à ce général, qui, à l’heure qu’il est, doit être arrêté.
Paris, 15 février 1804
Au contre-amiral Ver Huell, commandant la flottille batave
Monsieur le Contre-Amiral Ver Huell, vous partirez au premier temps favorable avec la première partie de votre flottille, et vous vous rendrez à Ostende. Là, vous mettrez la flottille sous les ordres d’un capitaine de vaisseau qui ait votre confiance, et vous retournerez à Flessingue pour organiser la seconde partie. Faites-moi connaître quand elle sera prête.
Les garnisons de la première partie de la flottille seront mises en règle à Ostende, et elle se chargera des vivres qu’on doit y mettre pour la traversée. On fera faire aussi là l’arrimage, de la manière conforme à l’instruction. En cas que le ministre de la marine ne vous l’ait pas envoyée, j’en joins ici un exemplaire.
Je désirerais bien que la seconde partie pût ne pas tarder à partir.
Paris, 16 février 1804
Au citoyen Régnier
Je désire, Citoyen Grand Juge, que vous lanciez un mandat d’arrêt contre le général Souham (Joseph Souham, 1760-1837. Ses relations amicales avec Moreau vont le conduire, pour 40 jours, à l’Abbaye. Mais l’Histoire retiendra de lui sa défection à Essonnes, en 1814) et contre le général Liébert (Jean-Jacques Liébert, 1758-1814. Il va être arrêté comme complice de Moreau, puis relâché. Il sera gouverneur de stettin en 1809), comme prévenus de conspiration contre l’État avec les généraux Moreau, Pichegru et le brigand Georges. (Moreau a été arrêté le 15 février)
Vous voudrez bien lancer un mandat d’amener contre madame Souham.
Arrivés à Paris, vous les ferez mettre au secret et interroger sur leurs relations avec le général Moreau et Pichegru, et particulièrement sur ce qui a été tramé à leur dernier voyage et sur les papiers trouvés sur l’agent David.
Le général Moncey chargera un officier de gendarmerie de toute ces arrestations. On fera mettre les scellés sur les papiers.
Un officier de gendarmerie se rendra chez le ministre de la guerre qui lui remettra des ordres qui leur feront connaître qu’ils cessent de commander les divisions militaires là ils sont employés; que dans une heure de la réception de l’ordre, ils cesseront de commander, et qu’ils remettront le commandement au plus ancien général de brigade, qui conservera ce commandement jusqu’à ce que les généraux de division qui remplaceront les généraux Souham et Liébert soient arrivés.
Paris, 16 février 1804
Au citoyen Régnier
Faites partir demain, Citoyen Ministre, madame Damas (Épouse du général Damas, impliqué au moment de l’arrestation de Moreau. Murat le fera libérer et passer au service du duché de Berg) pour se rendre dans une petite commune à son choix, à trente ou quarante lieues de Paris, en Bourgogne ou en Lorraine, où elle restera en surveillance.
Paris, 16 février 1804
RÉPONSE DU PREMIER CONSUL AU GÉNÉRAL DE BRIGADE CÉSAR BERTHIER
Le Premier Consul, après avoir remercié l’orateur des sentiments qu’il venait de lui exprimer au nom de l’état-major de la division militaire de Paris, a dit,
« Que les soldats de la République, qui avaient reçu du Peuple français l’honorable mission de le défendre contre ses ennemis, mission dont les armées s’étaient acquittées avec autant de gloire que de bonheur, avaient plus de droit que les autres citoyens de s’indigner des trames que notre plus cruel ennemi avait formées jusqu’au sein qu’au sein de la capitale; que, quels que soient les services rendus par des citoyens, ils n’en sont que plus coupables, lorsqu’ils oublient leurs devoirs envers leur patrie, et qu’ils ourdissent contre elle des trames criminelles; que les circonstances actuelles offriront à la postérité deux inconcevables exemples: qu’il a été trois jours sans pouvoir croire à des trames aussi noires qu’insensées, mais qu’il avait été forcé de se rendre à l’évidence des faits et de ne plus arrêter la marche de la justice; que jamais, sous son gouvernement, des hommes quels qu’ils soient, quels que soient les services qu’ils aient rendus, ne fausseront leurs serments et ne pratiqueront impunément des liaisons avec les ennemis de la France; mais que, dans les circonstances actuelles, l’union de tous les Français était un spectacle consolant pour son cœur; que ce n’était pas à eux qu’il avait besoin de répéter que ces attentats, si souvent renouvelés contre sa personne, ne pourront rien, n’eût-il autour de lui que le corps le moins nombreux de l’armée.
Paris, 16 février 1804
Au citoyen Cretet, directeur des ponts et chaussées
Citoyen Cretet, Conseiller d’État, je désirerais connaître ce qu’il y a de fait de la route qui traverse la Corse, d’Ajaccio à Bastia, depuis vendémiaire an XII; ce qu’on compte y dépenser dans l’an XII, et ce qu’il faut faire encore pour qu’une voiture puisse, sans dételer, se rendre de l’une à l’autre de ces villes.
Je désire également que vous donniez l’ordre de travailler cette année à rendre très-praticables pour les voitures les routes depuis le mouillage des Sanguinaires, golfe d’Ajaccio, jusqu’à la ville, et depuis Ajaccio jusqu’au petit port de Provenzale; enfin qu’on travaille pour achever le pont d’Ucciani, et qu’on fasse le devis et projet de deux ponts en bois les plus économiques possible sur les rivières de Liamone et Gravone, de manière que les routes d’Ajaccio à Vico et de Vico à Sartène ne soient jamais interceptées par le débordement de ces deux rivières.
Paris, 18 février 1804
RÉPONSE DU PREMIER CONSUL AU VICE-PRÉSIDENT DU SÉNAT
Depuis le jour où je suis arrivé à la suprême magistrature, un grand nombre de complots ont été formés contre ma vie. Nourri dans les camps, je n’ai jamais mis aucune importance à des dangers qui ne m’inspirent aucune crainte.
Mais je ne puis me défendre d’un sentiment profond et pénible, lorsque je songe dans quelle situation se trouverait aujourd’hui ce grand peuple, si le dernier attentat avait pu réussir; car c’est principalement contre la gloire et la liberté et les destinées du peuple français que l’on a conspiré.
J’ai, depuis longtemps, renoncé aux douceurs de la condition privée; tous mes moments, ma vie entière sont employés à remplir les devoirs que mes destinées et le Peuple français m’ont imposés.
Le Ciel veillera sur la France et déjouera les complots des méchants.
Les citoyens doivent être sans alarmes : ma vie durera tant quelle sera nécessaire à la nation . Mais ce que je veux que le Peuple français sache bien, c’est que l’existence sans sa confiance et sans son amour serait pour moi sans consolation et n’aurait plus aucun but.
Paris, 18 février 1804
Au citoyen Régnier, Grand-Juge, ministre de la justice
Il faut dépayser la femme Pocheton, tenant auberge au Mans, et faire tenir son auberge par une personne sûre.
Paris, 19 février 1804
DÉCISION
Le ministre de la guerre transmet des propositions faites par le chevalier d’Hervas, au nom du gouvernement toscan, sur le séjour des troupes françaises dans ce royaume. | Le citoyen Talleyrand répondra qu’il faut que la reine d’Étrurie paye la solde du peu de troupes qui sont en Toscane; que la ville de Livourne soit en état de siège; que ces mesures sont fondées sur ce que l’Angleterre n’a point reconnu le royaume d’Étrurie. |
Paris, 19 février 1804
Au général Soult, commandant le camp de Saint-Omer
Citoyen Général Soult, je reçois vos lettres des 24, 25 et 27 (14, 15 et 17 février). Je vois avec plaisir que vos deux généraux de division sont rentrés. Ne laissez séjourner à Boulogne aucun étranger, de quelque nation qu’il soit. Chassez arbitrairement tout ce qui vous est suspect, en leur faisant dire que, si on les retrouve à tant de distance des côtes, ils seront traités comme prévenus d’espionnage.
Savary vient de saisir à Abbeville et au Tréport une correspondance d’espionnage tenue par des misérables, et quelques lettres de change anglaises.
Nous avons assigné à Faultrier cinquante bâtiments pour l’artillerie; mais il y en a trente et un du port de plus de 30 tonneaux et qui ne peuvent servir décuries.
J’ai vu avec plaisir l’action de la péniche commandée par l’enseigne de la Garde. J’ai vu avec grand plaisir que le convoi d’Ostende était arrivé, et que la croisière ennemie avait pris le large. J’aurais voulu plus de détails pour connaître si ce sont les batteries de côte ou les bâtiments qui ont repoussé l’ennemi.
Concertez-vous avec Combis pour réunir dans un même local les bâtiments-écuries. Nous sommes au ler ventôse (en fait, un jour avant), et je n’oublie pas que vous m’avez promis qu’au ler ventôse le bassin serait entièrement fini.
Je dois actuellement vous dire qu’il ne faut pas attacher aux affaires de Paris plus d’importance qu’elles n’en méritent.
Moreau, égaré par je ne sais quelle passion , s’était décidé à faire venir à Paris Pichegru; Lajolais avait été l’intermédiaire. Pichegru est arrivé; Georges et quarante brigands s’étaient introduits avec lui. Moreau a vu quatre fois Pichegru et Georges. Moreau a été arrêté; quinze ou seize brigands ont été également arrêtés; les autres sont en fuite. On
a saisi une quinzaine de chevaux et des uniformes dont on devait se servir pour m’attaquer sur la route de Paris à la Malmaison ou de la Malmaison à Saint-Cloud, avec mon piquet, qui est de 20 hommes, ordinairement, comme vous savez.
J’ai fait lire les interrogatoires au Sénat et au Conseil d’État, qui en ont été indignés. Moreau sera traduit devant les tribunaux. Moreau, interrogé, a montré la plus grande consternation. C’est un ingrat et un traître de plus que le Peuple français a à punir. Du reste, l’union règne entre toutes les autorités, toutes les troupes, tous les citoyens. Tout le monde a été peiné de tant d’extravagance et de tant de folie.
Je vous envoie l’état des obusiers de 6 et de 8 pouces, et des pièces de 4 pour péniches, qui doivent être arrivés à Boulogne. Faites-moî connaître si tout est arrivé.
Paris, 19 février 1804
Au général Davout, commandant le camp de Bruges
Général Davout, je reçois votre lettre du 25 (15 février). Remerciez le général Mathieu Dumas des renseignements qu’il me donne. On est sur la trace de Pichegru; mais c’est toujours à quelques jour de distance. Les interrogatoires de Moreau sont faibles et d’un homme trahi par sa conscience. Avant peu de jours, cette affaire sera remise aux tribunaux ordinaires. Elle aura de l’éclat. Les preuves sont très fortes et ressortent de tous côtés. Il est prouvé, comme l’évidence, que Moreau a vu quatre fois Pichegru et deux fois Georges; qu’il savait depuis longtemps l’existence de Georges et de sa bande à Paris. Il a tout nié, même d’avoir jamais eu des nouvelles de Pichegru depuis le 18 fructidor.
J’ai vu avec grand plaisir ce que vous me dites de la flottille batave. Je pense donc que la première partie pourra bientôt venir vous joindre. Il sera bien essentiel alors que vous organisiez sur-le-champ les garnisons comme elles doivent l’être. Ainsi, d’après ce que vous me dites, la deuxième partie de la flottille batave pourra bientôt vous arriver aussi. L’amiral Ver Huell, qui doit venir à Ostende avec première partie de la flottille, ne doit y-rester qu’un moment; il doit retourner prendre la seconde partie. Vous lui ferez connaître que sa flottille sera réunie dans un seul port et formera une aile de l’armée. Pendant qu’il sera à Ostende, il doit commander dans la rade et dans le port selon son rang d’ancienneté; s’il est plus ancien que le général Magon (Charles-René Magon de Médine, contre-amiral, 1763-1805. Il commande une division de la flottille de Boulogne. Sera tué à Trafalgar), il le commandera. Quand sa flottille sera réunie dans le port, il y commandera en chef. C’est à vous et à vos généraux à bien traiter les officiers bataves. Il n’y a aucune difficulté à faire fournir au général Ver Huell les avirons qu’il demande, et à le favoriser le plus possible.
Parlez-moi des bateaux baleiniers; je n’entends pas dire qu’il en soit beaucoup arrivé.
Paris, 20 février 1804
Au citoyen Régnier, Grand-Juge, ministre de la justice
La saison étant venue plus rigoureuse, il serait convenable de faire distribuer 150,000 francs aux comités de bienfaisance, afin d’augmenter les secours pour le pauvre.
Paris, 20 février 1804
Au général Murat
Citoyen Général en chef Murat, Gouverneur de Paris, l’évêque d’Orléans vous adressera un nommé Piquantin, de la Vendée. Vous l’emploierez près de vous comme agent secret, et vous lui ferez un traitement raisonnable par mois. Vous lui promettrez 2,000 francs pour chaque chouan qu’il ferait arrêter de ceux compris dans la procédure actuelle, et une plus forte somme s’il faisait arrêter Georges ou quelqu’un des chefs de sa bande. Il vous verra très secrètement et de manière qu’il ne soit pas compromis. Il devra vous faire un rapport tous les jours.
Paris, 20 février 1804
Au contre-amiral Decrès
Je vous prie de d’apporter demain un arrêté pour que les déserteurs de la flottille soient traités comme les déserteurs de l’armée de terre.
Le général Magon n’a pas reçu l’ordre de faire filer les corvettes d’Ostende sur Dunkerque; veuillez le lui donner sur-le-champ.
Écrivez au général Lacrosse, que, dans l’apostille du préfet, du 28, je vois que les embarcations anglaises ont manqué de prendre le bateau du pilote à Boulogne, qui venait au secours des bâtiments échoués, qui devaient être dès lors bien près de la côte. Pourquoi n’avoir pas fait sortir quelques canonnières ou péniches pour protéger l’entrée de ces convois ?
Paris, 21 février 1804
Au général Davout, commandant le camp de Bruges
Citoyen Général Davout, je reçois votre lettre du 28 pluviôse (18 février). Je vois avec plaisir qu’indépendamment des 60 bâtiments partis d’Ostende 30 autres partent. De tous côtés les armements se préparent. Établissez une grande surveillance pour empêcher que les matelots ne désertent. Punissez-les sévèrement. Je vais prendre demain un arrêté pour qu’ils soient traités comme les déserteurs de l’armée de terre.
Je crois vous avoir déjà dit que les garnisons des 81 corvettes de pêche doivent être fournies par la division de Dunkerque.
Faites-moi connaître le nombre d’écuries que les Hollandais peuvent vous fournir. Il faut qu’ils vous en fournissent au moins pour les 600 chevaux de vos deux régiments de cavalerie. Les chevaux qui seront embarqués sur les corvettes de pêche seront des chevaux d’artillerie. La prame de Gand et les deux d’Anvers, qui doivent être prêtes, pourront aussi embarquer des chevaux. Indépendamment des bâtiments de transport que la flottille batave doit vous fournir, savoir, un bâtiment par bataillon pour les gros équipages, il faut qu’il y en ait quelques-uns pour porter la grosse artillerie. Causez de tout cela avec l’amiral Ver Huell, et faites-moi connaître ce qu’il espère avoir pour le 15 ventôse (6 mars).
Paris, 21 février 1804
Au général Junot, commandant les grenadiers de la réserve à Arras
Citoyen Général Junot, je vous prie de me faire connaître si les capotes sont arrivées, la situation réelle de vos bataillons, s’ils ont leurs bidons, leurs épinglettes, leurs deux paires de souliers dans le sac et enfin tout ce qui leur est nécessaire pour la campagne.