1813 – Trente-et-Unième Bulletin de la Grande Armée
Dresde, 26 septembre 1813
L’empereur a passé les journées du 19 et du 20 à Pirna, S. M. y a fait jeter un pont, et établir une tête de pont sur la rive droite.
Le 21, l’empereur est venu coucher à Dresde, et le 22, il s’est porté à Hartau: il a sur-le-champ fait déboucher au-delà de la forêt de Bischofswerda, le onzième corps, commandé par le duc de Tarente, le cinquième corps, commandé par le général Lauriston, et le troisième corps, commandé par le général Souham.

L’armée ennemie de Silésie qui s’était portée, la droite, commandée par Sacken, sur Kamenz, la gauche, commandée par Langeron, sur Neustadt aux débouchés de Bohême, et le centre, commandé par Yorck, sur Bischofswerda, se mit sur le champ en retraite de tous côtés. Le général Gérard, commandant notre avant-garde, la poussa vivement, et lui fit quelques prisonniers. L’ennemi fut mené battant jusqu’à la Sprée. Le général Lauriston entra dans Neustadt.
L’ennemi refusant ainsi la bataille, l’empereur est revenu le 24 à Dresde, et a ordonné au duc de Tarente de prendre position sur les hauteurs de Weissig.
Le huitième corps, commandé par le prince Poniatowski, a repassé sur la rive gauche.
Le comte de Lobau, avec le premier corps, occupe toujours Gushabel.
Le maréchal Saint-Cyr occupe Pirna et la position de Borna.
Le duc de Bellune occupe la position de Freyberg.
Le duc de Raguse, avec le sixième corps et la cavalerie du général Latour-Maubourg, était au-delà de Grossenhayn. Il avait repoussé l’ennemi sur la rive droite au-delà de Torgau, pour faciliter le passage d’un convoi de vingt mille quintaux de farine qui remontait l’Elbe sur des bateaux, et qui est arrivé à Dresde.
Le duc de Padoue est à Leipsick; le prince de la Moskwa entre Wittenberg et Torgau.

Le général comte Lefebvre-Desnouettes était, avec quatre mille chevaux, à la suite du transfuge Thielmann. Ce Thielmann est Saxon, et comblé des bienfaits du roi. Pour prix de tant de bienfaits, il s’est montré l’ennemi le plus irréconciliable de son roi et de son pays. A la tête de trois mille coureurs, partie Prussiens, partie cosaques et Autrichiens, il a pillé les haras du roi, levé partout des contributions à son profit, et traité ses compatriotes avec toute la haine d’un homme qui est tourmenté par le crime. Ce transfuge, décoré de l’uniforme de lieutenant-général russe, s’était porté à Naumburg, où il n’y avait ni commandant ni garnison, mais où il avait surpris trois à quatre cents malades. Cependant le général Lefebvre-Desnouettes l’avait rencontré à Freyburg le 19, lui avait repris les trois ou quatre cents malades que ce misérable avait arrachés de leurs lits pour s’en faire un trophée; lui avait fait quelques centaines de prisonniers, pris quelques bagages, et repris quelques voitures dont il s’était emparé. Thielmann s’était alors réfugié sur Zeitz, où le colonel Munsdorff, partisan autrichien qui parcourait le pays, s’était réuni à lui: le général comte Lefebvre-Desnouettes les a attaqués le 24, à Altenbourg, les a rejetés en Bohême, leur a tué beaucoup de monde, entre autres un prince de Hohenzollern et un colonel.
La marche de Thielmann avait apporté quelques retards dans les communications d’Erfurt et de Leipsick.
L’armée ennemie de Berlin paraissait faire des préparatifs pour jeter un pont à Dessau.
Le prince de Neufchâtel est malade d’une fièvre bilieuse; il garde le lit depuis plusieurs jours.
S. M. ne s’est jamais mieux portée.