Correspondance de Napoléon – Août 1813
Dresde, 11 août 1813.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg
Mon Cousin, c’est aujourd’hui le 11, et l’ennemi n’a pas encore dénonce l’armistice; ainsi les hostilités ne peuvent pas recommencer avant le 18. Vous devez donc presser la marche de tout ce qui doit vous arriver; vous avez de la latitude à cet égard jusqu’au 20. Je vous ai fait connaître qu’il n’y avait pas d’obstacle à ce que vous laissiez un corps d’observation sur la rive gauche, sauf à le reployer au besoin sur vous. Tout porte à penser que l’ennemi veut passer l’Elbe et se porter sur le Weser; mais votre mouvement sur la rive droite, qui ne peut pas être dérangé, puisque vous avez pour appui une place comme Hambourg et le Holstein, déconcertera ce projet, en même temps que le mouvement de Luckau sur Berlin obligera l’ennemi à revenir et mettra tout en confusion.
Je vois, par votre état de situation, que la 3e division a 8,140 hommes, mais, comme elle recevra d’ici là trois bataillons qui lui manquent, je puis la porter pour 10,000 hommes. La 40e division aura également 10,000 hommes, ainsi que la 50e. Vous pourrez donc marcher avec 10,000 hommes de la 3e division, 10,000 hommes de la 40e, et 5,000 hommes de la 50e, ce qui, joint aux 10,000 Danois, vous fera 35,000 hommes d’infanterie. Je vois que le 28e de chasseurs aura près de 1,000 hommes; je suppose qu’avant le 20 vous en aurez monté au moins 400. Le 17e de lanciers lithuaniens vous donnera également400 chevaux, ce qui vous fera 800 hommes de cavalerie. Enfin vous aurez 1.200 chevaux du régiment de marche, et il vous restera les 2,000 hommes à pied de la brigade provisoire de cuirassiers que vous emploierez à la garde de Hambourg, en attendant qu’ils soient montés.
Dresde, 11 août 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Filtre, il est probable que les ennemis dénonceront l’armistice le 11 ou le 12, et que les hostilités recommenceront le 17 ou le 18. L’Autriche paraît décidée à nous déclarer la guerre ; elle a des engagements avec l’Angleterre et est entrée dans tous les projets de cette puissance.
Vous aurez reçu l’ordre par lequel j’ai formé le 5e corps de cavalerie. Les trois brigades bis, composées de ce qui vient d’Espagne et des dépôts, se réunissent à Mayence. J’ai envoyé le général de division Milhaud pour en prendre le-commandement. Envoyez-y trois généraux de brigade pour commander ces trois brigades, et redoublez vos efforts pour que les dépôts envoient tout ce qu’ils auront de disponible.
Vous aurez également reçu mon ordre qui forme le 14e corps. Il est déjà rendu sur Dresde. Il est important que vous réitériez vos ordres pour que rien de ce qui serait destiné à ce corps ne passe par la ligne de Bayreuth ; tout doit suivre la route de l’armée par Fulde, Erfurt et Dresde. Il en est de même pour ce qui vient d’Augsburg.
Je pense qu’il faut prendre sans délai toutes les mesures nécessaires pour compléter le corps d’observation de Bavière, formé des 51e, 52e, 53e et 54e divisions; faites diriger tous ses bataillons sur Mayence. Voyez le ministre de la marine pour que les 10,000 conscrits de la marine soient sans délai mis en marche sur Mayence, armés de leurs fusils et de leurs gibernes, et munis de leurs schakos, leurs capotes et leurs havresacs complets. Vous verrez le comte de Cessac pour qu’à leur arrivée à Mayence ces conscrits trouvent les habits d’infanterie légère ou de ligne et les vestes et les culottes dont ils auront besoin. Veillez à ce que tout ce qui ne pourrait pas être arrivé le 20 à Magdeburg ou à Hambourg et à Dresde reste à Wesel ou à Mayence jusqu’à ce qu’il puisse en partir un gros convoi se dirigeant sur Erfurt ou sur Minden.
J’ai donné ordre au général de division Lemoine d’aller prendre à Wesel le commandement des six bataillons de la 6e division bis qui y sont encore. S’il y avait des batteries destinées pour Magdeburg, organisées, il les prendrait avec lui pour s’en servir. Dans tous les cas, il faudra qu’il ait six pièces de canon. Dirigez également sur Wesel, pour être sous les ordres de ce général, 5 à 600 hommes de cavalerie des 24e et 25e divisions. Le général Lemoine formera ainsi à Minden un corps d’observation de 4 à 5,000 hommes. Il correspondra avec le prince d’Eckmühl, avec le général Lemarois, avec mon ministre à Cassel, afin de pouvoir agir selon les circonstances.
Dresde, 12 août 1813, quatre heures du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, en quelque lieu que se trouve le général Lemoine, donnez-lui ordre de se rendre à Wesel, de prendre le commandement des bataillons de la Ge division bis, d’y joindre tout ce qui serait destiné à passer par Wesel pour rejoindre l’armée sur Magdeburg ; de tâcher d’y réunir huit pièces d’artillerie à cheval ou à pied, de celles qui sont destinées à l’armée ; d’y réunir aussi tous les détachements de cavalerie que les 24e et 25e divisions militaires auraient à envoyer à l’armée, et d’aller prendre position avec cette colonne à Minden, d’où il correspondra avec le prince d’Eckmühl, avec le général Lemarois et avec mon ministre à Cassel, afin de pouvoir de ce point, selon les circonstances, se porter partout où il sera nécessaire et être à portée de me rejoindre promptement quand il en recevra l’ordre.
Dresde, 12 août 1813, quatre heures du matin.
Au général comte Lemarois, gouverneur de Magdeburg.
Monsieur le général Lemarois, l’armistice est dénoncé; les hostilités commenceront le 17. Retirez l’artillerie que vous auriez dans vos petits postes, ainsi que les hommes qui s’y trouvent et qui seraient compromis. Si le fort de Tangermünde n’est pas bien assuré, retirez-en de même l’artillerie et la garnison ; car que signifieraient 3 à 400 hommes qui seraient là bloqués par de la cavalerie ? Il vaut mieux avoir toutes ses forces réunies que de les compromettre.
Je vous ai déjà fait connaître que le prince d’Eckmühl déboucherait, le 18, avec 40,000 hommes entre Berlin et la mer, et que le duc de Reggio, avec les 12e, 4e et 7° corps commandés par les généraux Bertrand et Reynier, et avec le troisième corps de cavalerie, commandé par le duc de l’adoue, déboucherait le 18 directement sur Berlin.
Annoncez que vous allez vous-même partir de Magdeburg avec une force de 18,000 hommes. Je suppose que des généraux vous sont arrivés. Organisez une division d’artillerie et faites ce qui est possible pour contenir l’ennemi au-delà de l’Elbe, menacer son pont s’il en jetait un, et vous mettre en communication avec le duc de Reggio. Je suppose que vous avez un chiffre; il faudra désormais s’en servir.
Envoyez un de vos aides de camp au prince d’Eckmühl; qu’il soit de retour le IG et vous fasse connaître la position et les projets du, maréchal. Ayez un chiffre avec ce maréchal ainsi qu’avec le duc de Reggio. Je suppose que le chiffre de l’état-major avec eux est le même, assurez-vous-en. Vous me ferez connaître ce que l’officier que vous aurez envoyé au prince d’Eckmühl vous aura dit à son retour.
- S. J’ai ordonné au général Lemoine de se porter avec six bataillons de la 6B division bis à Minden, pour y faire un petit corps de réserve.
Dresde, 12 août 1813, au matin.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg
Mon Cousin, j’ai nommé le général Girard, qui s’est si bien distingué à Lützen et qui est guéri de ses blessures, pour se rendre à Magdeburg. Il aura sous ses ordres, le ler corps du général Dombrowski, composé de huit bataillons polonais et de deux régiments de cavalerie, et 2° une division de 9,000 hommes tirés de la garnison de Magdeburg. Ce général pourra donc réunir entre Berlin, Wittenberg et Magdeburg 15,000 hommes qui serviront à établir une communication entre vous et le duc de Reggio. Cependant ce corps ne doit pas s’éloigner de manière à être isolé de Magdeburg, parce que la garnison de cette place ne serait plus suffisante. Le général Lemarois ayant le chiffre de l’état-major, que vous devez avoir aussi, vous pourrez correspondre.
Dresde, 12 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, envoyez l’ordre au commandant du 1er corps de cavalerie, qui est à Sagan, de partir le 13 pour se porter sur Gœrlitz, où il devra arriver le 15 ou au plus tard le 16, les hostilités devant commencer le 17.
Qu’il me fasse connaître la route qu’il prendra chaque jour. Il m’enverra aussi la situation de son corps.
S’il a des malades, qu’il les évacue aussitôt sur Torgau.
Donnez ordre au duc de Bellune de se porter sur Gœrlitz et d’y arriver le 16; il fera connaître la route qu’il prendra et où il se trouvera chaque jour.
Il laissera du côté de Guben une brigade de cavalerie et quelques compagnies de voltigeurs jusqu’au 17.
Donnez ordre au duc de Trévise de se rendre à Bunzlau, d’y arriver le 15, afin de pouvoir être à Gœrlitz le 17, s’il est nécessaire. Il amènera avec lui tout ce qui appartient au quartier général, savoir : les compagnies de sapeurs, le génie, les marins, etc., enfin il ne laissera que ce qui appartient à la garnison de Glogau. S’il y a des malades ou malingres, il les laissera à Glogau.
Prévenez le prince de la Moskova, le général Lauriston, le duc de Raguse et le duc de Tarente de la dénonciation de l’armistice, et que les hostilités recommencent le 17.
Donnez ordre au 2e corps de cavalerie de se rendre à Haynau, où il prendra les ordres du prince de la Moskova; prévenez le prince de cela.
Donnez ordre au général Sébastiani de laisser dans le cercle de Freystadt 5 à 600 chevaux, qui préviendront de ce qui se passera et le rejoindront le 17.
Donnez l’ordre au prince Poniatowski qu’il se rende à ses quartiers, qu’il réunisse ses troupes et s’éclaire bien depuis Neustadt jusqu’aux postes du duc de Tarente; qu’il se prépare à évacuer Zittau sans perte, s’il y a lieu, et choisisse pour placer ses troupes une bonne position militaire.
Dresde, 12 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, écrivez sur toute la ligne de l’Elbe et sur toute la ligne de l’armée qu’on ne laisse plus passer personne ni communiquer avec l’ennemi, et qu’on retienne tout ce qui irait vers le pays ennemi, afin d’empêcher, autant que possible, l’ennemi d’avoir des renseignements positifs sur nos mouvements.
Dresde, 12 août 1813.
ORDRES POUR LE MAJOR GENERAL.
Dans les huit redoutes de la rive droite de l’Elbe, il sera construit huit baraques conformes au modèle de celles de la jeune Garde; mais on choisira des arbres plus gros, de sorte que les hommes soient à l’abri, non-seulement de la fusillade, mais de la mitraille. Le commandant du génie donnera l’ordre pour tracer ces baraques. Elles seront doubles de celles de la Garde et contiendront 40 hommes. Le comte de Lobau donnera l’ordre pour que les bataillons de la jeune Garde soient chargés chacun de faire une de ces baraques, et pour qu’elles soient terminées demain.
Il sera construit pareillement de semblables baraques dans les cinq redoutes de la rive gauche. Les deux bataillons du régiment de Westphalie et les quatre bataillons du 11e de tirailleurs et du 11e de voltigeurs construiront ces baraques.
Il sera placé une pièce de canon de campagne dans chacune de ces treize redoutes ; cette pièce sera sans caisson, mais il sera placé dans un petit magasin 200 coups à tirer et 5,000 cartouches d’infanterie avec les pierres à feu nécessaires. Il y aura dans chaque redoute, et à dater de demain, un canonnier de service et 25 hommes d’infanterie de garde; ils seront cinq ou dix jours de garde. Le canonnier apprendra à six hommes les manœuvres de la pièce d’artillerie. Il y aura un sergent chargé de l’inspection et du commandement de ces pièces sur la rive gauche, et un autre sergent sur la rive droite. Ils visiteront les magasins et feront tous les jours l’inspection des pièces qui seront dans les redoutes. Il y aura tous les jours, de service dans la grande lunette, 100 hommes d’infanterie, un capitaine de la garnison, quelques officiers, et au moins un sergent d’artillerie, un caporal et quatre canonniers.
Il sera fait un approvisionnement de sacs à terre et de gabions suffisant pour barricader en peu d’heures les débouchés des cinq rues qui donnent sur la brèche de Wilsdruf, et provisoirement on établira à chacun de ces débouchés une barrière, de sorte que ces rues soient fermées tous les jours. En cas de rapproche de l’ennemi, on se servira des sacs à terre et gabions, et derrière les barrières l’on établira des traverses de dix-huit pieds de largeur. On placera de suite des palanques devant toutes les portes des maisons qui donnent sur la brèche, autant que cela ne gênera pas la communication de ces maisons et qu’elles auront une autre issue. Dans le cas contraire, on déposera les palanques à portée, pour qu’elles soient placées dans une heure. On aura aussi des gabions et des sacs à terre à portée pour en placer dans tontes les fenêtres, de manière que, si l’ennemi se présente, on s’établira dans toutes ces maisons, et les sacs à terre serviront de créneaux. La même opération sera faite pour les maisons qui donnent sur la brèche de Pirna, et tout cela sans donner de l’inquiétude aux habitants.
On réunira tous les ouvriers au fossé de la porte de Pirna, de manière que cette partie soit renforcée par un fossé plein d’eau; ce travail est le plus urgent de tous.
Toutes les portes des murs de jardin, ainsi que les sept à huit portes des faubourgs, seront fermées par une palanque, de manière qu’on ne puisse entrer que par ces portes des faubourgs. Il sera placé, avant le 18, une pièce de campagne à chaque porte et barrière des faubourgs, avec un canonnier de service et des servants pris dans les corps de garde, qui seront de 25 hommes.
Le pont en bois, qui est sur le fossé plein d’eau, près de la brèche de Wilsdruf, sera couvert par une barrière et un cheval de frise, et tous les soirs on en enlèvera des planches; la nuit l’usage en sera interdit. On établira à la porte du Soleil une bonne porte et une barrière.
On procédera à l’armement de la place de manière que, le 18, quatre-vingts pièces de canon soient en batterie, et vingt en réserve. Il y aura dans la place, indépendamment d’une compagnie d’artillerie saxonne, une compagnie d’artillerie française forte de 120 hommes; il y aura un colonel, un chef de bataillon et cinq ou six officiers d’artillerie.
Dans le cas où l’ennemi approcherait, les ponts-levis seront levés la nuit, et toutes les mesures seront prises. Dans le cas où la ville serait menacée, on s’emparera des quatre maisons qui sont sur la contrescarpe, près de la porte de Pirna, et, selon les circonstances, on les démolira ou on les occupera militairement.
Passé le 18, on réunira tous les bateaux et batelets dans Königstein et dans Dresde; tout ce qui sera plus bas qu’à mi-chemin de Meissen sera renfermé dans Torgau. On laissera subsister les barques, niais il y aura un corps de garde, une sentinelle et une pièce.
Toutes les voitures des équipages non attelées qui sont en répara-lion, ainsi que de l’artillerie, soit française, soit saxonne, seront renfermées dans les fortifications de Dresde, sur les différentes esplanades.
Tous les dépôts de malades, de blessés et de convalescents qui sont hors de Dresde y rentreront à dater du 18, et des patrouilles de gendarmerie française et saxonne parcourront les campagnes pour faire rentrer les hommes isolés.
Dès demain 13, on coupera les bois tout autour et à cent toises des redoutes qui sont sur la rive droite; ces bois serviront pour des abatis dans les lieux où cela sera nécessaire. On placera des chevaux de frise aux différentes issues des portes.
Dans la journée du 14 au plus tard, les adjudants de place qui doivent commander les faubourgs, et les officiers supérieurs qui commanderont sur les deux rives, seront à leur poste et le service commencera.
On exercera 400 hommes de la garnison à la manœuvre du canon, selon l’usage établi dans le service des places.
On exécutera l’ordre donné de faire de petits retranchements en bois à 120 toises des redoutes, pour contenir les avant-postes. On fera aussi des retranchements, en corps d’arbres et d’une forme carrée, en avant des portes et du pont en pierre.
Le gouverneur me rendra compte le 14 de l’état des travaux.
Le major général prendra les dispositions nécessaires pour l’exécution du présent ordre.
Dresde, 12 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, le major général vous aura annoncé que les ennemis ont dénoncé hier l’armistice. Les hostilités recommenceront donc le 17. Que votre quartier général sorte le plus tôt possible de Hambourg, et ne vous laissez pas masquer par des forces inférieures, et surtout par ce tas de canaille qui ne signifie rien.
J’ai fait venir le général Vandamme à Dresde ; mais le duc de Reggio avec son corps, qui est le 12e, le 4e corps commandé par le général Bertrand, fort de trois divisions, le 7e corps commandé par le général Reynier, fort de trois divisions, et le duc de Padoue, fort de trois divisions de cavalerie, ce qui fait une armée de 70 à 80,000 hommes, débouchera, le 18, de Luckau sur Berlin. Vous sentez que ce corps, n’étant qu’à trois journées de Berlin, pressera davantage l’ennemi, et qu’il serait possible qu’il portât toutes ses forces contre lui. Vous devez donc manœuvrer de manière à inquiéter l’ennemi sur sa droite et à vous réunir avec le corps du duc de Reggio sur Berlin. Aussitôt que vous serez éloigné de Hambourg, vous aurez une communication sûre avec Magdeburg.
Le général Lemarois a ordre de former une division active pour manœuvrer autour de Magdeburg.
Comme il est probable que l’Autriche est contre nous, les circonstances deviennent fortes. Il faut que vous mettiez la plus grande activité dans vos opérations. Aussitôt que vous aurez reçu cette lettre, votre corps doit quitter Hambourg et menacer le flanc de l’ennemi. Annoncez l’arrivée d’un corps considérable venant de Wesel. J’ai ordonné au général Lemoine de se porter à Minden avec six bataillons de la 6e division bis, afin d’y former une réserve entre Cassel, Magdeburg et Hambourg.
Dresde, 12 août 1813.
À Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant l’armée de l’Elbe, à
Mon Fils, les ennemis ont dénoncé hier l’armistice : les hostilités recommenceront donc le 17. Je n’ai pas la nouvelle que l’Autriche m’ait déclaré la guerre; mais je suppose que j’en recevrai la nouvelle dans la journée. Dès lors les hostilités avec elle commenceront également le 17. Tout porte à penser que de votre côté l’Autriche n’est pas en mesure : emparez-vous donc des bonnes positions des montagnes. Je suppose que la division napolitaine se dirige sur Bologne.
Dresde, 12 août 1813.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, l’armistice a été dénoncé hier par l’ennemi, et les hostilités recommenceront le 17. Correspondez avec mon ministre de la guerre et le duc de Valmy pour organiser promptement votre régiment de hussards français. Le ministre de la guerre a ordre de vous envoyer les officiers nécessaires, mais vous devez aussi designer vous-même ceux que vous connaissez et qui ne sont pas à l’armée. Je n’ai pas encore la nouvelle que l’Autriche nous ait déclaré la guerre, mais vous devez calculer là-dessus. J’ai ordonné à un général de partir de Wesel avec six bataillons de la 6e division bis, et de se porter à Minden, où il formera un corps d’observation, qui agira selon les circonstances.
Dresde, 12 août 1813.
INSTRUCTIONS POUR LE PRINCE DE LA MOSKOVA ET POUR LE DUC DE RAGUSE.
L’Autriche nous a déclaré la guerre. L’armistice est dénoncé. Les hostilités recommenceront le 17.
Voici le plan d’opération qu’il est possible que j’adopte, mais auquel je me déciderai définitivement avant minuit. Concentrer toute mon armée entre Gœrlitz et Bautzen, aux camps de Königstein et de Dresde. Si des fortifications ont été faites à Liegnitz et à Bunzlau, les détruire. Envoyer le duc de Reggio avec les 12e, 4e et 7e corps sur Berlin, dans le temps que le général Girard débouchera avec 10,000 hommes par Magdeburg, et le prince d’Eckmühl avec 40,000 hommes par Hambourg. Indépendamment de ces 110,000 hommes qui marcheront sur Berlin et de là sur Stettin, j’aurai sur Gœrlitz, savoir : les 2e, 3e, 5e, 6e, 11e, 14e et 1er corps d’armée, les 1er, 2e, 4e, 5e corps de cavalerie et la Garde. Cela fera près de 300,000 hommes. Avec ces 300,000 hommes je prendrai position entre Gœrlitz et Bautzen, de manière à ne pas pouvoir être coupé de l’Elbe, à me tenir maître du cours de ce fleuve, à m’approvisionner par Dresde, à voir ce que veulent faire les Russes et les Autrichiens, et à profiter des circonstances.
Je préférerais rester à Liegnitz; mais de Liegnitz à Dresde il y a quarante-huit lieues, c’est-à-dire huit marches, et en longeant toujours la Bohème. Il n’y en aurait que trente-six de Bunzlau, et vingt-quatre de Gœrlitz; si je prenais une position intermédiaire entre Gœrlitz et Bautzen, il n’y en aurait que dix-huit; ce pays se trouverait alors plein de troupes, et nous y serions pour ainsi dire entasses; nous aurions de la peine à vivre un mois. Pendant ce temps-là, ma gauche entrerait à Berlin, éparpillerait tout ce qui se trouve là, et, si les Autrichiens et les Russes livraient bataille, nous les écraserions. Si nous perdions la bataille, nous serions plus près de l’Elbe, et plus en mesure de profiter de leurs sottises. Je ne vois guère qu’on puisse hésiter pour Liegnitz.
I1 n’en est pas de même de Bunzlau : je ne me dissimule pas que cette position a l’avantage de me tenir dans le cas d’empêcher l’ennemi de passer entre l’Oder et moi; au lieu que, entre Bautzen et Gœrlitz, l’ennemi passant par Bunzlau peut se porter sur Gœrlitz.
Le quartier général de l’armée autrichienne se réunit à Hirschberg; il paraît que les Autrichiens veulent opérer à Zittau.
Faites-moi connaître ce que vous pensez de tout cela. Je suppose que tout doit finir par une grande bataille, et je pense qu’il est plus avantageux de la livrer près de Bautzen, à deux ou trois marches de l’Elbe, qu’à cinq ou six marches : mes communications seront moins exposées; je pourrai me nourrir plus facilement, d’autant plus que, pendant ce temps, ma gauche occupera Berlin et balayera tout le bas Elbe, opération qui n’est point hasardeuse, puisque mes troupes ont Magdeburg et Wittenberg à tout événement pour retraite. J’éprouve bien quelque regret d’abandonner Liegnitz; mais, en l’occupant, il serait difficile de réunir toutes mes troupes; il faudrait les diviser en deux armées, et ce serait une fâcheuse position que celle de longer ainsi la Bohême sur un espace de trente lieues, d’où l’ennemi pourrait partout déboucher et se trouverait dans une position naturelle. II me semble que la campagne actuelle ne peut nous conduire à aucun bon résultat, sans qu’au préalable il y ait une grande bataille. Je n’ai pas besoin de vous dire que, tout en s’échelonnant, il est indispensable de menacer de prendre l’offensive, en se contentant d’avoir sur l’ennemi le pays de neutralité et une ou deux lieues en avant.
L’Autriche ayant une armée contre la Bavière et une contre l’Italie, je ne suppose pas qu’elle puisse avoir contre moi plus de 100,000 hommes sous les armes. Je suis plus loin de croire que les Prussiens et les Russes réunis puissent en avoir 200,000, en comptant ce qu’ils ont à Berlin et dans cette direction. Toutefois il me semble que, pour avoir une affaire décisive et brillante, il y a plus de chances favorables à se tenir dans une position plus resserrée et à voir venir l’ennemi.
Je compte porter le 14 mon quartier général à Bautzen.
Évacuez à toute force vos malades.
Le prince de la Moskova pourra même profiter de Glogau.
Il enverra un officier au duc de Tarente, afin d’être prévenu de ce que l’ennemi fait sur son extrême droite.
Dresde, 12 août 1813.
Au maréchal Marmont, duc de Raguse, commandant le 6e corps de la Grande Armée, à Bunzlau.
Je désire connaître si, en avant ou en arrière de Bunzlau, il y aurait une belle position où un corps de 200,000 hommes pût être placé favorablement pour arrêter un ennemi qui déboucherait en force des frontières de Bohème et de Silésie et lui donner bataille.
Faites-moi connaître aussi s’il existe une bonne route de Bunzlau à Hoyerswerda.
Dresde, 12 août 1813.
Au maréchal Gouvion Saint-Cyr, commandant le 14e corps de la Grande Armée, à
Rendez-vous dans la nuit à Dresde, et faites connaître votre arrivée à mon aide de camp de service, afin que je puisse vous voir demain, à la pointe du jour.
Pressez le mouvement de la 44e et de la 45e division et de toutes vos troupes sur Freyberg, et celui de la 42e et de la 43e division sur Pirna et Dohna.
Dresde, 12 août 1813.
Au général Mouton, comte de Lobau, aide-major de la garde impériale, à Dresde.
Donnez ordre au général Nansouty de charger le général commandant la 2e division de la Garde d’avoir des postes sur Neustadt et sur les chemins qui de Bautzen vont en Bohême.
Donnez ordre à la division Delaborde de se tenir prête à partir demain avec ses trois batteries, et de prendre des vivres pour quatre jours; elle aura son artillerie, son organisation du génie, ses ambulances et son administration.
Vous nommerez un général de brigade pour rester avec la brigade composée du 11° de tirailleurs et du 11e de voltigeurs, et qui doit faire la garde de Dresde. Vous lui donnerez ordre de laisser des postes au camp, afin de le garder et de veiller à ce qu’on ne le dégrade pas.
Vous donnerez ordre à la vieille Garde de se tenir prête à partir demain; même ordre à l’artillerie, aux équipages militaires, et enfin à tout le service de la Garde.
Donnez des ordres pour qu’on évacue, dans la journée d’aujourd’hui et demain, 6 ou 700 malades de la Garde sur Torgau, où il sera établi un hôpital de la Garde.
Donnez ordre à l’ordonnateur de passer des marchés et de faire tout ce qui sera possible pour que sous deux jours tout ce qui doit compléter l’approvisionnement de Bautzen soit expédié.
Dresde, 12 août 1813.
Au général Mouton, comte de Lobau, aide-major de la garde impériale, à Dresde.
Vous trouverez ci-jointe l’organisation de la Garde à cheval que je viens d’arrêter. Donnez tous les ordres au général Nansouty, au général Dulauloy et à l’ordonnateur de la Garde. La 1e division se réunira à Wurschen, où seront le quartier général et l’artillerie; la 2e division se réunira à Bautzen, où seront également le quartier général et l’artillerie; la 3e division à Stolpen, où seront le quartier général et l’artillerie. Que tout se mette en mouvement dès aujourd’hui, et que le 14 tout le monde soit à sa place, sans cependant qu’on fasse avancer à marche forcée. Expédiez les ordres sur-le-champ.
Vous me renverrez copie de l’organisation.
Dresde, 12 août 1813.
Au maréchal Oudinot, duc de Reggio, commandant le 12e corps de la Grande Armée, à Luckau.
Mon Cousin, le major général vous a fait connaître que les hostilités recommenceront le 17. Il vous a fait également connaître que mon intention est que, le 14, la division Guilleminot et votre cavalerie légère soient réunies à Baruth, et que, le 15, le reste de votre corps d’armée y soit réuni, et que vous y ayez votre quartier général. Vous emploierez ce temps à diriger sur Baruth 100,000 rations de pain que vous ferez faire à Luckau.
Le major général vous a fait connaître que le 7e corps, commande par le général Reynier et composé de trois divisions, deux saxonnes et une française, faisant 18,000 hommes présents sous les armes, avec une brigade de l,600 chevaux saxons, arrivera le 16 ou le 17 à Luckau ; que le 4° corps, commandé par le général Bertrand et composé d’une division française, d’une division italienne et d’une division wurtembergeoise, avec une brigade de cavalerie légère, arrivera également le 16 ou le 17 à Luckau; enfin que le duc de Padoue, avec le 3e corps de cavalerie, fort de trois divisions, faisant 6,000 chevaux, se rend aussi le 16 ou le 17 à Dahme. Il passera l’Elbe à Torgau. Envoyez des ordres à ces trois généraux pour leurs directions.
Le 18, si l’ennemi n’est pas en forces supérieures devant vous, vous pourrez entrer aussitôt sur le territoire ennemi, ce qui vous mettra à même d’avoir des renseignements sur tout ce qui s’est fait et se passe devant vous. Le 4e corps, que vous pourrez diriger sur Baruth par Lübben, si vous le jugez plus convenable, le corps du général Reynier, et le 3e corps de cavalerie, qui arrivera à Baruth par Dahme, vous mettront à même de commencer sérieusement vos opérations, de sorte que le 21 ou le 22 vous puissiez être à Berlin.
Vous aurez ainsi sous vos ordres neuf divisions d’infanterie avec trois brigades de cavalerie légère et trois divisions de cavalerie ; cela formera: 12e corps, 16,000 hommes d’infanterie, 1,400 de cavalerie, soixante-deux pièces d’artillerie; 4e corps, 22,000 hommes d’infanterie, 1,000 de cavalerie, soixante-deux pièces; 7e corps, 18,000 hommes d’infanterie, 1,600 de cavalerie, soixante-deux pièces; 3e corps de cavalerie, 6,000 hommes, vingt-quatre pièces; total, 56,000 hommes d’infanterie, 10,000 de cavalerie, deux cent dix pièces d’artillerie. Ce qui fait 70 à 75,000 hommes. Dans cette artillerie, il y a quatre batteries de pièces de 12.
Vous ne devez pas perdre de monde devant des villages et des postes retranchés; mais vous devez sur-le-champ faire avancer les trente-deux pièces de 12 de vos quatre batteries de réserve, avec une quarantaine d’obusiers, au moyen de quoi vous détruirez en deux heures toutes les fortifications de campagne.
Le général Girard se rend à Magdeburg. Il aura sous ses ordres le corps du général Dombrowski, composé de huit bataillons polonais, avec deux régiments de cavalerie et une batterie d’artillerie à cheval, faisant à peu près 5,000 hommes. Au moment de l’expiration de l’armistice, s’il était poussé par des forces supérieures, il se replierait sur Wittenberg; mais il reprendra l’offensive aussitôt qu’il le pourra, el il marchera pour maintenir la communication entre vous et Wittenberg. Outre le corps du général Dombrowski, le général Girard aura sous ses ordres une division de 8 à 9,000 hommes avec laquelle il manœuvrera en avant de Magdeburg. Il tâchera de se lier avec le général Dombrowski, et réunira ainsi, entre Wittenberg, Magdeburg •et Berlin, 12 à 15,000 hommes.
Le prince d’Eckmühl débouchera le 18. Dès ce moment, son quartier général est hors de Hambourg, et son corps est réuni sur la rive droite de l’Elbe, renforcé par 15,000 Danois; ce qui le porte à plus de 40,000 hommes. Il suivra l’ennemi, ou l’attaquera s’il est en nombre inférieur, et manœuvrera de manière à le couper de la mer et à se placer entre Berlin et Stettin.
Il y aura donc contre Berlin votre corps fort de 70,000 hommes, le corps du général Girard, fort de 12,000 hommes, et celui du prince d’Eckmühl fort de 40,000, c’est-à-dire en tout 122,000 hommes.
Après avoir occupé Berlin, vous manœuvrerez pour établir vos communications avec Wittenberg et Magdeburg, et le général Girard sera merveilleusement placé pour cela. Vous débloquerez Küstrin et vous ravitaillerez cette place en y jetant tous les vivres que vous pourrez trouver à vingt lieues autour. Vous débloquerez et ravitaillerez de même Stettin, d’où vous retirerez tous les généraux qui sont inutiles, en n’y en laissant qu’un seul pour commander la place. Vous -obligerez les Suédois à se rembarquer et vous rejetterez l’ennemi au-delà de l’Oder. J’ai fait préparer un équipage de siège pour essayer de reprendre Spandau.
Le maréchal Saint-Cyr, avec le 14e corps, a son quartier général à Pirna. Je fais venir à Dresde le général Vandamme avec son corps d’armée, et, quoique je m’attende à ce que l’Autriche me déclare la guerre dans peu de jours, je suis en mesure de faire face à tout. Le vice-roi, avec une année de 80,000 hommes, se porte sur Görtz. Indépendamment des 122,000 hommes que je dirige contre Berlin, j’oppose deux armées aux armées russes, prussiennes et autrichiennes, égales à ce qu’elles peuvent me présenter.
Le général Lemarois, le prince d’Eckmühl, le général Lapoype, le général Durosnel, le gouverneur de Torgau, ont un chiffre qui est le même que celui que vous avez. Il faut en profiter pour leur écrire en chiffre ce qu’il serait dangereux que l’ennemi connût.
Le commissaire des guerres de Torgau ne vous a pas envoyé le complément de vos 6,000 quintaux de farine; il vient de recevoir l’ordre de le faire; envoyez à Torgau, pour le prendre, toutes vos charrettes de réquisition. Mais vous devez garder vos équipages pour l’approvisionnement de Baruth et pour vous suivre.
Faites en sorte que le général Bertrand et le général Reynier trouvent des vivres à Luckau pour leur consommation, et même pour en charger leurs voitures disponibles.
Faites-moi connaître quel est le commandant que vous laisserez à Luckau.
Dresde, 12 août 1813.
Au général baron Rognat, commandant le génie de la Grande Armée, à Dresde.
Monsieur le Général Rogniat, rendez-vous, avec un officier du génie de votre confiance, à Bautzen et Gœrlitz, et reconnaissez trois bonnes positions où l’armée puisse être centralisée, l’une derrière Gœrlitz, occupant Gœrlitz comme tête de position, la seconde en avant de Bautzen et la troisième derrière Bautzen. L’aile droite doit surtout être bien appuyée, cette armée pouvant être attaquée par les Russes et les Autrichiens.
Dresde, 12 août 1813.
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris
Mon Cousin, le ministre des relations extérieures vous a fait connaître que l’Autriche nous a déclaré la guerre. Son manifeste est assez insignifiant. L’analyse, en bon français, est qu’elle croit l’occasion bonne pour reprendre son influence.
Les négociations de Prague n’ont pas eu lieu : on n’a pas même pu échanger les pouvoirs. Les plénipotentiaires n’ont pas même pu se voir. Les affaires d’Espagne ont relevé les espérances; l’intrigue anglaise a fait le reste. Le 17 nous nous battrons.
Je désire que l’Impératrice fasse son voyage de Cherbourg et que ce ne soit qu’à son retour qu’elle apprenne tout cela. Faites-la partir le 17.
Je vous prie de faire réunir le conseil des ministres pour savoir s’il ne faudrait pas lever 25,000 conscrits dans les départements du Languedoc et de la Guyenne, qu’on dirigerait sur Bayonne pour renforcer les armées d’Espagne. Si vous êtes de cet avis, présentez le sénatus-consulte au Sénat.
Dresde, 12 août 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Correspondez avec le roi de Westphalie pour lui fournir les officiers nécessaires au régiment Jérôme-Napoléon, qui s’organise à Cassel. Je crois en avoir déjà nommé le colonel. Envoyez-y de bons chefs d’escadron. Le Roi mande qu’il a l’habillement, l’armement et les chevaux tout prêts. Dans les circonstances actuelles, il est important pour Cassel que le Roi ait ce régiment dans la main.
Dresde, 13 août 1813.
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris
Mon Cousin, j’ai reçu votre lettre du 8. Je porte demain mon quartier général à Bautzen. Toute l’armée est en mouvement; nous nous préparons à nous battre le 17. Le temps s’est remis au beau, et les chaleurs sont assez fortes.
Dresde, 13 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, vous donnerez ordre au général commandant le génie d’exiger des commandants du génie des différents corps de donner des relations sur les événements qui se passent; c’est un compte qu’il est d’obligation que chaque corps rende à l’Empereur.
Recommandez-leur de dire entièrement la vérité; dites-leur que leurs rapports seront connus seulement du général de leur arme et de l’Empereur. Écrivez la même chose au général commandant l’artillerie. J’entends qu’il me soit fait chaque jour un rapport sur l’administration, un sur l’artillerie et un sur le génie.
Donnez le même ordre aux généraux commandant les différents corps aux ordres du duc de Reggio. Exigez que, outre les rapports qu’ils rendront de leurs corps, ils donnent tous les renseignements qui pourront m’instruire de la situation des choses.
Dresde, 13 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, vous ferez connaître au maréchal Saint-Cyr que ses quatre divisions sont destinées à couvrir Dresde et le pont de Königstein; que la forteresse de Königstein et le fort de Stolpen sont sous ses ordres, et qu’il doit couvrir la frontière depuis au-delà de Neustadt jusqu’au débouché de Hof, et être instruit de tout ce qui s’y passe.
Vous demanderez au général Gersdorf qu’il y ait auprès du maréchal Saint-Cyr un officier supérieur saxon, qui soit chargé de recevoir les rapports des baillis et de la gendarmerie saxonne sur toute cette frontière, ainsi que de veiller à l’approvisionnement du corps d’armée.
Faites connaître à ce maréchal qu’il doit placer deux bataillons de la 42e division au camp de Lilienstein, et le général commandant celle division à Hohnstein, avec l’artillerie de la division. Il placera au débouché de Neustadt une avant-garde de cavalerie et d’infanterie, qu’il mettra sous les ordres du même général, auquel il donnera à cet effet 4 à 500 chevaux, et il portera lui-même son quartier général du côté de Pirna. Dites-lui de placer toute la 45e division et toute la 43′, avec leur artillerie, sur le plateau, dans la position qu’il reconnaitra la meilleure, du côté de Berggiesshübel, pour couvrir les deux roules qui viennent de la Bohême à Dresde. Qu’il occupe Hellendorf, avec une avant-garde de cavalerie, d’infanterie et d’artillerie : il laissera son artillerie légère à portée de renforcer son camp. II doit employer aussi une partie de la 44e division au même but. II emploiera le général Bonet pour commander ce camp, et, en général, il l’emploiera indistinctement pour commander plusieurs divisions ou pour commander là où il ne pourra pas être lui-même. Le reste de la 44° division sera employé à observer les autres débouchés. Il doit former, sur son extrême droite, du côté de la route de Leipzig, un corps d’observation qu’il pourra faire commander par le général Pajol. Ce corps devra être d’un millier de chevaux avec deux pièces d’artillerie à cheval, si cela est nécessaire, et quelques bataillons d’infanterie. Le général commandant la 44e division aura ordre de soutenir le général Pajol, qui éclairera la route de Leipzig et toute cette frontière jusqu’au débouché de Hof. Le maréchal Saint-Cyr fera placer une garnison dans le fort de Stolpen.
Vous lui ferez connaître que ceci ne doit être considéré que comme une instruction générale. Son but est de couvrir Dresde sur les deux rives, d’assurer la communication du pont de Königstein à Bautzen, et de veiller à ce que les partisans ennemis ne s’introduisent pas sur la route de Neustadt à Bautzen. Mon quartier général étant à Bautzen, le général de cavalerie commandant l’avant-garde placé au débouché de Neustadt, ainsi que le général commandant la 42e division, auront l’instruction de vous envoyer directement à Bautzen leurs rapports qui pourraient presser, indépendamment de ceux qu’ils enverraient au maréchal. Faites connaître au maréchal Saint-Cyr qu’il doit instruire tous les jours le général Durosnel, gouverneur de Dresde, de ce qui se passe et de tout ce qui peut intéresser la sûreté de ce dépôt de l’armée. Dites-lui qu’il reste à Dresde pour garnison huit bataillons et plusieurs compagnies d’artillerie. Si l’ennemi débouchait sur lui avec des forces beaucoup plus considérables que les siennes, il devrait retarder sa marche autant que sa position le permettrait, et se replier sur Dresde, où il prendrait le commandement supérieur du camp retranché et de la garnison, afin de défendre la ville contre l’ennemi; il conserverait cependant toujours Stolpen, le pont de Königstein, ainsi que les redoutes de Königstein, afin que je puisse faire déboucher des troupes par Königstein pour les porter sur les derrières de l’ennemi, ou bien, selon les circonstances, revenir sur Dresde. Il est important de faire réparer le chemin qui du pont de Königstein va à Hellendorf et à Berggiesshübel, afin que la communication entre les deux rives soit la plus prompte et la plus directe possible.
Faites connaître au maréchal que j’ai ordonné qu’il y eût au pont de Königstein 6,000 quintaux de farine, de riz, et 100,000 rations de biscuit; il doit aussi y avoir une manutention et un dépôt de munitions.
11 fera reconnaître le chemin qu’il pourrait prendre pour se porter sur Bautzen. Je ne sais pas si la route qui y conduit de Neustadt est praticable pour l’artillerie.
Il fera aussi reconnaître les chemins qu’il faudrait prendre pour se porter directement sur Zittau ou Gœrlitz, en cas de manœuvres de guerre. Il peut arriver tel cas où je ne laisse que deux bataillons au pont de Königstein et un millier de chevaux, avec deux ou trois bataillons d’infanterie légère sur la ligne, qui auraient leur retraite sur Dresde, et que je porte son corps rapidement, par un à-gauche et un mouvement forcé, sur Gœrlitz ou Bautzen, pour servir de réserve au moment d’une grande bataille.
Faites-lui connaître qu’il est autorisé à attaquer l’ennemi et à faire des incursions en Bohême dans toutes les directions, soit pour inquiéter l’ennemi, soit pour avoir des nouvelles, soit pour exercer ses troupes. Il fera interroger tous les déserteurs et prisonniers de guerre, et on demandera à chacun d’eux le nom de son régiment et la force de sa compagnie. Il enverra des espions, et aura soin d’interdire toute communication entre la Saxe et la Bohême. On arrêterait surtout tout ce qui passerait de Saxe en Bohême, et il fera interroger tous ceux qui arriveraient.
Aussitôt qu’il aura placé ses camps et ses postes, il vous les fera connaître. Il fera tirer tous les jours à la cible, et fera établir les baraques de ses camps à l’abri de la pluie. Il placera des postes de correspondance sur la route la plus directe de Königstein à Bautzen, afin de pouvoir communiquer rapidement avec le quartier général. Il en placera aussi sur la route de son quartier général à Dresde, afin de pouvoir avertir le général Durosnel de tous les mouvements de l’ennemi sur toute sa ligne qui paraîtraient menacer cette ville. Recommandez-lui d’activer l’arrivée de toutes ses troupes et de ses batteries qui sont encore en arrière; tout cela pourra être dirigé sur Dresde, d’où cela viendra le rejoindre.
II fera évacuer l’hôpital de Pirna, si cela n’est pas déjà fait, et s’en servira comme d’ambulance.
Si l’ennemi faisait un grand mouvement du côté de Neustadt, le général commandant sur ce point préviendrait directement le gouverneur de Dresde de ce qui pourrait intéresser la sûreté de ce pivot de l’armée.
Dresde, 13 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, écrivez au général Dombrowski que, comme il garde les trois routes de Belli, Treuenbrietzen et Jüterbogk, il sera nécessaire que son corps se reploie sur les trois routes et se réunisse soit sur la route de Wittenberg à Berlin, soit sur celle de Jüterbogk.
Il est nécessaire qu’il vous fasse des rapports de toutes les nouvelles qu’il recueillerait sur l’ennemi, sur ses forces à Berlin, et sur ce qu’il apprendrait de ce qui se passe au corps du duc de Reggio.
Si l’ennemi était plus fort que lui en infanterie et cavalerie, il pourrait se reployer sur Wittenberg; mais il marcherait en avant, aussitôt que le duc de Reggio aura fait reculer l’ennemi.
Dresde, 13 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, vous trouverez ci-jointe la manière dont j’entends placer mon armée. Je désire donc que vous ordonniez aux ingénieurs géographes de reconnaître sur-le-champ une belle position en avant de Gœrlitz, faisant front du côté de Zittau. Vous pouvez envoyer le général Pelet avec ces géographes et lui adjoindre des officiers du génie.
J’ai écrit au duc de Raguse de faire bien reconnaître la position de Bunzlau.
Enfin il faut faire reconnaître une troisième position entre Bautzen et Gœrlitz.
Dresde, 13 août 1813, au soir.
INSTRUCTIONS
POUR LES MARÉCHAUX KEY, GOUVION SAINT-CYR, MACDONALD ET MARMONT.
Voici le parti que j’ai pris. Si vous avez quelques observations à me faire, je vous prie de me les faire librement.
Le duc de Reggio, avec les 7e, 4′ et 12e corps, et le 3e’corps de cavalerie, marchera sur Berlin dans le temps que le général Girard, avec 12,000 hommes, débouchera par Magdeburg, el que le prince d’Eckmühl, avec 25,000 Français et 15,000 Danois, débouchera par Hambourg; il est actuellement à trois lieues eu avant de Hambourg, qui est devenue une place de première force. Cent pièces de canon y sont sur les remparts; les maisons qui gênaient la défense sont abattues; les fossés pleins d’eau; le général Hogendorp y commande une garnison de 10,000 hommes. J’ai donné ordre au duc de Reggio de se porter sur Berlin en même temps que le prince d’Eckmühl culbutera ce qu’il a devant lui, si l’ennemi lui est inférieur, ou du moins le poussera vivement quand il effectuera sa retraite. J’ai donc 120,000 hommes qui marchent dans différentes directions sur Berlin.
De ce côté-ci, Dresde est fortifié et dans une position telle qu’il peut se défendre huit jours, même les faubourgs. Je le fais couvrir par le 14e corps, que commande le maréchal Saint-Cyr; il a son quartier général à Pirna, il occupe les ponts de Königstein, qui, protégés par la forteresse, sont dans une position inexpugnable. Ces ponts ont un beau débouché sur Bautzen. La même division qui fournit des bataillons à Königstein occupe Neustadt avec la cavalerie. Deux divisions campent dans une très-belle position à Berggiesshübel, à cheval sur les deux routes de Prague à Dresde. Le général Pajol, avec une division de cavalerie, est sur la route de Leipzig à Karlsbad, éclairant les débouchés jusqu’à Hof. Le général Durosnel est dans Dresde avec huit bataillons et cent pièces de canon sur les remparts et dans les redoutes. Le 1e corps du général Vandamme et le. 5e corps de cavalerie seront à Bautzen. Je porte mon quartier général à Gœrlitz; j’y serai le 16; j’y réunis les cinq divisions d’infanterie, les trois divisions de cavalerie et l’artillerie de la Garde, ainsi que le 2e corps, qui seront placés entre Gœrlitz et Zittau; et entre le 2e corps et la Bohême sera l’avant-garde, formée par le 8e corps (polonais).
Le duc de Raguse est à Bunzlau ; le duc de Tarente, à Lœwenberg; le général Lauriston, à Grünberg-, le prince de la Moskova, dans une position intermédiaire entre Haynau et Liegnitz, avec le 2′ corps de cavalerie.
Cependant l’armée autrichienne, si elle prend l’offensive, ne peut la prendre que de trois manières :
Premièrement, en débouchant avec la grande armée, que j’estime forte de 100,000 hommes, par Peterswalde, sur Dresde. Elle rencontrera les fortes positions qu’occupe le maréchal Saint-Cyr, qui, poussé par des forces aussi considérables, se retirerait dans le camp retranché de Dresde. En un jour et demi, le 1er corps arriverait à Dresde, et dès lors 60,000 hommes se trouveraient dans le camp retranché à Dresde. J’aurais été prévenu, et en quatre jours de marche je pourrais m’y porter moi-même de Gœrlitz avec la Garde et le 2e corps. D’ailleurs Dresde, comme je viens de le dire, abandonné à lui-même, quand même il ne serait pas secouru du maréchal Saint-Cyr, est dans le cas de se défendre huit jours.
Le second débouché par où les Autrichiens pourraient prendre l’offensive, c’est celui de Zittau. Ils y rencontreront le prince Poniatowski, la Garde, qui se réunit sur Gœrlitz, et le 2e corps; et, avant qu’ils puissent arriver, j’aurai réuni plus de 150,000 hommes. En même temps qu’ils feraient ce mouvement, les Russes pourraient se porter sur Liegnitz et Lœwenberg; le 6e, le 3e, le 11e, le 5e corps d’armée, et le 2e corps de cavalerie, se réuniront sur Bautzen, ce qui ferait une armée de plus de 130,000 hommes, et en un jour et demi j’y enverrais de Gœrlitz ce que je jugerais superflu à opposer aux Autrichiens.
Le troisième mouvement des Autrichiens serait de passer par Josephstadt et de se réunir à l’armée russe et prussienne, de manière à déboucher tous ensemble. Alors toute l’armée se réunirait sur Bunzlau.
Il serait donc nécessaire que la principale position du prince de la Moskova fût à la hauteur de la nôtre, en occupant, s’il le juge convenable, Liegnitz.
Dans ce cas, le duc de Tarente éclairera l’ennemi; il préviendra de son mouvement le prince de la Moskova et le général Lauriston, et Je duc de Tarente se repliera sur la position indiquée sur Bunzlau.
Dans ce cas, il faut que le duc de Raguse choisisse la position de bataille à Bunzlau, en avant ou en arrière. Je lui ai déjà mandé de s’occuper de ce travail important.