Correspondance de Napoléon – Août 1813
Août 1813
Mayence, 1er août 1813.
À M. Collin, comte de Sussy, ministre du commerce et des manufactures, à Paris.
Monsieur le Comte de Sussy, je n’ai pas entendu parler depuis longtemps de la marche de votre ministère. Je désire que vous me fassiez connaître par un rapport comment ont marché les licences que j’avais accordées soit en France, soit en Italie, où en sont les départs et les retours, et ce que je dois espérer des droits. Les douanes rempliront-elles leur budget ? Dans le cas où elles ne le rempliraient pas, il faudrait me proposer des mesures pour y subvenir.
Faites-moi connaître la situation de la France en ce qui concerne le coton, les bois de teinture, l’indigo et les marchandises coloniales; de même la situation de la Hollande.
Enfin dites-moi s’il ne conviendrait point, pour augmenter nos ressources du budget, d’accorder de nouvelles licences, ou, en cas d’obstacles, des introductions par Hambourg ou par d’autres points de la frontière. Dans la situation actuelle de l’Empire, j’ai besoin que votre budget soit entièrement rempli, et plutôt en plus qu’en moins.
Écrivez-moi un mot là-dessus.
Mayence, 1er août 1813.
Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris
Monsieur le Duc Decrès, si j’étais à Paris, je voudrais aller à Cherbourg pour assister à l’introduction de la mer. Je désire que l’Impératrice y aille, et il sera convenable, si elle y va, que vous raccompagniez. Comme cette princesse est obligée d’être à Paris pour l’époque du 1er août, il faudra retarder de quelques jours l’opération de Cherbourg. La marine pourrait ordonner quelque chose à Cherbourg pour faire honneur à l’Impératrice et l’amuser. Il me semble que les préparatifs annoncés d’avance pourraient attirer beaucoup de inonde, et que l’opération, en elle-même, est assez intéressante pour donner lieu à un grand concours de curieux. Je pense que ce retard de cinq à six jours ne pourrait qu’être avantageux, car vous savez qu’il y a beaucoup de petits détails que cela permettra de mieux soigner.
Dresde, 4 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, vous trouverez ci-jointes la formation du 14e corps et celle du corps d’observation de Bavière. Communiquez-les au ministre de la guerre, au duc de Valmy, au duc de Castiglione et au maréchal Saint-Cyr.
Vous verrez qu’il est nécessaire que le maréchal Saint-Cyr soit rendu le 6 à Freyberg. Donnez-lui l’ordre de mouvement de toutes ses troupes, et recommandez-lui de veiller à ce que tout ce qui le rejoindrait, après l’expiration de l’armistice, ne coure aucun danger. Il est à désirer que tout ce qui appartient à son corps soit réuni avant la reprise des hostilités, qui aura lieu le 16.
Donnez ordre à l’ordonnateur et aux administrations du corps de Bavière de se rendre en toute diligence à Freyberg.
Expliquez bien mes intentions au général Pernety pour la sûreté des mouvements de l’artillerie.
Vous ferez connaître que le corps de cavalerie qui est attaché à l’armée d’observation de Bavière sera composé de 6,000 hommes de vieilles troupes.
Dresde, 3 août 1813.
Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant le 3e corps de la Grande Armée, à Liegnitz
Mon Cousin, on ne fait rien au congrès de Prague. Un agent anglais s’en mêle. On ne pourra arriver à aucun résultat, et les alliés sont dans l’intention de dénoncer l’armistice le 10.
Dresde, 4 août 1813.
À Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Monza
Mon Fils, j’ai reçu votre lettre du 29 juillet. Je viens d’arriver à Dresde. Tout porte à penser que l’armistice sera dénoncé le 10, et que les hostilités recommenceront le 16. Comme l’ennemi ne paraît pas très en mesure de votre côté, il faudra arriver à Graetz.
Dresde, 5 août 1813.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Monsieur le Duc de Bassano, écrivez aux plénipotentiaires que je leur envoie un projet de note, et que je leur donne toute la latitude pour qu’ils puissent faire tout ce qui est convenable pour arriver à l’échange des pouvoirs et ouvrir enfin les conférences. Ils pourront présenter des notes verbales ou écrites, régler le détail du cérémonial, déroger même à leurs instructions, mais y tenir le plus près qu’ils pourront, et sans compromettre l’honneur de l’Empereur.
Faites connaître aux plénipotentiaires que le congrès de Teschen était un arbitrage, et que l’Autriche est médiatrice; que ce congrès a duré quatre mois, quoique les négociations fussent d’un objet inférieur. Faites-leur connaître ce qui s’est passé en ces circonstances, et envoyez-leur le préambule qui a été adopté dans les pouvoirs du baron de Tolly, qui prouve jusqu’à l’évidence les prétentions de la Russie; elle ne veut autre chose qu’entraîner l’Autriche. Faites bien comprendre qu’au moins, dans le système que vous proposez, les plénipotentiaires russes seront toujours maîtres de ne pas partir s’ils le veulent.
Donnez des détails sur M. Anstett; un pareil choix a été regardé en France comme une insulte et comme une indication de ne pas vouloir négocier.
Faites connaître que, dans la négociation du 30 juin, il n’a pas été fixé de terme à la négociation; qu’il est dit seulement qu’elle sera prolongée le temps nécessaire pour faire la paix, mais qu’étant déjà au 5 août il faudrait au moins quarante jours pour pouvoir négocier.
Dresde, 5 août 1813.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Je vous envoie un projet de note. Portez-la-moi aujourd’hui une demi-heure avant le lever, afin que cela puisse partir de bonne heure.
PROJET DE NOTE
POUR LE DUC DE VICENCE ET LE COMTE DE NARBONNE, À PRAGUE.
Les soussignés, ministres plénipotentiaires au congrès de Prague, ont l’honneur de répondre à la note du ministre plénipotentiaire de la puissance médiatrice en date du
La convention du 30 juin, par laquelle la France accepte la médiation de l’Autriche, a été signée après être convenus de deux choses :
1° Que le médiateur serait impartial; qu’il n’avait conclu ou ne conclurait aucune convention, même éventuelle, avec une puissance belligérante pendant tout le temps que dureraient les négociations ;
2° Que le médiateur ne se présentait pas comme arbitre, mais comme conciliateur pour lever les différends et rapprocher les parties; que ce point avait été prévu et avait été l’objet d’une discussion entre M. le duc de Bassano et M. le comte de Metternich, parce que les intentions de la Russie se sont montrées dès le 4 juin aux négociations de l’armistice. Cette puissance a fait voir alors qu’elle voulait ouvrir des négociations, non pour arriver au but de la paix, mais pour compromettre l’Autriche et étendre les malheurs de la guerre.
Les soussignés, ministres plénipotentiaires, depuis plusieurs jours qu’ils sont ici, ne peuvent que témoigner leur étonnement de ne pas encore avoir vu les ministres russe et prussien ; de ce que les conférences n’ont pas commencé pour l’échange des pouvoirs respectifs; et encan d’être obliges de perdre un temps précieux à répondre à des idées aussi nouvelles qu’étranges : de conclure la paix sans se voir, sans se connaître et sans se parler.
Les questions posées par le médiateur dans sa note étaient donc répondues par les explications qui ont accompagné la convention du 30 juin. Toutefois, les plénipotentiaires voulant, autant que cela dépend d’eux, lever tous les obstacles et concilier toutes les prétentions, même les plus singulières, proposent au médiateur de ne s’en tenir exclusivement à aucun des modes de négociation, mais d’accepter les deux modes et de les faire marcher de front. On traitera les affaires par notes ; on se remettra ces rotes dans des conférences régulières et qui auront lieu une ou deux fois par jour; on aura dans ces conférences des explications officielles qui seront mises en procès-verbaux ou énoncés semi-officiels qui ne seront pas écrits, et, par ce moyen, l’usage de tous les temps sera suivi; et si le plénipotentiaire russe s’obstine à vouloir la paix sans parler, il ne sera point contraint de parler et il pourra faire connaître par des noies les intentions de sa cour. Les soussignés ont l’honneur, etc.
Dresde, 5 août 1813.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Monsieur le Duc de Bassano, de la manière dont est dirigé l’équipement des Polonais, on se noie dans les détails; il n’y a aucun budget, aucun ordre. Il faut me remettre un compte où je puisse voir à quoi m’en tenir. II faut constater la situation du corps polonais au moment de sa formation, et cela en trois parties, infanterie, cavalerie, artillerie; il faut me faire connaître ce qu’il en coûterait pour habiller ce corps à neuf, en supposant qu’il fût composé de recrues, et en distinguant l’habillement, le grand et le petit équipement, la masse de linge et chaussure. Une fois qu’on aura établi ce que doivent coûter ces trois articles, il faudra faire un nouveau calcul sur la situation du corps, non composé de recrues, et dire : il y a tant pour grand équipement, tant de gibernes, tant d’habits, de capotes, de culottes, de schakos, enfin le résultat par approximation, et dès lors la quantité de ce qui est nécessaire pour les trois chapitres.
Pour la cavalerie, il faut constater le nombre des chevaux au moment de la formation et ceux qui sont à réformer, comparer le nombre d’hommes, en ôtant pareillement ceux qui sont à réformer et en comprenant ceux qui arrivent, ce qui constatera les besoins en chevaux. Les besoins en selles peuvent également se constater.
Quant à la masse de linge et chaussure, il faut constater la quantité de chemises et de paires de souliers qu’a le corps; et on accordera une gratification de tant par homme, comme je l’ai fait pour les régiments composés de cohortes, avec obligation pour les corps de comploter leurs sacs; 10 francs par homme doivent suffire, si d’ailleurs ils ont quelque chose dans leurs masses ; s’ils n’avaient rien du tout, cela coûterait 40 francs; enfin, pour peu qu’ils aient quelque chose, 10 francs, comme je viens de le dire, ou 20 francs au plus, seront suffisants. Alors, chaque régiment s’occupant de ce qui concerne les souliers, les bas, les chemises, on n’aura plus à en entendre parler, il ne faut pas s’amuser non plus à fournir des fanfreluches à la cavalerie; il suffit de lui procurer du drap pour les babils, les manteaux ou capotes, des schakos, des bottes. Quant aux épaulettes de grenadiers, pompons, dragonnes, etc., les régiments les achèteront moyennant une gratification de tant par homme.
D’après ces dispositions, on connaîtra parfaitement le budget de ce qui est nécessaire au corps polonais ; les régiments se procureront tout ce qu’ils peuvent se procurer, et on ne leur fournira des magasins que l’essentiel, c’est-à-dire, pour l’infanterie, les schakos et les draps pour habits, vestes, culottes et capotes, et, pour la cavalerie, les chevaux et l’équipement.
Pour l’artillerie, c’est plus simple encore, puisqu’il n’est question que des chevaux et des harnais.
Ce travail, où le budget en argent se trouvera appuyé de l’état en matières et comparé avec le budget français, est même nécessaire pour appuyer vos ordonnances à la trésorerie.
Dresde, 5 août 1813.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde
Monsieur le Duc de Bassano, écrivez en Bavière que je suis instruit qu’on y rend les déserteurs autrichiens. Si cela est vrai, c’est une grande faute, les Autrichiens ne rendant pas les nôtres.
Dresde, 5 août 1813.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg
Mon Cousin, l’armistice sera dénoncé le 10; les hostilités commenceront le 16. Je crois vous en avoir déjà prévenu. Il est important que vous n’ayez rien en marche, après le 16, de Mayence à Hambourg et de Hambourg à Mayence, et de bien veiller à votre ligne d’étape de Wesel à Hambourg, afin qu’il n’y ait rien de pris par les partisans.
Je vous ai déjà mandé de réunir toutes vos troupes disponibles, ainsi que les Danois, de manière à avoir un corps de 30,000 hommes en avant de Hambourg pour prendre l’offensive sur l’ennemi. Mon intention est de faire marcher 60,000 hommes par Luckau sur Berlin, ce qui avec votre corps fera près de 100,000 hommes. On dit que le prince royal commande le corps de Bülow. Son premier soin sera sûrement de défendre Berlin. Le duc de Reggio y sera le troisième jour après l’expiration de l’armistice. Faites diversion de bonne heure avec votre armée, en menaçant de vous porter sur le Mecklenburg et sur Berlin. Répondez-moi à cela par mon officier d’ordonnance, et envoyez-moi par lui : 1° la situation de l’artillerie de campagne; 2° la situation de l’artillerie de siège et de son armement; 3° la situation de toutes les fortifications; 4° la situation de chacune de vos divisions; 5e la situation des remontes, harnachements; 6° la situation du corps danois; 7° la situation de la marine, etc. Enfin faites-moi connaître ce que tout cela aura d’accroissement, ainsi que la position au 17 août. Il ne faut pas s’arrêter à de petites considérations. Il faut éviter un échec; et, en ayant l’air d’envoyer des colonnes mobiles sur les rives de l’Elbe, à l’expiration de l’armistice, que tout cela soit replié sur Hambourg, afin de centraliser vos forces.
Si Cuxhaven est en état de défense, il faut l’armer et y mettre une garnison. Faites-moi savoir par mon officier d’ordonnance quels sont les postes que vous occupez.
Dresde, 5 août 1813.
Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris
Toutes les nouvelles que j’ai d’Angleterre, et que je lis dans les journaux anglais, sont que les’ Anglais font des frégates d’un calibre égal à celui d’Amérique, et que bientôt1 nos frégates ne pourront plus se présenter nulle part. Suivez, je vous’ prie, cette affaire.
Dresde, 6 août 1813.
Au maréchal Macdonald, duc de Tarente, commandant le 11e corps de la grande armée, à Lœwenberg.
Je désire que vous employiez deux ou trois jours à parcourir toute la frontière de la Bohême, depuis l’incidence de notre ligne de démarcation jusqu’à l’Elbe. Vous pourrez ne pas suivre vous-même toutes les sinuosités, en les faisant reconnaître par vos adjudants commandants, et vous contenter de bien saisir le pays et surtout les principaux débouchés qui aboutissent à Greiffenberg, Friedland, Zittau et Neustadt, et les communications de Bautzen et de Neustadt avec le camp que j’ai fait établir à Königstein. Selon les circonstances, il serait possible que je vous chargeasse du commandement de plusieurs corps d’armée pour opérer sur celte frontière.
Dresde, 6 août 1813
NOTES POUR LE COMTE DARU.
Il est probable que l’armistice sera dénoncé du 11 au 12, et que les hostilités commenceront du 17 au 18. L’Autriche nous déclare en même temps la guerre.
Il faut renouveler les ordres pour porter rapidement les vivres de Magdeburg sur Dresde, et avoir à Dresde des fourrages pour l’approvisionnement de la place en cas de quelques jours d’investissement.
Il faut m’établir l’état de tous les convois qui sont en arrière, soit de l’habillement, soit du trésor, de manière à me faire connaître où ils sont, jour par jour. Également pour les compagnies d’équipages militaires qui seraient en route ou qui devraient s’y mettre.
Voici le projet auquel je me suis arrêté et la position de mon armée les 17 et 18:
Le 13e corps, avec les Danois, à deux lieues en avant de Hambourg, sur la rive droite.
Le comte Hogendorp, avec une garnison de 10,000 hommes, dans Hambourg en état de siège.
La division de Magdeburg, commandée par le général Lanusse et sous les ordres du général Girard, en avant de Magdeburg.
La division du général Dombrowski en avant de Wittenberg.
Le général Durosnel dans Dresde, avec huit bataillons.
Le duc de Reggio, avec les 12e, 4e, 7e corps et 3e corps de cavalerie, à Luckau et Baruth, manœuvrant sur Berlin.
Le 14e corps, sous les ordres du maréchal Saint-Cyr : une division à Neustadt et Königsberg, sur la rive droite, occupant Stolpen et Königstein, qui sont sous les ordres de ce maréchal; trois divisions sur les hauteurs de (mot manquant), tenant les deux routes qui de Prague viennent à Dresde ; son quartier général à Pirna.
Le général Pajol, avec une division d’infanterie et une division de cavalerie, sur la route de Leipzig à Karlsbad, éclairant tous les débouchés jusqu’à Hof.
Le général Vandamme, avec le 1e corps et le 5e corps de cavalerie, à Bautzen.
Le quartier général à Gœrlitz, avec les cinq divisions d’infanterie de la Garde, les trois divisions de cavalerie, le 2e corps d’armée, le 1e corps de cavalerie.
À Zittau, le 8e corps; à Bunzlau, le Ge; à Lœwenberg, le 11e; à Gœrlitz, le 5e; à Sagan, le 3e occupant Liegnitz comme avant-garde.
L’ennemi peut déboucher par la rive gauche, et dans ce cas le maréchal Saint-Cyr, pressé par des forces supérieures, se retirerait dans le camp retranché de Dresde, et serait joint, avant l’arrivée de l’ennemi, par le 1er corps, et successivement par les corps que j’enverrais de Gœrlitz.
La deuxième opération est par Zittau, et se porte sur Gœrlitz.
Dans ce cas, on trouverait le 8e corps, la Garde, trois divisions du
maréchal Saint-Cyr. Dans ce cas, je donnerais bataille entre Gœrlitz et à (mot manquant).
Il est probable que, au même moment où l’armée autrichienne attaquera sur Zittau, les Russes attaqueront par Gœrlitz. Le 3e corps d’armée, le 2e corps de cavalerie se réuniront alors au 6e corps à Bunzlau.
Les trois points de résistance sont donc Bautzen, Gœrlitz et Bunzlau.
C’est là qu’on peut avoir des moyens d’achat.
L’armée se nourrira par les ressources du pays et les envois réguliers de Dresde. Jamais, de celte manière, la route ne peut être interceptée.
Les corps qui marchent sur Berlin s’approvisionneront par Torgau, et puis par Wittenberg et Magdeburg aussitôt qu’ils seront en position.
Donner ordre qu’on charge à Dresde 3,000 quintaux de farine et 200,000 rations de biscuit sur des bateaux, qu’on les mette sous les ordres d’un détachement de la Garde et d’un officier des marins de la Garde, et qu’ils soient prêts à remonter l’Elbe demain soir.
Qu’on place 1,000 bœufs sur-le-champ à Königstein, dans le camp retranché, une quantité de riz proportionnée à la farine, 3 ou 400,000 rations d’eau-de-vie; qu’on s’assure des quantités de bateaux nécessaires pour embarquer des farines à Königstein. Toutes ces dispositions secrètes.
Faire charger demain les 60 voitures de réquisition qui ont amené du biscuit ici, et les envoyer sur Zittau.
Laisser les 46,000 rations de la Garde chargées sur les voitures de la 8e compagnie.
Dresde, e août 1813.
Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris
Monsieur le Duc Decrès, j’ai signé le décret que vous m’avez envoyé. Vous verrez que j’y ai fait quelques changements.
1° Je ne veux pas conserver de frégates dans le Texel ; j’ai donc porté dans le décret quatre frégates, deux françaises et deux hollandaises. J’ai ajouté pour condition que les frégates hollandaises partiront les premières, et les françaises, quatre jours après. Si vous pouvez joindre aux frégates hollandaises une corvette ou un brick français, et aux frégates françaises une corvette ou un brick hollandais, faites-le.
2° Vous verrez également que je ne veux pas conserver de frégates dans l’Escaut; ainsi c’est six frégates au lieu de quatre, et cela par le même principe. Je désire qu’elles parlent deux à deux, à trois jours d’intervalle.
Si vous pouvez joindre un ou deux bricks montés par des Français ou des Hollandais à chacune de ces divisions, vous ferez une chose utile.
Ce sont les seuls changements que j’ai faits à ces dispositions qui me paraissent fort bonnes.
J’approuve que Bouvet puisse aller aux Indes. Je voudrais même que dans les instructions vous donnassiez à chaque frégate la permission, si elle se réapprovisionnait par des prises, d’aller plus loin.
Quant aux Américains, c’est une question bien difficile. Je pense qu’on pourrait prendre un mezzo termine. Tous les bâtiments américains qui iraient dans un port d’Espagne ou dans un port anglais seront considérés comme bonnes prises. Toutefois le capitaine vérifiera, 1° s’ils ont une permission ad hoc de leur gouvernement ; ou bien 2° s’ils transgressent les ordres de leur gouvernement. S’ils transgressent leurs ordres et n’ont pas de permission pour se rendre dans lesdits ports, on pourra détruire, non pas le bâtiment, mais seulement la cargaison, après s’être approprié tout ce qui conviendra. S’ils ont une permission de leur gouvernement, on se contentera d’évaluer la cargaison et d’eu faire signer la reconnaissance par le capitaine américain, et la question sera renvoyée à ce qui sera statué avec le gouvernement américain.
La même chose aura lieu pour les Danois. S’ils ont une licence ou une permission ad hoc de leur gouvernement, ils seront respectés en faisant ce qui a été dit ci-dessus.
Il doit être bien entendu qu’aucune prise américaine ne sera envoyée en Amérique, ni aucune prise danoise en Danemark. Il faudrait même qu’aucune prise américaine ne fût envoyée en Danemark, ni aucune prise danoise envoyée en Amérique.
Vous recevrez un décret par lequel j’ordonne qu’on construise à Toulon, à Rochefort et à Cherbourg une frégate de construction américaine. Je suis certain que les Anglais ont fait construire un bon nombre de frégates de ce modèle. Elles vont mieux, et ils les adoptent : il ne faut pas rester en arrière. Celles que vous ferez construire à Toulon, Rochefort et Cherbourg manœuvreront dans la rade et nous feront connaître ce qu’il faut penser de ce modèle.
Il me semble que vous avez à Dunkerque une belle corvette et un beau brick qui pourraient être joints à la croisière. Vous pouvez promptement faire terminer à Cherbourg la Cléopâtre. Je vois à Lorient le Diadème; il faudrait donner des ordres pour que ce vaisseau se rendît à Brest. Vous pouvez terminer la Bidon à Lorient. Employant ainsi trente frégates en croisières, vous devez calculer qu’avant le mois de juin prochain il y en aura dix de prises, il faut donc les remplacer, en pressant la construction des nouvelles frégates. Vous pouvez faire terminer la Magicienne à Rochefort et la Cornélie à Bordeaux.
Dresde, 1 août 1813.
Au général comte Durosnel, gouverneur de Dresde
Monsieur le Comte Durosnel, la place de Dresde, qui est le point d’appui de l’armée, a été fortifiée et armée. Faites la visite des fortifications avec votre commandant du génie et votre commandant de l’artillerie, afin de vérifier la situation dans laquelle vous vous trouverez au 15 août, si les hostilités recommencent à celte époque.
J’ai ordonné qu’on construisît trois nouvelles redoutes sur la rive gauche, de sorte que les faubourgs soient entourés de huit redoutes; niais il faut que, le 15, ces trois nouvelles redoutes soient bien palissadées et bien fermées à la gorge.
Il est nécessaire que les portes conservées aux faubourgs soient couvertes de bonnes palanques, et que toutes les issues soient fermées par des chevaux de frise, et que le service y soit fait avec la plus grande régularité. Il est nécessaire qu’à chaque porte de la ville il y ait un fossé avec un pont-levis. Il faut qu’il y ait des pièces sur les remparts, de manière à couvrir tout le fossé de mitraille. Vous devez ordonner de mettre des pièces près de la porte de Zwinger pour battre la palanque faite à la brèche du rempart. Il est important que, outre la palanque, on fasse entrer de l’eau dans le fossé devant la brèche du côté de Pirna, et qu’on fasse créneler les maisons et fermer les rues par des palissades , en sorte que l’ennemi qui aurait forcé la palanque ne puisse avancer, ayant devant lui comme une seconde enceinte formée par les maisons crénelées et les barricades de toutes les issues.
Sur la rive droite, les redoutes formant le camp retranché doivent être bien palissadées et bien fermées à la gorge, et l’enceinte de la ville neuve doit être bien armée. Celte partie de la place est la plus forte.
Je laisserai sous vos ordres dans la ville une garnison de 6,000 hommes, qui pourrait offrir une ressource de 3 à 4,000 hommes si on se battait aux environs de Dresde. Mais il faut bien organiser la défense de la place ; elle se divise naturellement en ouvrages sur la rive droite et ouvrages sur la rive gauche. Il faut avoir un officier supérieur remplissant les fonctions de commandant d’armes et qui sera chargé de tous les détails. 11 y aura en outre un commandant de la ville neuve avec trois ou quatre adjudants de place, et un commandant de la vieille ville avec cinq ou six adjudants. Ces adjudants seront placés dans les faubourgs, de manière qu’il y ait dans chaque faubourg un adjudant qui y logera et qui sera chargé de sa défense et de la police.
Il est important que vous ayez dans l’intérieur de la ville un magasin de réserve de paille et de foin, afin que vous puissiez y enfermer le dépôt de cavalerie et nourrir 2 à 3,000 chevaux pendant une quinzaine de jours, si l’ennemi parvenait à tenir la campagne pendant ce temps-là.
Comme vous êtes chargé spécialement de la défense de la ville, il faut que vous travailliez avec le commandant du génie et celui de l’artillerie de la place, pour compléter tout, ce qui y est nécessaire. Réunissez-les tous les soirs chez vous ; faites de fréquentes visites, et rendez-moi compte journellement de l’état des choses et de ce que vous aurez arrêté. 11 est convenable de veiller à ce que les corps, l’administration et l’artillerie n’encombrent pas la ville hors de mesure. Tout ce qui existe à Dresde en artillerie, voitures, etc., doit appartenir à la place ou être attelé, et on doit en avoir l’état exact, afin que je puisse, en cas de besoin, en ordonner l’évacuation. Le lieu où, de préférence, doit être placé tout le matériel de l’armée, est Torgau, qui est une véritable place forte.
Dresde, 8 août 1813.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 13e corps de la Grande Armée, à Hambourg
Mon Cousin, je reçois votre lettre du 5 août. Je me suis fait rendre compte de ce qui est relatif à vos compagnies d’artillerie à cheval; vous devez effectivement n’en avoir que deux.
Il n’y a aucune espèce de doute que l’ennemi dénoncera l’armistice le 10 et que les hostilités commenceront le 16 ou le 17. Vous pouvez donc compter là-dessus. Je vous ai dit de réunir toutes vos troupes sur la rive droite; cela me paraît de la plus grande nécessité, afin de prendre l’offensive et de tenir un corps égal en échec devant vous. Tous les renseignements m’apprennent que le prince royal de Suède commandera dans cette partie et même à Berlin.
Je vous ai déjà fait connaître que le duc de Reggio avec le général Vandamme, le général Reynier et le duc de Padoue, ce qui fera une année de près de 80,000 hommes, débouchera par Luckau et Baruth, le jour de la rupture de l’armistice, pour être en trois ou quatre jours à Berlin. Vous sentez qu’il est nécessaire que toutes les forces qui se trouvent sous les ordres du prince royal, savoir l’armée suédoise, le 3e corps de l’armée prussienne commandé par Bülow, le corps auxiliaire à la solde de l’Angleterre, et enfin la division russe, ne puissent pas se porter tout entières à la rencontre du corps qui débouchera par Luckau. Il faut les obliger à tenir un corps de 30,000 hommes vis-à-vis de vous, et ils se trouveront dans celte obligation s’ils vous voient le 10 prêt à prendre l’offensive. Le 12, ayez vous-même votre quartier général à une lieue en avant de Hambourg; que les portes de Hambourg soient fermées à tout votre état-major, et que toutes vos troupes, infanterie, cavalerie et artillerie, soient prêtes à déboucher. Vous déboucherez effectivement si vous vous trouvez supérieur, ou vous aurez pris une bonne position qui couvrira Hambourg si l’ennemi se trouvait supérieur. Vous aurez soin de poursuivre vivement l’ennemi, afin de menacer les Suédois de leur couper la Poméranie et de les obliger d’y rentrer.
Sur cet ordre que je vous ai déjà donné plusieurs fois, vous faites l’objection que l’ennemi pourra donc passer l’Elbe et ravager le pays. II n’y a pas de remède à cela. Je ne vous crois pas assez égal en cavalerie pour pouvoir vous y opposer avec avantage; mais il faut que, toutes les fois que les partisans passeront entre Hambourg et Magdeburg, ou entre Magdeburg et Dresde, ils ne trouvent rien à prendre à l’armée, qu’ils ne trouvent à piller que le pays. Je pense qu’il faut replier l’artillerie qui est dans vos différents postes, puisqu’elle pourrait y être compromise.
Vous proposez d’avoir 2 à 3,000 hommes d’infanterie, un millier de chevaux et cinq à six pièces d’artillerie légère, manœuvrant entre Harburg, Lüneburg et Werden. Cela me paraît fort sage et sans inconvénient. Ce corps, n’ayant aucun embarras, pourra promptement se replier sur Harburg et venir vous rejoindre s’il a affaire à des troupes trop considérables. Mais, si vous aviez poussé l’ennemi, il passerait l’Elbe à Dömitz et viendrait encore vous rejoindre. Non-seulement cette colonne sera utile, mais elle est même indispensable. Il est possible que l’ennemi attende, pour passer l’Elbe avec des forces raisonnables, qu’il ait pu vous rejeter dans Hambourg. Dans ce cas, ce corps sur la rive gauche menacerait l’ennemi. Si, au contraire, l’ennemi fait passer l’Elbe à des forces égales aux vôtres, vous aurez affaibli votre corps principal, mais l’ennemi se sera affaibli dans la même proportion.
Je vous ai dit de veiller â ce que, de tous les convois qui viennent à Hambourg, il n’y en ait aucun de pris. Vous saisissez mal ce que je veux vous dire et vous me répondez e qu’il est difficile de garder tout l’Elbe. e Je vous répète que mon intention n’est pas de garder tout l’Elbe, l’ennemi a trop de mauvaises troupes dont il fait peu de cas pour une affaire générale, et qu’il sait lancer en partisans pour piller ou pour faire insurger ; mais le moyen de ne rien perdre c’est de ne rien avoir. Les convois qui se dirigent sur Hambourg viennent de Wesel ou de Magdeburg; écrivez au général Lemarois qu’à dater de la reprise des hostilités on n’expédie plus aucun convoi pour Hambourg, et pressez l’arrivée de ceux qui sont en route. Donnez ordre également qu’on arrête à Bremen tous les bataillons de marche, tous les hommes à pied de la cavalerie, tous les convois d’artillerie, tous les convois quels qu’ils soient qui seraient en route pour se rendre à Hambourg après l’armistice; que le commandant de la ville de Bremen les garde pour la défense de la ville, et qu’il ne vous envoie des convois que lorsqu’il pourra réunir 3 ou 4,000 hommes pour leur escorte et lorsque la situation des choses rassurera d’ailleurs sur l’arrivée de ces envois. Ainsi je ne prétends pas que vous défendiez tout l’Elbe, mais qu’à l’expiration de l’armistice vous n’ayez en route aucun convoi ou détachement d’hommes à pied, de cavalerie, d’artillerie, d’équipages militaires ou d’infanterie, sur les communications de Bremen à Hambourg et de Magdeburg à Hambourg; qu’il n’y ait que les estafettes et la poste qui passent; qu’enfin on ne communique, comme cela doit toujours se faire pour les transports et convois en temps de guerre, que sous des escortes d’une force suffisante pour résister aux partisans. Faites parcourir par des officiers de gendarmerie les différentes roules par où viennent, les convois, pour qu’au moment de la rupture il n’y ait rien en marche el que rien ne soit compromis. Je suppose que maintenant vous comprenez bien mes intentions et que vous allez agir en conséquence.
Prenez les mêmes soins pour les convois d’argent; il faut qu’à dater du 10 au 12 août il ne parte aucun convoi d’argent sans un ordre spécial de vous, el que de Wesel à Hambourg, de Magdeburg à Hambourg et de Hambourg à Magdeburg, il ne se trouve aucun convoi d’argent. Lorsque les quinze premiers jours de la campagne seront passés, on verra la situation des choses et les mouvements qu’il sera convenable d’autoriser.
Écrivez à Wesel, à Bremen, à Magdeburg, à Osnabrück, à Hanovre, à mon ministre à Cassel, pour que tout cela soit ainsi organisé.
L’officier d’ordonnance que je vous ai expédié m’apportera la situation de tout votre corps. Je désire surtout la situation de voire cavalerie. 1° Votre cavalerie consiste : dans une brigade composée du 28e de chasseurs et d’un régiment lithuanien. Qu’est-ce que ces régiments auront, au 16 août, à cheval et en état de se battre ? Qu’est-ce qu’ils ont à pied à Hambourg ? Combien ont-ils de selles et de chevaux ? Que leur manque-t-il pour être entièrement montés ? Les colonel, major et cadres du 28e sont-ils arrivés, ou quand arriveront-ils ? Quand les différents détachements qui doivent compléter ce régiment arriveront-ils ? Cela doit former 1.200 hommes. 2° Vous avez un régiment de marche de troupes légères, de dragons et de cuirassiers, qui vous a été envoyé par le général Bourcier; ce régiment doit être de 1.250 hommes. Quelle est sa composition, sa situation en officiers, soldais, chevaux et selles? Il me semble que vous m’avez mandé que ces 1,250 hommes étaient montés. Le ministre de la guerre vous a envoyé les 4e escadrons de cuirassiers à pied, formant trois régiments, qui composent la brigade de cuirassiers de Hambourg. Combien y aura-t-il d’hommes arrivés au 16 août ? Où seront les autres? Veillez à ce qu’il ne reste sur les routes personne que l’ennemi puisse enlever. Combien y aura-t-il de chevaux? Combien de selles? Quand tous ces hommes seront-ils montes? 3° Enfin le général Bourcier a dirigé sur Hambourg, sur la demande que vous lui en avez faite, 1.000 hommes à pied de cavalerie. Faites-moi connaître s’ils seront arrivés le 16 et quand ils seront montés. Le total de tout ceci vous ferait 6,500 hommes. D’après les renseignements que vous m’avez donnés, je suis fondé à penser que vous aurez 4,000 hommes montés et dans le cas de se battre au 16 août, ce qui, avec les Danois, vous fera 6,000 cavaliers. Vous en aurez en outre 2,500 à pied, qui, pouvant faire le service de Hambourg et étant exercés au service du canon, vous permettront d’affaiblir d’autant la 50e division.
50e division. Quelle sera la situation de celle division au 16 août ? Le 5e bataillon du 33e léger sera-t-il arrivé ? Les conscrits réfractaires de Flessingue seront-ils arrivés? Ceux de Wesel seront-ils arrivés ? Les 3e bataillons du 3e et du 105e, avec les conscrits réfractaires et les différents détachements de Strasbourg, y seront-ils arrivés ? Où seront les autres détachements qui ne seraient pas arrivés à l’expiration de l’armistice ? Prenez des mesures pour qu’ils ne soient pas compromis. Selon les données que j’ai, j’espère que la 50e division aura une force de 9,000 hommes au 16 août. Vous en pouvez laisser 3,000 pour la garde de Hambourg, et employer 6,000 des meilleurs à augmenter votre corps actif.
De cette façon vous auriez : 1° à l’armée, la 3e division, la 40e et la 50e, ce qui vous ferait 20,000 hommes et 4,000 hommes de cavalerie ; total, 24,000 hommes, plus 10,000 Danois ; en tout 34,000 hommes; 2° à Hambourg, 2,500 hommes de cavalerie à pied, 500 hommes d’artillerie, 300 ouvriers de la marine, 1,000 hommes des équipages de la marine, 150 gendarmes, 7 à 800 douaniers et 3,000 hommes de la 50e division; ce qui ferait plus de 8,000 hommes à Hambourg. Vous aurez donc un total de près de 45,000 hommes, et, en admettant qu’il y ait quelque chose d’exagéré dans ce calcul, et que vous ne puissiez réunir que 30,000 hommes actifs et que 5,000 hommes de garnison à Hambourg, ce qui suffirait pour celte ville pendant le temps que vous la couvririez, cela ferait 35,000 hommes, et vous devez en avoir 45,000.
Je vous envoie un général qui sort de la Garde et qui est bon; il vous servira pour remplacer le général Loison ou le général Thiebault. La 50e division a le général Vichery, qui peut marcher. Vous avez beaucoup de généraux de cavalerie, puisque vous avez le général Watier et trois autres généraux. Faites-moi donc connaître, par le retour de l’estafette et en détail, votre position, et faites dresser un état de la situation de vos affaires au 16 août et pendant tout le reste d’août.
Je suppose qu’avec les Danois vous aurez cent pièces de canon. Vous devez partir du principe qu’il est bon d’avoir un approvisionnement et demi attelé, mais qu’un simple approvisionnement à la rigueur est suffisant, dès l’instant que vous avez à Hambourg des munitions pour les remplacements.
L’Autriche est contre nous. Cette puissance a 300,000 hommes sur pied, effectifs, ce qui lui fournit une armée de 120,000 hommes qui marchera contre moi sur Dresde, une autre de 30,000 hommes contre la Bavière, enfin une troisième de 50,000 hommes contre le vice-roi, qui est à Laybach; ce qui ferait 200,000 hommes sous les armes, et ce qui suppose 320 à 350,000 hommes effectifs. Quelque accroissement de forces que cela donne aux alliés, je me trouve en mesure d’y faire face. Mais vous devez sentir qu’il faut de l’énergie, et si votre corps de 30,000 hommes était disséminé et ne remplissait pas absolument son rôle, qui est de tenir un nombre supérieur en échec, cela compromettrait toutes les affaires.
Mon projet est de faire marcher, comme je vous l’ai dit, vos 30,000 hommes et les 80,000 du duc de Reggio, ce qui fait 110,000 hommes, sur Berlin; cette force sera encore augmentée d’une colonne de 6,000 hommes qui pourra sortir de Magdeburg. Je compte que l’on sera à Berlin le quatrième jour, c’est-à-dire le 20 ou le 21 ; et, s’il y avait une affaire où l’on pût battre l’ennemi, éparpiller la landwehr et désarmer le landsturm, cela me mettrait à même de vous en
voyer sur Stettin, pour suivre les Suédois, en vous augmentant du corps de Vandamme, et me permettrait de rappeler à moi soit le corps du général Reynier, soit le corps du duc de Reggio, et me renforcerait ainsi de 30,000 hommes contre la grande armée autrichienne et russe, ou bien, selon les circonstances, je vous laisserais tout ce monde pour débloquer Küstrin et Stettin, marcher sur Stettin, par-là menacer de débloquer Danzig et obliger les Russes à y courir en toute diligence et à se détacher des Autrichiens. Il y a dans toute cette armée qui vous est opposée beaucoup de canaille, qui, une fois attaquée et battue, se dissipera, telle que la landwehr, la légion hanséatique, la légion de Dessau, etc.; de sorte que huit jours de campagne, môme sans de grands succès, réduiront de moitié les troupes ennemies qui sont dans celte partie.
Les circonstances sont fortes ; le rôle que vous avez à remplir est très-actif. Il faut surtout que vous menaciez de bonne heure, afin qu’on ne se tourne pas entièrement contre ce qui débouchera sur Berlin, et qu’on ne vous néglige pas. Je vous le répète, aussitôt que vous saurez que l’armistice est dénoncé, sortez avec pompe de Hambourg, exigez que tout votre quartier général en parte et que vos troupes soient campées ou cantonnées suivant les maximes de la guerre.
Dresde, 8 août 1813.
Au général comte Lemarois, gouverneur de Magdeburg.
Monsieur le Comte Lemarois, j’ai reçu votre lettre du 6 août.
L’ennemi dénoncera l’armistice le 10, et les hostilités commenceront probablement le 16 ou le 17. Vous avez déjà six bataillons de la 6′ division bis; les 3e, 4e et 5e bataillons du 134e seront arrivés pour le 16, ce qui vous fera neuf bataillons. Vous aurez en outre deux bataillons du régiment de Lippe et deux bataillons westphaliens, ce qui vous fera en tout treize bataillons. Vous aurez de plus 4,000 hommes, savoir : 3,000 hommes venant des hôpitaux d’Erfurt, et 1,000 hommes sortant des hôpitaux de Magdeburg; vous armerez, habillerez et équiperez ces hommes isolés; vous en mettrez un certain nombre en subsistance dans chacun de vos neuf bataillons français, de manière à les porter au grand complet, et, selon le nombre d’officiers et sous-officiers sortant également des hôpitaux, vous formerez du reste quatre ou cinq bataillons de marche. Vous aurez, en outre, environ 2,000 cavaliers à pied.
Vous ferez faire le service de la place par un bataillon westphalien, un bataillon de Lippe et le 5e bataillon du 134e, vos quatre ou cinq bataillons de marche et les 2,000 cavaliers à pied, ce qui fera 6 à 7,000 hommes, nombre bien suffisant pour le service de la ville. Je pense que vous devez adopter la manière turque, c’est-à-dire affecter un bataillon de marche à la garde de la citadelle, un autre à la garde de la tête de pont, et trois autres bataillons à la garde des trois parties de l’enceinte, depuis le fort de l’Étoile jusqu’à l’Elbe, en exigeant qu’indépendamment des gardes, que j’évalue à un tiers des hommes, un autre tiers soit toujours consigné, et qu’un tiers seulement puisse être envoyé aux corvées ou venir en ville. Les chefs de corps et les adjudants de place étant ainsi chargés spécialement de la garde de postes déterminés, votre ville sera mieux défendue que si, avec le double de troupes, vous en faisiez faire le service selon l’ordonnance des places.
Il vous restera donc disponible une division active composée des six bataillons de la 6e division bis, de deux bataillons du 134e, un bataillon westphalien et un bataillon de Lippe; total, dix bataillons. Ces bataillons étant portés au grand complet, vu la faculté que vous avez d’y incorporer des hommes sortant des hôpitaux, vous formeront une division de 8,000 hommes. Je suppose que le dépôt de cavalerie pourra vous fournir 3 à 400 hommes à cheval. Vous organiserez pour cette division deux batteries d’artillerie à pied, et elle sera donc en tout de près de 9,000 hommes. Je vous ai envoyé un général de division et trois généraux de brigade. Le général de division commandera la division, et vous y attacherez deux des généraux de brigade.
Mon intention est que cette division débouche de Magdeburg pour arriver à Brandenburg, aussitôt que les 80,000 hommes- que je fais marcher de Luckau sous les ordres du duc de Reggio seront arrivés à Berlin et que les 30,000 hommes que commande le prince d’Eckmühl auront débouché de Hambourg pour se porter entre la Poméranie et Berlin. Votre division active formera la communication entre ces deux corps, mais elle restera sous vos ordres, et ne doit jamais se laisser couper de Magdeburg, parce que les 6 à 7,000 hommes restés à Magdeburg ne seraient pas suffisants pour la défense de cette place, si l’ennemi venait à l’investir.
Il est probable que quatre jours après la reprise des hostilités l’armée partie de Luckau sera sous Berlin, et le prince d’Eckmühl à moitié chemin de cette ville. Jusqu’alors vous pourrez avoir deux corps d’observation, chacun de 2,000 hommes, l’un entre Magdeburg et Dessau, l’autre entre Magdeburg et Werben, de manière à surveiller le passage de la rivière et à éclairer la place; mais, aussitôt que vous saurez que l’armée du duc de Reggio est en marche sur Berlin, il faut rappeler ces deux corps, et votre division active doit marcher sur Brandenburg et faciliter autant que possible les mouvements de l’armée du duc de Reggio et de celle du prince d’Eckmühl.
Quant à l’artillerie des petits postes, il faut l’y laisser jusqu’à deux ou trois jours avant le commencement des hostilités, et la retirer alors; vous ne garderez que les postes les plus près de la place, et vous confierez les autres à la garde de la gendarmerie et des gardes nationales westphaliennes et saxonnes.
Si l’offensive que nous prenons sur Berlin , de Hambourg et de Luckau, et qui probablement rejettera l’ennemi au-delà de l’Oder, n’empêche pas les partisans ennemis de passer l’Elbe, et il est difficile de l’empêcher, il est important que vous veilliez à ce que l’ennemi ne nous prenne pas de convois d’artillerie, ni de convois d’argent, ni de détachements d’hommes isolés.
Aucun convoi d’argent ne partira de Magdeburg, soit pour Hambourg, soit pour Dresde, passé le 12. Aucun convoi d’argent ne sera dirigé de Wesel ou de Hambourg sur Magdeburg, également passé le 12. Par ce moyen, on sera assuré que le 17 il ne se trouvera aucun convoi d’argent en route. S’il était nécessaire de faire d’ici là quelque envoi de fonds, il faudrait le faire en poste. Écrivez au prince d’Eckmühl, au commandant de Wesel et au général Durosnel pour leur faire connaître les dispositions que vous avez prises à cet égard et celles qu’ils doivent prendre.
Aucun convoi d’artillerie ne doit partir de Magdeburg pour Hambourg passé le 12. Il n’en doit également partir aucun, passé le 12, de Dresde pour Erfurt. Aucun convoi parti de Mayence ou de Wesel pour Magdeburg ne doit être en route passe le IG; ceux qui ne pourraient pas être arrivés le 16 doivent s’arrêter à Erfurt ou Minden.
Il en est de même pour les transports d’habillements, de harnachements, les hommes isolés, etc. Tous les convois ou détachements doivent se grouper à Erfurt, Minden et Hambourg, et ensuite en venir, selon les circonstances, en se dirigeant en force sur Magdeburg, en marchant militairement et en se trouvant ainsi à l’abri des attaques des partisans ennemis. Travaillez sur cet objet avec le général Bourcier, afin qu’il n’y ait rien de perdu. Il faut hâter la marche de tout ce qui pourrait arriver à Magdeburg avant le 17, en faisant doubler les étapes et en supprimant les jours de séjour, et que tout le reste s’arrête, comme je l’ai dit plus haut, à Erfurt, Minden ou Hambourg. Par ce moyen, les partisans ne pourront rien prendre. Travaillez là-dessus pour l’artillerie avec le général Neigre. Les convois ou les hommes isolés destinés pour votre place et arrêtés à Erfurt, Minden ou Hambourg, n’en devront partir que sur vos ordres, que vous leur enverrez selon leurs forces et les circonstances.
Si Tangermünde est à l’abri d’un coup de main et capable de faire la résistance convenable, vous garderez ce poste; sinon, il faut en retirer vos troupes, mais seulement au dernier moment. 200 ou 300 cavaliers dans ce poste n’empêcheront pas les partisans à cheval de l’ennemi de courir le pays.
L’Autriche sera contre nous, mais je suis en mesure de faire face à tout. Cela exigera cependant plus d’activité et d’application de la part des différents chefs. Ils doivent surtout concentrer leurs forces, et ne rien laisser prendre sur les derrières.
Correspondez fréquemment avec mon ministre à Cassel, et ayez à cet effet un chiffre avec lui. Vous devez également en avoir un avec le major général et un avec le prince d’Eckmühl. Vous correspondrez aussi avec le général Durosnel. Vous n’aurez pas besoin d’ordres pour, selon les circonstances, faire des détachements sur les derrières, pour couper les partisans ennemis, de concert avec les détachements que le roi de Westphalie enverrait contre eux.
Dresde, 9 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, faites connaître au maréchal Saint-Cyr que je désire que, le 11 au plus tard, le général Bonet ait son quartier général à Pirna; que le général commandant la 42e division ait le sien à Königstein, et que le général commandant la 43e ait le sien du côté de Dohna; que, le 11 et le 12, les 42e et 43e divisions soient réunies sous les ordres du général Bonet, entre Dohna, Pirna et Königstein , tandis que les 44e et 45e se réuniront à Freyberg.
Faites connaître au maréchal Saint-Cyr que j’ai donné ordre au général Milhaud de se rendre à Mayence pour y prendre le commandement des trois brigades bis du 5e corps de cavalerie. Le 14e régiment de hussards sera sous les ordres du général Pajol, et celui-ci sous ceux du maréchal Saint-Cyr.
Faites connaître à ce maréchal que probablement l’ennemi dénoncera l’armistice le 11 ou le 12, et qu’à cette époque l’Autriche nous déclarera la guerre; qu’ainsi il est convenable d’abandonner la ligne de Bayreuth à Dresde, et de diriger tout ce qui arrive pour le 14ecorps, artillerie, génie, détachements, etc., par la route de l’armée, par Fulde, Erfurt et Dresde.
Il faut que le général Pernety prenne des mesures pour que toutes les batteries destinées au 14e corps suivent cette direction, et que le 17 ou le 18 il n’y ait rien qui puisse être compromis.
Dresde, 9 août 1813.
Au général comte Drouot, aide de camp de l’empereur, à Dresde.
Il est nécessaire que vous me présentiez un projet de gratifications à donner aux acteurs de mon théâtre, et que vous fassiez connaître au comte de Turenne qu’il doit tout disposer afin que ces acteurs partent le 12 pour la France.
Dresde, 9 août 1813.
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris
Mon Cousin, j’ai écrit un mot au duc de Rovigo sur la situation actuelle des affaires; voyez-le. J’espère faire repentir l’Autriche de ses folles prétentions et de son infâme trahison. Mais, dans tous les cas, il ne pouvait rien arriver de pire que ce qu’elle proposait.
Dresde, 9 août 1813.
Au général Savary, duc de Rovigo, ministre de la police général, à Paris.
II est probable que le 11 ou le 12 les ennemis dénonceront l’armistice et que l’Autriche nous déclarera la guerre. Cette puissance a fait un beau rêve, et a cru pouvoir reprendre tout ce qu’elle a perdu depuis vingt ans ; elle voulait tout, même Venise. Je vous écris ceci pour votre gouverne; mais il faut garder le secret jusqu’au dernier moment.
Dresde, 9 août 1813.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, il est probable que les ennemis dénonceront l’armistice le 11 ou le 12, et qu’à cette époque l’Autriche nous déclarera la guerre. J’ai fait ce qui était possible pour tout concilier; mais les prétentions de l’Autriche étaient telles qu’elle se croyait en mesure de tout reprendre, même la Confédération du Rhin, et même Venise. Ceci doit être encore tenu secret; je vous l’écris pour votre gouverne. Si l’armistice est dénoncé le 11 ou le 12, les hostilités commenceront le 17 ou le 18.
Je ne sais pas si les hommes destinés à former le régiment français à votre service sont arrivés à Cassel, et si vous avez pu les monter et les armer.
J’ai ici des forces telles que j’espère faire repentir l’Autriche de ses folles prétentions. Il est cependant nécessaire que vous vous teniez sur vos gardes. Je suppose que vous avez un chiffre avec le major général, un avec le duc de Valmy, un avec mon ministre de la guerre, un avec le prince d’Eckmühl, un avec le général Durosnel, gouverneur de Dresde, et un avec le commandant d’Erfurt, afin de pouvoir correspondre avec eux, selon les différentes circonstances.
Dresde, 9 août 1813.
Au prince Frédéric de Hesse, à Darmstadt
Monsieur le Prince Frédéric de Hesse, j’ai reçu la lettre que vous m’avez écrite. J’ai vu avec plaisir le choix que le roi a fait de vous pour commander le corps qu’il a joint à mon armée, et je ne doute pas que vous ne justifiiez sa confiance. C’est une belle occasion pour vous de montrer vos talents militaires et d’acquérir de nouveaux titres à mon estime : je vous en donnerai des marques avec une particulière satisfaction.
Dresde, 11 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Mon Cousin, donnez ordre au général Vandamme de faire partir, demain 12, la 1e division pour aller prendre position entre Torgau et Eilenburg, de manière à pouvoir en trois jours se rendre à Dresde. La 2e division prendra position entre Wittenberg et Düben, de manière à pouvoir se rendre en quatre jours à Dresde, et sa troisième division (la 23e) sera placée entre Dessau, Wittenberg et Düben, de manière n pouvoir en cinq jours se rendre à Dresde. Son artillerie et tous ses équipages seront également placés entre Wittenberg et Düben ; mais son quartier général pourra rester à Dessau jusqu’à nouvel ordre.
Dresde, 11 août 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.
Donnez ordre au général Bertrand de partir demain de Sprottau et de se diriger sur Soura. Il enverra prendre, à Luckau, les ordres du duc de Reggio, étant destiné à faire partie d’une armée composée des 12e, 4e et 7e corps et du corps de cavalerie du duc de Padoue, laquelle armée a ordre de marcher sur Berlin, dans le temps que le prince d’Eckmühl marchera dans la même direction sur la rive droite de l’Elbe en partant de Hambourg. Je suppose qu’il a évacué ses hôpitaux sur Dresde et sur Torgau, et qu’il ne laisse rien derrière lui. Qu’il envoie à la division wurtembergeoise, qui est à Naumburg, le même ordre de se rendre à Sorau, où ce corps se réunira.
Donnez ordre au général Reynier départir, demain 12, de Goerlitz pour se rendre à Luckau. Il sera, avec le 3e corps de cavalerie, sous les ordres du duc de Reggio. Il est nécessaire qu’il ne laisse aucun embarras à Gœrlitz, et qu’il évacue ses malades sur Dresde et Torgau.
Donnez ordre au duc de Padoue de partir, demain 12, de Leipzig, de passer l’Elbe à Torgau, et de se rendre à Dahme, où il sera sous les ordres du duc de Reggio.
Donnez ordre au duc de Reggio de réunir ces [trois corps d’armée avec le 3° corps de cavalerie et de se diriger avec celte armée sur Berlin. Il est nécessaire qu’il commence son mouvement le 13 ou le 14, pour réunir toute son armée à Baruth. Le corps du général Bertrand arrivera à Luckau le 17, et celui du général Reynier à la même époque; de sorte que son corps se trouvera former l’avant-garde. Le corps du duc de Padoue arrivera le 15 ou le 16 à Dahme. Tout ce corps d’armée sera donc réuni à Baruth le 18 ou le 19.
Le général Lemarois, avec une division, manœuvrera en avant de Magdeburg, et le prince d’Eckmühl, avec 40,000 hommes, part de Hambourg pour contenir l’ennemi vis-à-vis de lui. Le corps du général Dombrowski formera un corps d’observation en avant de Wittenberg pour maintenir sa communication avec cette place. Il sera, du reste, sous les ordres du duc de Reggio.