Antoine-François de Fourcroy (1755-1809)
Je n’en puis plus, cet homme me tue ! (Fourcroy à Vauquelin à propos de Napoléon)

Antoine François de Fourcroy naît à Paris, le 15 juin 1755, d’un père apothicaire du duc d’Orléans. Orphelin de sa mère alors qu’il n’est âgé que de sept ans, sa jeunesse n’est pas des plus joyeuse. Il quitte les bancs de l’école à 15 ans. Par l’intermédiaire de F. Vicq d’Azyr [1]Antoine-François de Fourcroy , ami de la famille, qui le prend comme répétiteur, il côtoie le milieu de la société royale de médecine, dont Vicq d’Azyr est le Secrétaire. .En dépit de difficultés financières, il obtient le doctorat en médecine en 1780 : mais il n’exercera jamais la médecine, attiré qu’il est par la chimie. Il suit alors les cours du célèbre Bucquet, Ses travaux lui valent un poste de professeur à l’école vétérinaire de Maisons-Alfort, puis au Jardin du Roi, où il remplace Macquer. [2]Il sera l’un des propagateurs zélés du nouveau système métrique. Membre de plusieurs sociétés savantes, il entre en 1785 à l’Académie royale des sciences.
Fourcroy accueille la Révolution avec satisfaction. Électeur suppléant aux Etats généraux, puis à la Convention, il siège effectivement dans cette assemblée à partir de juillet 1793 – où il remplace Murat – et devient membre du Comité d’Instruction publique. Il travaille surtout pour la défense nationale. Directeur de la Commission des armes et des poudres, il est l’un des fondateurs de l’école Polytechnique. Son activité est alors considérable. Il donne par exemple des cours aux canonniers de Paris sur les techniques de fabrication de la poudre. Avec Berthollet, il fait aussi des expériences destinées à raccourcir la durée du tannage des peaux, pour chausser plus vite les citoyens pauvres (car la Convention a décidé que plus personne ne devait désormais aller nu-pieds !).
A la fin de 1793, il est élu Président du Club des Jacobins. Cette même année, c’est lui qui découvre le procédé qui permet d’extraire le cuivre et l’étain de l’alliage des cloches, et de reconvertir celles-ci en canons. Il fait également partie des savants qui supervisent les essais des aérostats à Meudon, en avril 1794 (année durant laquelle il fait l’acquisition du laboratoire de Vicq d’Azyr), dans la nouvelle école d’aérostation ouverte par le Comité de Salut Public. En 1795, il figure parmi les premiers membres du tout nouvel Institut.
Après Thermidor, il fait partie du Comité de Salut public. Il est mêlé dans les différents comités à l’élaboration de la législation scolaire (création des écoles centrales, de l’Ecole centrale des Travaux publics, des écoles de santé).
Fourcroy le chimiste Fourcroy doit sans doute sa renommée en raison de la part qu’il a pris dans l’établissement de la nomenclature chimique moderne, aux cotés de Morveau, Berthollet et Lavoisier. L’idée de base était d’indiquer la composition d’une substance par son nom. Morveau proposa un système dans lequel les nouveaux gaz (il les appelait : airs ») seraient désignés d’après leurs propriétés spécifiques. Par exemple : oxy-gène = « générateur d’acide » et « hydro-gène » « générateur d’eau ». Il proposa aussi l’emploi des suffixes « eux » et « iques » pour les acides, ainsi que « ide » et « ate » pour les sels. Lavoisier introduisit deux modifications au système proposé par Morveau., basant tous les noms sur la théorie et la nature. Fourcroy adhérait totalement au système proposé par Lavoisier et, quoique partiellement sceptique, après la découverte, par Cavendish, de la composition de l’eau et de l’acide nitrique, il lui donnera son appui total. De formation médicale, Fourcroy apporta de nombreuses contributions à la chimie de l’anatomie humaine. Il développa notamment la chimie de l’urée, mena à bien de nombreuses analyses quantitatives de l’os, du calcium urinaire et des calculs. Il démontra que le muscle contient une grande quantité d’azote. Il fut à l’origine de nombreuses découvertes concernant l’anatomie humaine et des tissus animaux, ainsi que dans le domaine de la chimie inorganique. Avec Vauquelin, il découvre l’iridium et découvre que le phosphore peut être présent autrement qu’à l’état de phosphates. |
Élu au Corps législatif, il est également élu au Conseil des Anciens, ou il siège de novembre 1795 à mai 1797.
Le 25 décembre 1799, Fourcroy, qui s’est montré favorable au Coup d’État de Brumaire, est nommé conseiller d’Etat, et à ce titre effectue des missions d’information dans les département de l’Ouest et du Nord, en 1801 et 1802. En mars 1802, il est nommé directeur général de l’lnstruction publique en mars 1802. C’est à ce titre qu’il rédige les différents textes législatifs et réglementaires concernant l’instruction publique. En mars 1802, il prononce un important discours au corps législatif, sur un projet de loi relatif à l’instruction publique.
Après l’élaboration de la loi du 11 fructidor An X sur l’Instruction publique, il est nommé, à la place de Roederer, à la tête de la direction générale de l’instruction publique. Il se voit confier l’élaboration des règlements d’application de cette loi. Il va ainsi travailler à l’organisation des écoles de médecine de Paris, Montpellier, Strasbourg, des écoles de droit, ainsi que d’un grand nombre de lycées et de collèges. Cet énorme travail ui vaut, en 1805, d’être nommé commandant de la Légion d’honneur.
Malgré ses énormes charges, Fourcroy continue d’enseigner la chimie, au Musée d’Histoire naturelle de Paris, à l’École Polytechnique, au Prytanée, et continue de travailler à ses ouvrages scientifiques.
En 1807, Fourcroy est nommé Conseiller d’État à vie. Allant à l’encontre de l’idée que se fait l’Empereur sur la fonction de Conseiller d’État, il fonde une fabrique de produits chimiques, dans laquelle il perdra une partie de sa fortune.
Le principe d’une Université impériale est établi par le projet de loi du 10 mai 1806 (voté par 210 voix pour contre 42) et qui décide que l’Université impériale, à organiser par un texte qui sera présenté « en forme de loi » en 1810, assumera seule l’enseignement « public » (au sens de « ouvert au public »).

Fourcroy travaille alors à la préparation d’un projet d’organisation, interrompue par la reprise des hostilités avec la 4e Coalition. Après Tilsitt, la discussion reprend et, le 28 janvier 1808, Napoléon dicte son projet, réservant à Fourcroy l’énorme tâche de préparer l’organisation pratique de cette Université impériale. Quatre rédactions sont nécessaires et le Conseil d’État adopte la version finale le 17 mars 1808, que l’Empereur approuve également le 17 mars 1808.
A la surprise générale, et à la grande (et légitime) déception de Fourcroy, c’est le poète Louis de Fontanes qui est nommé à la tête de la nouvelle Université. L’Empereur, sans doute, n’imaginait pas cet ancien Conventionnel incroyant à la tête ce cette importante institution ! Et Fontanes, ancien monarchiste rallié au Consulat, flatteur et littérateur renommé, catholique avéré sans pour autant être un bigot, lui avait semblé mieux à même de représenter l’Université et à l’orienter selon les vues de son souverain !
C’est désormais le temps de l’amertume pour celui qui a tant fait pour l’Université, à qui, maintenant qu’il est écarté, on trouve rapidement tous les défauts ! Il n’a plus bientôt que la tâche de s’occuper de l’octroi des bourses, ce qu’il fait avec une grande application.
Antoine François de Fourcroy [3]Il avait été fait comte de l’Empire le 26 avril 1806, écarté en 1808 de la grande maîtrise de l’Université impériale nouvellement instituée au profit du conservateur Louis de Fontanes, se retire avec amertume de la vie publique, tombe malade à la fin de 1809, et s’éteint le 16 décembre, à l’âge de 54 ans.
References[+]