16 janvier 1809 – Bataille de La Corogne

La poursuite du général Moore et la bataille de La Corogne

Mémoires sur les opérations des Français, en Galice, en Portugal et dans la vallée du Tage en 1809 – Paris, 1821

 

Avant de partir, il (NDLR : Napoléon) confia la poursuite des ennemis au maréchal Soult, commandant le 2e corps, qu’il renforça des divisions de dragons La Houssaye [1] et Lorge [2], des 70e et 86e régiments de ligne qui composaient la division Delaborde [3], et des régiments de la division Loison [4], qui ve­nait d’être dissoute et étaient encore en arrière. Il le fit soutenir par le 6e corps sous les ordres du maréchal Ney, qui devait déférer à ses in­vitations. La cavalerie légère de ce maréchal, qui avait à sa tête le général Colbert [5], se trouvant engagée en avant, était déjà, par sa position mê­me, aux ordres du maréchal Soult.

Jean de Dieu Soult
Jean de Dieu Soult

La poursuite de l’ennemi ne fut ralentie ni par les revues passées à Astorga, ni par l’intempérie de la saison très rigoureuse dans les mon­tagnes qui allaient être le théâtre de la guerre, et qui tiennent à la chaîne des Pyrénées.

D’Astorga pour aller à Villafranca, indépendamment de la grande route nouvellement construite, il y a l’ancien chemin plus direct, mais montueux et mauvais.

En se retirant, les Anglais avaient choisi la première et laissé l’autre aux Espagnols.

Le 95then route vers La Corogne (courtoisie Andrew Hewitt)
Le 95th en route vers La Corogne (courtoisie Andrew Hewitt)

Le maréchal Soult fit suivre les Espagnols par le général Franceschi [6], avec ordre de les pousser et de ne les pas perdre de vue : il marcha lui-même avec le reste de ses troupes sur les traces des Anglais.

Quelque précipitée que fût leur retraite, le 3 janvier on atteignit leur arrière-garde à Cacabellos. Ce bourg forme un long défilé, terminé par le pont de la Qua, qui coule le long d’une colline qu’il faut monter. L’ennemi avait beau­coup de tirailleurs dans les vignes, et occupait en force le village de Prieros, situé à trois cents toises sur le plateau de la colline.

Auguste François-Marie de Colbert-Chabanais
Auguste François-Marie de Colbert-Chabanais

Le général Colbert qui commandait l’avant-garde, composée des 3e de hussards et 15e de chasseurs [7], fit charger ce qu’il voyait devant lui; mais cette attaque n’ayant point réussi, il fallut attendre l’infanterie.

La 1e division, commandée par le général Merle [8], marchait en tête : dès que le 4e d’infanterie légère eut traversé Cacabellos et passé le pont de la Qua, on le forma en colonnes d’attaque, et on marcha à l’ennemi. La colonne principale suivit la grande route, tandis qu’une autre co­lonne passa par les vignes pour tourner la po­sition.

Le général Colbert, entraîné par son courage, se plaça aux premiers rangs de cette infanterie, et fut frappé de mort [9]. Jeune encore, il jouissait, comme militaire, de la plus haute estime. Canova l’avait surnommé l’Antinoüs moderne : ses amis chérissaient en lui ces qualités du cœur qui commandent l’attachement, il fut vivement regretté

On enleva la position de Prieros, et les An­glais furent poursuivis jusque près de Villafranca. La nuit força de s’arrêter.

A Villafranca, l’ancienne et la nouvelle route de la Corogne se rejoignant, les Espagnols se trouvèrent de nouveau réunis aux Anglais : étant trop nombreux pour traverser ensemble le défilé de Villafranca, ils se divisèrent encore; les Espagnols suivirent le val d’Ores, et le général Moore fit prendre la même direction à quatre mille Anglais pour aller s’embarquer à Vigo.

Quant à lui, il continua sa retraite sur la Corogne. [10]