Correspondance de Napoléon – Août 1813
Gœrlitz, 24 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Goerlitz.
Mon Cousin, écrivez au duc de Bellune qu’il est nécessaire qu’il s’arrange de manière que son corps et son quartier général arrivent demain 25 entre Stolpen et Bautzen. Mon quartier général sera à Stolpen. Il faut que dans la journée du 26 son corps puisse arriver sur le point de l’Elbe qui lui sera désigné, pour être prêt à passer.
Écrivez au duc de Raguse qu’il faut qu’aujourd’hui il arrive à Reichenbach; que demain 25 il dépasse Bautzen et aille à Bischofswerda, afin que le 2G il puisse se porter sur le point de l’Elbe où son corps devra passer. Le quartier général sera cette nuit à Stolpen.
Gœrlitz, 24 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Goerlitz.
Mon Cousin, écrivez au duc de Tarente qu’il est nécessaire qu’il occupe Lauban le plus promptement possible, et qu’il organise une colonne d’un millier d’hommes d’infanterie, bons marcheurs, avec une batterie d’artillerie et 12 à 1500 chevaux, pour donner la chasse à tous les partisans qui déjà paraissent entre Bautzen et Gœrlitz ;| que cette colonne doit être mise sous les ordres d’un bon général de cavalerie qui se garde bien ; qu’elle ne doit jamais passer les nuits dans les villes ; qu’elle ne doit jamais s’arrêter dans les lieux où elle a vu coucher le soleil; qu’elle doit aller passer la nuit au moins à une demi-lieue de là; qu’il est bien urgent que cette colonne se mette en mouvement et que le commandant ait une latitude de cinq ou six marches. 11 aura des nouvelles du duc de Reggio et maintiendra la sûreté du pays.
Écrivez aussi au duc de Tarente qu’il serait important de mettre une pièce de canon au blockhaus de Waldau, entre Bunzlau et Gœrlitz.
Gœrlitz, 24 août 1813.
Au maréchal Macdonald, duc de Tarente, commandant le 11e corps de la Grande Armée, à Goldberg.
Le général Lefebvre-Desnoëttes et le prince Poniatowski se sont emparés de toutes les positions en Bohême jusqu’à dix lieues de Prague; ils ont pris les camps retranchés préparés pour la landwehr et déjà palissades. Mais le mouvement de l’ennemi sur la rive gauche de l’Elbe était déjà trop décidé ; ses troupes ont attaqué le 22, à dis heures du malin, le village de Hellendorf; il n’était plus en état de revenir à Prague. Le maréchal Saint-Cyr a retardé la marche des alliés avec une division pendant toute la journée du 22; et hier, 23, tous ses corps étaient campés à deux lieues autour de Dresde, occupant la rive gauche et le camp de Königstein. Hier, à deux heures après midi, il n’avait pas vu l’ennemi. Ma Garde sera ce soir1 à Bautzen. Je suppose que le duc de Bellune et le général Vandamme se sont déjà portés sur Dresde.
Je viens de recevoir des nouvelles du duc de Reggio, du 22 au soir, de Trebbin : il n’était plus effrayé des inondations, ce monstre avait disparu en approchant; il ne l’était pas plus de ces fortifications qui ne tenaient pas à une vingtaine de coups de canon. Il espérait être aujourd’hui ou demain à Berlin.
Le 18, le prince d’Eckmühl avait passé la rivière de Stecknitz et s’était emparé de la ville de Lauenburg. Il n’était pas bien certain des forces de l’ennemi qui lui étaient opposées, mais il se croyait en état de les attaquer et de leur marcher sur le corps. Le 20, le général Girard était parti de Magdeburg avec 12,000 hommes, et se portait sur Brandenburg. Le général Dombrowski marchait entre lui et le duc de Reggio, et avait chassé tous les partis ennemis.
Ainsi les affaires se trouvent fortement engagées partout. Si je passais en Bohême, je serais à Prague dans trois jours. Mais je préfère le parti le plus sage et déboucher par Dresde, pour entamer vigoureusement l’armée qui se présente de ce côté.
Je vous ai fait écrire hier en route pour que vous nous renvoyiez le général Ornano. Renvoyez aussi la division Chastel; je la destine à former plusieurs colonnes avec de l’infanterie pour assurer nos communications.
Gœrlitz, 24 août 1813.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Monsieur le Duc de Bassano, je serai ce soir de ma personne à Bautzen ou à Stolpen. Ma Garde arrivera ce soir à Bautzen. Le maréchal Saint-Cyr n’ayant pas fait prévenir le général Vandamme, il n’a pu partir hier, mais ce général sera ce soir à Stolpen. J’ai envoyé des ordres au duc de Bellune. J’aurai donc, le 25 ou le 26, 200,000 hommes à Stolpen. Vous ne me donnez pas assez de détails sur les affaires qui ont eu lieu; les généraux n’en disant rien, il fallait vous informer du nombre de nos blessés et des pertes que nous avons éprouvées. Occupez-vous-en sans délai.
Deux régiments de hussards westphaliens viennent de passer tout entiers à l’ennemi, à- ce qu’il paraît, avec tous leurs officiers. Prévenez-en le roi de Westphalie. Je vais prendre des mesures pour faire mettre pied à terre aux autres régiments westphaliens qui sont à l’armée et m’emparer de leurs chevaux. Tenez cela Je plus secrètement possible. Il serait important que le Roi fit donner tous les chevaux de sa cavalerie à son régiment de hussards français, et qu’il cessât ses levées de troupes : c’est en donner à l’ennemi. Il pourra écrire sur-le-champ au commandant du dépôt de cavalerie à Francfort pour en faire venir un millier de cavaliers français, pour les monter. Si le roi de Westphalie se rend à cette proposition, il y aurait ce moyen à prendre : il enverrait un millier d’hommes de sa cavalerie à Magdeburg; là le général Lemarois leur ferait mettre pied à terre et donnerait leurs chevaux et leurs armes aux cavaliers français qui se trouvent au dépôt; les hommes seraient renvoyés en Westphalie. De cette manière, nous garderions les chevaux, les selles et les armes.
Faites passer la lettre ci-jointe au roi de Westphalie. Vous sentez combien il importe1 que votre dépêche ne soit point, interceptée. Vous écrirez en chiffre à mon ministre, et vous ferez chiffrer la lettre au Roi, que je n’ai pu faire chiffrer parce qu’il est à craindre que le chiffre de l’armée soit entre les mains de l’ennemi.
Gœrlitz, 24 août 1813.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, vos deux régiments de hussards ont passé à l’ennemi, de Reichenberg en Bohême, avec chevaux, armes et bagages, en ne laissant que leurs gros équipages. Deux escadrons qui étaient détachés n’ont pu suivre les autres; j’ai donné ordre qu’on leur fit mettre pied à terre et qu’on prît leurs chevaux, ainsi qu’à vos deux autres régiments. Cet exemple prouve que vous ne pouvez vous fier à personne en Westphalie. Je désire donc que vous puissiez envoyer 1,000 chevaux de votre cavalerie à Magdeburg. Arrivés dans cette place, le général Lemarois leur fera mettre pied à terre et donnera leurs chevaux à 1,000 cavaliers du dépôt français; les vôtres vous seront renvoyés. Vous pourrez, si vous le jugez convenable, vous montrer mécontent de cette mesure. Achevez promptement la remonte du régiment de hussards français que je vous ai accordé. Il ne faut pas vous dissimuler que dans la situation actuelle des choses, vous ne pouvez vous fier à aucun Westphalien.
Bautzen, 24 août 1813, trois heures après midi.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Monsieur le Duc de Bassano, j’ai reçu votre lettre à onze heures. J’arrive maintenant, à trois heures après midi, avec la Garde. Le général Vandamme est à Stolpen et Neustadt. Toute l’armée sera demain à Stolpen. J’y aurai demain mon quartier général, et plus tôt, si j’apprends des nouvelles de Dresde de la journée d’aujourd’hui qui nécessitent ma présence. Les gardes d’honneur, ayant avec eux un bataillon d’infanterie et une batterie d’artillerie, auraient pu prendre position à Meissen, pour assurer ce point important contre les Cosaques. Toutefois, si cela n’est pas, on leur ordonnera de se porter sur Torgau, et donnez le même ordre au général Margaron : il a de l’infanterie, de la cavalerie et de l’artillerie. Je ne suppose pas’ que l’infanterie ennemie soit de sitôt à Leipzig. Il est probable qu’après-demain, 26, j’attaquerai l’ennemi. Si le général Margaron est compromis, il doit se retirer à Torgau et communiquer avec moi par la rive droite. Je crois vous avoir mandé tout cela hier, de sorte que la fausse direction donnée aux gardes d’honneur aura été contremandée. Vos courriers sont fort mal appris : ils partent sans ordre. Donnez-leur des instructions pour qu’ils ne repartent plus, ni ne remettent de lettres à personne, sans l’ordre du grand écuyer.
Rendez-moi compte des mesures que j’ai ordonnées de s’emparer des maisons et de barricader les rues qui donnent sur les brèches. Si elles sont exécutées, Dresde peut tenir plusieurs jours. Demain, à deux heures après midi, 40,000 hommes pourront entrer dans Dresde; mais, si toutes les mesures sont prises, que les redoutes soient armées et que les troupes soient bien disposées, il n’y a rien à craindre, et alors je préférerai faire déboucher les 40,000 hommes par Königstein, et je déboucherai sur la rive ennemie avec toute l’armée par Königstein.
Bautzen, 24 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Bautzen.
Mon Cousin, envoyez un officier à Dresde qui fera connaître au général Durosnel que, si les gardes d’honneur ont rétrogradé, il faut leur donner l’ordre de se jeter dans Torgau. Ils jetteront des patrouilles sur la rive droite pour communiquer avec l’armée.
Envoyez un officier en poste à Torgau ; qu’il aille par Kamenz et Grossenhayn. Vous préviendrez que les estafettes doivent passer par Torgau jusqu’à ce que l’ennemi ait été battu, ce qui ne tardera pas.
Envoyez un officier à Leipzig pour instruire le général Margaron de l’état des choses. Dites-lui que je ne suppose pas que des partis d’infanterie ennemie soient près d’arriver à Leipzig; cependant, s’il en arrivait autrement, qu’il se porte sur Torgau, et il se mettra en communication avec l’armée par la rive droite de l’Elbe; qu’il est probable qu’après-demain, 26, l’ennemi sera attaqué et battu devant Dresde; que, le général Dombrowski ayant couvert Dessau, il peut y laisser une colonne de 3 ou 400 hommes au lieu de 1,000, et rallier toutes ses forces sur Torgau, s’il était obligé d’évacuer Leipzig; qu’il ait soin d’évacuer de Leipzig tout ce qui appartient à l’armée française, en le dirigeant sur Torgau et Wittenberg.
Stolpen, 25 août 1813, sept heures et demie du matin.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Monsieur le Duc de Bassano, je reçois votre lettre de minuit et trois quarts. J’arrive à Stolpen. Les troupes du général Vandamme, sont déjà fort avancées sur Dresde. Je vais prendre des mesures pour les diriger sur Königstein,’ où je pourrai déboucher le 26 ou le 27.
Faites-moi connaître si l’ennemi a été à Meissen. J’avais ordonné qu’on laissât là un bataillon cantonné dans le château ; il y aurait été à l’abri. C’est un point qu’il est important d’occuper de cette manière.
Il arrive une grande quantité de cavalerie. Le général Latour-Maubourg, qui a 13 à 14,000 chevaux, peut arriver demain de bonne heure à Dresde; il faudra l’employer à chasser la cavalerie ennemie de la plaine.
Je désire, du reste, qu’on fasse le moins de mouvement possible pour que rien n’annonce à l’ennemi l’arrivée des forces et les opérations qu’on inédite. Il serait bien important d’avoir quelques renseignements sur la force de l’ennemi et la distribution de ses troupes.
Stolpen, 25 août 1813, sept heures et demie du matin.
A Joachim Napoléon, roi de Naples, à Dresde.
Mon Frère, je reçois votre lettre. J’arrive à Stolpen. Du moment que je me serai assuré de la bonne situation de Dresde et des mesures prises pour se mettre en état de défense, mon intention est de déboucher par Königstein. Je déboucherai sur Hellendorf ; je m’emparerai du camp de Pirna et je ferai jeter un pont à Pirna. Une fois sur cette communication de la Bohême, j’agirai selon les circonstances pour tâcher de profiter des fautes que pourrait faire l’ennemi. Cette opération ne peut se commencer demain ; nous ne pouvons déboucher en forces qu’après-demain. Je pense donc que vous devrez rester à Dresde encore les journées d’aujourd’hui et de demain : d’ici là, j’aurai pris décidément un parti. Comme je n’aurai pas besoin d’une si grande quantité de cavalerie, je ne serais pas éloigné d’envoyer le général Latour-Maubourg pour balayer la plaine.
Stolpen, 25 août 1813, neuf heures du matin.
Au maréchal Gouvion Saint-Cyr, commandant le 14e corps de la Grande Armée, à Dresde.
Il est indispensable que je sois sans inquiétude sur Dresde, pendant les journées des 26, 27, 28, 29 et 30. Dresde doit tenir plus de six jours. Sa défense consiste, premièrement, dans le camp retranché : on a dû mettre huit à dix pièces de canon dans chaque redoute, indépendamment de trois batteries mobiles de vingt pièces chacune qu’ont la garnison ou le corps d’armée pour se porter partout où il serait nécessaire. Je suppose que le génie aura élevé quelques petits épaulements aux saillants de l’enceinte entre les redoutes. Les redoutes et les faubourgs évacués, il y a encore l’enceinte de la ville. Elle a un fossé plein d’eau et une palanque. Ce n’est pas dans la palanque que consiste la défense de la place, mais bien dans le rang de maisons derrière. J’avais ordonné que ces maisons fussent occupées par la garnison, et que les rues fussent barricadées avec des sacs à terre et des tonneaux, de manière qu’elles fussent toutes impraticables. Dès lors, l’ennemi doit d’abord éteindre le feu des bastions; et j’ai fait placer dans des casemates plusieurs pièces dont il serait difficile d’éteindre le feu, et tant que ce feu ne serait pas éteint, ce serait en vain que l’ennemi renverserait la palanque; il faudrait qu’il passât le fossé et qu’il fît brèche dans les maisons. Mais, avec une nombreuse garnison, je ne sais comment on peut faire brèche dans des maisons, puisqu’on peut se retrancher derrière les ruines. Enfin les feux de la place ne peuvent être éteints qu’en établissant régulièrement plusieurs batteries; ce qui consommera les sept ou huit jours que je demande. Des barricades établies derrière la première ligne de maisons, vis-à-vis les brèches, rendraient d’ailleurs vains les- efforts de l’ennemi et prolongeraient la défense. Dresde peut donc se défendre, selon les règles de l’art, six ou sept jours, et, avec opiniâtreté, quinze à vingt jours. La ville prise, il resterait les ouvrages sur la rive droite, où l’on aurait fait transporter fout ce qu’il y aurait de précieux et où l’on se défendrait longtemps. Le major général vous fera connaître les ordres donnés pour aujourd’hui et demain. Mon intention est de prendre le camp de Pirna avec toute mon armée. Je ferai déboucher demain le général Vandamme pour s’emparer des bois et des défilés de Hellendorf. La 12e division occupera Pirna et formera ma droite. Aussitôt que je serai maître de Pirna, je ferai jeter deux ponts vis-à-vis de Pirna; les pontons nécessaires sont tout prêts. Dans cette disposition des choses, quand vous serez arrivé à la hauteur de Pirna, vous retrouverez la 42e division. Si l’ennemi se sépare, ou s’il est mal enfourné, je tâcherai d’en profiter. S’il a pris la ligne d’opération de Leipzig, je me trouverai plus près que lui de Prague, et je tâcherai, en jetant des ponts sur l’Elbe, d’établir ma communication avec le prince Poniatowski et l’armée de Silésie par le débouché de Gabel.
Stolpen, 25 août 1813, dix heures du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Stolpen.
Mon Cousin, donnez ordre au général Vandamme de diriger toutes ses troupes, infanterie, cavalerie, artillerie, sur le camp de Lilienstein. Il peut les faire partir à midi ou une heure, de manière qu’elles arrivent avant la nuit; elles y prendront position et s’y reposeront. Le général Vandamme pourra placer une division dans te camp même de Lilienstein, une autre à Hohnstein et une autre entre le camp et Hohnstein. Il fera venir toute son artillerie sur le plateau, entre Lilienstein et la rivière, mais de manière à ne pas encombrer les passages. Il aura soin que la compagnie de sapeurs soit en tête et passe le pont de Königstein ce soir. 11 assurera quatre jours de vivres à ses troupes, vérifiera les cartouches et les complétera.
La 42e division se réunira tout entière avec son artillerie sur la rive gauche et sous la protection de la forteresse.
Si l’ennemi avait des tirailleurs de droite et de gauche, il faudrait les chasser pour que l’ennemi ne pût rien voir, et l’on gardera tous les sentiers pour qu’il n’ait aucune communication avec nous.
De sa personne le général Vandamme se rendra, au plus tard de midi à une heure, dans la petite ville de Königstein, et prendra connaissance de toute la position, se fera mettre sous les yeux le plan du camp de Pirna et étudiera les moyens d’exécuter les dispositions qui vont lui être prescrites. Il doit, avec son corps, déboucher par Hellendorf, par Langen-Hennersdorf et Bahra. La 42e division, qui sera à Königstein, se portera alors sur Pirna pour border le camp de Pirna.
Donnez ordre au général Lefebvre-Desnoëttes, qui est à Weissig, d’envoyer 500 chevaux, une batterie d’artillerie légère et deux bataillons vis-à-vis Pirna; il enverra de même 500 chevaux et une batterie à Pilnitz. Donnez-lui ordre de faire faire par ces postes des patrouilles, pour que l’ennemi ne puisse ni communiquer ni débarquer sur la rive droite. Si l’ennemi voulait jeter un pont, le général Lefebvre s’y porterait sur-le-champ pour s’y opposer. Du reste, ses troupes resteront dans leurs positions pour s’y reposer; elles devront être approvisionnées de quatre jours de pain, qu’il fera venir de Dresde, afin d’être prêt à entrer en opération dès demain. Le général Lefebvre renverra à Dresde toute la cavalerie du maréchal Saint-Cyr qui se trouverait entre Dresde et Königstein. IL donnera l’ordre aux commandants de ses détachements de ne pas montrer leur masse, pas même l’artillerie, ni plus de 30 hommes de leur infanterie, mais de se tenir en arrière, pour n’être pas vus de l’autre bord. Ils ne laisseront à la vue de l’ennemi que quelques cavaliers qui surveilleront les bords.
Ordonnez au maréchal Saint-Cyr d’envoyer 2,000 chevaux, sous les ordres du général Lhéritier, à Grossenhayn, avec une batterie d’artillerie à cheval; il lui donnera un bataillon. Ce général surveillera la rive droite depuis Dresde jusqu’à Torgau, et placera des postes vis-à-vis Meissen. Enfin il tiendra libre de partisans cette communication de l’armée. Il se liera le plus tôt possible avec le général Dejean, qui doit être à Torgau. Il se tiendra en masse et de la manière convenable pour ne pas être surpris par des partisans ennemis, mais au contraire les repousser et maintenir sa position. Il est indispensable que celle colonne parte demain avant deux heures.
Donnez ordre de placer un bataillon dans le château de Meissen; il s’y crénellera. Si on est à temps d’y réunir le bataillon et la batterie de la Garde qui sont avec les gardes d’honneur, on le fera. Ces troupes seront très-bien placées dans le château de Meissen avec les huit pièces de canon de la Garde. Dans ces détachements, il ne faut envoyer aucun Westphalien : on ne peut pas se fier à eux.
Vous ferez connaître au maréchal Saint-Cyr que vous lui ferez part, ce soir, de mes dispositions pour la journée de demain; mais qu’il est nécessaire qu’il tienne le général Pajol en réserve, pour le lancer à la poursuite de l’ennemi dans un pays qu’il connaît bien, et le charger, aussitôt que l’ennemi aura démasqué son mouvement rétrograde, de couper tout ce qui se serait aventuré.
Donnez ordre au général Corbineau de partir avec sa cavalerie et l’infanterie du prince de Reuss, pour se porter en avant de Stolpen; il prendra position à une demi-lieue de Stolpen, dans la direction de Hohnstein, et sur la droite ou la gauche de la route, de manière à ne pas l’encombrer.
Donnez ordre à la vieille Garde de se rendre à Stolpen, où elle cantonnera dans les maisons.
Donnez ordre aux trois divisions de la jeune Garde de se placer en colonne entre Bischofswerda et Stolpen, la 1e division à une lieue de Stolpen, la 2e à deux lieues de Stolpen, la 3e à trois lieues. Par ce moyen, la journée sera moins forte que les journées précédentes, et ces troupes pourront se reposer.
Donnez ordre au général Latour-Maubourg, pour ne pas encombrer la roule de Stolpen, de venir prendre position entre Stolpen et la roule de Bautzen, à peu près au village de Weickersdorf, mais de ne pas s’y rendre par la route de Bischofswerda à Stolpen; de faire une lieue de plus sur la grande route et ensuite se rabattre à gauche sur ce village.
Donnez ordre à la cavalerie de la Garde de se porter près de Stolpen, mais sur la gauche de la route de Bischofswerda à Stolpen, du côté des villages de Drebnitz et de Lauterbach, et de s’y rendre par une route directe, afin de ne pas encombrer la route de Stolpen à Bischofswerda.
Le parc du génie et les équipages de pont viendront jusqu’à Stolpen. L’équipage de pont se mettra à Stolpen sur le chemin de Pirna, où mon intention est de jeter demain deux ponts. Le parc du génie se placera en avant de Stolpen, dans la direction de Königstein, sans embarrasser la route.
Réitérez l’ordre au duc de Raguse d’envoyer une colonne mobile, composée comme je l’ai prescrit, sur Hoyerswerda. Faites-lui connaître que le général Lhéritier se rend à Grossenhayn, pour nettoyer le pays entre Dresde et Torgau.
Prévenez aussi le général Lhéritier de l’existence de la colonne du duc de Raguse à Hoyerswerda, pour que les deux commandants puissent correspondre entre eux et se réunir en cas de besoin.
Stolpen, 25 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Stolpen.
Mon Cousin, je vous renvoie les lettres du prince de la Moskova et celles du duc de Tarente. Il paraît que le prince de la Moskova n’a point reçu la lettre que vous lui avez écrite le 23, ce qui est un grand malheur. Le duc de Tarente le dit positivement dans sa lettre du 24 à trois heures du matin. Je suppose que la lettre du duc de Tarente a éclairci ce quiproquo, sans qu’il y ait eu aucun mal. Toutefois il est urgent d’envoyer un officier, avec ordre au général Souham de prendre le commandement du 3e corps, sous les ordres du duc de Tarente; au général Sébastiani de prendre les ordres du duc de Tarente, et au prince de la Moskova de venir de sa personne au quartier général, en lui envoyant copie de la lettre du 23, qui n’est pas parvenue.
Envoyez aussi un duplicata de cette lettre au duc de Tarente, pour qu’il le fasse passer au prince de la Moskova. Vous sentez rien n’est plus urgent.
Stolpen, 25 août 1813.
Au général comte Vandamme, commandant le 1er corps de la Grande Armée, à Dresde.
Monsieur le Général Vandamme, je vous envoie une lettre que je reçois du général Haxo que j’ai envoyé à Königstein. Comme toute la 42e division doit y être arrivée, je désire qu’aussitôt que vous aurez expédié vos ordres vous vous y rendiez de votre personne pour faire chasser les Cosaques de toutes les avenues, afin qu’ils ne voient pas notre mouvement.
Stolpen, 25 août 1813.
Au général baron Rognat, commandant le génie de la Grande Armée, à Dresde.
Monsieur le Général Rogniat, la place de Dresde, telle qu’elle est dans ce moment, vient de me rendre des services : sans elle, je n’aurais pu m’éloigner; l’ennemi aurait pu y être dès le 23. Ce premier moment passé, ce serait erreur de croire que son rôle a cessé.
L’échiquier de la guerre actuelle est compliqué; le nombre des ennemis que j’ai à combattre est redoutable; si les trois redoutes déjà tracées avaient été achevées, si les barricades avaient été terminées dans la ville et si le fossé de Pirna avait été bien établi, j’aurais eu plus de confiance dans Dresde, j’aurais pu en espérer une défense de dix à douze jours : alors je me serais moqué de la confiance de l’ennemi; j’aurais marché sur la Bohême. Mais, dans l’état où est cette ville, je ne puis y avoir cette confiance que je désire. Donnez des ordres pour faire achever les trois redoutes déjà tracées et pour qu’on en établisse trois autres nouvelles conformément au premier plan. Il faut que les palanques des faubourgs soient terminées et que tout ce qui doit concourir à la défense de Friedrichstadt soit bien organisé. Donnez des ordres pour achever le fossé de Pirna et pour que les barricades soient exécutées dans la ville; il est nécessaire que toutes les maisons de la ligne soient crénelées et occupées comme casernes; enfin il ne faut rien oublier pour bien établir l’équilibre entre la défense de la rive gauche et celle de la rive droite, afin que j’aie la conviction qu’un corps de 20,000 hommes se jetant dans la place, et portant ainsi sa garnison à près de 30,000 hommes, puisse s’y défendre quinze à vingt jours.
Stolpen, 25 août 1813.
Au général baron Rognat, commandant le génie de la Grande Armée, à Dresde.
Monsieur le Général Rogniat, je viens de donner ordre qu’il soit établi une garnison de 1,800 hommes à Bautzen. Mon intention est que des mesures soient prises pour fortifier cette place autant que possible. La citadelle et la ville doivent déjà être arrangées. Mon intention est d’arranger aussi l’enceinte qui embrasse les faubourgs, en creusant un bon fossé, en augmentant le relief du parapet, en fraisant et palissadant le fossé, en établissant un bon chemin couvert palissade, et en le traçant de manière qu’il y ait une place d’armes qui flanque toute l’enceinte, et dans laquelle sera placé un blockhaus; enfin en occupant les hauteurs par deux ou trois bonnes redoutes bien palissadées, et en faisant tout ce qui est nécessaire pour rester maîtres des ponts et résister avec succès au moins à des attaques légères. Faites en sorte que ces ouvrages soient dirigés de manière que tous les quinze jours il y ait un degré d’avancement, et que dans deux mois je puisse avec confiance laisser 2,000 hommes pendant quinze ou vingt jours dans Bautzen.
Stolpen, 25 août 1813.
Au général baron Rognat, commandant le génie de la Grande Armée, à Dresde.
Monsieur le Général Rogniat, mon intention est d’arranger le fort de Meissen de manière qu’un bataillon et cinq ou six pièces de canon y soient à l’abri de toute insulte. Donnez des ordres en conséquence. Faites travailler sans délai à l’établissement d’une tête de pont. Je suppose que ce travail pourra être fini dans quinze jours, et alors on travaillera à rétablir le pont. Donnez sans délai des ordres pour qu’on remplisse mes intentions.
Stolpen, 25 août 1813, trois heures après midi.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Monsieur le Duc de Bassano, en échange des mauvaises nouvelles que vous me donnez du duc de Reggio, je puis vous en envoyer de bonnes que je reçois du général Lauriston.
Ces nouvelles du duc de Reggio me paraissent, comme à vous, tellement confuses que je ne puis pas encore asseoir mes idées. La lettre dit que le 20 et le 21 nous avions eu des affaires avantageuses : or il est de fait, d’après les lettres officielles, que le 20 et le 21 on n’avait tiré que quelques coups de fusil. Il faut croire que l’affaire dont il est question n’est qu’une charge ou hourra qui aura mis le désordre dans les bagages du centre. Au reste, je suppose que d’ici à ce soir Gersdorf aura reçu de nouveaux renseignements. Faites faire une petite enquête sur la nature de l’homme qui a écrit cette lettre, et envoyez-moi, par un courrier, tous les renseignements qui vous arriveront.
Le général Lauriston a battu, entre Goldberg et Jauer, l’armée de Silésie. Il dit avoir compté sur le champ de bataille 7,000 ennemis morts et seulement 800 Français. Il a fait des prisonniers et pris quelques pièces de canon. Les positions de l’ennemi étant très-belles, l’intrépidité de nos soldats n’en a été que plus remarquée.
La division du général Teste peut se reposer aujourd’hui dans Neustadt. La pluie fatiguerait beaucoup la troupe et détériorerait les chemins.
Il paraît que l’ennemi a un corps, que les paysans évaluent de 15 à 20,000 hommes, qui n’aurait pas encore paru devant Dresde, et qui serait dans la position de Hellendorf. Il paraît aussi que le camp que l’ennemi avait sur les hauteurs de Pirna est évacué et qu’on l’a porté de l’autre côté du ravin.
Stolpen, 25 août 1813, trois heures après midi.
Au général comte Vandamme, commandant le 1er corps de la Grande Armée, à Königstein.
Monsieur le Comte Vandamme, une division de votre corps d’armée est à Neustadt, une à Stolpen, et six bataillons sont déjà rendus au camp de Lilienstein. Vous avez donc trente-quatre bataillons dans la main. La 42e division doit avoir au moins douze bataillons, si elle n’a pas ses quatorze bataillons; elle sera sous vos ordres. Vous aurez donc quarante-six bataillons réunis sous le fort de Königstein.
Vous expédierez tous vos ordres pour que demain, à la petite pointe du jour, tout se mette en marche. Si vous pouvez faire arriver vos sapeurs avant la nuit, faites-les venir. Donnez ordre à la demi-compagnie qui est détachée pour le service du camp de couper des fascines pour rendre plus faciles les chemins que les pluies auraient gâtés.
Cette nuit, vous ordonnerez à la 42e division et aux six bataillons de la division Teste (ce qui fera dix-huit bataillons), avec la batterie d’artillerie de la 42e division et la batterie de la brigade Teste, si cette brigade a amené avec elle sa batterie, de monter sur le plateau et de se ranger en bataille dans le plus grand silence derrière Königstein, de manière à pouvoir, au point du jour, s’y trouver en bataille avec leurs canons.
Si la brigade de la division Teste n’a pas sa batterie, les douze bataillons de la 42e division n’auront qu’une batterie, ce qui ne sera pas suffisant. Vous aurez soin alors d’ordonner à vos deux batteries d’artillerie légère, ou à la batterie que vous aurez le plus près, de se porter dans la nuit sur le plateau, de manière à y être au point du jour. J’estime qu’il faut au général Berthezène vingt-quatre pièces de canon environ. Vous y ferez venir votre cavalerie légère, de manière qu’elle soit à la pointe du jour au camp de Königstein, et vous aurez ainsi dans la main une avant-garde de 10 à 12,000 hommes placés sur le plateau. II serait nécessaire que ce soir vous fissiez chasser toutes les vedettes ennemies pour qu’elles ne puissent pas voir les rampes ni ce qui se fait.
Demain au jour, aussitôt que le brouillard sera dissipé, cette avant-garde s’emparera de tout le plateau de Pirna. Votre division de Neustadt, qui est la plus près, arrivera la première et se formera sur le plateau de Königstein. Votre seconde division arrivera immédiatement après, et vous ferez les dispositions suivantes : vous dirigerez le général Berthezène avec la 42e division et la brigade Teste, et vingt-quatre pièces de canon, sur Pirna, dont il s’emparera en restant sur les hauteurs; vous, avec vos deux divisions, aussitôt que vous serez assuré que l’ennemi n’est pas en mesure de disputer le camp ni la ville de Pirna aux dix-huit bataillons du général Berthezène, vous vous porterez, en prenant une position militaire, sur Langen-Hennersdorf. Il sera convenable de faire monter le plus tôt possible une batterie de 12, afin de l’envoyer au général Berthezène, s’il en a besoin, pour contrebattre les pièces que l’ennemi pourrait établir sur le Kohlberg.
L’équipage de pont sera arrivé à midi vis-à-vis Pirna, avec les huit bataillons de la division Teste auxquels j’adresse des ordres directement. En une heure ou deux, nous jetterons le pont, et je ferai occuper les hauteurs de Pirna par les divisions de la jeune Garde. Aussitôt, le général Teste, avec les huit bataillons qu’il aura amenés avec lui et les six bataillons qu’il trouvera avec le général Berthezène, réunira sa division, viendra vous joindre par un mouvement à gauche, de sorte que vous aurez dans la main vos trois divisions avant quatre ou cinq heures de l’après-midi. Le camp de Pirna sera donc alors occupé, la droite à Pirna par 40,000hommes d’infanterie de la Garde, et 8 à 10,000 hommes de cavalerie, la gauche par votre corps d’armée. Si alors les renseignements que l’on aura reçus donnent à penser que vous puissiez vous porter sur Bahra et Hellendorf pour vous emparer des défilés et tomber sur les derrières de l’ennemi, vous le ferez, et je vous ferai soutenir par la jeune Garde.
Je donne ordre au général Corbineau de partir à cinq heures du matin, avec sa division de cavalerie légère, pour venir vous rejoindre. Il a 4,000 hommes et une batterie d’artillerie; il sera utile pour occuper tout le plateau.
Vous aurez soin de vous informer auprès des ingénieurs saxons de tous les débouchés du camp de Pirna qu’il faut garder par des postes. Ces postes seront successivement relevés par la jeune Garde, lorsqu’elle débouchera à Pirna. Il sera nécessaire que vos sapeurs, avec leurs pioches, soient à la tête des colonnes pour élargir Je chemin et abattre les bois dans les défilés depuis Bahra jusqu’à Hellendorf. Demain au soir, le reste’ de l’armée arrive et débouche un corps par Königstein et l’autre par Pirna. Veillez à ce que les bagages, les fourgons d’équipages militaires et toutes les voitures quelconques restent sous la protection des redoutes de Hohnstein, où vous laisserez la brigade du général prince de Reuss qui arrivera demain de bonne heure à Hohnstein. La 42e division a, je crois, six bataillons entre Dresde et Königstein. J’ai ordonné au général Lefebvre-Desnoëttes de les faire relever par la jeune Garde : je suppose qu’il l’a fait, et qu’ainsi ce soir toute la division Berthezène ‘ sera réunie au camp.
Je vous envoie mon officier d’ordonnance Atthalin, qui connaît les routes. Je vous envoie avec lui un ingénieur géographe qui a levé la carte et connaît également le pays. Prenez aussi dans la citadelle des ingénieurs saxons qui connaissent parfaitement le pays, et prenez des forestiers pour vous conduire.
Stolpen, 26 août 1813, une heure du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Stolpen.
Mon Cousin, écrivez au général Lefebvre-Desnoëttes de réunir ses deux batteries d’artillerie légère qui pourront servir, si l’ennemi attaque Dresde, pour tirer de la rive droite sur la rive gauche.
Stolpen, 26 août 1813, une heure du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Stolpen.
Mon Cousin, donnez ordre aux batteries de réserve d’artillerie du général Dulauloy de filer sur Dresde.
Demandez à Latour-Maubourg s’il a des nouvelles du général Chastel, qui devrait avoir dépassé Gœrlitz. Qu’il envoie un officier à sa rencontre pour avoir des nouvelles positives du lieu où il se trouve.
Stolpen, 28 août 1813, une heure du matin.
Au général comte Vandamme, commandant le 1er corps de la Grande Armée, à Königstein.
Je vous ai fait connaître hier mes intentions. Toute l’armée ennemie, hier à minuit, s’est présentée sur Dresde, et le maréchal Saint-Cyr craignait d’être attaqué aujourd’hui ; je m’y porte. Mais cela est une probabilité de plus pour penser que les forces qui sont contre vous sont bien peu considérables. Débouchez donc le plus tôt possible, et emparez-vous du plateau. Maître de l’extrémité de ce plateau, vous le serez de la ville de Pirna, et alors vous y ferez jeter le pont. Enfin, si les circonstances sont favorables, débouchez pour vous porter sur Hellendorf. Cette opération portera la terreur chez l’ennemi, et peut être d’un grand résultat. Laissez deux bataillons d’infanterie et une brigade de cavalerie pour garder les redoutes de Hohnstein et de Lilienstein. La cavalerie battra les débouchés de Neustadt pour mettre le pays à l’abri de toute incursion.
Il est convenable, pour faire une diversion sur Dresde, que vous débouchiez le plus tôt possible, et j’ai espoir que, dans la journée, vous vous trouverez sur les derrières de l’ennemi, et que vous aurez écrasé la division qu’on a placée là pour vous observer.
Stolpen, 26 août 1813, une heure du malin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Stolpen.
Mon Cousin, envoyez un officier au général Teste, qui se trouve sur la route entre Stolpen et Dresde, à peu près à mi-chemin, pour lui donner ordre de partir aujourd’hui à quatre heures du matin pour retourner à Dresde et y prendre position comme réserve, sans entrer dans la Neustadt, et sur la rive droite, à moins d’un ordre contraire. 11 n’aurait pas dû partir hier sans prendre les ordres du maréchal Saint-Cyr.
Donnez ordre au général Lefebvre-Desnoëttes de rester dans la position où il se trouve; deux bataillons qui ont été placés sur la rive droite, vis-à-vis Pirna et Pilnitz, surveillent avec 1,000 chevaux le passage du fleuve; il doit diriger les huit autres bataillons sua Dresde avec leur artillerie. Il les fera partir à quatre heures du matin, de manière qu’ils arrivent à sept heures. Ils serviront de réserve et réoccuperont leur ancien camp.
Donnez ordre à la vieille Garde de partir à quatre heures pour se rendre à Dresde. Donnez le même ordre au général Latour-Maubourg et au général Walther. De sorte qu’il y aura à Dresde, avant midi, huit bataillons de la jeune Garde, de la division Delaborde, huit de la 23e division, dix de la vieille Garde, total vingt-six bataillons , tout le corps de Latour-Maubourg, toute la cavalerie de la vieille Garde, et enfin, avant le soir, toute la jeune Garde.
Le général Vandamme sera prévenu que, l’ennemi s’étant rapproché hier soir de Dresde et ayant l’air de menacer d’une attaque pour aujourd’hui, quelque peu probable que cela soit, l’Empereur a jugé convenable de s’y porter. Sa Majesté ordonne que, conformément à ses instructions d’hier, le général Vandamme prenne le commandement, 1° de la le et de la 2e division; 2° de la brigade de la 23e division qui est au camp de Königstein (l’autre brigade sous les ordres du général Teste reçoit directement de moi l’ordre de se rendre à Dresde) ; 3° de toute la 42e division; 4° de la brigade du prince de Heuss composée de six bataillons du 2e corps. Le général Vandamme aura donc sous ses ordres cinquante-deux bataillons d’infanterie, plus sa cavalerie légère et la division Corbineau, qui est forte de 4,000 chevaux. Avec ces troupes, le général Vandamme doit s’emparer de tout le plateau du camp de Pirna, occuper Pirna et couper la route de l’ennemi, aujourd’hui ou au plus tard demain, sur Hellendorf et Berggiesshübel, dans le temps que l’année qui déboucherait par Dresde pousserait vivement l’ennemi. L’équipage de pont sera aux ordres du général Vandamme. Il sera à une heure après midi au village de Mühldorf ou à Lhomen, et, aussitôt que le général Vandamme sera maître de Pirna, il pourra faire jeter le pont. Prévenez le général Vandamme que le général Lefebvre-Desnoëttes, avec la colonne de cavalerie légère de la Garde, garnira tous les postes depuis Pirna jusqu’à Dresde.
Stolpen, 26 août 1813.
Au général baron Haxo, commandant le génie de la garde impériale.
Rendez-vous à Königstein, pour assister de vos conseils le général Vandamme.
Je laisse sous les ordres de ce général les 1e, 2e divisions, la brigade de la 23e division qui est au camp de Königstein, une brigade que commande le prince de Reuss, composée de six bataillons du 2e corps, la 42e division et la division de cavalerie du général Corbineau; cela fait cinquante-deux bataillons avec 4 à 5,000 hommes de cavalerie. Quant à Desnoëttes, je le laisse à Dresde. Je désire que le général Vandamme s’empare le plus tôt possible du plateau, se rende maître de la ville de Pirna et prenne position sur ledit plateau; et, si l’ennemi n’était pas en mesure, qu’il pénètre sur Hellendorf.
Il sera nécessaire qu’il laisse deux bataillons d’infanterie et une brigade de cavalerie pour garder tous ses derrières, le débouché de Neustadt et les redoutes de Hohnstein et de Lilienstein.
Je me rends de ma personne sur Dresde et j’aurai avec moi toute ma Garde. Le corps du duc de Bellune et celui du duc de Raguse, qui seront ce soir à Stolpen, me serviront, selon les circonstances, à renforcer l’attaque de Pirna, ou je les ferai venir sur Dresde. Écrivez-moi quatre ou cinq fois dans la journée. Il y a des postes de la colonne du général Lefebvre-Desnoëttes qui pourront porter les dépêches.
Le général Vandamme, aussitôt qu’il fera jour et qu’il verra ce qu’il a devant lui, ne saurait manquer son mouvement sur le plateau
Stolpen, 26 août 1813, sept heures du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Stolpen.
Mon Cousin, expédiez une estafette au duc de Tarente pour lui faire connaître que nous arrivons à Dresde; que l’ennemi est devant la ville; qu’aujourd’hui une partie de l’armée débouche par Königstein pour gagner le camp de Pirna et les débouchés de Hellendorf et couper la ligne d’opération de l’ennemi; qu’il est donc probable que sous peu de jours il y aura des événements d’une haute importance.!
- S. Il paraît qu’il y a un corps de landwehr russe et prussien entre Lübben, Cottbus, etc. Il est nécessaire que vous envoyiez une bonne colonne pour empêcher ces gens de nous inquiéter. Comme nous avons beaucoup à faire ici, il faut lui donner pour latitude de se porter à Hoyerswerda, Luckau et Cottbus.
Dresde, 27 août 1813, six heures du matin.
Au maréchal Kellermann, duc de Valmy, commandant supérieur des 5e, 25e et 26e divisions militaires, à Mayence.
Mon Cousin, faites connaître par le télégraphe à l’Impératrice que j’ai remporté hier 26 une grande victoire à Dresde sur les armées autrichienne, russe et prussienne, commandées par l’empereur d’Autriche, l’empereur de Russie et le roi de Prusse. On amène beaucoup de prisonniers, des drapeaux et des canons.
Dresde, 27 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, envoyez à la rencontre de la division Chastel, pour qu’elle passe les ponts cette nuit. Faites-moi connaître si ce général a avec lui son artillerie légère. Vous lui donnerez ordre de se porter eu quartier général, redoute n° 4. Quand il passera de sa personne, il viendra me trouver; on l’introduira chez moi, quand même je serais couché, pour qu’il me rende compte de la situation de sa division.
Dresde, 27 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, je vous envoie copie du rapport d’un partisan ennemi. Ce partisan a 1,000 hommes de cavalerie russe et 1,000 de cavalerie autrichienne; il n’a ni infanterie ni canons.
Envoyez un courrier à Leipzig pour communiquer ces renseignements au général Margaron. Qu’il n’en prenne pas l’alarme; qu’il n’évacue pas Leipzig à l’approche de cette colonne, qui, n’étant que de 2,000 hommes, ne doit lui inspirer aucune crainte; qu’il marche à elle. Je suppose qu’il a en ce moment 2,000 hommes de cavalerie, 10 pièces de canon, et, si les badois sont arrivés, il aura plus de 4,000 hommes d’infanterie.
Dresde, 27 août 1813, sept heures du soir.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, écrivez an roi de Naples de prendre sous ses ordres le duc de Bellune. Faites-lui connaître que j’ai mis la division Teste sous les ordres du duc de Bellune; que l’ennemi n’est point en retraite, et qu’il ne regarde l’affaire d’hier que comme une attaque manquée, et qu’il est douteux s’il se mettra en retraite cette nuit. S’il tient, mon intention est de le tourner par sa gauche, et le roi de Naples, avec les trente-huit bataillons du duc de Bellune, est chargé de cette opération. Le Roi aura le général Latour-Maubourg, qui a trente-six pièces d’artillerie et deux divisions de cuirassiers, et les trente-huit bataillons du duc de Bellune et de la division Teste. Qu’il s’assure que le général Teste s’est fait rejoindre par ses trois batteries; dans le cas contraire, qu’il les fasse venir cette nuit; c’est! très-important. Faites connaître au Roi qu’à cinq heures du matin, je serai à la redoute n° 1, sur la route de Plauen. Vous me ferez bien connaître quelle est ce soir la position du Roi, du duc de Bellune cl du général Teste.
Mandez au prince de la Moskova de placer son quartier général dans une des maisons en avant de la redoute n° 4; qu’il se fasse joindre par la division Barrois et l’artillerie de cette division. Dites-lui que tout porte à penser qu’il y aura demain une grande bataille, et que l’armée ennemie est nombreuse.
Donnez ordre au duc de Raguse de réunir, dans la nuit, toutes ses divisions et toute son artillerie, et de s’appuyer au prince de la Moskova et au maréchal Saint-Cyr, et de s’attendre à une grande bataille pour demain.
Recommandez au roi de Naples de tenir libre la route de Nossen.
Dresde, 27 août 1813, sept heures du soir.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, envoyez reconnaître positivement la situation du maréchal Saint-Cyr. Témoignez-lui mon mécontentement de ce quel je n’ai pas eu de ses nouvelles pendant toute la matinée; il aurait dû m’envoyer un officier toutes les heures, pour me rendre compte de ce qui se passait. Faites-moi connaître les villages qu’il occupe, et écrivez-lui de tenir tout son corps réuni. Qu’il vous fasse connaître l’état de ses divisions et de son artillerie. J’ai vu avec peine qu’une partie de son infanterie était derrière les palanques.
Envoyez également reconnaître la situation positive du duc de Trévise et de la cavalerie de la Garde.
Il convient que vous écriviez à tous les commandants des corps que l’ennemi n’est point en retraite, et que demain, à la pointe du jour, on prendra les armes. Chaque commandant de corps fera connaître positivement l’emplacement de son corps. Faites-leur connaître que je serai à mon quartier général, â la redoute n° 4, près du moulin, sur la route de Plauen.
Dresde, 27 août 1813, huit heures du soir.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, donnez ordre au général Dulauloy de joindre à ses quatre batteries de réserve la batterie de la jeune Garde qui était attachée au service de la place. Aussitôt que la batterie qui est avec le général Dejean rentrera, il l’y réunira également. Ordonnez-lui de faire rentrer une des batteries à cheval de la division Ornano ou de la division Desnoëttes, et une de la division Walther, de sorte que la réserve, qui devra se trouver demain, à cinq heures du matin, à mon quartier général, à la redoute n° 4, sera composée de quatre batteries de 12, trois batteries à cheval et une batterie de division; total, cinquante-huit pièces de canon. La division Walther aura une batterie à cheval, la division Desnoëttes en aura deux, la division Ornano en aura une; total, quatre; ce qui, avec les trois batteries de la réserve, fait sept batteries d’artillerie à cheval. Le général Dulauloy joindra également à sa réserve la batterie westphalienne qui est dans la place, et la fera sur-le-champ réorganiser.
Donnez ordre au général Durosnel de reprendre sur-le-champ sa garnison pour le service de la place. 11 mettra dans chaque redoute, sur la rive gauche, cinquante hommes d’infanterie; chacune sera armée de huit pièces au lieu de six; à cet effet, il retirera les pièces nécessaires de la rive droite. Le général Sorbier mettra dans chaque redoute 80 canonniers pour que ces pièces soient bien servies. Le commandant du génie mettra dans chacune 50 hommes, soit sapeurs, soit ouvriers marins. Ainsi il y aura dans chaque redoute 80 canonniers, 50 hommes du génie, 50 hommes d’infanterie et huit canons. Il y aura un commandant pour chaque redoute, et non pas un pour deux, comme cela était. Il sera écrit une lettre à chaque commandant pour lui faire connaître qu’il doit se faire tuer dans la redoute et ne jamais en sortir sous aucun prétexte. Les pièces seront approvisionnées à deux cent cinquante coups, et il y aura dans chaque redoute un dépôt de 10,000 cartouches. Il sera fait une enquête pour savoir pourquoi le commandant de la redoute n° 3 l’a abandonnée, et quel était ce commandant.
La vieille Garde sera demain, à la pointe du jour, à la même position qu’elle était aujourd’hui, et placée de la même manière. Les grenadiers à cheval, étant destinés à ma garde personnelle, seront à
la redoute n° 4, ainsi que les escadrons de service et la division Ornano. Le général Nansouty restera dans la plaine pour appuyer le duc de Trévise avec la division Desnoëttes, les chasseurs et les dragons. Faites connaître au général Nansouty et au duc de Trévise mon mécontentement de ce qu’ils n’ont pas envoyé aujourd’hui leurs rapports d’heure en heure.
Donnez ordre que, pour la journée de demain, chaque commandant de corps ait un quartier général fixe où il laisserait, s’il le quittait, quelqu’un pour recevoir mes ordres et dire où il est. Faites-moi mettre sur un huilé la position de tous les corps d’armée ce soir, ainsi que l’indication exacte de leurs quartiers généraux.
Les grenadiers à cheval auront avec eux une batterie d’artillerie. Le général Desnoëttes retirera tous les hommes et toute l’artillerie qu’il a sur la rive droite.
Donnez ordre au général Corbineau de rappeler la brigade qu’il a à Neustadt; elle se dirigera sur Dresde, de manière à arriver avant neuf heures du matin, et viendra se placer auprès de la redoute n°4. Le général qui la commande me fera connaître son arrivée. Le général Corbineau fera remplacer cette brigade par 500 chevaux du côté de Neustadt; il placera aussi 200 chevaux pour relever la Garde et surveiller la rive droite, depuis Pilnitz jusque vis-à-vis Pirna.
Témoignez mon mécontentement au directeur de l’administration de l’armée sur la manière dont a été fait le service des ambulances. On n’a pas envoyé de chariots pour relever les blessés, et beaucoup ne le sont pas encore. Tous les agents des hôpitaux auraient dû s’y trouver. Recommandez-lui de prendre des mesures pour que cela aille mieux demain.
Les boulangers du général Vandamme doivent faire du pain au camp de Königstein. Vous pouvez faire revenir les 200,000 rations de biscuit qui sont à Königstein. On me rendra compte de la quantité de farine qui y existe; la rivière devant être bientôt libre, on pourra, si cela est nécessaire, en faire venir une partie.
Rendez-moi compte des ordres donnés par le général Durosnel à un bataillon du 131e de se rendre à Meissen, et faites-moi connaître quand il a dû en occuper le château. Cela est important, parce qu’il faut sans délai rétablir nos communications régulières par la rive gauche, par Leipzig et Nossen.
On ne laissera en garnison à Bautzen que 600 hommes ; tout le reste aura ordre de rentrer à Dresde.
Dresde, 27 août 1813, au soir
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris.
Mon Cousin, je suis tellement fatigué et tellement occupé que je ne peux pas vous écrire longuement; le duc de Bassano s’en charge. Les affaires vont ici fort bien.