1805 – DEUXIÈME BULLETIN DE L’ARMÈE D’ITALIE
Bulletin du 7 brumaire an 14[1].
Le général en chef a fait attaquer l’ennemi ce matin vers les cinq heures.
Pendant qu’à sa gauche la division du général Seras[2] passait l’Adige à Polo[3], & qu’à sa droite celle du général Verdier[4] manoeuvrait depuis Ronco[5] jusqu’à Albaro[6], les divisions des généraux Gardanne & Duhesme se déployant en avant du pont du vieux château de Véronne, attaquèrent les hauteurs du Val-Pantena[7]& tournèrent le château de San-Felice[8] ; profitant alors de leur position, le général en chef força les autrichiens à évacuer Véronnette[9]. Les palissades du pont neuf furent aussitôt abattues ; la division des chasseurs à cheval aux ordres du général Espagne[10], celle des grenadiers aux ordres du général Partouneaux[11], la réserve de cavalerie commandée par le général Monnet[12]& la division du général Molitor[13] traversèrent Véronnette & se portèrent sur la grande route de Saint-Michel[14], où les autrichiens nous opposèrent de l’infanterie & de la cavalerie protégées par plusieurs pièces de canon : il fut ordonné diverses charges de cavalerie qui furent vivement exécutées & que soutenaient les grenadiers de la division Molitor : dans l’une de ces charges, l’escadron des guides fit mettre bas les armes à 500 fantassins : l’ennemi a été culbuté, chassé du village de Saint-Michel & jusqu’au-delà de Saint-Martin[15]. Nous avons pris position à Vago[16].
Seize cents prisonniers et deux pièces de canon sont le résultat de la journée. Les autrichiens ont laissé beaucoup de monde sur le champ de bataille. Notre perte est de quelques hommes ; nous comptons à-peu-près cent blessés. L’armée va poursuivre ses avantages.
Les divisions, les différens corps ont manoeuvré avec précision, & le général en chef se loue de l’ardeur & de l’audace que les troupes ont montrées dans l’attaque : il leur a rendu auprès de S.M. l’Empereur & Roi, le témoignage qu’elles brûlent du désir d’imiter les exemples de la grande armée, & de mériter d’avoir part aux nobles récompenses que S.M. décerne à leur valeur.
NOTES
[1] Du 29 octobre 1805. In : Mémorial administratif du département de l’Ourte, n° 298 du 25 brumaire an XIV (16.11.1805), p. 166. Liège : J.F. Desoer, 1806. (Mémorial administratif du département de l’Ourte ; IX).
[2] Jean Mathieu Seras (1765-1815). Général (1801), comte de l’Empire (1809).
[3] Village sur l’Adige, au nord de Vérone, dans le coude du fleuve près du lac de Garde, et donc près du champ de bataille de Rivoli.
[4] Jean Antoine Verdier (1767-1839). Général (1796), comte de l’Empire (1808).
[5] Ronco all’Adige. Village en aval de Vérone, sur l’Adige, rive droite. Son opposé, sur la rive droite, est le village d’Arcole.
[6] Village sur l’Adige, rive droite, à quelques kilomètres au nord-ouest de Ronco.
[7] Vallée d’une petite rivière descendant de la montagne tridentine jusque Vérone, où elle se jette dans l’Adige.
[8] Petite fortification dans Vérone, rive gauche.
[9] Veronetta. C’est le quartier rive gauche de la ville de Vérone. A l’époque, partie autrichienne de la ville.
[10] Jean Louis Brigitte Espagne (1769-1809). Général (1799), comte de l’Empire (1809).
[11] Louis Partouneaux (1770-1835). Général (1799), comte (1816), député (1821-1830).
[12] Louis Claude Monnet de Lorbeau (1766-1819). Général (1799), baron sous la Restauration.
[13] Gabriel Jean Joseph Molitor (1770-1849). Général (1799), comte de l’Empire (1808), pair des Cent-Jours (1815), pair et maréchal de France (1823).
[14] San Michele, village à l’est de Véronette, sur la route de Vicence, avant San Martino.
[15] San Martino Buon Albergo. Village à l’est de Vérone, sur la route de Vicence, avant Vago.
[16] Vago. Village à l’est de San Martino et à l’ouest de Caldiero.