DIX-NEUVIÈME BULLETIN.

 

Vienne, le 16 juin 1809.

L’anniversaire de la bataille de Marengo a été célébré par la victoire de Raab, que la droite de l’armée, commandée par le vice-roi, a remportée sur les corps réunis de l’archiduc Jean et de l’archiduc Palatin. Depuis la bataille de la Piave, le vice-roi a poursuivi l’archiduc Jean l’épée dans les reins. L’armée autrichienne espérait se cantonner aux sources de la Raab, entre Saint-Gothard et Cormond. Le 5 juin, le vice-roi partit de Neustadt, et porta son quartier-général à OEdenbourg, en Hongrie. Le 7, il continua son mouvement et arriva à Guns. Le général Lauriston, avec son corps d’observation, le rejoignit sur sa gauche. Le 8, le général Montbrun, avec sa division de cavalerie légère, força le passage de la Raabnitz, auprès de Sovenyhaga, culbuta trois-cents cavaliers de l’insurrection hongroise et les rejeta sur Raab. Le 9, le vice-roi se porta sur Sarvar. La cavalerie du général Grouchy rencontra l’arrière-garde ennemie à Vasvar, et fit quelques prisonniers. Le 10, le général Macdonald, venant. de Gratz, arriva à Cormond. Le 11, le général de division Grenier rencontra à Karako, une colonne de flanqueurs ennemis qui défendaient le pont, et passa la rivière de vive force. Le général Debroc, avec le 9e de hussards, a fait une belle charge sur un bataillon de 400 hommes dont 300 ont été faits prisonniers. Le 12, l’armée déboucha par le pont de Merse sur Papa. Le vice-roi aperçut d’une hauteur toute l’armée ennemie en bataille. Le général de division Montbrun, général de cavalerie et officier d’une grande espérance, déboucha dans la plaine, attaqua et culbuta la cavalerie ennemie, après avoir fait plusieurs manœuvres précises et vigoureuses. L’ennemi avait déjà commencé sa retraite. Le vice-roi passa la nuit à Papa. Le 13, à cinq heures du matin, l’armée se mit en marche pour se porter sur Raab. Notre cavalerie et la cavalerie autrichienne se montrèrent au village de Szanak. L’ennemi fut culbuté et on lui fit 400 prisonniers. L’archiduc Jean ayant fait sa jonction avec l’archiduc Palatin près de Raab, prit position sur de belles hauteurs, la droite appuyée à Raab, ville fortifiée, et la gauche couvrant le chemin de Comorn, autre place forte de la Hongrie. Le 14, à onze heures du matin, le vice-roi range son armée en bataille, et avec 35,000 hommes en attaque 50,000. L’ardeur de nos troupes est encore augmentée par le souvenir de la victoire mémorable qui a consacré cette journée. Tous les soldats poussent des cris de joie à la vue de l’armée ennemie, qui était sur trois lignes et composée de 20 à 25,000 hommes, restes de cette superbe armée d’Italie, qui naguères se croyait déjà maîtresse de toute l’Italie ; de 10,000 hommes commandés par le général Haddick, et formés des réserves des places fortes de Hongrie ; de 5 à 6,000 hommes composés des débris réunis du corps de Jellachich et des autres colonnes du Tyrol échappées aux mouvements de l’armée par les gorges de la Carinthie ; enfin, de 12 à 15,000 hommes de l’insurrection hongroise, cavalerie et infanterie. Le vice-roi plaça son armée, la cavalerie du général Montbrun, la brigade du général Colbert et la cavalerie du général Grouchy sur sa droite ; le corps du général Grenier, formant deux échelons, dont la division du général Seras formait l’échelon de droite, en avant ; une division italienne, commandée par le général Baraguay-d’Hilliers, formant le troisième échelon, et la division du général Puthod en réserve. Le général Lauriston avec son corps d’observation, soutenu par le général Sahuc, formait l’extrême gauche, et observait la place de Raab. A deux heures après-midi, la canonnade s’engagea. A trois heures, le premier, le second et le troisième échelons en vinrent aux mains. La fusillade devint vive ; la première ligne de l’ennemi fut culbutée, mais la seconde ligne arrêta un instant l’impétuosité de notre premier échelon, qui fut aussitôt renforcé, et la culbuta. Alors la réserve de l’ennemi se présenta. Le vice-roi, qui suivait tous les mouvements de l’ennemi, marcha, de son côté, avec sa réserve : la belle position des Autrichiens fut enlevée, et à quatre heures la victoire était décidée. L’ennemi en pleine déroute se serait difficilement rallié, si un défilé ne s’était opposé aux mouvements de notre cavalerie. 3000 hommes faits prisonniers, 6 pièces de canon et 4 drapeaux sont les trophées de cette journée. L’ennemi a laissé sur le champ de bataille 3000 morts, parmi lesquels on a trouvé un général-major. Notre perte s’est élevée à 900 hommes tués ou blessés. Au nombre des premiers se trouve le colonel Thierry, du 23e régiment d’infanterie légère, et parmi les derniers, le général de brigade Valenlin et le colonel Expert. Le vice-roi fait une mention particulière des généraux Grenier, Montbrun, Seras et Danthouars. La division italienne Sevaroli a montré beaucoup de précision et de sang-froid. Plusieurs généraux ont eu leurs chevaux tués ; quatre aides-de-camp du vice-roi ont été légèrement atteints. Ce prince a été constamment au milieu de la plus grande mêlee. L’artillerie commandée par le général Sorbier a soutenu sa réputation. Le champ de bataille de Raab avait été des longtemps reconnu par l’ennemi, car il annonçait fort à l’avance qu’il tiendrait dans cette belle position. Le 15 il a été vivement poursuivi sur la route de Comorn et de Pest. Les habitants du pays sont tranquilles, et ne prennent aucune part à la guerre. La proclamation de l’Empereur a mis de l’agitation dans les esprits. On sait que la nation hongroise a toujours désiré son indépendance. La partie de l’insurrection qui se trouve à l’armée avait déjà été levée par la dernière diète ; elle est sous les armes, et elle obéit.