ONZIÈME BULLETIN.

Ebersdorf, le 24 mai 1809.

Le maréchal duc de Dantzick est maître du Tyrol. Il est entré à Inspruck le 19 de ce mois. Le pays entier s’est soumis. Le 11, le duc de Dantzick avait enlevé la forte position de Strub-Pass, et pris à l’ennemi sept canons et six cents hommes, Le 13, après avoir battu Chasteller dans la position de Voergel, l’avoir mis dans une déroute complète, et lui avoir pris toute son artillerie, il l’avait poursuivi jusqu’au-delà de Ratteuberg. Ce misérable n’a dû son salut qu’à la vitesse de son cheval. En même temps le général Deroy ayant débloqué la forteresse de Kufstein, faisait sa jonction avec les troupes que le duc de Dantzick commandait en personne. Ce maréchal se loue de la conduite du major Palm, du chef du bataillon léger bavarois, du lieutenant-colonel Habermann, du capitaine Haider, du capitaine Bernard, du 3e régiment des clievau-légers de Bavière, de ses aides-de-camp Montmarie, Maingarnaud et Montélegir, et du chef d’escadron Fontange, officier d’état-major. Chasteller était entré dans le Tyrol avec une poignée de mauvais sujets. Il a prêché la révolte, le pillage et l’assassinat. Il a vu égorger sous ses yeux plusieurs milliers de Bavarois, et une centaine de soldats français. Il a encouragé les assassins par ses éloges et excité la férocité de ces ours des montagnes. Parmi les Français qui ont péri dans ce massacre, se trouvait une soixantaine de Belges, tous compatriotes de Chasteller. Ce misérable couvert des bienfaits de l’Empereur, à qui il doit d’avoir recouvré des biens montant à plusieurs millions, était incapable d’éprouver le sentiment de la reconnaissance, et ces affections qui attachent même les barbares aux habitants du pays qui leur a donné naissance. Les Tyroliens vouent à l’exécration les hommes dont les perfides insinuations les ont excités à la rébellion et ont appelé sur eux les malheurs qu’elle entraîne avec elle. Leur fureur contre Chasteller était telle, que lorsqu’il se sauva après la déroute de Voergel, ils l’arrêtèrent à Hall, le fustigèrent et le maltraitèrent au point qu’il fut obligé de passer deux jours dans son lit. Il osa ensuite reparaître pour demander à capituler. On lui répondit qu’on ne capitulait pas avec un brigand, et il s’enfuit en toute hâte dans les montagnes de la Carinthie. La vallée de Zillerthal a été la première à se soumettre ; elle a remis ses armes et donné des otages. Le reste du pays a suivi cet exemple. Tous les chefs ont ordonné aux paysans de rentrer chez eux, et on les a vus quitter les montagnes de toutes parts, et revenir dans leurs villages. La ville d’Inspruck et tous les cercles ont envoyé des députations à S.M. le roi de Bavière, protester de leur fidélité et implorer sa clémence. Le Voralberg, que les proclamations incendiaires et les intrigues de l’ennemi avaient aussi égaré, imitera le Tyrol, et cette partie de l’Allemagne sera arrachée aux désastres et aux crimes des insurrections populaires.

Combat de Urfar.

Le 17 de ce mois, à deux-heures après midi, trois colonnes autrichiennes, commandées par les généraux Grainville, Bucalowitz et Sommariva, et soutenues par une réserve aux ordres du Général Jellachich, ont attaqué le général Vandamme, au village de Urfar, en avant de la tête du pont de Lintz. Dans le même moment arrivait à Lintz le maréchal prince de Ponte-Corvo, avec la cavalerie et la première brigade d’infanterie saxonne. Le général Vandamme, à la tête des troupes wirtembourgeoises, et avec quatre escadrons de hussards et de dragons saxons, repoussa vigoureusement les deux premières colonnes ennemies, les chassa de leurs positions, leur prit 6 pièces de canon et 400 hommes, et les mit dans une pleine déroute. La troisième colonne ennemie parut sur les hauteurs de Boslingberg, à sept heures du soir, et son infanterie couronna en un instant la crête des montagnes voisines. L’infaterie saxonne attaqua l’ennemi avec impétuosité, le chassa de toutes ses positions, lui prit 300 hommes et plusieurs caissons de munitions. L’ennemi s’est retiré en désordre sur Freystadt et sur Haslac. Les hussards envoyés à sa poursuite, ont ramené beaucoup de prisonniers. On a pris dans les bois 500 fusils et une quantité de voitures et de caissons chargés d’effets d’habillement. La perte de l’ennemi, indépendamment des prisonniers, est de 2,000 hommes tués ou blessés. La nôtre ne va pas à 400 hommes hors de combat. Le maréchal prince de Ponte-Corvo fait beaucoup d’éloges du général Vandamrne. Il se loue de la conduite de M. de Leschwitz, général en chef des Saxons, qui conserve à soixante-cinq ans, l’activité et l’ardeur d’un jeune homme ; du général d’artillerie Mossel ; du général Gérard, chef d’état-major, et du lieutenant-colonel aide-de-camp Hamelinaie.

ARMÉE D’ITALIE.

Le vice-roi commandant en chef, informe le ministre de la guerre de la suite des opérations de l’armée d’Italie. Selon le rapport des prisonniers, la perte que l’ennemi a éprouvée à la bataille de la Piave, s’élève à 10,000 hommes. Le feld-maréchal- lieutenant Wauxall est au nombre des morts : l’un des deux généraux Giulay a été blessé mortellement. Après la bataille de la Piave, l’ennemi, vivement poursuivi, a été atteint à Sacile au moment où il cherchait à établir des redoutes pour gagner du temps ; il a été attaqué et mis en fuite, et on lui a fait quelques centaines de prisonniers. Le lendemain 10, la poursuite a continué, et l’avant-garde a ramené un grand nombre de prisonniers : deux bataillons du 23e d’infanterie légère, qui avaient été dirigés sur Brugniera, ont atteint la queue d’une colonne ennemie, et lui ont pris 500 hommes et une pièce de canon. Le 11, toute l’armée a passé le Tagliamento : elle a joint l’armée autrichienne vers trois heures de l’après-midi à Saint-Daniel. Le général Giulay occupait les hauteurs avec plusieurs régiments d’infanterie, plusieurs escadrons de cavalerie et cinq pièces d’artillerie. L’archiduc Jean s’y trouvait de sa personne, et avait ordonné de tenir jusqu’à la dernière extrémité, pour donner le temps au reste de l’armée de défiler dans la longue vallée de la Fella. La position fut aussitôt attaquée : l’ennemi fut chassé de toutes les hauteurs et mis dans le plus grand-désordre, et à minuit notre avant-garde prit position sur la Ledra. L’ennemi a perdu dans le combat de Saint-Daniel 2 pièces de canon, 600 hommes tués ou blessés ; le drapeau et 1,500 hommes du régiment de Rieski ont été pris. Nous avons eu 200 hommes tués ou blessés. Le 12, le général Grouchy a chassé l’ennemi jusqu’au-delà de l’Isonzo, lui a fait 800 prisonniers, et a pris à Udine tous ses magasins, ses pontons et beaucoup de voitures d’équipages. Le même jour, le colonel Giflenga, à la tête d’un escadron du 6e de hussards et d’un escadron des dragons de la reine, a joint une colonne qui se retirait à Gemona. Il a aussitôt chargé et culbuté l’ennemi, auquel il a pris 800 hommes, dont 8 officiers, et un drapeau du régiment de François Jellachich. La poursuite continue avec la même activité.