1er juin 1815 – La mort de Berthier

Hans-Karl Weiss

(Traduction : R. Ouvrard)

« Il prit le parti de se retirer à Bamberg, et sa mort même n’a pas trouvé grâce devant l’esprit de parti pour une résolution aussi loyale. On a prétendu que le suicide qui termina ses jours n’aurait été qu’un dernier acte du vertige que décelait, dans les derniers temps, son état mental. Mais, ne serait-il pas plus juste de dire qu’après avoir cédé une première fois à l’empire des circonstances en sacrifiant à ses devoirs politiques les engagements de l’affection et de la reconnaissance, Berthier ne voulut pas dévorer, comme tant d’autres, l’humiliation d’un nouveau parjure, en répudiant la foi jurée à la Charte de 1814, qui garantissait l’indépendance et la liberté de la France. » (Encyclopédie des gens du monde – Paris, Treuttel et Würtz, 1831-1844, 22 vol. in-8°.)


Au commencement de mes recherches, je me suis posé les questions suivantes:

  • Berthier voulait-il revenir en France, afin d’aider Napoléon durant la campagne à venir ?
  • A-t-il été empêché de revenir en France ?
  • Que s’est-il passé le 1er juin 1815 à Bamberg ?

Je me suis servi des documents des Archives de la ville de Bamberg, de qualités diverses : articles de journaux, le manuscrit d’une pièce de théâtre, une série d’articles parus dans le journal „Das Bayerland“, ainsi que des documents manuscrits, malheureusement difficilement exploitables. Rien de bien sensationnel de sorte que ce qui suit doit être plutôt considéré comme une mise au point.

Le maréchal Berthier
Le maréchal Berthier

Le 9 mars 1808, à Paris, Berthier (probablement à la demande de Napoléon) épousait la duchesse  Maria Elizabeth (ou Elisabetha) Franziska en Bavière (de Palatinat – de Deux Ponts – de Birkenfeld), fille du duc Wilhelm en Bavière et nièce du roi de Bavière. La duchesse était alors âgée de 23 ans [1]Elle était née le 5 mai 1784 à Landshut, et décèdera le 1er juin 1849 à Grosbois, [2]Ce que l’on pense être l’unique portrait de la duchesse figure en noir et blanc dans „Das Bayernland“, 13e année, 1902, p. 408, et présente la duchesse sous les traits d’une très jeune … Continue reading, Berthier étant donc de 30 ans son aîné [3]Berthier étai né le 20 novembre 1753 à Versailles.

Comme on le sait, il était malheureusement éperdument amoureux d’une femme mariée de Milan, la marquise Visconti. Durant la campagne d’Égypte, il avait même fait dresser un autel orné du portrait de sa belle, mais il ne l’avait jamais épousée. Lorsque la Visconti était devenue veuve, Berthier était déjà marié : Napoléon avait eu dans cette affaire matrimoniale plus d’influence que la Visconti ! [4]Voir un portrait de la Visconti dans La Revue Napoléon, mai 2004, N°. 18, p. 34), Berthier aura de son épouse 3 enfants : un fils et deux filles.

Comme on le sait, le 1er mars 1815, Napoléon débarque à Golfe Juan, et les évènements, dès lors, s’enchaînent. Berthier, comme la plupart de ses collègues s’était rallié aux Bourbons, ce que l’on n’aurait pas attendu de l’un des collaborateurs les plus intimes de Napoléon.

Berthier suit Louis XVIII jusqu’à Ostende, où il prend congé du roi, afin de rejoindre sa famille, qui se trouve déjà sur la route de Bamberg, où le duc Wilhelm, le père de Maria Elisabetha, habite dans une des ailes de la „Neuen Residenz“ [5]Le 6 octobre 1806, Napoléon y avait signé la déclaration de guerre à la Prusse. On y montre encore la table où l’Empereur pris place.. Le 29 mars (mais Jakubaß donne le 30 [6]Voir les sources en annexe Berthier arrive à Bamberg, dix jours après son épouse, qui y était arrivée, avec leurs enfants et une suite de 10 serviteurs.

La Résidence
La Résidence

Le 2 avril, Berthier demande de nouveaux ses passeports, afin de retourner en France, et s’occuper de ses biens.

Cette demande, à peine être arrivé à Bamberg, suscite évidemment la question de savoir pourquoi Berthier, voulait déjà repartir ? Voulait-il rejoindre Napoléon ? Napoléon l’avait-il, comme le prétend Thiers, contacté ?

Le 13 avril 1815, le roi de Bavière, Max Joseph refuse à Berthier ses passeports, et, un jour plus tard, le baron Montgelas donne l’instruction au chef de la police de Bamberg, Schauer, de surveiller Berthier et d’empêcher son départ.

Maximilien Joseph de Montgelas
Maximilien Joseph de Montgelas

„(…) par tous les moyens disponibles, de surveiller le prince de Wagram et d’essayer de connaître, secrètement, et sans que personne n’en soit informé, tous les déplacements qui pourraient indiquer un départ“[7]Jakubaß – p. 10

Le président de la police se met au travail, le maître de poste de Bamberg et ses proches collaborateurs sont instruits de ne pas donner de chevaux sans son autorisation, et cinq personnes espionnent Berthier en permanence.

Le 18 avril, Berthier écrit de nouveau au roi de Bavière, demandant des passeports pour sa femme et ses enfants, pour qu’elle puisse représenter ses intérêts en France.

Ces passeports sont préparés et le 30 avril, à trois heures et demie, l’épouse de Berthier et ses enfants quittent Bamberg et, empruntant la route prescrite, se dirigent, par la Suisse, vers la France.

Schauer a même pris la précaution de former un piquet d’alarme de trois chevau-légers, pour pouvoir, si cela s’avère nécessaire, intervenir rapidement.  (au cas où Berthier saisirait cet instant favorable) et, à Forcheim, la voiture de la famille Berthier est encore contrôlée.  A Stockach, la voiture est arrêtée par le général prince Hohenzollern : les passeports n’ont pas été signés par le prince Schwarzenberg, et l’on doit retourner à Bamberg.

Maximilien Ier de Bavière peint par Joseph Stieler
Maximilien Ier de Bavière peint par Joseph Stieler

Le 1er mai, Berthier écrit de nouveau au roi Max pour protester et le roi charge, le 5 mai, le général-lieutenant von Rechberg, de présenter, dès son arrivée au quartier général, les passeports à Schwarzenberg.

Dès le 24 mai, les premiers régiments russes prennent leurs quartiers dans les environs de Bamberg, Barclay de Tolly réside à Memmelsdorf [8]Village situé non loin de Bamberg, possédant un château – le „Seehof », la 12e division se dirige sur Eltmann.

Le 31 mai 1815, le duc Guillaume en Bavière, le beau-père de Berthier, donne un dîner en l’honneur des „hôtes“ russes, auquel Berthier prend également part.  Le général Osten von Sacken félicite Berthier, selon lui l’un des rares généraux français à être resté fidèle au roi, ce qui semble l’embarrasser

Le 1er juin, Berthier observe, des étages supérieurs de la Résidence, le passage de la division de cavalerie Korff.

Le 1er juin 1815, le directeur de la police informe le ministre Schauer:

„A 1 heure et demie de l’après-midi, le prince de Wagram est tombé du troisième étage de la résidence, sur le pavé de la Ludwigstrasse [9]Aujourd’hui la Résidenzstrasse, et s’est brisé le crâne. Informé par une personne de confiance qui se trouvait sur place, j’ai fait transporter le corps sans vie dans la chapelle située à côté de la maison paroissiale du 4e arrondissement [10]Vraisemblablement l’actuelle Elisabethenkirche, conformément aux souhaits des ducs en Bavière.  D’après toutes les suppositions, il voulait observer, de la fenêtre, ses enfants, qui venaient juste de partir pour voir le passage d’une brigade de dragons russes, lorsque, pris de vertige, il tomba.  Durant sa chute on put encore l’entendre crier à l’aide ; son cerveau a jailli à une hauteur de six pieds et éclaboussa le mur. [11]Gottfried von Böhm, das Ende Berthier, in das Bayerland, p. 393

Plaque commémorative
Plaque commémorative

Le même jour, il informe la cour d’appel :

« A une heure de l’après-midi le prince de Wagram a fait une chute depuis une fenêtre du troisième étage du château royal, et est tombé dans la Ludwigstrasse, se brisant le crâne. J’ai fait transporter la dépouille dans la chapelle de la maison paroissiale du 4e arrondissement »[12]] Jakubaß, p. 16

La gouvernante ou préceptrice est la seule personne à avoir vu Berthier avant sa chute :

« Interrogée, la gouvernante des enfants princiers, Madame Gallien a donné les informations suivantes sur les dernières heures  et la chute fatale du prince. Ce dernier, durant la matinée du 1er juin, était allé de nombreuses fois à la fenêtre et avait observé, à l’aide d’une lunette d’approche les troupes russes. Entre une heure et une heure et demie il est apparu dans la chambre de ses enfants et a donné l’ordre à Madame Gallien de se hâter vers sa voiture déjà prête. Comme elle voulait mettre les gants aux enfants, Berthier réitéra son ordre.   De derrière la porte, elle put encore l’entendre monté sur un fauteuil qui se trouvait près de la fenêtre et s’écrier à plusieurs reprises : Ma pauvre Patrie ! C’est alors qu’elle entendit le siège tomber, , qu’elle retourna en hâte dans la pièce et pu se rendre compte de la malheureuse chute. »[13]Böhm, p. 399.

La gouvernante Gallien est donc la dernière à avoir vu Berthier, et Jakubaß cite sa déclaration :

„Le 1er juin, le prince de Wagram se trouvait dans la chambre de son épouse, puis se rendit, entre midi et une heure, dans celle des enfants princiers, à l’étage supérieur de la Résidence, se renseigna sur la conduite du prince et de la princesse. D’après les dires du témoin, il se plaignit de vertiges, que sa langue était encore jaune, se déplaça de long en large dans la pièce, plongé dans ses pensées. Se rongeait les ongles, remarqua les troupes russes qui passaient devant la fenêtre, se plaignit que le défilé ne cessait pas, soupirant : Pauvre France, que va-t-il t’arriver, et je suis là, s’éloigna de la fenêtre, demanda à Gallien quand elle devait partir avec les enfants, car la voiture était prête à partir. A la réponse de Gallien qu’elle ne pourrait le faire qu’après qu’il se soit éloigné, le prince celui-ci rentra dans le bureau. Gallien entendit encore la porte s’ouvrir, où le…….  se trouvait, entendit un fracas, pensa aussitôt qu’il était arrivé quelque chose au prince, une fois dans la chambre elle n’aperçut plus le prince, remarquant seulement que , que le siège entre la commode et la fenêtre tremblait encore. C’est au moment ou Gallien avait entendu le fracas du siège que le malheur était arrivé » [14]Jakubaß, p. 17

Vue de la fenêtre d'où Berthier est tombé
Vue de la fenêtre d’où Berthier est tombé

Je n’ai toutefois pas pu vérifier si cette citation est correcte. Aux archives municipales de Bamberg se trouvent, dans le carton H.V. Reg. 3 Nr. 1111 Berthiers Tod – Blücher (1811 – 1820) deux notes manuscrites et des lettres, dont l’une porte le titre : Mort de Berthier

„La gouvernante a déclaré : le prince, peut avant …(ici un mot en allemand difficile à comprendre), était venu la voir dans la chambre des enfants princiers et avait demandé comment les… (à partir de là, je n’ai rien pu déchiffrer – et l’utilisation d’un appareil digital était malheureusement interdite)

Dans un article du Journal „Bamberger Volksblatte“, du mercredi 14 décembre 1938, on trouve les questions que nous nous sommes nous-mêmes posées : Pourquoi le maréchal Berthier est-il tombé  de la Résidence ?  Une lectrice se présenta pour apporter des compléments d’information, qui furent publiés dans le journal, le 18 décembre 1938.

„En particulier, sur ce sujet, la veuve du Conseiller Peter Fleischmann nous a informé, que le père de son mari, mort 10 ans auparavant, , l’instituteur Fleischmann avait été le témoin de l’accident, alors qu’il avait à faire à Bamberg (son employeur se trouvait dans la Fränkischen Schweiz ». Berthier tomba sous les yeux de Fleischmann. De son récit elle se rappelait parfaitement qu’il avait ramassé un morceau de calotte crânienne de Berthier, qui avait été projetée au loin (…) »

Tels sont les témoignages – dont aucun cependant n’a vu de ses yeux la chute de puis la fenêtre.  Le fils de Berthier n’était pas plus dans la pièce que les 5 ou 6 hommes masqués, pas plus qu’il n’y a d’homme déguisé en officier russe, qui apparaissent toujours dans la littérature, comme par exemple, malheureusement, dans le Six :

« se tua à Bamberg (Bavière) en tombant d’une fenêtre du palais soit par suicide, soit, comme certains le pensent, précipité par six hommes masqués qui s’étaient introduits dans sa chambre, 1er juin 1815, »[15]Six, S. 87

De tels contes apparaissent également dans la Grande Encyclopédie.

Alors, s’agit-il d’un accident – ou d’un suicide ?  Question difficile à répondre et qui a ses partisans des deux bords. Berthier, cela est vrai, était sujet, les jours précédents, à une atteinte dépressive, en tous les cas les évènements en France, ce qu’il voyait à Bamberg, le voyage en France avorté de sa famille, l’avaient  fortement déprimé – sans toutefois lui faire perdre la raison.

„Les dernières lettres que Berthier avaient envoyées à Gand et au roi Maximilien-Joseph, ne laissent paraître aucun signe de troubles mentaux, et son médecin traitant n’avait rien remarqué de tel. Le docteur Ziegler rapporta seulement que, durant les 14 jours précédent sa fin, il avait souffert de douleurs d’estomac et de la goutte, et s’était souvent plaint de vertiges ». [16]Böhm, p. 402

Un certain nombre d’officiers russes furent présent lors de l’autopsie, le 2 juin 1815.

« D’après les dires du docteur Pfeufers, mis à part les os de la base du crâne, pratiquement aucun débris de la tête n’ont pu être ensevelis dans la tombe, car la plupart des personnes présentes ont dérobé des cheveux ou des morceaux d’os de la dépouille princière » [17]Böhm, pp. 399-400

Le 5 juin eurent lieu les obsèques solennelles de Berthier, dans la cathédrale de Bamberg, puis, un peu plus tard, son transfert au couvent des Bénédictins de Banz. Plus tard, on le sait, la dépouille de Berthier fut inhumée, dans un sarcophage de bronze, dans la crypte du domaine des Wittelsbach de Tegernsee, où on peut encore de nos jours le voir[18]Le tombeau se trouve dans la crypte des Wittelsbach, église paroissiale Sankt-Quirinus. La visite est possible, sur demande préalable.  Les parents d’Élisabeth de Bavière reposent également … Continue reading . Il semblerait qu’un ancien directeur des Archives de Bamberg ait obtenu l’autorisation de photographier, mais j’ignore si cette photo existe encore.

Peu après sa mort, on supposa le suicide – une note écrite au crayon sur le rapport de Schauer indique : « il en résulte que le prince de Wagram a mis lui-même fin à sa vie » [19]Böhm, p. 400

Il fut également supposé que Berthier se serait jeté par la fenêtre, de désespoir de ne pouvoir rejoindre Napoléon.

Tous ces bruits amenèrent le beau-père de Berthier à écrire, le 16 juin 1815, une lettre à Montgelas, en français, dans laquelle il écrit notamment :

„Veuillez recevoir de mon côté, Monsieur le Comte, sur mon honneur, l’assurance que je suis certain que le prince de Wagram n’avait, directement ou indirectement, aucun contact avec Napoléon et ses partisans, et qu’il n’avait d’autre but que de vivre retiré et au sein de sa famille. »  [20]Böhm, p. 400

On ne put rien trouver dans les papiers de Berthier, et une lettre scellée fut envoyée, non ouverte, à Munich, mais celle-ci ne concernait elle aussi que des affaires privées de Berthier et fut retournée à la famille.

On le sait, Berthier avait pris la fuite avec le roi de France, et s’était dirigé vers Bamberg, et non Paris, comme cela aurait pu être tout à fait possible.

Napoléon avait rayé Berthier de la liste des maréchaux. Berthier écrivit plusieurs fois à Louis XVIII, le priant d’accepter sa démission, car il n’était plus en mesure de le servir encore, compte tenu de sa mauvaise constitution.

Louis XVIII ayant ordonné à Berthier, le 12 mai, de le rejoindre sans délai,  celui-ci répond, le 22 mai, en réitérant sa demande de démission.

La thèse de Thiers selon laquelle Napoléon serait entré en contact avec Berthier et qu’il l’aurait appelé près de lui, se heurte à tous les documents, et Thiers ne donne pas ses sources.

Pour ma part, je tiens l’accident comme le plus vraisemblable, car les Russes étaient arrivés quelques jours auparavant à Bamberg et dans les environs : pourquoi aurait-il été sujet à une telle dépression, qui l’amène à se jeter par une fenêtre.

Qu’il ait poussé le siège – ou quoique ce soit – devant la fenêtre, personne ne peut le préciser ; il aurait tout aussi bien pu l’écarter pour mieux se pencher et l’avoir repoussé avec ses jambes au moment de sa chute.

Très certainement Schauer a essayé d’empêcher Berthier de partir pour la France, mais celui-ci n’a apparemment jamais eu l’idée d’une fuite secrète, au contraire, tous ses souhaits tendaient vers un poste officiel. Une liaison avec Napoléon me semble également invraisemblable.

Ce que l’on peut lire dans le célèbre Dictionnaire Napoléon, me semble hautement douteux et basé seulement sur des spéculations

« (…) pour l’empêcher de se rallier à l’Empereur, les Alliés le retiennent prisonnier. » [21]Gambiez, in Dictionnaire Napoléon, p. 212

Berthier n’avait aucunement le projet le projet de rejoindre Napoléon, cette possibilité existait déjà à Ostende : au lieu de rejoindre Bamberg Berthier aurait pu aller à Paris.  Et dans ses archives personnelles à Bamberg ne se trouve aucun indice d’une communication avec Napoléon.

De même, les Alliés ne retinrent pas Berthier prisonnier, le roi de Bavière refusa les passeports et Montgelas le mis sous la surveillance, afin d’empêcher le voyage, d’un président de police de province, ce n’était pas vraiment une surveillance ou une détention, le mot « prisonnier » est donc ici tout à fait trompeur.

 » C’est dans ce contexte qu’il trouve la mort, le 1er juin 1815, en tombant d’une fenêtre située au troisième étage du château de Bamberg. S’agit-il d’un crime, d’un accident ou d’un suicide ? » [22]Gambiez, Dictionnaire, S. 212 

Il ne peut absolument pas s’agir d’un crime, ce ne sont que des spéculations hasardeuses et il aurait été souhaitable que Gambiez, à ce sujet, prenne la peine de les mettre de côté.  Schauer n’aurait sûrement pas gardé pour lui un tel évènement et aurait transmis l’information.

« Pour cette dernière hypothèse (suicide, ndlr),  s’il n’y a pas de preuves, il existe tout au moins de fortes présomptions ; d’abord l’état dépressif du maréchal depuis le retour de l’Empereur. » [23]Gambiez, S. 212 / 213

Sur quoi Gambiez base-t-il cette supposition ? Il est sûr que Berthier n’était pas en bonne condition physique et mentale, mais le médecin traitant de Bamberg, le docteur Ziegler, n’a pas formulé de diagnostic d’aliénation. Berthier était plein d’activité, comme ses lettres à différentes personnes le montrent, il faisait des promenades dans Bamberg, autant de signes qui plaident contre une dépression profonde.

Par ailleurs, Gambiez donne 1,07 m comme hauteur du mur de la fenêtre.

Le lecteur est toutefois fortement encouragé à accepter le suicide, mais d’après les sources indiquées, il apparaît qu’on ne peut tirer à ce sujet aucune conclusion. Le seul élément certain est le témoin qui apparemment aurait entendu des appels au secours au moment de la chute de Berthier, mais là aussi il n’existe aucune preuve certaine.

Il existe sûrement encore des recherches à faire, une visite privée de la Résidence de Bamberg, en mesurant, si possible, la hauteur de la fenêtre, et en vérifiant ce que l’on peut voir de celle-ci, pourquoi Berthier choisit-t-il, justement, cette fenêtre, où bien est-ce le fait du hasard, Berthier ayant observé les troupes d’un autre endroit, pour continuer ensuite son observation depuis la chambre des enfants.

Où passaient les troupes, par la Sandstrasse, comme certains le pensent ? L’actuelle Residenzstrasse passe directement sous la fenêtre, il n’y a eu là certainement aucun mouvement de troupes, sinon Berthier serait tombé sur elles, et il y aurait eu des témoins russes.

La Sandstrasse se trouve un peu plus bas que la Résidence, environ à 75 m en vol d’oiseau, est en fait très étroite et bordée de maisons – de sorte qu’on ne peut absolument rien voir de la fenêtre.

Le livre de Leitschuh, Alexandre Berthier (Bamberg, Hübscher, 1887) semble basé sur des sources de grande qualité.

Il faut également signaler un autre livre sur ce thème : Stich Michael, Marshall Berthier und sein Ende, (Münich, 1908)

HKW, Bamberg, 18.11. 2005

 

Sources

Archives de Bamberg

B.S. 485, Berthier, Marschall Fürst von Wagram

Un carton des Archives de Bamberg, avec diverses collections sur ce thème, comme des extraits de journaux, des articles, dont on a utilisé :

Jakubaß, Franz. H : Der Marschall und der Polizeidirektor – Der Fenstersturz zu Bamberg, Manuskript zu einen Hörspiel, Sendezeit, 22. Juni 2003

Jakubaß s’est profondément intéressé à ce sujet (comme ses sources le montrent, parmi lesquelles les archives Wittelsbach dans les Archives Secrètes de la Maison Wittelsbach) et donne aussi des témoignages (malheureusement sans donner ses sources)

Articles de Journaux :

Bamberger Volksblatt, Dezember 1938, Mittwoch den 14. Dezember 1938. Fragen, die uns gestellt werden – Warum stürzte sich Marschall Berthier aus der Neuen Residenz?

Bamberger Volksblatt, Dezember 1938, Freitag den 18. Dezember 1938, Die Erörterung über den Tod des Marschalls Berthier

Archives de la Société d’Histoire de Bamberg, Reg. 3, Nr 1111

Un carton contenant notamment deux notes manuscrites de l’époque napoléonienne, une sur Berthier et la déposition de la bonne d’enfants des Berthier, des écrits de l’époque, mais en vieille écriture, pour moi illisible, et dont le déchiffrement serait sans doute très utile.

Dans le carton se trouvent également d’autres documents de l’époque napoléonienne, comme un sur les Volontaires que Bamberg leva en 1813 contre Napoléon.

 

Böhm, Gottfried von : Das Ende des Marschalls Berthier, eine Serie von Artikel in : Das Bayerland, 13. Jahrgang 1902, Nr. 31, S. 364 f.; Nr. 32, S. 375 f.; Nr. 33, s. 392 f., Nr. 34, S. 399 f; und S. 408 mit dem Portrait von Berthiers Frau.

Böhm s’appuie fortement sur le livre de Leitschuh, l’un des directeurs des Archives d’État de Bamberg, livre qu’il me faut sûrement lire, car il apparaît riche en témoignages.

Dans la série des articles se trouve également une représentation, peu connue, de la chute, malheureusement, une fois de plus, il ne m’a pas été permis de la photographier. Peut-être serait-il possible qu’une bibliothèque universitaire emprunte le journal et fasse cette photographie.

 

Autres sources.

Gambiez, Général : Berthier, in Dictionnaire Napoléon, Tulard (Éditeur), 2 vol. Paris 1999, (1. vol. A – H) pp. 210-213.

Lalliard, François : Qui était le Maréchal Berthier ? La Revue Napoléon, Nr. 18, Mai 2004, p. 31 f. (jolis portraits)

Six, Georges : Dictionnaire Biographique des Généraux & Amiraux Français de la Révolution et de l’Empire (1792 – 1814) Paris 1934, 2  Vol., Nouvelle édition Paris 1999, 1. Vol. A – J, pp 87-88

 

References

References
1Elle était née le 5 mai 1784 à Landshut, et décèdera le 1er juin 1849 à Grosbois
2Ce que l’on pense être l’unique portrait de la duchesse figure en noir et blanc dans „Das Bayernland“, 13e année, 1902, p. 408, et présente la duchesse sous les traits d’une très jeune femme.
3Berthier étai né le 20 novembre 1753 à Versailles.
4Voir un portrait de la Visconti dans La Revue Napoléon, mai 2004, N°. 18, p. 34)
5Le 6 octobre 1806, Napoléon y avait signé la déclaration de guerre à la Prusse. On y montre encore la table où l’Empereur pris place.
6Voir les sources en annexe
7Jakubaß – p. 10
8Village situé non loin de Bamberg, possédant un château – le „Seehof »
9Aujourd’hui la Résidenzstrasse
10Vraisemblablement l’actuelle Elisabethenkirche
11Gottfried von Böhm, das Ende Berthier, in das Bayerland, p. 393
12] Jakubaß, p. 16
13Böhm, p. 399.
14Jakubaß, p. 17
15Six, S. 87
16Böhm, p. 402
17Böhm, pp. 399-400
18Le tombeau se trouve dans la crypte des Wittelsbach, église paroissiale Sankt-Quirinus. La visite est possible, sur demande préalable.  Les parents d’Élisabeth de Bavière reposent également dans la crypte.
19, 20Böhm, p. 400
21Gambiez, in Dictionnaire Napoléon, p. 212
22Gambiez, Dictionnaire, S. 212
23Gambiez, S. 212 / 213